«LA OU LES AUTRES PAYS REFLECHISSENT (…), NOUS PASSONS NOTRE TEMPS A NOUS CHAMAILLER…»
NDONGO SAMBA SYLLA, ECONOMISTE DU DEVELOPPEMENT

«La démocratie est-elle porteuse de développement»? C’est pour débattre de ce thème que de nombreux intellectuels ont été conviés, hier, à la célèbre maison d’édition «L’Harmattan». Et pour répondre à cette lancinante question, le conférencier, l’économiste du développement Ndongo Samba Sylla, a coupé la poire en deux.
Comme chaque mercredi, de nombreux intellectuels se sont retrouvés hier à la maison d’édition «L’Harmattan» pour débattre d’un thème. Hier, la question «La démocratie est-elle porteuse de développement?» était au cœur des discussions. Et pour l’introduire, personne de mieux placé qu’un économiste du développement qui peut également se targuer d’une casquette de sociologue. Et pour aborder le sujet, Ndongo Samba Sylla s’est longuement arrêté sur les termes « démocratie » et « développement » pour camper les débats. «Pendant plus de 2000 ans, la démocratie a été perçue un peu partout comme une affaire d’aristocratie qui ne prenait en compte que les intérêts d’une petite minorité. Aux Etats Unis, jusqu’en 1905, il n’a jamais été question de démocratie telle que nous la connaissons de nos jours», explique-t-il.
Poursuivant et s’arrêtant sur le cas du pays de l’oncle Sam, le conférencier considère que c’est la constitution même de cette confédération, qui s’est progressivement élargie, qui demandait à ce que les
Américains ferment les yeux sur certains principes. Ce n’est qu’après la seconde guerre mondiale, relève-t-il, que la démocratie sous sa forme actuelle a commencé à gagner le monde, prenant de plus en plus en compte les préoccupations des minorités.
Prenant le cas du Sénégal, l’ancien champion du monde de scrabble estime : «si nous voulons nous développer, nous avons besoin de démocratie, pas de la démocratie vendue par les libéraux ou vendue par les occidentaux, mais d’une démocratie composée d’une réelle culture sur l’égalité des personnes et l’égalité économique». Car, souligne-t-il, cette démocratie-là peut être porteuse de développement. Mais, suffit-il d’organiser régulièrement des élections pour se présenter comme un pays démocratique ? « Après trois décennies de soi-disant démocratisation en Afrique, le fait est que, pour moi, nous ne pas sommes encore sortis de la trappe néocoloniale et de la trappe du néolibéralisme».
Et, poursuit-il, « à l’heure actuelle, notre revenu par habitant le plus consistant est inférieur de 8 % au revenu par habitant laissé par le colon, en 1960 ». Pour dire que malgré notre statut de pays démocratique, le développement est loin d’être acquis. Car, de son avis, «là où les autres pays réfléchissent sur le développement, nous passons notre temps à nous chamailler entre partis politiques ». Ce qui fonde son scepticisme « sur les performances des systèmes dits démocratiques »