«TRES SINCEREMENT, LA PLAINTE DE BALBOA NE ME FAIT RIEN »
ALIOUNE SARR SUR LE CONTENTIEUX AVEC LE SENEGALO-SUISSE

Enfin le président du CNG sort de sa «clinique», laissant de côté blouse blanche et autres instruments médicaux, le temps de répondre à nos questions. Dans cette interview, Alioune Sarr jette un coup d’oeil sur l’arène. Cette arène qu’il dirige depuis plus de 20 ans. Rien n’a été laissé rade : l’affaire CNG / Rocky Balboa, l’année blanche concédée par le Roi des arènes, la retraite à 45 ans, les choses à améliorer au CNG, l’insécurité de l’arène Adrien Senghor. Bref, le président du CNG passe à la loupe les maux de notre sport national et tente de trouver des remèdes pour le guérir. Entretien
Président, pourquoi on vous voit très rarement dans les galas de lutte ?
Je ne sais pas ce qu’ils veulent. J’ai l’habitude de dire que le travail ne se fait pas au stade. J’ai des réunions habituelles du comité (CNG). Ensuite, il y a des réunions de bilan par rapport à ce qui se fait durant la semaine. J’ai une équipe qui est tout le temps au stade : le chargé de la communication, le chargé de l’organisation, le 1er vice président… . Voir le président ou ne pas le voir président, je pense que c’est vous journalistes que cela intéresse pour vos buzz. Que je sois présent ou pas, le travail se fait bien. Peut-être que sans être présent physiquement, je suis présent et je suis au courant de tout ce qui se fait.
Qu’est-ce que cela vous fait de voir un lutteur comme Rocky Balboa porter plainte contre une instance dirigeante comme le CNG ?
Très sincèrement, la plainte du lutteur dont vous parlez ne me fait rien du tout. Tout citoyen a des droits et devoirs. S’il se sent lésé dans ses droits, il a le droit de saisir la justice. Je n’ai pas d’autre commentaire à faire. Pour moi, ce n’est pas un sujet d’actualité. Je ne vous le cache pas. Ce sujet ne m’intéresse pas à ce niveau. Pour moi, c’est un dossier que j’ai clos depuis fort longtemps.
Avec le temps, n’avez-vous pas regretté de n’avoir pas sauvé le combat Rocky / B52 ?
J’ai exceptionnellement des regrets par rapport à ce que je fais. Parce que je n’agis jamais sans prendre un temps de réflexion, sans prendre assez de temps pour approfondir ma connaissance du dossier et faire face par rapport à mes convictions. Je n’ai rien à regretter par rapport à ce dossier et aux dossiers antérieurs.
Certains pensent que c’est à cause du CNG que le Roi des arènes a concédé une saison blanche …
On ne peut pas empêcher les gens de penser.
Quelle est votre part de responsabilité dans cette affaire ?
Je n’ai pas de commentaire à faire par rapport à cette question.
L’ancien ministre Abdoulaye Makhar Diop a approuvé la décision de Rocky Balboa de porter plainte car, dit-il, «cela permettra au CNG, aux lutteurs, sponsors et amateurs en cas de situation litigieuse d’aller à un contentieux propice». Que répondez- vous à cette sortie de l’ancien ministre ?
Depuis très longtemps, j’ai une philosophe. Dans ma vie, tout ce qui ne m’interpelle pas directement, c’est-à-dire qui s’adresse à moi en tant qu’individu ou en tant que personne morale, de quoi que ce soit, n’a pas de réaction de ma part. Je n’ai pas lu l’article. Je n’ai pas échangé avec Abdoulaye Makhtar Diop. Je n’ai pas lu ce que vous êtes en train de me dire. Donc, je ne peux pas me permettre de faire un commentaire par rapport à cela.
