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27 avril 2025
Opinions
PAR Alasaan Jóob At-Tijjaani
CHAPITEAU CÉLESTE
Sous le son sourd des litanies sacrées à la zawiya de Pikin, les âmes s'abreuvent de l'eau divine du soufisme. Là où la ferveur des fidèles impose sa loi, illuminant les cœurs au rythme d'un zikr nourrissant la foi
Plus que de simples sons qui sortent de bouches en harmonie, le souffle lourd traduit la ferveur des âmes bénies en cet après-midi de vendredi à la zawiya de Pikin. Dans ce microcosme populeux de la rue 10, le passant aux yeux écarquillés est on ne peut plus médusé. Entre brouhaha ambiant par ci, concert de klaxons et autres bruits de transistors inféodés aux échoppes et étals de rue par-là, le chœur impose sa loi pour que résonne le Nom Sublime au firmament de l'entendement. Lumière céleste, elle est la seule antimatière, en ce jour saint, en mesure de transpercer les cœurs profanés pour leur insuffler ce goût du Divin dans un monde en perdition. En un mot comme en mille, ça sent Dieu partout à Pikin, chez Seex Abdul Hamid Saar. Le tapis vert en guise de natte était trop étroit pour contenir le monde venu des coins et recoins de Dakaar pour cette traditionnelle ziyaara en l'honneur du Phare de la guidance. Móodu Kama Caw, islamologue au talent métrique reconnu, qui plus est une voix autorisée de la hadara, louera l'inestimable mérite du Cheikh - qu'il qualifie au demeurant de rameur en eaux troubles - qui est l'application de la sentence contenue dans Rimah : Accepter de vous ranger derrière l'abreuvoir de votre époque quel que soit par ailleurs votre degré de sainteté. Une chose est de la connaître mais une autre est de l'appliquer dans toute sa rigueur en s'affranchissant des pesanteurs sociales et/ou contingences culturelles.
Et pourtant, l'observateur averti y verra un certain bégaiement de l'histoire. En terres sénégalaises, l'illustre Maxtaar Penda SI, congénère de Seexu Omar, n'aura pas hésité à se ranger derrière le jeune Tafsiir Maba, porte-étendard du Jihad à la suite de sa désignation comme continuateur de la guerre sainte par l'aigle de Halwaar avant son départ vers le Mandé. Allaaji Maalig SI, à son époque, avait reçu allégeance et adhésion de nombre de hauts dignitaires de la Tijjaaniya qui étaient plus âgés que lui. Quoi de plus normal donc pour le guide averti et de surcroît sincère dans sa guidance, de rallier la cause de Sang bi Jóob, le dépositaire du legs des 《anciens》 ? Il faut donc voir dans cet acte de Muhiidin Seex Abdul Hamid Saar, une grande humilité doublée de courage. C'est le propre des âmes bénies de poser des actes dont la difficulté de la faisabilité n'a d'égal que la facilité de la dicibilité. C'était bien facile pour Ibliis de reconnaître la faculté de l'Omnipotent de créer un être qui lui est supérieur. Mais c'était tout autant difficile pour lui de faire acte de prosternation devant cet être fait d'argile. La ruse, voisine de l'intelligence, n'a jamais conduit le rusé vers la félicité car celle-là commande l'humilité là où celle-ci est l'œuvre même de l'ego.
Dans son adresse aux fidèles, Seex Abdul Hamiid aura loué cet acte de Sang bi Jóob en revenant sur l'importance de la Hadaratul Jumaa dans la voie. Acte exclusivement voué au Divin par sa composition en Heylalaa et Allaa, le disciple Tijaani, par la probité se son intention de s'y adonner, trouve là, la voie de la félicité. Car quiconque est à la recherche de la félicité doit strictement se conformer aux injonctions du vrai maître et c'est ainsi que le résultat escompté est obtenu. Oraison majeure de la voie, Seex Ahmada Tijaani(Qu'Allah sanctifie son précieux secret et qu'IL soit satisfait de lui) l'a reçue du Prophète PSL. Acte auparavant pratiqué dans la voie Xalwatii, son importance peut se jauger au fait d'être le seul à bénéficier de la présence du Prophète dès le départ. Les détenteurs du privilège du dévoilement apprécient hautement la délectation de la meilleure des créatures durant l'accomplissement d'une telle oraison tant il est vrai qu'Il demeure le plus accompli des musulmans.
Ainsi, le zikr, notamment la Hadaratul Jumaa, demeure la clé de rapprochement au Divin, au Prophète PSL et à Seex Ahmad Tijaani (Qu'Allah sanctifie son précieux secret et qu'IL soit satisfait de lui). Le vrai musulman est donc celui qui s'adonne constamment au zikr, à la quête du Divin, des Prophètes et Saints sans coup férir.
Revenant sur Sang bi Jóob, Seex Abdul Hamiid dira que c'est la marque des hommes de Dieu comme lui de dire ce qu'ils ont expérimenté ou surpassé, à la différence des hommes de science qui s'expriment à partir du spectre réduit de l'intellect. Ainsi, en indiquant Sang bi Jóob, c'est le calife de Dieu qu'il montre. A charge donc pour chaque disciple de savoir comment profiter de ce bienfait.
Dans son discours d'ouverture, Móodu Kama Caw est revenu sur les deux grâces qui vont de pair, à savoir l'avantage de la rencontre avec Sang bi Jóob par l'entremise de Seex Abdul Hamiid Saar que les disciples doivent célébrer. C'est au demeurant, le sens à donner à cette ziyaara. Parmi les innombrables grâces dont le Tout-puissant a comblé le musulman, celle d'être musulman reste la plus grande. D'où l'importance du soufisme pour préserver la foi musulmane en la reconnectant à son sens originel dans un monde corrosif, qui reste la soumission exclusive à Allaah. Mutatis mutandis, le soufisme à son tour connaîtra moult infestations de prédateurs sous les apparences de guides au point de requérir une longue tradition de réformateurs et révivificateurs tous méritants pour avoir chacun, en fonction du contexte de son époque, rétabli la vérité originelle. Ces mérites culmineront pour ainsi dire, avec l'avènement de Seyid Seex Ahmada Tijaani (Qu'Allah sanctifie son précieux secret et qu'IL soit satisfait de lui). Marchant sur les plates-bandes de ses prédécesseurs, la Tijjaaniya aura à son tour subi bien des dérives telles que percusions et danses aux relents de paganisme. Ainsi donc, en phase avec le conseil d'Abul Àbbaas Al Mursiiyu qui enjoint l'aspirant à opérer le choix de son guide sous la bienveillance du connaisseur sincère ; car ce dernier, faisant fi des signes extérieurs, fonde le choix d'un guide sur des critères autres. C'est le sens à donner ainsi aux indications de Seex Abdul Hamiid Saar à l'endroit de Seex Mohamed Jóob At-Tijjaani. D'où la gémellité de grâces qui forcent à prier pour la longévité et la vitalité de leur porteur, par les innombrables bénéficiaires tant il est vrai que ces deux guides incarnent la fierté de l'islam, de ses plus illustres serviteurs, en l'occurence le Prophète PSL, Seex Ahmada Tijaani RTA, Seex Mohamed Al Ghali, Seex Omar Fuutiyu, Maam Alfa et Seex Al Haaji Maalig. Pour finir, il reviendra sur son récent poème aux succulents vers en l'honneur du Cheikh :
- Vous [ndlr : Seex Abdul Hamiid] êtes en vérité, la fierté de Seex Seydil Haaji Maalig.
- Si Seydil Haaji Maalig avait à choisir un missionnaire pour sa postérité, vous seriez le meilleur choix possible.
- Vous êtes le pourvoyeur des nécessiteux en quête de Dieu. Vous êtes le meilleur remède pour les malades de la voie.
- Car ils sont nombreux à revivifier les chartes de la confrérie, notamment le respect des prières canoniques et des wazifa en assemblée alors qu'ils ne vous ont jamais vu. Vous êtes donc le guérisseur des malades de la Tijjaaniya dans ce monde.
- La Tijjaaniya, telle une pirogue en mer, avance sous votre impulsion. Vous êtes donc un don à cette confrérie pour l'atteinte de sa mission.
- D'autres comme moi [ndlr : Móodu Kama Caw], ont pu "retrouver la vue" grâce à vous [ndlr : Seex Abdul Hamiid] alors qu'ils végétaient aux lisières de brasiers par égarement.
- Vous avez su attacher nos cordes à celle de Sang bi Jóob qui est le sauveur de quiconque, nécessiteux et voulant être comblé de grâces.
- Certes, en Sang bi Jóob, nous avons trouvé un sauveteur, qui a su raviver des soleils en passe de s'éteindre à jamais, conformément aux coups d'éclat de son homonyme de Prophète PSL.
- Oh Allaah, nous rendons donc grâce à ton sujet-ci [ndlr : Seex Abdul Hamiid] en t'implorant de lui accorder la longévité de Noé avec d'innombrables grâces.
La Communication de Sang bi Jóob
"Bàyyi di duufloo loo xamni daa néewi rekk."
Son éloquence, connue de tous, s'est encore illustrée par des propos nimbés d'un halo de gratitude pour cette marque de générosité que Seex Abdul Hamiid ne cesse de faire montre à son égard en se positionnant en passerelle entre lui et les âmes. Ces dernières, pour ainsi dire, ont donc une dette morale envers lui [ndlr : Seex Abdul Hamiid]. C'est d'ailleurs le sens de nos actes envers Allaah que de témoigner notre gratitude par nos actes tels que la prière ou encore le jeûne.
Actualité de la ouma oblige, Sang bi, comme à son habitude, a profité de la séance pour parler de la crise israélo-palestinienne actuellement en cours. Dénonçant vertement l'omerta des chefs religieux d'ici et d'ailleurs, il a rappelé l'urgente nécessité pour les musulmans de s'unir alors même que les ennemis de l'islam se retrouvent. Le hadith du Prophète PSL est limpide sur cela : "Quiconque ne se préoccupe pas des affaires des musulmans n'en est pas un." C'est le lieu d'ailleurs de saluer la récente communication de la haute autorité en Gambie, dénonçant les injustices faites à la Palestine.
"Doompat ci sot la bokk" dira Sang bi Jóob comme quoi dans une lutte, aucun effort n'est à sous-estimer pour arriver à vaincre l'adversaire. C'est donc sur ces entrefaites qu'une oraison spéciale de 65 jawharatul kamaal a été dite pour les frères palestiniens en espérant que l'esprit du "Markazil fuhuumi wal ma'aani" - le centre de toutes formes de compréhension et de signification - habite les bourreaux de gaza pour que se taisent à jamais les chars de la furie meurtrière et que la "Nuurul akwaani mutakawiinatil aadamiyi saahibil hàqi ràbbaani"- la lumière des êtres en cours de formation humaine leur inspire l'humanité dont notre monde a besoin.
