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25 avril 2025
Diaspora
GUY MARIUS SAGNA, ACTIVISTE OU ANARCHISTE ?
Les discours enflammés du député sénégalais au parlement de la CEDEAO remettent en cause le statu quo et obligent l'institution à se remettre en question. Une bouffée d'air frais pour certains, une menace pour d'autres
Le député Guy Marius Sagna est en train de jeter manifestement un pavé dans la mare du parlement de la CEDEAO. Toutefois, si certains africains découvrent les thèses anticolonialistesdu parlementaire sénégalais qui ont fortement secoué le parlement de l'organisation sous régionale, force est de dire que Guy Marius Sagna n'a pas varié sur ses convictions de gauche souverainiste et anti-impérialistes qui sont la trame de son engagement politique.
La CEDEAO doit une fière chandelle au député Guy Marius Sagna qui l’a remise au-devant de l’actualité du continent. Avec ses interventions enflammées contre le parlement de l'organisation sous-régionale créée en 1975,Guy Marius Sagna a permis de rendre attractive cette session dont les débats houleux alimentent les chaumières africaines. Connu pour sa fougue, son franc-parler et son combat contre l'impérialisme occidental, le député sénégalais est resté inflexible au parlement de la CEDEAO. Dénonçant ainsi la léthargie et la dépendance de ladite organisation qui n'arrive pas à impulser de vraies dynamiques dans la sous-région.
Sans concession, il a notamment indiqué que cette législature risque d'être la dernière si la CEDEAO n'opère pas de véritables changements. Le tout dans un phrasé et un ton véhément qui ont ravi certains et sidéré d'autres, poussant même à des altercations qui ont fait le tour des réseaux sociaux.Héros et héritier des panafricanistes pour plusieurs observateurs, impertinent et téméraire pour d'autres, les interventions de Guy Marius Sagna suscitent la polémique. Enseignant-chercheur à l'UGB, Moussa Diaw salue la posture iconoclaste du parlementaire sénégalais.
'' Il bouscule les habitudes ''
Disséquant les différents discours de Guy Marius Sagna, il soutient : '' Il bouscule les habitudes au niveau du Parlement de la CEDEAO''.Àl'en croire, les africains n'ont pas l'habitude de voir et d'entendre ces genres d'interventions au niveau de la CEDEAO. '' Son discours est un langage inhabituel'', renchérit le politiste non sans indiquer que les africains avaient l'habitude d'entendre des discours policés sous-tendus par des intérêts partisans. Les représentants viennent souvent, d'après lui, avec idées égoïstes. '' Guy Marius Sagna a le mérite de pousser à la réflexion et au débat '', trouve Diaw dans un entretien téléphonique accordé à L’AS. Par ailleurs, il a fait savoir que l'activisme du Sénégalais transcende les régimes. ''C'est idéologique et cela représente presque les néomarxistes'', note Moussa Diaw. Abondant dans le même sens, le directeur de Legs Africa signale queGuy Marius Sagna est un député qui fait un excellent travail.
'' Avec lui au moins, on est au courant de l'existence de ce parlement de la CEDEAO qui en réalité perpétue les chaînes de l'aliénation contre la souveraineté ''.
'' En tant que véritable représentant des peuples africains mais aussi du peuple sénégalais, avec lui au moins,toutle monde est au courant de l'existence du parlement de la CEDEAO qui, en fait, n'est pas très utile et colporte les chaînes de l'aliénation contre la souveraineté'', déclare Elimane Kane, lui-aussi interpellé par L'AS. Et le très chevronné membre de la société civile d'ajouter : '' Je pense que le travail qu'il est en train de faire là-bas consiste à poser de véritables questions qui sont des questions qui interpellent tous les décideurs à travers nos représentants dans ce parlement ''. De son avis, Guy Marius Sagna reste fidèle à son discours anti-impérialiste, à son discours souverainiste. Il invite simplement, d'après Elimane Kane, les africains à prendre leur destin en main. '' Guy Marius Sagna est aujourd'hui un député qui mérite d'être appuyé et soutenu par tous ceux qui travaillent pour la souveraineté et qui veulent sortir l'Afrique de ces dépendances stratégiques'', souligne-t-il avec véhémence. Très influencé par les partis de Gauche, Guy Marius Sagna incarne-t-il cette pensée dans ses actions ? Moustapha Senghor pense que ça ne sonne pas comme une évidence.
'' Je ne sais pas comment on peut considérer Guy Marius Sagna comme quelqu'un qui incarne la gauche sénégalaise et africaine ''
Le président des jeunes de la Ligue Démocratique indique effectivement que Guy Marius Sagna peut avoir une pensée et une attitude dignes d'un homme de Gauche. '' Mais il faudra faire le distingo entre la pensée de l'individu et la structure à laquelle il appartient. Jusqu'au moment où je vous parle, Guy Marius Sagna n'a jamais été identifié parmi les membres de la gauche au Sénégal. Structurellement, on ne l'identifie pas comme quelqu'un qui constitue un fer de lance de la gauche au Sénégal '', révèle-t-il. Dans ce cadre, il rappelle qu'ils ont tenu l'année dernière les Assises de la gauche plurielle. Mais il ne connaît pas, insiste-t-il, un de ses représentants qui a participé à cette rencontre. ‘’Guy Marius Sagna n'a pas participé à cette rencontre. Je ne sais comment on peut le considérer comme quelqu'un qui incarne la gauche sénégalaise et africaine '', fulmine-t-il. Selon lui, il est difficile de faire la différence entre les idées de gauche etles structures.
