VIDEOL'INFLATION DÉFIE LE NGALAX PASCAL
Malgré des hausses de prix atteignant 50% sur certains ingrédients essentiels, les familles s'organisent et s'adaptent, bien décidées à ne pas laisser les contraintes économiques compromettre ce pilier du vivre-ensemble islamo-chrétien

À la veille du Vendredi saint, les familles sénégalaises ont préparé activement à célébrer Pâques avec le traditionnel ngalax, véritable symbole du vivre-ensemble entre communautés musulmanes et chrétiennes.
Le ngalax, préparation sucrée composée de pâte d'arachide, de pain de singe (bouye) et de tchakri (céréales), est devenu au fil du temps bien plus qu'un simple dessert. C'est le symbole du partage interreligieux qui caractérise le Sénégal. "On a grandi comme ça. Si c'est le ngalax, on bascule sur le ngalax, si c'est la Korité, c'est la Korité", témoigne un membre d'une famille mixte.
Malgré l'augmentation significative des coûts des ingrédients à l'approche des fêtes, la tradition perdure. Le sac de pain de singe (50 kg) est passé de 15 000 à 17 500 francs CFA, tandis que la pâte d'arachide (20 kg) a augmenté de 20 000 à 30 000 francs CFA. "Il faut avoir un grand cœur pour gérer vraiment", confie une préparatrice qui admet avoir pensé que "cette année ça n'allait pas marcher".
La confection du ngalax est devenue un rituel familial où musulmans et chrétiens se retrouvent. "Nous venons la veille chahuter, déconner et tout préparer en famille", explique l'un des participants. Ces veillées qui durent souvent jusqu'au petit matin sont des moments privilégiés d'échange et de convivialité.
Si traditionnellement chaque famille apportait son propre récipient, la pratique a évolué. Aujourd'hui, les hôtes investissent dans des pots en plastique jetables, représentant une dépense supplémentaire pouvant atteindre 100 000 francs CFA. "Moi, le plaisir c'est de le partager quand chacun vient chercher son petit 'gamel'", témoigne une cuisinière.
Malgré les difficultés économiques et l'évolution des pratiques, le ngalax reste un élément incontournable des célébrations pascales au Sénégal. "C'est une bonne tradition de partager. Chaque année on fait le ngalax impérativement", affirme un habitant. Cette préparation continue d'incarner les valeurs de partage et de cohésion sociale qui font la spécificité du modèle islamo-chrétien sénégalais.
À l'heure où les défis économiques pèsent sur les ménages, le ngalax demeure un rappel puissant de l'importance du vivre-ensemble et de la préservation des traditions qui unissent plutôt que de diviser.