La ziyaara aura vécu. Les guides repartent amenant avec eux toute la solennité de l'événement.
par Ngugi wa Thiong'o et Boubacar Boris Diop
LETTRE OUVERTE À BASSIROU DIOMAYE FAYE
EXCLUSIF SENEPLUS - Les langues sénégalaises doivent être au coeur du nouveau Sénégal. Cela doit commencer par l'abandon du préalable de la maîtrise du français par les candidats à la présidence
Ngugi wa Thiong'o et Boubacar Boris Diop |
Publication 09/05/2024
Excellence, Monsieur le président de la République,
Permettez-nous de nous présenter avant d'en venir au cœur de notre propos. Nous sommes Ngugi Wa Thiong'o du Kenya et Boubacar Boris Diop du Sénégal. Tous deux romanciers et essayistes, nos œuvres les plus connues sont respectivement Decolonizing the Mind : The Politics of Language in African Literature (1986) et Murambi, le livre des ossements (2000), consacré au génocide perpétré en 1994 contre les Tutsi au Rwanda. Ce qu'il importe toutefois de souligner au regard de la motivation principale de cette lettre ouverte, c'est qu'en plus de notre production littéraire en anglais et en français - les langues des anciens colonisateurs - nous avons publié des ouvrages dans nos langues maternelles, le Kikuyu et le Wolof parmi lesquels Matigari (1986) et Bàmmeelu Kocc Barma (2017).
Nous vous félicitons sincèrement pour votre investiture en tant que nouveau président de la République du Sénégal. Nos félicitations vont également à votre Premier ministre et compagnon de lutte, M. Ousmane Sonko. Par cette brillante élection qui n'a été contestée par aucun de vos rivaux, le peuple sénégalais ne vous a pas choisi comme son maître mais comme l'esclave de ses rêves. Il ne fait aucun doute à nos yeux que vous saurez vous hisser à la hauteur de ses espérances.
Nous ne nous sommes certes jamais rencontrés en personne mais toute l'Afrique, en vérité le monde entier, vous connaît et nous savons que votre jeunesse même a fait souffler un vent d'optimisme sur le continent africain. C'est du reste pour cette raison que nous avons pris la liberté de nous adresser aujourd'hui à vous en tant que vos aînés, à l'africaine en quelque sorte, mais aussi en tant que deux de vos admirateurs.
Si l'Afrique va aujourd'hui encore si mal, c'est la faute de ses leaders politiques qui, à quelques exceptions près, comme Kwame Nkrumah, ont trahi les populations africaines. De mauvais dirigeants ont tout simplement normalisé les anomalies du colonialisme et du néo-colonialisme, qui n'est rien d'autre que l'africanisation du système colonial. Voilà pourquoi nos ressources naturelles continuent depuis si longtemps à enrichir l'Europe et l'Occident. Au moment où les regards de ces complexés restent obsessionnellement tournés vers l'Occident, on ne peut manquer de s'interroger : où sont donc nos inventeurs ? Nos ingénieurs ? Nos explorateurs spatiaux ? L'Afrique aspire à un leadership capable d'enflammer l'imagination de sa jeunesse. Mais cela ne pourra jamais se faire avec des présidents qui ne savent qu'imiter l'Occident, des présidents qui ne croient ni en eux-mêmes ni en leurs peuples. Vous, Excellence, vous avez la possibilité d'ouvrir pour votre peuple des sentiers nouveaux, vous pouvez lui redonner une telle confiance en lui-même qu'il traitera, tout naturellement, d'égal à égal avec toutes les autres nations de la terre. Gardez cependant à l'esprit que si vous choisissez cette voie, vous vous ferez bien des ennemis en Occident. Ce que l'Europe et l'Occident attendent de l'Afrique, c'est qu'elle n'arrête jamais de mettre ses matières premières à leur disposition sans rien recevoir en contrepartie. N'acceptez pas une telle iniquité. Et s'ils vous diabolisent pour cela, et ils ne manqueront pas de le faire, ne vous en souciez pas, car seul doit compter pour vous le jugement du peuple sénégalais.
Nous aimerions à présent partager avec vous quelques brèves réflexions sur la question linguistique qui nous est très familière en tant qu'écrivains. Nous avons choisi de nous concentrer sur ce problème particulier parce que, à notre humble avis, sa résolution est un préalable à toute révolution économique, politique, sociale et culturelle, et donc au bien-être de vos compatriotes.
Voici quelques points que nous tenons à souligner :
Votre pouvoir tire sa force des citoyens sénégalais. Vous les défendez, ils vous défendent. Vous leur parlez, ils vous parlent. Mais vous ne pouvez pas le faire en utilisant une langue qu'ils ne comprennent pas. N'est-ce pas là une évidence, M. le président ?
Les langues sénégalaises doivent être la pierre angulaire du nouveau Sénégal. Chaque Sénégalais a le droit d'exiger le respect de sa langue maternelle. Évitez toute hiérarchisation des langues. Priorité donc à la langue maternelle, qu'elle soit le pulaar, le seereer, le soninke, le wolof, le mandinka, le joolaa ou toute autre langue parlée au Sénégal. Mais si une langue sénégalaise, par exemple le wolof, devient celle qui permet la communication entre tous les Sénégalais, cela ne doit poser aucun problème. Voici notre conception de la politique linguistique : la langue maternelle d'abord. Ensuite, disons, le wolof. Ensuite, disons le swahili, le français, etc. Si vous connaissez toutes les langues du monde sans connaître votre langue maternelle, vous êtes en état d'esclavage mental. En revanche si après avoir maîtrisé votre langue maternelle vous y ajoutez toutes les autres langues du monde, vous n'en serez que plus riche et plus fort.
Encouragez les traductions entre les langues sénégalaises. C'est à nos yeux un point fondamental. Nous proposons à cet effet la mise en place d'un centre national d'interprétation et de traduction qui permettrait une symbiose et une fertilisation croisée entre les langues de votre pays et entre celles-ci et les langues de l'Afrique et du monde. Votre Excellence, de nombreux Africains ont apprécié le fait que lors de votre première visite officielle en Gambie, vous et le président Barrow avez échangé directement en wolof. Nous savons également que, contrairement à vos prédécesseurs, vous prononcez la plupart de vos discours à la fois en français et en wolof et nous pensons que c'est exactement ce qu'il faut faire. Faites votre discours dans une langue sénégalaise, puis mettez-le à disposition dans toutes les autres langues sénégalaises avant de le faire traduire en français. Aux Nations Unies, parlez dans une langue sénégalaise et votre propos pourra faire l'objet d'une traduction simultanée dans les langues de travail de cette organisation internationale. En d'autres termes, faites comme tous les autres présidents du monde, prononcez vos discours dans votre langue. En visite en France par exemple, faites-vous accompagner d'un interprète et adressez-vous dans une langue sénégalaise à votre homologue de l'Élysée. En bref, veillez à faire respecter partout les langues sénégalaises. Et cela doit commencer par l'abrogation dès que possible de l'étrange et embarrassant article 28 de la Constitution sénégalaise, qui exige de tout candidat à la présidence qu'il sache lire, écrire et parler couramment le français.
Organisez les paysans et les ouvriers sénégalais. Stimulez leur créativité. Ils seront vos plus ardents défenseurs. Ne vous préoccupez pas des soi-disant élites intellectuelles qui, parce qu'elles auraient tant à perdre dans le développement des langues de votre pays, multiplient les manœuvres et les arguments fallacieux pour faire dérailler le train de l'Histoire.
Les œuvres de Sembène Ousmane, notamment Les Bouts-de-bois-de-Dieu, et celles d'autres grands noms de la littérature comme Cheikh Hamidou Kane, devraient être disponibles dans toutes les langues sénégalaises. Quant à Cheikh Anta Diop, il est temps que ses livres soient au programme de toutes les écoles de votre pays.
Nous souhaitons aussi que les littératures progressistes d'Afrique et du reste du monde soient disponibles dans les langues sénégalaises et enseignées dans vos écoles et dans vos universités.
Nous savons bien que le Sénégal sera votre priorité. Mais il faudra ensuite vous tourner vers l'Afrique puis vers l'Asie et l'Amérique latine avant de penser à l'Europe. Et cette option devrait se refléter dans le système éducatif.
Faites du Sénégal une nation de penseurs, d'inventeurs, d'artisans, d'explorateurs, une nation de créateurs, ouverte à tous les vents du monde et capable de faire respecter ses intérêts vitaux.
En espérant que ces idées et suggestions de deux compatriotes africains de bonne volonté retiendront votre attention, nous vous prions de croire, Excellence, à notre profond respect.
Your Excellency President Bassirou Diomaye Diakhar Faye
Allow us to introduce ourselves to you before getting to the heart of what we have to say. We are Ngugi Wa Thiong'o from Kenya and Boubacar Boris Diop from Senegal. Both novelists and essayists, our best-known books are respectively Decolonizing the Mind: The Politics of Language in African Literature. (1986) and Murambi, le livre des ossements (2000), about the genocide perpetrated in 1994 against the Tutsis in Rwanda. But the most important thing to emphasize with regard to the motivations behind this open letter is that we have not exclusively published works in English and French - the languages of the former colonizers - but also novels - including Matigari (1986) and Bàmmeelu Kocc Barma (2017) - in our mother tongues, Kikuyu and Wolof.
Congratulations on your assumption of power as the new President of the Republic of Senegal. Our congratulations also go to your Prime Minister and brother in arms, Mr. Ousmane Sonko. With this brilliant election, which not one of your rivals contested, the Senegalese people have not chosen you as its master but as its servant. We have no doubt whatsoever that you will live up to this expectation. We have never met in person but all Africa, indeed the world, has met you and we know that your youth gives Africa hope. That's why we are writing to you as both your African elders and admirers.
Up to now, except for a few leaders like Kwame Nkrumah, the African leadership has betrayed African people. They have simply normalized the abnormalities of Colonialism and neo-colonialism which is simply the Africanization of the colonial system. Our resources have continued to develop Europe and the West. As we only look up to the West, one wonders where our inventors are? Our engineers? Our space explorers? Africa longs for a leadership that can fire the imagination of the continent’s youth. But we cannot do that when our leadership simply mimics, always imitating the West, with no belief in ourselves, in our people. You are in a position to steer Senegal onto a new and different path towards a collective self-confidence, relating to the world on the basis of equal give and take. But if you choose that path, you will create enemies in the West. The West wants an Africa that always gives to Europe and the West. Don't accept an inequity which will be at the expense of your people. And if they demonize you for that, just don't care, don't accept any other judge than the Senegalese people.
Let us now share a few thoughts. We 've chosen to focus on the language problem, because as writers we're familiar with it, but also because, in our humble opinion, the resolution of the language problem is a prerequisite for any economic, political, social, and cultural revolution, and therefore for the well-being of your compatriots.