Par Hamidou ANNE
JOE BIDEN ET LE TRAIN DE L’HISTOIRE
A chaque fois que le fascisme rôde, les démocrates voient leur responsabilité indexée. Ils choisissent de collaborer ou de faire face. Le président américain a montré le chemin. Son camp doit être digne de son sacrifice
Joe Biden a décidé de jeter l’éponge ce dimanche, après des mois de doute sur sa capacité à se représenter. Son débat calamiteux face à Donald Trump le 27 juin dernier, son état de santé, ses trous de mémoire et sa fragilité avaient convaincu bon nombre de ses partisans à réclamer de plus en plus ouvertement son renoncement. Finalement, le président américain a cédé à la pression et s’est montré à la hauteur de l’histoire. Dans sa lettre, Biden affirme : «Bien qu’il ait été dans mon intention de me représenter pour un nouveau mandat, je crois qu’il est dans l’intérêt supérieur de mon parti et du pays que je me retire et me concentre uniquement sur l’accomplissement de mes devoirs de Président pour le reste de mon mandat.» Les hommages se multiplient, d’abord chez les Démocrates, puis dans le monde, du fait de la grandeur du geste bidenien, des enjeux colossaux pour son pays et pour l’humanité, car en face, Donald Trump semblait marcher tout droit vers la Maison Blanche, surtout après la tentative d’assassinat dont il a été victime. L’ancien président, qui a échappé miraculeusement à la tragédie, renforce son aura dans son camp, et la photo le montrant combatif alors qu’il a le visage ensanglanté au milieu d’une nuée d’agents du Secret Service, tranche avec la fébrilité d’un Biden au pas lent, à la diction inaudible et au propos incompréhensible. L’Amérique, qui s’est construite sur l’image d’un pays puissant et insubmersible, ressemblait davantage, ces dernières semaines, à Trump qu’à un Biden affaibli.
Récemment, j’expliquais à une amie journaliste, qui me proposait de commenter les rumeurs de retrait de Biden, mon refus d’aborder ces sujets relatifs à l’âge, même pour des hommes publics, et au déclin physique qui l’accompagne. C’est avec une grande peine que je lisais les moqueries sur l’âge de Biden, ses bourdes, comme par exemple quand il appelle le président ukrainien «Poutine». Ce n’est pas ma conception du commentaire politique, ni de la vie tout court. Aussi, j’ai toujours eu une forme d’estime pour Joe Biden, son parcours, son sérieux et la ténacité de ses combats malgré des drames qui ont ponctué sa vie personnelle. En 1972, à peine élu au Sénat et avant même de prêter serment, il perd son épouse et sa fille dans un accident de voiture. Pendant 36 ans, Joe Biden rentrait quasiment tous les soirs par le train Washington Dc–Delaware, pour être au chevet de ses deux garçons. La gare où le train marquait son arrêt dans le Delaware fut renommée «Joe R. Biden, Jr. Railroad Station». En 2015, il perd son autre fils «Beau» Biden, mort à 46 ans d’un cancer du cerveau. Biden est un homme décent, un démocrate progressiste, rigoureux et ouvert, de tous les combats de l’aile progressiste de son parti. Après un mandat de quatre ans, il laisse un bilan jugé positif par de nombreux observateurs avertis. En effet, Biden a par exemple soutenu la hausse des salaires des classes moyennes et lancé un vaste plan de réindustrialisation verte. A ce sujet, il a fait revenir les Etats-Unis dans l’Accord de Paris sur le climat que Trump avait dénoncé. Il a su juguler les conséquences tragiques de la crise du Covid-19, qui avait été gérée de manière assez calamiteuse par son prédécesseur. Biden a su aussi faire revenir l’Amérique dans une forme de sérénité dans la relation avec le monde. Au contraire d’un Trump qui, entre autres propos racistes et xénophobes, considérait les Etats africains «comme des pays de merde».
Ce que je retiendrai le plus dans la décision historique de Joe Biden est sa responsabilité attendue d’un homme d’Etat, qui dirige en plus la première puissance mondiale. Il a su se surpasser, aller au-delà de son idiosyncrasie pour placer le destin de son pays au-dessus. Conscient du danger pour l’Amérique et le monde que représenterait un retour au pouvoir de Donald Trump, Biden a décidé d’agir. Toutes les études le donnaient perdant face au candidat républicain, homme particulièrement dangereux et inapte à gouverner. Biden n’a pas voulu être le marchepied du fascisme et a décidé d’en être un rempart. Ces mots de l’acteur africain-américain Wendell Pierce expriment justement ce que je pense de la décision de Biden : «La décision historique prise aujourd’hui par le président Biden est un acte patriotique désintéressé. Il s’en est remis à ce qu’il jugeait être le mieux pour son parti et son pays. Il a sauvé cette Nation il y a quatre ans, au milieu d’une pandémie, d’une crise économique et d’une crise constitutionnelle après une insurrection contre le gouvernement. Aujourd’hui, nous sommes plus forts qu’à l’époque. L’héritage du président Biden consistera à sauver la démocratie du fascisme américain. Je lui en serai éternellement reconnaissant.»
Si Trump, enragé et plus inquiétant que jamais, est une nouvelle fois défait, cette fois en novembre par Kamala Harris, il ne faudra pas oublier la décision historique du dimanche 21 juillet de Joe Biden, homme d’Etat respectable et estimable. A chaque fois que le fascisme rôde, les démocrates voient leur responsabilité indexée. Ils choisissent de collaborer ou de faire face. Biden a montré le chemin de comment réagir face à la menace fasciste, son camp doit être digne de son sacrifice. En Afrique et partout ailleurs, le geste de Joe Biden doit aussi nous inspirer pour toujours être en première ligne quand il s’agit de combattre le fascisme dont la finalité est la promotion de la guerre civile
Par Mamadou Omar NDIAYE
BRAVO PRESIDENT, CHAPEAU PREMIER MINISTRE
« Su fi yemoon saxmu neex » ! Oui, Monsieur le président de la République, oui M. le Premier ministre, si votre bilan en matière de presse devait s’arrêter aux mesures que vous avez déjà prises dans ce secteur, eh bien il serait déjà largement positif
Nous citons volontiers Youssou Ndour chantant la performance des « Lions » du football dans une Coupe du Monde, pour dire au président de la République et à son Premier ministre ceci : « Su fi yemoon saxmu neex » ! Oui, Monsieur le président de la République, oui M. le Premier ministre, si votre bilan en matière de presse devait s’arrêter aux mesures que vous avez déjà prises dans ce secteur, eh bien il serait déjà largement positif ! Car les mesures de nettoyage des écuries d’Augias que vous mettez en œuvre depuis votre arrivée au pouvoir sont de salubrité publique et vont incontestablement dans le bon sens. En ordonnant le gel de toutes les conventions signées par des ministères et des sociétés nationales avec des entreprises de presse — dont la plupart ne le sont que de nom— , le temps d’y voir clair, vous avez démontré votre volonté d’instaurer une transparence dans l’utilisation de l’argent public. Lequel, à travers ces conventions signées avec des individus entrés par effraction dans le secteur de la presse, servait à les enrichir sans cause. A coups de dizaines de millions de francs parfois pour des sites souvent fantômes et qui n’étaient créés que pour pouvoir justifier la signature de conventions. Et, donc, le versement d’argent public à des copains, des coquins, des condottiere. La plupart du temps, la contrepartie à ces libéralités financières — encore une fois avec de l’argent public ! —, c’était d’insulter copieusement les opposants, en premier lieu Ousmane Sonko et le Pastef. De les calomnier, de les diffamer, de les vilipender. A cette fin, nos larrons et donzelles étaient généreusement stipendiés à travers des ministères et des sociétés nationales.
