SenePlus | La Une | l'actualité, sport, politique et plus au Sénégal
27 avril 2025
Opinions
lettre d'amérique, par rama yade
LE NUCLÉAIRE, UNE CHANCE POUR L’AFRIQUE ?
Jusqu’à récemment, l’énergie nucléaire n’était utilisée que par les pays les plus riches. Hormis l’Afrique du Sud et sa centrale nucléaire, Koeberg Nuclear Power Station, la majeure partie du continent africain ne dispose pas d’une centrale nucléaire ...
Jusqu’à récemment, l’énergie nucléaire n’était utilisée que par les pays les plus riches. Hormis l’Afrique du Sud et sa centrale nucléaire, Koeberg Nuclear Power Station, construite avec l’aide des français d’Alstom et Framatome, aux abords de Cape Town dans les années 70, la majeure partie du continent africain ne dispose pas d’une centrale nucléaire et s’est contentée de l’utilisation des énergies fossiles dont les ressources sont généralement limitées et polluantes, sans parler de la volatilité des prix.
Résorber la fracture énergétique
Avec l’explosion démographique - deux milliards d’habitants d’ici 2050 -, le continent est confronté à des besoins croissants en énergie (propre). En Afrique subsaharienne, 57% de la population (600 millions) n’ont pas accès à l’électricité, alors que le continent abrite 20% des réserves mondiales d’uranium. Mais, le nucléaire civil représente moins de 2% de la production d’énergie du continent. Or, sans une électricité abordable, il n’y aura pas de développement industriel en Afrique. Selon l’Agence internationale de l’énergie atomique (Aiea), un tiers des pays émergents du monde pour l’énergie atomique sont africains.
Une trentaine de pays africains, comme le Ghana, le Kenya, l’Ouganda, la Zambie ou le Nigeria, ont levé le «tabou» et exprimé leur volonté de développer l’énergie nucléaire pour se fournir de l’électricité. Derniers en date : le Burkina Faso a annoncé en 2024 sa volonté de disposer d’une centrale sur son territoire d’ici 2030, avec pour ambition de doubler sa production d’électricité. Le Kenya est entré dans l’année 2025 en projetant le lancement de la construction d’une centrale en 2027, avec l’espoir de produire de l’électricité dès 2030.
Un ticket d’entrée élevé
Or, le passage à l’énergie nucléaire requiert du temps (environ une quinzaine d’années) et des conditions drastiques. Pour l’heure, les coûts de production sont élevés, la construction d’une centrale nucléaire requérant plusieurs centaines de millions de dollars. L’absence d’autorités réglementaires nationales est également un défi. Enfin, il est important de garantir les normes les plus élevées en matière de sûreté et de sécurité, rendant l’adhésion des populations indispensable à tout projet de centrale nucléaire. Tchernobyl en Ukraine (1986), Fukushima au Japon (2011), pour ne citer que les cas les plus connus, montrent qu’un accident sur les centrales de production d’électricité nucléaire est vite arrivé, avec des conséquences sur plusieurs générations, sans parler des incidents sur les industries de production de plutonium, dans le domaine de la recherche ou même en médecine.
La révolution des Smr
Mais des opportunités nouvelles se font jour avec l’apparition de petits réacteurs modulaires (Small Modular Reactors- Smr), plus sûrs et plus abordables. Selon les experts, ils ont une capacité de production électrique de 300 mégawatts, ce qui correspond à la moitié des capacités d’une centrale classique. Mais tout le monde n’est pas unanime concernant les Smr dont les coûts et la lenteur sont encore pointés du doigt.
Ainsi, dans un rapport de mai 2024, Institute for Energy Economics and Financial Analysis recommandait de surveiller les augmentations inopinées de coûts observées dans la construction de certains réacteurs dont les délais peuvent dépasser les prévisions, mais également d’informer le public de manière transparente. L’organisation prévenait également que l’enthousiasme pour les Smr ne devait pas conduire les gouvernements à renoncer aux investissements dans l’éolien et le solaire dont la contribution dans la transition énergétique demeure essentielle et plus disponible à court terme.
Une compétition impitoyable
Comme dans bien d’autres domaines, le nucléaire civil n’échappe pas aux rivalités de puissances. Dr Scott Firsing pour Firoz Lalji Institute for Africa rappelait récemment qu’à l’échelle mondiale, on trouve 440 réacteurs nucléaires dans la production électrique établis dans 32 pays, l’Amérique dominant avec 94 réacteurs, suivie de la Chine (58), de la France (57) et de la Russie (36). Ces pays gèrent non seulement leurs propres besoins énergétiques, mais jouent également un rôle central dans l’exportation de la technologie nucléaire vers l’Afrique. Ainsi, un des principaux producteurs d’uranium, la Namibie, recherche les investissements chinois, tandis que le Zimbabwe se rapproche des capacités russes. Mais c’est sans doute la Russie qui est le plus en pointe en Afrique.
Selon Bulletin of the atomic scientists, la société russe Rosatom détient environ 70% du marché mondial de la construction de nouvelles centrales nucléaires. Pour 30 milliards de dollars, elle construit actuellement la centrale nucléaire égyptienne d’El Dabaa, située sur la Mer méditerranée, qui sera la deuxième installation nucléaire opérationnelle d’Afrique en 2028.
Le Ghana, lui, autre force nucléaire montante en Afrique, parie sur les Etats-Unis dans son ambition de devenir un centre d’excellence régional.
En partenariat avec le ministère de l’Energie du Ghana et l’Institut ghanéen de l’énergie nucléaire de la Commission de l’énergie atomique, l’organisation par le ministère américain de l’Energie du tout premier Sommet Etats Unis-Afrique sur l’énergie nucléaire (Usanes), à Accra en octobre 2023, a été l’occasion de souligner la nécessité d’une «croissance durable de l’énergie nucléaire dans la région» et de souligner l’importance de travailler avec les Etats-Unis en tant que partenaire nucléaire civil. S’en est suivi un accord nucléaire signé en août 2024, avec au centre du dispositif, la technologie des petits réacteurs modulaires pour soutenir le Ghana dans sa production d’électricité propre, mais également la formation d’ingénieurs.
De la nécessité d’un consensus africain sur le nucléaire
Cette dimension est fondamentale pour les Etats africains confrontés à la fragilité de l’écosystème scientifique et désireux de ne pas dépendre de la main-d’œuvre étrangère. Le sort des déchets radioactifs demeure également une source d’inquiétude.
Fin 2024, l’Agence internationale pour l’énergie atomique menait deux missions d’assistance législative au Kenya et en Ouganda pour les aider à renforcer leurs cadres juridiques nationaux en matière nucléaire et à promouvoir leur adhésion aux instruments juridiques internationaux.
On le voit, si le nucléaire peut être une chance pour l’Afrique, le ticket d’entrée est fort élevé. La valorisation des meilleures pratiques pour faire face aux coûts de production et aborder des questions telles que l’acceptation du public et le développement d’une main-d’œuvre qualifiée devront faire partie du nouveau consensus africain qui reste à bâtir.
Par Henriette Niang KANDE
DÉSERT D’OPPORTUNITÉS VERSUS MIRAGE DE PROSPÉRITÉ
Les rêves de startup agricoles font face à un écueil : « pas de marge de manœuvre ». L’eldorado promis s’avère être… une récolte de raisins en Espagne... Faute d'imagination, les solutions ressurgissent d'un passé qu'on aurait aimé oublier
C'était une époque pas très lointaine pleine de promesses, des discours et une campagne teintés d'idéaux flamboyants. Ils avaient su capter l'attention de toute une génération. Leur programme ? Simple : des emplois pour les jeunes, une économie indépendante des fluctuations internationales et une autosuffisance alimentaire qui nous ferait oublier l'existence même des importations.
