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30 avril 2025
Diaspora
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UN SYSTÈME MACROÉCONOMIQUE À ÉCLATER
"C'est une illusion de croire qu'en augmentant le taux de croissance, vous allez significativement réduire le chômage". Ndongo Samba Sylla démonte les mythes économiques dominants et expose les mécanismes d'un Sénégal dans la dépendance
L'économiste du développement Ndongo Samba Sylla pense sans ambages qu'il faut "éclater" tout le système macroéconomique du Sénégal. Invité de l'émission À contrecourant sur l'AS Tv, le chercheur connu pour son militantisme pour la souveraineté monétaire trouve que c'est un cadre qui ne permet aucun développement économique.
Il est un économiste qui refuse les idées reçues et aime questionner, critiquer voire battre en brèches les modèles de développement ambiants, surtout ceux qui sont proches du système néolibéral. Disséquant le système économique du Sénégal, Ndongo Samba Sylla fait un sévère réquisitoire de son cadre macroéconomique. Ainsi, sans langue de bois, il soutient : "Le cadre macroéconomique que nous avons ne permet aucun développement économique digne de ce nom. On va tourner en rond, nous endetter en monnaie étrangère".
À l'en croire, il ne peut pas comprendre que le Sénégal paye sur son budget 2 900 milliards. Le budget de l'éducation nationale pour l'année, c'est plus de 900 milliards. "Alors que les intérêts sur la dette, c'est 900 milliards. Le budget de la santé presque 300 milliards. Donc vous dépensez 10 fois plus pour payer la dette que pour la santé. Quel développement voulez-vous avoir ? Et c'est une tendance qui va se perpétuer", s'indigne l'auteur de l'Arme invisible de la Françafrique, une histoire du Fcfa.
Il ajoute : "À un moment, il faut dire stop. Nous devons mobiliser nos ressources, et quand je dis mobiliser nos ressources, cela suppose que nous avons notre banque centrale, nous avons notre système financier et on alloue les ressources en partant des expertises que nous avons. Quand on veut construire des écoles par exemple, partons d'abord des ressources réelles que nous avons. Tout ce que vous pouvez faire vous-même, il n'y a que vous-même qui pouvez financer ça. Ce n'est pas l'extérieur. Si l'extérieur vous donne l'argent, tant mieux, ça va financer d'autres importations mais ça ne va pas financer ces projets-là".
De son avis, c'est de cette manière qu'il sera possible de créer des emplois pour les jeunes. S'exprimant en outre sur la croissance du Sénégal, il souligne que la loi d'Okun (elle décrit une relation linéaire empirique entre le taux de croissance et la variation du taux de chômage) ne s'applique pas aux pays en voie de développement.
"L'exemple que je donne souvent, c'est la Sierra Leone qui, vers 2013, 2014, avait commencé à exploiter le minerai de fer. Elle a dû enchaîner deux années où il y avait plus de 10% de taux de croissance, et une année même 20% de taux de croissance. Mais cette croissance, la population n'en a pas bénéficié parce que les multinationales qui opéraient dans ce secteur extractif avaient trouvé des failles pour ne rien payer comme taxes, impôts, redevances et autres. Et quand il y avait Ebola dans le pays, on pouvait compter le nombre d'ambulances. La croissance en tant que telle, cela ne veut absolument rien dire", renseigne l'économiste non sans faire savoir que ce qu'il faudrait voir, c'est secteur par secteur. Car d'après lui, ce qui tire la croissance à long terme, c'est le secteur industriel manufacturier.
"C'est une illusion de croire qu'en augmentant le taux de croissance, vous allez significativement réduire le chômage"
"C'est une illusion de croire qu'en augmentant le taux de croissance, vous allez significativement réduire le chômage", prévient l'ancien de la fondation Luxembourg. Proposant des solutions, Ndongo Samba Sylla déclare : "La question de l'emploi, elle se pose différemment à la périphérie. La seule manière de créer des emplois, c'est de mettre en place une garantie d'emploi. Qu'est-ce que cela veut dire une garantie d'emplois ? Cela veut dire que l'État qui a sa propre monnaie va dire que la constitution dit que tout le monde a droit à un emploi décent."
Et il dit : "Les collectivités locales, arrangez-vous pour déterminer vos besoins en termes d'emplois sans concurrencer le secteur privé. Et l'État peut financer cela. Et quand ces gens trouveront mieux ailleurs, ils partiront du dispositif. Ça permet de mobiliser toute la force de travail. Tout le monde est au travail et avec le même niveau de productivité partout. Et il y a une demande et un pouvoir d'achat. Actuellement, pourquoi on ne peut créer des emplois ? Parce que le secteur privé est beaucoup trop exigu. Et le secteur privé est exigu parce que le marché intérieur est étroit".
Selon lui, la plupart des gens sont pauvres, ils n'ont pas de pouvoir d'achat. Les entreprises, explique-t-il, qui naissent vont mourir parce qu'il n'y a pas de débouchés. "Donc d'où peuvent venir les débouchés ? Il ne peut pas venir de l'extérieur parce que nous ne sommes pas compétitifs pour plusieurs raisons. Mais qui peut injecter ce pouvoir d'achat ? Il n'y a que l'État. Mais si vous êtes dans le cadre de l'UEMOA où on vous dit que l'État ne doit pas faire de déficit, cela veut dire que vous n'aurez pas de développement", analyse Dr Sylla.
"Contrairement à ce que les gens pensent, le déficit est une injection nette de pouvoir d'achat"
Et l'ancien pensionnaire du Prytanée militaire de Saint-Louis de révéler : "Le déficit, contrairement à ce que les gens pensent, est une injection nette de pouvoir d'achat. Quand l'État dit que j'ai fait 100 milliards de déficit, cela veut dire que moi, j'ai apporté comme contribution financière 100 milliards. Donc si vous êtes dans un système où on vous dit on ne veut pas de déficit, c'est un système qui dit que je ne veux pas que les entreprises croissent. Quand l'État ne fait pas déficit, cela veut dire que l'État n'apporte rien à l'économie. C'est l'État colonial, il n'apporte rien".