These are some points we want to stress:
1.Your Power is the Senegalese people. You defend them, they defend you. You speak to them they speak to you. But you cannot do that using a language they can't understand. It is as simple and self-evident as that.
2. Senegalese languages must be the bedrock of the new Senegal. Every Senegalese has a right to their mother tongue. Avoid hierarchy of languages. So, mother tongue first, be it Pulaar, Seereer, Soninke, Wolof Mandinka or Joolaa or any other language spoken in Senegal. But if one Senegalese language, say Wolof, becomes the language that enables conversation among all the other Senegalese languages, that is good. The language policy: Mother tongue first. Then say, Wolof. Then say Swahili, French etc. If you know all the languages of the world, and you don’t know your mother tongue, that is mental enslavement. But if you know your mother tongue, and add all the languages of the world to it, that is empowerment.
3. Encourage translations among Senegalese languages. This is a particularly important point for us. To that end, set up a national interpreting and translation center that would enable a symbiosis and a cross-fertilization between the languages of your country, and between them and the languages of Africa and the world. His Excellency, many Africans appreciated the fact that during your first official visit to the Gambia, you and President Barrow spoke directly to each other in Wolof. We also know that, unlike your predecessors, you make most of your speeches in both French and Wolof, and we think that's exactly the right thing to do. Make your speech in a Senegalese language and then make it available in all the other Senegalese languages. And then in French etc. At the United Nations, speak in a Senegalese language. You can have it translated and or interpreted into French or English, as necessary. In other words, do what all other Presidents in the world do; they make their speeches in their languages. In France, with a French President, speak to him in a Senegalese language. You have an interpreter with you etc.
In short, please invest in the Senegalese languages. And this must start with the repeal at the earliest opportunity of the strange article 28 of the Senegalese Constitution, which requires all presidential candidates to be able not only to speak but also to read and write French.
4. Organize the Senegalese farmers and workers. Fire their imagination. They are your defenders. Don't worry about all the self-proclaimed elites who have so much to lose in the development of your country's languages, and who are multiplying maneuvers and specious arguments to derail the train of History.
5. The works of Sembène Ousmane, especially God’s Bits of Wood, and those of other literary giants like Cheikh Hamidou Kane should be available in all Senegalese languages. As for Cheikh Anta Diop, his books should be taught in all Senegalese schools
6. Progressive literatures from Africa and the rest of the world should be made available in Senegalese languages and also taught in Senegalese schools and universities
7. Senegal first. Then Africa. Then Asia and Latin America. Then Europe etc. This should be reflected in the country’s educational system.
8. Senegal must become a nation of thinkers, inventors, manufacturers, explorers, a nation of makers of things, relating to the world on the basis of equal give and take.
These are, His Excellency, just a few thoughts from two African compatriots and well-wishers from Kenya and your beloved Senegal.
Respectfully yours,
par Jacques Ayadji
L’EXEMPLE INSPIRANT DE DIOMAYE FAYE
Lorsqu’on accède à la magistrature suprême dans un pays qui a traversé des crises majeures comme ce fut le cas au Sénégal récemment, œuvrer pour colmater les brèches nées des querelles politiques, souder les fractures sociétales est un devoir républicain
Le tout nouveau chef de l'État sénégalais, par un acte inspirant, vient d’indiquer le chemin à suivre aux dirigeants du continent africain, notamment ceux du Bénin.
Il n'y a pas meilleure occasion que celle de ce mardi 7 mai 2024 pour adresser mon encouragement et mes chaleureuses félicitations au tout nouveau président sénégalais pour cette historique décision qu'il a prise à la réunion hebdomadaire du Conseil des ministres du 24 avril 2024 en faveur des victimes des événements de janvier 2021 à février 2024. Et pour cause, la journée de ce 7 mai marque la célébration de l'édition 2024 de la Journée nationale de Lutte contre la Torture décrétée en 1994 par le gouvernement du président Nicéphore Dieudonné Soglo. Ceci en mémoire de Luc Togbadja, jeune étudiant militant de la jeunesse communiste du Bénin sauvagement torturé à mort au petit palais courant 1988. Cette journée a également pour but de :
- rappeler les conditions de vie des anciennes victimes abandonnées dans la précarité sans juste et équitable indemnisation ;
- sensibiliser les pouvoirs publics sur l'interdiction par les instruments juridiques internationaux du recours à la torture pour contraindre le citoyen à faire ou ne pas faire quelque chose.
Depuis ce temps, les anciennes victimes ou leurs ayants-droits manifestent à l'occasion de cette journée pour commémorer leurs martyrs que sont Luc TOGBADJA, Rémi Akpokpo Glele, Mama Yari Moussa, Kpomassi Sègla, Boniface Suatinki et les héros victimes de la torture encore vivants dont Maître Aboubakar Baparape est le symbole.
C’est donc avec grande satisfaction, que nous avons appris au Mouvement des Élites Engagées pour l’Émancipation du Bénin (MOELE BENIN), la décision prise en Conseil des ministres ce mercredi 24 avril 2024 par le président sénégalais, de mettre en place une commission d’indemnisation des victimes des événements de janvier 2021 à février 2024.
Selon le compte-rendu du Conseil des ministres sénégalais, il sera notamment question d’identifier les victimes et de procéder à l’évaluation des préjudices subis ainsi qu’à la prise en charge effective des blessés en cours de traitement. Cette décision est un acte fort de réconciliation nationale, et dénote de l’intérêt marqué par le nouveau Président sénégalais pour la solidification du tissu national.
MOELE BENIN se réjouit de cette occurrence et saisit cette occasion pour adresser ses chaleureuses félicitations et encouragements au Président Bassirou DIOMAYE FAYE, pour sa clairvoyance politique.
En effet, lorsqu’on accède à la magistrature suprême dans un pays qui a traversé des crises politiques et institutionnelles majeures, comme ce fut le cas au Sénégal récemment, œuvrer pour colmater les brèches nées des querelles politiques, pour souder les fractures sociétales est un devoir républicain. Et tout jeune qu’il est, le président Bassirou Diomaye Faye a su prendre très vite ses marques d’homme d’État. Comme quoi, aux âmes bien nées, la valeur n’attend point le nombre des années. Et ce faisant, il se pose en modèle.
Vérité – Réparation – Réconciliation
Vérité – Réparation – Réconciliation. Je puis affirmer sans risque de me tromper, que ce triptyque est ce qui a fait le plus défaut au Bénin au sortir de la Conférence Nationale des Forces Vives de la Nation. Un faux pas qui marque de son empreinte déstabilisatrice notre cheminement politique et institutionnel depuis 1990, et nous conduit de crise en crise jusqu’à ce jour. Était-ce parce que le pouvoir n’avait pas été alors remis à l’un des vrais combattants qui avaient fait plier par leur lutte le régime militaro-marxiste du PRPB ? C’est une question qui mérite d’être traitée par nos intellectuels, nos universitaires et/ou chercheurs.
Il est cependant encore possible de rectifier le tir. Car, notre marche vers l’édification d’une Nation, est tributaire de la réparation des préjudices du passé, significative de justice pour tous. Une priorité de premier ordre, voire un préalable, si tant est-il que nous ambitionnons d’aller d’un pas assuré plus loin.
Pour MOELE BENIN, il s’agit d’une vertu à cultiver, d’un point fondamental en lequel notre conviction reste fortement attachée.
C’est prenant conscience du non règlement de ce préalable depuis 1990, que le parti MOELE BENIN a, dans son offre de législature intitulée « Osons l’inclusion pour un Bénin inclusif » et rendue publique dans le cadre des élections législatives du 8 janvier 2023, accordé une place de choix à cette problématique essentielle. Car, pour MOELE BENIN, il faut impérativement :
- rendre justice à tous les anciens détenus politiques et à toutes les victimes de la répression du régime militaro-marxiste de l’ex Parti de la Révolution Populaire du Bénin (PRPB) ou leurs ayants-droits ;
- et instituer un cadre de témoignages et de reconnaissance à tous nos combattants et gloires d’hier.
Fort de ceci, notre parti accueille cette noble décision du Combattant Bassirou Diomaye Faye plébiscité président de la République du Sénégal comme une espérance. Espérance d’une aube nouvelle pour notre continent et pour nos pays demeurés divisés parce que les dirigeants n’ont jamais suffisamment su prendre toute la mesure de leur responsabilité historique, à cultiver l’unité nationale, la justice et la paix, en tenant grand compte du passé et de l’environnement qui a généré leur accession au pouvoir.
Par son acte révolutionnaire, le Président Bassirou Diomaye Faye indique ainsi le chemin à tout un continent, et nous croyons qu’il l’indique particulièrement à tous les dirigeants qui ont manqué d’œuvrer en faveur du rassemblement et de la concorde nationale.
Le Bénin a inauguré une nouvelle ère d’unité et de consensus national de par son génie exprimé à la Conférence Nationale des forces vives de la Nation de février 1990. Mais il a manqué d’honorer une démarche plus que sacrée, pour les Béninois, en ne sacrifiant pas au rituel « vɔsísá », ô combien déterminant.
MOELE BENIN voudrait par la présente réitérer à toute la classe politique béninoise, son appel patriotique à enfin procéder au rituel sacrificiel « vɔsísá », véritable symbole aux dimensions spirituelles incontestables, afin d’exorciser les démons de la division qui hantent toujours notre marche vers l’unité nationale. Unité sans laquelle le développement intégral et durable est utopique.
MOELE BENIN reste convaincu que, sans ce « vɔsísá », nous ne finirons jamais avec les crises politiques majeures dans notre pays. Et de cela, on ne rendrait personne coupable, fusse-t-il Président de la République ou membre de quelque institution de la République.
Jacques O.H.S. Ayadji est président de MOELE-BENIN.
Par Mamadou Bamba TALL,
DE LA NECESSITE DE REVOIR LES CONDITIONS D’ACCES AUX CONCOURS ET À CERTAINES PROFESSIONS
Le système éducatif sénégalais est une copie conforme des tares et défauts du système français. Le monde évolue et l’imaginaire de l’ex-colonisé, le Sénégalais, semble stagner
Le système éducatif sénégalais est une copie conforme des tares et défauts du système français. Le monde évolue et l’imaginaire de l’ex-colonisé, le Sénégalais, semble stagner.
En effet, qu’il s’agisse du contenu de nos programmes, des rapports hiérarchiques en milieu scolaire, de l’introduction des langues vernaculaires dans l’enceinte de l’école, et de beaucoup d’autres aspects de notre éducation qui continuent d’avoir une place de choix dans notre milieu de vie scolaire - tout en étant objet de discorde entre nous – tout ceci date du temps où les parents et les arrière-grands-parents de certains d’entre nous récitaient aveuglément avec le plus grand sérieux du monde, dans leur cours d’histoire que leurs ancêtres étaient des Gaulois.
