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25 avril 2025
Développement
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KHONDIO, RÉCEPTACLE DES DÉCHETS TOXIQUES
Ce village près de Mboro, situé à environ 80km de Dakar, abrite le déversoir des déchets acides du pays depuis 1983. Des rejets hautement toxiques dont les ICS contestent pourtant la dangerosité
Dans sa nouvelle enquête, La Maison Des Reporters vous emmène à Khondio, un village près de Mboro, situé à environ 80km de Dakar. Une localité très particulière car elle abrite le déversoir des déchets acides des ICS depuis 1983. Des rejets hautement toxiques dont les ICS contestent la dangerosité pour l'environnement et pour les hommes.
Après la mise en demeure du ministre de l’environnement, les ICS se trouvent dans l’obligation d’apporter la preuve de la toxicité ou non des déchets déversés en mer. Le temps qui leur est imparti est largement dépassé et les résultats des analyses se font toujours attendre. Les habitants de Khondio quant à eux sont formels. Leurs maux sont devenus innombrables avec ces déchets.
En contrepartie les ICS ont construit une case de santé dans le village. Un investissement jugé très peu significatif par les populations qui fustigent le manque d'équipe médicale et de moyens matériels. Le ministère de l'environnement a recommandé le déplacement du lieu de déversement vers un autre village. Une tentative destinée à faire taire la polémique sans pour autant résoudre le problème alors que des alternatives existent pour valoriser la substance.
Souleymane Diassy et Amy Keita se sont rendus sur place pour évaluer l'impact de ces camions d'acide fluo-silicique qui depuis plus de 30 ans déversent leur contenu en mer.
par Bosse Ndoye
LA FRANCE RESTE FIDÈLE À SA STRATÉGIE DU LÂCHER POUR MIEUX TENIR
La stratégie a merveilleusement fonctionné avec le tour de passe-passe de changement du CFA en ECO. L’ancienne métropole est restée cohérente avec elle-même depuis le début de sa longue odyssée coloniale
Dans les rapports de domination qu’elle a entretenus et qu’elle continue d’entretenir avec la majorité de ses anciennes colonies d’Afrique en général, et d’Afrique subsaharienne en particulier, la France a souvent adopté la stratégie dite du lâcher pour mieux tenir. Celle-ci consiste à faire semblant de faire certaines réformes et/ou « concessions» afin de préserver les avantages et privilèges qu’elle tire des relations (néo)coloniales avec les pays de son pré carré africain. C’est aussi une façon de calmer les ardeurs de ceux qui réclament la souveraineté totale de leurs pays en exigeant une révision complète des rapports souvent léonins les liant à l’ancienne puissance coloniale. L’histoire recèle d’exemples pouvant étayer ces propos.
Humiliée, traumatisée et épuisée par la guerre d’Indochine à laquelle mirent fin les Accords de Genève de juillet 1954 - l’année où commença à couver le feu algérien -, l’ancienne métropole, tout en espérant garder son ex-colonie de peuplement devenue département français au fil des années, préféra se séparer, à son corps défendant, du Maroc et de la Tunisie en leur accordant l’indépendance respectivement le 2 mars et le 20 mars 1956. Ainsi choisit-elle de lâcher ces deux pays pour s’accrocher à celui qui était sans doute le plus important à ses yeux afin d’éviter l’embrasement général de la région. D’autant que celui-ci pouvait entraîner la perte totale du Maghreb francophone, et avec lui ses nombreuses ressources naturelles et son bel emplacement stratégique.
Craignant que la lutte armée en Algérie ne fît des émules dans ses colonies de l’Afrique noire par effet de contagion, la France y desserra un peu l’étau de la domination avec l’adoption de la Loi-cadre Defferre en 1956. Celle-ci élargit les pouvoir locaux avec la création de Conseils de gouvernement élus suffrage universel. Mieux valait lâcher un peu de lest en octroyant quelques libertés pour toujours tenir les colonies que de faire face à de multiples soulèvements populaires déstabilisateurs pouvant être engendrés par les désirs d’autonomie qui devenaient de plus en plus grands après la seconde guerre mondiale et aussi avec l’accession à l’indépendance d’autres pays africains.
Le Général de Gaulle abonda dans le sens des réformes que la Loi-Cadre Deferre avec la Communauté franco-africaine. Bien que plus d’autonomie fût accordée aux colonies, les véritables manettes du pouvoir restaient entre les mains de la France, qui fit de son mieux pour préserver son empire, tout en évitant d’aborder la question d’indépendance et menaçait même ceux qui seraient tentés de la réclamer. La Guinée en fit les frais par son Non en 1958, même si le choix lui en avait été donné. Au final, l’Union française de 1946, la Loi-cadre de 1956 et la Communauté franco-africaine de 1958 n’ont été que des formes différentes de la mise en application de la stratégie du lâcher pour mieux tenir permettant à la France de s’adapter aux réalités sociales, économiques et politiques des temps changeants afin de préserver son empire colonial.
Lorsque les indépendances devinrent inévitables au début des années 60, la France consentit à les accorder à la plupart des territoires sous sa domination, non sans les avoir corsetées par différents accords politiques, économiques et de défense… qui jetèrent les bases des relations néocoloniales entre elle et ses futures ex-colonies. Ces mots de Michel Debré, tirés de sa lettre adressée à Léon Mba, futur président du Gabon, constituent une preuve irréfutable de la stratégie de Paris du lâcher pour mieux tenir : « On donne l'indépendance à condition que l'État s'engage une fois indépendant à respecter les accords de coopération signés antérieurement : il y a deux systèmes qui entrent en vigueur en même temps : l’indépendance et les accords de coopération.. L’un ne va pas sans l’autre[1].» Cela était valable pour presque toutes les colonies qui allaient accéder à l’indépendance. Ce qui a fait dire, à juste titre, à François-Xavier Verschave que : « Les pays francophones au sud du Sahara ont été, à leur indépendance, emmaillotés dans un ensemble d’accords de coopération politique, militaire et financières qui les ont placés sous tutelles[2].»
