SenePlus | La Une | l'actualité, sport, politique et plus au Sénégal
26 avril 2025
Opinions
Par Baba DIENG
DIOMAYE-SONKO, DEUX MARCHANDS DE CAUCHEMARS AU SERVICE DU DESESPOIR
Le Sénégal est dramatiquement devenu un pays où le rêve -ce moteur des sociétés humaines-, à cause de ses dirigeants, n’est plus permis. Tout participe à son abandon. Les utopies ne libèrent plus, elles enchaînent
Le Sénégal est dramatiquement devenu un pays où le rêve -ce moteur des sociétés humaines-, à cause de ses dirigeants, n’est plus permis. Tout participe à son abandon. Les utopies ne libèrent plus, elles enchaînent. C’est désormais une «grande nuit» qui s’annonce, avec les hantises de sa pénombre. Les temps sont durs. Et nos dirigeants, qui nous vendaient le «miracle» il y a à peine quelques mois, sont déterminés à nous le faire comprendre. Nos imaginaires de décollage économique spectaculaire sont à nouveau calfeutrés. Nos peurs et inquiétudes, elles, par contre, émergent.
L’antienne de l’apocalypse est aujourd’hui de mise : «Il n’y a rien sous nos tropiques.» L’indigence est notre seconde nature. Rien n’est plus efficace que cette rengaine désespérante pour momifier nos énergies. Là où il n’y a pas d’espoir, dit Camus, il faut l’inventer. Car, sans espoir, nos forces sont en hibernation.
Rêver dans un pays en ruine ? Pas si facile… L’émigration circulaire -ce subterfuge aux allures d’un aveu d’incompétence de ces gens-là, chantres d’un souverainisme forcené- est là pour nous en donner une idée claire : les jeunes, nos vaillants bras, veulent partir, et l’Etat ne s’y oppose pas ! Abass Fall, comme Ulysse de retour à Ithaque, a fièrement brandi l’accord qu’il a obtenu pour exporter, au Qatar, une bonne partie de nos têtes bien faites. L’Espagne et ses travaux champêtres, eux, sont convoités et font rêver.
Le Premier ministre, toujours paré de ses atours d’opposant, avait déclaré, à la stupéfaction générale, que le pays est au fond du gouffre, que nos chiffres sont falsifiés. En termes clairs : il n’y a rien dans le Sénégal dont ils ont hérité ; tout a été gaspillé, bradé, volé, truqué. Un pays en décombres. Et qu’il faudra serrer la ceinture, car la marche vers le progrès économique sera longue et inextricable.
Nous étions en train de ruminer la déclaration cauchemardesque du Pmos avant que le Président Diomaye, lui aussi, s’invite au drame : l’Etat est financièrement asphyxié jusqu’à l’évanouissement. Mais que son train de vie, lui, ne se refuse rien. Aporie ! Il a déploré ceci : «D’abord, un Etat contraint dont les marges de manœuvre budgétaire et financière n’existent quasiment plus, une Administration républicaine, mais manquant de cohérence et figée dans des schémas dépassés, alors même que les réalités socio-économiques évoluent rapidement, marquées notamment par la transformation numérique et l’essor de l’Intelligence artificielle.» Diomaye aime les mauvaises nouvelles, il se «lamente», dira un esprit peu fréquentable.
Récemment, et très exceptionnellement, l’on a eu droit, de la part du Pmos, à une bonne nouvelle : 60 projets de transformation systémique du pays vont sortir de terre. Fait-il du Mao ou du Wade ? C’est toujours appréciable, en tout cas, de donner aux gens des raisons d’espérer de meilleurs futurs. La politique, c’est aussi l’art de transformer des préoccupations en espoirs.
L’espoir, c’est comme le pain, il est vital. Il faut le garder en lieu sûr, à l’abri de ce qui peut le corrompre ou le travestir. Ce travail se fait dans la production d’imaginaires, par le truchement de discours.
L’exigence de vérité et de transparence doit cohabiter en bons termes avec la nécessité de maintenir l’espoir. Le «lexique d’optimisme officiel» dont parle Armand Farrachi est parfois salvateur, surtout pour cette jeunesse si tentée par l’ouverture de nouvelles utopies, celles émancipatrices. Vendez-nous du rêve, de l’espoir ! C’est ce dont nous avons besoin. Soyez des «marchands de rêves», et non de cauchemars : sic itur ad astra !
PAR Babacar Korjo Ndiaye
BIRAME SOULEYE, UN MINISTRE EN MODE FREESTYLE
Notre ministre a un talent rare. Celui de toujours dire ce qu’il ne faut pas, au moment où il ne faut pas, avec une assurance qui force l’accablement. Bientôt, il ne lui restera bientôt plus que son miroir pour l’écouter sans grimacer
Il faut dire que notre ministre a un talent. Un talent rare. Celui de toujours dire ce qu’il ne faut pas, au moment où il ne faut pas, avec une assurance qui force le respect… ou plutôt l’accablement. Il parle, et c’est comme un bulldozer sans frein sur une route pleine de nids-de-poule : ça cahote, ça cogne, et ça finit toujours en sortie de route. Gaalu njoobeen du teer!
Dernière sortie en date ? Pour répondre à ceux qui affublent les militants de son parti du qualificatif de Salafistes (au sens le plus explosif du terme), il a eu l’illumination suivante : « Ma mère est la fille du vénéré Aladji Ahmad Ndieguene. Comment peut-elle enfanter un Salafiste ?... » Voilà donc la nouvelle génétique ministérielle : une bonne mère ne peut enfanter un mauvais fils. Au-delà de l’étrange biologie qu’il nous propose, le message est limpide : si vous êtes Salafiste, c’est que votre mère a raté son coup. Un bel hommage aux valeurs familiales, mais un petit scandale pour la communauté salafiste du Sénégal, qui appréciera sûrement d’être reléguée au rang d’erreur maternelle. Bon Xataraayu!
Mais ce n’est pas la première fois que notre ministre brille par sa finesse oratoire. Rappelez-vous quand, en pleine euphorie post-électorale, il a jugé bon de rappeler aux promoteurs de lutte que l’État ne sponsoriserait plus leurs combats. « Ces spectacles archaïques ne sont pas notre priorité », aurait-il presque soufflé en filigrane. Un avis respectable… sauf que personne ne lui avait rien demandé. On l’imagine, la bouche en cœur, expliquant aux lutteurs que désormais, ils devront se contenter de l’amour du public et de la sueur du mbapatt. C’est ainsi qu’il a réussi un exploit : unir toute une industrie contre lui, du promoteur de l’arène nationale au dernier batteur de tam-tam du village.
