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25 avril 2025
Développement
PAR Mouhamadou Moctar Sourang
RÉFLEXIONS ET PROPOSITIONS A PROPOS DE L’OUVERTURE PROGRAMMÉE DES CLASSES
Comment attendre des écoliers de bas-âge l’observance stricte des gestes-barrières quand ils sont livrés à eux-mêmes, à l’intérieur comme à l’extérieur de leurs établissements, quelles que soient par ailleurs les mesures d’encadrement prises ?
La situation de l’Ecole en cette période de pandémie du Cornavirus, en particulier à la veille de la réouverture des classes d’examens, décidée par le gouvernement pour le 02 juin prochain nous inspire quelques réflexions que nous voulons partager.
La faisabilité de la décision, au vu de la complète désorganisation qui prévaut dans les prémices de sa mise en œuvre, apparait plus que problématique, voire irréalisable. Il y a lieu de s’alarmer de ce que les opérations entreprises pour le convoyage des enseignants à leurs lieux de travail respectif soient sujettes de risques fort élevés de circulation du virus que l’on est censé combattre ! Toutes choses qui ne rassurent pas les parents d’élèves et inquiètent les enseignants eux-mêmes. Comprenant le souci des autorités publiques de « sauver » l’année scolaire, nous les invitons instamment à étudier les réaménagements idoines à opérer dans les meilleurs délais.
A cet égard, il nous parait particulièrement dangereux d’inclure dans cette réouverture imminente de l’Ecole, les classes du niveau élémentaire. Comment en effet, attendre des écoliers de bas-âge l’observance stricte des gestes-barrières quand ils sont livrés à eux-mêmes, à l’intérieur comme à l’extérieur de leurs établissements, quelles que soient par ailleurs les mesures d’encadrement prises ? Une telle décision prend-elle en compte le dénuement de bon nombre des établissements scolaires qui peuvent manquer même de toilettes adéquates, voire d’eau courante ?
Une telle décision, telle qu’elle est déclinée, pose dans sa conception même, le problème d’égalité de chances dès lors que les élèves vivant avec une maladie chronique sont exclus dans le processus. Qu’en sera-t-il alors de leur sort, de la suite de leur cursus scolaire ?
Par contre les élèves de Terminale, postulant au baccalauréat, sont suffisamment matures pour être pris en compte et organisés pour une reprise des cours en début juin. L’examen du BAC pourrait ainsi être envisagé au mois d’août, pour permettre aux nouveaux bacheliers de postuler aux grandes Ecoles de pays étrangers, avant le début de la nouvelle année académique.
Pourquoi ne pas attendre le mois de septembre le temps d’évaluer la situation et de tester l’expérience des terminales pour la réouverture des autres classes, tout en prévoyant d’organiser les contrôles du second semestre de l’année en cours et les évaluations de passage en classe supérieure au mois de Novembre ?
La prochaine ouverture des classes pourrait alors être envisagée au plus tard en janvier 2021.
Par Moussa Kamara
CHIENLIT !
A lire les gazettes, nous avons l’impression qu’il y a des sénégalais qui ignorent ou défient les lois de la République. Tantôt un groupe d’individus se lève pour décréter tout bonnement une interdiction d’inhumer !
Qui l’eut cru ? Une grève en pleine pandémie de Covid-19 est la menace brandie par des transporteurs dirigés par un Gora Khouma sans peur ! Grève de soutien clament-ils mais le lien est vite fait avec les fonds de soutien généreusement distribués ailleurs.
Le sénégalais raffole d’argent depuis vingt ans que les Libéraux règnent. Nous avons tous vu le précédent résident distribuant abondamment et généreusement des millions à d’heureux sénégalais et étrangers.
Des lutteurs aux footballeurs et basketteurs sans compter les sinistrés et victimes des inondations dignement logés à Jaxay ; les planches à billets avaient bien fonctionné. Nonobstant le cactus et le rictus créés par l’opération Segura, foireuse et malheureuse, l’opinion découvrait que la corruption était une règle non écrite chez plusieurs de nos dirigeants. Alors avec les sous du fonds Convid-19, tous les pauvres diables du Sénégal se croyaient élus.
Déçus de n’avoir rien reçu, ils s’adonnent à une forme de bataille. Sans travail, pas de graille pour ces chauffeurs qui content leurs malheurs devant les micros et dans les studios. Avec cette grève, ils espèrent être entendus et reçus pour de futures négociations. Rien que ça !
A lire les gazettes, nous avons l’impression qu’il y a des sénégalais qui ignorent ou défient les lois de la République. Tantôt un groupe d’individus se lève pour décréter tout bonnement une interdiction d’inhumer !
En vertu de quoi ? C’est notre quartier, pas d’étrangers ni de victimes du coronavirus pour reposer éternellement sans notre quitus ! Quand les ignares prennent la barre, on en arrive à ce stade d’incompréhensions qui entrainent des exactions sur les biens des forces de l’ordre, les ambulances des sapeurs-pompiers en l’occurrence.
Toujours dans cette chronique sur la pandémie, y a aussi le cas Rangou. Cette fille qui se vend sur le Net par des photos suggestives a, au mépris de tout, convoqué ses gogos pour un « yendu » torride dans un hôtel de la place. Et la DIC d’intervenir pour faire tout capoter (sans jeu de mots !). A ce rythme de transgression des règles de la vie faut-il craindre la chienlit ?
Par Mamadou Oumar NDIAYE
LE BON PLAISIR DU ROY MACKY SALL…
Au moment où on quémande des annulations ou des remises de créances, donc, on octroie sur le plan intérieur des privilèges coûteux pour les finances publiques. Macky a l’art de danser à contretemps
Comme nous l’écrivions il y a deux semaines, au lendemain de sa décision d’assouplir certaines restrictions prises dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire, le président de la République a décidément le talent inouï de danser à contretemps ! Nous avions notamment moqué sa valse à contretemps.
En effet, alors que la pandémie était au plus bas et n’avait encore fait aucune victime, il avait pris des dispositions de confinement ubuesques. Et lorsque la même pandémie grimpait allègrement vers les sommets après avoir fait des dizaines de morts, il avait entrepris de déconfiner !
