«TOUS POUR LE DIALOGUE ET LES ECHANGES»
FEMME, RELIGION ET SOCIETE

«Si on s’accorde à reconnaître que le Sénégal est à l’abri des conflits interreligieux, néanmoins soigner et pérenniser le dialogue s’impose à tous». C’est la conviction des différentes panélistes qui se sont prononcées lors du dernier colloque sur le plaidoyer pour un dialogue interreligieux dont le thème est «Femme, religion et société». Hier, mercredi 04 mars, la fondation Konrad Adenauer a rendu public le rapport général de ce colloque en présence des (représentants de ses) partenaires dont l’université Cheikh Anta Diop de Dakar, Asecod et l’ambassade d’Israël.
La fondation Konrad Adenauer a rendu public le rapport sur le plaidoyer pour un dialogue interreligieux sur le thème: «Femme, religion et société» déroulé au mois de décembre dernier à Dakar. Selon les actes de ce colloque, le Sénégal reste un pays de tolérance, mais néanmoins, il importe, pour les acteurs, de soigner et de pérenniser le dialogue entre tous partout et en tout temps. Pour la représentante résidente de la fondation, Andréa Kolb, la religion est souvent au centre des guerres et des tensions dans le monde. La religion est aussi souvent instrumentalisée pour faire mal. Et, c’est dans ce contexte que s’est inscrit le colloque qui a pour finalité de faire un plaidoyer pour une bonne cohabitation entre les religions.
Au cours de la restitution dudit rapport, Mme Andréa a souligné que deux religions ont été mises en étude à savoir les religions révélées comme l’Islam, le Christianisme et le Judaïsme ainsi que celles traditionnelles africaines (Rta). La place des femmes au sein de ces religions a ainsi fait l’objet de réflexion et les panélistes en sont arrivées à la conclusion qu’elles sont les forces tranquilles qui propulsent le développement. Même si bon nombre d’entre-elles sont victimes de l’instrumentalisation de la religion et ceci par le manque d’éducation et de dialogue entre les différentes communautés.
Pour Sidy Niang de l’Association sénégalaise de coopération décentralisée (Asecod), la seule manière d’arriver à une stabilité ou une bonne cohabitation entre les religions est d’être profondément ancré dans sa foi tout en acceptant l’autre dans son indifférence. Le professeur Babacar Diop de l’université Cheikh Anta Diop, pour sa part, a relevé que le rôle de la femme est primordial dans la société. Toutefois, «il faut éduquer, communiquer et favoriser les visites et les échanges», a-t-il conseillé.
RÔLE ET CONTRIBUTION DE LA FEMME DANS L’HISTOIRE ET L’ÉVOLUTION DES RELIGIONS : Analyse des discours religieux
Pour cette interrogation sur «le rôle et la contribution de la femme dans l’histoire et l’évolution des religions, analyse des discours religieux», les différentes panélistes, qui sont toutes des femmes, sont allées puiser dans leur domaine spécifique. Pour montrer la place prépondérante de la femme dans la société, Fatou Kiné Camara, Docteur d’Etat en Droit, chargée d’enseignement à la Faculté des sciences juridiques et politiques à l’université Cheikh Anta Diop de Dakar, part du matriarcat, fondé sur une très puissante religion de la déesse, une forte idéologie de la maternité, et un principe moral général d’amour.
«Le matriarcat, poursuit-elle, citant Cheikh Anta Diop, n’est pas le triomphe absolu et cynique de la femme sur l’homme; c’est un dualisme harmonieux, une association acceptée par les deux sexes pour mieux bâtir une société sédentaire où chacun s’épanouit pleinement en se livrant à l’activité qui est la plus conforme à sa nature physiologique. Un régime matriarcal, loin d’être imposé à l’homme par des circonstances indépendantes de sa volonté, est accepté et défendu par lui.»
Sœur Mère Marie Diop, quand à elle, l’analyse sous l’angle de l’Eglise. Elle constate que la femme n’est pas la seule à vivre mal dans la société, elle n’est pas la seule à se plaindre des injustices structurelles. Mais, compte tenu de son importance numérique dans la société et de sa vocation à l’amour, «sa voie retentit plus que celle des autres. Car, comme le dit si bien le Pape Jean Paul II, Dieu confie l’homme, l’humain à la femme, en raison de sa vocation à l’amour». Elle en arrive à la conclusion qu’éduquer une femme, c’est éduquer une société, en ce sens que tout homme passe entre les mains d’une femme.
Mme Selly Bâ, sociologue, a, elle aussi, mis l’accent sur la rupture d’une tradition qui a longtemps privilégié dans l’univers de la prédication audiovisuelle, jusque-là contrôlé par les hommes. De sa communication, il ressort que la prédication des femmes est assez prometteuse et porteuse de changement. Le Rabbin Nava Hefetz pose le principe de l’égalité des sexes qui est au cœur de la religion juive. Alors que le Pr Penda Mbow a, elle, mis en valeur la contribution de la femme depuis la construction de la société islamique naissante (7e siècle).
DROITS, LIBERTÉS ET RESPONSABILITE : La femme sénégalaise entre droit positif et droit musulman
«Femme sénégalaise entre droit positif et droit musulman: L’exemple du mariage et du divorce». C’est le thème introduit par Mme Zeynab Kane. Selon le rapport du colloque, sa communication a établi le caractère institutionnel du mariage protégé par le droit positif et le droit musulman. La superposition des deux règlements n’est pas sans conséquences. Il en est ainsi de la méconnaissance des textes et des procédures.
Mme Clémentine Diop, pour sa part, a abordé le thème du mariage interreligieux. Son succès est, selon elle, commandé par des conditions suivantes: la préparation au mariage qui instaure un dialogue approfondi entre les futurs époux pour une meilleure connaissance des religions; l’acceptation et le respect de l’autre, de sa culture et de sa religion; la célébration de toutes les fêtes religieuses (Korité, Tabaski, Noël, Pâques) et le partage de repas avec les belles familles.
S’y ajoute l’indépendance sociale et économique de la femme et beaucoup de compréhension de part et d’autre avec une union basée sur l’amour et l’amitié, faite de concessions réciproques. Ces ménages sont, selon Mme Diop, au cœur de la rencontre islamo-chrétienne, de ce que l’Eglise appelle «le dialogue de vie». Pour réussir un tel ménage, Mme Diop invite le couple à vivre l’épître de Saint Paul aux Corinthiens: 1 CO, 13, 4 à 8 à travers l’hymne à l’amour.