Dans l’Archipel des Comores – Anjouan, Grande Comores, Mohéli, Mayotte –, alors que le référendum d’autodétermination du 22 décembre 1974 a vu massivement triompher le oui en faveur de l’indépendance (94,5%), l’État français décida unilatéralement de prendre en compte les résultats île par île et non pour l’ensemble de l’Archipel. Cette décision était en porte-à-faux avec la position de l’ONU et était surtout en contradiction avec la loi française du 23 novembre 1974, qui énonce dans son article 5 : « que si le classement des résultats se fera île par île, la proclamation en sera globale[3].» C’est ainsi que l’île de Mayotte, où le non l’avait emporté à 63.22%, est restée dans l’escarcelle française à la suite d’une « élection à la Naegelen» qui y avait été organisée plus tard et qui avait conforté la volonté française. C’est dire que la France n’accepte presque jamais de perdre totalement les avantages qu’elle tire de la plupart de ses anciennes colonies africaines. Elle peut consentir à lâcher du lest, mais jamais à lâcher prise.
Cette stratégie multi-décennale, sinon séculaire, du lâcher pour mieux tenir - qui pourrait être l’autre nom du refus viscéral de Paris de décoloniser -, est en droite ligne avec l’adoption par la France du projet de loi entérinant la fin du franc CFA ce 20 mai 2020… Car avec l’ECO, bien que l’appellation CFA change, les comptes d’opérations et les représentants français dans les trois différents Conseils d’administration des 3 Banques Centrales vont disparaître, la France reste grandement présente dans cette monnaie et garde de nombreux avantages puisque c’est elle qui la garantit et qu’ il y aura entre autres toujours le principe de la convertibilité illimitée – qui fait mal aux pays membres de la zone franc -, et celui de la parité fixe avec l’Euro, sans oublier le fait qu’elle « se réserve le droit de revenir dans une instance de décision, en l’occurrence le conseil de politique monétaire[4]». Il importe aussi de mentionner que l’ancienne puissance coloniale a « courcircuité» la CEDEAO en compromettant son vieux projet de monnaie commune et surtout qu’elle refuse de voir le Nigéria menacer son emprise sur ses ex-colonies d’Afrique de l’ouest en devenant leur leader dans une organisation monétaire sous-régionale. La stratégie du lâcher pour mieux tenir a merveilleusement fonctionné avec le tour de passe-passe de changement du CFA en ECO.
La France est prête à tout mettre en œuvre pour défendre ses intérêts sur le continent. Elle doit par conséquent trouver sur sa route une réponse à la hauteur de ses ambitions. Mais celle-ci ne pourra lui être apportée que par un ensemble fort et d’après une stratégie bien définie et bien réfléchie. L’ancienne métropole est restée cohérente avec elle-même depuis le début de sa longue odyssée coloniale. Maintenant, c’est à nous de l’être avec nous-mêmes et avec nos revendications.
[1] Michel Debré, lettre adressée à Léon Mba, datée du 15 juillet 1960… cité par Said Bouamama, Planter du blanc, Chronique du (néo)colonialisme français, p.14
[2] François-Xavier Verschave, La Françafrique : le plus grand scandale de la République, p.86
[3][3] André Oraison, Quelques réflexions critiques sur la conception française du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes à la lumière du différent franco-comorien sur l’île de Mayotte, Cité par Said Bouamama, Ibid p.113
Sénégalais du Sénégal, avez-vous perçu vos 200 000F CFA de Macky Sall ? Cette surprenante décision saluée par certains immigrés posent néanmoins plusieurs interrogations, à l’exception de l’aide aux étudiants
Qui l’eût cru, l’argent du Sénégal vers la France ! Les immigrés de France ont eu la grande surprise de recevoir des mails et courriels provenant des leurs différents consulats notifiant que le président de la République a décidé de transférer des fonds de Dakar vers la France pour nous soutenir contre le coronavirus. Plus de 700 000 000F CFA nous tombent du ciel malgré la fermeture des frontières. Il nous est demandé de remplir un formulaire et de transmettre nos relevés d’identité bancaire, ce qui nous permettra de toucher 300€, environ 200 000F CFA.
Sénégalais du Sénégal, avez-vous perçu vos 200 000F CFA de Macky Sall ? Cette surprenante décision saluée par certains immigrés posent néanmoins plusieurs interrogations, à l’exception de l’aide aux étudiants. En effet, La France réputée pour être un état providence, dispose un système social solidaire qui n’existe nulle part ailleurs. Les soins sont gratuits et le salarié empêché d’exercer son travail durant cette période difficile, - donc en chômage partiel-, perçoit 84% de son salaire net. Le revenu de solidarité active (R.S.A) existe pour ceux qui ont épuisé leurs droits aux allocations chômage.
L’allocation personnalisé au logement (A.P.L.) permet de réduire jusqu’à 90 % les charges fixes de loyer pour les personnes ayant droit aux minima sociaux. Il convient de noter que les sénégalais ont les mêmes droits sociaux que les français. Ce constat ne nous invite pas à considérer que les immigrés vivent confortablement en France, non. Il pose néanmoins la question de notre rapport à l’argent et sa distribution anarchique, alors que notre pays souffre avant et pendant cette pandémie de difficultés majeures, parfois innommables.