En tout cas assoupli son confinement. Un peu comme les banquiers dont on dit qu’ils vous prêtent un parapluie par beau temps et vous le retirent dès que l’orage éclate ! Mieux, et pour en revenir à notre président, alors que toutes les troupes de ce pays sont au front de la lutte contre le coronavirus, le Généralissime qu’il est jouait tranquillement au Ludo avec sa famille. Et le faisait savoir au peuple moutonnier que nous sommes…
Eh bien jamais deux sans trois puisque c’est encore en plein état d’urgence sanitaire, alors que ses gouverneurs et préfets avaient fermé tous les « loumas » du pays, accentuant la misère dans le monde rural, et décrété une ouverture alternée kafkaïenne des marchés des autres localités, précarisant davantage les acteurs de l’informel, alors que des secteurs entiers de l’économie sont à l’arrêt ou agonisent, c’est donc ce moment particulièrement grave que notre Connétable a choisi pour encore octroyer des privilèges. A une courtisane cette fois-ci. Car enfin, quelle urgence y avait-il à sortir un décret pour nommer Mme Aminata Tall présidente honoraire de ce machin qu’est le Conseil économique, social et environnemental ? Je n’entrerai évidemment pas dans la querelle byzantine voire picrocholine consistant à savoir s’il y a eu un faux décret ou un décret falsifié voire un décret détourné de son objet.
Peu m’importe également que le décret instaurant l’honorariat pour les anciens présidents de ce Conseil ait été signé par l’ancien président de la République, Me Abdoulaye Wade. Au demeurant, je savais bien que ce dernier avait octroyé ce statut particulièrement juteux en termes pécuniaires et d’avantages matériels à son pote big Fam. Là n’est pas le problème !
Il se trouve dans le fait que même si Wade, avec sa prodigalité légendaire, à eu à donner un tel statut et les privilèges qui vont avec, le président Macky sall, plébiscité par les sénégalais pour, entre autres missions, mettre fin aux dérives dépensières de son prédécesseur, ait pu continuer à distribuer à tour de bras des privilèges ruineux pour les finances publiques. C’est encore plus grave à ce moment précis où, investi des pleins pouvoirs de chef de guerre, il est chargé de mener la bataille contre un terrible ennemi invisible appelé Covid-19.
Une guerre pour les besoins de laquelle il a organisé un grand « mastata fi sabililahi » au niveau national ayant parfois pris des allures d’un braquage genre « la bourse ou la vie ! » pour financer son plan de riposte contre la pandémie. Le geste du président de la République fait d’autant plus désordre et est d’autant plus inopportun qu’il est intervenu après que le même président Macky sall s’est autoproclamé « leader » de la cohorte de présidents africains mendiants mise sur pied pour solliciter de la communauté internationale l’annulation de la dette publique des pays du continent.
Au moment où on quémande des annulations ou des remises de créances, donc, on octroie sur le plan intérieur des privilèges coûteux pour les finances publiques. Macky a l’art de danser à contretemps, on vous dit. Et pas seulement du « wango » ou du « wathiatha » !
Privilège royal
Car enfin, président honoraire du Conseil économique, social et environnemental (Cese) ce n’est malheureusement pas qu’un titre ronflant. C’est aussi une foultitude d’avantages qui, cumulés, coûtent bonbon au contribuable. Et c’est justement cela qui heurte la morale et insulte l’éthique en plus d’être carrément indécent.
Pendant que le peuple se serre la ceinture, mange son pain noir et est même à l’article de la famine dans le monde rural, tandis qu’une grave récession se profile, notre Président, dont on pensait qu’il était tout entier absorbé par la guerre contre la pandémie et ses terribles conséquences sanitaires et économiques, trouve non seulement le temps de jouer au Ludo mais encore de faire les samba Linguère ! Car tel est son bon plaisir… Côté symboles et provocations — voire insultes — au peuple, je ne vois que deux précédents illustres dans l’Histoire qui ressemblent, toutes proportions gardées bien sûr, à l’acte que vient de poser en catimini le président de la République.
Le premier, c’est lorsque la reine de France Marie-Antoinette avait déclaré, soit avec morgue soit par sottise, ceci : « Le peuple n’a plus de pain ? Il n’a qu’à manger de la brioche ! » Une phrase prêtée à tort à l’Autrichienne (Jean-Jacques Rousseau l’aurait mise dans la bouche d’une princesse d’un de ses livres) même si d’aucuns soutiennent qu’elle aurait contribué à déclencher la Révolution française !
Le second s’était passé en Ethiopie, pays qui abrite depuis 1963 le siège de l’Organisation de l’Unité Africaine (OUA) devenue UA. En 1973, pendant que le pays était frappé par une terrible sécheresse et que les gens mouraient de faim, la Télévision montrait le Négus (ou empereur) Haïlé sélassié en train de donner des quartiers de viande de bœuf à ses lions !
Un geste en comparaison duquel, sans doute, le privilège du roi Macky sall à une courtisane déchue peut apparaître à priori comme un péché véniel ou un geste banal. A priori seulement !
par Abdou Latif Coulibaly
LES RÈGLES DU JOURNALISME SONT-ELLES DIVISIBLES ?
EXCLUSIF SENEPLUS - Le texte publié il y a moins d’une semaine par le Monde Afrique sur le pétrole sénégalais, est un tissu d’erreurs factuelles qui étonnent à plus d’un titre
J’ai lu dans la journée du mercredi 27 mai 2020 un article publié sur le site du Monde Afrique et portant sur le secteur pétrolier au Sénégal. Titré : « Au Sénégal, les perspectives d’exploitations pétrolières s’éloignent une fois de plus », et rédigé à deux mains par Théa Ollivier (Dakar, correspondance) et Mariama Darame, le texte qui a été publié en ligne, il y a moins d’une semaine, est un tissu d’erreurs factuelles qui étonnent à plus d’un titre. Nul n’a besoin d’une lecture attentive pour s’en rendre compte, tant celles-ci nous paraissent grossières. On pourrait croire que les deux rédacteurs de cet article ont voulu ériger en faits, des opinions radicales pour construire on ne sait quelle vague de discrédit autour des politiques économiques. Au fond de moi, je me suis posé la question de savoir : est-ce que certains journalistes en Occident, n’en sont-ils pas arrivés, dès lors qu’ils parlent de l’Afrique, à croire que les règles qui s’appliquent à leur métier peuvent être divisibles. Une divisibilité qui fonctionnerait selon qu’on est en Europe ou en terre africaine. Sinon, Théa Olivier et la personne avec qui il a travaillé, auraient pris le minimum de précautions, pour vérifier auprès des autorités du pays le fondement des fausses informations publiées sur leur site. Quand c’est en Afrique, le doute professionnel s’envole, l’empathie qui assure une bonne communication avec tout interlocuteur et la distance qui sauvegarde et protège la neutralité et l’objectivité procédurale ont alors vite fait de déserter le terrain. Je n’ai nullement envie de dénoncer des comportements ou de répondre à des journalistes qui ont estimé devoir faire leur travail comme ils ont cru devoir le faire au Sénégal, mais j’ai plutôt envie de débattre avec eux, pour que je sois définitivement édifié, quant à la question de savoir si le journalisme a changé au cours de ces dix dernières années. Je sais que l’Internet est passé par là, toutefois, même si on constate impuissant les effets dévastateurs que ce nouvel outil porte à la crédibilité de ce métier, je ne pourrais me résoudre à l’idée que ce que le site en ligne du Monde Afrique a écrit est normal.