Néanmoins, l'iconoclaste chercheur se veut clair. "Maintenant il ne faut pas faire du déficit pour faire du déficit, le déficit doit être ciblé et tenir compte de l'impact sur la balance de paiement. C'est tout cela l'art de la planification", prévient-il.
"L'emploi, ce n'est pas une question d'employabilité. Ça, c'est une explication farfelue"
Dans le même ordre d'idées, Ndongo Samba Sylla trouve simpliste de penser que le chômage est lié à une question d'employabilité. "L'emploi, ce n'est pas une question d'employabilité. Ça, c'est une question farfelue."
"Tous les jeunes dont on dit qu'ils n'ont pas d'emploi, par chance quand ils traversent le Nicaragua pour arriver aux États-Unis, ces gens ont tout de suite des emplois. Donc dans les pays avancés, avec des technologies avancées, ces gens qui n'ont pas été formés, trouvent des emplois. Vous allez à New-York, vous trouvez beaucoup de livreurs sénégalais. Ces gens ont des emplois dans des pays avancés très riches et ici, on ne peut rien pour vous parce que vous n'êtes pas employables", fulmine-t-il.
Poursuivant son argutie, il note que l'emploi, c'est une question macroéconomique, c'est une question de demande. "Les entreprises privées font du profit. Et si les entreprises ne peuvent pas espérer faire du profit, elles ne vont pas employer. Et pour faire du profit, l'État doit soutenir les entreprises privées. Mais l'État soutient les entreprises privées non pas en les taxant mais en dépensant net pour les entreprises privées, c'est-à-dire qu'on vous prélève 100 mais on dépense 150", prône-t-il.
Et Sylla de rappeler pour s'en désoler : "Mais maintenant, vous êtes dans un cadre macroéconomique qui vous dit : nous ne voulons pas de déficit, ce qui nous intéresse, c'est de mettre la parité fixe avec l'euro, donc il n'y a pas de crédits. Ou quand on vous donne des crédits, c'est à des taux de 15%, 16%. Mais quelle économie voulez-vous avoir ? C'est pourquoi je dis que tout ce cadre, il faut l'éclabousser".
"Il faut mettre en place un cadre économique de souveraineté monétaire"
De l'avis de Ndongo Samba Sylla, il faut mettre en place un cadre national de souveraineté monétaire, et un cadre de planification de politique industrielle. Et faire attention aux dépenses publiques et à leurs conséquences en termes d'inflation et sur la balance des paiements. C'est tout l'art de la gestion macroéconomique, parce que tout ce que vous pouvez faire vous-même, vous n'avez pas besoin d'un dollar de l'extérieur. Et quand vous employez tous vos jeunes, vous leur donnez la possibilité de s'employer, ils ont un pouvoir d'achat, vous pouvez canaliser ce pouvoir d'achat pour acheter les produits sénégalais et c'est comme ça que vous créez un cercle vertueux", préconise-t-il non sans signaler qu'avec ce modèle, les entreprises vont croître, et certains qui étaient dans les dispositifs de garantie d'emplois, qui ont été formés, vont être recrutés par le secteur privé. "C'est comme ça qu'on avance. Les problèmes économiques que nous avons sont différents de ceux des pays".
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SI LE PÈRE NOËL DEVENAIT AFRICAIN
Que faire vient le père Noël, ce gros bonhomme nordique, dans les célébrations des fêtes en Afrique ? Renaud Dossavi, agacé par cette importation hors-sol, imagine à quoi ressemblerait un père Noël africain
Que faire vient le père Noël, ce gros bonhomme nordique, dans les célébrations des fêtes en Afrique ? Renaud Dossavi, agacé par cette importation hors-sol, imagine à quoi ressemblerait un père Noël africain. Bien loin du pôle Nord !
"Il nous a trahis." Cette confession amère d'un proche collaborateur de Bachar al-Assad au New York Times résume le sentiment de ceux qui ont découvert, stupéfaits, la fuite secrète de leur président dans la nuit du 7 décembre
(SenePlus) - Dans une enquête publiée ce dimanche 22 décembre 2024, le New York Times lève le voile sur les derniers jours du régime de Bachar al-Assad en Syrie. Le quotidien américain révèle comment le dirigeant syrien, qui régnait par la peur depuis plus de deux décennies, a orchestré sa fuite secrète alors même que son entourage préparait un discours censé annoncer un partage du pouvoir avec l'opposition.
Les dernières semaines de la dynastie Assad ont commencé par un moment de joie familiale à Moscou. Fin novembre, alors que son fils aîné Hafez soutenait sa thèse de doctorat à l'Université d'État de Moscou, personne ne pouvait imaginer l'imminence de la chute. La thèse de 98 pages, dédiée "aux martyrs de l'armée arabe syrienne, sans les sacrifices désintéressés desquels aucun de nous n'existerait", allait prendre une tournure ironique quelques jours plus tard.
Le début de la fin est survenu le 30 novembre, quand une coalition rebelle menée par Hayat Tahrir al-Sham, un groupe islamiste issu d'Al-Qaïda, s'est emparée d'Alep. Selon le New York Times, qui cite trois responsables iraniens dont deux membres des Gardiens de la Révolution, cette perte a déclenché des réunions d'urgence à Téhéran. Le ministre iranien des Affaires étrangères, Abbas Araghchi, s'est même rendu à Damas pour une visite médiatisée, mangeant du shawarma devant les caméras et promettant que l'Iran soutiendrait Assad "jusqu'au bout".
