«ON NE PRENDRA PAS LE RISQUE D’ENVOYER DES ETUDIANTS A L’ETRANGER APRES LE 30 SEPTEMBRE»
Dans cet entretien, le Directeur des Bourses, Khalifa Gaye revient sur les dispositions prises par le gouvernement pour faciliter le voyage aux étudiants.

Avec la pandémie de la Covid-19 et le déroulement du baccalauréat au mois de septembre, des illusions se présentent sur la rentrée académique pour les étudiants bénéficiaires de bourses étrangères. Dans cet entretien, le Directeur des Bourses, Khalifa Gaye revient sur les dispositions prises par le gouvernement pour faciliter le voyage aux étudiants. Toutefois, selon lui, certains d’entre eux risquent de rater leur rentrée en raison du délai très court lié aux procédures. Il souligne que l’Etat du Sénégal qui a octroyé plus de 125 bourses étrangères cette année, paie environ 70 milliards de F Cfa en termes de bourse aux étudiants.
Comment bénéficier d’une bourse étrangère à votre niveau ?
Nous avons plusieurs types de bourses étrangères, pour la France mais aussi pour d’autres pays européens et en Amérique, surtout en Amérique du Nord. Nous avons donc les bourses d’excellence où il s’agit d’encourager les élèves excellents au baccalauréat et c’est particulièrement les élèves qui ont eu la mention Très Bien et Bien. Les critères ne se limitent pas seulement à la mention. Pour bénéficier d’une bourse d’excellence, il faut aussi avoir une inscription en classe préparatoire. On a souvent cette incompréhension et surtout des élèves qui sont hors de Dakar. Souvent, ils ne prennent pas les dispositions quand ils sont en classe de Terminale pour chercher ces inscriptions en classe préparatoire. Il faut une classe préparatoire pour la France. Pour les autres pays, il faut que l’université dans laquelle vous voulez vous inscrire soit dans le top 100 Shanghai (classement académique des universités mondiales, Ndlr).
Où en êtes-vous avec les dossiers des bourses étrangères de cette année ?
Cette année exceptionnellement, vu la situation de la pandémie, on avait sorti de notre agenda cette histoire de bourses d’excellence. Comme les élèves allaient dans des classes préparatoires et qu’en France, les enseignements dans les classes préparatoires commencent tout au début du mois de septembre et que nous, notre bac allait commencer le 2 septembre, on se disait que les élèves n’auraient pas la possibilité de voyager. Surtout que les classes préparatoires scientifiques, c’est des enseignements très serrés. Ce sont des programmes qui se font en une année et demie. Ce qui se fait en trois ans à l’université, ils vont le faire en une année et demie en classe préparatoire. Ce qui fait qu’on ne pouvait pas se permettre d’envoyer des étudiants qui allaient être à un mois de retard. C’est pourquoi, dès le départ, on s’était dit qu’il n’y aurait pas de bourse d’excellence. Mais ce n’était pas sans compter avec la volonté politique.
Le Président de la République a donné l’instruction à notre ministre de l’Enseignement Supérieur, de la Recherche et de l’Innovation, Cheikh Oumar Ann, de travailler pour envoyer des étudiants bacheliers parce qu’on a eu de très bons élèves qui ont eu le baccalauréat avec de très bonnes mentions. Et pour respecter les conventions qu’on avait avec des universités, il fallait envoyer des étudiants. Aussi, les élèves comptaient beaucoup sur les bourses. C’est une source de motivation. Ce qui a fait que le Président a demandé à ce qu’on travaille pour envoyer des élèves. On a travaillé dans une première commission pour sélectionner les 17. Au départ, on n’a eu que 17 conventions qui nous avaient été envoyées par des classes préparatoires. Ce sont les classes préparatoires qui nous envoient des admissions et c’est à nous d’affecter des admissions à des élèves. Ces classes souhaitaient avoir que des séries S1. L’Office du Bac nous a envoyé la liste des candidats admis S1 avec mentions Très Bien. Parmi ces candidats, nous avons sélectionné les 17 premiers et ils sont maintenant en cours de route. Ils ont eu leurs visas hier (mardi 22 septembre, Ndlr). En principe, ils doivent partir aujourd’hui (mercredi 23 septembre, Ndlr). Ça, c’était la première partie. Ensuite, on a fait ce qui se faisait habituellement. On a sorti un communiqué pour sélectionner les candidats qui avaient la mention Très Bien ou Bien et des préinscriptions dans les classes préparatoires. Ils ont déposé dans un délai très court cette année. Parce que comme je l’ai dit, les enseignements avaient déjà démarré de l’autre côté et ils doivent partir avant la fin du mois. Ils avaient un délai très court malheureusement pour certains. Mais ils ont déposé quand même et tous ceux qui avaient des dossiers conformes ont été retenus. Ils sont au nombre de 98. Ils sont dans le processus de recherche de visa. Ils ont bouclé leurs dossiers de Campus France. Ils doivent en principe d’ici demain ou après demain (jeudi 24 ou vendredi 25 septembre, Ndlr) au plus tard déposer les visas pour espérer partir. Maintenant, il y a un problème qui va se poser après. Quand ils avaient déposé, on leur avait demandé de nous amener des dérogations que l’université va continuer de les accepter jusqu’au 30 septembre. Mais le problème est que, comme ils déposent leurs visas entre demain et après demain (jeudi 24 et vendredi 25 septembre), le visa peut sortir au-delà du 30 septembre. Donc, la question que nous nous posons, est-ce qu’après le 30, ils vont être toujours acceptés par les établissements ? Si oui, on va toujours les accompagner. Sinon, on ne prendra pas le risque de les envoyer parce qu’on risque de les faire des SDF. On leur conseillera de rester et chercher. Il y a donc des risques parce qu’on a commencé notre baccalauréat très tardivement.