Quelle est la première erreur factuelle notée ? Un expert du nom de M. Omgba, consulté par les journalistes, je me demande il est expert de quoi, affirme de façon péremptoire : « Le rêve pétrolier et gazier s’éloigne encore un peu plus pour les Sénégalais. Initialement prévue en 2020, l’exploitation des deux principaux projets d’hydrocarbures, le champ pétrolier Sangomar offshore et le gisement gazier Grand Tortue Ahmeyim (GTA) partagé avec la Mauritanie – tous deux découverts en 2014 – avait déjà été retardée à trois reprises. La pandémie de la Covid-19 vient à nouveau de repousser d’un an, à la fin de 2023, le lancement de la production commerciale ». Nulle part dans les documents officiels publiés par le Sénégal et ses partenaires, une exploitation des hydrocarbures n’a été envisagée en 2020. Même pas imaginé. La date d’exploitation le plus tôt avancée a été fixée pour l’année 2022. On a d’ailleurs le plus souvent parlé de fourchette : 2022-2023. On parle d’erreur factuelle, pour éviter d’avoir un gros mot pour qualifier la liberté prise avec les faits. Les opérations de développement (construction des plateformes d’exploitation) ayant démarré en 2019, comment le Sénégal pouvait-il attendre des recettes pétrolières en 2020 ? En fait, je constate, pour ma part, que ce sont les journalistes, eux-mêmes, qui se trompent quand, ils pensent pouvoir avec leur expert, informer sur le pays de la manière dont ils l’ont fait. La question de perte de recettes pétrolières qui porterait un rude coup aux attentes du Sénégal est une vue de l’esprit de l’expert du site Monde Afrique, une pure invention. Nulle part dans la loi de programmation triennale qui détermine les investissements publics au cours des trois années (2017-2020) des recettes provenant du pétrole ou du gaz n’ont été prévues, encore moins dans le budget en cours (2020). Pour le collectif budgétaire en cours, le tableau ci-après donne le profil des prévisions de recettes : « Le budget général pour l’année 2020 s’élève à 3 122,55 milliards FCFA en recettes et à 3 573 milliards de FCFA en dépenses. Les recettes budgétaires sont composées des grandes masses suivantes : recettes fiscales : 2 675 milliards de FCFA (en hausse de 9,9% par rapport à la LFR1) ; recettes non fiscales : 124 milliards de FCFA (en hausse de 0,5% par rapport à la LFR1) ; recettes FSE : 30 milliards de FCFA ; - tirages sur dons - projets : 260,5 milliards de FCFA ; - dons budgétaires : 33 milliards de F CFA ». Nulle part ne figurent des recettes provenant de nos champs gaziers ou pétroliers.
Quelle est la deuxième erreur factuelle ? L’expert consulté par le Monde Afrique prétend que, dès que l’annonce de découvertes d’hydrocarbures a été faite, les salaires des fonctionnaires ont été augmentés. Une augmentation de salaire n’est pas intervenue dans la Fonction publique sénégalaise depuis le 11 août 2009. La dernière augmentation est intervenue dans ce secteur public, à la suite d’un protocole tripartite signé entre les centrales syndicales, le Patronat et l’Etat. Ce qui est constant, c’est une baisse d’impôts de l’ordre de 15000 FCFA, en moyenne qui avait impacté tous les travailleurs du secteur public et privé. Cette baisse a été actée en 2013, à la suite de la refonte globale du Code général des Impôts. La baisse des impôts des particuliers avait été prévue dans le protocole tripartite tantôt évoqué. Le Monde Afrique confond (sciemment ?) l’augmentation de salaire négociée et actée dans le secteur privé en 2019, avec la Fonction publique. Signalons que le secteur privé était resté dix ans sans aucune augmentation des traitements.
Troisième erreur factuelle. Écoutons l’expert du site du Monde Afrique pour comprendre : « Depuis 2012 et l’arrivée au pouvoir du président Macky Sall, la dette publique du Sénégal est passée de 42,9 % à 67 % du PIB en 2020, selon le Fonds monétaire international (FMI). Cet accroissement s’explique d’abord par les investissements massifs dans des projets d’infrastructures et de développement réalisés dans le cadre du Plan Sénégal émergent (PSE), mais pas seulement. Le pays a augmenté les salaires des fonctionnaires dès 2018. Il a aussi mis en place des subventions en faveur du secteur énergétique, malgré une hausse des cours », précise M. Omgba. Quand Macky Sall arrivait au pouvoir, la subvention accordée par l’État au secteur de l’énergie dépassait les 200 milliards par an. Il a maintenu les subventions qui sont allouées à ce secteur depuis pratiquement le premier choc pétrolier de 1973. Comment un expert qualifié peut-il ignorer cela ? En 2011, au-delà des subventions actées chaque année, les locations de barges de production électrique pour suppléer les défaillances de Senelec en la matière, avaient, au bas mot, coûté 300 milliards de nos francs. Pour un expert, la qualité de la prestation est tout sauf brillante.