Mais les options de Téhéran étaient limitées. Le Hezbollah, allié traditionnel d'Assad, sortait affaibli d'une guerre avec Israël qui avait décimé ses rangs et sa direction. Israël menaçait par ailleurs d'intercepter tout avion iranien ou mouvement de troupes vers la Syrie. Selon les sources du Times, Araghchi a trouvé un Assad "confus et en colère" face à l'incapacité de son armée à tenir Alep.
La Russie, autre soutien crucial du régime, s'est également dérobée. D'après un officiel turc et un proche du palais cités par le journal, Vladimir Poutine a cessé de répondre aux appels d'Assad dans les premiers jours de l'avancée rebelle. Cette distance soudaine du dirigeant russe, qui avait sauvé le régime en 2015, annonçait clairement la fin.
L'enquête du New York Times révèle l'ampleur de la décomposition de l'armée syrienne. Avec des salaires réduits à moins de 30 dollars mensuels par l'effondrement économique et les sanctions, les forces gouvernementales reposaient largement sur des conscrits mal équipés. Face à eux, les rebelles disposaient d'un atout majeur : les drones. Des rapports des services de renseignement militaire syriens, consultés par le journal, décrivent des attaques incessantes contre lesquelles le régime était impuissant.
Le 7 décembre, alors que les rebelles approchaient de Homs, dernière grande ville avant Damas, la panique a gagné la capitale. Pendant que les habitants se ruaient vers les magasins pour stocker de la nourriture ou fuyaient en voiture, le personnel du palais présidentiel vivait dans l'illusion. "L'idée que Damas puisse tomber n'était suggérée par personne", confie au New York Times un insider dont le bureau était proche de celui d'Assad.
La mise en scène finale du régime s'est jouée ce même jour. Alors que les équipes techniques installaient caméras et lumières pour un discours censé annoncer un partage du pouvoir avec l'opposition, Assad préparait secrètement sa fuite. À la tombée de la nuit, il s'est envolé vers une base militaire russe au nord de la Syrie avant de rejoindre Moscou. Son frère Maher, chef de la redoutée 4e division blindée, a fui séparément vers l'Irak.
Les collaborateurs d'Assad n'ont appris sa fuite qu'après minuit, déclenchant une panique généralisée au palais. "Il nous a trahis", déclare amèrement au journal l'insider du palais. "Le discours n'était qu'une ruse pour nous distraire pendant qu'il s'échappait."
Cette débâcle a eu des répercussions immédiates. À la prison de Sednaya, tristement surnommée "l'abattoir humain" par Amnesty International, les gardiens ont fui en laissant les clés. "C'était un rêve", raconte au New York Times Bilal Shahadi, un ancien détenu libéré dans la confusion. "Tout cela ressemblait à un rêve."
La chute d'Assad marque la fin de 50 ans de règne autoritaire de sa famille sur la Syrie. Dans sa résidence personnelle du quartier huppé d'al-Maliki à Damas, pillée depuis, les voisins racontent au journal les dernières heures chaotiques : les gardes hurlant "Fuyez ! Ils arrivent ! Qu'il soit maudit, il nous a abandonnés !"
Selon le New York Times, cette fin brutale redessine la carte stratégique du Moyen-Orient et ouvre une période d'incertitude pour la Syrie. Le pays, déjà ravagé par 13 ans de guerre civile ayant fait plus d'un demi-million de morts et des millions de réfugiés, doit maintenant imaginer son avenir sans les Assad. Une page d'histoire se tourne, laissant un goût amer à ceux qui sont restés fidèles jusqu'au bout à un régime qui les a abandonnés sans un mot.
400 VIES SÉNÉGALAISES EN SUSPENS À MAYOTTE
Alors que le secrétariat d'État aux Sénégalais de l'Extérieur prétend n'avoir pas été informé de la situation critique des compatriotes dans l'archipel, l'ADHA monte au créneau avec des preuves accablantes
Alors que le secrétariat d'État aux Sénégalais de l'Extérieur prétend n'avoir pas été informé de la situation critique à Mayotte, l'ADHA monte au créneau avec des preuves accablantes à travers le communiqué ci-après. L'organisation a recueilli des témoignages attestant que 400 Sénégalais sont laissés à l'abandon après le passage du cyclone Chido, perdant leurs logements et vivant dans une précarité extrême. Un professeur sénégalais, témoin direct ayant même échangé avec Emmanuel Macron, confirme qu'aucun représentant officiel du Sénégal ne s'est manifesté.
"Réaction aux propos du soi-disant chargé de communication du secrétariat d’État aux Sénégalais de l’Extérieur concernant la situation des Sénégalais à Mayotte
Action pour les Droits Humains et l’Amitié (ADHA) tient à réagir aux déclarations du chargé de communication du secrétariat d’État aux Sénégalais de l’Extérieur, publiées dans le journal EnQuête des 21 et 22 décembre 2024 et sur le site internet de www.enqueteplus.com . Celui-ci a affirmé que les autorités sénégalaises n’auraient pas été informées de la situation des Sénégalais à Mayotte, touchés par le passage du cyclone Chido.
1. Informations fiables obtenues par ADHA
Malgré ses moyens limités, ADHA a collecté des témoignages directs confirmant que près de 400 Sénégalais à Mayotte vivent une détresse aiguë : pertes de logements, absence de secours et précarité extrême.
En effet, ADHA signale, par exemple, le Professeur de classe exceptionnelle Serigne Khadimou Rassoul Thiam, résident sénégalais à Mayotte, qui peut fournir des informations précises et est joignable au + 262 639 65 34 55. Ce dernier a eu un échange physique avec le président de la République Emmanuel Macron, le 18 décembre à l’hôpital de Mayotte. Il confirme qu’aucun officiel sénégalais n’est entré en contact avec les 400 Sénégalais en détresse alarmantes.
2. Rôle et devoirs de l’État sénégalais
Il est regrettable qu’ADHA, une organisation modeste, ait accédé à ces informations pendant qu’un secrétariat d’État, doté de ressources importantes, n’ait pas été proactif.