Cette décision loufoque et kafkaïen me rend schizophrène. Cette somme d’argent sera renvoyée illico presto à nos familles installées au Sénégal car les Sénégalais de France transfèrent une très grande partie de leurs revenus pour subvenir aux besoins à leurs parents ou/et construire des écoles, des centres de santé, etc. Il ne faut pas oublier le «vol retour», puisque les immigrés paieront des frais liés au transfert d’argent vers le Sénégal.
Faites votre calcul ! RIA, WESTERN UNION … auront leur part du gâteau. Ce qui diminuera naturellement cette aumône. Par conséquent, je refuse de m’inscrire pour percevoir les 200 000f CFA qui, à mon sens, sont plus utiles à mes compatriotes au Sénégal qui souffrent terriblement pendant cette période de pandémie. Ce coup de gueule ne remet nullement en cause nos compatriotes en France qui n’ont rien demandé ; puisque l’argent tombe du ciel, il faut bien le ramasser.
D’aucuns me rétorqueront à juste titre : «Regardez autour de vous. A Dakar, des personnes qui n’ont jamais exercé une activité professionnelle roulent en 4X4 neuves, distribuent des billets de banque et nos dirigeants bénéficient beaucoup avantages qui n’existent pas dans les pays développés». Ils ont raison mais ces réactions s’apparentent-elles à un constat ou une dénonciation ?
Voulons-nous être à la place du khalife pour pérenniser ces gabegies ou sommes-nous prêts ou réinventer un autre modèle. Moi, je préfère que l’argent ne tombe pas du ciel et que nos dirigeants l’utilisent à bon escient afin que les immigrés n’aient plus à combler les failles de l’état. Permettez-moi, je ne dis pas : «MERCI».
par Cheikh Tidiane Dièye
POUR QUE L'ÉCO SOIT RÉELLEMENT NOTRE MONNAIE
Je demande aux dirigeants de la CEDEAO de s’opposer à l’utilisation du nom et des signes de l’éco, qui constituent un symbole la libération des peuples ouest-africains et non un instrument de la servitude de certains États
Ils peuvent bien se donner bonne conscience en affirmant que le Franc CFA, sous sa forme coloniale et post-coloniale, est en train de mourir. Mais qu’ils n’essayent pas de nous faire croire que ce qui va naître sera l’ECO.
L’ECO n’est pas la monnaie de l’UEMOA et ne le sera pas. C’est un projet souverain de la CEDEAO pris au piège des manœuvres d’une France qui, face à des dirigeants africains sans épaisseur, a réussi à faire d’une pierre deux coups: torpiller un projet de la CEDEAO sur lequel elle n’a aucune prise et usurper un symbole monétaire qu’il fait naître ligoté et enchaîné à l’euro pour une durée indéterminée.
Au moment où la crise sans précédent du COVID 19 amène certains grands dirigeants du monde à se donner les moyens de consolider leurs acquis et à d’autres de rompre les équilibres défavorables et les chaînes de la dépendance, il se pourrait bien que rien ne change en Afrique. La faute à des dirigeants incapables de prendre conscience des enjeux de l’heure et de comprendre que les disruptions ne sont plus seulement nécessaires. Elles sont devenues incontournables.
Je demande, une fois encore, aux dirigeants de la CEDEAO de s’opposer à l’utilisation du nom et des signes de l’ECO, qui constituent un symbole de la libération des peuples ouest africains et non un instrument de la servitude de certains États.
J’invite en particulier le Nigeria, le Ghana et les autres pays de la ZMAO à rejeter la réforme de la France. Je milite et œuvre depuis plus de 15 ans pour l’avènement d’une monnaie souveraine et flexible dans la CEDEAO, en appui aux politiques sectorielles commerciale, agricole et industrielle. Je poursuivrai ce combat avec tous les intellectuels, militants, acteurs politiques et de la societe civile ouest africaine pour faire barrage aux desseins de la France et ses représentants.
Je recommande aux États de l’UEMOA de continuer à utiliser le Franc CFA arrimé à l’euro aussi longtemps qu’ils le voudront, tout en œuvrant, comme ce fut le cas ces dernières années, pour des convergences nécessaires à la création de l’ECO.
Ainsi, plus tard, lorsque les conditions seront réunies au niveau de la CEDEAO, et cela arrivera tôt ou tard, l’ECO naîtra en tant que monnaie libre, flexible et souveraine. Elle sera alors notre monnaie.
BARA DIOUF RACONTE LES DÉBUTS DU SOLEIL
Dans cet entretien qui n’a jamais été rendu public, le premier patron du Soleil revient sur les premières années du premier quotidien national sénégalais et les péripéties de sa création par le président Léopold Sédar Senghor
En 2010, le Sénégal célébrait ses 50 ans d’indépendance. Dans le cadre d’un projet de documentaire, nous avions décidé de filmer et interroger diverses personnalités témoins de l’époque coloniale. Parmi eux, Bara Diouf, ancien Directeur général du journal «Le Soleil», rencontré dans sa villa au centre-ville. Dans cet entretien qui n’a jamais été rendu public, il nous raconte, entre autres sujets, les premières années du premier quotidien national sénégalais et les péripéties de sa création par le président Léopold Sédar Senghor.