Et puis, il y a eu l’épisode Touba. Là encore, il voulait faire une démonstration. Prouver que son parti n’a jamais tenté de séduire les autorités religieuses de la ville sainte. Il aurait pu le dire calmement, avec intelligence, en finesse. Mais non, c’est mal le connaître. « Moi, avant l’élection, je n’avais jamais mis les pieds à Touba ! » a-t-il fanfaronné avec sa verve habituelle. Ah bon ? Donc en plus de ne pas séduire, vous n’avez même pas daigné faire acte de présence ? Voilà qui est habile. Si l’objectif était de convaincre que les nouveaux dirigeants n’ont aucun lien avec Touba, mission accomplie.
Ce ministre est un homme de convictions, certes, mais surtout un homme de convictions mal formulées. Un artiste du faux pas verbal. Un virtuose du mauvais timing. On lui a demandé d’apprendre à parler sans heurter. Mais visiblement, chez lui, c’est un talent inné : heurter, c’est son mode d’expression naturel.
À ce rythme, il ne lui restera bientôt plus que son miroir pour l’écouter sans grimacer.
Par MOUSTAPHA TAMBADOU
SOUTENIR LE KUYAN BAA, UN DEVOIR, UNE NECESSITE
Eriger en Casamance, dans une région repoussée à la périphérie des programmes de développement culturel les plus acceptables, une infrastructure d’accès et de diffusion dotée d’équipements de dernière génération ?
Eriger en Casamance, dans une région repoussée à la périphérie des programmes de développement culturel les plus acceptables, une infrastructure d’accès et de diffusion dotée d’équipements de dernière génération? Tel était, tel est le projet d’Omar Camara, promoteur du KUYAA BAA, du nom du Bois sacré mandingue. Cela pouvait ressembler à un défi colossal, un défi à la fois ambitieux et téméraire. A un rêve impossible.
Peintre au génie et au talent internationalement consacrés, Omar se veut, avant tout, le fils de cette région meurtrie lancée depuis des décennies dans la quête pathétique d’une paix se dérobant constamment aux espoirs les plus ardents.
Son rêve est celui de l’enfant du pays ayant eu la chance de traverser l’Atlantique sans confier sa vie à une frêle embarcation risquant de le livrer, à l’instar de milliers de ses frères et sœurs, à la furie meurtrière des flots. Après avoir obtenu loin de ses terres une reconnaissance et une aura à sa dimension il a choisi de mettre sa réussite acquise de haute lutte, au service des siens. Le nom choisi pour l’espace culturel qu’il construit dans la forêt de ziguinchoroise de Diabir, jadis lieu d’affrontements meurtriers, KUYAN BAA est en soi, doublement, l’emblème de la fierté identitaire et de la culture obstinée du vivre ensemble. Petit à petit, avec des moyens personnels péniblement réunis et le seul soutien de quelques partenaires et mécènes étrangers, le KUYANN BAA sort e terre. Et, déjà, on y organise des événements tels que des expositions internationales d’arts visuels, des rencontres échanges animés par des artistes et critiques venus de divers coins d’Afrique et d’Europe. Déjà Omar avance dans l’illustration, et la promotion de la richesse culturelle et du génie artistique de son terroir , bien sûr, mais également de notre pays et de notre continent. Qui n’a, par exemple, jamais entendu parler de la Biennale Z’ARTS la biennale des arts visuels de Ziguinchor qu’il a fondée?
Cet événement phare du KUYAN BAA a organisé cette année sa treizième édition. C’est-à-dire, pour s’exprimer sans langue de bois, a survécu à 26 années d’inénarrables difficultés dans la mise en place des activités que nous venons d’évoquer, pourtant unanimement saluées pour leur importance dans la mise en lumière des patrimoines et des génies. Hélas, découragé par l’inaction des autorités nationales et territoriales, déçu par l’indifférence des sponsors, Omar Camara est aujourd’hui à bout de souffle et tout près de jeter l’éponge.
Ensemble, refusons cette sinistre éventualité.
Par Fadel DIA
L’ONU A-T-ELLE ENCORE SA PLACE À NEW YORK ?
L'arrêt brutal de l’aide américaine sera douloureuse car beaucoup trop de personnes ont commis l’erreur d’en dépendre mais, et c’est le bon côté de cette décision, cela peut mettre fin à plusieurs mythes qui l’entourent
Dans une allocution solennelle prononcée à la télévision nationale à l’occasion de la commémoration de la mort de son père, le roi Mohamed VI a annoncé que le Maroc allait racheter à l’Espagne, l’ensemble des iles Canaries, qui sont, après tout, des terres africaines, pour en faire un Dubaï de l’Atlantique, autrement plus attractif et plus enchanteur que celui du Golfe Persique, et aux portes de l’Europe. Quant aux populations locales, elles seront tout simplement transférées dans le pays dont elles parlent la langue, l’Espagne.
On apprend par ailleurs que le président Poutine a révoqué tous les actes qui avaient abouti à la dissolution de l’URSS en 1991 et qu’en conséquence les pays baltes ou l’Ukraine sont réintégrés dans la Russie et que le pouvoir y sera désormais exercé par des gouverneurs nommés par Moscou. En conséquence Vlodmyr Zelenski est purement et simplement révoqué de ses fonctions.
Enfin, le président Xi Jinping a pris la décision de constituer une Grande Chine et de mettre fin à l’indépendance des états à populations majoritairement chinoises, Taiwan, mais aussi Singapour et la Malaisie. Le cas du Viet Nam et des autres pays de la sous- région sera examiné ultérieurement, après examen du taux de sinité de leurs populations respectives… Fake news stupides ? Absurdités ? Oui, mais d’autres du même acabit polluent les médias depuis plusieurs jours sans qu’on doute de leur authenticité, assurément parce que leur signataire est coutumier des faits. Nous sommes entrés dans l’ère de l’absurdité, celle de la force brutale et du « maa tey », celle du déni des grands principes tant chantés par les pays occidentaux qui s’en sont proclamés les inventeurs et les gestionnaires exclusifs. Droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, respect de la dignité de la personne humaine, égalité des hommes et des peuples etc., tous ces grands principes sont aujourd’hui bafoués dans de nombreux pays d’Europe et d’Amérique du Nord, à l’intérieur de leurs frontières et à l’extérieur.