ADHA rappelle que :
L’article 8 de la Constitution sénégalaise garantit la protection des citoyens ;
La Convention de Vienne de 1963 impose aux représentations diplomatiques de veiller sur leurs ressortissants ;
Le Pacte international relatif aux droits civils et politiques engage les États à prévenir et répondre aux crises touchant leurs citoyens.
Attendre une saisine officielle, dans un tel contexte, traduit une grave défaillance du devoir de vigilance.
3. Appel à une réponse immédiate
ADHA exhorte les autorités sénégalaises à initier une démarche proactive.
ADHA invite également Son Excellence Monsieur le président de la République du Sénégal à exprimer compassion et solidarité envers ces compatriotes dans le besoin.
« Massa »!"
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LA FRANCE COLONIALE SE PERPÉTUE À MAYOTTE
Bidonvilles et pénuries d'eau témoignent d'une réalité coloniale persistante malgré le changement de statut. La crise actuelle de ce territoire stratégique révèle l'échec d'une politique qui perpétue des schémas de domination dépassés
L'île de Mayotte, département français dans l'océan Indien, cristallise aujourd'hui les complexités héritées d'une histoire coloniale mouvementée. Ce territoire, partie intégrante de l'archipel des Comores, est devenu français en 1841 suite à son achat au prince malgache Andriansouli, dans le cadre de la stratégie française de contrôle du canal du Mozambique après la perte de l'île Maurice.
L'année 1974 marque un tournant décisif dans l'histoire de l'archipel. Lors du référendum sur l'indépendance des Comores, Mayotte fait figure d'exception avec 65% de sa population votant pour rester dans le giron français, tandis que les trois autres îles choisissent l'indépendance. Cette séparation, contestée par l'ONU, a créé une fracture durable dans la région.
La départementalisation de Mayotte en 2011, fruit d'une longue revendication de la population mahoraise, n'a pas produit les effets estimés. Le département reste marqué par des disparités criantes avec la métropole : système de santé fragile, infrastructures déficientes, coupures d'eau récurrentes. Paradoxalement, malgré ces difficultés, Mayotte affiche un niveau de vie supérieur à celui des îles voisines.
Cette disparité économique régionale a engendré un phénomène migratoire massif, particulièrement en provenance des Comores. L'île fait face à une présence importante de personnes sans papiers, dont de nombreux mineurs, générant des tensions sociales et sécuritaires croissantes. Les bidonvilles se multiplient, créant des conditions de vie précaires pour une partie significative de la population.
L'importance de Mayotte pour la France demeure considérable. Sa position permet le contrôle des îles Éparses autour de Madagascar et des routes maritimes essentielles du canal du Mozambique. Cette zone recèle également un potentiel important en termes de ressources sous-marines.
La reconstruction de Mayotte pose désormais des questions fondamentales sur l'aménagement du territoire, la gestion des flux migratoires et l'équilibre régional. La situation exige une approche globale prenant en compte les réalités historiques, sociales et économiques d'un territoire où les populations ont toujours circulé librement pendant des générations.
La gestion de Mayotte représente ainsi un défi majeur pour la France, illustrant les difficultés persistantes dans la relation entre la métropole et ses territoires ultramarins, ainsi que les conséquences à long terme des politiques coloniales sur le développement territorial et les équilibres régionaux.
Les belles feuilles de notre littérature par Amadou Elimane Kane
BATTEZ, BATTEZ LE TAM-TAM DE LUMIÈRE, LE TAM-TAM DE NOTRE HISTOIRE
EXCLUSIF SENEPLUS - À travers l’histoire de la tradition ancestrale et celle des langues africaines, Doudou Ndiaye Rose Junior, héritier du Sabar paternel, partage ses connaissances dans un domaine qu’il maîtrise de tout son corps, de son esprit
Notre patrimoine littéraire est un espace dense de créativité et de beauté. La littérature est un art qui trouve sa place dans une époque, un contexte historique, un espace culturel, tout en révélant des vérités cachées de la réalité. La littérature est une alchimie entre esthétique et idées. C’est par la littérature que nous construisons notre récit qui s’inscrit dans la mémoire. Ainsi, la littérature africaine existe par sa singularité, son histoire et sa narration particulière. Les belles feuilles de notre littérature ont pour vocation de nous donner rendez-vous avec les créateurs du verbe et de leurs œuvres qui entrent en fusion avec nos talents et nos intelligences.
Doudou Ndiaye Rose Junior fixe ici la transmission « je ne peux me permettre d’écrire cet ouvrage sans parler de mon père, celui sans qui je n’aurai aucune clé pour transmettre sur le Sabar. Cet homme, mon père, Doudou Ndiaye Coumba Rose, grand tambour major ».
En interprète savant, Doudou Ndiaye Rose Junior fait du Sabar un art majeur qu’il veut transmettre par son savoir, son savoir-faire et une pratique incroyable et multidimensionnelle.
Le sabar, l’art du tambour et de la danse au Sénégal, possède une histoire millénaire qui s’inscrit de manière belle dans notre patrimoine historique et culturel.
Cette pratique traditionnelle ancestrale est synonyme de symboles puissants du récit africain. C’est ce que nous fait redécouvrir Doudou Ndiaye Rose Junior dans son ouvrage intitulé De la vocalisation des tambours aux expressions dansées - L’essence du Sabar révélée dans tous ses états.
À travers l’histoire des groupes sociaux, de la tradition ancestrale et celle des langues africaines, Doudou Ndiaye Rose Junior, héritier du Sabar paternel, partage sa passion et ses connaissances dans un domaine qu’il maîtrise de tout son corps, de tout son cœur et de son esprit. Profondément artiste et enraciné dans le cercle ancestral de la transmission de cet héritage unique légué par une généalogie impressionnante, Doudou Ndiaye Rose Junior propose de rétablir la genèse du Sabar, véritable discipline artistique et culturelle, issue du rythme traditionnel africain et portant des valeurs et des symboles qui sont bien loin de l’imagerie du simple divertissement exotique souvent décrit par la société occidentale.