L e tout emballé dans une rhétorique pleine d'élan patriotique et de slogans. Le programme initial, rappelons-le, était ambitieux. Un plan massif d’investissements, le développement de circuits courts, et des incitations à la création d’entreprises locales devaient redonner au pays un lustre économique qu’il n’avait jamais connu. Les jeunes, eux, étaient promis à des emplois dans les technologies, la recherche et l’innovation, ou encore des carrières exaltantes dans l’agriculture « modernisée ». En somme, on leur proposait la Silicon Valley version bio et terroir. C'était leur espoir, le grand souffle de renouveau. En élisant l’équipe de la "Souveraineté et de Rupture" (S&R pour les intimes), le pays semblait avoir trouvé la solution miracle : des emplois dignes et épanouissants pour sa jeunesse, une autosuffisance économique et alimentaire, et un avenir radieux sous un ciel bleu patriotique.
Les promesses étaient un brin trop ambitieux, les rêves de startup agricoles font face à un écueil imprévu : « pas de marge de manœuvre ». Les emplois pour les jeunes se feront finalement, au son du sécateur et du craquement des feuilles sous les pieds et des coups de bistouri dans les structures de santé qataries. Direction les vignobles espagnols, et les projets technologiques ou de médecine du Qatar donc. Nous n’avions jamais imaginé que la "souveraineté économique" consistait à mieux « rentabiliser » les exploitations agricoles espagnoles et combler le déficit de personnels qataris, à coups de maind’œuvre pas chère. En effet, après dix mois plus tard, d’exercice du pouvoir, la réalité s’est imposée avec toute la grâce d’un tracteur déraillant dans un champ de maïs. L’eldorado promis s’avère être… une récolte de raisins et de mandarines, en Espagne ou un travail de forçat « qualifié » au Qatar. L'espoir s'est transformé en une réalité plutôt... terre à terre. Très terre à terre. Terre aride même. Quand l'imagination fait défaut, les solutions viennent souvent d'un passé qu'on aurait aimé oublier. Nos dirigeants, viennent d'appliquer une recette déjà connue : envoyer nos jeunes concitoyens à l'étranger, dans des emplois qui n'ont rien de glorieux, mais qui font illusion sur le papier.
C’est le dernier coup d'éclat en date du ministre Abasse Fall à qui on peut donner le titre de « ministre du Travail et des Perspectives radieuses », qui, revenant du Qatar, brandit un accord comme s'il avait décroché la lune. Son trophée ? Exporter dans ce petit émirat un millier de travailleurs de divers secteurs tels que la technologie, la médecine et la logistique, dont la formation a coûté au Sénégal qui en a grandement besoin.
Dans la foulée, le gouvernement sénégalais a décidé de remettre sur la table un accord de migration circulaire avec l'Espagne. Traduction ? Des bras sénégalais pour aller cueillir fruits et légumes dans les champs espagnols. Oui, vous avez bien lu. La jeunesse, portée aux nues il y a peu, est aujourd'hui invitée à plier bagage et traverser les frontières pour participer aux vendanges et à la cueillette en Espagne. Les emplois promis sont bel et bien là, mais il faudra mettre des bottes, attraper un sécateur, vivre dans des cantonnements, et apprendre à dire "olé, viva Espaňa" sans sourciller
Pendant ce temps, l’opposition politique se frotte les mains. « Voilà où mènent les slogans populistes, à l’exil de notre jeunesse ! », tonnent d’anciens dirigeants gouvernementaux, qui n’avaient eux-mêmes pas mieux proposé quand ils étaient aux affaires. Et maintenant ? À bien y réfléchir, pourquoi la souveraineté à cors et à cris, sur tous les tons, ne nous fait-elle pas réclamer une réciprocité ? Le sens unique doit interroger, d’autant plus que les jeunes du monde entier, ont la mobilité en commun. Pourquoi les Espagnols ne viendraient-ils pas, eux, planter des cacahuètes dans nos campagnes ? À croire que l’équilibre agricole espagnol et le développement du Qatar, reposent sur une subtile stratégie de délocalisation des bras et des cerveaux. Et nos jeunes, le lubrifiant silencieux des rouages de leurs économies respectives.
Au pays pourtant, les terres cultivables s'étendent, désespérément inactives ou louées à des étrangers. Des milliers de kilomètres carrés de potentiel agricole qui attendent une maind'œuvre... qui part ailleurs. Les terres arables locales se couvrent d'herbes folles, d’épineux, repas de roi pour des troupeaux de chèvres, de sachets plastique que le vent accroche aux arbustes, et le pays importe à prix d'or des denrées qu'il aurait pu produire lui-même. Mais pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué ? Les exploitants espagnols, eux, se frottent les mains : une jeunesse dynamique, prête à tout pour gagner quelques euros. Pendant ce temps, notre pays regarde ses enfants s’éloigner.
Cherchez l'erreur. Ah, ces pauvres gouvernants, bien plus doués pour planter des promesses électorales et des plants de salade ! Il n'y a pas si longtemps, des rêves nous étaient vendus : des rêves en technicolor : "En deux mois, tout sera réglé ».
À croire qu'il est plus simple de négocier des contrats saisonniers à l'étranger que de construire des infrastructures agricoles chez soi. Après tout, pourquoi ne pas se pencher sérieusement sur une économie locale au lieu de transformer sa jeunesse en travailleurs lowcost pour l'économie hors-frontières ? Une solution pratique : les jeunes travaillent, les statistiques de chômage baissent, et le gouvernement peut se féliciter. Pas mal, non ?
Le plus beau dans cette affaire, c'est le double discours. Officiellement, on nous parle de fierté nationale, de valorisation des talents locaux, de souveraineté alimentaire. Officieusement, on les emballe dans des charters direction l'Espagne avec, peut-être, un petit guide touristique pour se consoler : "L’Espagne et ses merveilles »."Qui croit aux promesses récolte l'exil."
Finalement, cette histoire de jeunesse exportée pourrait être une excellente comédie… si elle n'était pas si tragique. Que faire de cette situation ? Rire pour ne pas pleurer ? Peut-être. Mais il serait temps que nos gouvernants se rendent compte qu'un pays ne se construit pas en exportant ses forces vives. Les champs espagnols ont peutêtre trouvé nos bras, le Qatar nos cerveaux, mais notre pays, lui, risque fort de perdre son âme
Pour arriver au niveau de développement actuel, les Chinois pédalaient en uniforme Mao, une mode sobre qu’on pourrait qualifier d’anti-paillettes. Chez nous, les tenues d’apparat, les carrosses dorés et les privilèges clinquants, liés aux fonctions officielles, sont des arguments motivants pour les jeunes. Rien que ça fait germer l’envie de ne pas rester, mais plutôt de jouer les aventuriers sur des rafiots douteux ou de tester l’endurance dans le désert en mode « esclavage version hardcore ». Mais bon, pourquoi changer ? L’exemple vient d’en haut, et là-haut, on aime bien les paillettes. On garde les vieilles recettes foireuses, convaincus que le frein, ce n’est pas nous. Eh bien si.
Alors, qu'on se le dise : exportateur des travailleurs, c'est peutêtre efficace à court terme, mais ça ne nourrit pas les ambitions nationales. Si nos dirigeants actuels veulent vraiment marquer l'histoire, qu’ils sortent du cycle des idées réchauffées, se dévêtissent de leurs boubous froufroutants, des costumes près-du-corps, des chaussures dont le cuir bêle encore et qu’ils innovent. Sinon, leur place dans les livres d'histoire, risque de se limiter à une simple note de bas de page, juste après la recette du gaspacho espagnol et le majboos, le plat incontournable au Qatar. Ah ! j’oubliais, majboos signifie « être engagé » en arabe. Comme ces milliers de jeunes qui ont littéralement envahis les Bureaux d’Orientation et de Suivi (Baos) et les tribunaux du pays, chacun espérant faire partie du « peuple des élus ». Engagés à quitter ce désert d’opportunités pour aller vivre un mirage de prospérité ailleurs.
