LE TRAVAIL TITANESQUE DES ACADÉMICIENS DU WOLOF
Ils n'étaient initialement que deux ou trois, ils sont désormais près de 3 000 à s’activer quotidiennement pour l’enseignement de la langue de manière extrêmement codifiée. Un pas de géant qui ouvre la voie vers l'adoption du wolof comme langue officielle

Ils n'étaient initialement que deux ou trois, ils sont désormais près de 3.000 à s’activer quotidiennement pour l’enseignement de la langue wolof de manière extrêmement codifiée qui, grâce à ce pas de géant réalisé en un temps record, ouvre la voie vers l'adoption du wolof comme langue officielle.
En février 2018. trois amis soucieux de la nécessité de vulgariser à large échelle l'enseignement de la langue wolof, décident d'en relever le défi en se servant des nouvelles technologies. Ils n'ont pas les moyens financiers de leur projet, mais ont des idées plein la tête et se sentent capables de soulever des montagnes.
C'est ainsi que le groupe "Jàng Wolof" (apprendre le Wolof) est né. Mais très vite, ses fondateurs sentent qu'il faut en faire beaucoup plus. Ils changent alors le nom qui devient "Wolof Ak Xamle" (WAX, Wolof et transmission de connaissance) WAX étant aussi l'anagramme du mot signifiant "parler" en wolof.
Aujourd'hui WAX a ouvert des classes virtuelles via la messagerie Whatsapp, mis en place un site d’enseignement à distance, traduit des œuvres littéraires ou scientifiques, alimente Wikipedia en articles divers, a aussi créé un site d'information à savoir Saabal.com ... Bref, c’est un travail de Titan qui est en train d’être abattu par ces volontaires déterminés à donner au wolof une place non seulement sur le Web, mais également en incitant la population et l’administration à l’utiliser de manière académique. L’objectif ultime étant d’en faire la langue utilisée dans les correspondances, les textes juridiques, les tribunaux et la transmission des connaissances de toutes sortes.
Car, "la chance du Sénégal est justement d’avoir à sa disposition une langue comprise et parlée par plus de 95% de la population, alors que moins de 20% des Sénégalais parlent ou écrivent couramment le français. Il faut y ajouter les 84% de Gambiens et 37% de Mauritaniens qui sont également wolofophones", argumente Seex Lóo, l’un des deux hommes à l’origine de ce vaste projet et actuel responsable du groupe WAX.
Selon lui, on ne peut pas développer un pays avec une langue que même le tiers de la population ne parle pas.
Afin de réussir cette difficile phase de généralisation du wolof académique, les membres de Wax s’interdisent d’utiliser le moindre mot en français pour communiquer. Ils banissent les termes les plus techniques et les plus recherchés, mais également ceux tellement ancrés dans le parler quotidien des Sénégalais qu’ils finissent par être wolofisés. Ainsi, ils ne disent pas "téléphone", mais "jollasu". A la place de "numéro", ils emploient le terme wolof "limat". Un "ordinateur" est appelé "nosukaay", l’épidémie "mbas", et ainsi de suite.
Face à leurs détracteurs qui estiment que les langues africaines ont pris du retard et ne peuvent pas être des supports d’enseignement des sciences, ils ont trouvé une belle parade, puisque la plupart des termes de physique, de chimie, de sciences de la vie et de la terre sont déjà dans leur dictionnaire. Certains ont même déjà retrouvé leur place dans Wikipedia en wolof, qui s’enrichit quotidiennement de nouveaux articles. Ainsi, si peu de Sénégalais connaissent le terme d'électron, sa traduction par "mbëjfepp", contraction d’électricité (mbëj) et de grain (fepp) peut être facilement mémorisée. Sur le même principe, un proton est appelé "feppsalal", etc.