En effet, la pratique du Sabar appartient à des rites ancestraux qui avaient fonction d’éducation sociale et de transmission culturelle et patrimoniale. C’était également un rite fort de communication et d’échanges.
À travers le langage, le rythme, l’oralité, le corps et la danse, le Sabar est une expression artistique qui communique des symboles de l’histoire africaine. Quand on en saisit la complexité, on est émerveillé de cette combinaison transdisciplinaire qui va au-delà de la simple représentation. Le Sabar est histoire, le Sabar est rythme, le Sabar est langage, le Sabar est poésie, le Sabar est oralité, le Sabar est savoir, le Sabar est science. Et c’est cette alliance plurielle qui en fait sa beauté.
En effet, le Sabar s’inscrit dans un mouvement culturel de la société sénégalaise lors de nombreuses fêtes et cérémonies. Mais Doudou Ndiaye Rose Junior, en interprète savant, en fait un art majeur qu’il veut transmettre par son savoir, son savoir-faire et une pratique incroyable et multidimensionnelle.
Ainsi, il interroge les fonctions profondes du Sabar en nous plongeant dans son histoire qui s’attache à réveiller notre patrimoine social, culturel et artistique africain.
Ce livre est un trésor documentaire en la matière et je ne peux que saluer ce travail prodigieux qui, à travers notamment la richesse de nos langues nationales, décline toute l’expression combinatoire de cet art exceptionnel.
Le Sabar, cette danse traditionnelle alliée au tambour, instrument parlant et communiquant, est un tam-tam de lumière dans notre cosmogonie africaine. Il est pour moi incarnation, signification et poésie car il transmet notre tissu mémoriel de manière intemporelle et universelle.
Doudou Ndiaye Rose Junior souligne que « jouer du tambour, c’est forger » et cette image métaphorique me parle infiniment. Il dit encore que, dans l’art du sabar, « le cerveau et le corps ne font qu’un » et je partage amplement cette idée. Il dit aussi que pour parvenir à l’exercice absolu de son art, « il faut devenir son instrument », magnifique parole qui me transporte dans des ciels de rêve, dans des ciels de créativité.
Ce sont aussi pour lui « les mots du tambour et l’esprit de la danse » qui l’habitent en permanence, cette histoire se conjugue à mon verbe épris de liberté et de poésie.
Cet ouvrage est un livre indispensable pour reformer notre récit culturel patrimonial et je suis captivé par cette œuvre minutieuse, précise et transversale dans la compréhension de notre univers cosmogonique, et qui tient compte des va-et-vient culturels et spatio-temporels.
En fin de volume, Doudou Ndiaye Rose Junior indique plusieurs techniques de la danse du Sabar et ce lexique artistique et technique est celui d’un créateur expert qui partage sa connaissance profonde et son savoir-faire. Cette démarche, à la fois artistique et pédagogique, est selon moi inédite dans ce domaine.
En lisant ces lignes appartenant à notre héritage culturel ancestral, je suis ému de voir combien le grand artiste qu’est Doudou Ndiaye Rose Junior, qui brille telle une étoile transnationale, contribue à inscrire notre récit renouvelé, magnifié et participant ainsi à notre renaissance culturelle.
Amadou Elimane Kane est enseignant et poète, écrivain
De la vocalisation des tambours aux expressions dansées… L’essence du Sabar dans tous ses états, Doudou Ndiaye Rose Junior, essai, Lys Bleu éditions, 2024, ISBN : 979-10-422-3611-3
Huit mois après l'installation du nouveau régime, l'heure n'est pas encore au bilan selon Abdoul Aziz Tall. L'ancien ministre appelle plutôt à une prise de conscience collective sur l'importance du civisme dans la réussite des politiques publiques
L'ancien ministre en charge du Suivi du Plan Sénégal émergent (PSE) Abdoul Aziz Tall partage sa réflexion sur les premiers pas du nouveau régime. Dans cet entretien, il appelle à un changement de comportements, condition incontournable pour assurer les ruptures attendues du nouveau régime. M. Tall, également ancien délégué général à la Réforme de l'État, suggère quelques pistes à emprunter pour réussir « l'agenda national de transformation 'Sénégal 2050' ».
Dans une récente contribution parue dans la presse, vous avez écrit ceci : « Un régime qui vient à peine de s'installer doit prendre ses marques et fixer ses repères ». Est-ce que cela s'applique au nouveau régime en place depuis huit mois ?
Il me semble tout à fait prématuré de répondre de façon péremptoire. À la suite de l'élection présidentielle, la récente majorité acquise au niveau de l'Assemblée nationale constitue une étape à la fois critique et majeure dans la mise en place des balises institutionnelles. Permettez-moi d'utiliser une telle expression. Au-delà, il faut toujours considérer les aspects critiques dans la construction et l'évolution fonctionnelle d'une équipe. Il s'y ajoute que l'État du Sénégal s'est toujours reposé sur des ressorts extrêmement solides, au regard de son histoire et des acteurs qui ont construit la nation et l'État. Donc, les marques et repères que vous évoquez ne peuvent être déconnectés brutalement de l'exercice républicain qui a toujours existé, quelles que soient les ruptures annoncées. Autrement dit, il y a des principes incontournables et immuables qu'aucun État ne saurait ignorer parce que ces balises constituent le socle même de l'État et de la Nation. Il y a lieu, à présent, d'aller vers la « transformation de l'essai » pour emprunter un langage propre au rugby, c'est-à-dire passer de l'énorme espérance nourrie par un leadership charismatique et une légitimité incontestable à une adhésion fondée sur des réalisations au plan économique et social découlant de la mise en œuvre du projet « Sénégal 2050 ».
Comment jugez-vous le bilan d'action du nouveau régime après huit mois de gouvernance ?
