«INCITER LES JEUNES FILLES A ETRE PLUS CONSCIENTES»
«Expériences de vie: vers une aube nouvelle» de l’auteure Aïda Diop est un récit autobiographique de 209 pages, publié par les éditions Harmattan le 19 juin 2020 à Dakar.

Aïda Diop a vu le jour à Dakar en 1977. Licenciée en marketing et communication, elle a travaillé dans un cabinet d’avocat et s’est régulièrement livrée à sa passion d’écriture. «Expériences de vie: vers une aube nouvelle» de l’auteure Aïda Diop est un récit autobiographique de 209 pages, publié par les éditions Harmattan le 19 juin 2020 à Dakar. Le livre raconte le parcours de Dada, une femme introvertie qui observe son monde de son adolescence à l’âge adulte. Elle analyse dans l’oeuvre, sa vie de femme et de mère. Elle confie ainsi son vécu à un journal intime près de 22 ans, de 19 à 41 ans. Dans cet ouvrage, l’auteure y retrace ses expériences aussi belles, riches que douloureuses. Dans cet entretien, Aïda Diop répond aux questions du PATRIMOINE.
Si on vous demande de vous présenter à nos lecteurs que diriez-vous ?
Je m’appelle Aida Diop, épouse Ndiaye. Je suis née à Dakar où j’ai grandi. J’ai trois enfants et depuis quelques années, je suis femme au foyer. Il faut ajouter cependant que j’ai arrêté de travailler quand j’ai senti la nécessité de m’occuper davantage de l’éducation de mes enfants. J’ai accumulé une certaine expérience dans le monde du travail dans des secteurs très différents comme la recherche de petits boulots après mon baccalauréat, la mode (mannequinat), ou le monde judiciaire (cabinet d’avocats comme assistante de direction en quelque sorte) .
Et quelles sont les personnalités qui vous ont marquée ou influencée dans le secteur littéraire ?
Amadou Hampathé Ba que je considère comme le gardien de la Civilisation africaine m’a beaucoup marquée surtout son livre, Amkoullel l’Enfant Peul dans lequel il parle de la mère et de son importance dans la perception qu’on doit en avoir et le respect qu’on lui doit, il s’y ajoute le caractère autobiographique de son écriture. Je pourrais ajouter à cet intérêt celui que j’ai nourri pour Aspects de la Civilisation africaine. Ousmane Sembene. J’aime beaucoup le regard qu’il porte sur nos sociétés africaines, regard sans complaisance, mais chargé de beaucoup d’humanité. Martin Luther King. Le combat qu’il a mené durant toute sa vie pour la liberté des Africains Américains et qu’il livre avec beaucoup de vérités dans son autobiographie. Susan Cain la force des discrets : un livre qui m’a beaucoup parlée dans lequel elle décrit le comportement des personnes introverties dont je fais partie et c’est tout naturellement que je me suis retrouvée dans son écriture. La liste serait longue si je devais les énumérer tous et je ne peux pas passer sous silence l’étude de la vie de Fréderic Douglass esclave noir devenu personnage central dans la lutte des Africains Américains dans l’affirmation de leur liberté par l’étude, la connaissance et la lutte.
Nous sommes en pleine situation de pandémie liée au corona virus au Sénégal et dans le monde, est ce que ça vous confine à écrire ?
La covid 19 doit pousser tout le monde à réfléchir à toutes les conséquences qu’une telle catastrophe mondiale peut avoir sur l’humanité. Il m’arrive d’y réfléchir et de noter des idées qui pourraient un jour me servir dans l’écriture. Cela signifie que cette pandémie met au cœur de la réflexion le devenir de l’humain, or comme tout ce qu’on écrit ramène ou devrait ramener à notre humaine condition, je pense que si on était confiné cela permettrait de mettre à profit une nécessaire distance par rapport à la vie, à la considérer avec des yeux nouveaux et ça peut faire l’objet pourquoi pas d’un genre littéraire à définir. Ça me confine à écrire et me pousse à réfléchir davantage sur les effets d’après Covid.
Quelle appréciation globale faites-vous du contexte de la pandémie qui affecte la société, l’économie et les autres secteurs ?
C’est un phénomène mondial qu’on n’arrive pas encore à maitriser, une situation difficile qui touche tous les secteurs, y compris économique et au Sénégal, un pays sous développé, on le ressent davantage dans des mesures que le gouvernement ne peut pas prendre pour ne pas bouleverser des équilibres déjà fragiles. Il s’y ajoute que les Sénégalais ont du mal à accepter certaines mesures surtout celles qui ont trait à leur quotidien. Je pense par exemple à cette brave femme qui vend son couscous au coin de la rue pour assurer son quotidien, à cette brave femme qui se lève très tôt pour aller vendre son poisson et ramener de quoi nourrir sa famille. Tous les secteurs sont au ralenti et évidemment cela affecte tout un chacun et je prie pour toutes ces personnes qui en sont victimes et j’en appelle vraiment à la vigilance et à respecter les mesures recommandées. Je prie pour que bientôt tout ceci soit qu’un vieux souvenir.
