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27 avril 2025
International
POUR HOLLANDE, THIAROYE ÉTAIT UN MASSACRE
L'ancien président français rompt avec la version officielle d'une simple répression qui aurait mal tourné. Il reconnaît désormais que l'armée française a délibérément ouvert le feu à la mitrailleuse sur ces soldats africains
(SenePlus) - Dans une interview exclusive accordée à Radio France Internationale (RFI), François Hollande qualifie pour la première fois de "massacre" la tuerie perpétrée par l'armée française contre des tirailleurs africains le 1er décembre 1944 au camp militaire de Thiaroye, au Sénégal. Cette déclaration marque une évolution significative dans la reconnaissance officielle de ce drame colonial.
L'ancien président français, qui avait jusqu'alors parlé de "répression sanglante" lors de ses précédentes interventions en 2014, franchit désormais un pas décisif dans la qualification des événements. "C'est un massacre puisque ce n'est pas simplement une répression comme on en connaît dans des manifestations qui débordent. Là, il s'agit d'un massacre à la mitrailleuse", affirme-t-il sans ambiguïté dans l'entretien accordé à la journaliste Charlie Dupiot pour le podcast "Enquêtes africaines" de RFI.
Les faits remontent au 1er décembre 1944, lorsque des dizaines, voire des centaines de tirailleurs africains - Sénégalais, Maliens, Guinéens et Ivoiriens - furent exécutés par l'armée française. Ces soldats, qui avaient combattu sous l'uniforme français et avaient pour beaucoup été prisonniers pendant la Seconde Guerre mondiale, réclamaient simplement le paiement de leurs indemnités.
François Hollande rappelle le contexte : "C'est une répression sanglante parce qu'il y a un acte qui est celui d'une revendication, légitime d'ailleurs, des tirailleurs sénégalais qui demandent d'avoir le versement de leur solde. La manifestation dégénère et il y a une répression qui est sanglante."
Sur la question de la responsabilité, l'ancien chef d'État précise que la décision n'émanait pas nécessairement des plus hautes instances : "Ce n'est pas un ordre qui a été donné forcément en haut lieu, mais les chefs militaires sur place, ceux qui ont donné l'ordre, ont commis l'irréparable."
Cette reconnaissance historique intervient dans le cadre de la diffusion d'une nouvelle saison du podcast "Thiaroye, les tirailleurs sacrifiés" de RFI, dont le dernier épisode sera disponible le 6 décembre, quelques jours après les commémorations officielles du 1er décembre.
Cette déclaration de François Hollande constitue un tournant majeur dans la reconnaissance officielle de ce drame colonial, marquant une évolution significative du discours politique français sur cet épisode tragique de l'histoire franco-africaine.
par Djibril Sambou
QUELLE PLACE POUR SONKO DANS LA MISE EN ŒUVRE DE LA TRANSFORMATION SYSTÉMATIQUE ?
La création d'une vice-présidence aux prérogatives renforcées apparaît comme la solution idoine. Cette innovation constitutionnelle permettrait d'optimiser le leadership du chef de Pastef tout en modernisant la gouvernance sénégalaise
À un moment crucial de son histoire, le Sénégal se trouve à la croisée des chemins. Face à des défis socio-économiques complexes et des attentes croissantes pour une gouvernance plus juste et souveraine, le pays a besoin d’un leadership exceptionnel. Avec la large victoire de Pastef aux élections législatives, Ousmane Sonko émerge comme la figure politique incontournable, porteur d’un projet visionnaire pour le Sénégal. Cependant, pour concrétiser une transformation systématique et durable, Sonko doit occuper un rôle exécutif à la hauteur de son envergure et de ses ambitions.
Le poste de président de l’Assemblée nationale: Un rôle limité pour Sonko
Depuis la publication des tendances lourdes donnant Pastef et son leader largement vainqueur des élections législatives, les apôtres du système hérité de la colonisation ont synchronisé leurs violons pour convaincre l’opinion que le poste de président de l’Assemblée nationale serait mieux indiqué pour M. Ousmane Sonko. Leur objectif non déclaré est de confiner le PROS (président Ousmane Sonko) à l’arbitrage des débats parlementaires, loin des leviers stratégiques du pouvoir exécutif nécessaires pour piloter les grandes réformes attendues par le peuple sénégalais.