Quatrième erreur factuelle : « En juin 2019, une affaire de corruption sur ces contrats impliquant le frère du président sénégalais, Aliou Sall, avait indigné la population. En réponse, le gouvernement de Macky Sall a promulgué un nouveau code pétrolier promettant de respecter les intérêts du pays ». Faux ! La réforme du Code pétrolier a été adoptée le 24 janvier 2019. C’est dire donc, six mois avant cette affaire de corruption que vous évoquez non sans malice. La réforme de ce Code pétrolier procède d’une politique d’Etat de réformes en profondeur des secteurs minier, pétrolier et gazier du pays. C’est d’abord la réforme du Code minier qui a été réalisée deux ans avant que n’intervienne en janvier 2019 la réforme du Code pétrolier. Un nouveau Code gazier distinct du Code pétrolier a été dans la foulée adoptée. C’est cela la stricte vérité.
De la faute de goût professionnel. Apparemment, pour le site du Monde Afrique, les autorités qui ont été mises en cause et vilipendées n’ont pas droit à la parole. Ainsi, les opposants peuvent trôner sans contradicteurs. C’est la ronde des contempteurs. Ousmane Sonko fidèle à son discours de dénonciations tous azimuts, a encore sonné la rengaine pour le Monde Afrique. C’est Fatou Diop qui enchaîne. Sans trop d’idées nouvelles dans la critique. « Malgré les incertitudes liées à ce projet, le Sénégal avait tout misé sur le pétrole. Il a perdu, estime la militante ». Inexact de dire que le Sénégal a tout misé sur le pétrole. Si le Sénégal a tout misé sur le pétrole, pourquoi alors s’est-il employé à construire de grandes centrales solaires à Ten Mérina (Ngaye Mékhé) avec 30 mégawatts, à Bokhol (20 MW) à Malicounda (22 MW) ? Et que dites-vous du parc éolien de Taïba Ndiaye ? Au contraire, le Sénégal étant conscient des dangers du tout pétrole, mise plutôt sur le mix énergétique. Ainsi, dès 2017, le pays a mis en service cinq nouvelles centrales solaires qui ont porté le taux des énergies renouvelables à 21%. Avec les premiers 50 MW du parc éolien de Taïba Ndiaye et les 100 MW du programme scaling Solar, ce taux sera porté à 30% en 2018. En 2019, quatre autres centrales photovoltaïques hybrides ont été inaugurées dans les îles du Saloum, précisément à Bettenty, Djirnda, Bassoul et Dionewar dans le département de Foundiougne, là où justement le pétrole de Sangomar a été découvert. C’est quoi tout misé sur le pétrole ? C’est se préparer à une exploitation rationnelle et optimale de la ressource, en mettant en place les moyens et les conditions indispensables à cette fin ? Si c’est cela, heureusement alors que le pays mise toujours et raisonnablement sur son pétrole. C’est légitime. « Il a tout perdu », dit la militante. J’espère que ce n’est pas là un souhait du cœur de sa part. Je souhaite conclure, en soulignant que je m'agace souvent, face à une certaine pratique de type latin du journalisme. Une pratique souvent marquée par une avalanche d'opinions sentencieuses martelées avec certitude, voire arrogance par des pontifes qui ne doutent jamais. Les faits pour eux sont secondaires, pour ne pas dire relégués sous les décombres d'un métier un peu trop malmené, ces temps-ci, par le déferlement quotidien de productions de nouvelles de toutes sortes venant des réseaux sociaux, mais provenant aussi de tous les supports disponibles sur Internet. Le site Monde Afrique m‘a semblé cette fois-ci un peu léger, en se montrant peu digne de l'aura et du professionnalisme de son père géniteur : Le Monde. Ce que j'aime dans la pratique anglo-saxonne, c'est son attachement encore effectif au fait. Je ne me fais cependant aucune illusion. Je vois bien que là également, on peut s'organiser pour tenter de travestir le fait, en le plongeant dans un magma d'opinions dévastatrices qui en dénaturent totalement le sens et la signification.
En tout état de cause, les règles du journalisme, nous semble-t-il, changent dès lors que l'Afrique est en cause. La pandémie en cours en donne une parfaite illustration. Ainsi, à défaut de pouvoir ramasser à la pelle des morts dans les hôpitaux du continent noir, on s’évertue à trouver des angles d'attaque « ingénieux », en se demandant, par exemple, pourquoi les Africains ne meurent pas encore en masse du Covid-19 ? Comme si les journalistes qui ne sont pas des scientifiques, ni médecins - les seuls susceptibles de répondre, et encore, à cette interrogation, pouvaient eux trouver la réponse. L'information, c'est : les Africains meurent, du Covid-19 mais ils en meurent aujourd’hui beaucoup moins que les autres. C'est cela le fait. Toute autre chose dite est de la spéculation. Une opinion, ni plus ni moins.
DESTIN TRAGIQUE DES ENNEMIS DE SERIGNE TOUBA
Mbaye Guèye Syll nous plonge dans l’histoire du fondateur du mouridisme, en retraçant ses démêlés avec le colon français, à travers son livre ‘’Cheikh Ahmadou Bamba, que sont devenus ceux qui ont essayé d’entraver sa mission ?’’
Qu’il s’agisse des administrateurs coloniaux eux-mêmes ou de leurs collaborateurs autochtones qui les ont aidés dans leur entreprise de musèlement de Cheikhoul Khadim, tous ont fini de manière abominable. C’est ce que relève Mbaye Guèye Syll dans son livre ‘’Cheikh Ahmadou Bamba, que sont devenus ceux qui ont essayé d’entraver sa mission ?’’.
Mbaye Guèye Syll nous plonge dans l’histoire du fondateur du mouridisme, en retraçant ses démêlés avec le colon français, à travers son livre ‘’Cheikh Ahmadou Bamba, que sont devenus ceux qui ont essayé d’entraver sa mission ?’’. Ils sont nombreux les auteurs qui ont écrit sur la vie de Serigne Touba, mais c’est une première qu’une telle réflexion soit soulevée. L’objectif de cet ouvrage est de montrer aux musulmans ‘’son triomphe sur un ennemi, pourtant superbement bien armé et autrement puissant’’.
En effet, la résistance africaine face à la colonisation a été forte. Le pouvoir colonial ne s’est pas embarrassé de scrupules pour abattre ceux qui voulaient contrecarrer ses visées hégémonistes sur les territoires africains. Pour le cas du Sénégal, ce sont deux types d’adversaire qu’il a eu à tenter de réduire au silence par des méthodes très brutales et dénuées de toute forme de respect de la dignité humaine. Si ce pouvoir colonial a pu mettre au pas, par les armes, ceux que l’on appelle les héros de la résistance armée, il en a été autrement pour ceux appartenant à la deuxième catégorie. Ceux-là, ce sont tous ces vaillants paladins de la foi qui s’étaient assigné pour mission de lever haut l’étendard de l’islam. Parmi eux, Cheikh Ahmadou Bamba.