Le « bafoueur » en chef s’appelle Donald Trump et s’il nous inquiète plus que les autres, c’est parce qu’il est capable de tout et aussi parce qu’il peut faire tout ce qu’il a promis de faire, y compris le pire ! Ce n’est pas son principal allié, le seul qui compte à ses yeux et dont on se demande si ce n’est pas surtout son manipulateur, qui l’en dissuaderait. C’est en tout cas une forfaiture que le chef du gouvernement de l’Etat d’Israël adoube ce qui n’est rien d’autre que la réédition des crimes qui constituent l’essentiel du cahier de charge de victimaire de son pays. Netanyahou fait peu cas des paroles d’un de ses éminents compatriotes qui disait que l’une des leçons que les Israéliens d’aujourd’hui devraient tirer des malheurs subis par leurs ancêtres, c’est de faire en sorte que ça ne recommence pour personne!
Mais Donald Trump ne s’en prend pas qu’aux Palestiniens. Il porte aussi l’estocade à tous ceux qui bénéficiaient peu ou prou de l’aide américaine, et dans certains cas, il s’agit d’un acte criminel puisque cela peut mettre en danger la vie de millions de personnes qui en dépendaient, pour leur santé ou leur survie. La suspension, ou plus radicalement l’arrêt, de l’aide américaine au développement sera douloureuse parce qu’elle a été brutale et que, malheureusement, beaucoup trop de personnes ont commis l’erreur d’en dépendre mais, et c’est le bon côté de cette décision, cela peut mettre fin à plusieurs mythes qui l’entourent.
Le premier de ces mythes, c’est de croire que c’est une aide désintéressée et purement humanitaire et le premier à réfuter cette assertion est le mieux placé pour le faire : c’est celui qui tient les ciseaux, c’est le chef du « département de l’efficacité gouvernementale », Elon Musk, qui trouve même qu’elle est « criminelle ». Il est en tout cas de notoriété publique, qu’elle cible des objectifs bien précis, vise à servir d’abord les intérêts stratégiques du bailleur et qu’elle a quelquefois des relents de service de renseignements, voire d’espionnage méthodique. Elle n’est pas non plus, et c’est le deuxième mythe, aussi généreuse qu’on le croit et si elle est importante en chiffres absolus, elle est insignifiante au regard de la richesse américaine. Les Etats-Unis ne viennent qu’au 25ème rang mondial si l’on rapporte leur aide à leur PIB : 0,24%, quand la Norvège est à 1,09% !
Il s’agit enfin d’une aide discrétionnaire puisque, pour les derniers chiffres connus, les 4 pays africains qui figurent dans le top 10 de ses principaux bénéficiaires (Ethiopie, Soudan du Sud, Nigéria, RDC, soit au total près de 470 millions d’habitants) ont reçu, ensemble, bien moins de la moitié de ce qu’a reçu la seule Ukraine, qui compte dix fois moins d’habitants …C’est en tout cas la preuve que ce n’est pas « l’aide » qu’ils apportent aux pays pauvres qui peut empêcher les Etats-Unis d’être « great again ».
Une Amérique arc-boutée sur ses dollars et qui ne rêve que de plages et de terrains de golf, une Amérique opposée à la promotion des droits de l’Homme, à la fourniture d’une aide humanitaire conséquente aux plus démunis, au développement durable et à la garantie du droit international, peut - elle être un abri sûr pour l’Organisation des Nations-Unies ? New York n’avait pas été choisie pour abriter son siège pour des raisons purement logistiques et stratégiques, mais aussi parce qu’au sortir de la deuxième Guerre mondiale, les Etats-Unis représentaient la puissance qui avait vaincu les régimes dictatoriaux et qui prêchait la liberté et l’émancipation des peuples.
Mais aujourd’hui ils ont pratiquement quitté le navire ONU, ils se sont retirés de ses organismes les plus symboliques, dont aucun pourtant ne met en péril le bien-être des Américains, et il n’est même pas exclu qu’ils arrêtent toute contribution à son fonctionnement ! Ils ont à nouveau claqué les portes de l’OMS et de l’UNESCO, bêtes noires de Donald Trump, chargées de veiller sur nos corps et nos esprits, et celles du Conseil des Droits de l’Homme, dont la mission est la promotion et la protection des droits humains les plus fondamentaux.
Ils sont sortis de l’Accord de Paris sur le climat signé sous l’égide de l’ONU et dont l’une des ambitions était de fournir aux pays pauvres les moyens d’atténuer les effets du changement climatique dont les pays développés sont les principaux responsables. Ils ont réduit de façon significative leur contribution au fonctionnement de l’URNWA qui a sous son mandat 6 millions de réfugiés palestiniens, 700 écoles et 500.000 élèves. Ils ont pris des sanctions contre la Cour Pénale Internationale, dont ils ne sont pas membres, au seul motif qu’elle s’est interrogée sur la responsabilité du Premier ministre israélien dans le génocide qui est en cours à Gaza, etc.
Les Etats-Unis de Donald Trump ont donc renié tous les principes qui sont à la base de la création de l’ONU, au point qu’on peut se poser la question de savoir si celle-ci peut décemment maintenir son siège dans la métropole d’un pays qui lui est hostile et qui travaille à la discréditer ! C’est une question que malheureusement personne n’osera poser : si dans leurs salons feutrés les chefs d’Etats et rois du monde entier murmurent que Trump est fou ou vulgaire, aucun n’osera l’admonester, car il leur fait peur, pas seulement parce qu’il est fort, mais aussi parce qu’il peut tout dire et tout faire. Nous sommes revenus au temps de Gengis Khan !
PAR ISMAILA DIALLO
S’AFFRANCHIR DE LA DÉPENDANCE
Il y a des moments dans l’histoire d’un peuple où l’épreuve devient l’étincelle du renouveau. La suspension de financements étrangers, notamment ceux décidés par l’administration Trump, sonne pour le Sénégal comme un électrochoc brutal mais nécessaire.