Pourquoi écrivez-vous pour partager des expériences de vie ?
Pour que les lecteurs en tirent des leçons comme moi-même j’en ai tiré. Je veux également attirer l’attention et inciter les jeunes filles en âge de devenir à être plus conscientes et surtout leur ouvrir les yeux à ce stade de leur vie de passage d’un âge a un autre pour ne pas se laisser emporter par qui que ce soit ou quoi que ce soit. Ensuite, je veux faire comprendre à tout un chacun qu’il faut revoir les attitudes, les comportements, se parfaire et réfléchir sur les manières d’être en société et éviter de juger sans savoir et surtout de se garder de tout préjugé de quelque nature qu’il soit.
D’où viennent vos inspirations, ce sont les problématiques sociétales ?
J’observe beaucoup et je ne veux pas oublier tout ce que je peux engranger dans ma conscience immédiate des choses des situations et de ce que j’ai traversé. C’est ce qui fait que c’est un récit autobiographique soigneusement daté et je me suis rendue compte que tout ceci relevait de thématiques et de problématiques qui ont affecté plus ou moins mon vécu dans certains cas y ont laissé des traces. Le choix de publier ces réflexions muettes participe d’une volonté de partage et de sensibilisation pour que tout un chacun puisse en tirer le meilleur parti sans aucun jugement de valeur.
Avez-vous rencontré des obstacles pour publier « expériences de vie ?
Je remercie le ciel, je n’ai pas rencontré d’obstacles et j’ai bénéficié d’un concours de circonstances favorables. Chaque auteur aspire à être publié à être lu. Il faut ajouter que c’est un travail qui n’a pas été facile et qui s’est fait dans un laps de temps assez long (lecture, corrections, relecture, conseils etc…).
Quel est votre regard sur la situation littéraire et les contenus proposés ?
Je note avec intérêt qu’il y a beaucoup de productions littéraires et c’est tant mieux. J’en lis beaucoup et je suis frappée avec des traitements divers de la permanence de certains thèmes relatifs à la société et qui montrent qu’ils sont objet de préoccupations soutenues. Celles-ci peuvent être reprises ou tout au moins être prises en considération dans les politiques menées dans notre pays (éducative, économique et autres à caractère social. La récurrence des thèmes doit obéir à un traitement rigoureux qui, soit, ne lasse pas, soit, ne laisse pas le lecteur sur sa faim.
Comment appréciez-vous l’importance ou l’impact du livre et aussi de la lecture dans les sociétés comme la nôtre ?
Je trouve que le livre n’a pas encore trouvé sa véritable place dans notre société. Les gens ont perdu l’habitude d’aller acheter des livres.
Question de moyens, d’intérêt à susciter ou de priorité par rapport à d’autres urgences, voire même de culture ?
Il faut inciter les individus à lire en créant des bibliothèques un peu partout et faire des séances de lecture pour les jeunes ou même des concours afin de promouvoir la lecture dans notre société. Des structures comme la direction du livre et de la lecture participent de cela et il faut encourager cette politique. Vous avez assisté au vernissage de l’exposition de Ousmane Ndiaye Dago et de ses invités Kalidou Kassé, Kiné Aw, Daouda Ndiaye.
Comment appréciez-vous la vie culturelle à Dakar ?
Je voudrais saluer cette très belle initiative de l’artiste Ousmane Ndiaye Dago, qui a montré une autre manière de faire face à la pandémie en cultivant la vie et en respectant les mesures barrières. Cela donne du souffle et du courage dans ces moments de désarroi face à cette pandémie. Je salue le travail des artistes invités à cette exposition, qui ont du mérite en allant dans le même sens. La vie culturelle à Dakar n’offre pas beaucoup de choix, de manière générale en dehors de la covid 19. Il faudrait souhaiter que l’après covid soit des moments de relance de différentes activités culturelles enrichissantes pour tout le monde.
On dit que les jeunes lisent de moins en moins, que leur direz-vous ?
C’est vrai que les jeunes lisent de moins en moins à cause de l’internet et d’une absence d’éducation à la lecture en dehors d’œuvres qui sont au programme. L’internet agit de manière négative sur la maitrise de la langue ce que la lecture offre. Il faudrait éduquer ou rééduquer les jeunes et les plus âgés à la lecture, source d’enrichissement individuel et collectif et qui participe d’une socialisation progressive qui permet à l’homme de toujours être en situation de contexte par l’échange que cela suscite même si ce n’est pas partagé ou lors de séances de lecture/ discussion ou pendant des séances de cafés littéraires qui manquent cruellement dans notre pays. Je leur conseille de mettre un livre à leur chevet et se donner l’habitude de lire quelques pages avant de s’endormir, une très bonne habitude pour garder une mémoire fraiche. Un deuxième conseil, prendre l’habitude en lisant de noter au crayon et souligner des mots qu’on ne comprend pas, un conseil de ma mère. J’ai toujours procédé ainsi et l’habitude m’est restée.