Bien que prestigieux, le poste de président de l’Assemblée nationale demeure fondamentalement un rôle de gestion législative. Le président de l’Assemblée est un arbitre et un coordinateur des débats parlementaires, dont l’influence, bien que notable, est confinée au cadre législatif. Un tel rôle limiterait la capacité de Sonko à mettre en œuvre les réformes majeures contenues dans son programme ambitieux pour la transformation systémique, notamment les initiatives du Plan Sénégal 2050 qui exigeront une autorité exécutive directe. Ce rôle limiterait également la capacité de Sonko à mobiliser les institutions pour le changement, compte tenu du fait que son leadership de dépasse de loin les attentes d’un poste législatif. Enfin, cela limiterait la pleine exerce de son charisme ; Sonko est un homme d’État capable de fédérer et d’inspirer les masses, ce qui dépasse le cadre procédural et souvent restreint de la présidence de l’Assemblée.
On le sait, Pastef regorge de talents tels qu’Ayib Daffé, qui pourraient brillamment diriger l’Assemblée nationale, libérant ainsi Sonko pour des responsabilités exécutives plus stratégiques. Limiter Sonko à ce poste équivaudrait à dilapider un potentiel immense, une opportunité que le Sénégal ne peut se permettre de perdre.
Premier ministre ou vice-président : Quelle position pour maximiser l’impact de Sonko ?
Le rôle de Premier ministre, bien qu’offrant davantage de pouvoir exécutif, reste limité par sa dépendance au président de la République. Le Premier ministre agit comme un exécutant des orientations présidentielles, ce qui bride sa capacité à impulser des changements structurels.
À l’inverse, une réforme constitutionnelle créant un poste de vice-président, avec des prérogatives renforcées, apparaît comme une nécessité historique pour répondre aux aspirations du peuple sénégalais et relever les défis du moment. Ce poste offrirait un cadre idéal pour exploiter pleinement les compétences de Sonko. Ce poste, inédit dans l’histoire politique du Sénégal, permettrait de renforcer la continuité institutionnelle. En cas d’absence ou d’empêchement du président, le vice-président pourrait prendre les rênes du pays sans perturber la mise en œuvre des politiques publiques. Il permettrait également un partage stratégique du pouvoir exécutif.
Contrairement au Premier ministre, le vice-président jouerait un rôle clé dans l’élaboration et la mise en œuvre des grandes orientations nationales. Enfin, il renforcerait la modernisation de la gouvernance sénégalaise. Ce modèle, inspiré de pays comme les États-Unis, donnerait un signal fort de rupture avec les anciennes pratiques centralisatrices.
Dans ce cadre, le vice-président assumera toutes les responsabilités actuelles du Premier ministre en plus de certains pouvoirs que détient le président de la République.
En somme, le poste de vice-président offrirait à Sonko un cadre pour incarner une transformation profonde tout en modernisant les institutions de la République.
Plaidoyer pour une réforme constitutionnelle ambitieuse
Pour traduire cette vision en réalité, une réforme constitutionnelle introduisant le poste de vice-président s’impose. Cette transformation institutionnelle serait bien plus qu’un simple ajustement administratif ; elle représenterait une avancée stratégique dans la gouvernance sénégalaise.
Les bénéfices de cette réforme sont multiples avec, notamment :
Un pouvoir équilibré. En confiant des responsabilités stratégiques au Vice-président, le Sénégal pourrait accélérer les réformes sans monopolisation du pouvoir par une seule entité.
Une meilleure résilience de l’État. Ce modèle garantirait la continuité de l’État en cas de crise majeure, politique ou sanitaire.
Une proximité accrue avec le peuple. Le vice-président, élu ou désigné dans une première phase, serait un interlocuteur direct des citoyens, agissant comme un médiateur entre la population et les institutions.
Dans une phase transitoire, le vice-président pourrait être élu par les députés à la majorité des deux tiers. À l’avenir, ce poste pourrait être intégré dans l’élection présidentielle, comme cela se fait aux États-Unis.
Ousmane Sonko : Un leadership indispensable dans la mise en place d’un Sénégal nouveau
Ousmane Sonko ne se limite pas à être un simple politicien. Sa trajectoire, marquée par une intégrité exemplaire et une vision audacieuse, en fait l’homme de la situation pour le Sénégal. Ses priorités incluent (1) une souveraineté économique accrue. En réduisant la dépendance aux partenaires étrangers et en valorisant les ressources locales, il prône un développement endogène et durable. (2) Une justice sociale équitable. Son engagement pour l’éducation, la santé et la réduction des inégalités reflète sa volonté de mettre les citoyens au cœur de l’action publique. (3) Une gouvernance transparente : Il milite pour une rupture totale avec les pratiques clientélistes, favorisant la reddition des comptes et l’exemplarité institutionnelle.
Sonko est bien plus qu’un visionnaire ; il est un catalyseur de changement. Pour réaliser ces ambitions, il a besoin des outils appropriés, et le poste de vice-président, renforcé par des prérogatives exécutives, est le cadre idéal pour matérialiser ses réformes.