Vous n’avez pas cherché à savoir s’ils vont être acceptés ou non ?
Comme pour les conventions, ce n’est pas à nous de leur trouver des dérogations. C’est eux parce que c’était à eux de chercher les préinscriptions. C’est à eux maintenant de contacter ces établissements et de leur demander de leur envoyer des dérogations ou bien même s’ils n’envoient pas de dérogations, qu’ils garantissent que s’ils viennent après le 30 septembre, ils vont les accepter. De toute façon, on a déjà tout fini. On est disposé à acheter des billets. On les accompagne dans les démarches administratives. Maintenant, si tout cela est réglé et qu’ils aient des prolongations, on va toujours les accompagner. Hier (mardi 22 septembre, Ndlr), on leur a déjà ouvert leurs comptes en France pour préparer leurs paiements. Mais nous ne pouvons pas leur trouver de logements ni de dérogations.
-Beaucoup de boursiers déplorent le retard dans la délivrance des visas. Est-ce à dire que vous n’avez pas pris les dispositions nécessaires ?
Pourtant, on a pris toutes les dispositions. D’ailleurs, c’est l’assistante du chef de service de Paris qui est actuellement ici et qui les accompagne. Le problème de visa, même si le ministère des Affaires Etrangères s’est bien impliqué à travers le ministre chargé des Sénégalais de l’Extérieur, à un moment donné, c’est le système. On ne comprend pas. C’est les machines. Quand on met toutes ces informations, on attend que le système soit ouvert pour pouvoir imprimer le visa. Ça ne dépend pas d’une personne mais d’une machine et on ne peut pas contrôler la machine. Mais ils ont presque tous leurs visas en moins d’une semaine. Quelles sont les dispositions que vous avez prises pour faciliter le voyage des boursiers avec la fermeture des frontières avec l’Union européenne? Tout ça a été réglé par le ministère chargé des Sénégalais de l’Extérieur. Nos étudiants partent, même s’il ne s’agit pas des boursiers d’excellence. Ils partent depuis le mois d’août. Depuis le 15 août, nous avons un lot important d’étudiants qui a déjà voyagé. A la Direction des Bourses, on signe des autorisations de sortie de territoire. C’est une attestation. Combien d’étudiants bénéficient de bourses étrangères chaque année ? Pour les bourses d’excellence, ça tournait autour de 70 au maximum pour les autres années. Cette année, nous sommes au-delà de 125. C’est un coût très énorme parce que déjà l’étudiant est payé à 450000 F Cfa par mois. C’est 650 euros que l’étudiant perçoit par mois de la première année jusqu’en master s’il ne redouble pas. S’il redouble, la bourse est transformée en bourse normale. Pour l’autre type de bourse étrangère qu’on attribue aux autres Sénégalais demandeurs, ça dépend maintenant des villes. Si c’est Paris, pour l’année, presque l’étudiant perçoit 2 300 000. Si c’est hors Paris, l’étudiant reçoit 1900000 F Cfa.
A combien s’élève le montant des bourses payées par l’Etat du Sénégal chaque année ?
L’Etat du Sénégal paie un montant très élevé en termes de bourses. Il paie chaque année et surtout ces deux dernières années environ 70 milliards de F Cfa.
Quelles sont les mesures que vous avez prises pour remédier au retard de paiement des bourses ?
On a fait un travail très colossal pour qu’il n’y ait presque plus de problème de bourses. Déjà, il y a un engagement de l’autorité de mettre à la disposition des structures concernées les fonds. C’est tout un système. Il y a le Trésor. Je peux parler de manière générale le ministère des Finances qui fait le contrôle et qui met à la disposition les fonds pour le paiement. Il y a les universités aussi qui participent en mettant à disposition les listes des étudiants ayant droit à la bourse. Il y a aussi la communication qu’on a eu à mener entre nous et les étudiants au cas il y aurait de retard. Cette année, les bourses se sont payées tous les mois avant le 30. Il y a eu un seul mois où il y a eu un retard et on ne peut pas le considérer comme retard parce qu’on a commencé le 4 alors que le paiement doit commencer le 5 du mois. Toutefois, je ne dis pas qu’il n’y a pas de difficultés.
Quelles sont ces difficultés?
Vous savez, quand nous nous payons, nous faisons nos états validés par le ministère des Finances et ça passe par un processus assez long jusqu’à arriver à Ecobank qui fait le paiement. L’Etat du Sénégal paie presque 130000 étudiants. Ecobank, ne pouvant pas payer en un seul jour pour 130000 étudiants, a trouvé des partenaires comme Wari, Free Money, Proximo etc. Et c’est là où il y a des problèmes. L’étudiant peine à recevoir le code pour être payé. Parfois, il ne sait pas qui paie. Les opérateurs peuvent changer. Même si l’Ecobank a maintenant mis en place une plateforme pour gérer des réclamations, c’est toujours à améliorer. On y travaille. On espère que d’ici l’année prochaine, tout cela soit derrière nous. L’autre difficulté rencontrée par les étudiants, c’est souvent liée aux emplacements de certaines structures comme ceux qui sont à l’UVS où ils sont dans des ENO (Espaces numériques ouverts). On peut parfois avoir un opérateur qui n’a pas un montant élevé.