Abdoulaye Makhtar Diop avait aussi déclaré qu’il y a des choses à améliorer au CNG, par exemple le manque de grandes affiches, du fait des prétentions des lutteurs, du manque des sponsors…
Il a été plusieurs fois ministre. Il a son point de vue. Je le respecte. Peut-être que si j’étais en face de lui, j’aurais donné mes arguments.
Certains acteurs de la lutte comme Mbaye Guèye ne sont pas d’accord sur l’âge limite de la retraite à 45 ans. Pensezvous le revoir dans les saisons à venir ?
Si on devait revoir l’âge de la retraite, ce serait pour réduire encore mais pas pour augmenter. C’est-àdire aller en dessous des 45 ans. Si Mbaye Guèye le dit, c’est plus sentimental que basé sur une science. Je suis médecin et médecin du sport. Je sais ce que l’organisme peut supporter, surtout pour le sport de haut niveau et le sport individuel. Un athlète peut aller exceptionnellement au-delà de 35 ans. La lutte est encore plus complexe, surtout la lutte avec frappe où on reçoit des coups. S’y ajoute que nous ne maîtrisons pas tout ce que les gens consomment pour arriver à des performances. Je pense qu’il faut préserver l’intégrité morale et physique de nos lutteurs.
Certains pensent que les textes du CNG sont obsolètes. Pensezvous les revoir dans les années à venir ?
Ceux qui le disent, s’ils sont du milieu, c’est qu’ils n’ont pas compris leur mission. Chaque année, nous rencontrons toutes les composantes de la lutte. Si les textes du CNG sont obsolètes, les textes de l’ensemble du milieu de la lutte le sont. Cela veut dire que tous ceux qui sont là n’apportent rien au développement.
Vous avez dit tout à l’heure que chaque année vous rencontrez toutes les composantes de la lutte. Alors, allez-vous recevoir l’Association des lutteurs en activité ?
Écoutez, cette question n’est plus d’actualité, pour plusieurs raisons. Je fais partie de ceux qui ont redynamisé cette structure (association des lutteurs en activité), de ceux qui leur ont donné leur titre de noblesse. Avant, les règles n’imposaient pas à un lutteur de passer par des écuries pour avoir une licence. Depuis quelques années, pour faire la lutte avec frappe, il faut appartenir à une structure. Et je pense qu’il faut renforcer les structures et non les individus qui sont dans ces structures. Nous avons dit que désormais nous allons recevoir les présidents d’écuries, au nom de leurs lutteurs. Voilà la raison principale. Il y a eu un incident et les gens ont en voulu faire un buzz. Et nous pensons que nos meilleurs interlocuteurs, ce sont les présidents d’écuries et des écoles de lutte.
Pourtant, vous avez reçu l’association des anciens…
C’est une association d’anciens lutteurs. Le jour où ces lutteurs en activité rejoindront l’association des anciens, ils seront reçus.
Est-ce que vous êtes prêt à recevoir l’association des lutteurs en activité pour clore le débat une bonne fois ?
Chaque personne est libre de faire pour X raisons. Nous aussi nous avons le droit d’agir pour X raisons.
L’ancien entraîneur de l’équipe nationale de lutte, Riche Niang, a déclaré que le protège-dents est réservé à la boxe et non à la lutte. Que lui répondez-vous ?
D’abord, préciser que Riche Niang a été entraîneur de l’équipe nationale de lutte olympique où on ne porte pas de protège-dents. Il a été un lutteur avec frappe au moment où on ne portait pas de protègedents. J’aimerais savoir au nom de quoi il avance cet argument. Si cette phrase vient de lui, je me demande pourquoi. Le port de protège- dent s’explique du fait que les lutteurs reçoivent des coups à mains nues qui sont des coups plus dangereux que ceux avec des gants. Et vous pouvez perdre vos dents. Nous l’avons fait pour protéger l’intégrité du lutteur. S’ils le disent, soit ils sont mal informés, soit ils sont ignorants.