C’était la même chose avec le Fonds d’aide à la presse dont une bonne partie passait dans les comptes bancaires des fonctionnaires chargés de le distribuer à travers des sites d’ « information » fictifs. Un fonds qui, au fil des années, a été détourné de sa vocation initiale de soutien aux entreprises de presse pour, là aussi, stipendier des mercenaires de la plume ou de la voix. C’est si vrai que, pendant deux ans, notre société, « Le Témoin », qui a 34 ans et possède un quotidien et deux radios, a été zappé de cette distribution au prétexte qu’il n’a pas déposé de demande ! Et pour cause car nous n’avions pas voulu cautionner les magouilles en cours. Dire pourtant que Mamadou Oumar Ndiaye, notre directeur de publication, faisait partie des « quatre mousquetaires » (en plus de lui il y avait Abdoulaye Bamba Diallo et feus Babacar Touré et Sidy Lamine Niasse), ainsi qu’on les surnommait, qui avaient négocié cette « aide à la presse » avec l’ancien président Abdou Diouf par l’intermédiaire de Famara Ibrahima Sagna, alors ministre de l’Intérieur. C’était en 1990. Plus de 30 ans après, il s’est trouvé des fonctionnaires pour exiger du « Témoin » de déposer un dossier pour prouver qu’il est une entreprise de presse ! Comme disent les Wolofs, « lu sotti am borom »…
Il faut «geler» le fonds d’aide à la presse !
Qu’on nous comprenne bien : nous ne soutenons pas que des conventions ne doivent pas être signées avec la presse. Non ! Ce que nous disons, c’est que des critères clairs et stricts doivent être établis et que la transparence doit prévaloir. Encore que, pour en revenir au Fonds d’aide à la presse — on en a changé le nom mais c’est tout comme —, tel qu’il fonctionne actuellement, il créé un appel d’air et favorise la multiplication des journaux, radios, télévisions, sites et autres pour capter cette manne publique. Et plus l’Etat augmentera le montant de ce fonds, plus il y aura de supports qui prétendront à ce soutien financier. C’est le serpent qui se mord la queue et on ne s’en sortira jamais. Mieux, des employés de groupes de presse recevant cette subvention ou signataires de conventions avec des sociétés, créent eux-mêmes des sites et bénéficient à leur tour et de la subvention et de conventions ! Au même titre, encore une fois, que le groupe qui les emploient. La République et décidément bonne fille…
C’est pourquoi, pensons-nous, à défaut de pouvoir le faire pour les conventions avec les ministères et les sociétés nationales — ce qui serait hautement salutaire pourtant — ce serait une bonne chose de « geler » ce Fonds d’aide à la presse ne serait-ce que pendant une année pour remettre les choses à l’endroit. Autrement dit, faire un « jubanti » là aussi. Si cela n’était pas possible, nous suggérerions de tout centraliser au niveau de la Primature et que toutes les conventions avec toutes les entreprises de presse y soient validées. Cela permettrait de contrôler l’utilisation de l’argent public dans le secteur de la presse et de la communication. Et aussi de laisser la loi du marché réguler tout cela.
En attendant, qu’il nous soit permis une fois de plus de tirer notre chapeau au président de la République et au Premier ministre pour le travail d’assainissement de la presse qu’ils ont entrepris depuis trois mois. Un travail qui aurait dû, pourtant, être l’œuvre des professionnels du secteur eux-mêmes !
par l'éditorialiste de seneplus, ibe niang ardo
COUP DE SEMONCE DU CHARRETIER AU MODERNISME
EXCLUSIF SENEPLUS - Un charretier nargue ouvertement policiers et citoyens en empêchant le passage du BRT. Au-delà de cette forfaiture intolérable, cette scène révèle les limites d'une jeunesse et d'un État démissionnaires face à l'incivisme
Ibe Niang Ardo de SenePlus |
Publication 22/07/2024
Vous avez été nombreux à réagir à ma chronique sur les mendiants conforté en moi l’idée qu’il y a des maux, hors du mesquin tintamarre politicien, qui suscitent l’engouement de la population civile. Ces maux voilés par une piteuse condescendance des autorités et hommes politiques partisans, ont besoin de mots réconfortants, tranchants pour les mettre à nu afin que nul n’en ignore.
La seule réponse du citoyen à l’indécence est le refus doublé d’indignation
Aujourd’hui j’ai pour motif un fait grave, inacceptable, dont les images hideuses circulent sur les réseaux sociaux, consistant en un charretier qui soulève sa charrette et la fait traverser les lignes interdites du BRT, entravant ainsi le passage du Bus de transit. Voilà donc un quidam qui, d’après celui qui a pris la vidéo, répète son forfait de plein jour chaque fois que l’envie lui en prend, sans coup férir. L’auteur de la vidéo que je remercie au passage, interpelle l’indifférence des policiers. Cependant, le dilemme du policier qui fait de lui un démissionnaire est qu’il se sait démuni face à un attelage de cheval et charrette encombrant, conduit par un cynique charretier qui s’en donne à cœur joie de son impuissance en le narguant.
Par contre dans le décor, on aperçoit des citoyens contrariés qui, comme anesthésiés, observent avec désolation, alors qu’il leurs aurait suffi de se lever et faire barrage pour empêcher cette forfaiture de s’accomplir. Imaginez la différence s’ils avaient eu le comportement convenable, quel impact aurait eu une vidéo d’une telle scène pour le civisme, le patriotisme et le courage. Face à l’indécence dans l’espace public, tout acte du citoyen en deçà d’un refus indigné catégorique est un déficit ou une trahison des normes et vertus civiles inhérentes en nous-mêmes.
La jeunesse responsable est partie prenante d’un pacte de maintien des acquis.
Sur un autre aspect, l’incroyable paradoxe de cette scène réside dans les acteurs en cause, le lieu et le temps.