RETOUR AU SÉNÉGAL APRÈS UNE QUINZAINE D’ANNÉES D’ABSENCE
«En 1959, le Général Charles de Gaulle avait décidé d’organiser la 6ème session du Conseil exécutif de la Communauté à Saint-Louis du Sénégal qui était la capitale de l’Afrique occidentale française (Aof). Le quotidien français Le Monde devait ainsi y envoyer des journalistes de renom. À l’époque, j’étais reporter dans ce prestigieux journal et son directeur et fondateur, Hubert Beuve-Mery, décida de me mettre dans la délégation puisque l’événement se passait dans mon pays d’origine. Ainsi, après une quinzaine d’absence du Sénégal (mes parents résidaient en Côte d’Ivoire et j’avais passé mes études en France), je débarquais à Saint-Louis pour la couverture médiatique de ce Sommet de la Communauté. À l’époque, sous la Loi cadre et un peu avant l’indépendance, Obeye Diop était le ministre de l’Information du Sénégal et il fut surpris de voir sur la liste de la délégation française le nom, à consonance bien sénégalaise, d’un certain Bara Diouf. Et puisqu’il cherchait à recruter un coopérant pour encadrer la presse nationale naissante, les Français l’avaient orienté vers moi. C’est ainsi qu’il me proposa à Mamadou Dia, président du Conseil des ministres, qui accepta de me garder. À l’époque, il n’existait que quelques rares publications comme «Dakar Jeunes», «Condition humaine» (créé par Léopold Sédar Senghor et dirigé par Alioune Badara Mbengue), «Afrique nouvelle» ainsi que «Petit Jules», un hebdomadaire aux écrits d’une violence inouïe qui remettait en cause le pouvoir colonial. Il faut dire que Dakar avait une vie intellectuelle et journalistique très dense».
CRÉATION DU QUOTIDIEN LE SOLEIL
«Quand je suis revenu de France lors du fameux voyage du Général de Gaulle en 1959 à Saint-Louis, Houphouët Boigny, qui participait au Sommet, a tout fait pour me récupérer et m’emmener avec lui en Côte d’Ivoire, mais Obeye Diop avait proposé de me nommer comme directeur général de l’Agence de presse sénégalaise (Aps). Une agence que j’avais créée et fondée car seuls des journalistes français étaient là pour le compte de l’Agence France presse (Afp). Le directeur de l’antenne locale était d’ailleurs mon condisciple à l’Ecole de journalisme de la rue du Louvre à Paris. Et plus tard, après l’indépendance, les autorités décidèrent de mettre sur pied un journal sénégalais. Je me souviens que Michel de Breteuil, qui avait beaucoup d’estime pour moi, était le patron de «Paris Dakar» fondé durant la colonisation et qui s’appela ensuite «Dakar Matin» afin de coller à la nouvelle ambiance politique. Ce n’était plus, en effet, Paris-Dakar comme un axe, mais Dakar qui, chaque matin, donnait le ton et indiquait comment vivaient le Sénégal, l’Afrique et le monde. Après tant d’années, il avait envie de partir et de me laisser la publication puisque j’étais le premier Sénégalais diplômé en journalisme. Et je me souviens que Michel de Breteuil avait dit à Senghor: «Je m’en vais, je n’ai plus de place ici car le système colonial qui m’a vu naître et grandir est fini. J’ai fait mon travail, je suis en bonne amitié avec tout le monde, mais c’est bien le moment de partir en fermant mon journal. En attendant, je vous laisse le soin de former ceux qui vont diriger le vôtre». C’est ainsi que Senghor avait décidé de créer un quotidien qu’il avait lui-même appelé Le Soleil. Et comme j’étais le premier sénégalais ancien directeur d’une entreprise de presse, qui voulez-vous qu’il choisisse pour faire partie des premiers dirigeants de ce nouveau journal ? Ce n’est pas parce que j’étais le meilleur, mais comme le dit une formule, c’est le vide qui fait la valeur (rires). La valeur d’un individu n’a de sens que s’il y a un vide. Il faut dire que j’aimais ce métier, j’aimais également mon pays et j’avais un esprit d’équilibre et de raison. Je ne suis jamais tombé dans les excès politiques ou autres et suis toujours admiratif de l’éminente dignité de la personne humaine, quelle que soit son origine, son rang social ou son appartenance religieuse. J’en suis arrivé à un esprit de dépassement où personne n’est mauvais, l’essentiel est de tenir un langage de vérité».
LE CRÉDO DU SOLEIL DE L’ÉPOQUE
«Nos objectifs étaient de réveiller les consciences, construire une nation et informer sur la marche de l’Etat en misant sur des intellectuels. Mon option politique était axée sur l’Homme afin de forger sa dignité, sa valeur, de bâtir un citoyen laïc, ouvert à tout le monde, capable d’oublier sa race, sa religion, son ethnie, pour ne voir que sa grandeur et sa capacité de réaliser une belle et grande Afrique. À l’époque du « Soleil », le président Senghor et nous autres journalistes étions obsédés par l’idée de créer un homme de culture et de civilisation plutôt qu’un Sénégalais opposé aux autres nationalités africaines. Ce combat n’était vraiment pas le nôtre et je me souviens que lorsque j’avais eu des divergences avec Sékou Touré, le président de la Guinée, Senghor m’avait convoqué dans son bureau et m’avait dit ceci : « Bara, laisse tomber cette polémique, ça ne vaut pas la peine, surtout avec quelqu’un comme Sékou Touré et tout le combat qu’il a mené pour l’Afrique. Il ne faut pas perdre ton temps en le jugeant pour ce qu’il est en train de faire maintenant. Faisons notre Afrique, faisons le Sénégal et travaillons pour qu’il n’y ait plus de querelles ethniques entre Sérères, Wolofs, Toucouleurs, Diolas, etc., mais uniquement un grand peuple sénégalais». Ce conseil de Senghor, je le réitère aux jeunes d’aujourd’hui : soyez de grands hommes de culture, ayez des diplômes, élaborez de grandes pensées politiques sur l’homme et son éternité! Voilà ce combat que nous menions à l’époque, ce qui expliquait pourquoi il m’était facile de faire des éditoriaux dans de telles conditions, dans un tel contexte. Je n’attaquais personne, je n’avais que de grands principes d’humanisme sur lesquels je m’appuyais. Souvent, je prenais les discours de Senghor et en discutais avec lui. Il me recevait dans son bureau et nous analysions ses discours pendant des heures. Et quand je sortais de ces échanges intellectuels, j’avais assez d’éléments et d’idées qui étaient ainsi la quintessence de mes éditoriaux. Ma chance était aussi que j’écrivais bien. Je n’étais pas un brillant intellectuel, mais je savais agencer un sujet, un verbe et un complément dans de très bonnes conditions».