Parler de bilan au sens managérial du terme me paraît tout aussi prématuré. En huit mois de gouvernance, il est difficile de se prononcer sur un bilan. Précisément, une période de huit mois reste dérisoire sur un mandat de cinq ans. En revanche, comme dans tout système qui fonctionne, il est impérieux d'assurer un suivi permanent qui permet de déceler très tôt les dysfonctionnements éventuels et de leur apporter les mesures correctives. Ce suivi est aussi l'occasion d'identifier les acquis positifs et de les renforcer. C'est le sens que les Anglo-saxons donnent au concept de « control » qui signifie une maîtrise de la situation au fur et à mesure que l'activité se déroule. À ne pas confondre avec une vérification qui s'effectue sur une période plus longue et qui peut donner lieu à des résultats dont les interprétations peuvent être à la fois plus larges et plus détaillées. C'est, du reste, cette dernière conception qui se prêterait le mieux à la notion de bilan. La mise en place récente d'une structure chargée du monitoring et de l'exécution des politiques publiques pourrait bien faciliter l'atteinte des objectifs et résultats attendus.
Le Premier ministre a annoncé, lors du dernier Conseil des ministres, qu'il va faire sa Déclaration de politique générale (DPG) dans le 27 Décembre. Qu'est-ce que vous attendez de ce rituel ?
La Déclaration de politique générale est un événement inscrit dans le calendrier républicain à chaque fois que la Primature a un nouveau locataire. Je dois avouer, pour avoir participé, par le passé, à la préparation de ce type de discours, qu'il s'agit plutôt d'annoncer au peuple, via le Parlement, une compilation des actions prioritaires de l'exécutif, qui s'inspire d'un programme. Ici, c'est l'agenda national de transformation « Sénégal 2050 ». C'est encore le lieu de rappeler la grande importance qu'il faut accorder au monitoring et à la mise en œuvre diligente des politiques publiques déclinées dans la DPG. Au-delà, c'est un événement rituel où chaque acteur (majorité et opposition) joue sa partition. Il est également question de préciser l'application du programme présidentiel en évoquant, autant que faire se peut, les détails, le calendrier et le financement des mesures envisagées.
Vous avez été ministre en charge du suivi du Plan Sénégal émergent (PSE). Y a-t-il des similitudes entre le PSE et la « Vision Sénégal 2050 » ?
Partons du principe que l'État évolue toujours dans une logique de continuité. Par conséquent, il est tout à fait normal de retrouver des points de convergence. Certes, les deux plans ne sont pas des frères siamois, mais leur principal objectif reste et demeure le développement économique et social du Sénégal. Le nouveau régime va forcément s'adosser sur les compétences en ressources humaines qui existent pour mener sa mission à bon port. Et c'est cela la cohérence institutionnelle qu'il faut observer, la vocation de l'agent de l'État étant de contribuer à la mise en œuvre diligente des politiques définies par le chef de l'État au-delà de toutes autres considérations.
Dans la même tribune, vous avez appelé à « un changement impératif de comportement des citoyens » si l'on veut atteindre la rupture tant chantée par les nouvelles autorités. Est-ce à dire que le civisme et la citoyenneté seront la clé de réussite du régime en place ?
Il est essentiel de rappeler et de souligner fortement que les questions stratégiques liées au civisme et à la citoyenneté doivent précéder toute culture et action de bonne gouvernance. De façon permanente, l'État, la société et, par extension, l'école et les médias, ainsi que la famille doivent constituer ce que j'appelle le triangle des valeurs républicaines en termes de promotion, d'éducation, de sensibilisation et de culture. Autrement, toute action, aussi performante soit-elle, est vouée à l'échec. Il ne faut pas se faire d'illusions : les conditions de réussite du nouveau régime sont intrinsèquement liées à un changement majeur des comportements de nos concitoyens. Quelle que soit la légitimité du désir de rupture, le citoyen doit être convaincu qu'il reste et demeure lui aussi au centre du processus transformationnel. À ce propos, le débat public relatif à la gouvernance doit d'abord questionner les contre-valeurs d'une société dont les dysfonctionnements découlent de ses propres comportements.
De cette introspection, il apparaît nettement que l'incivisme et l'incivilité de la plupart de nos compatriotes, qui dépassent tout entendement, devraient être au cœur des préoccupations. Le non-respect des valeurs et règles les plus élémentaires en termes de comportements civiques est plus que factuel. Ceci, à travers l'anarchie qui règne presque partout, notamment en milieu urbain. Les exemples sont légion. L'un des aspects les plus visibles de ces écarts de comportements porte sur l'utilisation des cyclomoteurs dans nos villes qui offrent un spectacle à la fois indigne et affligeant de conducteurs qui violent allègrement les exigences du Code de la route. Le défaut de port du casque est devenu une flagrante banalité. Pis encore, nombreuses sont les agressions des citoyens par des délinquants souvent primaires et qui se font constamment avec l'usage des cyclomoteurs. À côté de « ces engins de la mort », la valse des charrettes sur des artères à grande circulation fait désormais partie du mobilier urbain. Malheureusement, ce ne sont là que des échantillons d'actes d'indiscipline et de comportements à bannir pour accompagner les nouvelles autorités dans cette dynamique de rupture. À défaut, elles seront obligées, via les pouvoirs de délégataires du peuple, de passer plus de temps à corriger nos imperfections collectives en lieu et place d'une concentration sur l'essentiel de leurs missions régaliennes.
Selon vous, comment le nouveau régime peut-il mettre fin à ces dérives ?
En amont, il est essentiel de décliner un leadership par l'exemple. C'est le gage d'un effet d'entrainement et de contagion au niveau de la communauté. Il faudrait également esquisser une stratégie de sensibilisation, de communication et de mobilisation sociale. Qu'il s'agisse des radios, des télévisions ou des journaux et réseaux sociaux, les troupes de théâtre, les messages de rappel citoyen doivent être permanents à travers différents supports de communication. Relativement aux médias audiovisuels, il est grand temps, comme l'affirmait Salvador Dali, que nos télévisions cessent d'être « des instruments de crétinisation de notre société ».
