EN AFRIQUE, ORANGE A DÉPOSÉ LES ARMES FACE À GOOGLE ET FACEBOOK
Les Gafam sont maintenant considérés comme des alliés par le groupe français, qui mise sur le développement de la data et de la fintech sur le continent

« En Afrique, 95 % des téléphones tournent sous Android, le système d’exploitation de Google. » Dans les mots d’Alioune Ndiaye, patron d’Orange Afrique et Moyen-Orient (Omea), l’alliance avec la firme américaine pour commercialiser le nouveau smartphone Sanza Touch d’Orange sonne comme une évidence.
Depuis plusieurs mois, le groupe français multiplie les opérations avec les Gafam : outre le lancement de « l’un des téléphones les moins chers d’Afrique » à 25,50 euros, commercialisé depuis octobre en Guinée-Bissau, en Côte d’Ivoire et à Madagascar, Orange avait déjà rejoint Facebook, avec une multitude d’autres opérateurs opérant en Afrique autour du projet 2Africa, un futur câble sous-marin encerclant le continent.
Changement de stratégie
Pourtant, lors de sa prise de fonctions, en 2018, le ton d’Alioune Ndiaye s’affichait volontiers offensif à l’encontre des deux géants américains les plus présents en Afrique, Google et Facebook.
« Orange a d’abord essayé de consolider son activité de “vache à lait” 2G, décrypte Steve Esselaar, expert dans le secteur des télécoms africaines au cabinet Research ICT Solutions. La société pensait que les autorités réglementaires l’aideraient à compenser ses investissements dans les réseaux haut débit. »
Lesquels sont considérables, d’après Alioune Ndiaye, qui assure qu’« Orange investit 1 milliard d’euros chaque année dans les infrastructures réseau en Afrique ».
« Cette stratégie a clairement échoué, il lui a fallu changer son fusil d’épaule », estime Steve Esselaar, pour qui l’avenir des revenus de télécoms se joue dans la donnée, WhatsApp et Facebook ayant remplacé le SMS et la voix. Un constat que partage Alioune Ndiaye : « La voix, qui représentait 80 % des revenus des opérateurs il y a quelques années, a plongé sous les 50 % », indique-t-il.
Précieuses données
Selon Research ICT Solutions, elle représente 30 % des revenus mobiles en 2020 et pourrait bien avoir totalement disparu en 2025. « Nos chiffres d’affaires ont connu des baisses à deux chiffres en Afrique avec l’arrivée des acteurs over-the-top services [OTT ou service par contournement] », explique encore Alioune Ndiaye.
Pour les chercheurs du cabinet Research ICT Solutions, les OTT n’ont pas seulement pris des parts de revenus aux opérateurs. Ils se sont aussi approprié une denrée de valeur : le contrôle des données d’usage de leurs clients.