NOSTALGIQUE DU SOLEIL DES ANNÉES 1970 – 1980 ?
«Je n’ai pas de nostalgie pour cette époque. Le président Senghor est parti et ne reviendra plus, la naissance du « Soleil » c’est derrière nous. Seulement, je suis fier de dire que la plupart des grands journalistes sénégalais et d’autres pays africains comme Babacar Touré, Gabriel Jacques Gomis, Aly Kheury Ndao, Hamadoun Touré et tant d’autres, sont passés entre mes mains et, parmi eux, personne ne m’en a voulu. Je répète qu’il n’y a pas un seul qui est parti en m’en voulant car j’ai eu cette chance, très tôt, d’accepter l’autre tel qu’il est. Ce qui m’intéressait chez les gens avec qui j’étais au «Soleil», c’est ce qu’ils avaient dans la tête et le fruit de leur travail. Je ne perdais jamais mon temps sur des considérations religieuses, politiques, ethniques ou autres. Ce qui m’intéressait, c’était l’homme, son intelligence, son éminente dignité, sa perception de la grandeur et du beau, son patriotisme et son combat. Dès que je voyais qu’une personne avait ces capacités, je le prenais et le protégeais. Et que l’on me fasse la guerre ou non, pour moi c’étaient de faux problèmes. Le vrai problème est je puisse contribuer à l’épanouissement d’une presse de qualité et je pense qu’à travers «Le Soleil», non seulement j’ai atteint cet objectif, mais j’ai aidé à l’éclosion d’une classe journalistique sénégalaise qui a fait ses preuves un peu partout à travers le monde. D’ailleurs, la plupart de ceux qui ont créé ou animé les premiers journaux privés au Sénégal ont fait leurs premières armes au «Soleil». Cette presse privée va bien sûr jouer un très grand rôle dans dix ou quinze ans. Peut-être que je ne serais plus là pour voir ça car je suis relativement vieux maintenant (rires)».
REGARD SUR LA PRESSE ACTUELLE
«Cela me fait très mal de voir l’état de la presse actuelle car je suis un idéaliste toujours à la recherche du beau et du parfait, pour ne pas dire un perfectionniste. Cependant, il faut que j’accepte que la plupart de ces jeunes journalistes viennent à peine d’atterrir dans un domaine qui était jusqu’ici très éloigné pour eux, intellectuellement. Certains ne sont pas bien formés et ils arrivent tous en masse dans la profession. Malheureusement, il faut l’avouer, au début, ce ne sont pas les meilleurs qui se sont saisis de la presse car la plupart des diplômés de l’époque voulaient devenir avocats ou fonctionnaires dans l’administration générale. Et il a fallu d’autres générations, avec la création du Cesti (Centre d’études des sciences et techniques de l’information de l’Université de Dakar), pour que de jeunes diplômés s’intéressent à la presse, mais les places étaient déjà prises. Aujourd’hui, de nombreux jeunes ont émergé avec de nouvelles idées, mais n’ont pas toujours un grand niveau, ce qui explique cette sorte de médiocrité que nous sentons. Mais, cela va passer dans cinq ou dix ans car l’Afrique bouge et les générations avancent. Soyons patients, tolérants et acceptons cette petite médiocrité, ou plutôt ce manque de métier que nous allons bientôt dépasser».
CONSEIL AUX JEUNES JOURNALISTES
«Le seul conseil que je donne aux jeunes journalistes est celui-ci: lisez car votre drame est que vous ne lisez pas beaucoup. Lisez tout ! Vous avez ce devoir d’être l’écho de la Nation et, pour bien transmettre cet écho, vous devez en percevoir le bruit».
L'ECO À PETITS PAS
Le vrai changement en profondeur c’est la rupture des liens « techniques » entre les pays concernés, le Trésor et la Banque de France. La France ne va plus cogérer la monnaie ouest-africaine avec les États concernés
Le projet de loi entérinant la fin du franc CFA a été adopté ce mercredi 20 mai en Conseil des ministres par le gouvernement français. Ce texte valide formellement la transformation de la monnaie ouest-africaine qui changera de nom pour s'appeler l'éco. C’est une nouvelle étape après l’annonce faite le 21 décembre par Emmanuel Macron et Alassane Ouattara.
La réforme concerne huit pays membres de l'Union monétaire ouest-africaine : le Bénin, le Burkina Faso, la Côte d'Ivoire, la Guinée-Bissau, le Mali, le Niger, le Sénégal et le Togo. Elle était dans les tuyaux depuis au moins trois ans et a pu aboutir après de longues négociations entre la France et les pays concernés lors du dernier semestre 2019.