PAR Ismaila Madior Fall
L’AES, ENTRE LÉGITIMITÉ DU RETRAIT DE LA CEDEAO, EFFECTIVITÉ ET AVENIR DE L’ORGANISATION SOUS-RÉGIONALE
EXCLUSIF SENEPLUS - La désintégration par dénonciation du traité fondateur de la communauté peut-elle être mise en œuvre sans consultation populaire ni aval parlementaire, mais aussi des autres organes de l’organisation ?
Ce mercredi 29 janvier 2025 marque la date de formalisation du divorce du Mali d’avec la CEDEAO.
Un divorce regrettable
Pourtant, lors des réunions (ministérielles et de chefs d’Etat) de la CEDEAO de l’année 2023 sur les velléités des Etats de l’AES de quitter l’organisation, nous étions convaincus qu’ils n’allaient pas franchir le rubicond de claquer la porte de la maison communautaire et qu’ils allaient revenir sur leur volonté de se délier de l’organisation pour ne pas compromettre les acquis de plusieurs décennies de construction d’un modèle d’intégration, qui bien qu’imparfait, est bien meilleur que beaucoup d’autres expériences du genre sur le continent et dans le monde.
La lettre du président de la Commission (Docteur Omar Alieu Touray) (en date du 13 janvier passé) adressée au ministre des affaires étrangères et de la coopération internationale de la République du Mali, (Abdoulaye Diop) l’invitant à engager les formalités de séparation à compter du 29 janvier 2025 nous ramène à la dure et douloureuse réalité de l’effectivité du divorce avec plein d’incertitudes qui concernera aussi le Niger et le Burkina Faso.
Réserves sur des divorces engagés par des régimes de transition
Malgré le respect qu’il convient d’accorder à cette séparation qui constitue un risque sur la viabilité de l’organisation et l’avenir de l’intégration en Afrique de l’Ouest et, au-delà, en Afrique, l’on peut s’interroger sur le bien-fondé de la décision de retrait d’une organisation régionale de la part d’Etats dont les autorités sont dépourvues de la légitimité du suffrage universel et n’ont pas pris l’initiative d’une ratification populaire d’un acte de cette envergure de désaffiliation affectant le destin d’une communauté, quoi qu’on en dise, soudée par l’histoire, la géographie, la culture, l’économie et un ambitieux droit qui définit les principes de convergence constitutionnelle régissant le mode de vie politique de cet espace ; une communauté de droit qui récuse et sanctionne audacieusement la prise de pouvoir par des moyens portant atteinte aux bases ontologiques de l’intégration.
La décision unilatérale des juntes militaires de délier leurs Etats de leurs obligations vis-à-vis de la CEDEAO, même si elle est, bien sûr, conforme aux principes régissant les organisations internationales (dénonciation) et au traité fondateur de la Communauté (retrait), elle pose un problème de légitimité quant à la validité procédurale et substantielle de la démarche, tant en droit international qu’en droit interne. En effet, si, en droit international, l’effectivité du pouvoir peut parfois l’emporter sur la légitimité, en droit de l’intégration en revanche, on peut s’interroger sur l’admission automatique d’un retrait assumé par des autorités investies en violation des textes de la CEDEAO, notamment du Protocole de Dakar. Doit-on se limiter à la lettre du droit communautaire et laisser libre cours aux retraits ? Ou ne devrait-on pas, sans aller jusqu’à loi de l’enchaînement de l’Etat fédéré à l’Etat fédéral, davantage rigidifier la procédure de retrait, avec l’objectif de donner du temps et de la chance à la diplomatie intégrative. Ce qui pose le débat de la réforme institutionnelle de la CEDEAO après que le traité soit éprouvé par l’expérience.
Au surplus, la désintégration du processus d’intégration par des actions initiées dans le cadre de la dénonciation du traité peut-elle être accueillie et mise en œuvre sans consultation du peuple par voie référendaire, des parlements nationaux suspendus ou dissous, mais aussi des autres organes de l’organisation (Parlement au titre des saisines facultatives au moins, Cour de justice) ? Ces derniers devraient aussi, au nom de la logique institutionnelle, avoir leurs initiatives à prendre et leur mot à dire, même si le dernier mot revient à la Conférence des chefs d’Etat et de gouvernement.
A dire vrai, au-delà de la légalité de la démarche, ces retraits, spectaculaires et inédits depuis le départ en 2000 de la Mauritanie qui a envisagé heureusement son retour par la signature en 2017 avec l’organisation d’un accord d’association, doivent être pris au sérieux et subir le traitement juridique et politique requis. Ils pourraient souffrir d’un déficit de légitimité apaisante lié à l’absence d’onction démocratique tirée du défaut d’élection des dirigeants de la transition et de la non tenue de consultation référendaire, comme on l’a vu par exemple dans le cadre du Brexit où après le référendum, la Cour suprême britannique avait exigé l’approbation parlementaire, avant d’activer l’article 50 du Traité de Lisbonne sur les négociations de sortie. A juste titre, car le référendum reste le procédé de droit commun de validation et de légitimation d’une décision d’un pays décidant se retirer d’un projet d’intégration cinquantenaire, dont l’Etat en question est membre fondateur.
Les réserves de principe démocratique sur l’initiative de désaffiliation de la CEDEAO de la part de régimes à vocation transitoire sont également valables pour celle de leur affiliation à l’AES. En tout état de cause, il est clair qu’après 50 ans de vie dans une organisation d’intégration, se retirer de celle-ci signifie tourner le dos à une expérience de fraternité africaine cinquantenaire, pourtant citée en exemple par les benchmarkings de fonctionnement de modèles d’intégration.
Une opportunité pour sécuriser le droit de retrait et sauver l’intégration
Bien entendu, le propos ne consiste pas ici à délégitimer ou à contester la décision de retrait des Etats de l’AES ou à critiquer la mise en branle de la procédure de séparation, mais plutôt à inciter la CEDEAO à transformer cette crise en opportunité pour sécuriser le processus d’intégration et éviter d’ultérieurs retraits liés notamment à des changements anticonstitutionnels de gouvernement (on le sait doublement condamnés par la CEDEAO et l’Union Africaine) qui peuvent se révéler des parenthèses bien circonscrites dans des périodes de transition d’une durée limitée. Ce besoin de sanctuarisation de l’organisation ne répond pas seulement aux Etats théâtres de coup d’Etat, mais à tous types de manifestations de volonté de rompre avec celle-ci. Il faut, à cet égard, prêter attention à la récente déclaration du ministre togolais des affaires étrangères Robert Dussey qui n’exclut pas une adhésion de son pays à l’AES. A l’évidence, un autre retrait et une éventuelle attractivité de l’AES (avec l’intention prêtée au Tchad d’y adhérer) seraient un coup dur pour les efforts méritoires de construction de l’intégration des Etats et des peuples de l’Afrique de l’Ouest.
L’organisation communautaire devrait, donc, marquer le coup en engageant, sans remettre en cause la souveraineté des Etats qui restent maîtres des traités, la réflexion sur la sécurisation de la clause du droit de retrait et définir une doctrine préventive y relative pour endiguer quelque tentation de cascades de décrochages qui saperaient la dynamique intégrative, mais aussi les efforts collectifs de construction de la paix et de la sécurité de la sous-région.
En définitive, parce qu’il y va de la survie de l’organisation, cet ajustement institutionnel salvateur de l’intégrité de l’organisation devrait être un des points de l’Agenda attendu des réformes de la CEDEAO.