Pour terminer, il faut noter que le Sénégal est à un moment décisif de son histoire. Ni le poste de président de l’Assemblée nationale, ni un rôle limité de Premier ministre ne permettraient à Ousmane Sonko de conduire efficacement la transformation systématique attendue. Une réforme constitutionnelle créant un poste de vice-président est la solution naturelle pour répondre aux défis de l’heure et refléter la nouvelle ère politique incarnée par Sonko.
Aux côtés du président Bassirou Diomaye Diakhar Faye, Ousmane Sonko pourrait devenir l’architecte du Sénégal de demain. Un Sénégal souverain, prospère et équitable, à la hauteur des attentes de son peuple. Le moment est venu de faire ce choix audacieux pour écrire une nouvelle page de l’histoire nationale.
Mouhamed monte dans sa pirogue vers l'Europe, pendant que Menka quitte Paris pour le Sénégal. L'un fuit la pauvreté, l'autre cherche ses racines. Leurs trajectoires opposées illustrent la complexité des flux migratoires entre l'Afrique et l'Europe
(SenePlus) - L'océan Atlantique est devenu le théâtre d'un double mouvement migratoire aux contrastes saisissants. Comme le rapporte Mehdi Ba dans Jeune Afrique, deux documentaires récents de la BBC illustrent ce phénomène : d'un côté, des milliers de Sénégalais risquant leur vie pour rejoindre l'Europe, de l'autre, des "repats" français d'origine africaine cherchant à renouer avec leurs racines.
Les chiffres sont vertigineux : "40 000 migrants en 2023 et 70 000 en 2024" ont tenté la traversée vers les îles Canaries, générant un trafic estimé à "150 millions d'euros" pour les passeurs. Le documentaire "Eaux troubles" suit l'un d'eux, Mouhamed Oualy, un trentenaire du Sénégal oriental dont les derniers mots avant le départ résonnent comme un testament : "S'il vous plaît, priez pour moi. Le moment est venu."
À l'inverse, "Le Retour au pays" dépeint le parcours de Français d'origine africaine choisissant de s'installer au Sénégal. Menka Gomis, 39 ans, né à Paris, incarne cette tendance : "Moi, j'ai beau être Français, je viens aussi d'ailleurs", confie-t-il à la BBC. Après une carrière d'ingénieur en France, il voit dans l'Afrique "un continent d'avenir" où il y aurait "tout à construire."
Le contraste entre ces deux réalités est frappant. Pendant que certains risquent leur vie sur des embarcations de fortune, d'autres, comme Marie D'Almeida, accompagnent les "repats" dans leur installation au Sénégal. "Les gens ne se retrouvent plus dans le modèle social de la France", explique-t-elle, ajoutant que "plus de 90 de ses clients ont d'ores et déjà franchi le cap."
Mais ces retours aux sources ne sont pas sans désillusions. Salamata Konté, ancienne cadre bancaire, témoigne : "J'étais rejetée en France, et ici aussi je suis rejetée ?!", s'indignant d'être surnommée "Sala la Française" à Dakar.
Le bilan humain de la traversée maritime est, lui, dramatique. Selon l'ONG Caminando Fronteras, citée par Jeune Afrique, "plus de 18 000 migrants auraient perdu la vie lors de la traversée depuis 2018, dont 2 000 femmes et enfants." Dans le cimetière d'El Hierro, aux Canaries, des tombes anonymes accueillent les corps non identifiés des naufragés, derniers témoins d'un drame qui continue de se jouer sur les eaux de l'Atlantique.
DAKAR EXPLORE LA MÉMOIRE DE THIAROYE
Huit panels thématiques, des dizaines d'experts internationaux, et deux journées intenses de réflexion et de commémoration. Le programme du colloque international sur le massacre de Thiaroye révèle l'ampleur de l'événement prévu les 2 et 3 décembre 2024
(SenePlus) - Le massacre colonial de Thiaroye, survenu le 1er décembre 1944, fera l'objet d'un colloque international majeur à Dakar les 2 et 3 décembre 2024, selon le programme diffusé par le Comité scientifique de commémoration du 80ème anniversaire. Cet événement, qui se tiendra entre l'Ucadet le camp militaire de Thiaroye Gare, réunira historiens, chercheurs et artistes autour des enjeux historiographiques, mémoriels et culturels de cette tragédie coloniale.
Le colloque s'ouvrira à l'amphithéâtre Khaly Amar Fall de l'Ucad avec une conférence inaugurale du Professeur Ibrahima Thioub, précédée de performances artistiques incluant slam et poésie. Le premier panel, présidé par Rokhaya Fall, abordera frontalement la question du massacre colonial, avec notamment une intervention d'Armelle Mabon sur "Le Massacre de Thiaroye, 1er décembre 1944, Histoire d'un mensonge d'État".
