LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL ORPHELIN DE SON PRESIDENT
Magistrat émérite, Mamadou Badio Camara et le Conseil constitutionnel se sont fortement distingués par leur ferme opposition à la volonté de Macky Sall, de reporter la dernière élection présidentielle de février à décembre 2024

Le président du Conseil constitutionnel, Mamadou Badio Camara, est décédé hier, jeudi 10 avril, à Dakar à l’âge de 73 ans. Magistrat émérite, Mamadou Badio Camara et ses collègues du Conseil constitutionnel se sont fortement distingués par leur ferme opposition à la volonté de l’ancien chef de l’Etat, Macky Sall, de reporter la dernière élection présidentielle de février à décembre 2024.
Le Conseil constitutionnel orphelin est de son président. Mamadou Badio Camara est décédé hier, jeudi 10 avril à Dakar, à l’âge de 73 ans. Magistrat émérite, Mamadou Badio Camara a accédé à la présidence de cette haute juridiction à la suite de sa nomination, le 5 septembre 2022 par décret présidentiel, en remplacement de Papa Oumar Sakho. En 2024, le défunt magistrat et ses collègues du Conseil constitutionnel se sont fortement distingués par leur ferme opposition à la volonté de l’ancien chef de l’Etat, Macky Sall, de reporter la dernière élection présidentielle de février à décembre.
A travers plusieurs décisions successives, le Conseil constitutionnel a ainsi pu permettre la tenue de la présidentielle avec un léger décalage de la date initiale et la passation du pouvoir entre le président sortant, Macky Sall, et son successeur, Bassirou Diomaye Diakhar Faye dans les délais constitutionnels après la cérémonie d’’investiture tenue le 2 avril 2024.
S’exprimant le 3 octobre dernier à Paris à l’édition 2024 de la Nuit du droit, évènement organisé par le Conseil constitutionnel français, Mamadou Badio Camara avait révélé que le Conseil constitutionnel avait signifié au président Macky Sall que la Constitution ne lui permettait pas de briguer un nouveau mandat, après être resté 12 ans à la tête du pays.
Dans son discours, lors de l’investiture du président Bassirou Diomaye Faye, le 2 avril 2024 à Diamniadio, Mamadou Badio Camara avait également fait remarquer à l’endroit de l’actuel chef de l’Etat que le « choix incontestable et éclatant du peuple sénégalais lors de l’élection présidentielle du 24 mars, symbolise sa volonté de changer de paradigme dans sa gouvernance et de génération dans son gouvernement ».
Loin de s’en tenir-là, Mamadou Badio Camara avait aussi invité le Président Diomaye à se souvenir, « à l’heure où surgiront les inévitables tentations du pouvoir, l’ivresse de la puissance, les démons de la division, de la main de Dieu, dont la volonté domine et détermine inéluctablement les moments que nous vivons ».
Poursuivant son propos, après avoir prié pour « que cette bénédiction divine ne cesse de tirer notre pays de tous les traquenards tendus par la main de l’homme, en particulier dans la perspective d’une exploitation prochaine, et porteuse d’espoir, du pétrole et du gaz », le défunt président du Conseil constitutionnel avait déclaré à l’endroit du président élu : « Vous êtes désormais le garant de la démocratie sénégalaise, du respect des institutions, des droits et libertés, gage de la stabilité de l’État et de l’unité du Peuple sénégalais, dans sa diversité. Prions que les espoirs de notre peuple, placés en vous, Monsieur le président de la République, fleurissent et portent fruits. Que Dieu Le Tout-Puissant vous assiste ! »
Diplômé de l’École nationale d’Administration et de Magistrature (ENAM), section Magistrature, faisant partie de la 2e promotion, Mamadou Ba dio Camara a occupé plusieurs fonctions au sein de la magistrature de 1977 année où il a débuté sa carrière jusqu’à son décès. De Premier substitut du procureur à Dakar, il est passé par les tribunaux de grande instance de Kaolack en tant que Procureur de la République puis à Ziguinchor, à partir de 1984 avant d’atterrir en 1991 à la Cour d’appel de Dakar comme Substitut général. Nommé Procureur-adjoint à Dakar de 1993 à 1998, Mamadou Badio Camara a finalement rejoint la Cour de cassation après sa nomination comme conseiller puis secrétaire général au sein de cette juridiction. En 2008, il a intégré la Cour suprême après sa nomination comme Secrétaire général, fonction qu’il cumula avec celle de président de la Chambre criminelle de la Cour suprême de 2008 à 2013. Au mois d’août de la même année, il est promu Procureur général avant d’accéder aux fonctions suprêmes au niveau de cette haute juridiction après sa nomination en avril 2015 comme Premier président de la Cour suprême. Sur le plan international, Mamadou Badio Camara a eu à occuper durant sa carrière diverses fonctions dont celle de Chargé de mission de l’Organisation internationale de la Francophonie (O.I.F) : mission d’audit organisationnel de la Cour de cassation d’Haïti (Port-au-Prince, juin 2007) et mission d’appui à la justice pénale (Port-au-Prince, juin 2008) et membre élu du comité des Nations-Unies sur les disparitions forcées en 2011.