Incapables d’arrimer pleinement nos propres besoins existentiels et identitaires à l’évolution du monde et à nos réalités propres, nous n’avons jamais osé amorcer le virage de folie qui nous guérirait définitivement de nos migraines et de nos troubles digestifs en éducation.
Les Français sont nos référents en matière d’éducation pour ne pas dire nos maitres. Qu’on enlève à notre système éducatif tout ce que nous leur devons et notre univers scolaire s’écroulerait comme un château de cartes. Rappeler cette vérité ici est moins un souci de décrier le passé que de mettre en exergue notre refus d’évoluer par nous-mêmes sans qu’on nous prenne par la main.
Le monde actuel est un hub ouvert où tout le monde est capable de parler à tout le monde. On est donc bien loin de ce temps où pour pouvoir parler aux autres peuples, notre pays devait suivre du regard la France et attendre son hochement de tête, signe de son approbation, pour oser aller de l’avant.
Cette même France qui s’est beaucoup inspirée des Latins et des Grecs pour se doter d’une éducation féconde et virile, cette France fière de ses ancêtres gaulois refuse de se figer dans le temps en ne se fiant qu’aux fondements de la vision de Jules Ferry sur l’école. Elle refuse de reposer son avenir uniquement sur ses beaux acquis d’hier. Chaque année, elle apporte des modifications à son système éducatif quand la situation l’exige.
Les Français sont à l’affût des nouvelles théories émergentes en éducation. Ils s’inspirent de ce qui marche à travers le monde, et à contrario, ils délaissent sans regret ce qui ne correspond plus au besoin du peuple ou qui n’est plus adapté au temps présent. Mais nous Africains, et particulièrement Sénégalais, que faisons-nous? Nous marquons le pas à presque la même cadence : les idées fortes que le Colon nous a laissées après 1960 continuent d’être les lignes directrices de notre enseignement en 2024.
En d’autres mots, il est possible de relever beaucoup d’incongruités de notre éducation qui relève de notre mimétisme et de notre incapacité à oser le changement. Pour l’accès à la fonction publique sénégalaise, pour ne prendre que cet exemple, le critère d’âge constitue un écueil insurmontable pour bon nombre de jeunes gens qui se sont battus durement pour obtenir leurs diplômes, mais qui finalement se rendent compte que beaucoup de concours ne sont plus à leur portée à cause leur âge.
Avec cette discrimination pas toujours justifiable, non seulement on perd des hommes et des femmes qui auraient pu être des ressources humaines de qualité, mais on crée aussi une situation d’injustice qui ne se justifie pas. 2 Pourtant, au Sénégal, la notion de « jeune » est un concept bien élastique.
En effet, beaucoup de personnes dans la quarantaine sont considérées dans nos quartiers comme étant de jeunes gens. D’ailleurs, il faut regarder ceux qui s’activent dans le milieu Navétane pour mieux comprendre le sens de nos propos. Aussi bien au niveau des ODCAVi que des ONCAVii, on retrouve beaucoup de dirigeants du mouvement national de jeunesse ayant plus de 45 ans. Tout ceci pour dire que socialement et culturellement, il y a une sorte de déphasage paradoxal entre l’image que la société se fait d’une personne jeune et les exigences de notre administration publique qui place la barre très basse pour admettre en son sein de « jeunes » Sénégalais qui aspirent à travailler pour elle.
En France et dans beaucoup de pays développés, l'absence de limite maximale d'âge pour l'accès aux concours est devenue aujourd'hui la règle dans la fonction publique, même si quelques exceptions sont maintenues dans certains cas spécifiques. Nous ne comprenons pas donc pourquoi, on continue au Sénégal de maintenir si basse la limite d’âge pour accéder à la plupart des concours de la fonction publique. Cette limitation qui recale les postulants est d’autant plus incongrue qu’il y a peu de solutions alternatives prévues pour les diplômés ayant plus de 30 ans.
Au demeurant, il est facile de constater que bon nombre de jeunes sénégalais, la plupart issus du monde rural, mettent plus de temps qu’il en faut pour obtenir leurs diplômes universitaires. Un retard dans les études dû en grande partie aux conditions de vie difficile de leurs familles qui manquent presque de tout. Ces jeunes très méritants au regard de leur parcours et des défis surmontés, au lieu de les soutenir pour leur persévérance dans les études, on tue leur ultime espoir de travailler dans la fonction publique en incriminant leur âge. Nous avons des façons de faire archaïques et inadaptées à l’évolution actuelle du monde. Par ce fait même, nous oublions qu’un individu peut se découvrir tardivement une vocation ou un intérêt particulier pour une profession dans l’administration publique.
Ailleurs, en de pareilles circonstances, il est possible de se réorienter et de changer complètement de carrières. Pour illustrer nos propos, nous n’avons pas besoin de chercher loin, la communauté sénégalaise au Canada regorge de talents qui travaillent dans des secteurs d’activités de pointe qui n’avaient rien à voir avec leur formation initiale au Sénégal. Nous pouvons donner en exemple le cas de plusieurs Sénégalais qui étaient des enseignants du primaire et qui sont devenus au Canada des comptables, des informaticiens, des banquiers, des gestionnaires, etc. il s’agit de personnes qui, s’ils étaient restés au Sénégal, auraient été condamnées à renoncer à leur rêve pour des raisons liées à la limite d’âge ou encore par le manque de souplesse de nos structures à accueillir des reconversions professionnelles.
C’est dans ce même sillage des limites d’âge imposées çà et là que nous dénonçons particulièrement l’âge maximal pour le service militaire fixé à 24 ans. Cela n’a aucun sens de notre humble point de vue. Nous ne voyons pas le moindre argument à l’état actuel du monde qui pourrait le justifier. Mieux déverrouiller ce plafond de 24 ans permettrait à beaucoup de jeunes sénégalais d’intégrer l’armée à la fin de leurs études universitaires sans passer par des concours très sélectifs d’officiers ou de sous-officiers où les sélectionnés se comptent du bout des doigts. Cette exigence de notre armée est évidemment plus aberrante quand on se compare à des pays comme le Canada.
En effet, plusieurs Sénégalais parviennent sans difficulté à intégrer l’armée canadienne, là où ils n’auraient jamais pu porter la tenue militaire dans leur propre pays d’origine à cause de leur âge. 3 Au Canada, un Sénégalais âgé de 50 ans peut s’enrôler dans l’armée, alors qu’au Sénégal à 25 ans la même personne est très vieille pour être militaire. Quelle est la logique dans tout ça? C’est à nos officiers de s’expliquer, car en ce qui concerne les Canadiens la réponse est claire, nette et précise : « Il n'y a pas de discrimination par rapport à l'âge. Si les gens sont aptes médicalement et qu'ils sont capables de faire le travail, il n'y a rien qui les empêche de relever ce défi-là. »iii
Bref, nous devons nous regarder dans le miroir et revoir sans complaisance certaines de nos façons de faire. Toujours en restant dans l’univers des examens et concours au Sénégal, il est possible de décrier d’autres anomalies. Notre pays, par exemple, ne promeut pas l’égalité des chances entre les individus. Cette affirmation, nous pouvons l’étayer de plusieurs façons et sous plusieurs angles, mais nous nous en limiterons ici uniquement au cas criard des personnes en situation de handicap qui sont laissées à eux-mêmes. Il n’existe pas de programme d'accès à l'égalité permettant à certaines personnes d'exercer leurs compétences et d'occuper des emplois qu'elles n'auraient pu jamais obtenir autrement.
Pour favoriser l'intégration des personnes en situation de handicap dans tous les domaines de la société, au même titre que tous les citoyens, ça prend des mesures adaptatives auxquelles notre État n’est même pas prêt à songer. Le droit à l’égalité fait partie des valeurs fondamentales des sociétés modernes. Mais au regard de la manière dont fonctionne notre pays, on dirait que l’État n’en a cure, ce n’est pas de ses préoccupations de créer les conditions minimales d’égalité entre ses citoyens.
La véritable égalité exige que des personnes ou des groupes en situation de vulnérabilité soient traités différemment afin de respecter les différences entre individus et de répondre à leurs besoins.
Au Sénégal, avoir un handicap semble être une fatalité en soi, alors que dans d’autres sociétés cela ne constitue pas une quelconque malédiction en soi. Quelles que soient les limites physiques de l’individu, il est capable de jouer dans la société un rôle valorisant. Or chez nous on pense qu’être en situation de handicap est une raison suffisante pour tendre la main. L’État ne fait rien de significatif pour accommoder en éducation les personnes en situation de handicap. Ni leurs déplacements ni leur environnement de travail ne sont pas adoptés en fonction de leurs contraintes. En définitive, nous persistons à croire que notre pays doit s’efforcer d’opérer des ruptures audacieuses pour aller de l’avant. Il est donc temps que le Sénégal mette l’emphase sur une éducation plus inclusive. Les changements nécessaires que doit opérer une société ne tombent jamais du ciel, il est toujours l’œuvre d’hommes et de femmes de bonne volonté qui ont le courage et la conviction de leurs idées. Ce n’est que de cette façon que les changements que nous attendons depuis des décennies pourront se réaliser. Autrement, nous allons continuer de nous leurrer nous-mêmes comme toujours, et comme dit Albert Einstein : « La folie, c’est de faire toujours la même chose et de s’attendre à un résultat différent. »
ii Organisme National pour la Coordination des Activités de Vacances.
iii S'enrôler dans l'armée à 51 ans | Radio-Canada
par Yoro Dia
LE CHOIX DE L’ARRIÈRE-GARDE
Si Sonko suit son gourou Mélenchon, le Sénégal pétrolier sera un futur Venezuela, la référence de Mélenchon et non pas un futur Dubaï comme nous en rêvons. Le complexe d’infériorité a encore de beaux jours devant lui
En matière de politique extérieure, le duo Diomaye-Sonko danse la tango, c’est-à-dire un pas en avant deux pas en arrière. Autant le président Faye a fait un pas en avant en réservant sa première sortie à l’étranger à la Mauritanie, signe d’avant-garde car avec le pétrole et le gaz, le Sénégal peut accélérer sa marche vers l’Emergence. Donc être à l’avant-garde économique après avoir été à l’avant-garde politique (exception démocratique). Autant Sonko, avec sa tournée pompeusement annoncée dans l’alliance des Etats putschistes (Guinée et l’Alliance des Etats du Sahel à savoir le Mali, le Burkina et le Niger), fait deux pas en arrière en réservant sa première sortie aux pays de l’arrière garde démocratique. Même s’ils sont sensiblement de la même génération, il y a un fossé politique entre le Président Faye et ces Présidents de l’alliance des Etats putschistes. Diomaye a été élu démocratiquement alors les autres ne sont que des putschistes qui cherchent à légitimer leur forfaiture par la manipulation idéologique d’un souverainisme désuet et anachronique.