La dimension internationale de l'événement se reflète dans la diversité des intervenants et des approches. Hassoum Cessay explorera les échos du massacre dans les archives nationales gambiennes, tandis que Lazare Ki-Zerbo replacera Thiaroye dans le contexte plus large de "l'Atlantique Noir".
Le deuxième jour, les travaux se poursuivront au camp militaire de Thiaroye Gare, lieu même des événements. La programmation met l'accent sur les représentations artistiques et littéraires du massacre, avec un focus particulier sur l'œuvre de Léopold Sédar Senghor et le cinéma de Sembène Ousmane.
Les questions de transmission et d'enseignement occuperont une place centrale, comme en témoigne le panel dédié à l'intégration de Thiaroye dans les programmes scolaires, tant au Sénégal qu'au Cameroun. Le colloque se conclura par un "Appel de Thiaroye" pour le droit aux archives, soulignant l'importance continue de l'accès aux sources historiques.
Cette manifestation scientifique d'envergure, organisée sous l'égide de l'Institut des mondes africains (IMAF), marque une étape importante dans la reconnaissance et l'étude d'un des épisodes les plus sombres de l'histoire coloniale française en Afrique. Elle illustre la persistance des questions mémorielles et leur résonance contemporaine, 80 ans après les faits.
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DSK : LES DESSOUS D'UNE RECONVERSION LUCRATIVE
Comment rebondir après un scandale planétaire? Dominique Strauss-Kahn semble avoir trouvé la réponse dans les paradis fiscaux et les régimes autoritaires. L'ancien ministre socialiste facture désormais ses conseils à prix d'or, loin de son passé politique
Le magazine "Cash Investigation" lève le voile sur la nouvelle vie de Dominique Strauss-Kahn, l'ancien patron du FMI dont la carrière politique s'est brutalement arrêtée en 2011 suite à l'affaire du Sofitel de New York.
L'enquête, basée sur des documents confidentiels issus des Pandora Papers, révèle que l'ancien ministre des Finances français a rapidement rebondi dans le monde des affaires. Dès 2012, il crée la société Parnasse et se lance dans les conférences internationales, facturant ses interventions jusqu'à 100 000 euros.
La société de DSK s'installe stratégiquement à Casablanca Finance City, une zone franche marocaine. Ce choix lui permet d'économiser environ 6 millions d'euros d'impôts sur les sociétés en cinq ans. À l'expiration de ces avantages fiscaux, ses activités sont transférées vers une juridiction encore plus opaque.
L'émission détaille également sa collaboration avec l'homme d'affaires Thierry Leyne. Ensemble, ils créent LSK et tentent de lever 2 milliards de dollars pour un fonds d'investissement international. Cette aventure se termine tragiquement avec le suicide de Leyne et des accusations d'escroquerie, notamment envers un couple de retraités marseillais ayant perdu plus d'un million d'euros.
L'ancien patron du FMI devient par ailleurs conseiller de gouvernements controversés, notamment celui du président congolais Denis Sassou-Nguesso. Une position qui soulève des questions, DSK ayant précédemment facilité l'effacement d'une dette de 1,5 milliard d'euros du Congo lorsqu'il dirigeait le FMI.
Sollicité par l'équipe de "Cash Investigation", Dominique Strauss-Kahn a décliné toute demande d'interview concernant ses activités post-FMI.
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L'UNIVERSEL EST PLURIEL OU N'EST PAS
Contre la montée des discours xénophobes, la voix de Souleymane Bachir Diagne s'élève avec force. Dans "L'échappée", la nouvelle émission d'Edwy Plenel, le penseur sénégalais défend un universalisme qui se nourrit de la diversité du monde
Dans sa nouvelle émission "L'échappée", Edwy Plenel reçoit à la Cité de l'Immigration à Paris le philosophe Souleymane Bachir Diagne, figure majeure de la pensée contemporaine. Face à la montée des discours anti-immigration des deux côtés de l'Atlantique, ce professeur à l'université Columbia de New York livre une réflexion puissante sur l'universalisme.
Enfant de Saint-Louis du Sénégal, ville historiquement métissée où se sont mêlées populations, cultures et religions, Bachir Diagne incarne dans son parcours même cette universalité qu'il théorise. De l'École Normale Supérieure à Paris aux prestigieuses universités américaines, en passant par l'université Cheikh Anta Diop de Dakar, il développe une pensée ancrée dans la pluralité.