L’urgence d’engager la réforme de l’architecture institutionnelle
Au total, pour éviter de se désagréger et plutôt s’élargir en se consolidant, la CEDEAO doit, d’urgence, se réformer dans le sens d’une meilleure balance entre la sauvegarde des principes constitutionnels, la gestion des susceptibilités souverainistes et l’atteinte des objectifs économiques.
Ismaila Madior Fall est Professeur des Universités, ancien ministre des Affaires étrangères et des Sénégalais de l’Extérieur.
PAR MATEL BOCOUM
CRIS D’ORFRAIE
"Des militants des droits de la femme s’attendent au respect du protocole de Maputo qui autorise l’accès à l’avortement à cette tranche sociale. Le Sénégal l’a ratifié depuis 2004."
La venue d’un bébé illumine généralement nos vies. Un nouveau-né porte en lui une lumière et un amour qui irradient tout un univers. Il symbolise l’espoir d’un avenir lumineux. C’est tout naturellement que la nation sénégalaise a partagé le bonheur du couple présidentiel, qui a célébré la naissance du premier enfant né au Palais de la République. L’instant est magique. Une connexion naturelle s’est vite créée. Les rires et pleurs d’un bébé vont désormais résonner dans ce lieu symbolique. Le baptême a inspiré des vibrations positives à notre cher Galsen qui aspire à voguer sur une nouvelle dynamique.
Dire qu’au même moment, d’autres voix s’élèvent pour plaider en faveur des jeunes filles qui veulent se débarrasser d’une grossesse. Elles militent pour l’adoption d’une loi autorisant l’avortement médicalisé, c’est-à-dire qu’il ne soit plus uniquement permis à la maman dont la vie est menacée, mais de l’élargir aux victimes de viol et d’inceste.
Loin de s’inscrire dans une logique de défiance, elles ne veulent plus donner vie à des enfants qui n’apportent pas la joie de vivre dans la famille. Ces innocents, nés de relations incestueuses ou de viol, ne dégagent pas la candeur qui sied au bébé. Ils sont souvent étiquetés, dès leur bas âge, d’enfants du malheur. Ils constituent un fardeau pour leurs géniteurs et leur entourage. Mais, les cris d’orfraie des forces conservatrices feront encore trembler toute une République. Ces défenseurs de la morale sont toujours aux aguets pour faire avorter des projets aux relents féministes.
Tels des phares de la foi, ils disent s’accrocher à des valeurs authentiques : la vie est sacrée. Ils exigent un droit à la vie. Si l’expérience a montré que les enfants issus du viol ou de pratiques incestueuses brisent l’harmonie familiale, les parangons de la vertu n’en ont cure. Ils ont tendance à faire des analyses sous l’angle du mimétisme ignorant que même dans les sociétés traditionnelles, l’inceste est considéré comme un crime le plus abject contre la société, la famille. Il attirerait les foudres des divinités et des ancêtres.
Qu’importe si les enfants, conçus dans telles circonstances, auront du mal à trouver les ressorts nécessaires pour se faire une place dans la société, traverseront toute leur vie un désert affectif et seront condamnés à payer la faute morale de leurs parents, il leur faut toujours décocher des flèches…
Or, pour cette fois, des praticiens du droit ont suggéré une interruption de grossesse médicalement assistée pour cette catégorie sociale, qui ne mérite pas de subir un autre supplice après un traumatisme sexuel. Ils ont mis des garde-fous contre le libertinage.
Mais les défenseurs de la morale, toujours prompts à ouvrir un large front de lutte, sont formels, le « yakh birr » ne prospérera pas au Sénégal. Ils invoquent la « loi sur la Santé de la Reproduction » (article 15), le « code de déontologie des médecins » (article 35) et le code pénal (article 305). L’État du Sénégal a souscrit, sans équivoque, au postulat qui n’autorise l’avortement « que lorsque la vie de la mère est à ce point menacée… » À travers leur posture, ils rappellent cette nécessité de disséminer la bonne information pour une adhésion massive à la cause des victimes de viol et d’inceste.
Des militants des droits de la femme s’attendent au respect du protocole de Maputo qui autorise l’accès à l’avortement à cette tranche sociale. Le Sénégal l’a ratifié depuis 2004. Habitués à affronter des poches de résistance, ils ont pu développer jusque-là des stratégies idoines pour calmer les ardeurs. Ils ont d’ailleurs été exposés au même scénario lorsqu’il a été question de promouvoir la planification familiale comme style de vie, dans l’optique de préserver la santé de la mère et de l’enfant. Les parangons ont reconsidéré leurs positions lorsqu’ils ont pris conscience des bienfaits d’un intervalle de deux ans entre deux grossesses. Ils venaient de cerner la différence entre espacer les naissances et les limiter.
Seulement, dans un monde où des hommes tremblent devant la montée en puissance des femmes de plus en plus autonomes et émancipées, les cris d’orfraie risquent encore d’être plus retentissants que les cris des bébés…
PAR SAMBOUDIAN KAMARA
TRISTE KIVU
"L’histoire ne se répète pas, dit-on, mais elle rime. En observant les dynamiques autour des ressources naturelles, on ne peut qu’être frappé par les échos de cycles passés qui, bien que remaniés, continuent de modeler notre monde."
L’histoire ne se répète pas, dit-on, mais elle rime. En observant les dynamiques autour des ressources naturelles, on ne peut qu’être frappé par les échos de cycles passés qui, bien que remaniés, continuent de modeler notre monde.
Combien d’esclaves déportés aux Amériques pour leur mise en valeur agricole ? Combien de guerres menées pour accéder au pétrole ? Combien de vies abrégées par les « diamants du sang » en Sierra Leone ? Sous nos yeux se déroule une compétition technologique hors normes avec comme terrain de confrontation l’Intelligence artificielle (IA). Parallèlement, des pays africains, détenteurs de métaux rares nécessaires à la fabrication de la plupart des composants électroniques, sont exclus de cette « conversation ».
Les dernières nouvelles sur le High-Tech semblent corroborer cette thèse. Le monde n’a pas fini de s’émouvoir des conséquences de l’alliance entre Donald Trump et les géants du numérique, surtout dans la perspective d’une explosion des fake news, qu’une éclaircie est venue de Chine, de Hangzhou. C’est en effet dans cette ville de l’empire du Milieu que se trouve la start-up initiatrice de DeepSeek.
Il s’agit d’un agent conversationnel qui bouscule depuis quelques heures l’Américain Nvidia (leader mondial des composants et logiciels pour l’intelligence artificielle) sur les marchés boursiers. Pas fous pour un sou, les investisseurs ont compris que ces entreprises ne sont plus seuls maîtres à bord. Le Chatbot DeepSeek, attaqué le même jour par une cyber-offensive d’envergure, propose des fonctionnalités identiques à celles de ses concurrents occidentaux, ChatGpt en premier lieu. Il en bouche un coin par ses performances en codage informatique ou en résolution de problèmes mathématiques, coûte moins cher, mais n’est performant qu’en chinois et en anglais.
Naturellement, il est « politiquement correct » et les premiers échos de son utilisation révèlent qu’il se débine dès qu’il est interrogé sur des sujets « sensibles », le président Xi Jinping par exemple. DeepSeek est surtout open source, cela veut dire que son code est accessible à tous, ce qui permet de comprendre son fonctionnement ; ouverture qui, du reste, le différencie de ses concurrents dont « la boîte noire » de leur IA est mieux gardée que les joyaux de la couronne britannique à la Tour de Londres. Mais le préalable à ces innovations, c’est de disposer de puissantes puces et micro-processeurs, de divers composants, de batteries. Où trouve-t-on les intrants nécessaires à leur fabrication ?
Alors que le Nasdaq (indice boursier des valeurs technologiques) à New York se pâme pour DeepSeek, les agences de presse annonçaient hier la chute de Goma désormais aux mains des « rebelles » du M 23, le groupe armé soutenu par le Rwanda dans sa guerre contre l’État congolais (Rdc). Dans ce « scandale géologique » qu’est le Kivu, dans l’est de la Rdc, se résument toutes les contradictions d’un continent.