Face au projet de déculturation-acculturation, donc de démantèlement, des structures sociales sénégalaises portées par le Blanc, soucieux d’imposer ses schémas culturel et sa vision du monde, le marabout allait se dresser, porteur, lui, d’un projet de revivification de l’islam, un islam compris dans toute la splendeur de la Sunna. Ce chef religieux combat dans la spiritualité et dans la paix pour la liberté de son peuple.
Pour le chercheur, c’est la raison pour laquelle, les Blancs s’en sont pris à lui. ‘’Il a subi 285 tentatives d’assassinat’’, relate-t-il.
Mbaye Guèye Syll s’est donc intéressé au destin de tous ceux qui, d’une façon ou d’une autre, ont été impliqués, à un certain niveau de responsabilité, dans ‘’les cruelles persécutions’’ que l’administration coloniale a fait subir à Cheikh Ahmadou Bamba. Il note que leur destin fut tragique : ‘’Qu’il s’agisse des administrateurs coloniaux eux-mêmes ou de leurs collaborateurs autochtones qui les ont aidés dans leur sinistre entreprise de musèlement de Cheikhoul Khadim, tous ont fini de manière abominable.’’ Parce que, d’après lui, si Serigne Touba n’a jamais nourri de ressentiment à l’endroit de ses bourreaux, pas plus que ne l’a jamais habité un quelconque désir de vengeance sur eux, Dieu, par contre, met chacun en face de ses responsabilités.
‘’De plus, la responsabilité et le poids de la faute sont amplifiés par la stature de l’offensé. L’offensé, c’est Cheikh Ahmadou Bamba, coupable seulement d’avoir voulu revivifier le message coranique et de réactualiser la tradition (la Sunna) de Seydina Mouhamed (PSL). S’attaquer à un tel personnage, revient à s’attaquer à Allah (SWT) lui-même et à son Sublime Messager (PSL). Qu’on ne s’étonne donc pas qu’Allah (SWT) lui-même endosse la riposte et accable de son implacable rigueur les tortionnaires du serviteur de son élu (PSL)’’, croit-il. Et d’ajouter : ‘’Cheikh Ahmadou Bamba n’avait comme seule arme que sa foi en Dieu et la conviction chevillée au corps que le créateur était avec lui et qu’Il avait pris cause et fait pour lui. Sans ambiguïté, engager la confrontation avec lui, équivaut à déclarer la guerre à Allah (SWT).’’
C’est ainsi qu’il croit fermement que les desseins impénétrables de notre créateur ont créé une conjonction d’événements de telle sorte que la confrontation entre le colon français et Cheikh Ahmadou Bamba était inéluctable. Cette confrontation, dit-il, démontre de façon claire et indubitable que ‘’c’est Dieu lui-même qui avait armé Cheikh Ahmadou Bamba’’.
Mbaye Guèye Syll a commencé à faire ses recherches sur le ‘’mouridisme’’ depuis 1978. Il révèle à ‘’EnQuête’’ que c’est lors d’un voyage à Paris avec Serigne Mame Mor, fils de Serigne Mountada Mbacké, à l’occasion de ses tournées européennes, qu’il a pu accéder aux archives des Français, alors qu’il était à la recherche d’une version orale. ‘’Une fréquentation longue et assidue de toutes les sources de documentation, en particulier les archives coloniales, nous a permis de retracer les démêlés de Cheikh Ahmadou Bamba avec le Toubab. Ces archives, tenues de l’époque du gouverneur Faidherbe, portent, soigneusement consignés, les moindres faits des armées coloniales. De la même manière, on y retrouve, intacts, tous les actes administratifs par lesquels le pouvoir colonial a eu à gérer la vie des territoires assujettis à sa domination’’, indique-t-il.
UNE NOUVELLE INÉDITE DE BOUBACAR BORIS DIOP
COMME UN DÎNER D’ADIEU (4/4)
EXCLUSIF SENEPLUS - J’entends plein de gens nous bassiner avec ça depuis ce matin, répliqua Chris avec vivacité. Ah, vous savez, disent nos bonnes âmes, ils étaient des gars bien, à Charlie Hebdo, puis ils ont mal tourné
Boubacar Boris Diop de SenePlus |
Publication 28/05/2020
Dembo Diatta réfléchissait, quant à lui, sur une pièce dans laquelle on ne verrait à aucun moment les visages des acteurs.
Tout va se jouer sur la déception sans cesse renouvelée des spectateurs, précisa-t-il. Jusqu'à la fin, ces pauvres crétins attendront en vain et…
Et n’importe quoi, mon petit Dembo… coupa Chris.
Riant de bon cœur, ils trinquèrent à leur infernale puissance créatrice. Malgré leur gaieté, tous trois restaient sur le qui-vive, moins à l’aise que d’habitude. D’ailleurs, pendant que Chris descendait en flammes une pièce qu’il avait vue quelques jours auparavant, Dembo Diatta sentait peser sur lui le regard inquisiteur de Muriel Carpentier. L’heure de vérité était de plus en plus proche. Les assassins de la rue Nicolas-Appert étaient d’autant plus présents dans les esprits que l’on ne savait presque rien d’eux. Des noms. Des visages. Rien de plus.
Lorsque le sujet fut abordé pour la première fois, Dembo Diatta se mit à tourner autour du pot et commit l’erreur de déclarer, au milieu de plusieurs phrases embarrassées :
Je ne suis pas tellement sûr d’être d’accord avec ce que j’entends ici et là mais bon, je ne suis peut-être pas bien placé non plus pour parler de ça…
Allons, Dembo, pas de manières avec nous, fit Muriel, il n’y a rien de politique dans cette histoire. Des fous débarquent dans une salle de rédaction et abattent tout le monde…
“Rien de politique, vraiment ?” se demanda Dembo, un peu perdu.
Il avait perçu une légère irritation dans la voix de Muriel mais aussi une réelle curiosité, visiblement partagée par son mari. Cette fois-ci c’était au tour de ce dernier de chercher à lire à travers lui.
