SYLVAIN SANKALÉ DÉPEINT SAINT-LOUIS AUTREMENT
Le roman "A la mode du pays, chroniques Saint-Louisiennes" présente "une société émergente de 1835 que l’on ne retrouve nulle part ailleurs", selon son auteur, le critique d'art
"C’est l’émergence d’une société que l’on ne retrouvera nulle part ailleurs parce qu’on assiste à une société qui n’est pas assise sur la domination", a souligné l’écrivain lors d’une conférence au musée de la femme Henriette Bathily.
Sylvain Sankalé part de l’histoire d’un jeune militaire français qui, en 1835, cinquante ans plus tard, au soir de sa vie, écrit ses mémoires et raconte à ses petits-enfants ce qu’a été Saint-Louis du Sénégal, "un terreau d’expérimentation sociale unique au monde avant la colonisation militaire du général Faidherbe".
"Il est intéressant de savoir ce qui s’est passé avant la colonisation, (…). On y appréhende les rapports humains qui ne sont pas basés sur la domination", a fait savoir M. Sankalé d’où son intérêt à l’analyse de cette époque avant la colonisation au Sénégal.
"Ceux qui arrivaient d’Europe (Français et Anglais) ont pu épouser des femmes noires pour qu’elles s’occupent d’eux, d’où cette population de métisse", dit-il.
L’écrivain et juriste s’est beaucoup intéressé aux femmes noires et à leur enfants "métis" qui avaient un certain pouvoir.
"Les femmes étaient puissantes et avaient un pouvoir qu’elles n’auront pas ailleurs. C’est une population intéressante parce qu’elle est très autonome et ne se laisse pas faire", souligne l’auteur.
Mais ce qui l’a surtout poussé à s’intéresser à la vie de ce jeune militaire français, dit-il, "outre les fonctions qu’il a occupé, c’est l’acte notarié qu’il a pris pour la reconnaissance de sa femme noire".
"Il a cédé la moitié de sa fortune à sa femme parce qu’il reconnait la contribution qu’elle a apporté dans la composition de celle-ci. C’est quelque chose d’exceptionnel dans ce contexte", analyse-t-il.
En tant que historien du droit, Syvain Sankalé s’est beaucoup intéressé à la législation de cette époque où le "Code noir" était appliqué aux colonies sauf que le Sénégal n’était pas une colonie au sens administratif du terme.
"Gorée et Saint-Louis étaient rigoureusement différents de ce qui se passait dans les sociétés antillaises par exemple à cette période", analyse-t-il.
Pour l’auteur, à travers cette époque "on peut étudier les fondements du Sénégal contemporain, car l’urbanisation commence là, on peut comprendre comment elle s’est faite, etc."
Le livre "A la mode du pays, chroniques Saint-Louisiennes", publié en 2007 est préfacé par l’académicien Jean Christophe Rufin, ancien ambassadeur de France au Sénégal.
Le livre est tiré d’une thèse de doctorat en histoire du droit de 750 pages soutenu par l’auteur en 1978.