La Rdc possède environ 60 % des réserves mondiales de coltan (contraction de ses deux composants, la colombite et la tantalite), particulièrement recherché pour son contenu en tantale, un minerai rare et stratégique, car utilisé en association avec d’autres dans la fabrication de condensateurs pour appareils électroniques (smartphones, ordinateurs, Gps, consoles de jeux), dans l’industrie aéronautique et militaire ; il permet des alliages pour les moteurs de turbines ou de fusées. La bourse s’agite alors que les populations du Kivu trinquent. Derrière chaque avancée technologique qui fait vibrer les places boursières, se cache une réalité plus sombre, enfouie dans les entrailles de la terre.
Ces ressources qui alimentent les révolutions numériques ne seront véritablement des leviers de progrès que lorsque l’innovation s’accompagnera d’une éthique universelle, où l’exploitation des richesses naturelles ne rimera plus avec la souffrance humaine.
Par Mohamed GUEYE
LES NOUVEAUX TRAFIQUANTS D’ESCLAVES
Les accords de migration signés avec le Qatar et l'Espagne contrastent avec les promesses d'emplois locaux. Le ministre Abasse Fall présente comme une victoire ce qui ressemble aux errements des régimes précédents
Une fois de plus, il s’avère que notre Premier ministre avait parlé trop vite. Ousmane Sonko, président du parti Pastef, lorsqu’il soutenait la candidature de son poulain Bassirou Diomaye Diakhar Faye à la présidence de la République, promettait aux jeunes gens, qui constituaient la grande masse de la troupe d’électeurs sur lesquels il comptait, qu’eux au pouvoir, l’horizon allait se déboucher pour les jeunes. Ces derniers n’auraient plus pour seules perspectives de conduire des motos Jakarta ou de tenter d’émigrer en prenant les routes de la mer ou le chemin du Nicaragua pour tenter de rejoindre les Etats-Unis d’Amérique.
On avait la garantie qu’avec Pastef et ses dirigeants dynamiques et incorruptibles au pouvoir, non seulement les prix des denrées de première nécessité allaient baisser, mais en plus, de nombreuses entreprises nationales allaient voir le jour, qui allaient embaucher l’abondante et entrepreneuse main-d’œuvre des jeunes laissés oisifs par le pouvoir incompétent de Macky Sall. Ces paroles sont tombées dans des oreilles si crédules que les nouveaux dirigeants ont obtenu, tant à la présidentielle qu’aux législatives, des scores de sénateur, et une majorité indiscutable. Las ! C’est juste en ce moment que de nombreux électeurs ont commencé à se rappeler que les promesses n’engageaient que ceux qui y croyaient.
Le pire est que nos dirigeants actuels, sans doute peut-être à court d’imagination, en sont venus à recourir aux mêmes expédients utilisés par les pouvoirs qu’ils avaient voués au peloton d’exécution. Ainsi, il y a quelques jours, le ministre Abasse Fall revenait du Qatar en exhibant fièrement un accord qu’il venait de passer avec les autorités de ce pays, permettant d’expédier dans ce pays du Golfe, un millier de travailleurs manuels pour des emplois pas nécessairement les mieux rémunérés.
Avant que l’enthousiasme ne refroidisse, le gouvernement et le Royaume d’Espagne annoncent la revitalisation d’un accord de migration circulaire, qui devrait permettre à certains Sénégalais d’aller cueillir des fruits et des légumes dans des champs d’Andalousie, de Galice ou de la Catalogne…
Une autre bonne trouvaille, mais qui, comme celle du Qatar, a déjà fait ses preuves dans ce pays. Nos dirigeants se rappellent certainement qu’en 2007, quand les premières pirogues ont commencé à prendre d’assaut les côtes des îles Canaries, le gouvernement espagnol de l’époque avait proposé un contrat de ce type au pouvoir du Président Abdoulaye Wade. Il s’agissait, une fois encore, de migration circulaire. Des Sénégalais, jeunes gens et femmes jusqu’à un certain âge, étaient encouragés à partir en Espagne avec un contrat de travail d’un an. A la fin du contrat, le candidat revenait pour laisser la place à un(e) compatriote qui reprenait le même parcours. L’idée a fait «flop», non pas à cause des Espagnols, mais simplement parce que les premiers bénéficiaires ne voulaient plus retourner. Pourtant, les autorités espagnoles avaient mis les moyens, allant jusqu’à appâter les dirigeants sénégalais avec une cagnotte de 13 milliards, qui devait servir à l’Agence nationale pour l’emploi des jeunes (Anpej), à créer des emplois au niveau local.
Une bonne partie de ce montant a servi à lancer le Plan Retour des émigrés vers l’agriculture (Reva), qui devait servir à encourager les personnes refoulées d’Europe, à se former et à investir dans l’agriculture. Après plusieurs années, le fameux Reva, ne faisant rêver personne, a été transformé en Anida par Macky Sall. Sans doute échaudé par l’expérience de Wade, son successeur n’a pas relancé le projet de migration circulaire avec l’Espagne. Il faut dire que, à la même époque, le ministre français de l’Intérieur, un certain Sarkozy, était passé à Dakar pour tenter de vendre à son homologue Ousmane Ngom, l’idée d’une «immigration choisie», qui ambitionnait de piocher dans la crème des cadres bien formés chez nous, pour travailler dans les entreprises européennes avides de main-d’œuvre qualifiée. Mais là aussi, l’offre étant toujours supérieure à la demande, les portes de l’Europe se sont déplacées sur les côtes africaines, où l’agence européenne Frontex a voulu nous enfermer dans nos frontières. Avec souvent des complicités africaines.
Abasse Fall, qui est revenu du Qatar avec sa belle trouvaille, a sans doute oublié l’expérience du Koweït d’après-la guerre du Golfe, quand ce pays a voulu payer à Abdou Diouf la dette du sang de nos Jambaar tombés sur la route de la Mecque, après avoir pris leur part de la lutte contre Saddam Hussein, sous la couverture de Gorge Bush père. Plusieurs manœuvres ont pris le chemin de Koweït City. Les plus qualifiés étaient maçons, menuisiers, peintres, plombiers et autres. Nourrissant le rêve de faire fortune dans ce pays pétrolier, nombre d’entre eux ont vite déchanté devant les conditions de vie et de travail auxquelles ils étaient astreints. Et les choses ne se sont pas améliorées depuis.
Ceux qui ont suivi le processus d’attribution de la Coupe du monde de football au Qatar, ont aussi certainement à l’esprit les conditions dans lesquelles ont travaillé les migrants qui ont construit les beaux stades et les jolis immeubles qui ont accueilli les millions de visiteurs qui se sont rendus dans ce pays. Les médias occidentaux, mieux informés, n’ont pas hésité à parler des conditions proches de l’esclavage. Cela, sans parler des nombreux décès que ces constructions ont entraînés. C’est dire que les milliers d’emplois que fait miroiter Abasse Fall, devraient être scrutés avec beaucoup d’attention.
La première chose que notre ministre du Travail devrait éclairer est de savoir pourquoi cet accord, qui aurait été passé depuis 2014, sous le magistère du Président Macky Sall, n’a jamais vu un début d’application. Pourtant, Macky Sall a été confronté à des très sérieux problèmes d’emploi des jeunes. Cela ne l’a pourtant pas incité à enclencher cet accord signé avec ce pays ami, très riche en gaz et pauvre en population active. Si son régime n’était pas aussi désespéré, cette situation aurait dû mettre la puce à l’oreille de Abasse Fall.