Heureusement qu’au Sénégal, nous avons un Etat solide et des forces de défense et de sécurité qui ont été à la hauteur pour vaincre l’insurrection avant que nos frères égarés n’en reviennent à l’opposition légale pour prendre le pouvoir par les urnes. Si le General Moussa Fall et ses hommes n’avaient pas été à la hauteur pour mater l’insurrection, aujourd’hui le Sénégal aurait perdu son statut d’exception et serait membre de l’alliance des Etats putschistes où nul ne sait quand est-ce qu’auront lieu les élections.
L’avant-garde est souvent une illusion de l’arrière garde. C’est valable pour Ousmane Sonko s’il croit que l’avant-garde ce sont l’alliance des Etats putschistes et son gourou Mélenchon, un dinosaure idéologiquement fossilisé. Dis-moi qui tu fréquentes, je te dirais qui tu es. Si Sonko suit son gourou Mélenchon, le Sénégal pétrolier sera un futur Venezuela, la référence de Mélenchon et non pas un futur Dubaï comme nous en rêvons. Le souverainisme est aujourd’hui dans l’économie comme l’ont compris l’Inde et la Malaisie qui se glorifient d’avoir un PNB qui a dépassé celui de l’ancien colonisateur et la Chine qui est passée du péril jaune à empire du milieu sur le plan économique en cherchant à le devenir sur le plan politique. Le souverainisme est dans l’économie et la croissance et non pas dans le fait de passer de supplétif français à supplétif russe comme l’alliance des Etats du Sahel ou être un supplétif idéologique de Monsieur Mélenchon. Quand Branco n’avait plus aucune crédibilité en France, il était venu se recycler en Afrique (au fait où en est-on avec sa fanfaronnade de poursuite à la CPI ? La presse s’honorerait en s’intéressant à la suite donnée à cette farce). Mélenchon aussi vient se recycler chez Sonko son supplétif idéologique car probablement durant toute sa carrière politique ce sera la première fois qu’il est annoncé à l’étranger comme un chef d’Etat et sera reçu probablement comme tel.
Le complexe d’infériorité a encore de beaux jours devant lui. La rupture ce n’est pas simplement de changer de maître blanc. Les Sénégalais ont opéré la rupture et réglé la question du souverainisme depuis 2000 et comme dans leur habitude de façon démocratique en élisant Wade alors que tout le monde savait que Diouf était le choix de la France. L’élection de Diomaye le confirme. Le débat sur le souverainisme est, soit de la manipulation pour légitimer la forfaiture politique des coups d’Etat, soit du Don Quichotisme politique au Sénégal. Le souverainisme est la bataille économique pour l’émergence, le seul combat qui vaille au Sénégal. Tout le reste est perte de temps et le « temps ne chôme pas ». Nous sommes tous des panafricanistes mais nous préférons le panafricanisme démocratique à celui putschiste de nos voisins qui instrumentalisent le panafricanisme comme arme de diversion politique pour masquer leur forfaiture politique. Ce n’est pas un hasard si les élites et les peuples de l’alliance des états putschistes rêvent du modèle démocratique sénégalais alors que notre Premier Ministre prend leurs dirigeants pour modèles. Quelle négation du Sénégal, de ses valeurs et surtout de son rang. Chez Sonko, l’avant-garde est toujours une illusion de l’arrière-garde !
Dr Yoro Dia est politologue.
par Macky Sall
LE SYSTÈME FINANCIER INTERNATIONAL APPROFONDIT LES INÉGALITÉS
Notre accès au capital est à la fois restreint et scandaleusement onéreux. Nos politiques fiscales et monétaires sont dictées, de fait, par des banques centrales lointaines. Nous n'avons pas voix au chapitre
Dans une tribune publiée le 8 mai 2024 sur le site de Context, une plateforme de la Thomson Reuters Foundation consacrée au changement climatique, aux impacts des technologies sur la société et aux économies inclusives, Macky Sall, l'ancien président devenu Envoyé spécial pour le Pacte de Paris pour les peuples et la planète depuis la fin de son mandat, dénonce le système financier international.
"Lorsque je réfléchis à mes 12 années passées en tant que président du Sénégal, une leçon se détache : à quel point le système financier international est déloyal envers les pays en développement comme le mien. Peu importe la solidité de nos politiques économiques, nous sommes considérés comme un pari risqué. Notre accès au capital est à la fois restreint et scandaleusement onéreux. Nos politiques fiscales et monétaires sont dictées, de fait, par des banques centrales lointaines. Et quand nous essayons de protester, nous découvrons que nous n'avons pas voix au chapitre.
Il a fallu une pandémie, et l'implosion économique qui a suivi, pour que ces failles deviennent visibles pour tous. Cela a conduit les Nations Unies et le Fonds Monétaire International (FMI) à appeler à un nouveau « moment de Bretton Woods » : une réforme en profondeur des institutions financières internationales.
Quatre ans plus tard, avec le Covid sous contrôle et une fragile reprise économique mondiale en cours, l'élan réformiste risque de s'estomper au fur et à mesure que le sentiment d'urgence s'estompe.
Mais pour la plupart d'entre nous dans le monde en développement, ces efforts ont été insuffisants. Les multiples crises auxquelles nous sommes confrontés n'ont pas disparu. Au cours des trois dernières années seulement, il y a eu 18 défauts souverains dans 10 pays en développement - plus que tous les défauts de paiement de la dernière décennie réunis.
Les inégalités mondiales continuent de croître
Selon la Banque mondiale, 60% des pays à faible revenu courent un risque élevé de surendettement ou y sont déjà. Les paiements d'intérêts de ces pays ont quadruplé au cours des 10 dernières années alors que les taux d'intérêt mondiaux ont bondi.
Pour honorer le remboursement de leur dette, les pays à faible revenu réduisent les dépenses dans l'éducation, la santé et autres services publics. Ce faisant, ils sacrifient aussi leur droit à un avenir meilleur.
L'Afrique paie désormais davantage en service de sa dette qu'elle ne consacre à investir dans la résilience climatique, estimée à 50 milliards de dollars par an. Sa dette extérieure a atteint 824 milliards de dollars en 2021, les pays y consacrant 65% de leur PIB pour rembourser ces obligations.
Lors des réunions de printemps de la Banque mondiale et du FMI cette année, le FMI a mis en garde contre la croissance des inégalités mondiales, avec « les pays les plus pauvres qui s'éloignent encore davantage ».
Le besoin de rendre le système financier international plus équitable, plus réactif aux besoins réels du monde en développement, et plus représentatif de la communauté mondiale, est plus urgent que jamais.
L'année dernière à Paris, lors d'un sommet mondial convoqué par le président français Emmanuel Macron, 32 pays dont le Sénégal se sont mis d'accord sur le Pacte de Paris pour les peuples et la planète (P4).
Nos objectifs sont clairs : créer un monde où la pauvreté a été éradiquée et la planète préservée, et où les pays vulnérables sont mieux armés pour faire face aux crises. Pour ce faire, nous visons à mobiliser toutes les sources de financement, ce qui explique pourquoi la réforme du système financier international est au sommet de notre agenda.
Nous savons que de nombreuses institutions partagent nos objectifs et que nous ne souhaitons pas dupliquer leurs efforts. Au contraire, nous plaidons pour une nouvelle approche, que j'appelle le 'multilatéralisme inclusif'.
Nous cherchons à rassembler le plus de pays possible, de tous les continents et niveaux de revenus, en surmontant les divisions - Est contre Ouest, Nord global contre Sud, pays verts contre pollueurs - qui ont nui aux initiatives par le passé.
Réécrire les règles de la finance mondiale
En tant que plateforme, nous pouvons d'ores et déjà pointer certains progrès. Par exemple, notre campagne en faveur d'une plus grande représentation des pays en développement dans la gouvernance des institutions financières internationales commence à porter ses fruits.
En octobre dernier, les membres du FMI ont approuvé l'élargissement de son Conseil d'administration pour inclure un troisième représentant africain sur 25, ce qui contribuera à renforcer la voix du continent dans les affaires économiques et financières.
Mais il nous reste encore un long chemin à parcourir.
Nous encourageons également les gouvernements à exiger des agences de notation des critères objectifs, transparents et mesurables dans l'évaluation du risque souverain.
Des recherches menées par le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) montrent que ces agences attribuent systématiquement des notations de risque plus élevées aux pays pauvres, indépendamment des réalités économiques sur le terrain.
Cela a abouti à une situation où, en moyenne, les pays africains paient quatre fois plus pour emprunter que les États-Unis et huit fois plus que les économies européennes les plus riches. Notre accès au financement du développement et du climat dépend de la fin de cette discrimination financière.
Un autre objectif est d'attirer au moins un euro de financement privé pour chaque euro de financement public dépensé dans le développement, le climat et la nature.
Nous invitons davantage de pays à rejoindre le Pacte de Paris pour réécrire les règles de la finance mondiale, donner aux pays en développement une plus grande influence dans les institutions financières internationales et mobiliser le financement pour une croissance durable.
Ce faisant, nous espérons créer un nouvel ordre financier mondial inclusif et à la hauteur des enjeux du 21ème siècle."
Par Djibril BA
LE FINANCEMENT DE L’AGRICULTURE : UN MAILLON IMPORTANT POUR ATTEINDRE LA SECURITE ALIMENTAIRE
La disponibilité insuffisante ou l’absence des ressources financières, combinées aux échecs de nos politiques de crédit dans le secteur de l’agriculture, impactent négativement les performances du secteur et par ricochet notre économie.
De nos jours, le financement constitue un véritable casse-tête pour les acteurs des chaînes de valeurs agricoles et agroalimentaires. La disponibilité insuffisante ou l’absence des ressources financières, combinées aux échecs de nos politiques de crédit dans le secteur de l’agriculture, impactent négativement les performances du secteur et par ricochet notre économie.
A cela, s’ajoutent la faiblesse de la productivité agricole, l’instabilité de la pluviométrie, le manque de structuration des chaînes de valeurs agricoles et agroalimentaires dans certaines zones agroécologiques, l’absence de modèles de financement intégrés, l’absence de garantie, etc. Malgré l’existence de certains instruments de garantie tels que le Fonsis et le Fongip, et d’autres mécanismes mis en place par l’Etat et le secteur privé sous forme de fonds de garantie, le déficit des crédits bancaires dans le secteur demeure une préoccupation pour les acteurs. Parallèlement, le Covid-19 et ses corollaires ont impacté négativement la qualité du portefeuille des institutions financières qui ont comme cible le monde rural. Les producteurs à la base enregistrent une ardoise d’impayés dans certaines institutions financières de la place et occasionnent une rupture de relation et/ou un déclenchement de processus de recouvrement aux contentieux conformément aux principes qui réglementent l’activité bancaire.