Le cahier des charges des organes de presse qui bénéficient de l'appui de l'État devrait comporter une clause de participation à l'effort de restauration des valeurs civiques et républicaines. Par ailleurs, les programmes d'instruction civique dans les établissements scolaires devraient être systématisés et valorisés.
Manifestement, pour vous, le contenu des programmes de certaines télévisions, entre autres, ont un impact négatif par rapport à l'avènement d'un nouveau type de Sénégalais ?
Tout le monde peut le constater, nous sommes envahis, à longueur de semaine, par des séries télévisées et sketchs qui sont loin d'orienter les citoyens sénégalais vers les bonnes pratiques comportementales au sein de la société. Bien au contraire, elles regorgent d'inepties déconcertantes et où l'obscénité le dispute à la vulgarité, l'irrespect, l'indécence, la violence physique et verbale. Quand on regarde certains des programmes de nos télévisions, l'on ne peut s'empêcher de donner raison à ce psychologue qui affirmait que, dans ces images impudiques, tout ce qui concourait à l'intimité de la vie conjugale se trouve ravalé au rang de pratique banale aujourd'hui. Ainsi, nous constatons la perte progressive de nos valeurs de « Jom », « Kersa » et « Sutureu ».
Vous avez suggéré la création d'une institution chargée de la promotion du civisme. Quel doit être sa mission ?
Ce travail de sensibilisation pourrait être confié à une structure de promotion du civisme, qui serait logée à un niveau stratégique pour lui conférer le poids institutionnel nécessaire à l'accomplissement de sa mission. Mieux, il serait indiqué d'ériger un ministère en charge de la promotion de la citoyenneté. Dans ce cadre, le non-respect des règles et principes qui guident le comportement citoyen doit faire l'objet de sanctions sans discrimination de la part des services publics habilités.
Il y a manifestement une forte corrélation entre l'état de développement d'une Nation et le niveau d'élévation de l'esprit civique de ses citoyens !
Les pays asiatiques nous en ont administré la preuve. Nous ne pouvons pas déléguer à un pouvoir l'autorité de nous diriger pour nous comporter ensuite d'une façon qui ne peut qu'entraver l'exercice de sa mission. Les médias qui sont à la fois des relais et leaders d'opinion doivent accompagner le régime à l'avènement d'un comportement citoyen à l'opposé de ceux qui défient ouvertement les règles de civisme et violent les droits et l'intimité de leurs concitoyens.
L'ÉTAT EXCLUT TOUTE RESTRUCTURATION DE SA DETTE
Le message du gouvernement aux marchés financiers est sans ambiguïté. Il privilégie une approche stratégique de gestion de la dette, visant à optimiser les échéances tout en honorant ses engagements
(SenePlus) - Le gouvernement tient à rassurer les marchés : il "n'a aucune intention de renégocier ou de restructurer sa dette", comme le souligne fermement le ministère des Finances dans un communiqué rapporté par Bloomberg. Cette déclaration intervient alors même qu'un audit récent des finances publiques révèle une situation plus préoccupante qu'initialement annoncée.
Le ministère affirme vouloir plutôt "mettre en œuvre une approche proactive et stratégique de gestion de la dette publique visant à optimiser son profil de remboursement tout en honorant strictement ses engagements envers les investisseurs". Cette stratégie vise notamment à obtenir "un profil de remboursement plus approprié favorisant un rééchelonnement avec des échéances prolongées", selon les projets de documents budgétaires.
Cette position ferme sur le respect des engagements financiers intervient dans un contexte délicat : l'audit a mis en lumière que la dette publique dépasse 80% du PIB fin 2023, bien au-delà des 73% précédemment annoncés sous la présidence de Macky Sall. Plus inquiétant, le déficit budgétaire atteint plus de 10% du PIB, près du double des 5,5% initialement déclarés, ce qui a conduit le FMI à geler une enveloppe de prêts de 1,8 milliard de dollars.
Pour faire face à cette situation sans compromettre ses engagements, le Sénégal déploie une stratégie à plusieurs volets. Le pays prévoit notamment d'émettre des obligations de la diaspora pour 1,5 billion de francs CFA, visant à réduire sa dépendance aux financements externes. Il doit également gérer 3,2 milliards de dollars d'obligations en euros et en dollars arrivant à échéance dans les dix prochaines années.
Le gouvernement mise également sur des réformes structurelles, incluant une révision du code minier prévue pour mai et un renforcement du contenu local dans le secteur pétro-gazier. Ces mesures s'inscrivent dans le cadre d'un budget 2025 de 6,4 billions de francs CFA (10,2 milliards de dollars), avec un objectif de déficit ramené à 7%.
Les perspectives économiques demeurent positives malgré ces défis financiers. Le pays anticipe une croissance de 8,8% en 2025, portée par le démarrage de la production pétrolière et la future exploitation du champ gazier Grand Tortue Ahmeyim, un projet de 4,8 milliards de dollars opéré par BP. L'inflation devrait rester contenue à 1,9% l'année prochaine, selon le projet de budget.
La cour des comptes, qui examine actuellement ces révisions, devrait rendre ses conclusions prochainement. Le ministère des Finances prévoit déjà "une révision à la hausse de l'encours de la dette et du service de la dette" pour 2024-2025, avec un déficit budgétaire qui devrait dépasser 11% en 2024, tout en maintenant sa position ferme contre toute restructuration de la dette.