A moins qu’il ne veuille reproduire le trafic d’esclaves de triste mémoire, qui a dépouillé nos pays africains d’une grande partie de sa jeunesse dynamique au bénéfice des Occidentaux et des esclavagistes arabes. En moins d’un an de pouvoir, le projet souverainiste en serait donc tellement à court d’énergie pour en venir à transformer ses ministres en trafiquants d’esclaves ? Où sont donc les brailleurs de «France Dégage» ? Ou alors l’Espagne et le Qatar ne sont pas concernés par ce slogan ?
Par Samba Oumar FALL
POUVOIR SUPRÊME
Regardons les chiffres : les acteurs en tête avec 11 mentions, les mamans avec trois, Dieu, créateur de l’univers, zéro mention… Rien d’étonnant dans cette ville impie , avait déclaré Nikki Glaser
Début janvier, lors de la 82e cérémonie des Golden Globe Awards qui a eu lieu à Los Angeles, l’animatrice Nikki Glaser a fait une blague de mauvais goût qui a suscité un débat intense sur les réseaux sociaux. « Regardons les chiffres : les acteurs en tête avec 11 mentions, les mamans avec trois, Dieu, créateur de l’univers, zéro mention… Rien d’étonnant dans cette ville impie », avait déclaré Nikki Glaser.
Ces propos jugés « irrévérencieux » ont été considérés comme une moquerie à l’égard de Dieu. Dans un pays, les États-Unis, où la devise est « In God we trust » (En Dieu, nous croyons), une déclaration aussi controversée a créé une onde de choc. Elle a suscité diverses réactions sur les réseaux sociaux, a reçu les critiques de nombreux internautes qui l’ont jugée irrespectueuse et déplacée, et l’ont condamnée. Deux jours plus tard, un gigantesque incendie d’une rare violence a ravagé Los Angeles. D’aucuns n’ont pas hésité à faire le rapprochement entre la blague de Nikki Glaser et les feux apocalyptiques qui ont dévoré la « Cité des anges ».
Depuis plus de deux semaines, le cauchemar continue ; l’incendie ayant fait des ravages, détruit des maisons, causé des morts, fait des déplacés sans compter les dommages évalués à des milliards de dollars. Avertissement divin ou simple coïncidence, la leçon est qu’on ne se moque pas de Dieu. Tous ceux qui ont eu à se prêter à ce jeu l’ont appris à leurs dépens. Se moquer de Dieu signifie Lui manquer de respect, nier ou ignorer Son existence. La toute-puissance et le pouvoir, c’est Dieu et nul autre que Lui ne détient ces attributs. Malheureusement, nous vivons dans un monde où nos élites sont, pour la plupart, atteintes du syndrome d’Hubris.
Le succès et l’accès au pouvoir sont de bons stimulants pour faire ressortir ce trouble de la personnalité qui, depuis des millénaires, a transfiguré un grand nombre de dirigeants. Il est difficile aujourd’hui, de dresser la liste de tous ces hommes de pouvoir qui ont perdu la tête face à l’exercice de leurs fonctions. Parce que ce n’est plus un secret, le pouvoir fait perdre la tête. Il rend fou, comme le dit le dicton et le soutient d’ailleurs le romancier et poète islandais. « Le pouvoir rend parfois l’être humain démoniaque, voilà pourquoi les hommes sont parfois la pire plaie qui existe sur terre », écrivait Jon Kalman Stefansson.
Et il n’a pas foncièrement tort. Car les dirigeants plongés dans un état d’Hubris chronique deviennent très arrogants, narcissiques et mégalomanes. Leur pouvoir leur confère un sentiment exagéré d’invulnérabilité, de toute-puissance et de supériorité. Ils se croient immortels, se prennent parfois pour des demi-dieux. Ils abusent de leur pouvoir, de leur autorité parce qu’ils se croient au-dessus des autres. Aujourd’hui, ce trouble psychiatrique, encore appelé « maladie du pouvoir », est de plus en plus répandu. Il s’étend bien au-delà de la sphère politique et peut se retrouver à différents échelons de la société.
L’histoire a démontré que le pouvoir peut changer une personnalité en profondeur. Nous l’avons vécu en Afrique et ailleurs. Ce qui conforte le biographe autrichien, Stefan Zweig qui affirmait : « Le pouvoir est comme la tête de Méduse : celui qui en a vu la figure ne peut plus en détourner son regard, reste fasciné et charmé. Celui qui, une fois, a goûté à l’ivresse de la domination et du commandement ne peut plus s’en passer ». Si le pouvoir fait souvent perdre la tête à ceux qui ne savent pas le contrôler, le réveil peut souvent s’avérer très brutal, car une fois qu’ils tombent de leur piédestal, ces « malades » qui ont chopé ce triste syndrome se rendent vite compte que seul Dieu détient le pouvoir suprême.
Et que Sa grandeur transcende toute compréhension humaine. Infinie, inégalable et éternelle est Sa puissance et rien ni personne ne peut Lui résister ou contester Son autorité suprême. La réalité est que « toute puissance humaine, aussi impressionnante soit-elle, n’est qu’une infime parcelle de la puissance divine, accordée par le Seigneur dont la gloire est incomparable, dépasse tout ce que l’esprit humain peut concevoir ». Comme il est mentionné dans la sourate L’exode, Il est « le Souverain, le Pur, la Paix, le Dispensateur de la sécurité, le Vigilant, le Puissant, le Contraignant, le Superbe… ». Et la foi en Lui offre une source intarissable de force et de sérénité.
Par Papa Abdoulaye Seck
L’ADMINISTRATION PUBLIQUE DANS LA CONSTRUCTION DE CE SENEGAL NOUVEAU
À mon humble avis, un appel à candidatures pour les prestigieux postes de notre administration s’impose.
Notre pays, sur forte prescription des plus hautes autorités politiques, s’interroge sur les voies et moyens d’optimisation des rendements de notre administration publique. Certes, l’équation est difficile mais elle est inévitable et de sa résolution se dessineront notre avenir économique et notre forteresse pour un partage mutuellement avantageux de notre espace géographique. En effet, sans une administration publique forte, transparente, dotée d’une réactivité stratégique d’exception, efficace et efficiente, point d’émergence socio-économique.
Ceci résulte du fait que les créateurs de richesse et générateurs d’emplois ne peuvent doper leur inventivité que dans un univers propice à l’explosion de leur génie en dormance. Le monde bouge ! Nous pouvons évoquer, sans prétendre à l’exhaustivité : les changements climatiques, les catastrophes naturelles devenues récurrentes, l’insécurité alimentaire, la répartition disruptive des ressources générées dans un espace géographique donné, l’essentiel des richesses captées par des élites sans empathie, une diffusion asymétrique de l’information, une exploitation sans limite des ressources naturelles des pays pauvres, un obscurantisme entretenu par l’ignorance des uns et la passivité des autres, une volonté extrême de puissance de certains grands pays voulant s’ériger en gendarmes mondiaux, un fanatisme incontrôlé, une xénophobie révoltante, les doutes planant sur nos communautés économiques régionales telles que la Cedeao, etc.
Face à de tels éléments d’une gravité sans borne, l’heure devrait être, me semble-t-il, à la synergie de toutes les intelligences, de tous les moyens et tous les efforts pour – d’une part, densifier notre carapace dans ce monde d’interconnexion sans ,vraiment, une réelle empathie – et d’autre part, nous réinventer pour assurer une souveraineté plurielle(alimentaire, énergétique, monétaire..) En abrégé, conjuguons à la première personne du pluriel! Car nous avons des ressources humaines de qualité. Pour preuve, il m’est inconnu et je ne me souviens d’aucun domaine dans lequel des compatriotes ne sont pas cités pour leurs compétences, leur sérieux et leur dévouement. Ils sont dans les organisations internationales, professeurs dans les plus grandes universités du monde, leaders de grandes multinationales, membres de prestigieuses sociétés savantes du Nord et du Sud, leaders dans les grandes sociétés civiles du monde.
