VIDEOWASIS DIOP AVOCAT D'OUMAR SANKHARE
FESTIVAL DE JAZZ DE SAINT-LOUIS

On a du mal à cataloguer ses prestations. Tantôt c’est un concert, avec beaucoup de mélodies, tantôt on a l’impression d’être dans une discussion, avec des thématiques très poignantes qui reviennent souvent. Malgré tout, le concert d’un artiste accompli comme Wasis Diop laisse toujours des traces dans la mémoire. On n’en ressort pas indemne.
Il faut tendre l’oreille, être aux aguets, pour entendre les mur- mures de l’artiste. Beaucoup plus qu’un concert, Wasis Diop entraîne l’auditoire dans les soirées de veillées africaines où le verbe est sublimé. L’homme renvoie, avec son timbre vocal, «à ce vieux à la voix cassée» de Guy Tirolien, dans sa célèbre prière d’un petit enfant nègre, qui raconte les histoires des animaux.
Oui, avec cet artiste, c’est le même procédé, car lui parle du lion, de l’hyène, du lièvre, en somme un langage imagé autour de la savane africaine. Ces rencontres autour du feu étaient le lieu de la formation de l’être hu- main à travers l’enfant.
Sous le ciel pervenche et étoilé de la Place Faidherbe, Wasis a chanté la tolérance dans «Aïda», où il loue cette femme, appelée prostituée, rencontrée lors de ses périples. Celle-ci, au détour d’une conversation, lui fera comprendre qu’elle fait ce job pour nourrir sa famille. Plus tard, le prince Abdou Aziz évoque Dubaï et rêve d’oasis, de Mc Claren, bref d’argent facile.
La nuit avance, le conteur Wasis est de plus en plus en verve, en ces lieux où il fait doux. Il fait l’apologie des pères dans «My son» et plus tard, à l’heure où les esprits inondent la nuit, le conteur parle des «Djinn», ces êtres surnaturels. Plus tard, il s’interroge : «Que faut-il faire ?» de ces ordures, de certains aléas de la vie.
L’homme à la voix rauque loue aussi l’amour dans «Raï Mbele». Cette balade toute en prose et en mélodies s’est déroulée sous la bénédiction de Pablo Moustapha, l’homme aux doigts magiques qui a le don de faire ressortir de son accordéon toutes sortes de rythmes.
HYMNE À LA TOLÉRANCE
Très taquin, lors d’un intermède musical, l’artiste a salué les Bâ, Sow, Kâ, Diop, Ndiaye, Diouf, Sané, en somme le Sénégal, avant de lancer «Sankharé aussi». Cette boutade n’a pas été prononcée par hasard, et à la fin du concert, Wasis Diop a expliqué que cette assertion avait une certaine corrélation avec l’actualité, concernant le livre du Professeur Oumar Sankharé, ayant trait au Coran, avec la levée de bouclier qui s’en est suivie.
Pour lui, des idées «ne doivent en aucune manière nous diviser». De son avis, tout en précisant n’avoir pas lu le livre et aussi ne défendant personne, l’artiste a soutenu que «le Pr Sankharé a son opinion et est libre de penser. Je ne dis pas qu’il a raison ou tort, mais je respecte son aptitude à réfléchir». Il faut, de son point de vue, éviter de jeter l’opprobre sur des gens et travailler à dépassionner le débat car le Sénégal est paix. Nous devons aller, poursuit-il, «vers l’apaisement sur cette question». Il en a profité pour dénoncer l’attitude de la presse qui a participé à amplifier les choses.
Sur un autre registre, en ambassadeur de la paix, Wasis Diop a évoqué son prochain voyage en Rdc. «J’ai écrit une chanson pour la paix dans ce pays car nous devons aller vers. Aussi, poursuit-il, les autres contrées du continent qui connaissent des soubresauts doivent retrouver la quiétude».
Durant cette soirée, le public a pu, en levé de rideau, apprécier la complicité entre Didier Labbé, saxophoniste de talent français, et Jax Ravel le bassiste malgache.