Au cœur de sa réflexion se trouve le concept d'"universel latéral", inspiré de Merleau-Ponty. Cette vision propose un universalisme construit horizontalement, où chaque culture contribue à égalité, en rupture avec l'exceptionnalisme européen. Edwy Plenel rappelle à cet effet que 66% des troupes de la France Libre en 1943 étaient constituées de soldats coloniaux, soulignant que "c'est le monde qui nous a sauvés".
Soufi musulman, Bachir Diagne refuse tout enfermement identitaire. Il prône "une vraie fidélité dans un mouvement continu pour sortir de la répétition". S'appuyant sur le concept sud-africain d'Ubuntu, popularisé par Desmond Tutu et Nelson Mandela, il défend une politique d'humanité capable de dépasser les logiques de division.
Face aux crises actuelles, de Gaza aux politiques migratoires restrictives, le philosophe appelle à une "civilisation de l'universel" où "tous seraient présents". Une vision exigeante mais nécessaire, selon lui, pour construire un monde où l'humanité fait communauté dans sa diversité même.
LE XALAM2 REND HOMMAGE À AMADOU MAHTAR M'BOW À L'UNESCO
Les musiciens ont partagé des témoignages personnels sur l'influence profonde de l'ancien patron ministre dans leur parcours artistique. Son engagement pour la culture africaine et sa vision panafricaine restent des sources d'inspiration
Jeudi 14 novembre 2024, le siège de l'UNESCO à Paris a résonné des mélodies du mythique Xalam2. L'événement qui se déroulait au siège de l'UNESCO à Paris, célébrait la mémoire de feu Amadou Mahtar M'Bow, ancien Directeur Général de l'UNESCO et premier Africain à avoir dirigé une institution des Nations Unies.
Choisi pour la séquence musicale, le Xalam2 a saisi ce moment pour souligner l'impact profond de M'Bow sur la scène culturelle africaine et son influence durable sur les artistes du continent.
Taffa Cissé, percussionniste du groupe, a partagé un témoignage personnel rappelant avec fierté son passage par Mudra Afrique, la prestigieuse école sénégalaise d'excellence artistique, impulsée par le Président Léopold Sédar Senghor et soutenue par Amadou Mahtar M'Bow, et ayant façonné sa carrière et celle de nombreux artistes africains.
Taffa Cissé a également souligné l'engagement constant de M'Bow envers la culture africaine : "M'Bow a toujours été présent pour la culture africaine et les arts, permettant aux artistes de garder espoir de pouvoir continuer à transmettre le bagage culturel africain." Il a ajouté que l'approche multilingue de Xalam2, chantant dans diverses langues africaines, est en partie inspirée par la vision panafricaine de M'Bow.
"Amadou Mahtar M'Bow a contribué à nous ouvrir les yeux sur la culture, l'art, les identités culturelles, et sur l'idée d'une Afrique unie," a-t-il rajouté.
Cette prestation du Xalam2 à l'Unesco réaffirme le rôle essentiel des artistes dans la préservation de la mémoire collective et la célébration des figures qui ont façonné l'histoire du Sénégal et de l'Afrique. Elle souligne également l'importance continue des institutions culturelles dans le développement artistique du continent et la promotion d'une identité africaine unie et diverse.
"Amadou Mahtar M'Bow incarnait l'excellence africaine sur la scène internationale," dira plus tard Henri Guillabert originaire de Saint-Louis tout comme M'Bow. "Il a prouvé que l'Afrique pouvait briller aux plus hauts niveaux mondiaux. Son engagement pour la diversité culturelle et l'éducation a profondément marqué notre génération d'artistes et continue d'inspirer, nous l'espérons, les jeunes talents africains" selon Ibrahima Coundoul.
L'hommage musical du Xalam2 à M'Bow illustre parfaitement comment l'héritage d'un grand homme peut continuer à inspirer et à guider les artistes, même des décennies après son passage à l'Unesco, renforçant ainsi les liens entre la diplomatie culturelle, l'éducation et les arts vivants en Afrique.
LA GRANDE MUE DE L'ASSEMBLÉE NATIONALE
Les tractations s'intensifient pour la distribution des rôles clés, dans un contexte où l'inexpérience côtoie l'ambition réformatrice
La prochaine législature sénégalaise, la 15e du genre, s’annonce riche en défis et en tractations politiques. Alors que le nouveau gouvernement peine encore à asseoir ses réformes, l’Assemblée nationale s’apprête à jouer un rôle central. Après une victoire écrasante du jeune parti Pastef, de nombreuses interrogations subsistent quant aux figures clés qui dirigeront l’hémicycle et les groupes parlementaires. Les stratégies, les spéculations et les nominations futures occupent déjà le devant de la scène.