Les acteurs : de vigoureux jeunes passants ou habitants du voisinage,
Le lieu : il est le même que là où s’est déroulé plusieurs fois de suites des affrontements sanglants entre la jeunesse et les forces de sécurité et de défense
Le temps : l’espace-temps entre l’un et l’autre événements relatés n’est que de peu de mois.
Donc en rapprochant des événements qui se sont déroulés dans un même lieu en l’espace d’un an à peine, avec les mêmes acteurs, nous essayons de comprendre le bon sens et la raison des actes posés.
Quand les jeunes risquaient leurs vies face à des gendarmes armés n’était-ce pas pour une meilleure qualité de vie promise par leur leader ?
Ces infrastructures en train d’être vandalisées devant ces mêmes jeunes des mois plus tard ne participent-elles pas à cet objectif de meilleure qualité de vie ?
La même personne qui se joint aux foules au péril de sa vie, au gré de l’appel d’un leader, n’est pas prête à lever le plus petit doigt à l’encontre d’un délinquant à ses œuvres, devant sa propre demeure. Voilà la triste révélation.
Non ! Ce n’est pas ce qu’on attend de cette jeunesse capable de beaucoup de choses. Il lui faut nous servir autre chose de mieux, donner un sens civique à son engagement et avoir le courage patriotique d’engager des actes spontanés de solidarité de maintien des acquis, dans l’espace public. Il n’est besoin d’aucune organisation préalable pour ça, il suffit de peu de gens qui l’exercent pour que le processus dit du “cercle d’expansion” fasse le reste et répande partout la nouvelle norme. Les jeunes doivent à présent prouver que leur mobilisation n’est pas un inconditionnel acquis à une stratégie de patriotisme aux relents de populisme, dépourvu d’appel à la raison. Le patriotisme c’est aussi prendre ses responsabilités selon ses convictions et principes dans la discrétion, sans triomphalisme. Lorsque par exemple on est quatre jeunes vigoureux en train de deviser au coin d’une rue et qu’un délinquant se mette tout d’un coup à vandaliser les ouvrages publics, attendre la police n’est pas une option, il faut le mettre hors d’état de nuire avant que les dégâts ne s’aggravent.
Ceci dit, pour solutionner ces incivismes lamentables, il appartient à l’État de mettre ses agents à l’abris d’une submersion par tout type de délinquance, en les dotant de moyens performants. Par exemple, face à ces charretiers, qui ne tiennent leur aberrante réalité au cœur de notre capitale que de la défaillance chronique des autorités, les moyens performants pourraient consister en maîtres-chiens en circulation, menottes pour tous les policiers afin qu’ils puissent dans pareils extravagances, menotter le charretier à son attelage le temps qu’un remorqueur vienne les conduire en un lieu idoine.
Cet appel à la responsabilité est une invite à de l’environnementalisme et à une stratégie d’épanouissement durable, en réponse à la stratégie de chaos gratuit ambiante.
Ibe Niang Ardo est président du Mouvement citoyen Jog Ci.
LES MAGISTRATS S'OPPOSENT À L'ÉLARGISSEMENT DU CONSEIL SUPÉRIEUR DE LA MAGISTRATURE
Le maintien du président à la tête du Conseil supérieur de la magistrature est une ligne rouge pour les juges sénégalais. Sa présidence consolide au contraire le dialogue entre l'exécutif et le judiciaire, estiment-ils
Le président de la République doit présider le Conseil supérieur de la magistrature (CSM). Tel est l’avis de magistrats qui s’opposent à l’élargissement du conseil à des acteurs de la société, tel que préconisé dans les conclusions des assises nationales de la justice. Ils pensent que cette formule est impertinente et dénudée de tout sens. En lieu et place, ces magistrats proposent un Haut conseil de la justice qui sera ouvert à tous les acteurs de la société.
Alors que le président Bassirou Diomaye Faye est dubitatif sur sa présence ou non au sein du Conseil supérieur de la Magistrature (CSM), du côté des magistrats, la question semble tranchée : le chef de l’Etat doit présider le CSM. Dans les chaumières, le débat fait rage. Les magistrats ont déjà répondu à la question du chef de l’Etat, cela avant même l’assemblée générale de l’Union des magistrats du Sénégal (UMS) prévue le 10 août prochain. Si le président de la magistrature dit être accroché à la position des magistrats, celle-ci est très claire. Elle s’oppose à tout retrait du président du Conseil. Selon des sources de «L’As», les avis sont unanimes sur la question. Le président doit continuer à présider le conseil supérieur de la Magistrature. Pour la simple raison que sa présence ne constitue aucunement un obstacle à l’indépendance de la justice. Au contraire, elle évite le cloisonnement des pouvoirs et consolide le dialogue des pouvoirs. En effet, le président de la République a prêté serment d'être, durant son mandat, garant de l’indépendance de la justice en général et de la Magistrature en particulier. Et ces derniers, jouissant de leur position de fonctionnaires avec un statut spécial, reçoivent au nom des sénégalais le serment du président de la République et rendent justice en se fondant sur les lois en vigueur. Ainsi, ils estiment que si l'état de droit se mesure par la séparation des pouvoirs, il n’en demeure pas moins que cette séparation ne doit pas être absolue. En réalité, les pouvoirs doivent se parler. D’autant plus que dans un État de droit, le pouvoir exécutif a toujours besoin du pouvoir judiciaire et inversement. Dès lors, il est nécessaire qu'ils se rencontrent, se parlent pour une meilleure distribution de la justice. Sous ce rapport, le CSM offre un cadre de rencontre et de discussion. D’ailleurs, c'est ce que le législateur sénégalais a compris pour avoir organisé les rencontres sur convocation du président de l’exécutif et leur périodicité dans l’année. Selon certains magistrats, le président de la République, en se retirant du Conseil supérieur de la Magistrature, risque de briser son serment de garantir l'indépendance de la Magistrature. Pis, soutenir pour eux le retrait du président de la République du CSM au nom de l’indépendance de la justice et de la séparation des pouvoirs, pour le compenser avec l'ouverture à de tiers, relève d'une méconnaissance du rôle des parties prenantes et des pouvoirs dont disposent les destinataires des mesures prises. Car le CSM doit rester un cadre de rencontre fermé dédié uniquement aux magistrats.