Dembo Diatta se jeta à l’eau :
Vous savez, juste avant de venir à notre rendez-vous, je suis allé sur le Net pour voir les caricatures de Charlie Hebdo. Je tenais absolument à les voir de mes propres yeux.
Leurs regards fixés sur lui posaient la même question muette : « Et alors ? »
Ces caricatures sont abominables, dit-il avec un calme qui le surprit lui-même, détachant bien ses mots. Vous et moi, on sait ce que c’est, des caricatures, mais celles-ci m’ont franchement horrifié. Ai-je le droit d’ajouter que je les ai trouvées vulgaires et racistes ? J’ai longtemps aimé certains dessinateurs de cet hebdo mais là je ne les ai même pas reconnus.
C’était sans doute le bout de phrase de trop.
Tu ne les as pas reconnus… ? fit Chris en se penchant légèrement vers lui.
Il y avait une inhabituelle aigreur dans sa voix. Dembo Diatta fit comme s’il n’avait rien remarqué :
Faire sourire et blesser, ça n’est pas pareil, dit-il. Pourquoi jeter de l’huile sur le feu ?
J’entends plein de gens nous bassiner avec ça depuis ce matin, répliqua Chris avec vivacité. Ah, vous savez, disent nos bonnes âmes, ils étaient des gars bien, à Charlie Hebdo, puis ils ont mal tourné. Tu veux dire qu’ils ont fini par être obsédés par l’islam, c’est ça ? Islamophobes, Cabu et Wolinski, c’est bien ça ? Racistes aussi ? Eh bien, Dembo, ils ont payé, des petits salopards sont venus, et ces petits salopards-là, tu sais, ils ont pris le temps d’appeler chacun par son nom avant d’en faire un tas de viande froide.
Ça commençait mal.
Et tel qu’il connaissait son Chris, un gars généreux et à l’esprit ouvert mais un peu cinglé, ça risquait d’aller de mal en pis au fil des minutes. Bientôt on n’entendrait plus qu’eux au Casa Nostra. Dembo Diatta choisit de réagir sur un ton détaché. Cependant, il tenait tant à se faire bien comprendre qu’il resta sur la défensive, plus occupé à se justifier qu’à donner, tout simplement, son opinion.
Ce jour-là, ses deux amis et lui ne se quittèrent pas fâchés mais, ce qui était bien plus triste aux yeux de Dembo, très mal à l’aise. De serrer la main de Muriel et de son époux près d’une bouche de métro en fuyant leurs regards lui donna l’impression qu’entre eux plus rien ne serait comme avant. Il devait se souvenir longtemps après du dernier regard, glacial et dur, de Muriel.
« C’est fou, comme ce monde a les nerfs à vif ! dit-il à haute voix, sans se soucier des passants. Bientôt, vos meilleurs amis ne vous parleront plus parce que vous détestez un film ou un roman qu’ils trouvent génial ! » Il reprit un instant son souffle et pesta : « Je l’ai bien douchée, Muriel, quand elle m’a accusé de prôner le port du voile ! » C’était quand Dembo leur avait lancé : « Qu’est-ce qui ne va donc pas avec ce pays ? Vos yeux ne supportent pas le voile des musulmanes et vous voulez que les leurs supportent des images aussi obscènes de leur religion ? Je ne vois pas bien la logique.» Le dépit et l’agacement lui avaient involontairement fait élever la voix à ce moment-là.
Il en voulait presque à Chris et Muriel d’avoir provoqué cette discussion sur la tuerie au siège de Charlie Hebdo. Ou peut-être est-ce lui qui aurait dû tenir sa langue ? Après tout, quand une famille est dans le deuil, vous ne déversez pas votre bile sur le défunt au nom de la liberté de parole. Mais c’était trop tard pour revenir en arrière. Il leur avait fait remarquer que jamais, nulle part, y compris en France, personne n’avait osé soutenir que tout pouvait être dit. « Savez-vous comment a été créé ce canard, Charlie Hebdo ? » Ils s’en souvenaient vaguement.
« Moi, je l’ai appris aujourd’hui même avec stupéfaction, reprit-il. Un ami, redoutable fouineur, m’a envoyé le lien d’un papier qu’il a d’ailleurs mis en ligne. Les faits parlent d’eux-mêmes : en novembre 70, Charles de Gaulle s’éteint paisiblement chez lui et Hara-Kiri titre : ‘Bal tragique à Colombey : 1 mort’. La police prend alors d’assaut les kiosques, saisit tous les numéros, les détruit et interdit illico le journal. Pourquoi donc ? ‘Atteinte au respect dû aux morts’. Et vlan ! Ce n’est pas fini : pour contourner la mesure et continuer à se moquer du Général, le même canard se rebaptise Charlie Hebdo. » Là aussi, quelque chose échappait à Dembo Diatta : pourquoi, soudain, tout un pays, voire l’humanité entière, devait-elle se mettre à trottiner derrière un petit groupe de libertaires parisiens qui avaient toujours craché à la gueule de tout le monde ? Ayant de plus en plus de mal à se contrôler, Dembo les avait traités de ‘nihilistes puérils et ringards ‘.
Et pendant toute cette bagarre au Casa Nostra, des mots interdits n’avaient pas cessé de planer silencieusement autour d’eux. Vous. Nous. Oppresseurs. Damnés de la terre. Traite négrière. Madagascar. Sétif. Thiaroye. Les mots de Césaire aussi : « L’Europe est comptable devant la communauté humaine du plus haut tas de cadavres de l’histoire… » Tout ça, il l’avait heureusement gardé pour lui. Ce n’était pas le genre de choses qu’il pouvait jeter à la figure de Muriel et Chris. Il se méfiait d’ailleurs moins de ces propos eux-mêmes que du fiel et de la tenace rancune qu’ils charriaient. Cependant, Dembo n’avait pu s’empêcher de leur parler de la ‘Matinale’ de France 2 où deux journalistes s’étaient mis à pérorer sur « le génocide rwandais où la communauté hutu va être entièrement massacrée par les Tutsi. » Il n’avait jamais rien entendu d’aussi fou. « Je ne vois pas le rapport », avait dit Muriel d’un air pincé et Chris avait ajouté : « Tu nous parles de deux parfaits crétins, là. Qu’ils aillent se faire pendre par là où je pense ! » Et lui ne put se retenir : « Encore une fois, quel est votre problème ? C’est vous qui poussez les autres à faire des comparaisons mal venues… Il y aurait un beau charivari si quelqu’un disait dans ce pays que les Juifs ont été les bourreaux des Nazis ! Pourquoi êtes-vous si peu capables de vous mettre à la place des autres ? » C’est à ce moment précis que Dembo avait surpris un sourire amusé sur le visage de Muriel. Toujours aussi énervé, il voulut riposter violemment mais elle l’arrêta d’un geste de la main : « Ne le prends pas mal, Dembo, je ne me moque pas de toi, je viens simplement de réaliser que tu ne sais même plus nous parler, à nous tes vieux camarades, tu parles à deux Blancs, à deux Occidentaux. »
Dembo, troublé, se contenta de la regarder en silence. Muriel Carpentier, plus froide et réfléchie que son mari, avait une fois de plus visé juste. Dembo n’était pourtant pas tout à fait d’accord avec elle: « Je vois bien ce que tu veux dire, mais pour vous non plus je ne suis pas juste Dembo Diatta. Non, ça ne se passe plus ainsi. On est tous bien au chaud dans des cages et chacun devrait se bouger le cul pour en sortir. » Puis, après une pause : « Et peut-être vous plus que les autres…» « Nous…? » fit Muriel avec une sorte d’effarement sincère. « N’ayons pas peur des mots, Muriel », répondit simplement Dembo.