La majeure partie des élus de cette nouvelle législature sont des novices en matière parlementaire. Pour Pastef, cette victoire représente à la fois une consécration et un défi colossal. Le parti a remporté une majorité sans précédent, mais il devra maintenant transformer ce succès électoral en actions concrètes et crédibles au sein de l’Assemblée nationale.
Avant l’installation officielle prévue pour début décembre 2024, si aucun recours n’est déposé, les tractations internes battent leur plein pour structurer les futurs groupes parlementaires.
La question du leadership au sein de Pastef
Au sein de Pastef, le sujet du futur président de l’Assemblée nationale reste tabou. Les hauts dignitaires du parti évitent soigneusement toute déclaration publique, préférant régler ces questions en interne. Trois noms reviennent cependant avec insistance : Ayib Daffé, Amadou Ba et Ousmane Sonko.
Ancien président du groupe parlementaire de Pastef, Ayib Daffé est une figure respectée au sein du parti. Proche d’Ousmane Sonko, il a su faire preuve de loyauté et de ténacité, particulièrement durant les périodes de turbulences. Plusieurs voix s’élèvent pour qu’il devienne le prochain président de l’Assemblée nationale. Certains y voient un moyen d’éviter une dualité au sommet entre Ousmane Sonko, chef du gouvernement, et le président de l’Assemblée. Daffé lui-même reste discret, appelant à la prudence : ‘’Cette question doit être réglée en interne’’, souligne-t-il, rejetant les débats prématurés.
Pour les observateurs, proposer Sonko à la présidence de l’Assemblée nationale est une idée qui divise. Ses partisans y voient une manière d’affirmer son leadership. Mais cette option présente des risques de concentration du pouvoir et pourrait créer des frictions inutiles. De plus, Sonko semble plus destiné à consolider son rôle à la tête du gouvernement.
Un autre nom évoqué est celui d’Amadou Ba, connu pour son éloquence et sa maîtrise des questions parlementaires. Originaire de Thiès, il a remplacé Birame Souleye Diop après la démission de ce dernier pour cumul de fonctions. Respecté pour son verbe incisif et sa discipline, l’ancien mandataire de Diomaye représente une alternative crédible. Ses partisans estiment qu’il pourrait apporter une stabilité nécessaire face à une opposition déterminée à mettre le nouveau régime à l’épreuve.
L’opposition en quête de cohérence
La défaite de l’intercoalition de l’opposition a laissé des séquelles profondes. Certains leaders ont été pointés du doigt pour leur manque de préparation et de légitimité. Seule la coalition Takku Wallu semble en mesure de constituer un groupe parlementaire solide.
Cependant, des divisions internes persistent, notamment entre Jàmm ak Ñariñ et Sàmm sa Kaddu, deux coalitions qui peinent à surmonter les rancunes de la défaite électorale.
Par ailleurs, dans les tractations internes au sein de l’opposition, une question divise profondément les militants : la légitimité des leaders qui ont perdu leur base politique. Pour beaucoup, diriger un groupe parlementaire exige non seulement des compétences, mais aussi une solide implantation locale. Cette position est particulièrement visible au sein de Takku Wallu Sénégal où les débats font rage quant à la désignation des futurs responsables parlementaires.
Parmi les figures pressenties, Amadou Dawa Diallo apparaît comme un candidat incontournable. Président du Conseil départemental de Ranérou-Ferlo, il a réussi à maintenir son bastion lors des dernières élections législatives, remportant un large succès face à Pastef. Avec près de 8 289 voix contre 5 550 pour le parti au pouvoir, sa victoire témoigne d’une solide base électorale et d’une capacité à fédérer localement.
Contrairement à certains leaders de l’opposition qui peinent à justifier leur position en raison de défaites électorales, Amadou Dawa Diallo s’impose comme un symbole de résistance face à la razzia de Pastef. Ses partisans mettent en avant cette performance pour légitimer ses ambitions parlementaires, estimant que la présidence du groupe doit revenir à ceux qui ont su conserver la confiance des électeurs.
Toutefois, deux noms dominent les discussions au sein de l’opposition : Abdou Mbow et Aïssata Tall Sall.
Député depuis 12 ans, ancien vice-président de l’Assemblée et ex-président du groupe parlementaire Benno Bokk Yaakaar, Abdou Mbow est un candidat naturel. Sa connaissance approfondie des rouages parlementaires et sa ténacité en font un adversaire redoutable. Cependant, son manque de base politique pourrait limiter ses chances de diriger un groupe en reconstruction après la débâcle du 17 novembre 2024.