Il y a des moments dans l’histoire d’un peuple où l’épreuve devient l’étincelle du renouveau. La suspension de financements étrangers, notamment ceux décidés par l’administration Trump, sonne pour le Sénégal comme un électrochoc brutal mais nécessaire. Pendant des décennies, nous avons vécu sous perfusion, croyant que l’aide extérieure était une solution alors qu’elle n’était qu’un poison lent, un piège doré qui nous a maintenus dans la soumission et la précarité.
Mais aujourd’hui, l’illusion se dissipe. Nous sommes face à une vérité implacable : personne ne viendra nous sauver. Personne ne construira notre avenir à notre place. La dépendance nous a enfermés dans un cycle vicieux où nous empruntions pour rembourser des dettes, où nos ressources étaient pillées tandis que nous restions spectateurs de notre propre appauvrissement.
Le Premier ministre Ousmane Sonko l’a dit avec force : notre développement doit être endogène. Ce n’est plus une simple option, c’est un impératif vital. Il est temps de rompre avec cette fatalité économique qui nous condamne à tendre la main. Il est temps d’ouvrir les yeux sur nos propres richesses, sur notre potentiel inexploré. L’industrialisation n’est pas un rêve lointain, elle doit être une réalité immédiate. Nos ressources naturelles, notre jeunesse dynamique, notre intelligence collective sont les véritables leviers de notre prospérité.
Mais pour cela, il faut un changement radical. Il faut briser les chaînes de la corruption qui gangrène nos institutions. Il faut traquer l’évasion fiscale, bloquer les fuites de capitaux, récupérer chaque franc volé au peuple sénégalais. Chaque entreprise, chaque citoyen doit comprendre que l’intérêt national prime sur les intérêts personnels. Ce combat est celui de la dignité, de la souveraineté et de la justice.
L’histoire nous observe. Sommes-nous prêts à écrire un nouveau chapitre ? Un chapitre où le Sénégal ne sera plus un mendiant du monde, mais un bâtisseur de son propre destin ? Un chapitre où nous transformerons nos matières premières au lieu de les exporter brutes pour enrichir d’autres nations ?
La réponse ne viendra pas d’ailleurs. Elle est en nous. Le choix nous appartient : subir ou se relever.
Et cette fois, nous avons l’obligation de nous relever.
PAR MANSOUR FAYE
SCANDALEUSE DÉCISION PAR ARROGANCE ET IGNORANCE
La récente conférence des chefs d’État et de gouvernement de l’OMVG à Banjul continue de faire des vagues. L'ancien ministre dénonce une décision, qui, selon lui, compromet les intérêts stratégiques du Sénégal dans le projet énergétique régional.
La conférence des chefs d’Etat et de Gouvernement de l’OMVG s’est tenue récemment à Banjul où le Senegal était représenté par son Premier ministre. Pour rappel, cette instance est la plus haute dans l’architecture de la gouvernance du système. Entre autres prérogatives, par résolution, elle peut décider définitivement des points d’échanges ayant connu des blocages, pour diverses raisons, au niveau de l’instance du conseil des Ministres de l’organisme.
Je précise que l’OMVG, comme l’OMVS, fonctionne, par consensus à toutes les échelles et pour tous les sujets. Les projets initiés par les pays membres les engagent sur l’endettement et le partage du productible, selon une clé de répartition définie de commun accord.
L’OMVG a initié un projet Energie qui a deux composantes:
- un réseau de transport (appelé ligne d’interconnexion ou autoroutes de l’électricité) de plus de 1700 km, dont le financement dépasse les 700 millions USD;
- l’aménagement hydroélectrique de Sambangalou pour la production d’énergie d’environ 128 Mégawatts et le régulation du fleuve Gambie avec un financement de près de 400 Millions d’euros.
L’exploitation de la production (comme d’habitude) nécessite la création d’une société d’exploitation et de gestion.
C’est ainsi que la SOGESART a été créée.
Lors du processus de négociations pour sa mise en œuvre, il était clairement défini que le Sénégal se positionnerait pour abriter le Siège (probablement à Kedougou) mais surtout prendre le poste de Directeur Général, tout au moins durant la période de remboursement de l’investissement.
Je rappelle que le Senegal, étant le seul pays membre éligible au niveau des partenaires financiers, s’est porté garant de l’endettement de ce projet.
À Banjul, notre frivole tout Puissant Son Altesse Sérénissime « demi-dieu », faisant fi des conseils et suggestions des experts du secteur, aurait pris la décision catastrophique et incompréhensible de ne se contenter que du poste de SG, laissant ainsi les choix du siège et du DG aux deux autres pays membres.
Il semble ignorer que le SG d’une structure d’exécution n’a aucune influence sur les décisions ou la gestion du DG.
La seule question atone qui l’intéressait, était celle relative à l’exonération ou non sur l’accord de siège, nonobstant tous les autres avantages. Thieyy….la fiscalité, toujours la fiscalité…j’ai encore vraiment peur pour notre pays!
En tout de état de cause, le Sénégal n’aura aucune maîtrise sur la viabilité et la rentabilité de la SOGESART. Le risque réel que la garantie donnée par notre pays soit appelée , n’est pas à écarter. Aujourd'hui, tous les acteurs sénégalais du secteur sont effarés et désolés au plus haut point.
Dommage pour notre pays qui subit les conséquences de cette hérésie qui entraîne d'énormes pertes d'opportunités, notamment des emplois; mais pire encore, des risques inutiles de remboursement de centaines de millions de US dollars.
Ah! Quelle vision limitée et .... patriotique!
PAR DR NGAGNE FALL
PUBLICATION DE LA LISTE DES MÉDIAS RECONNUS, ENTRE CONFUSION ET INCOHÉRENCE
Ce travail de reconnaissance en vue d’une régulation efficace et dynamique des médias aurait gagné en fiabilité et en transparence si le MCTN avait pris le temps d’étudier le secteur en profondeur
La volonté du MCTN de réguler le secteur des médias est à saluer car les reformes ont été menées à un temps record dans un but d’assainir l’écosystème médiatique qui est en souffrance depuis plusieurs années, cependant il convient aussi de relever quelques observations qui pourraient aider à mieux affiner la démarche. Le ministère a publié une liste pour chaque catégorie de médias jugés conforme aux dispositions du code de la presse. La liste telle que publiée donne l’impression que nous disposons de cinq catégories de médias, à savoir les télévisions, les radios généralistes, la presse écrite, les radios communautaires, la presse en ligne et les Webtv. Cette classification semble ignorer la spécificité de chaque média et rend difficile le travail de reconnaissance et de régulation.