Mise en place d’un Haut conseil de la justice ouvert
En lieu et place d’un CSM ouvert, les magistrats proposent un haut conseil de la justice, tel que préconisé dans les conclusions des assises de la justice. Il s’agit d’une institution constitutionnelle au sein de laquelle acteurs et usagers vont désormais assurer un contrôle du bon fonctionnement du système judiciaire. Étant convaincu que l’autorité suprême ne peut au nom de la loi se faire substituer par des tiers dont la présence encourage le lobbying dans un conseil jusque-là épargné de tout clivage, les magistrats indiquent que l'ouverture du CSM ne doit pas être pour certains de ses partisans un moyen pour favoriser la mainmise de puissance étrangère sur notre système judiciaire. Pour eux, ouvrir le conseil, c'est l’exposer à la merci d'intérêts catégoriels. Ce qui serait un risque fort pour une souveraineté judiciaire. Différent du CSM, le Haut Conseil sera ouvert aux magistrats, aux avocats, aux notaires, aux huissiers de justice, aux commissaires-priseurs, aux greffiers, aux universitaires, aux journalistes, à la société civile etc. Il agira dans l’intérêt des justiciables pour une meilleure distribution de la justice, sa mission et ses pouvoirs étant précisés.
par Tierno Monénembo
QU’EST-IL ARRIVÉ AU GÉNÉRAL SADIBA COULIBALY ?
La vérité, c’est qu’après avoir accaparé, un à un, tous les leviers du pouvoir, Mamadi Doubouya a mis à jour la machine à tuer héritée de son mentor, Sékou Touré. Nos tyrans ne tombent pas du ciel. Ils viennent de notre lâcheté collective
Tout est bizarre dans cette affaire et d’abord, son arrestation et sa condamnation. Si notre Général avait commis quoi que ce soit de répréhensible (un acte de rébellion par exemple), on l’aurait régulièrement arrêté et au grand jour, déféré devant un tribunal militaire.
Au lieu de cela, son domicile est assiégé un beau matin et, sans sommation, arrosé de tirs nourris. Pris de panique, il se rend de lui-même à la Présidence pour solliciter des éclaircissements. Il est détenu sur-le-champ et condamné à cinq ans de prison pour « désertion à l’étranger et détention illégale d’armes » puis déchu de son titre de Général et exclu de l’armée.
« Désertion à l’étranger », c’est celle-là, la deuxième bizarrerie. Qu’est-ce que cela veut dire ? Que notre officier supérieur a déserté l’armée pour se réfugier à l’étranger ou que notre Chargé d’Affaires à notre ambassade à Cuba a quitté son poste sans autorisation ? Dans ce cas, désertion ou abandon de poste ?
Autre chose qui a du mal à passer dans mon ciboulot de pauvre chroniqueur : « détention illégale d’armes ». En effet, dans ma modeste compréhension de la chose militaire, rien de plus normal qu’un Général soit armé, c’est pour cela d’ailleurs qu’on le paie. En tout état de cause, ses avocats sont formels : il a prévenu son ministre de tutelle de sa venue au pays, et pris la peine de lui rendre visite dès son arrivée à Conakry. Il se trouve où, le crime ?
Mais passons. Condamné à cinq ans de prison, dégradé puis rayé de l’armée, Sadiba Coulibaly qui, de ce fait, n’était plus, comme vous et moi, qu’un citoyen lambda, est détenu dans un lieu secret et non, comme il se doit à « l’hôtel Cinq Etoiles de Coronthie ». Et voilà que dans un communiqué qui pue le malaise, et daté seulement du 25 juin, le tribunal militaire de première instance de Conakry, nous annonce le décès du condamné, décès survenu, tenez-vous bien, le 22 du même mois, soit trois longs jours après le drame. Vous avez compris ?
L’ancien chef d’Etat- major de notre armée est mort le 22, son certificat de décès a été signé le 24 et c’est seulement le 25 que l’on se décide à nous le communiquer. Mais oublions un moment la ronde fastidieuse des dates et lisons ce que dit le médecin-légiste : « le décès pourrait être imputable à un psycho-traumatisme important et un stress prolongé qui sont à l’origine d’une arythmie cardiaque majeure ayant entraîné une défibrillation et un arrêt cardiaque ». Non, ce n’est pas une erreur, c’est bien ce qui est écrit : « le décès pourrait être imputable ». Ah, quand la vérité scientifique se met au conditionnel ! On a envie de dire : « merci Docteur mais de grâce, inventez-nous autre chose ! Un Général d’armée formé dans une des plus belles académies américaines (sain d’esprit et de corps, qui plus est !), mourir de stress, sans aucun choc physique ou électrique, ce n’est pas une autopsie, c’est une histoire à dormir debout !
Il a circulé, peu de temps après l’enterrement du Général, un papier évoquant un suicide. On aurait découvert dans le smartphone du défunt un projet de coup d’Etat et celui-ci se serait suicidé, pris de remords. Un projet de coup d’Etat dans un téléphone portable, une gaminerie à laquelle les Pieds Nickelés eux-mêmes n’auraient pas pensé !
La vérité, c’est qu’après avoir accaparé, un à un, tous les leviers du pouvoir, Mamadi Doubouya a mis à jour la machine à tuer héritée de son mentor, Sékou Touré. Aujourd’hui, c’est Sadiba Coulibaly ; demain, ce sera toi, moi ou quelqu’un d’autre. En tout cas, nous savons tous maintenant que nos tyrans ne tombent pas du ciel. Ils viennent de notre lâcheté collective.
Au moment où j’écris ces lignes, deux braves combattants du FNDC, Foniké Mengué (encore lui !) et Billo Bah ont été kidnappés par des gradés en cagoule et conduits manu-militari, en un lieu inconnu. Dans quel état, nous les rendront-ils ? Dans un état de psycho-traumatisme important ?