Avocate et ancienne ministre, Aïssata Tall Sall incarne une opposition dynamique. Connue pour sa force de proposition et son charisme, elle dispose d’une certaine légitimité. Toutefois, ses allers et retours entre le gouvernement et le Parlement suscitent des interrogations. Certains estiment qu’elle manque de constance, tandis que d’autres voient en elle la meilleure chance de revitaliser l’opposition.
Les listes et coalitions indépendantes : alliés potentiels ou non-alignés
Dans la configuration de la prochaine législature, l’Assemblée nationale verra émerger des groupes parlementaires potentiellement inédits. La question centrale reste celle des alliances stratégiques, des ralliements ou de la neutralité de certains partis. Si la majorité est sans conteste dominée par Pastef, les autres coalitions et listes indépendantes joueront un rôle clé dans l’équilibre des forces politiques.
Parmi les formations les plus en vue, plusieurs pourraient rejoindre l’opposition ou choisir une position médiane. Ces choix seront déterminants pour la dynamique de la 15e législature. Les différentes coalitions devront non seulement définir leur positionnement politique, mais aussi établir des stratégies claires pour maximiser leur influence parlementaire. La liste Dieul Lignou Mom, représentée par Tahirou Sarr, occupe une place particulière.
Bien que Sarr ait eu des différends avec Pastef dans le passé, sa proximité idéologique avec Ousmane Sonko reste manifeste. Son discours nationaliste et souverainiste trouve un écho dans les orientations politiques de Pastef, le plaçant ainsi dans une position ambivalente. S’il rejoint la majorité, ça ne sera pas une surprise. Il est quasi impossible de le voir rallier le camp de l’opposition, notamment Takku Wallu Sénégal, selon plusieurs observateurs. Toutefois, il peut choisir d’être un non-alignée.
Un scénario plus plausible pour Thierno Alassane Sall de la coalition Senegaal Kese. Il peut continuer dans sa logique de non-inscrit. L’ancien ministre est connu pour son indépendance farouche et son ambition de se démarquer des blocs traditionnels. Une telle position lui permettrait de peser sur des débats spécifiques sans s’engager dans une logique d’opposition systématique.
Une posture qui n’est pas le cas de Birima Mangara, à la tête du Pôle alternative 3e voix. Ancien ministre, il jouit d’une réputation de pragmatisme. Sa coalition pourrait opter pour une ligne indépendante, tout en collaborant ponctuellement avec l’opposition sur des questions d’intérêt national.
And Koluté Nguir Sénégal (AKS) avec Abdou Karim Sall semble plus proche aussi de l’opposition, car il est issu des flancs de BBY. Moustapha Diop de la coalition Farlu pourrait également suivre une trajectoire similaire.
Cependant, Maguette Sène et Adama Diallo, représentants de la coalition Andu Nawlé et la Marche des territoires, ont une assise électorale locale forte. Leur stratégie pourrait viser à défendre les intérêts territoriaux, ce qui les place dans une dynamique d’alliance flexible. Leur ralliement à l’opposition n’est pas exclu, mais leur priorité restera la défense des dossiers régionaux. De même qu’And Bessal Sénégal d’Abdoulaye Sylla.
La 15e législature s’annonce donc comme un tournant décisif. Pour Pastef, il s’agira de prouver sa capacité à gouverner et à fédérer, après des années passées dans l’opposition. Le choix du président de l’Assemblée nationale et des chefs de groupe parlementaire sera déterminant.
L’opposition, de son côté, doit surmonter ses divisions pour offrir une alternative crédible.
Dans ce contexte tendu, le Sénégal s’apprête à vivre une nouvelle phase politique où chaque décision, chaque nomination aura des répercussions majeures sur l’avenir du pays.
LE PIÈGE DU PLÉBISCITE
Pour Jean-Baptiste Placca, le Pastef qui s'est construit sur la critique du pouvoir précédent ne peut désormais plus se permettre d'invoquer l'héritage difficile pour justifier ses lenteurs. Pour les nouveaux maîtres de Dakar, l'horloge tourne déjà
(SenePlus) - L'écrasante victoire du Pastef aux législatives du 17 novembre, couronnant celle de mars à la présidentielle, pourrait paradoxalement devenir le plus grand défi du duo Bassirou Diomaye Faye - Ousmane Sonko. C'est l'analyse développée par Jean-Baptiste Placca dans son éditorial sur RFI ce samedi 23 novembre 2024, où il dessine les contours d'une équation politique complexe pour les nouveaux maîtres de Dakar.