D’abord concernant les télévisions, un travail de fond aurait permis de faire la différence entre les types de télévisions, sur la même liste, on mélange les télévisions généralistes (Tfm, Waltv, 2stv…), les télévisions régionales (Saloum tv), les télévisions religieuses (Touba tv Mourchid tv, Médina Baye tv) et les chaînes internationales (F24, China tv). Ces chaînes découlent certes du modèle de flot (programme de flux), mais elles appartiennent à des catégories différentes tant dans le mode de financement que dans la régulation. En les regroupant sur une même liste, on leur attribue des fonctions et des missions similaires.
Pourquoi c’est important, si on applique le code de la presse dans toute sa rigueur, les télévisions religieuses ne devraient jamais figurer sur la liste, car l’article 144 du code la presse précise qu’« aucune licence ne peut être accordée à un parti politique, à une alliance ou groupe de partis politiques, à une ethnie ou à un groupe d'ethnies et à une communauté́ religieuse. » Sur la liste y figurent au moins 7 chaînes religieuses et une chaîne appartenant à un groupe ethnique. Donc, sur le tableau présenté, seulement 7 chaînes sont des télévisions généralistes qui se distinguent des autres de par leur portée générale et leur valeur informationnelle.
Le même constat sur la liste des radios enregistrées ou on mélange les radios généralistes, commerciales (Rfm, Walfm, Sudfm...), les radios musicales(Vibe radio), les radios internationales et quelques stations qui devraient figurer sur la liste des radios communautaires (Zigfm, Alfayda fm). Dans certains cas, on ne fait pas de différence entre groupes de presse et le support appartenant au même groupe de presse. Dans la catégorie radios enregistrée, on cite Emedia, Groupe futurs média Walfadri qui ne sont pas des radios mais des groupes ou entreprises de presse regroupant plusieurs supports médiatiques.
Le même mélange de genre est constaté sur la liste des médias en ligne. La démarche pose problème, vu, les exigences du code la presse, on ne peut pas mesurer la conformité d’un média en ligne par le simple fait d’un dépôt de dossier. Le code précise que le média en ligne doit employer, à titre régulier, au moins trois (3) journalistes, En outre, l’entreprise de presse en ligne doit disposer d’un directeur de publication et d’un rédacteur en chef justifiant respectivement d’au moins dix (10) années et sept (07) années d’expérience professionnelle. Le médias doit mettre, à disposition du public, un contenu original, composé d’informations présentant un lien avec l’actualité et ayant fait l’objet, au sein du service de presse en ligne, d’un traitement à caractère journalistique, notamment dans la recherche, la vérification et la mise en forme de ces informations. Au vu de ces exigences, on ne peut pas définir la conformité de ces médias en ligne sans faire une analyse de contenu des sites concernés pour évaluer la nature et la valeur journalistique des informations diffusées.
Ce travail de reconnaissance en vue d’une régulation efficace et dynamique des médias aurait gagné en fiabilité et en transparence si le MCTN avait pris le temps d’étudier le secteur en profondeur. Avec le bouleversement numérique, le travail de régulation des médias est devenu très complexe, des études sérieuses ou une simple consultation des travaux universitaires en amont auraient pu permettre une bonne compréhension et une meilleure appréhension des enjeux du secteur des médias.
Par Habib Demba FALL
FEMME DE PUB, UNE PUDEUR MISE A NU
Nos yeux et nos oreilles se plaindront sans doute du spectacle mondain qui défile comme un long fleuve d’obscénités. Ce n’est pas un propos sorti du néant.
Nos yeux et nos oreilles se plaindront sans doute du spectacle mondain qui défile comme un long fleuve d’obscénités. Ce n’est pas un propos sorti du néant. Je tiens cette réflexion de la relation à ce Jour du Jugement dernier qui a peuplé notre jeunesse. « Bessoum penc » est le rendez-vous de la balance.
Un révélateur de la trajectoire des uns et des autres dans cette Vallée des larmes tant décriée pour ses leurres mais toujours adorée pour ses luxures. Ici, puisqu’il faut que quelques-uns s’indignent et condamnent pendant que d’autres zyeutent discrètement, le verdict est sans appel : chorus pour une condamnation publique du viol de la morale publique pour des âmes dévergondées ayant osé déchirer le silence des anges violés. Ça, oui ! L’impudique parade de la licence met à nu la morale publique.
Que voulez-vous ? Au pays des paravents, l’annonce d’une marche de femmes dans leur tenue d’Eve, sous le titre de « Nue/Taatu néén », choque forcément. J’exagère ? Heureusement, elles n’ont pas produit d’affiche pour cette véritable secousse suscitée au pays de l’isoloir et de la gymnastique lexicale pour nommer la vérité. Si, Si ! Impossible de tout dire au Sénégal ! Je sais. Chaque énoncé émane de son contexte social et finit par y retourner en message comestible. La prise de parole et chaque attitude révèlent une capacité à se fondre dans le moule social.
Sauf à être anticonformiste, brisant ainsi les silences convenus sur des pathologies sociales de notre époque. Le viol fait partie de cette face hideuse de notre société au même titre que cette impudeur placardée sur toutes les rues à travers des bouts de tenue, des mots salaces qui dépassent la suggestion et la grande tentation du nu qu’une exagération confond avec la coquetterie. Attention : la quasi-nudité ne justifie pas le cruel appétit des violeurs ! Cette part d’animalité révèle l’affreux instinct qui pousse à bondir carrément sur des proies souvent faciles. Défense de résister parce que, quelquefois, c’est un ticket pour le trépas.
Des victimes ont quitté ce monde sous les souillures de forcenés. Une écrivaine sénégalaise de renom, plume sans fard et respectabilité affirmée qui n’est autre que Ken Bugul, si l’on en croit Le Quotidien, a elle-même exprimé sa disponibilité à marcher nue pour dénoncer les monstres embusqués dans les demeures, au coin de la rue, les administrations ou, simplement, les transports. Elle a dû bousculer les tabous en exposant l’indicible hypocrisie de « bien-pensants », acceptant l’impudeur lorsqu’elle est tue ou privée. Cependant, il importe de se pencher sur cette folle escapade vers le nu, qui banalise celui-ci dans notre société même si, banalement, ce corps social ne l’accepte pas. Trop souvent, le nu est une tenue provoquée et voulue.