Il se souvint d’avoir ensuite longuement promené les yeux autour de lui. Le Casa Nostra s’était peu à peu vidé de ses clients. Une brune solitaire entre deux âges, perchée sur un tabouret tout près d’eux, semblait plus intéressée par Chris que par leur bagarre. « Bon, avait soudain ajouté Dembo, je suis un peu perdu, comme tout le monde. C’est simple, plus personne ne sait où il en est. Ils vont finir par nous avoir. »
Il y eut une ou deux minutes de silence gêné, sans doute le tout premier en plus de vingt ans d’amitié.
En retraversant le parc Emile Perrin quasi désert, Dembo repensa à Muriel et Chris. Ils avaient un long parcours en métro avant d’arriver chez eux, Place du Caquet, à Saint-Denis et il les imagina en train de se demander pourquoi lui, Dembo, était de plus en plus tendu et intolérant. Il se reprocha une nouvelle fois d’être incapable de tenir sa langue, de ne pas savoir refouler au fond de sa gorge tous ses pourtant-peut-être bien que-à moins que-néanmoins-en revanche. Le temps des nuances était bel et bien révolu et la peur de l’avenir scellait toutes les bouches. Qu’avait-il donc à faire le malin ?
Il lui restait une journée à Paris, celle du lendemain, avant le retour au pays. Il la passerait étendu dans sa chambre à lire les vieilles BD qu’il emportait toujours avec lui en voyage. Elles le mettraient, au moins momentanément, à l’abri des infos de la télé et de la radio. Il en avait marre de toute cette histoire, ça lui chauffait la tête pour rien.
Peut-être d’ailleurs ferait-il mieux d’appeler Mambaye Cissé au lieu de rester enfermé au Galileo. La danse d’amour des mérous marbrés ne l’intéressait pas vraiment mais ils pourraient toujours se moquer avec tendresse de leurs stupides rêves d’étudiants dakarois. C’était dans une autre vie.
LA COMMUNICATION GOUVERNEMENTALE AUTOUR DU CORONAVIRUS NE CONVAINC PAS
L'assouplissement des mesures combiné aux diverses polémiques autour de la fiabilité des tests de l'institut Pasteur poussent de plus en plus de Sénégalais à négliger les mesures de prévention, notamment les gestes barrières
VOA Afrique |
Seydina Aba Gueye |
Publication 28/05/2020
Des familles qui réfutent des tests post-mortem, des médecins qui auraient été testés positifs puis négatifs suite à la contestation des résultats, autant de polémiques qui accentuent les doutes déjà présents chez une partie de la population qui ne croyait que partiellement à l'existence de la maladie Covid-19.
Malgré les éclairages de l'institut Pasteur, certains ne sont toujours pas convaincus. C'est le cas de Fara Ndiaye, diplômé de l'université de Dakar qui ne comprend pas pourquoi les autorités "annoncent des décès et parmi ces décès leurs familles disent qu'ils ne sont pas morts à cause du coronavirus".
Il s'interroge: "Est-ce qu’il y a vraiment cette maladie dans ce pays, est-ce que ce n’est pas un lobby, est-ce que c’est pas un deal entre le gouvernement et les étrangers? Est-ce qu'ils ne se basent pas sur ce virus pour essayer de faire annuler la dette?".
Beaucoup de questions auxquelles il ne peut apporter des réponses.
Pour Boubacar Kouyaté, l'existence du virus ne fait pas de doute car c'est une pandémie qui secoue le monde entier. Cependant, le jeune homme explique que les gens ne sont plus prêts à changer leur mode de vie car il y a une certaine lassitude autour des gestes barrières. "Il y a certaines choses que nous ne pouvons pas arrêter parce que ça fait partie de nos valeurs comme les rassemblements et les salutations", confesse-t-il.
Malgré le mutisme d’Abidjan, les positions tranchées de Dakar et Cotonou au sujet du moratoire sur les dettes des pays africains signalent deux visions antagonistes des priorités de l’État et de son pouvoir face aux marchés
Jeune Afrique |
Joël Té-Léssia Assoko |
Publication 28/05/2020
Pourvu qu’elles échappent à l’extrême agressivité du débat sur le franc CFA, les lignes de fracture créées ou exacerbées par la crise sanitaire et économique liée au Covid-19 pourraient donner un nouveau souffle au débat d’idées sur le continent.
Les propos embarrassés devant la dépendance croissante des économies africaines aux capitaux chinois cèdent le pas à une discussion plus franche sur les arbitrages à réaliser. Le choix d’Ethiopian Airlines de maintenir la desserte de la Chine a fait voler en éclats le consensus mou qui existait en Afrique de l’Est, Nairobi prenant la tête de la fronde contre son allié et concurrent régional.
Approfondissement des marchés
Toujours vis-à-vis de Pékin, l’enthousiasme peut-être excessif au sujet des « 85 millions d’emplois » que l’empire du Milieu ne manquerait pas de délocaliser, à terme, vers l’Afrique a vécu. Place désormais à une réflexion plus ardue sur le développement des chaînes de valeurs locales et l’approfondissement des marchés africains.