Ces experts sont aujourd’hui affolés par la violence des débats à l’échelle nationale et craignent toute participation au débat citoyen de peur d’être insultés, chahutés par des personnes qui n’ont d’autre force que leur courage et leur parfaite ignorance. Il faut honorer la connaissance comme un aimant, dans la construction d’une émergence économique aux dividendes partagés. C’est le prix à payer cash pour un Sénégal décomplexé, entreprenant, riche d’une exploitation optimale de ses diverses potentialités. À mon humble avis, un appel à candidatures pour les prestigieux postes de notre administration s’impose. Toutefois, la refondation doit être globalisante .Et sans doute, l’appel à candidatures est une première pierre précieuse dans la constitution de cercles de qualité totale que j’ai déjà désignés sous le vocable « d’équipes nationales de compétences », forces motrices d’une émergence normée. Mon vécu professionnel national et international m’incite à penser qu’une administration à la recherche d’une performance constamment revigorée doit:
1- recruter dans ses différents compartiments sur concours
2- nommer ses dirigeants par appel à candidature, assorti d’une véritable enquête de moralité ;
3- exiger une lettre de mission annuelle pour tous les cadres, signée par l’intéressé et son supérieur hiérarchique direct ;
4- procéder à une évaluation annuelle sur la base de lettre de mission de l’agent, pour permettre l’avancement de catégorie ;
5- procéder à une évaluation pluriannuelle ou évaluation de carrière sur une fréquence à déterminer. Ainsi, le grade n’est plus octroyé en fonction de la durée à un poste mais plutôt sur la base de l’efficacité et de l’efficience de l’agent ;
6- distinguer le grade de la fonction occupée. Ainsi, toute personne nommée aura comme salaire, celui correspondant à son grade et des indemnités de fonction.
7- limiter le temps d’occupation d’un poste de Directeur ;
8- plafonner l’âge pour faire acte de candidature dans un appel à compétition ;
9- respecter l’âge de départ à la retraite des Directeurs ;
10- éviter d’avoir des services à forte connotation familiale ;
11- exiger une déclaration annuelle de patrimoine de tous les Directeurs ;
12- mutiplier les formations de mise à niveau des animateurs.
À titre illustratif , dans un proche avenir, l’intelligence artificielle va nous imposer de nouvelles pratiques, il urge de ne pas rater le train. En conclusion, il faut une révolution de nos attitudes et comportements pour une administration publique nouvelle, intrant stratégique, pour un Sénégal nouveau Ces propos sont ceux d’un retraité viscéralement attaché à son pays, d’un ancien combattant assoiffé de paix, de tolérance et de progrès durables et continus pour notre patrimoine commun: le Sénégal.
Par Vieux SAVANE
DE QUI SE MOQUE-T-ON ?
Drôle de pays que le nôtre où l’on fait mine de ne pas se rendre compte qu’il est gangrené par une gestion prédatrice et clientéliste des deniers publics. Tout ce tapage alentour semble bien dérisoire lorsqu’il est question de la reddition des comptes
Les rapports de la Cellule nationale de Traitement des Informations financières (Centif) transmis au Procureur de la République qui font étalage de crimes économiques présumés donnent froid dans le dos.
A bien des égards ils sont révélateurs du rapport au pouvoir qui travaille ce pays qui est le nôtre. Aussi, en lieu et place des indignations, des cris d’orfraie et des mouvements de soutien qui s’époumonent ici ou là, il conviendrait plutôt de s’interroger sérieusement sur une réalité indéniable qui le gangrène et plombe l’économie nationale.
Depuis ces dernières années en effet, le compteur de l’impunité et de la prédation s’affole en attendant que la justice fasse enfin son travail dans le respect de la séparation des pouvoirs. Dernier rempart susceptible de garantir la cohésion sociale, elle a l’obligation, à travers les personnes qui sont censées la dire au nom du peuple sénégalais, de rester fidèle à son serment. Et cela, conformément à l’idéal de la balance, symbole d’équilibre qu’elle incarne, parce que censée ne pencher ni d’un côté ni de l’autre. En dehors de toute connivence, refusant d’être aux ordres, il lui revient de dire le droit en ayant pour seule boussole, une conscience trempée dans l’éthique et la déontologie. C’est à ce prix qu’elle pourra contribuer à l’éveil d’une nouvelle confiance citoyenne autour de laquelle pourra s’édifier et se consolider le vivre-ensemble.
Et cette dernière, convient-il de le rappeler, se noue autour de l’exemplarité. Les dirigeants actuels doivent par conséquent montrer qu’ils incarnent au premier chef, la rupture systémique à laquelle ils appellent. Aussi, importe-t-il qu’ils nous montrent de la simplicité, de l’humilité et de l’ardeur au travail en prônant une vigilance à toute épreuve, refusant de succomber à cet ego hypertrophié qui aveugle et fait sombrer dans l’hubris d’un pouvoir fait d’arrogance et d’irresponsabilité.
Au premier chef sont-ils donc appelés à s’éloigner de cette culture de l’apparat voire du m’as-tu vu avec ces énormes bolides en provenance des usines de l’Occident décrié et/ou d’Asie, et qui coûtent aux deniers publics. L’Asie aurait dû au contraire, servir plutôt de modèle, pour avoir montré sa capacité à compter sur ses propres forces. Voilà un continent qui a misé sur l’ingéniosité et le sens de l’engagement et du don de soi des citoyens guidés par la volonté patriotique de transformer positivement un espace, naguère humilié par la domination étrangère, en pays qui emprunte avec panache le chemin de la souveraineté économique.
Déprivatiser les trottoirs du palais
A rebours de tout cela, la gouvernance impériale semble prendre ses quartiers sous nos cieux. Les tenants du pouvoir sont encore dans un m’as-tu vu, fait de sirènes, de gyrophares et de cortèges tapageurs. Avec en prime, pour le chef de l’État, des déplacements sur des parcours jalonnés par un impressionnant dispositif des forces de l’ordre. Sans compter cette régression démocratique qu’on peine à comprendre et que même les régimes précédents n’avaient osé imposer et qui consiste en la privatisation des trottoirs qui bordent le Palais présidentiel, c’est-à dire la maison des Sénégalais. Ils sont interdits à la circulation piétonne; mesures inadmissibles en dehors des périodes de crise, puisqu’il s’agit d’un espace public. Aussi, est-il souhaitable que le gouverneur du Palais puisse corriger ce qui ressemble à un abus de pouvoir d’un autre temps. Et pour tout clore, tout dernièrement le chef de l’État a présidé un séminaire relatif à l’administration pour appeler à plus d’efficacité, oubliant de relever que la première mesure à prendre car commandant tout le reste, et que les autorités doivent incarner au premier chef, est de rompre avec l’heure sénégalaise. Cet alibi paresseux qui pétrifie la ponctualité et ouvre un grand boulevard au laxisme, jusqu’à pas d’heure.
Il urge alors que les mots épousent les choses dans le sens d’une rupture qui refuse de se complaire dans l’incantation, oubliant que la puissance performative est de l’ordre du champ mystico-religieux, contrairement à celui de la réalité concrète qui nécessite que l’on se confronte à elle. En dehors des mots, des belles promesses et des décisions sans lendemains qui chantent. Une manière de s’inspirer ainsi de Thomas Sankara, une des références du pouvoir actuel, qui lui avait l’honnêteté de se conformer à l’idéal auquel il appelait. Avec simplicité et humilité, il circulait dans une petite voiture, incitait avec vigueur à une consommation endogène, à l’image du port « Faso danfani ».