Ce qui va changer c’est tout d’abord le nom de la monnaie. Le franc CFA deviendra l’éco. Mais le vrai changement en profondeur c’est la rupture des liens « techniques » entre les pays concernés, le Trésor et la Banque de France. La France ne va plus cogérer la monnaie ouest-africaine avec les États concernés.
Autre changement, la Banque centrale des Etats d'Afrique de l'Ouest ne devra plus déposer la moitié de ses réserves de change auprès de la Banque de France. Cette obligation était perçue comme une dépendance humiliante vis-à-vis de la France par tous ceux qui ont œuvré pour cette réforme. La France va aussi quitter tous les organes de décision et de gestion de l’UEMOA. Mais Paris continuera d'offrir des garanties en cas de crise monétaire.
Le processus n’en est qu’à son début
Pour l’instant l’éco va toujours être rattaché à l’euro avec une parité fixe ce qui garantit la même valeur de la monnaie pour les consommateurs. Paris passe en somme d’un rôle de co-gestionnaire à un rôle de garant, mais en pratique cela ne va rien changer dans le quotidien des consommateurs.
Les étapes et les questions sont encore nombreuses. A quelle date les nouveaux billets seront-ils imprimés ? Quand entreront-ils en vigueur ? Il faudra probablement patienter pour tenir un eco entre les mains, peut-être même plusieurs années.
Il faudra attendre encore plus longtemps pour que l’ancienne zone franc rallie à elle les autres pays de la Cédéao, pour construire une monnaie unique. Dans la zone Cédéao, certains ne voient d’ailleurs pas cette réforme d’un bon œil notamment le Nigeria.
L'Afrique centrale, zone monétaire à part
Le géant économique n’appartient pas à la zone franc, il gère sa propre devise, le naïra. Et comme les autres pays anglophones de la région, le Nigeria est prudent et exigeant. Ces pays qui participent à la réflexion sur une monnaie unique dans la zone Cédéao, mettent en avant pour aller vers cette monnaie des critères auxquels peu d’Etats peuvent répondre.
A noter que cette réforme ne concerne pour l’instant pas les six pays d’Afrique centrale qui utilisent aussi le franc CFA. Ils se trouvent dans une zone monétaire distincte et sont dans une autre dynamique régionale. Le débat est cependant déjà lancé.
LE FLÉAU DES FAUX BILLETS
Des immeubles poussant comme des champignons, de nouveaux riches qui sortent ex nihilo… Les signaux alimentant les soupçons de blanchiment et faux monnayage sont nombreux. La dernière affaire portant sur plus de 1 200 milliards F CFA donne le vertige
En plus de chasser des investisseurs potentiels, la contrefaçon de monnaie est un fléau qui pourrait être préjudiciable à toute l’économie, en créant un déséquilibre entre la masse monétaire et la production de biens et services.
Des immeubles qui poussent comme des champignons. De rutilantes voitures qui roulent sur les routes de la capitale. Les nouveaux riches qui sortent ex nihilo… Les signaux sont assez nombreux pour alimenter les soupçons de blanchiment et faux monnayage de billets de banque. Un mal si profond qui peut gangréner toute l’économie nationale. Pour les spécialistes de la matière économique, c’est surtout la dernière affaire qui porte sur une valeur estimée à plus de 1 200 milliards F CFA qui donne le vertige. Docteur Souleymane Astou Diagne témoigne : ‘’J’ai eu le tournis quand j’ai entendu cette information. Je me demande comment des gens peuvent prendre le risque de mettre autant de liquidités en circulation dans notre économie nationale. C’est plus qu’un crime ça. On doit les sanctionner de la manière la plus sévère possible. Ils mettent en danger tout le tissu économique national : nos emplois, notre santé, l’éducation… Tout est mis en péril, si leur forfait avait été accompli. Cela décrédibilise tout le système économique.’’
Abondant dans le même sens, docteur Malick Sané, Directeur du Laboratoire de politiques commerciales, estime que cela dépasse l’entendement et devrait augmenter la vigilance des plus hautes autorités.
Le moins que l’on puisse dire, c’est que ce phénomène qui prend de plus en plus de l’ampleur, avec un laxisme parfois complice de certaines autorités, peut avoir des effets néfastes sur le tissu économique. Parmi ces impacts, relève le Dr Sané, il y a le risque d’inflation, de discrédit de la monnaie elle-même… ‘’Le faux monnayage est source de déséquilibre de l’économie. Vous savez, la création monétaire voudrait que toute monnaie créée ait une contrepartie.
C’est la valeur de la production qui représente à peu près la monnaie créée, ce qui donne la masse monétaire. Si la quantité de monnaie excède la valeur des biens et services existant dans l’économie, cela peut déboucher sur ce qu’on appelle l’inflation monétaire. De telle sorte que les gens auront de l’argent, mais la marchandise fait défaut’’, peste-t-il. Et de renchérir : ‘’L’autre risque, c’est le discrédit porté sur la monnaie. La valeur de celle-ci est basée sur la confiance. Si une monnaie est reproduite à certaines proportions de manière frauduleuse, cela peut saper le moral des agents économiques qui ne veulent plus détenir cette monnaie.’’