Fort de tous ces constats, pour relancer le secteur de l’agriculture, l’Etat devra impérativement trouver, avec les parties prenantes, des moyens pour renforcer les mécanismes de financement des banques parapubliques et trouver une solution aux impayés comptabilisés par les producteurs grâce à l’impact du Covid-19 et de la baisse de la productivité agricole. A cela, s’ajoute aussi son obligation de régler, sans délais, les montants dus aux opérateurs privés stockeurs afin de préparer la prochaine campagne d’hivernage.
Sous ce rapport et dans une perspective d’amélioration de l’efficacité des filières agricole et agroalimentaire, il devient nécessaire et urgent de revoir le système de la politique de financement dans notre pays. Ledit système devra être corrélé avec les objectifs de production agricole et agroalimentaire, tout en intégrant la contribution du secteur privé.
Si nous nous référons aux premières sorties du ministre de l’Agriculture, de la souveraineté alimentaire et de l’élevage, force est de constater que les autorités se sont à nouveau engagées à faire du développement de l’agriculture et de l’agro-industrie une priorité. La finalité de cet objectif est d’atteindre l’autosuffisance alimentaire et de mettre fin à la dépendance du pays aux importations, notamment en riz, et à certains produits horticoles pendant une certaine période de l’année. Parallèlement, certaines industries comme la Sonacos, les agroindustriels dans les chaînes de valeurs riz et arachide en particulier, la Sodefitex, etc., ne parviennent plus à atteindre leurs besoins en collecte et de relèvement du niveau de leur plateau technique. Toutes ces faiblesses expliquent l’absence de performances dans le secteur agricole et par ricochet des difficultés pour assurer un retour sur investissement par les entrepreneurs agricoles
Pour atteindre la souveraineté alimentaire et contribuer à résoudre la problématique de l’emploi des jeunes à travers le secteur primaire, l’Etat du Sénégal, à défaut de procéder à des réformes qui les regrouperont en un seul instrument fort et performant, doit impérativement promouvoir la mise en valeur du potentiel agricole en appuyant les institutions financières comme La Banque agricole (Lba), la Banque nationale de développement économique (Bnde), la Der-Fj et les autres instruments de financement. Cet accompagnement devra aboutir à la mise en place d’offres spécifiques de crédits à l’investissement pour accompagner le développement d’une agriculture plus performante sur les plans agronomique, économique, écologique, commercial, et plus résiliente face aux aléas, notamment climatiques. En sus, pour minimiser les risques intrinsèques à l’activité agricole, la Compagnie nationale d’assurance agricole doit être accompagnée afin de rendre notre agriculture résiliente et d’inciter les institutions de financement à injecter leurs ressources dans le secteur. Le développement de partenariats public-privé, à travers des fonds de garantie, des lignes de crédit à des taux concessionnels, une organisation des acteurs à la base seraient aussi une excellente opportunité pour minimiser les risques.
Si nous faisons un diagnostic du financement de l’agriculture, nous comprendrons que les crédits de court terme au profit des acteurs des chaînes de valeur ont montré leurs limites et ne sont pas performants face aux nombreux aléas auxquels le secteur fait face. En d’autres termes, toute organisation de producteurs et d’entrepreneurs agricoles qui rate une campagne agricole a moins de chances pour cheminer avec les institutions financières. Certes des mécanismes existent, mais ils ne sont pas performants, sans impact et non pérennes.
A date, quel est le niveau d’endettement des producteurs et des autres acteurs du secteur agricole ? Quel est leur niveau d’impayés dans les portefeuilles des institutions financières locales ? Quelle stratégie pour une reprise de relation entre certains agri-entrepreneurs et les institutions financières de la place ? Quel mécanisme innovant pour toucher tous les acteurs des chaînes de valeur ? En amont du financement, pour assurer un retour sur investissement, quelle stratégie pour rentabiliser la production agricole ? Voilà tant d’interrogations qui méritent une réponse si nous envisageons de développer les chaînes de valeurs agricoles et agroalimentaires à travers l’échiquier national.
Quelques alternatives pour un financement durable du monde rural
Pour pallier toutes ces contraintes relatives à l’accès au financement, plusieurs leviers doivent être actionnés : amélioration de la productivité et de la production agricole, structuration des chaînes de valeur, démocratisation du financement avec des taux concessionnels, financement des jeunes entrepreneurs agricoles, gestion des risques de crédits.
Financement des jeunes entrepreneurs agricoles
Pour améliorer la qualité des ressources humaines porteuses de projet de développement dans le secteur primaire et régler partiellement la problématique de l’emploi des jeunes, les sortants des écoles de formation comme l’Ecole nationale supérieure d’agriculture de Thiès (Ensa), l’Ufr S2ata de Saint-Louis, du Master en développement rural et coopération de l’Ugb, l’Ufr agro de Ziguinchor, les Isep, entre autres, doivent être incubés pendant quelques mois, juste avant ou après leur formation. Des passerelles et canaux de communication doivent être établis entre ces instituts de formation agricole, le secteur privé et les institutions financières pour préparer les diplômés à l’activité entrepreneuriale. Bien entendu, ils devront au préalable être sensibilisés et motivés pour avoir le goût du métier. Plusieurs métiers, depuis la fourniture des intrants jusqu’aux activités post-récoltes, peuvent être créés pour permettre à la jeunesse de régler la problématique de l’employabilité et de l’emploi.
Des mécanismes devraient aussi être mis en place pour assurer leur insertion dans la vie professionnelle, à travers l’entreprenariat agricole et la mise à disposition de produits et services financiers à leur profit. Les Technologies de l’information et de la communication (Tic) constituent aussi une excellente niche à explorer. Cette niche permet de maîtriser l’information agricole et joue un rôle important dans la mise en place de systèmes de marché, de cartographie des parcelles de production, etc. Si tous les préalables sont établis, les institutions financières mettront à leur disposition des produits et services taillés sur mesure
Le Système de financement décentralisé (Sfd) doit s’impliquer plus activement dans l’accompagnement des petits entrepreneurs agricoles. Cela peut être soutenu par la mise en place de ressources affectées par des structures comme la Fonamif, entre autres. Les banques, quant à elles, devront déployer des ressources pour accompagner les Pme et Pmi, afin de tirer les petits exploitants à travers des schémas intégrant les producteurs, les agrégateurs, les agro-industriels, etc
Enfin, La Banque agricole, instrument incontournable dans le financement de l’agriculture, doit être fortement renforcée et appuyée pour porter dans ses livres toutes les lignes de crédits et les fonds venant des partenaires financiers et du secteur privé, et destinés au secteur agricole.
Si nous voulons intensifier notre agriculture incontestablement, des mécanismes de financement innovants doivent être mis en place pour permettre aux associations de coopératives d’acquérir de gros investissements comme les tracteurs, les moissonneuses-batteuses, des infrastructures de stockage et de conditionnement, la réhabilitation et l’extension des périmètres irrigués dans certaines zones agro-écologiques du pays.
Enfin, pour accéder aux petits matériels agricoles et faire de gros investissements, les institutions financières doivent être appuyées afin de booster leurs portefeuilles de crédit-bail et de micro-leasing à travers des modèles de financements intégrés.
Par Kaccoor Bi - Le Temoin
FUTILITÉS
Pour crétiniser une jeunesse, le moyen le plus rapide, c’est de lui proposer des jeux, toujours des jeux !
On nous présente souvent comme des gens beaux et intelligents. En tout cas, dans un pays comme le Gabon, nous sommes une denrée très recherchée. Vous en doutez ? Renseignez –vous autour de vous ou discutez avec de bons compatriotes qui ont pris leurs aises dans ce doux pays où les donzelles n’ont pas peur de dire leurs fantasmes. Vous voulez quoi?
Saturé de politique politicienne, il faut bien que je braque les yeux ailleurs. Surtout dans ce pays où de bienheureux se promènent sur des hectares de terre. Mais voilà, on a beau être exhibés comme des gens brillants, il arrive que l’on se demande si les autres ne nous trompent pas pour mieux nous b…
J’ai entendu dire que de plus en plus, des jeunes sont devenus accrocs aux jeux du hasard. Ils sont dans les casinos ou tentent leur chance dans différents jeux dont le fameux site de paris sportifs 1Xbet. Des élèves y misent ainsi leur frais de scolarité pendant que des pères de famille parient leurs salaires. Au niveau des casinos, d’anciennes célébrités appauvries y cherchent fortune. Il y a quelques années, la Lonase (Loterie nationale sénégalaise) nous bombardait d’un spot publicitaire. Il s’agissait d’un vieux vendeur de charbon de bois qui s’offre le jackpot avec 50millions de francs Cfa. Plus tard, on le retrouve en costard, cigare à la bouche et entouré de belles filles qui boufferont certainement son fric avant qu’il ne retourne à son charbon de bois.
Dans l’autre spot, c’est toujours le même vieil homme qui cherche à s’enrichir, il touche le jackpot et on l’aperçoit encore à une soirée traditionnelle avec une orgie de musique et entouré de belles dames et de griots qui chantent ses louanges pour lui soutirer du fric comme dans le premier spot. Depuis lors, rien n’a changé…
Tout cela représentait la belle illustration de nos « sénégalaiseries » ou de nos comportements d’une autre époque ! On gagne de l’argent non pas pour l’investir dans des projets porteurs et générateurs de revenus, mais pour faire la fête et sauter de belles femmes !
Des images insipides que l’on offre ainsi à une jeunesse qui ne croit plus aux études, mais qui passe son temps à parier avec l’espoir de devenir millionnaire et sortir de la pauvreté qui continue de gagner du terrain.
Et tout se joue à travers nos télévisions locales qui sont devenues de vraies poubelles, des déchets de notre société. Des futilités fortement sponsorisées par des sociétés qui se détournent des émissions éducatives ou qui font appel à l’intellect pour des fadaises. Tout est jeu ! Une jeunesse passe son temps à parier. Ce qui constitue une vraie arnaque pour des jeunes qui ne savent pas qu’on se joue d’eux pour enrichir d’autres.
Au lieu d’offrir à une jeunesse d’autres rêves, tout est devenu jeu, toujours des jeux et encore des jeux où l’on gagne du fric, des portables et d’autres appareils qui nous enfoncent encore dans l’ignorance. Rien que de l’accessoire !
Pour crétiniser une jeunesse, le moyen le plus rapide, c’est de lui proposer des jeux, toujours des jeux !
Par Alain Claude MONTEIRO
ANALYSE ET REFLEXION SUR L’EVOLUTION DE STATUT DE L’ANCIEN FONCTIONNAIRE AU STATUT DE RETRAITE
Travail et Retraite sont les substrats majeurs du système d’employabilité. Le second est la suite logique du premier ! Au Sénégal, l’âge légal de départ à la retraite est établi à 60 ans depuis 2005
La Journée Internationale du Travail, fête des masses laborieuses a été célébrée le mercredi 1er mai 2024, ensemble, la main dans la main, Etat, employés et employeurs se sont engagés à relever le défi de la sauvegarde de l'outil de travail et la préservation des acquis sociaux, dont la Retraite des anciens travailleurs. Travail et Retraite sont les substrats majeurs du système d’employabilité. Le second est la suite logique du premier ! Au Sénégal, l’âge légal de départ à la retraite est établi à 60 ans depuis 2005. Paradoxe, les syndicats demandent régulièrement un rallongement de cet âge ce que les autorités refusent, arguant qu’il faut laisser la place aux nouvelles générations.