par l'éditorialiste de seneplus, Arona Oumar Kane
ASSEMBLÉE NATIONALE : LE SOUVERAIN DÉRIVÉ, UN MODÈLE INEFFICACE ET DÉPASSÉ
EXCLUSIF SENEPLUS - Le parlement est la seule corporation où on accepte des individus dépourvus de compétences nécessaires. Les régimes successifs ont fait régresser ce pilier essentiel de nos institutions et détourner de ses objectifs originels (1/2)
Arona Oumar Kane de SenePlus |
Publication 21/07/2024
Le Souverain dérivé, un modèle inefficace et dépassé
L’analyse des listes de candidats investis aux élections législatives sénégalaises de 2022 révèle une anomalie statistique majeure qui permet de comprendre la faiblesse du niveau constaté chez les parlementaires de cette nouvelle législature. Les deux professions les plus représentées sur ces listes, telles que mentionnées dans la publication officielle du Conseil constitutionnel, sont : “COMMERÇANTE” (212 occurrences) et “MÉNAGÈRE” (164 occurrences). Il s’agit probablement du même profil, qu’on pourrait résumer par “FEMME D’AFFAIRES”. En retirant la variable “sexe” et en fusionnant avec les professions “COMMERCANT”, “OPÉRATEUR ÉCONOMIQUE” et “OPÉRATRICE ÉCONOMIQUE”, on arrive à une majorité écrasante de candidats et candidates à la profession floue mais qu’on peut situer dans le monde des affaires au sens informel du terme. Les professions “JURISTE” (24 occurrences), “INGÉNIEUR” (20 occurrences) et “COMPTABLE” (14 occurrences) suivant loin derrière, cela donne une idée assez précise du problème (voir le graphique en illustration de l’article).
Cette répartition[1] se retrouve, à peu de choses près, dans toutes les coalitions qui ont concouru à ces législatives de juillet 2022, à l’exception de Yewwi Askan Wi, où la profession COMMERÇANTE, toujours en tête, est suivie de la catégorie ENSEIGNANTE et le profil MÉNAGÈRE se tient en quatrième position derrière ENTREPRENEUR, autre profession au contenu aléatoire.
Fondements historiques du mode de représentation parlementaire
L'article 3 de la Constitution de la République du Sénégal dispose : "La souveraineté nationale appartient au peuple sénégalais qui l’exerce par ses représentants ou par la voie du référendum".
Ce dogme institutionnel, hérité de la Constitution de la Ve République française - elle-même lointain résidu de la Révolution de 1789 et des théories du Contrat social élaborées par des penseurs comme Rousseau - est la base théorique qui légitime l'existence du pouvoir législatif. L'évolution de la notion de souveraineté, dans l'histoire politique moderne, est en effet marquée par l’affirmation d’un "Souverain originel" qui réside dans le peuple. Ce dernier délègue sa souveraineté à un "Souverain dérivé", incarné par des structures gouvernementales, dont l'Assemblée nationale.
Ainsi, dans le cas du Sénégal, les députés, élus au suffrage universel, concourent à l’incarnation de cette souveraineté dérivée qui les dote, le temps d'une législature, de la prérogative de prendre des décisions à la place du peuple ; ce transfert de souveraineté partant d’un postulat simple : les décisions prises par le Souverain dérivé sont censées refléter la volonté générale. La mission ainsi dévolue au parlementaire recouvre différentes activités parfois schématisées sous la forme d’un triptyque : Représenter, Légiférer, Contrôler.
Cet article propose d’ouvrir un débat sur la pertinence de ce modèle dans le contexte actuel, d’y poser un regard froid et lucide pour en faire l’évaluation et proposer un modèle alternatif qui pourrait permettre de résoudre des problèmes structurels qui sont autant d’entraves au développement de notre pays et à l’émergence d’un véritable État de droit.
Dérives du modèle actuel
Le fonctionnement actuel de notre démocratie parlementaire révèle des failles significatives dans ce mode d’exercice de la souveraineté populaire. L'Assemblée nationale, bien qu'élue par le peuple, est souvent perçue comme déconnectée de ses électeurs. Pire encore, le jeu des majorités tend à placer le Législatif sous le contrôle de l'Exécutif, entravant la séparation des pouvoirs, essentielle à toute démocratie. Ce phénomène est exacerbé par la relation de très forte dépendance - alimentaire - des parlementaires vis-à-vis du chef de l’Exécutif qui, jusqu’à l’avènement du président Bassirou Diomaye Faye, était également chef du parti ou de la coalition majoritaire et principal pourvoyeur de privilèges. Ainsi, la prise en compte véritable des aspirations du peuple n’est pas une réalité dans l’action parlementaire, comme le montrent la fâcheuse tentative de coup d’Etat constitutionnel du 3 février 2024 et les récents soubresauts dans les relations entre la majorité parlementaire BBY, issue des législatives de 2022, et le nouvel exécutif, incarné par le président Bassirou Diomaye Faye.
Le porte-parole du nouveau gouvernement s’est récemment pris une volée de bois verts de la part des membres de l’opposition pour avoir déclaré, en substance, que censurer le gouvernement Sonko équivaudrait à ne pas respecter la volonté populaire. Même si M. Ndieck Sarré s’est exprimé de façon maladroite - il faut reconnaître qu’il n’a pas le talent oratoire d’un Seydou Gueye ou d’un Abdou Karim Fofana - sa réflexion est pertinente. En effet, si l’unique source de légitimité des parlementaires est la volonté populaire, alors il est normal d’attendre d’eux qu’ils se soumettent à la version la plus récente de celle-ci, à savoir celle sortie des urnes le 24 mars 2024. Ainsi, le respect de cette volonté générale devrait non seulement les contraindre à se retenir de toute tentation de motion de censure contre le gouvernement Sonko, mais ils devraient même aller plus loin et faciliter l’action du nouvel Exécutif en votant tous les textes soumis par celui-ci pendant cette période transitoire imposée par les délais de dissolution. Malheureusement, au vu du récent acte de blocage - de sabotage - du débat d’orientation budgétaire, qui devait légalement se tenir avant la fin de la session ordinaire, on constate que cet alignement sur la toute dernière volonté du peuple n’est pas à l’ordre du jour.
L’un des principaux problèmes que révèle notre étude est la perte de qualité dans les profils des parlementaires au fil des ans. Il est fréquent d’entendre dire que la représentation nationale est un reflet de la société dans sa globalité, une sorte de “microcosme à l’image du pays”, diront certains. L’idée sous-jacente étant de dire que s’il y a des gens brillants et des médiocres parmi nous, il est normal qu’on en retrouve des échantillons représentatifs à l’Assemblée nationale. Cette assertion est d’autant plus injuste que le spectacle que nous offrent nos représentants sur les bancs de l’hémicycle depuis quelques législatures est bien loin de refléter la distribution globale de ces caractéristiques dans la société.