Proportionnellement au rétrécissement du tissu dont certaines ont besoin pour bien s’habiller, la décence ne se mesure même plus en mètres ou en yards. Il suffit de peu pour avoir une tenue qui détone ! Les mensurations les plus prisées par certaines de nos sœurs sont celles qui exposent des rondeurs. C’est une autre forme de publicité qui donne raison à une idée cruelle du produit d’appel. Un publiciste danois a sorti un jour cette phrase cruelle : « Si vous voulez vendre une voiture, mettez une femme à côté. Si la voiture ne se vend pas, déshabillez-la. Si elle ne se vend toujours pas, c’est que la voiture n’est pas bonne. » No comment !
La femme en elle-même est un objet de publicité. Naguère, une certaine idée du marketing disait qu’un produit adopté par la femme est facilement adopté par la famille. Il en est ainsi des magazines people achetés par des femmes ou des hommes mais lus, en fin de compte, par tout le monde. Son image se confond avec le matériel proposé à la vente, non parce qu’elle est l’utilisatrice principale dans le foyer, mais bien parce qu’elle incarne elle-même la chose au-delà du fait qu’elle est une personne. Les deux sujets de curiosité, proposés à une attirance foncièrement vénale, fusionnent en un objet de marketing. La démarche lascive se transforme en un bolide au design lisse. L’expression corporelle interprète la sensualité à l’extrême.
Quand la technologie s’en mêle, il devient possible de transformer un brin d’allumette en liane et un pied carré en orfèvre du ballon rond, seigneur de la sape ou rossignol de la chanson. Et cela devient viral ! L’explosion des médias sociaux et la peopolisation de certains supports d’informations créent un traitement très osé du corps. Nos yeux sont habitués à la nudité et nos âmes s’accommodent de cette la dérive qui n’est pas qu’une expression acceptée de « la tenue d’Adam et d’Eve » dans la nuit des temps. Erreur !
À l’état de nature, la nudité est une évidence qui ne peut heurter tout simplement parce que l’habit n’a pas la valeur de couverture. Aucune convenance n’est bafouée, aucun tabou brisé non plus. Impossible de regretter ce qu’on n’a pas connu, voyons ! Dans nos sociétés moulées dans les tenues, ce n’est pas le cas. Les temps ont changé. Le nu attire, fascine, choque et aliène les grilles de perception du physique faisant du corps une matière de marketing érotique ou exotique. Nous voici au temps du viol de l’imaginaire des cibles d’une publicité qui enjambe les bornes.
Par Sidy DIOP
MOUSTAPHA NIASSE, LA DER D’UN POLITICIEN HABILE
Il a traversé les régimes comme d’autres traversent les décennies. Dans un pays où les carrières politiques s’éteignent parfois aussi vite qu’un feu de paille, l'homme a tout connu : les palais feutrés, les trahisons en douce, les alliances inattendues...
On ne fait pas plus inoxydable que Moustapha Niasse. L’homme a traversé les régimes comme d’autres traversent les décennies : sans jamais perdre l’équilibre. Il a été là sous Senghor, il a été là sous Diouf, il a été là sous Wade, il a été là sous Macky. Et aujourd’hui, après une carrière aussi longue qu’un discours de politique générale à l’Assemblée nationale, il s’apprête à passer la main.
Il y a quelque chose de fascinant chez ces hommes politiques capables de rester dans le jeu, quoi qu’il arrive. Niasse a tout connu : les palais feutrés, les salles de réunion enfumées, les trahisons en douce, les alliances inattendues. Il a été ministre, Premier ministre, président de l’Assemblée, chef de parti, faiseur de rois et éternel survivant. On le disait fini en 2000, et il est revenu. On le disait marginal en 2012, et il s’est retrouvé troisième homme de la présidentielle avant de rallier Macky Sall et de prendre la tête du Parlement. L’art de toujours retomber sur ses pieds.
Dans un pays où les carrières politiques s’éteignent parfois aussi vite qu’un feu de paille, Niasse a su durer. Pas en faisant du bruit, pas en jouant les tribuns enflammés, mais en restant là, solide, discret, patient. Il n’a jamais eu le panache d’un Wade, ni l’aura d’un Senghor, ni même la ruse d’un Macky Sall. Mais il a eu cette qualité rare : la constance. Il n’a jamais brûlé ses vaisseaux, jamais claqué la porte trop fort, jamais insulté l’avenir. Résultat : il a toujours trouvé une porte ouverte quelque part. Aujourd’hui, il dit vouloir tourner la page.
Quitter la vie politique, laisser l’AFP à d’autres. Peut-être. Mais après tant d’années à tirer les ficelles, peut-on vraiment s’arrêter ? Peut-on se contenter de regarder le jeu sans y participer ? Il y a fort à parier que Moustapha Niasse restera, d’une façon ou d’une autre, une voix qui compte. Un de ces sages que l’on consulte, que l’on écoute, qui glisse un conseil ici, une mise en garde là. Car quand on a passé une vie à faire de la politique, on ne raccroche jamais vraiment. On fait semblant, c’est tout.
Succéder à Niasse ? Bonne chance. Il avait « choisi l’espoir » le 16 juin 1999, combattu vigoureusement Abdou Diouf et Ousmane Tanor et fait chuter l’historique Parti socialiste. Son devoir accompli, Moustapha Niasse s’en va. Enfin, c’est ce qu’il dit. Après une carrière aussi longue qu’un embouteillage sur l’Autoroute de l’Avenir, le patron de l’Afp prépare donc sa sortie. Il l’assure, il passe la main. À qui ? Ça, c’est une autre histoire. Parce que prendre la relève d’un homme qui a fait de la longévité un art, ce n’est pas une mince affaire.
Niasse, c’était la boussole de l’AFP, le dernier des mohicans du socialisme à la sauce sénégalaise. Il a traversé les régimes, évité les tempêtes, toujours su quand s’accrocher et quand lâcher du lest. Le remplacer, c’est un peu comme vouloir rejouer «La Tragédie du roi Christophe» sans Douta Seck. Alors, qui ? Un fidèle lieutenant ? Un jeune loup ? Un ancien repêché des marées politiques ? Il faudrait quelqu’un d’assez habile pour maintenir l’AFP à flot, d’assez respecté pour ne pas la voir exploser en vol et d’assez patient pour attendre le prochain virage de l’histoire.