La gouvernance n’est pas un gâteau à partager
L’actuel pouvoir avait par ailleurs promis de se démarquer du népotisme et de toute forme de tribalisme en ayant recours à des appels à candidature pour là aussi, finir par se noyer dans le poto-poto partisan, oubliant que la gouvernance n’est pas un gâteau à partager, ni une récompense pour services rendus mais question de compétence et de sens aigu du service public. Ce qu’on attend de nos dirigeants c’est de transpirer, de voir leurs cheveux blanchir sous le harnais, leurs mines préoccupées, à cœur de sortir le Sénégal de l’ornière. On attend d’eux qu’ils révolutionnent notre rapport au pouvoir. Que l’on n’ait plus à se réjouir de la nomination d’une tierce personne à un poste de responsabilité signifiant par-là, qu’elle va avoir accès aux ressources. Les urgences devraient pourtant être ailleurs au regard des problèmes de santé, de l’emploi, de la promotion positive des femmes dans les sphères de décision, des enfants talibés qui se voient voler leur avenir, etc. Alors que l’école est obligatoire ne les voilà-ils pas jetés dans la rue à la merci de toutes sortes de prédateurs sexuels et autres usuriers ? Autre signe inquiétant, on voit se poursuivre en dépit de toutes les campagnes de prévention et des mesures de répression, des vagues de départ de jeunes par pirogues, au risque de leur vie, en dépit des rêves et du « Projet », à la recherche d’une bouée d’espérance. Sans compter que le front syndical est entrain de se réchauffer, du fait de l’impatience qui commence à gagner certains secteurs sociaux.
La rupture systémique promue doit donc impérativement s’éloigner de la fétichisation des slogans pour avoir l’obsession de dérouler un chemin autre, en n’ayant pas en ligne de mire un second mandat car cela implique des calculs politiciens avec tout ce que cela suppose comme renoncement à des principes. Qu’importe du reste ce qui adviendra, car s’impose un sens du sacrifice, puisqu‘il faudra balayer toutes les mauvaises habitudes acquises durant ces dernières années, lesquelles se sont sédimentées autour du clientélisme et de la prédation.
Assurément, le souverainisme ce n’est pas passer son temps dans une conflictualité de dénonciation, mais s’inscrire dans une démarche de compter sur ses propres forces, comme axe central articulé autour de l’ouverture aux autres. Il s’agit en effet d’inverser la donne de l’échange inégal en se focalisant sur ce qui permet d’être maître de son destin. En somme consommer ce que l’on produit et produire ce que l’on consomme, car liberté ne peut être sous tutelle
L’impératif de justice
Drôle de pays que le nôtre où l’on fait mine de ne pas se rendre compte qu’il est gangrené par une gestion prédatrice et clientéliste des deniers publics ! Pour s’en convaincre, il suffit tout simplement de se souvenir de ce président de la République issu de la première alternance démocratique proférant ces paroles effarantes dès l’acceptation de sa défaite par l’opposition. « Nos problèmes d’argent sont maintenant terminés » avait-il clamé. Avec une brutalité teintée d’un cinglant cynisme, il posait ainsi un désastreux rapport au pouvoir ressemblant à un nid de la poule aux œufs d’or qui ne demande qu’à être pillé.
En réalité il ne faisait que mettre en exergue une vision qui s’est infusée dans le corps social et qui se traduit par le fait que, dès lors qu’une personne est nommée à un poste de responsabilité, ce qui intéresse d’emblée, ce ne sont pas les défis à relever mais la cagnotte qu’elle va devoir gérer. On se souvient aussi d’un autre président issu de la deuxième alternance qui se targuait d’avoir mis sous le coude des dossiers diligentés par l’inspection générale d’Etat (Ige), dans l’optique de neutraliser des adversaires politiques potentiels. Il menaçait aussi de se défaire de tout directeur de société nommé par ses soins en cas de défaite électorale, incitant ainsi à puiser allègrement dans les ressources publiques. Pourvu que ça rapporte gros sur le plan électoral !
A l’évidence, il est attendu ici que la justice s’empare des dossiers qui lui sont soumis par la Centif et puisse les instruire équitablement. A charge et à décharge, loin des calculs et des pressions politiques. Tout ce tapage alentour semble bien dérisoire lorsqu’il est question de la reddition des comptes. A se demander de qui se moque-t-on ?
Par B. Khalifa NDIAYE
PARFUM D’AFRIQUE
Il a plané comme un parfum d’Afrique au-dessus du stade Ngalandou Diouf de Rufisque, samedi lors de la rencontre Teungueth FC – Jaraaf, les deux derniers représentants du Sénégal en compétitions continentales des clubs.
Il a plané comme un parfum d’Afrique au-dessus du stade Ngalandou Diouf de Rufisque, samedi lors de la rencontre Teungueth FC – Jaraaf, les deux derniers représentants du Sénégal en compétitions continentales des clubs.
Et à l‘arrivée, malgré les 5 buts inscrits, la victoire des visiteurs (3 – 2) et un spectacle parfois plaisant, on a compris en partie pourquoi nos « Africains » peinent à exister à l’international : nos équipes ont du mal à être constantes sur un match complet. Teungueth FC avait très tôt ouvert le score et tellement dominé la première période qu’on a un moment pensé que le Jaraaf était encore groggy et ne s’était pas totalement remis de son élimination en phase de poules de la Coupe de la CAF, une semaine plus tôt à Alger.
Et qu’à l’inverse, les Rufisquois, qui n’avaient pas pu passer le tour préliminaire de la Ligue des champions, avaient eu le temps de digérer leur désillusion d’août dernier face au Stade d’Abidjan. Même si par ailleurs ils sont carrément à la ramasse en championnat et éliminés de la Coupe du Sénégal. Battus dans le jeu et dans l’envie, les « Vert et blanc » semblaient avoir du mal à retrouver leurs esprits et à revenir aux joutes domestiques après avoir, eux, failli fréquenter les cimes continentales. Et puis changement de décor à la reprise.
Le Jaraaf transfiguré s’est enfin décidé à … commencer son match. Alors, les locaux de TFC perdent pied, le temps d’encaisser trois buts avant, eux aussi, de se rappeler qu’ils étaient champions du Sénégal en titre et qu’ils avaient un rang à défendre. Mais ils ne purent que réduire la marge dans le temps additionnel. Intermittents du jeu (et accessoirement du spectacle), Jaraaf et TFC ont aussi alternativement eu Eole pour autre adversaire. Ceci explique certainement cela. Car aucune des deux formations n’a réellement développé son jeu lorsqu’elle avait le vent de face. Or, pour exister, surtout en Afrique, il faut savoir s’accommoder à certains facteurs exogènes, tels que le vent, la canicule, la pluie, la fraicheur pour ne pas dire le froid.
Samedi, ce n’était pas l’Afrique même si deux ex « Africains » étaient de sortie en rattrapage de la 10e journée du championnat de L1. On ne s’est certes pas ennuyé, mais on était en droit d’attendre bien plus. Le retour sur le continent passe par des prestations bien plus convaincantes. Surtout que, même s’il s’est arrêté aux portes des quarts de finale de la Coupe de la CAF, le Jaraaf a donné des idées à certaines formations qui rêvent de réussir à faire au moins autant. L’US Gorée qui n’a plus humé l’enivrant parfum d’Afrique depuis bientôt 20 ans mène « la révolte » et même les promus Wally Daan et Oslo s’amusent à jouer les trouble-fête.
C’est vrai que, comme dans la pub d’une certaine boisson énergisante, « l’Afrique donne des ailes ». Mais, attention à ne pas se les brûler et gare à la gueule de bois des lendemains de terribles désillusions. PS : Pour rester en Afrique, ce soir, le Sénégal connaîtra ses premiers adversaires à la CAN de football « Maroc 2025 ». Les spécialistes de la météo sportive auront ainsi presque onze mois (et le début de la compétition le 21 décembre prochain) pour tirer des plans sur la comète.