Il est aussi communément admis, dans notre pays, cette incroyable idée qu’il n’est pas nécessaire de savoir lire et écrire pour devenir député. Et donc, un législateur peut être dispensé de l’aptitude à lire, voire à comprendre, les textes de lois qu’il est censé créer, modifier, supprimer - ou, selon le jargon consacré, voter, réviser, abroger. Ainsi, le parlement est la seule corporation où on accepte le recrutement d’individus dépourvus des compétences nécessaires à l’exercice du métier. Le plus important, en ce qui est exigé d’eux, c’est de faire des discours et de voter. Jusqu’à quand va-t-on continuer avec cette aberration ? C’est tout comme si on acceptait dans les hôpitaux le recrutement de médecins qui ne savent pas soigner les malades mais dont l’activité se limiterait essentiellement à causer entre eux et à signer des bulletins d’admission et des certificats de décès !
L’autre mission dévolue au parlementaire, en plus de celles de légiférer et de représenter ses concitoyens, est celle de contrôler l’action du gouvernement et évaluer les politiques publiques. Cela suppose, bien entendu, une connaissance à minima des principes de base qui régissent le fonctionnement de l’Etat, de ses structures, de ses procédures et règles de gestion notamment des finances publiques. Mais, pas de souci, nul besoin de comprendre tout cela pour être parlementaire au Sénégal. Le plus important, c’est de savoir s’imposer dans le militantisme de terrain, et d’être capable de voter le moment venu pour contribuer au rapport de force politique, sous la houlette d’un chef de l’Exécutif qui donne le ton et tire les ficelles, en violation perpétuelle du principe constitutionnel de séparation des pouvoirs.
En toute objectivité, on peut admettre, pour assurer une représentativité la plus large possible, qu’il y ait effectivement parmi les élus du peuple des profils qui reflètent la diversité sociologique du pays. On doit ainsi pouvoir retrouver sur les bancs de l’Assemblée nationale des agriculteurs, des pêcheurs, des commerçants ou des éleveurs aux côtés de juristes, d’ingénieurs, d’enseignants, de comptables, etc. Mais le nombre d’élus analphabètes ou ayant un niveau d’instruction modeste devrait être contenu dans des limites raisonnables, c’est-à-dire au strict minimum, si l’on voulait se doter d’un parlement performant.
La mainmise des affairistes sur les investitures
Le maire d’une grande capitale régionale, docteur en droit de son état, et d’autres figures des coalitions avaient fait éclater au grand jour leur frustration d’avoir été mis sur la touche, et voilà que les données nous apprennent qu’ils l’ont été pour privilégier des individus aux profils surprenants, objectivement beaucoup moins légitimes pour exercer la fonction de parlementaire. Une Assemblée nationale de qualité devrait être majoritairement composée de juristes ou, tout au moins, de personnes ayant de solides connaissances en droit, ou étant en capacité de monter en compétence sur le sujet. L’ancien député Théodore Chérif Monteil de la 13e législature en est une illustration parfaite. Chimiste de métier, il s’est fait remarquer par sa maîtrise des procédures législatives et sa capacité à les rendre compréhensibles pour les profanes. La non réélection d’un parlementaire aussi doté, intellectuellement et techniquement, comparée à l’entrée dans l’hémicycle de certains individus, constitue en soi un bug de notre système électoral, une sorte de faille de sécurité institutionnelle sur laquelle nous gagnerions à nous pencher sérieusement.
La preuve de compétences avérées devrait être un critère gravé dans le marbre du code électoral pour empêcher les partis politiques d’investir n’importe qui et favoriser l’émergence et l’élection d’hommes et de femmes de qualité. Un tel critère de compétences eût été beaucoup plus pertinent et légitime que certains critères abusifs qui n’ont eu, jusqu’ici, d’autre utilité que de permettre au pouvoir en place d’opérer des manipulations politiques pour prendre l’avantage sur ses adversaires. Il est tout de même question de la manière de choisir les hommes et les femmes qui doivent décider des règles fondamentales qui régissent notre société et valider les importantes décisions qui engagent la Nation tout entière.
La question qui vient à l’esprit, à la découverte des statistiques sur la profession des candidats aux législatives, est de savoir pourquoi l’intérêt soudain de femmes et d’hommes d’affaires pour le service public, malgré les contraintes supposées sur la vie personnelle, la famille, le business et malgré tous les autres risques du métier ? On peut également s’interroger sur cette facilité pour ces personnes à obtenir l’investiture sur des listes où la guerre des responsables au sein des coalitions est d’ordinaire de rigueur pour obtenir une place en position éligible. La réponse à ces questions est sans doute à chercher dans ce que rapportent les protagonistes de cette alliance singulière et le profit que chacun en tire potentiellement.
Une coalition politique qui investit un commerçant ou une commerçante peut gagner en retour une contribution financière pour soutenir ses activités et un relais de mobilisation efficace, notamment dans les quartiers populaires, dans les familles, sur les marchés et dans la Diaspora. Les diplômes, l’éloquence ou la fougue de politiciens professionnels désargentés peuvent s'avérer insuffisants pour décrocher l’investiture. En contrepartie, une fois élus, ces honorables députés bénéficient d’un passeport diplomatique qui permet de voyager presque partout dans le monde sans les habituelles tracasseries des demandes de visas, avec en bonus un passage par le salon d’honneur de l’AIBD au départ et, si besoin, l'assistance des services diplomatiques et consulaires à l’arrivée. L’accès aux hautes sphères de l’Etat et la visibilité sont également une source potentielle de motivation. Par ailleurs, un parlementaire reçoit un petit médaillon doré sur la poitrine et une vignette sur le pare-brise, de précieux sésames qui, en plus du prestige qu’ils procurent en ville et dans les campagnes, ouvrent les portes des administrations. Enfin, l’immunité parlementaire, un véhicule de fonction, des indemnités, des milliers de litres de carburants et autres privilèges sont autant de bénéfices que confèrent l’obtention d’un siège de député.
On le voit bien, ce qui devait être un sacerdoce, un don de soi au service du pays, pourrait bien être devenu, pour certaines personnes, un moyen d’obtenir ou de consolider une position sociale confortable. Dès lors, la défense des intérêts du citoyen “ordinaire”, qui n’est qu’un instrument pour arriver à cette fin - une sorte de marchepied - devient secondaire. Voilà comment les régimes successifs ont fini par faire régresser l’un des piliers essentiels de nos institutions et le détourner de ses objectifs originels. Un pays qui aspire à l'Émergence ne saurait se payer le luxe de la régression parlementaire à laquelle nous assistons depuis quelques années et qui a pris des proportions inquiétantes avec cette 14e législature.
