UNE SIMPLE PAROLE POUR DIRE LES CHOSES
DÉSAMOUR POUR LA CULTURE, DÉSAFFECTION POUR SORANO, DÉSINTÉRÊT POUR LE CINÉMA ?

Mercredi dernier, c’était la projection en première diffusion nationale du film Une simple parole de Mariama et Khady Sylla. L’évènement coïncidait avec la célébration du premier anniversaire de décès de l’auteur de Une fenêtre ouverte.
Une belle opportunité pour le monde de la culture, mais surtout du cinéma sénégalais, de se réunir pour non seulement rendre hommage à leur défunte consœur, mais surtout vivre ce moment unique de la vie de ce film posthume de Khady Sylla. Mais quelle déception à Sorano, lorsque l’on jette un regard sur le public présent.
Quelle déception de constater qu’à peine une centaine de personnes ont pu faire le déplacement à l’occasion de cette sortie nationale. Khady Sylla ne méritait-elle pas mieux ? Le cinéma sénégalais ne mérite-t-il pas mieux ?
Loin de se servir de ma plume pour donner des leçons, je pense que la culture, le cinéma sénégalais et ce qu’a été Khady Sylla (réalisatrice rebelle et talentueuse), méritent plus d’égard. Certes, j’ai été réconforté lorsque j’aperçu dans la salle de Sorano certains pontes et ténors du monde de la culture, tels que Tata Annette Mbaye D’Erneville, Amadou Lamine Sall, Moussa Touré, Jo Ouakam, Thierno Seydou Sall, Hugues Diaz,...
Toutefois, je ne peux m’empêcher de poser des questions au regard du désintérêt réservé à cette production nationale. La culture a- t-elle encore une importance au Sénégal ? De plus en plus, l’on note un désintérêt total à la chose culturelle. Cela se remarque au fil du temps au point de faire dire à un observateur avisé de la vie culturelle sénégalaise, qu’ «il existe un lobby qui tue la culture».
Je ne veux pas y croire. C’est bien ici au Sénégal que ce digne fils du pays avait crié en direction du monde que «la culture est au début et la fin de toute chose». C’est bien ce pays que depuis les années 60, l’on cite comme référence et carrefour de la culture africaine. Que se passe-t-il donc ? Est-ce un simple dégoût du Théâtre Daniel Sorano qui, selon certains, aurait «perdu son âme», qui justifie cette absence du public culturel aux rendez-vous les plus essentiels ? Non !!! Je ne pense pas. Serait-ce déjà que les amis, proches et acteurs du monde du 7e art, auraient déjà oublié l’existence et le talent qu’avait Khady Sylla ?
Ce serait une erreur. Le monde du cinéma pendant que l’on porte un combat pour le renouveau n’a plus le droit de rester en marge de ces rendez-vous. Les jeunes réalisateurs d’ici, ceux qui sont à l’école comme ceux qui aspirent à devenir un acteur du 7e art, devraient être présents à ces rencontres. Les films de Khady sont une poésie et sa façon de réaliser ses œuvres poussent l’humain à réfléchir sur sa vie, sur tout.
Avant-hier encore, elle en a donné la belle illustration à travers Une simple parole, ce film qui tonne comme une chanson généalogique, mais qui surtout présente la beauté et la richesse de la culture d’ici.
Un film à voir absolument en hommage à celle qui fut pour tous, «un talent du cinéma sénégalais». Sa sœur Mariama Sylla disait à juste raison : «Ce qui nous a poussé à faire ce film, c’est l’humain.» L’humain !!! N’est-ce pas finalement ce qui résume toute la cinématographie de Khady Sylla ?