DAKAR SUFFOQUE SOUS LE NUAGE SAHARIEN
Les mesures de la qualité de l'air atteignent des sommets inquiétants, propulsant la capitale sénégalaise devant New Delhi au classement des villes les plus polluées
(SenePlus) - Selon les informations rapportées par Bloomberg, la capitale sénégalaise a grimpé au sommet du classement mondial des villes les plus polluées, dépassant même des mégapoles comme New Delhi et Dhaka. L'indice établi par la plateforme suisse IQAir a enregistré mercredi un score préoccupant de 392 pour Dakar, bien au-delà du seuil acceptable fixé à 101.
Cette situation critique s'explique par un phénomène naturel saisonnier : l'Harmattan, un vent sec chargé de poussières sahariennes qui souffle sur l'Afrique de l'Ouest de fin novembre à mars. Comme le précise Abdoulaye Diouf, ingénieur prévisionniste à l'Agence nationale de l'aviation civile, "un épisode de poussière" particulièrement intense affecte actuellement le nord du Sénégal et devrait s'étendre à l'ensemble du pays avant de se stabiliser ce weekend.
Les données sont alarmantes : "La concentration de particules dans l'air extérieur dépasse 1000 microgrammes par mètre cube", indique Diouf, soit le double de la moyenne habituelle et plus de 22 fois la recommandation de l'Organisation Mondiale de la Santé fixée à 45 microgrammes. La visibilité à Dakar devrait chuter à "500 mètres ou moins" selon les prévisions.
Les conséquences sanitaires inquiètent particulièrement les professionnels de santé. Le Dr Oumar Ba, du service de pneumologie de l'Hôpital Général de Yoff à Dakar, souligne que c'est "une réelle préoccupation, particulièrement pour les maladies respiratoires comme l'asthme et la bronchite, et chez les enfants qui sont souvent plus fragiles". Il estime qu'environ 10% de la population souffre de problèmes pulmonaires, une proportion probablement plus élevée dans la capitale.
L'impact économique est également significatif, notamment pour la communauté des pêcheurs. Omar Drame, secrétaire général d'un syndicat de pêcheurs de Dakar, explique les risques accrus : "Le risque d'échouage ou de collision avec d'autres bateaux augmente, sans parler de l'impact sur la santé des pêcheurs". À Soumbedioune, seuls quelques marins équipés de GPS osent encore prendre la mer, comme le confirme Issa Fall, coordinateur de l'association locale de pêche.
La vie quotidienne des Dakarois s'en trouve bouleversée. Mamadou Diop, octuple champion sénégalais de triathlon, a dû adapter ses activités : "Pousser son corps en extérieur dans ces conditions n'est vraiment pas une option". Les autorités sanitaires recommandent d'éviter les activités sportives en plein air et conseillent aux personnes vulnérables de rester à l'intérieur et de porter des masques.
Ce phénomène météorologique, qui peut persister plusieurs jours voire plusieurs semaines selon les conditions atmosphériques, continue d'affecter sévèrement la qualité de vie des habitants de la capitale sénégalaise, soulevant des inquiétudes croissantes quant à la détérioration de la qualité de l'air dans la région.
COMME UNE ALLIANCE DE PARIAS
Jean-Baptiste Placca tance des putschistes qui "assimilent leur orgueil à l'honneur de leur patrie", évoquant la rupture entre l'AES et la CEDEAO. "L'interdépendance est telle que les considérations d'amour-propre ne devraient pas y prévaloir"
(SenePlus) - Dans son éditorial de ce samedi 21 décembre 2024 sur RFI, Jean-Baptiste Placca analyse sans concession la sortie du Burkina Faso, du Mali et du Niger de la Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO). L'éditorialiste y voit une décision aux conséquences dramatiques pour les populations, portée par des régimes militaires qui confondent "leur orgueil personnel avec l'honneur de leur patrie".
Cette rupture intervient alors même que la CEDEAO tente de maintenir ces trois pays dans l'organisation régionale. Le chef de la junte nigérienne a d'ailleurs rejeté cette semaine toute tentative de médiation, confirmant le caractère "irréversible" de leur départ. Une position que Jean-Baptiste Placca qualifie de "manœuvre grotesque", particulièrement dans leur décision d'accorder des exemptions de visa aux ressortissants des pays de la CEDEAO.
"Pourquoi n'appliquent-ils donc pas ces exemptions à toute l'Afrique ?", s'interroge l'éditorialiste, qui y voit une tentative de "quémander, par la force, une réciprocité" et d'anticiper "la réprobation de leurs concitoyens, qui ne manqueront pas de leur reprocher cette rupture, lorsqu'elle commencera à leur compliquer singulièrement l'existence".
L'analyse est d'autant plus sévère que le bilan des régimes militaires reste peu reluisant. "Plus de quatre ans après le renversement d'Ibrahim Boubacar Kéita, près de trois ans après le renversement de Roch Marc Christian Kaboré, et bientôt un an et demi après le coup d'État qui a renversé Mohamed Bazoum, ni les Maliens ni les Burkinabè et encore moins les Nigériens ne vous diront qu'ils sont un peuple heureux, en sécurité, à l'abri des privations et de la vie chère", souligne Jean-Baptiste Placca.
L'éditorialiste pointe également le manque de vision politique claire de ces régimes, dont les discours ne sont que "des tâtonnements truffés d'extraits picorés chez Rawlings, Sankara, ou même Sékou Touré". Une différence notable avec les putschistes historiques comme Rawlings au Ghana ou Sankara au Burkina Faso, qui "avaient une idée claire de ce qu'ils pensaient, et ce dont ils rêvaient pour leur peuple".
Si la CEDEAO n'est pas exempte de critiques - l'organisation s'étant "beaucoup discréditée aux yeux des populations" ces dernières années selon l'éditorialiste - la décision de ces trois pays apparaît comme "une diversion" particulièrement préjudiciable. "L'interdépendance est telle que les considérations d'amour-propre ne devraient pas y prévaloir", conclut Jean-Baptiste Placca, rappelant qu'"on ne quitte pas une organisation parce qu'elle vous applique les textes qui la fondent".