Qu’en est-il du projet du ministre des Sports de budgétiser le Drapeau du chef de l’État ?
Nous sommes là depuis 25 ans et vous n’avez pas encore compris que le comité national n’est pas une fédération. Nous sommes un démembrement de l’État. Ce qui se passe à l’intérieur de notre fonctionnement ne mérite pas d’être avancé publiquement. Attendons de voir. Le Drapeau du chef de l’État, c’est pour le 15, 16 et 17 juillet. Nous allons y arriver. Et comme nous avons toujours l’habitude de le faire, nous allons faire le bilan. Maintenant, pour dire si oui ou non nous avons reçu de l’argent, allez poser la question au ministre des Sports (rires).
Des tests antidopage ont été réalisés il y a deux ans lors du tournoi de la CEDEAO. Les résultats sont-ils encore connus ?
Ça va, Dieu merci. Nos lutteurs n’ont pas été contrôlés positifs jusque-là. Les premiers tests ont été faits sur Yékini en Afrique du Sud en lutte olympique. Même si les tests n’ont pas été officiellement reçus, nos lutteurs n’ont pas été contrôlés positifs.
Et pour Lac Rose et Sa Thiès ?
C’est le même cas pour les autres formes de lutte, à savoir en frappe.
Pourquoi, le CNG a autorisé l’organisation de deux galas de lutte simple à Iba Mar Diop et à Demba Diop alors que ce n’est pas le cas pour la lutte avec frappe ?
Répondre à cette question sera difficile. C’est un fait qu’on n’a jamais posé en réunion. Je prends acte. Maintenant, est-ce que la règle de la lutte sans frappe l’interdit ? Nous avons l’habitude d’organiser à Gaal-Gui et à Adrien Senghor. Pour ce qui est de la lutte avec frappe, j’ai toujours dit que le jour où nous aurons plusieurs combats de lutte dans le même département, on dira que la lutte a fait un grand bond. Les amateurs auront le choix entre plusieurs manifestations. Pour le moment, il y a de gros investissements du côté de la lutte avec frappe et nous sommes sensibles à ce qu’ils font et nous les protégeons.
Le plafonnement des cachets, la catégorisation et le manque de sécurité à Adrien Senghor. Qu’est-ce que le CNG compte faire pour régler ces problèmes ?
Normal que nous ayons demandé le plafonnement des cachets car Adrien Senghor ne répond plus aux normes d’une arène de lutte. Nous avons attiré l’attention des autorités. Cela a été mal construit. Nous avons demandé à recevoir les responsables de l’arène Adrien Senghor, la mairie et l’architecte qui a construit le site. Nous voulons éviter un risque de débordement et peut-être un drame. Si la mise n’est pas trop élevée, certains ténors n’y participent pas et cela réduit le public. Et toutes ces mesures de façon indirecte peuvent réduire l’insécurité.
L’arbitrage au niveau de la lutte simple est souvent décrié, créant souvent des scènes de violence. Quelle solution pour éviter de tels incidents ?
Vous savez, au Sénégal, dès qu’il y a une anomalie, on en fait une généralité. Il faut savoir sur X combats, il y a eu combien de contestations ? Je constate qu’il y a de la violence dans la contestation. Les lutteurs ne connaissent pas les règles et ils s’en prennent aux arbitres. Il y a une table de réclamation. Donc, le lutteur n’a pas besoin d’insulter, ni de sortir des cornes, ni de frapper l’arbitre, ni de rester durant des heures dans l’enceinte empêchant la poursuite de la compétition. Son seul droit est d’aller sur la table de réclamation, de payer une certaine somme, de contester et une commission se réunit pour savoir où se situe la vérité en utilisant les médias. C’est aussi banal que ça. Les lutteurs qui ne respectent pas le règlement prennent des tuiles et ensuite ils disent que le CNG est trop dur. Le CNG sanctionne les lutteurs qui ne respectent pas l’ordre public. (À suivre)