Dans la même veine, Souleymane Astou Diagne souligne qu’en fait, cette baisse de la confiance des acteurs instaure une incertitude sur le marché. ‘’Il faut savoir, dit-il, pour que l’économie puisse fonctionner, il faut que les transactions économiques soient très élevées. Or, les faux billets ralentissent ces transactions, à cause de ce déficit de confiance. Cela peut se traduire par une réduction de la production ou des activités commerciales. Ce qui est fort préjudiciable à l’économie nationale’’. Les faux billets, renseigne-t-il, augmentent de manière artificielle la masse monétaire en circulation. ‘’Comme vous le savez, il revient à la Banque centrale de mesurer le niveau de la masse monétaire en circulation ; et c’est en fonction de la production de biens et services. Toute augmentation de monnaie non émise par la Banque centrale peut impacter sur la politique monétaire et économique, et peut avoir des impacts sur les prix’’.
Toutefois, tiennent à préciser nos interlocuteurs, le fléau n’a pas encore atteint des proportions de nature à avoir de telles influences sur le marché sénégalais. ‘’Nous pouvons craindre l’inflation si, par exemple, cette contrefaçon de monnaie atteint certains niveaux. Mais force est de constater que ce n’est pas encore le cas. Tout dépend donc de la quantité de fausse monnaie en circulation. Pour l’heure, le phénomène est marginal et il est heureux de constater que les forces de défense et de sécurité veillent au grain’’, reconnait le Dr Diagne.
A en croire l’économiste Bassirou Bèye, ancien formateur à l’Ecole supérieure d’économie appliquée (ESEA/ex-ENEA), l’Etat devrait, en tout cas, tout mettre en œuvre pour juguler le mal qui devient endémique. ‘’Je pense qu’il faudrait même penser, à l’instar de certains pays, mettre en place une brigade spéciale chargée de traquer ces criminels dont l’activité s’avère désastreuse pour notre faible économie. Certains signes devraient pousser à s’interroger sur la fortune de certains citoyens. On ne devient pas riche comme Crésus en un claquement de doigts, alors que, dans la pratique, on ne mène aucune activité pour justifier une telle richesse. Et une telle brigade aurait pu mener ce genre d’enquête, car le phénomène prend de l’ampleur’’.
A en croire l’économiste, ‘’lutter contre les faux billets, c’est préserver la croissance économique. Ne pas gérer cette problématique, c’est mener le pays vers la faillite’’.
Il y va, fait-il remarquer, de la pérennité même des régimes. ‘’Certes, on n’a pas encore atteint certains niveaux et des efforts sont déployés pour mettre les délinquants hors d’état de nuire. Mais, il urge de renforcer la lutte pour enrayer toute dérive. Il faut savoir que la production de fausse monnaie peut même être utilisée comme une arme politique ou géopolitique. Cela a été fait dans certains pays comme en Guinée, quand celle-ci a pris la décision d’avoir sa propre monnaie. Le débat se pose aussi avec l’Eco qui est encore en gestation. C’est un véritable problème qui nécessite la prise de décisions fortes’’. Très inquiet, le spécialiste prévient que même à l’intérieur d’un pays, ce procédé tout comme le trafic de drogue peut jouer à la déstabilisation d’un pouvoir.
Il faudrait donc, selon lui, user de tous les moyens possibles dont le renseignement, l’espionnage… pour endiguer le mal. La monnaie, explique M. Bèye, est au centre de l’activité économique. ‘’Quand le secteur monétaire est déréglé, tous les autres secteurs suivent. Et c’est un désastre pour un pays. En attendant de trouver des moyens efficaces pour démanteler ces réseaux, il faut surtout essayer de protéger les populations, en leur rendant accessibles les outils de détection de fausse monnaie. Mais dans le moyen, long terme, il faut penser à de véritables politiques pour les éradiquer une bonne fois pour toutes’’.
Revenant sur la lutte contre le fléau, Souleymane Astou Diagne estime qu’il faudrait une répression plus sévère. ‘’Cela s’apparente à un vol, parce que c’est l’argent d’honnêtes citoyens qui est parfois subtilisé de manière frauduleuse. Tu fais une transaction en donnant de la bonne monnaie. En retour, on te donne de l’argent que tu ne pourras utiliser nulle part. C’est du vol. C’est de l’arnaque. Il faut donc des solutions judiciaires sévères’’, souligne le Dr Diagne, non sans préciser que de pareilles informations pourraient chasser d’éventuels investisseurs. ‘’Imaginez des étrangers qui veulent venir investir chez nous. S’ils voient de telles informations, ils peuvent se retourner, parce qu’ils n’auront plus confiance au système’’.
par Papa Meissa Gueye
IMPACTÉS MAIS PAS MENDIANTS
Il faut que les artistes qui déclarent des manques à gagner de centaines de millions cessent la comédie. Le fonds de secours aux acteurs culturels ne doit pas être des liasses de billets que l’on se partage
Le Sénégal, à l’instar d’autres pays du monde et de l’Afrique, vit une situation très difficile. La pandémie du coronavirus est en train de bouleverser le mode de vie des artistes et a fini de les installer dans un désarroi qui ne semble pas avoir de fin. Les autorités gouvernementales et sanitaires font des pieds et des mains pour contenir la maladie et éviter qu’elle n’atteigne de plus larges couches. Des mesures contraignantes sont prises : état d’urgence suivi de couvre-feu, limitation des déplacements, interdiction des voyages inter-régions, fermeture de certains marchés, bouleversement complet du transport en commun, point de rassemblements. Le secteur culturel s’est révélé très touché par ces mesures. Plus de concerts, plus de représentations théâtrales, l’activité artistique dont la pratique est liée à la présence du public vit ses plus durs moments.