HISTORIQUE DU FONDS NATIONAL DE RETRAITES
Les origines du Fonds National de Retraite remontent à 1907 avec la création de l’Inspection des Sous Ordonnancements du Sénégal par l’arrêté du 27 novembre 1907, modifié en janvier 1957 et juin 1958. L’inspection des sous-ordonnancements était chargée, entre autres, de : la constitution des dossiers de pension des fonctionnaires ; la régularisation de la situation financière du personnel au regard des pensions ; la validation des services auxiliaires et contractuels ; l’établissement des décisions attribuant des rentes viagères aux contractuels et aux auxiliaires ; enfin, de l’attribution des secours après décès appelés « capital décès »
C’est dans ces conditions que l’existence d’une caisse autonome ne se justifiait plus et c’est pourquoi la loi de finances de la France de 1961, en son article 72, a prononcé la dissolution de la CRFOM à compter du 1er janvier 1961. C’est ainsi qu’au Sénégal, est créé, dès l’accession à la souveraineté internationale, un compte hors budget intitulé « Fonds National des Retraites » par loi n°61-04 du 14 janvier 1961 avec une dotation initiale de 160 millions FCFA pour la prise en charge des pensions de retraite.
Les recettes du FNR comprenaient, outre, les retenues opérées sur les traitements et l’abondement versé par l’État, les Communes ou les établissements publics employeurs et une subvention d’équilibre inscrite au budget de l’État. La loi de finance n°62- 49 du 20 juin 1962 transformera le FNR en compte spécial du Trésor et le décret n°66-518 du 30 juin 1966 en fixera les règles de fonctionnement. Il faut noter que le régime juridique des pensions au Sénégal a été organisé d’abord par la loi n°61-36 du 15 juin 1961 relative au régime des pensions civiles avant d’être remplacée par la loi n°64-24 du 27 janvier 1964, premier texte de portée générale organisant la retraite de tous ceux qui, civils ou militaires, pouvaient prétendre à une pension en rémunération des services qu’ils ont rendus à l’État. Mais force a été de constater quelques années après sa publication, que certaines dispositions devaient être modifiées, les unes pour être complétées, les autres pour être abrogées et remplacées. C’est ainsi que plusieurs lois modificatives ont été adoptées entre 1966, 1981 et 2002. La dernière loi 2002- 08 du 22 février 2002 devait, entre autres modifications, prolonger la retraite à soixante ans.
La création du FNR a, bien entendu, était accompagnée par la mise en place d’une première structure de gestion administrative et financière par décret n°61-090 du 07 mars 1961 dénommée sous-Direction des Pensions et qui avait pour principale mission la gestion des pensions dont bénéficiaient les fonctionnaires relevant des régimes de retraites ainsi que la gestion des rentes et allocations viagères aux agents non fonctionnaires. Ces deux structures étaient rattachées au Ministère de la Fonction Publique et du Travail. Par décret n°66-1072 du 29 décembre 1966, le Service des Pensions prend le nom de Service National des Pensions. Celui-ci deviendra par décret n°67-827 du 07 juillet 1967 la Direction de la Dette Viagère (DDV). Ces deux dernières structures, contrairement aux deux premières, étaient rattachées au Ministère des Finances La DDV a été chargée d’effectuer tous les actes nécessaires à la liquidation et à la concession des pensions et des rentes d’invalidité dans les conditions prévues par le régime général des pensions civiles et militaires de retraites.
C’est en 1990 qu’interviendra la fusion de la Direction des Pensions et Rentes Viagères avec la Direction Centrale de la Solde qui aboutit à une seule Direction Centrale de la Solde, des Pensions et des Rentes Viagères créé par décret n°90-333 du 27 mars 1990. Cette nouvelle Direction avait en charge, à la fois, la gestion des salaires et allocations des fonctionnaires civiles et militaires et celle des pensions. Cette Direction Centrale deviendra, trois ans plus tard, par décret n°93- 723 du 07 juin 1993, la Direction de la Solde, des Pensions et des Rentes Viagères (DSPRV). Enfin, la DSPRV sera scindée en deux directions distinctes par le décret n°2017-480 du 03 avril 2017 modifiant le décret n°2014-1171 du 16 septembre 2014 portant organisation du Ministère de l’Économie, des Finances et du Plan.
QUELLES STRATEGIES POUR AMELIORER LE NIVEAU DES PENSIONS DE RETRAITE DES FONCTIONNAIRES CIVILS ET MILITAIRES ?
La Conférence sociale de 2017, dont le thème portait sur « La réforme des retraites au Sénégal : vers des régimes viables et inclusifs », a été un grand moment de diagnostic du système de retraite. Dans ses conclusions, elle a formulé des recommandations fortes ayant pour finalités l’extension de la couverture sociale, la restauration de la viabilité financière, la revalorisation des pensions de retraite et de réversion mais aussi la modernisation de la gestion administrative et financière afin de développer la qualité de l’offre de service. «dans la perspective de l’adaptation de notre système de retraite aux standards internationaux, (….) de veiller à l’équilibre financier à long terme des régimes de retraite, à assurer la viabilité et l’autonomisation institutionnelle du Fonds National de Retraites (FNR), ainsi que le relèvement continu et significatif du niveau des pensions, afin d’améliorer durablement la qualité de vie des retraités, en intégrant, notamment, outre le système courant de répartition, le recours innovant et indispensable à la retraite complémentaire ».
Forte de cette directive, la Direction Générale du Budget du Ministère des Finances et du Budget, à travers la Direction des Pensions, a ouvert un vaste chantier de réformes du FNR ayant pour colonne vertébrale l’amélioration continue du niveau des pensions, axe soutenu principalement par la multiplication des piliers et, secondairement, par l’instauration d’un mode pérenne de revalorisation des pensions ainsi que le relèvement de la pension minimale. Cela a permis de mettre en place le régime complémentaire et de modéliser le régime d’épargne-retraite volontaire.
Dans la même dynamique, les travaux en cours s’orientent vers la conception d’un mode de revalorisation annuelle des pensions et l’ajustement de la pension minimale au contexte socio-économique actuel La cotisation mensuelle varie de 2.910 à 54.880 FCFA pour toutes les catégories de fonctionnaires. Cette contribution relativement modeste pour le plus grand nombre résulte de l’étroitesse de l’assiette soumise à cotisation qui ne prend pas en compte les indemnités. Régime se justifiait amplement si l’on tient compte du niveau de contribution du régime de base, de la volonté du Gouvernement de préserver le pouvoir d’achat des actifs, du désir d’en faire un régime attractif.
En application de l’alinéa 2 de l’article 3 de la loi n°2018-12 du 30 mars 2018 qui dispose que « Le coût d’acquisition et les modalités de calcul du nombre de points, la valeur du point de retraite et des points forfaitaires sont fixés par arrêté du Ministre chargé des Finances », l’arrêté n°024334/MFB/ DGB/DP du 07 octobre 2020 fixant les paramètres du régime complémentaire a été pris par le Ministre des Finances et du Budget. Cela a permis d’entamer la liquidation de la pension complémentaire à partir du 1 er janvier 2021 correspondant à un revenu mensuel allant de 8.440 à 25.768 FCFA pour la première cohorte des bénéficiaires ayant cotisé moins de trois années. Mais, l’impact du nouveau régime de retraite complémentaire sur le pouvoir d’achat des nouveaux retraités apparaîtra réellement à partir de 15 ans de mise en œuvre avec alors un accroissement significatif du niveau de l’allocation. Les projections confirment la montée en puissance du régime complémentaire qui constitue également une opportunité inédite pour transformer le FNR en investisseur institutionnel, doté de la personnalité juridique et de constitution des cotisants, les excédents accumulés devant supporter les charges futures.
MODELISATION DU REGIME D’EPARGNE-RETRAITE VOLONTAIRE
Enjeu du troisième pilier : les simulations effectuées lors des travaux préparatoires au relèvement du niveau des pensions du personnel titulaire des universités ont corroboré la pertinence de l’idée de création d’un troisième pilier supplémentaire retenue par la Conférence sociale d’avril 2017 : l’épargne-retraite volontaire par capitalisation. Il est, en effet, ressorti des calculs que l’élargissement de l’assiette soumise à cotisation à l’Indemnité spéciale Recherche-Formation combinée à la suppression de l’écrêtement et à la création d’un régime complémentaire obligatoire relevaient le taux de remplacement à 45%, et, au meilleur des cas pour certains, à 60%. A cela, s’ajoute la situation, déjà évoquée, de prédominance du régime indemnitaire dans le système de rémunération des agents publics qui fait qu’une part importante du revenu échappe à l’assiette soumise à cotisation, minorant la pension et engendrant souvent le basculement des retraités dans la précarité.
Pour l’épargne retraite, les projections donnent, selon la hiérarchie, le capital de sortie suivant :
- Les magistrats : 33 012 552 FCFA pour 19 ans de cotisation ;
- Les enseignants du supérieur : 37 860 000 FCFA pour 19 ans de cotisation ;
- Hiérarchie A : 9 800 000 FCFA pour 15 ans de cotisation ;
- Hiérarchie B : 6 151 000 FCFA pour 16 ans de cotisation ;
- Hiérarchie C : 5 970 000 FCFA pour 19 ans de cotisation.
Globalement, le retraité, poly pensionné, bénéficiera de deux pensions réversibles en cas de décès et d’un capital de sortie : la première est celle du régime de base, la seconde celle de la retraite complémentaire et le capital de sortie.
LA REVALORISATION ANNUELLE DES PENSIONS
Le mode de revalorisation des pensions s’inscrit dans le cadre plus large de la problématique du pouvoir économique des retraités qui soulève plusieurs questions. La première question est celle du pouvoir économique à concéder aux pensionnés par rapport au niveau de vie des actifs et à la croissance du revenu national. Autrement dit, les retraités doivent-ils être pris en compte dans le progrès pour favoriser la parité économique entre actifs et retraités.