Liste des candidats aux Élections Législatives 2022 publiée, par le Conseil Constitutionnel
Statistiques et Graphiques SITOE Système Intégré de Traitement des Opérations Électorales, par Bangath Systems
Du Contrat Social ou Principes du Droit Politique, par J.-J. Rousseau
[1] Pour la lisibilité, seules les 20 professions avec le plus d’occurrences sont affichées sur le graphique.
BIDEN LÂCHE PRISE
Le président américain quitte la présidentielle dans la douleur, enterrant ses espoirs de second mandat. À 81 ans, le démocrate a cédé aux pressions l'appelant à renoncer, après une campagne minée par les soupçons sur sa santé
(SenePlus) - Dans un coup de théâtre sans précédent, le président américain Joe Biden a annoncé ce dimanche 21 juillet 2024, son retrait de la course à la Maison Blanche pour 2024. Cette décision choc, bien qu'attendue par certains, bouleverse complètement la campagne présidentielle à quelques semaines de la convention démocrate.
"Je pense qu'il est dans l'intérêt de mon parti et du pays que je me retire et que je me concentre uniquement sur l'exercice de mes fonctions jusqu'à la fin de mon mandat", a déclaré Biden dans un communiqué, ajoutant qu'il s'exprimerait plus en détail "plus tard cette semaine".
À 81 ans, le démocrate rejoint ainsi le cercle très restreint des présidents sortants ayant renoncé à briguer un second mandat. Mais il est le premier à abandonner aussi tardivement, et surtout le seul à le faire en raison d'interrogations sur ses capacités mentales.
C'est la performance calamiteuse de Biden lors du débat du 27 juin face à Donald Trump qui a précipité les événements. Dès les premières minutes, un Biden très affaibli, toussotant et s'emmêlant les pinceaux, a fait exploser au grand jour les doutes sur son âge avancé.
"Un spectacle douloureux", selon de nombreux démocrates, qui a fait fondre les sondages déjà défavorables au président sortant. Les appels se sont alors multipliés, d'abord en coulisses puis publiquement, pour qu'il jette l'éponge.
Selon les médias américains, des figures démocrates de premier plan comme Barack Obama, Nancy Pelosi, Chuck Schumer et Hakeem Jeffries, ont fait part en privé de leur inquiétude. En parallèle, les images d'un Biden positif au Covid-19 et peinant à descendre d'un avion ont achevé de miner sa campagne.
Il faut désormais trouver dans l'urgence un ou une remplaçante à Biden pour la convention démocrate mi-août à Chicago. Sa vice-présidente Kamala Harris serait un choix naturel, mais pas automatique. Le dernier mot reviendra aux 3.900 délégués du parti, pour la plupart inconnus du grand public.
Cette annonce intervient dans un contexte délicat pour les démocrates, Donald Trump semblant avoir repris l'avantage après avoir miraculeusement survécu à une tentative d'assassinat le 13 juillet. Le milliardaire républicain a depuis engrangé des victoires judiciaires et une nouvelle consécration lors de la convention de son parti à Milwaukee.
Pour le camp démocrate, l'équation est donc simple : trouver un candidat de dernière minute suffisamment populaire et dynamique pour contrer l'élan de Trump. Un défi de taille pour éviter une défaite potentiellement écrasante en novembre prochain.
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LIBÉRER LA JUSTICE DE L'EMPRISE PRÉSIDENTIELLE
Dès lors que la Constitution énonce la séparation des pouvoirs, le président de la République et le ministre de la justice ne doivent plus assurer la présidence et la vice-présidence du Conseil supérieur de la magistrature
Le Conseil Supérieur de la Magistrature, censé garantir l'indépendance du pouvoir judiciaire, est paradoxalement présidé par le chef de l'exécutif. Cette anomalie démocratique menace l'équilibre des pouvoirs et la crédibilité de la justice. Une réforme urgente s'impose pour restaurer la confiance des citoyens et renforcer l'État de droit au Sénégal.
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LE RÊVE OLYMPIQUE DE MBAGNICK NDIAYE
Après avoir porté haut les couleurs de son pays à Tokyo, le judoka des quartiers populaires de Dakar vise désormais le podium aux Jeux de Paris 2024, son idole Teddy Riner dans le viseur
(SenePlus) - Deux mètres, 137 kg et une détermination à toute épreuve : tel est Mbagnick Ndiaye, qui portera haut les couleurs du Sénégal lors des Jeux Olympiques de Paris 2024. Triple champion d'Afrique, le colosse sera à la recherche de sa première médaille olympique à domicile, comme l'a suivi France 24 dans sa quête.
Champion d'Afrique à trois reprises (2019, 2020, 2023), le judoka de 28 ans sera le leader de la délégation sénégalaise. Pourtant, son parcours olympique avait mal débuté à Tokyo l'été dernier, avec une défaite d'entrée face au Russe Tamerlan Bashaev. Mais cette fois, Mbagnick Ndiaye veut marquer l'histoire en décrochant un titre, le 2 août prochain dans le Grand Palais Éphémère.
C'est dans son quartier natal du Plateau, à Dakar, que tout a commencé pour le géant. Entraîné depuis l'âge de 8 ans au fameux dojo national sénégalais, berceau du judo local depuis les années 70, il y a forgé sa technique. Comme il l'a raconté à France 24 lors de son passage en novembre dernier pour l'Open de Dakar, remporté haut la main.
Désormais installé à l'Insep près de Paris pour peaufiner sa préparation, Ndiaye reste très attaché à ses racines. Il y retourne avant chaque compétition pour puiser la force dans les rues de son quartier, où il est adulé par tous. "C'est là où je suis né, où j'ai fait mes premiers pas. Ce quartier m'a tout donné, je le représente", a-t-il confié ému à France 24.
Sa quête pour décrocher le sésame olympique a également mené Ndiaye à dominer l'Afrique, devenant N°1 continental dans sa catégorie des +100kg. Une performance essentielle pour valider son billet pour Paris 2024.
Désormais, c'est le rêve ultime qui l'attend dans l'arène du Grand Palais. Celui d'affronter son idole Teddy Riner en finale, et peut-être, de rentrer au Sénégal auréolé d'une médaille historique. Le combat promet d'être homérique.