Si dans un premier temps, ces mesures ont trouvé un écho favorable dans une large frange de la population, de plus en plus elles sont contestées. La raison est que le Sénégal est un pays dont l’économie est essentiellement basée sur l’informel. Les mesures bien que salutaires tuent les affaires des artistes et les réduisent à une situation de précarité qu’ils peinent à accepter et à surmonter. Pour autant, cela ne doit pas faire d’eux des mendiants.
Impactés oui !
Mendiants non !
La balle se trouve dès lors dans les deux camps : celui du ministère en charge de la Culture et de la Communication et celui des acteurs culturels. Il est vrai qu’il y a un déficit de communication au niveau du ministère qui ne peut fournir aucune information sur l’ aide et le secours destinés aux acteurs culturels décidés et rappelés par le président de la République, notamment lors d’un récent Conseil des ministres .
Nous invitons donc le ministre de la Culture et de la Communication à communiquer juste et vrai sur la situation au moment où les acteurs culturels, eux aussi exagèrent et versent même dans le ridicule, comme ce fut le cas avec Thione Seck, remettant ses factures au ministre. Nous condamnons cette attitude avec la dernière énergie, parce que nous pensons qu’il n’est pas décent de profiter de cette situation de pandémie, pour régler des problèmes alimentaires qui n’ont rien à voir avec le contexte dans lequel nous sommes. Il faut également que les artistes qui déclarent des manques à gagner de centaines de millions cessent la comédie. Qu’ils reviennent donc à la raison, d’autant qu’ils n’ont eu qu’un mois d’inactivité, car le mois de carême n’a jamais été un mois prolifique pour les artistes. Toutes les activités sont aux arrêts durant le mois béni.
De notre point de vue, le fonds de secours aux acteurs culturels ne doit pas être des liasses de billets que l’on se partage. Des mécanismes doivent être mis en place par les autorités pour faire bénéficier de ce fonds, tous les acteurs impactés ; à charge également pour ceux-ci d’imaginer des scénarii basés sur des démarches communes, débouchant sur des projets structurants pour chaque secteur, ouvrant ainsi la voie à un Nouvel Ordre Culturel.
De ce fait, nous proposons à la place d’une distribution automatique, le lancement d’appel à projets calqués sur la situation que nous vivons et celle d’après Covid-19 ; il sera ainsi réglé, le problème de répartition et de distribution, ce qui fera certes beaucoup de mécontents, mais contribuera à projeter les acteurs dans une démarche inclusive d’innovation, quant au financement et au développement de la Culture, dans notre pays ; démontrant ainsi notre génie créateur en ce qui concerne la gouvernance future de notre secteur.
Oui pour un appel à projet Covid-19 !
Non, pour un partage de fonds !
Impactés mais pas mendiants.
Papa Meissa Gueye est artiste/entrepreneur culturel
L'AFRIQUE A BESOIN DE TESTS DE DÉPISTAGE DU COVID-19
Le manque de tests reste le problème le plus criant pour permettre une évaluation mieux étayée de la situation. « 1,3 million de tests seulement ont été réalisés sur une population de près de 1,3 milliard d’habitants. Il en faudrait dix fois plus »
Le Monde Afrique |
Laurence Caramel |
Publication 20/05/2020
Auditionné par le Sénat, le directeur du Centre de prévention et de contrôle des maladies en Afrique invite à rester prudent sur l’évolution de l’épidémie sur le continent.
Il serait prématuré de croire que l’Afrique sera épargnée par le Covid-19 : auditionné mercredi 20 mai par la commission des affaires étrangères du Sénat, le docteur John Nkengasong, directeur du Centre africain de prévention et de contrôle des maladies (CDC), s’est montré des plus prudent sur l’évolution de l’épidémie sur le continent. Les données disponibles sont, pour cet observateur privilégié, trop parcellaires pour imaginer qu’elles reflètent la réalité. Selon les chiffres publiés la veille par le CDC, l’Afrique comptait 88 172 cas et 2 834 décès. « Le nombre de morts a augmenté de 30 % en une semaine », a-t-il mis en garde pour tempérer tout triomphalisme prématuré en rappelant aux sénateurs que la situation de pays comme le Brésil avait rapidement basculé.
Le manque de tests reste le problème le plus criant pour permettre une évaluation mieux étayée de la situation. « 1,3 million de tests seulement ont été réalisés sur une population de près de 1,3 milliard d’habitants, a rappelé M. Nkengasong. Il en faudrait dix fois plus. » L’Union africaine dont dépend le CDC souhaite y parvenir d’ici « deux à trois mois ». La formation d’un million de travailleurs communautaires capables de tracer les personnes contaminées et leurs contacts ainsi que la création d’une plateforme commune d’achat des médicaments sont les deux autres objectifs que se sont fixés les gouvernements africains dans leur plan d’action coordonnée, dont le coût est estimé à 600 millions de dollars (547 millions d’euros).
SenePlus publie ci-dessous, les nominations prononcées au Conseil des ministres du 20 mai 2020.
"Au titre des mesures individuelles, le Président de la République a pris les décisions suivantes :
Monsieur Moustapha Lô DIATTA, Docteur en relations internationales, Enseignant chercheur à l’Université Assane SECK de Ziguinchor, matricule de solde n°172145/F, est nommé Directeur du Centre régional des Œuvres universitaires sociales (CROUS) de Ziguinchor, en remplacement de Monsieur Mamadou DIOMBERA, appelé à d’autres fonctions
Docteur Anta Sarr DIACKO, est nommée, Présidente du Conseil d’Orientation du Fonds de l’Habitat social, au Ministère de l’Urbanisme, du Logement et de l’Hygiène publique."