UN AUTRE TRAITEMENT AURAIT PU ETRE RESERVE AU DEPARTEMENT DE TIVAOUANE
Cheikh Tidjane Diouf, ancien député Rewmi de la 12e législature et ancien président du Conseil de Surveillance de l’Agence nationale des Eco villages (Anev), analyse, dans cet entretien, la situation politique nationale
Cheikh Tidjane Diouf, ancien député Rewmi de la 12e législature et ancien président du Conseil de Surveillance de l’Agence nationale des Eco villages (Anev), analyse, dans cet entretien, la situation politique nationale. Même s’il revendique son alliance avec le président de la République Macky Sall, le président du Mouvement Construire Tivaouane Durablement (Mctd) estime qu’un autre traitement aurait pu être réservé au département de Tivaouane lors du dernier remaniement.
On ne vous entend plus dans l'espace politique local. Est-ce une stratégie ou une volonté d'exprimer un certain mécontentement ?
La sagesse populaire nous enseigne que «quand tout le monde parle, se taire pour certains devient un impératif». Les populations nous attendent davantage dans des actions concrètes, utiles que dans des discours politiciens, creux, stériles et puériles, en déphasage avec leurs préoccupations. Il devrait plutôt s’agir de parler peu et d’agir beaucoup. C’est cela le temps de l'action. C'est dans cette dynamique que je me suis inscrit.
Un nouveau gouvernement d'ouverture a été récemment mis en place. Comment l’appréciez-vous ?
Un remaniement est un évènement ordinaire dans une République. C’est un acte de gestion, de management des ressources humaines. Le Président apprécie la situation politique et en fonction de ses objectifs, il fait usage de ses prérogatives constitutionnelles dans le but d’apporter les changements qu’il estime qualitatifs, pour le développement économique et social du pays. Les ministres dans un gouvernement, sont à l’image de joueurs de football dans une équipe. Il faut de temps à autre changer les hommes, réajuster le dispositif, pour apporter du sang neuf ou du tonus à l'équipe. Les ministres ne sont pas inamovibles et c’est le président de la République qui nomme à des fonctions civiles et militaires.
L'entrée de Rewmi, votre ancien parti, vous- a-t-elle surpris ?
Absolument pas ! En effet le président de la République a appelé au dialogue pour aboutir à un consensus autour du concept «Un Sénégal de tous et pour tous». Des partis ont répondu favorablement, et d'autres non. On va voir ce que cela va donner dans l’avenir.
Certains soupçonnent le Président Macky Sall de vouloir déblayer le terrain pour Idrissa Seck. Etes- vous de cet avis?
Je ne suis pas un génie de l'art divinatoire et je m’abstiens toujours de faire des élucubrations politiciennes, bien que ma formation et mon parcours politiques m'ont procuré un certain nombre d'outils et d’instruments, pour pouvoir faire une analyse objective et concrète d'une situation bien déterminée. La seule et unique certitude que je puis vous confirmer est que le pouvoir reste un attribut du Tout Puissant. C'est Dieu qui confère le (ou une portion de) pouvoir à qui il veut, assorti d’un échéancier précis. Le Sénégal étant une démocratie, la transmission du pouvoir se fait par le biais du suffrage universel.
Pensez-vous que le gouvernement actuel est capable de prendre réellement en charge les préoccupations actuelles des Sénégalais ?
Dans tous les cas, le gouvernement est tenu de s'y atteler et dans les meilleurs délais possibles ; «réew mi, fépp ay metti» (Ndlr, la situation du pays est difficile) ! L'urgence est partout et dans tous les sens.
Le département de Tivaouane ne compte pas de ministre dans ce gouvernement. Quel impact cela peut-il avoir sur l'avenir du département?
Il est vrai que tous les 45 départements que compte le pays ne peuvent pas siéger dans le gouvernement. Toutefois, compte tenu du statut socio économique, religieux, historique et politique du département et de la disponibilité de cadres de haute facture, aux compétences et expertises certifiées dans les domaines les plus pointus, qui sont, et de surcroit, engagés à côté du Président Macky depuis l'opposition, un autre traitement aurait pu lui être réservé. Des ministres, des Directeurs généraux, des hauts fonctionnaires civils comme militaires, au-delà de l’honneur et de la fierté, apportent toujours une plus-value réelle dans un département ou dans une communauté. Des postes de responsabilité, Tivaouane en a plus que besoin.
Selon vous, comment la coalition Bby devrait s'y prendre pour être au top à Tivaouane?
