DEMAIN, JE PARTIRAI
Poète ? Certainement pas. Le temps d’une phrase, guettée, attendue, espérée, l’homme utilise ces mots, rappelant un vers de ce célèbre poème de Victor Hugo :

Poète ? Certainement pas. Le temps d’une phrase, guettée, attendue, espérée, l’homme utilise ces mots, rappelant un vers de ce célèbre poème de Victor Hugo : « Demain, dès l’aube, à l’heure où blanchit la campagne, je partirai… ». Lui, annonce, ménageant déjà son effet : « demain, à l’heure contenue dans la convocation, nous irons répondre… écouter, le juge du Premier cabinet ». La comparaison s’arrête là.
Pas une once de poésie dans le discours servi pendant près d’une heure et trente minutes face à la nation. Dans un décorum rappelant justement cet exercice républicain dont la solennité demeure le principal critère : le message à la nation, le leader des patriotes s’est approprié ses codes. Pour sa troisième sortie médiatique en l’espace d’un mois, Ousmane Sonko endosse ses habits de « Président ».
En guise d’armoiries de la République, un baobab, symbole de la Nation ; un tableau d’art abstrait, un fauteuil rouge, un bonnet de la même couleur avec un rappel au niveau des broderies du « costume » traditionnel, complètent le décor. La sortie est théâtrale. Une mise en scène était de mise.
Répondant à la supplique de tous, l’homme finit par déférer à la convocation. « Quand on prend des conseils, on les écoute », dixit Ousmane Sonko. Donc, écoutant ces fameux conseils, le leader des « Patriotes » décide de se « rendre ». La voix de ses avocats a fini par être entendue, d’abord, la voix de toutes les franges de la société, ensuite. « Mais cela ne veut absolument pas dire une abdication », avertit déjà le leader du Pastef. Un avertissement suivi d’effets.
En ces temps troublés, la conférence de presse est ainsi devenue le canal de communication le plus prisé. La presse ne sait plus où donner de la tête ou plutôt où tendre son micro. Dans le désordre, les sorties se succèdent. Les souteneurs qui appellent à une marche, programmée 48 heures après la sortie du chef de file de Pastef. Les aléas du direct révèlent que cette décision ne fait pas l’unanimité. Qu’importe ! Le groupe en a décidé ainsi.
Face à la presse, Idrissa Seck, ci-devant Président du Conseil Economique Social et Environnemental, s’adresse lui aussi aux Sénégalais. Lui, émet une conditionnalité à son rôle auto-proclamé de médiateur, ce qui fausse et efface l’intention annoncée. Au tour du ministre de l’Intérieur, la voix officielle de la République, qui sermonne, sanctionne, avertit, conseille. Tant de registres que l’on finit par s’y perdre. Surtout que le charisme manque à l’appel, balayé définitivement par des hésitations qui affaiblissent le discours. De son côté, le Médiateur de la République appelle à l’apaisement dans un message qui aura été moins relayé que celui des intervenants précédents. Pendant ce temps, dans les rangs de l’opposition, chacun semble vouloir « profiter » du « buzz » du chef des Patriotes pour se rappeler au bon souvenir de ses compatriotes. Comme lors d’une séance-photo de groupe, chacun étire le cou, joue des coudes, s’empresse de se coller à son voisin immédiat pour être devant l’objectif. Voici que l’on aperçoit quelques figures « oubliées » de l’opposition, bien en sécurité dans un véhicule hors de prix, pour figurer sur les images de la marche organisée.
Conséquence de cette « non abdication annoncée », trois jours d’émeutes, de guérilla urbaine où l’on compte malheureusement les morts et les blessés, sous l’œil des objectifs, relayés en temps réel sur tout type d’écrans. De quoi couper le signal de certaines chaînes de télé, d’attaquer et d’incendier des maisons de presse ou d’agresser des journalistes. Partout la violence se fait omniprésente, dans les actes, les propos et les commentaires partagés encore et encore.
Dans ce tourbillon irréaliste, adoptons « l’hypothèse optimiste » du journaliste, actuel Directeur de l’Information du Groupe Futurs Médias, Souleymane Niang. Livrant son analyse, il espère notamment qu’un « dialogue national sincère et inclusif s’engage, qui ira aussi loin que la refondation de la démocratie sénégalaise l’exigera ». Amine