VERS UNE REFORME DOSSIER RETRAITE INSTITUTIONNELLE DU FONDS NATIONAL DE RETRAITES : POUR UNE MEILLEURE GOUVERNANCE DU SYSTEME DE RETRAITE
Contexte La réforme institutionnelle du FNR est une des recommandations phares de la deuxième conférence sociale organisée en avril 2017 dont le thème portait sur « la réforme des Retraites au Sénégal : vers des régimes viables et inclusifs ». Cette recommandation formulée dans un contexte marqué par la gestion axée sur les résultats, laquelle est devenue le cadre normatif d’élaboration, d’exécution et d’évaluation des politiques publiques, a recommandé d’assurer «la viabilité et l’autonomisation institutionnelle du Fonds National de Retraites ainsi que le relèvement continu et significatif du niveau des pensions ». Au demeurant, le diagnostic institutionnel du Fonds, créé en 1962, a mis en évidence que le statut de compte spécial du trésor ne répond plus à l’exigence de performance attendue d’un régime de retraite, en termes de gouvernance inclusive et cohérente, de financement viable et soutenable, d’extension de la couverture du risque vieillesse, ni à l’obligation de respecter les normes de gestion prudentielles généralement admises par les organismes internationaux de supervision des institutions de prévoyance sociale.
En Conclusion, une réforme en profondeur des systèmes de retraites au Sénégal est devenue une exigence sociale, « une condition sine qua non » un besoin inéluctable, un point de non-retour. Dans la perspective de rencontres d’information et de sensibilisation des tenants actuels du Pouvoir, je voudrais suggérer : Le renforcement du Pouvoir d’achat des pensionnés FNR face à la Cherté de la Vie en allouant une indemnité compensatoire ; l’amélioration à court terme de la situation précaire des pensionnés FNR par la revalorisation des pensions. la Constitution de la République du Sénégal dispose que « l’Etat et les collectivités publiques ont le devoir de veiller à la santé physique et morale de la famille et, en particulier des personnes handicapées et des personnes âgées. » L’Etat du Sénégal a consenti de gros efforts en direction des populations, dont la tranche 3e âge est une grande bénéficiaire. Il s’agit entre autre du Programme National de Bourses de Sécurité Familiale ou la Couverture Maladie Universelle dont le Plan Sésame pour les personnes de plus de 60 ans. Malgré tout, les conditions de vie des personnes âgées sont extrêmement difficiles face au renchérissement du coût de la vie et une inflation généralisée de tous les produits de consommation.
SÉMITES, ANTISÉMITES : DE QUOI PARLE-T-ON ?
C’est l’historien allemand August Ludwig von Schlözer qui crée le terme sémitique à la fin du XVIIIe siècle, pour catégoriser une famille linguistique de l’Asie occidentale qui comprend, entre autres, l’hébreu et l’arabe.
The Conversation |
Par Laura Calabrese |
Publication 08/05/2024
Depuis le 7 octobre, comme lors de chaque résurgence du conflit israélo-palestinien, les discours et les actes hostiles aux Juifs se multiplient dans le monde entier, avec une augmentation de 1000 % en France (chiffres de janvier 2024).
Très souvent, les accusations d’antisémitisme sont suivies d’arguments destinés à les discréditer ou les minimiser. Certains de ces arguments sont aussi observables pour d’autres formes de racisme, par exemple l’accusation de victimisation ou d’obstruction du débat public, souvent utilisée à l’extrême droite de l’échiquier politique.
Mais un argument se démarque comme étant propre à la dénonciation d’antisémitisme, celui qui affirme que les Juifs ne sont pas les seuls Sémites, ce qui rendrait l’accusation illégitime.
Ce commentaire Facebook a été publié sous un post annonçant la conférence de deux chercheurs travaillant sur l’antisémitisme, qui a déclenché des accusations de victimisation et d’instrumentalisation.
L’énoncé doit se comprendre dans le contexte de la guerre Israël-Hamas, où il sert à étouffer la dénonciation de l’antisémitisme en sous-entendant qu’elle n’a pas sa place dans le contexte actuel. La logique, sans fondement historique, de l’argument mérite d’être examinée, et pour cela il faut revenir à l’origine du sémitisme et des notions qui le sous-tendent.
Aux origines du sémitisme
C’est l’historien allemand August Ludwig von Schlözer qui crée le terme sémitique à la fin du XVIIIe siècle, pour catégoriser une famille linguistique de l’Asie occidentale qui comprend, entre autres, l’hébreu et l’arabe.
S’appuyant sur la mythologie biblique de l’origine humaine, il identifie différents peuples de la région (Syriens, Babyloniens, Hébreux, Arabes, Phéniciens) comme étant un seul. En effet, la Genèse raconte que les descendants de Noé sont les seuls survivants après le Déluge. Les trois fils de Noé, Shem (qui devient Sem dans la traduction grecque et latine), Ham et Japhet, sont de ce fait les ancêtres de tous les peuples connus à l’époque : Ham donne naissance aux peuples d’Afrique, Shem aux Hébreux et peuples apparentés et Japhet aux Grecs, Persans et autres nations identifiées comme appartenant aux Aryens et locuteurs de langues indo-européennes.
Comme beaucoup d’autres récits bibliques, cette carte des peuples anciens s’installe comme une évidence dans l’imaginaire occidental. La parenté avérée entre les langues et le fait de considérer le récit biblique comme historique conduit donc à lier famille linguistique et famille ethnographique, un pas fondamental dans « la fabrique des Sémites », comme l’appelle l’historien italien Domenico Paone.
Si ce lien est vite fait, c’est parce que la philologie (la science des textes anciens et de leurs langues) du XVIIIe siècle voit comme une évidence la correspondance entre langue et culture. En effet, elle considère que tout groupe linguistique partage une série de caractéristiques communes plus ou moins intemporelles, qui peuvent aller de pratiques culturelles à des qualités morales, et qu’en conséquence les locuteurs d’une langue ou d’une famille linguistique constituent un peuple.
Plus tard, le sémitisme des philologues et des historiens va s’incorporer parfaitement à la vision racialiste des humains qui se développe au XIXe siècle.
Qui est un antisémite ?
S’il est vrai que chez les philologues et historiens la catégorie de Sémite réunit les Juifs et les Arabes, la fièvre antijuive de la fin de siècle va utiliser le terme presque exclusivement pour les premiers.
Dans les dernières décennies du siècle, dire que les Juifs européens étaient des Sémites revenait à les désigner comme étrangers, ennemis intérieurs des sociétés aryennes (sous-entendu chrétiennes).
Comme l’écrit le journaliste et écrivain d’extrême droite Édouard Drumont dans Le Testament d’un antisémite, le Sémite est celui qui « envahit l’Aryen indigène », il est « retors, peu scrupuleux […], expéditeur du personnel pour les harems et lupanars d’Orient dans les villes. »
Pour sa part, l’orientalisme axé sur l’Arabe et le musulman est bel et bien vivant, mais suit une autre voie, celle de l’exotisme et du regard colonial. Quoi qu’il en soit, depuis le début le Sémite prend les traits de l’altérité, de l’éloignement dans l’espace (l’Orient) et dans le temps (car arrêté au passé).
Preuve qu’en fin de siècle le concept de Sémite se focalise notamment sur les Juifs est la naissance du terme antisémitisme, popularisé par le journaliste viennois d’extrême gauche Wilhelm Marr, auteur de La Victoire du judaïsme sur le germanisme (où il exprime son plan pour envoyer les Juifs du monde entier en Palestine) et fondateur d’une « Ligue antisémite » en 1879.
La catégorie de Sémite lui permet de cristalliser des préjugés bien ancrés, qui vont de l’antijudaïsme chrétien classique à la racialisation moderne, en adoptant le ton scientifique de la philologie. Même si depuis son apparition le terme fait l’objet de débats au sein des groupes antijuifs, il réussit à s’imposer car il est suffisamment évocateur et à la fois sémantiquement vague.
Depuis lors, l’antisémitisme est consensuellement considéré comme une hostilité envers les personnes ou les institutions juives en tant que juives ou perçues comme telles. Cependant, le fait que ce type particulier de racisme soit nommé par le biais d’une dénomination qui est en soi un malentendu le rend vulnérable à toutes les manipulations.
Être ou ne pas être (anti) sémite
Pour nos yeux contemporains, la fragilité du concept de Sémite est évidente. Du point de vue philologique, il ne correspond pas aux réalités démographiques, car les Juifs ont cessé d’être un groupe linguistique depuis l’Antiquité. Du point de vue racial, il n’a plus lieu d’être depuis que l’Occident a cessé de croire en l’existence des « races ». Pourquoi le concept continue donc de circuler ?
Dans son usage actuel, il participe notamment de deux arguments. Le premier, déjà mentionné, sert à esquiver la dénonciation d’antisémitisme, à en détourner le sens ou à ne pas reconnaitre sa spécificité parmi d’autres types de racisme (un leitmotiv de certains groupes antiracistes), comme dans l’exemple suivant :
L’étymologie, souvent avancée comme argument dans les discussions, comme si elle donnait à la démonstration un vernis scientifique, suffit à nier un phénomène attesté. Un peu comme si on avançait que le racisme n’existe pas puisqu’il a été prouvé que l’humanité n’est pas divisée en races. L’argument ne résiste pas à la preuve du réel, car le terme antisémitisme n’est jamais employé par les associations antiracistes dénonçant le racisme contre les Arabes ou les musulmans.
Le deuxième argument qui mobilise la notion de Sémite se déploie dans le cadre du conflit israélo-palestinien : tous les Juifs ne sont pas des Sémites, mais uniquement ceux d’origine moyen-orientale. Le tweet suivant illustre les représentations qui sous-tendent ce discours : le Juif blanc, portant des habits européens, fait la morale à l’habitant légitime du Moyen-Orient.
L’artifice stylistique consiste en un calembour qui ignore le sens consacré du mot antisémitisme en tant que haine antijuive et se focalise sur le sens littéral et ancien du mot (les Sémites comme famille linguistique qui inclut l’hébreu et l’arabe).
Ce même argument avait été utilisé par Mahmoud Abbas en septembre 2023, dans un discours où il affirmait que les Juifs ashkénazes (d’origine européenne) n’étant pas des « Sémites », ils n’avaient pas de légitimité au Moyen-Orient. Ce qui est sous-entendu ici est que seul a droit à la terre le vrai Sémite, habitant originel et authentique de la région.
Comme on le voit, le concept fonctionne dans deux enchaînements argumentatifs qui se contredisent, ce qui paradoxalement n’affaiblit pas sa circulation :
les Juifs ne sont pas les seuls Sémites, donc l’antisémitisme ne peut pas les viser particulièrement ;
les Israéliens ne sont pas de vrais Sémites, donc ils n’ont pas de légitimité territoriale.
Alors que dans le premier argument tous les Juifs sont des Sémites (parmi d’autres), dans le deuxième ceux qui parlent une langue sémitique (l’hébreu) sont exclus du « peuple sémite ».
Ce concept, tout droit sorti de l’imaginaire racialiste européen des XVIIIe et XIXe siècles, nous rappelle combien nos représentations actuelles sont dépendantes de l’agenda des idéologues du passé. Loin d’être une notion descriptive qui prend appui sur la science, le mot Sémite a, au contraire, nourri un programme idéologique qui jette plus d’ombre que de lumière sur les événements du présent.