Et surtout, d’assez malin pour faire oublier qu’en dehors de Niasse, l’AFP, c’était surtout… Niasse. On nous dit qu’il y a des prétendants. Bien sûr. Il y en a toujours. Mais tenir le gouvernail après un capitaine aussi endurant, c’est une autre paire de manches. Parce qu’après le départ du sage, il reste souvent une question en suspens : à quoi sert un parti sans son pilier ?
Par Ousmane BADIANE
PLEINS FEUX SUR LES LISTES ELECTORALES 2025
Du 1er février au 31 juillet 2025 les projecteurs de l’actualité électorale vont être braqués sur le théâtre des activités liées à la révision ordinaire des listes électorales, en perspective des prochaines élections locales.
Du 1er février au 31 juillet 2025 les projecteurs de l’actualité électorale vont être braqués sur le théâtre des activités liées à la révision ordinaire des listes électorales, en perspective des prochaines élections locales.
Conformément aux dispositions des articles L.37 et R.28 du décret n° 2021-1196 portant partie réglementaire du Code électoral, ces opérations entrent dans le cadre de la mise à jour du fichier électoral. Elles revêtent une importance capitale si l’on sait que la dernière révision ordinaire des listes électorales remonte à 2016, soit neuf (9) ans, jour pour jour. Cette opération de révision ordinaire des listes électorales qui s’inscrit dans le cadre des efforts pour renforcer la transparence et l’inclusivité du processus électoral est d’autant plus importante qu’elle va permettre aux primo votants de pouvoir s’inscrire dans les différentes commissions administratives ouvertes sur l’ensemble du territoire national et dans la diaspora. Comme chacun le sait, l’élection présidentielle du 24 mars 2024 et les élections législatives anticipées du 17 novembre 2024, ont marqué le début de l’ouverture d’un nouveau cycle politique marqué par l’avènement et l’immixtion active d’une nouvelle génération de jeunes dans l’espace politique. C’est ce processus qui a conduit à la victoire de la coalition « Diomaye président » dont le candidat Bassirou Diomaye Diakhar Faye de Pastef âgé seulement de 44 ans (devenant ainsi le plus jeune président de la République du Sénégal issu de l’opposition), a remporté la victoire de la présidentielle du 24 mars avec 54,28% des suffrages dès le premier tour, donnant incontestablement à ce scrutin, les allures d’un référendum. C’est dire que la jeunesse a joué un rôle de premier plan dans le processus qui a conduit à la victoire de cette coalition. Cette tendance, loin de s’estomper, va au contraire s’exacerber et s’amplifier, si l’on sait que la population sénégalaise est composée de plus 60% de jeunes qui n’ont pas encore atteint la majorité électorale (18 ans).
C’est dire que dorénavant, la composante « jeune », dans les échéances à venir, comme dans celles futures, va faire l’objet d’une attention particulière de la part de tous les acteurs politiques, en raison des enjeux essentiels qu’elle constitue dans notre société. La révision ordinaire des listes électorales qui va démarrer le 1er février pour s’achever le 31 juillet 2025, intervient dans un contexte particulier de l’évolution de notre société. Le président de la République a annoncé à l’occasion de son message du 31 décembre 2024, l’ouverture prochaine de concertations sur des questions constitutionnelles, mais aussi électorales, notamment la problématique du financement, de la rationalisation des partis politiques et d’autres questions majeures concernant le processus électoral. Ces concertations sont d’autant plus urgentes et impérieuses que nous assistons de plus en plus à une inflation exponentielle et continue de candidats et des listes en compétition, dans un écosystème de près de 400 partis légalement constitués, pour une population de 18 millions d’habitants.
Les implications financières que ces consultations électorales, de surcroit très rapprochées (présidentielles, législatives, locales et référendaires) constituent des charges très lourdes sur le budget de l’État. La révision de listes électorales est une étape première et importante du processus électoral. Dans la chronologie des opérations électorales, elle est suivie de beaucoup d’autres étapes du cycle électoral, jusqu’à la phase finale et ultime, le vote. Le principe directeur des listes électorales réside dans le fait qu’elles sont régies par la règle de la permanence qui stipule à l’article L.37 du Code électoral, que « les listes électorales sont permanentes ».
De cette permanence, il résulte, en principe, que les listes électorales ne peuvent et ne doivent pas être modifiées pour quelque raison que ce soit en dehors des périodes de révision, prévues à l’article R.29 du Code électoral qui stipule : « Au plus tard cinq (05) jours avant le début de la révision des listes électorales, les autorités administratives compétentes instituent, par arrêté, des commission d’établissement et de révision des listes électorales, et précisent les horaires ainsi que les lieux où elles doivent siéger. Ces commissions sont constituées en application de l’articleL.39. Elles informent les partis politiques de la date de démarrage de la révision en vue de leur représentation. »
La dérogation à cette règle de la permanence est intervenue 02 (deux) fois dans notre histoire électorale. La première fois c’est sous le magistère du président Léopold Sédar Senghor en 1977, au moment de l’informatisation du fichier électoral. Les listes antérieures à cette période qui dataient de l’époque coloniale, ont fait l’objet d’une annulation par l’article 1er de la loi n°77 du 05 janvier 1977. La deuxième fois où les listes électorales ont été annulées, c’est sous le magistère du président Abdoulaye Wade en 2005, avec la loi n° 2004-32 du 25/08/2004, qui a annulé toutes les listes électorales, et a prescrit l’établissement de nouvelles listes basées uniquement sur une carte nationale d’identité numérisée.