La Coalition Bby Tivaouane est à l'image des autres départements du pays. Elle est minée par des tendances partisanes, par des manœuvres politiciennes et des luttes de positionnement. Elle n'est ni structurée ni organisée. Je ne vois pas comment la rendre dynamique et efficace dans ces conditions.
Quels sont vos rapports avec le Président Macky Sall?
Mes rapports avec le Président sont au beau fixe. Il sait plus que quiconque ce que je lui ai apporté depuis 2012. Le Président Macky Sall connait bien mon parcours, mes performances et mon potentiel politiques. De même, il sait aussi le genre d'homme que je suis. Le Président a beaucoup de considérations et d'estime pour ma personne. Il m’avait fait l'honneur de me nommer Président du Conseil de Surveillance de l’Agence Nationale des Eco-villages (Anev) suite à ma non-reconduction à la dernière minute, à l'Assemblée Nationale. Nous avions trouvé beaucoup de difficultés dans l'Agence. Dès notre prise de fonction, nous nous sommes mis au travail, avec le Conseil de Surveillance et l'équipe cadre de l’Anev, pour la relancer. Mais le Président l’a dissoute en Août 2019. Depuis, nous restons à l'écoute du président de la République, tout en lui renouvelant notre engagement à ses côtés, conformément à la volonté de mon père et guide Abdoul Aziz Sy Al Amine (RTA) qui m'avait demandé de le soutenir. Ce que j'ai fait sans réserve et sans préalable aucun. Nous relevons tout de même que cette longue attente constitue une entrave au développement de nos activités. Le statut et la responsabilité renforcent toujours en politique. Sans responsabilité, pas de perspectives !
Les prochaines élections locales se préparent dans un contexte marqué par une nouvelle configuration politique, suite à la formation du dernier gouvernement. Quel rôle comptez-vous y jouer ?
Sans intérêt et motivation, il n’y a pas d'action. Et c’est l'action qui nourrit l'ambition. Depuis 1985, je fais de la politique. J'étais encore au collège. Je suis l'un des hommes politiques les plus constants en terme de présence et de participation à des élections. Depuis 96, j'ai participé activement à toutes les joutes locales. En 2009, je devais être le maire de Tivaouane, mais à la dernière minute, une bonne partie des conseillers ont fait défection. Ce qui explique que nous avions en tant que député, déposé une proposition de loi portant modification du mode d'élection du maire en Mars 2013. Aussi en 2014, nous devrions remporter les élections devant une très grande coalition dirigée par le ministre Abdou Ndéné avec aussi Demba Diop dit Diop Sy, Mamadou Diagne Sy Mbengue devenu maire, la ministre Seynabou Gaye Touré, des membres de la famille Sy et d'autre gros calibres. Au finish, nous avons perdu par une différence de 800 voix. J'avais battu entièrement campagne avec mes moyens propres sans aucun soutien particulier. J’étais alors dans Rewmi ; et ce statut d’opposant ne m’a pas facilité les choses à Tivaouane. Je signale d’ailleurs qu’en 35 ans de militantisme, je n’ai jamais adhéré à un parti au pouvoir. Depuis, le contexte local a évolué avec l'arrivée de nouvelles têtes. Nous appartenons à une coalition qui a un chef, nous attendons ses directives, même si le dernier mot appartient aux populations. Il faudra auparavant que les uns et les autres soient fixés sur la date exacte des prochaines élections locales.
Quel est l'état d'avancement des grands projets du Président dans la ville sainte?
Les travaux ont connu un coup d'arrêt pour beaucoup d'entre eux. Il y en a qui n'ont pas encore connu un début d'exécution. Le projet d'assainissement se poursuit. On n’a pas encore beaucoup inauguré. Pour dire vrai, tout ne se passe pas comme prévu. Et la Covid19 est venue compliquer davantage les choses. Les Tivaouanois attendent aussi le président de la République sur les questions de l’éducation, des daara, sur la formation, l’insertion et l'emploi des jeunes dans les industries extractives du département mais aussi dans les filières agricoles et artisanales, pour atténuer le phénomène «Barça ou Barsakh». En outre, il faut un second lycée car le lycée Babacar Sy a dépassé largement ses capacités d’accueil. Il faut un centre de formation professionnel à défaut d'un lycée technique, mais aussi un stade moderne pour les sportifs. J'en ai parlé au président de la République au cours d'un de nos entretiens. Le chômage et la pauvreté font des ravages dans le département de Tivaouane en dépit de ses potentialités ! Heureusement, c’est en cela que le projet du khalif général Serigne Babacar Sy pour la finition de la grande mosquée est salutaire. Il est venu à son heure pour embaumer les cœurs et susciter davantage d'espoirs dans la ville sainte et la communauté.