Le plébiscite populaire, manifesté d'abord par l'élection de Bassirou Diomaye Faye à la présidentielle avec plus de 54% des voix, puis confirmé par la majorité écrasante obtenue aux législatives, témoigne d'une confiance sans précédent. "Le peuple sénégalais désire ardemment confier son destin à cette équipe nouvelle", note l'éditorialiste, soulignant que "contrairement à ce que l'on observe dans de plus en plus de démocraties, les électeurs ne se sont pas, ici, servi de leur bulletin de vote comme d'un lance-pierre pour régler des comptes ou se venger."
Cependant, cette confiance massive pourrait se transformer en piège redoutable. Jean-Baptiste Placca met en garde contre les attentes pressantes de l'électorat de base du Pastef : "Ils ne vont peut-être pas pouvoir patienter longtemps, sous prétexte que le passif hérité du président Macky Sall serait lourd." Une situation d'autant plus délicate que le parti au pouvoir s'est lui-même construit sur la critique des "insuffisances réelles ou supposées du pouvoir de Macky Sall."
L'histoire politique sénégalaise offre d'ailleurs un schéma récurrent que l'éditorialiste détaille avec précision : "Abdoulaye Wade l'a été pour Abdou Diouf quand celui-ci n'était pas rallié, au gouvernement. Abdoulaye Wade a eu les siens, plutôt des dissidents issus du PDS, son propre parti, tel Idrissa Seck ou Macky Sall [...] Ousmane Sonko aura été, pour Macky Sall, ce que Wade fut pour Diouf."
Le risque d'une impopularité croissante n'est pas à écarter, selon l'analyse de Jean-Baptiste Placca. "Une si écrasante majorité à l'Assemblée nationale peut s'avérer une source d'angoisse", prévient-il, notamment face à des populations qui pourraient "s'agacer des allusions aux difficultés héritées du prédécesseur, trop souvent servies [...] comme justification à la lenteur des solutions à leurs propres difficultés."
Le défi est d'autant plus grand que le Pastef, "arrivé en dernier sur l'échiquier politique", a réussi à éclipser les formations traditionnelles en capitalisant sur les frustrations populaires. Cette stratégie pourrait aujourd'hui se retourner contre lui, le parti ne pouvant "décemment, appeler aujourd'hui les Sénégalais à se montrer raisonnables, ou à modérer leurs exigences pressantes."
L'avertissement de l'éditorialiste est clair : "À moins que le Sénégal ne devienne en quelques années le paradis terrestre dont rêvent certains, il n'est pas exclu, passée la lune de miel, que surgisse une génération spontanée d'opposants virulents au Pastef." Une perspective qui pourrait amener Ousmane Sonko à "méditer sur les insomnies qu'il donnait naguère à Macky Sall."
MUṬIKKAPPAṬĀTA : QUAND L'ART EXPLORE LES HÉRITAGES MULTIPLES
Entre Bordeaux, l'Inde et la Guadeloupe, Nathalie Vairac tisse une toile mémorielle fascinante à travers son exposition. Cette artiste plurielle dévoile à RAW Material Company les fragments intimes d'une histoire familiale transcontinentale
(SenePlus) - RAW Material Company présente, depuis le 10 novembre 2024 jusqu'au 13 janvier 2025, l'exposition MUṬIKKAPPAṬĀTA de Nathalie Vairac, une plongée au cœur des mémoires familiales et de la transmission culturelle.
L'exposition, qui s'inscrit dans le cadre de la 13e édition de #Partcours et du OFF de la 15ème Dak'Art Biennale, propose une exploration sensible des héritages multiples à travers le regard d'une artiste aux racines indo-guadeloupéennes. Née à Bordeaux et installée à Dakar, Nathalie Vairac interroge dans ce projet la manière dont les mémoires visibles et invisibles traversent le temps et les océans.
Comédienne et directrice artistique reconnue, Nathalie Vairac a collaboré pendant 20 ans avec des figures majeures du théâtre comme Philippe Adrien et Sotigui Kouyaté. Son parcours d'interprète, jalonné de succès, l'a menée de la tragédie grecque aux œuvres contemporaines, lui valant notamment le Saana Award de la meilleure actrice au Kenya en 2014. Plus récemment, elle s'est illustrée dans le film "Sira" d'Apolline Traoré, distingué à la Berlinale et au Fespaco 2023.
RAW Material Company enrichit l'exposition d'une série de programmes publics en trois temps : une lecture-performance sur l'ancrage le 29 novembre, une conversation féminine autour de la transmission épigénétique le 30 novembre, et une réflexion méditative sur les façons d'être au monde le 10 janvier 2025.
Cette exposition s'inscrit dans la mission de RAW Material Company, centre dakarois dédié à l'art, au savoir et à la société. L'institution, fondée et dirigée par Koyo Kouoh, œuvre à la promotion de la créativité artistique et intellectuelle en Afrique à travers une approche transdisciplinaire.