Le Code électoral prévoit une révision annuelle ordinaire des listes qui, généralement, s’effectue du 1er février au 31 juillet et une révision exceptionnelle en année électorale, dont les délais sont fixés par un décret du président de la République. La révision des listes électorales, c’est essentiellement 04 (quatre) opérations : • Inscriptions : Inscrire sur les listes les primo votants qui viennent d’avoir l’âge électoral (18 ans) et les citoyens remplissant les conditions, mais qui n’y figuraient pas, et qui souhaitent s’inscrire pour pouvoir s’acquitter de leurs devoirs civiques. • Radiations : Rayer de la liste les personnes décédées ou déchues de leurs droits civiques pour condamnation. • Modifications : Pour les personnes qui veulent changer d’adresse électorale ou qui étaient frappées d’une incapacité juridique provisoire, et qui souhaitent recouvrer le droit de vote. •
Changement de statut qui concerne l’électeur civil devenu militaire ou paramilitaire ou vice versa. L’article R.32, précise que pour prouver son rattachement à la collectivité territoriale, si l’adresse domiciliaire ou le lieu de naissance qui figure sur la carte nationale d’identité ne se trouve pas dans la circonscription électorale, l’électeur doit produire un certificat de résidence. S’il y a carence dans la délivrance du certificat de résidence quarante-huit heures après la demande, l’autorité administrative y pourvoit sur rapport du service de Police ou de Gendarmerie territorialement compétent. À défaut du certificat de résidence, l’électeur doit présenter soit une facture d’eau, d’électricité ou de téléphone soit un quitus fiscal. La facture ou le quitus fiscal doit être établie au nom de l’électeur et dater d’au moins six (06) mois.
L’inscription sur les listes électorales est un acte individuel qui requiert la présence physique de l’électeur au niveau des commissions administratives compétentes, sous la supervision et le contrôle de la CENA (Commission Electorale Nationale Autonome). Les représentants des partis politiques ou coalitions de partis politiques légalement constitués, siègent dans les commissions administratives instituées à cet effet. (Art. L. 37). Dans l’histoire de la procédure des inscriptions sur les listes électorales au Sénégal, on peut distinguer 02 (deux) grandes périodes : celle d’avant l’acte III de la décentralisation et celle à partir de l’acte III instituée en 2013, un an après l’accession du Président Macky Sall à la magistrature suprême. À partir de l’acte III de la décentralisation Rappelons que le principe directeur de l’acte III de la décentralisation : c’est la territorialisation des politiques publiques. Cela veut dire quoi ? C’est le fait de partir des exigences exprimées à la base par les populations dans les territoires, pour leur offrir des missions pertinentes de service public.
L’acte III ayant supprimé les communautés rurales, les communes d’arrondissement et les régions (collectivités locales), il a été procédé à la communalisation intégrale c’est à dire, à la transformation des communautés rurales et des communes d’arrondissement, en communes de plein exercice. Quant au département, il a été érigé en collectivité locale, en remplacement de la région. C’est ainsi que le Sénégal dispose depuis 2013, de deux (02) ordres de collectivités territoriales réparties en 558 communes et 46 départements (collectivités). Rappelons qu’avant l’acte III, il y avait 373 communautés rurales, 185 communes et 14 régions. La collectivité territoriale est une nouvelle approche conceptuelle. C’est d’abord et avant tout, un construit social, économique, politique et spatial qui détermine de nouvelles formes d’organisation et de gestion des espaces d’exercice du pouvoir local. Les conditions d’inscription sur les listes électorales sont désormais au nombre de huit (08). Ces conditions régissent les inscriptions à l’intérieur du pays et celles des sénégalais établis à l’étranger, communément appelés les sénégalais de la diaspora. Les inscriptions à l’intérieur du pays concernent les communes.
Les conditions sont au nombre de sept (07). 1. Ceux qui y sont nés ; 2. Ceux dont l’un des ascendants au 1er degré y réside ; 3. Tous les électeurs qui ont leur domicile réel dans la commune ou qui y résident depuis six (06) mois au moins ; 4. Ceux qui ont une attache fiscale sans interruption pendant trois (03) ans au moins ; 5. Ceux qui sont assujettis à une résidence obligatoire ; 6. Ceux qui, en période de révision ordinaire, ne remplissant pas les conditions d’âge et de résidence lors de la formation de la liste, les rempliront avant la clôture définitive ; 7. Ceux qui, en période de révision exceptionnelle, rempliront les conditions d’âge au plus tard le jour du scrutin ; Pour les sénégalais de l’extérieur Ceux immatriculés au Consulat du Sénégal, sur leur demande, peuvent être inscrits sur la liste électorale de l’une des communes suivantes : a). Commune de naissance ;b). Commune de leur dernier domicile ou de leur dernière résidence à condition que cette résidence ait été de six (06) mois au moins ; c). Commune où est inscrit l’un de leurs ascendants ou de leurs descendants au 1er degré. (Art. L. 34 et L.35) Code électoral, édition 2022. Voilà les conditions d’inscription sur les listes électorales, à partir de l’acte III de la décentralisation, pour l’intérieur du pays comme pour les sénégalais établis à l’étranger. Comme on le constate, les notions de Domicile et Résidence sont au cœur des conditions d’inscription sur les listes électorales. Le domicile n’est pas la résidence. Il n’est pas non plus l’habitat ni l’adresse. Le domicile au sens du Code électoral n’a pas la même signification que dans le Code civil, ou le Code pénal, ou le Code de procédure pénale, ou le Code des obligations civiles et commerciales ou le Code du travail ou même le Code de la famille. La loi n° 72-61 du 12 juin 1972, portant Code de la famille, distingue quatre (04 types de domicile : (le domicile personnel, le domicile professionnel, le domicile légal et le domicile élu). (Art. 12). Le Code électoral parle de domicile « réel » qui signifie domicile politique.
C’est la circonscription électorale de l’électeur. Dans le dispositif électoral sénégalais, ne l’oublions pas, tout électeur est rattaché à une circonscription électorale qui constitue son principal établissement où il exerce son devoir civique. Comme le précise l’article L.38 du Code électoral : « la personne est domiciliée au lieu de son principal établissement et pour son activité professionnelle au lieu où elle exerce celle-ci. Au sens du présent code, la résidence s’entend comme le lieu d’habitation effective et durable dans la commune ». Il y a lieu de préciser que 03 (trois) caractéristiques fondent la notion de domicile : la fixité, la durée et la nécessité juridique. En conclusion, la révision ordinaire des listes électorales qui va démarrer le 1er février 2025 va polariser les feux de l’actualité politique, en perspective des prochaines élections locales prévues en 2027, selon les dispositions constitutionnelles en vigueur. En raison de ses enjeux, ce scrutin va déterminer de façon décisive le cours politique dans notre pays, singulièrement la présidentielle 2029.