WAVE, CE SONT 20 000 EMPLOIS DÉTRUITS AU SÉNÉGAL
Le patron d’Orange en Afrique et au Moyen Orient, Alioune Ndiaye, commente l’arrivée de la fintech américaine en Afrique de l’Ouest, répond aux critiques sur le prix de l’Internet et salue le rôle positif de l’équipementier chinois Huawei sur le continent

Depuis 2018, Alioune Ndiaye est le DG d’Orange Middle-East and Africa (Omea), qui regroupe les 18 filiales du groupe français en Afrique et au Moyen-Orient. Si, sur le continent, Orange n’a concrétisé ces dernières années ni la grande fusion envisagée avec Airtel et MTN, ni son entrée sur le marché éthiopien, l’ex-patron de Sonatel conserve en interne une grosse côte. Sous sa direction, le chiffre d’affaires du holding est passé de 5,1 milliards d’euros à presque 6,4 milliards en 2021. Et c’est aujourd’hui, et de loin, le premier contributeur à la croissance d’Orange.
À quelques jours de l’arrivée de Christel Heydemann au poste de directrice générale en remplacement de Stéphane Richard, le Sénégalais est le grand invité de l’économie Jeune Afrique-RFI, émission diffusée le 2 avril sur RFI. Retrouvez les moments forts de l’interview réalisé avec Bruno Faure.
Jeune Afrique : Au moment où la gouvernance du groupe est bouleversée par la démission forcée de son PDG, Stéphane Richard, votre départ est-il d’actualité ?
Alioune Ndiaye : J’ai eu la chance dans ma carrière d’avoir toujours pu fixer le moment de la sortie. Et j’avais effectivement prévu de quitter mon poste cette année. Mais il y a l’arrivée d’une nouvelle directrice générale le 4 avril, d’un nouveau président en mai, et nous sommes en discussion pour trouver la manière dont je peux accompagner le groupe pendant cette phase de transition.
Le reproche revient constamment chez les consommateurs quand on leur parle des opérateurs télécoms, ils trouvent trop cher les prix des communications, d’Internet…
Orange fait tous les efforts pour que le prix soit le plus accessible possible. Les Nations unies considèrent que l’accès à Internet est abordable en Afrique quand le prix du gigaoctet est inférieur à 2 % du revenu brut. L’ensemble des opérateurs étaient en moyenne à 13,2 % en 2016, on est passé à 4,2 % en 2019. Concernant Orange, nous sommes dans 18 pays. Dans neuf d’entre eux, notre prix moyen est déjà inférieur à 2 % et dans tous nos pays les prix continuent à baisser.
L’augmentation des cours du pétrole, mais aussi les tensions sur le marché du blé, conséquences de la guerre en Ukraine, accentuent l’inflation partout dans le monde et y compris en Afrique. Les gouvernements cherchent des marges de manœuvre. Tous veulent éviter des mouvements de contestation sociale. Cela alimente-t-il la pression fiscale sur le secteur télécom ?
Nous avons toujours connu une pression fiscale un peu forte, avec jusqu’à 30 ou 40 % de notre chiffre d’affaires prélevé par l’État. Cette tendance est parfois alimentée par les institutions internationales. Le dialogue avec les gouvernements doit permettre d’établir un cadre fiscal et réglementaire plus prévisible, plus équilibré et adaptable à l’évolution rapide de notre industrie.
Vous le dites en des termes diplomatiques, cela vous met-il en colère ?
Ce n’est pas de la colère, c’est une conviction profonde. Le Mali, quoiqu’on en dise, a adopté un niveau de fiscalité raisonnable. Au départ, il n’y avait même pas de taxe sur le chiffre d’affaires spécifique au secteur télécoms, alors que maintenant elle atteint 6 ou 7 % dans chacun de nos pays. À moyen terme, les gouvernements qui font le pari d’un niveau de taxes supportable en fixant des obligations d’investissement adoptent un modèle plus vertueux, car ils ne brident pas le développement du secteur. Au Mali, nous sommes le premier contribuable et c’est l’un des pays où l’on génère le plus de revenus pour l’État.