Malgré le mutisme d’Abidjan, les positions tranchées de Dakar et Cotonou au sujet du moratoire sur les dettes des pays africains signalent deux visions antagonistes des priorités de l’État et de son pouvoir face aux marchés. Par là, des préférences potentiellement différentes quant aux contours de l’eco, la future monnaie commune.
La maîtrise de l’information stratégique dans les entreprises sénégalaises peut être une aubaine dans cette politique de construction économique du pays après avoir subi les politiques d’ajustement structurel des institutions de Bretton Woods
Trente ans après la chute du mur de Berlin marquée par l’effondrement du bloc soviétique, le monde a inauguré un nouveau cycle avec la mise en place d’un système capitaliste sans résistance symbolisé par une économie de marché dont la base est la recherche de profit.
Pourtant même sans être passionné de géopolitique, il n’est point de secrets que le capitalisme est le système économique reflétant la compétitivité et la libre concurrence entre les entreprises de tous les secteurs d’activités et quelles que soient leur taille (GE, ETI, PME).
En effet, cette nouvelle hégémonie a profondément changé le circuit économique du monde car elle a donné un blanc-seing aux Grandes Entreprises (GE) dont l’effectif est supérieur ou égal à 4235 employés[1]. Alors, avec cette marge de manœuvre les GE dictent leur loi. Les GAFAM, entreprises de la Silicon Valley sont un exemple patent de cette domination économique voir de ce pouvoir sans précédent des Grandes Entreprises. Ces dernières ont mis en place des stratégies afin de maîtriser leur capital informationnel gage d’influence et de sécurité économique.
Mais malgré cet état de fait, c’est-à-dire la farouche concurrence au sein du marché, certaines entreprises moins costauds n’ont pas jusqu’à présent mesuré l’importance de l’information dans la bonne marche de leurs activités.
Paradoxalement, depuis la fin de la guerre froide, le monde est entré de plain-pied de ce qu’on peut appeler la société de l’information. Comme la société industrielle avec ses multiples indices qui sont entre autres l’essor des moyens de production et la floraison des biens de consommation, la société de l’information a aussi ses propres leitmotivs in fine son contingent d’identifiants. « Les nouvelles technologies de l’information et de la communication dont Internet constitue le référent identitaire, sont présentes dans tous les domaines d’activité des hommes, enseignement, documentation, édition, commerce, finance, médecine, loisirs, recherche scientifique, etc… La généralisation des échanges électroniques d’informations et de documents, le caractère universel de cette nouvelle communication globale, planétaire, la rapidité et le caractère spectaculaire des mutations induites font de cette « révolution » un moment clé voire spéciale de l’histoire de l’humanité.[2] »
Par ailleurs, à l’aune de la connaissance immatérielle, l’information occupe un pan de l’économie mondiale irriguée par deux facteurs majeurs : la mondialisation et la globalisation. Ce faisant, certaines entreprises ont pris le train en marche afin d’être aux aguets des signaux faibles pour mieux anticiper les évolutions et d’avoir une vision 360° de leur environnement concurrentiel, commercial, technologique. C’est la raison pour laquelle, beaucoup de pays ont adopté une démarche de veille stratégique dont le substrat est la maîtrise de l’information garantie de compétitivité et de sécurité pour les entreprises.
Par exemple, en France, l’efficacité de l’information à valeur économique découle du rapport d’Henri Martre « Intelligence économique et stratégie des entreprises », publié en 1994 à la Documentation française[3]. C’est à l’issu de ce travail que les entreprises françaises ont pris conscience, en proportion de leur goût, l’importance de la mise en place d’outils de veille stratégique in fine d’intelligence économique pour mieux se positionner en Europe et à l’international. Ce qui leur permet d’avoir une photographie de l’environnement des affaires et de la compétitivité mais aussi d’engranger des parts de marché.
Ayant compris l’importance de l’information stratégique pour la bonne marche de leur économie, certains pays africains à l’image du Maroc via ses petites et moyennes entreprises s’initient à la veille informationnelle car les PME occupent une place cruciale dans le tissu économique du pays[4]. Ne voulant pas être le dernier de la classe en Afrique subsaharienne, le Sénégal a entamé aussi sa mue d’Intelligence économique dans l’optique d’armer ses entreprises avec la mise en place au sein du ministère de l’Economie des Finances et du Plan d’un dispositif national d’intelligence économique. Ainsi, le Sénégal est l’un des pays africains à avoir fixé une réflexion sur sa sécurité économique par le management de l’information[5]. L’objectif est de booster l’économie des entreprises notamment des PME. Mais malheureusement, cette initiative souffre de rigueur car les outils « cellules de veille » qui devaient l’accompagner ne sont pas présents dans certaines entreprises.
Cela dit, la pénétration des technologies de l’information et de la communication ont donné un nouveau visage à l’information à tel point qu’on parle de trop-plein d’informations « Infobésité ». Ainsi, les entreprises sénégalaises, doivent asseoir un travail de vigie pour anticiper, innover dans l’optique d’atteindre cette quête de compétitivité. Ceci demande une stratégie bien pensée de la part des entreprises en toile de fond les PME si le pays veut atteindre les objectifs fixés par le Plan Sénégal Emergent (PSE) d’ici 2035.
La maîtrise de l’information stratégique dans les entreprises sénégalaises peut être une aubaine dans cette politique de construction économique du pays après avoir subi les politiques d’ajustement structurel des institutions de Bretton Woods (FMI, Banque mondiale). Il faut armer nos entreprises à l’ère de la guerre de l’information, lit de la compétitivité économique où le marché est roi.
[2] Michel, Jean. Société de l’information et nouvelles solidarités professionnelles : L’impérative exigence de dépassement des frontières. In : http://michel.jean.free.fr/publi/JM331.html
[3] Le rapport d’Henri Martre, « Intelligence économique et stratégique des entreprises », publié en 1994 à la Documentation française, est le premier ouvrage considéré comme fondateur de l’IE en France.
BLACK LIVES MATTER - René Lake analyse le phénomène des discriminations raciales outre-atlantique, ravivé par la récente mort par étouffement au sol de George Floyd, un afro-américain, suite à une violente arrestation policière
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René Lake analyse pour VOA Afrique, les tenants et boutissants du racisme contre les noirs aux Etats-Unis. Entretien à retouver à partir de la 10è minute.