TOUJOURS LE REGNE DE L’INDISCIPLINE, DE L’INCONSCIENCE ET DE L’IRRESPONSABILITE
Près de deux décennies après, les Sénégalais n’ont tiré aucun enseignement de cette tragédie maritime la plus meurtrière de l’histoire de l’humanité. En atteste la surcharge érigée en règle dans les transports terrestres

Près de deux décennies après le naufrage du bateau «Le Joola» qui a fait plus de 1 800 morts, les sénégalais n’ont tiré aucune leçon de cette catastrophe maritime la plus meurtrière de l’histoire de l’humanité. en atteste la surcharge érigée en règle dans les transports terrestres. La seule aubaine vient du transport maritime où les autorités portuaires ne lésinent pas sur le respect de ce dispositif sécuritaire.
1 863, c’est officiellement le nombre de victimes du naufrage du bateau «Le Joola» dont la capacité était pourtant de 500 passagers. Et parmi les causes de ce chavirement, nombreux sont ceux qui pointent du doigt le surnombre. En dépit de cette grosse catastrophe, l’éveil des consciences sur le danger de la surcharge tarde encore à se faire. Ce qui pousse d’ailleurs à se demander si les Sénégalais ont tiré les leçons de cette tragédie. Au terminus de Liberté VI, le soleil darde ses rayons sur les bus Tata garés çà et là.
Dans l’attente d’une ligne qui leur convient, les gens se rassemblent en petits groupes sous l’ombre des bâtisses. Certains pianotent leurs portables, d’autres ont l’œil rivé sur les bus, prêts à embarquer à tout moment. Au même moment, quelques passagers ont pris place dans un bus. Au volant, le chauffeur qui n’attend que le top départ pour s’ébranler en direction de la banlieue. Interrogé sur les leçons tirées du naufrage du «Joola», notre interlocuteur qui a requis l’anonymat déclare : « Les Sénégalais ont la mémoire courte et oublient vite. La pratique qui a emporté plus de 1 800 personnes a toujours cours dans le milieu du transport terrestre. La cause principale, c’est l’indiscipline et l’absence de sanctions.
A mon avis, il faut prendre des mesures assez contraignantes pour éviter le surnombre». Le pire, estime-t-il, c’est que les Sénégalais sont inconscients des dangers de la surcharge. «Souvent, on voit des bus pleins, mais il y a des clients qui vont continuer à embarquer», se désole-t-il avant d’appeler à un changement de comportements. Non loin de lui, un groupe de 4 personnes discutent tranquillement en attendant le prochain bus. Aline Faye, la trentaine et teint noir, pense que la crise sanitaire devrait nous apprendre beaucoup de choses. «Lorsque les autorités avaient interdit la surcharge, tout le monde s’y était conformé. Mais depuis que la mesure a été levée, les vieilles habitudes ont repris et les surcharges sont de règle. A défaut de se limiter aux places assises, on devrait penser à limiter le nombre de places debout. A mon avis, le Joola ne nous a rien enseigné», clame-t-il. Pour lui, il est du ressort de l’Etat de veiller à l’application effective de la loi contre la surcharge.
L’EXCEPTION DU TRANSPORT MARITIME
Sitor Cissé emprunte régulièrement la voie maritime pour se rendre en Casamance. Il a pris le bateau Diambogne à la gare maritime de Dakar, hier à 20, heures pour se rendre à Ziguinchor. A l’en croire, les autorités portuaires ont tiré toutes les leçons de cette catastrophe maritime. «Je pense que les Sénégalais n’ont pas tiré beaucoup de leçons, parce que 18 ans après, les bus et les cars rapides sont toujours bondés de monde. Il n’y a que les navires où l’Etat a pris d’importantes mesures pour assurer la sécurité des passagers. Depuis le chavirement du bateau Le Joola, la capacité de charge dans les transports maritimes est respectée», se félicite-t-il tout en invitant l’Etat à faire de même dans le transport routier.
Adrien Léonard Bendia a effectué, à maintes reprises, le voyage entre Ziguinchor et Dakar. Son dernier voyage, dit-il, remonte en début février, juste avant l’avènement de la Covid-19 au Sénégal. Adrien attend confortablement le départ du bateau pour se rendre en Casamance. Il est tout à fait en phase avec son prédécesseur. «Je pense que les autorités portuaires ont pu, dans une certaine mesure, régler l’erreur qu’avaient commise les responsables du bateau Le Joola. Car elles se sont attelées à renforcer la sécurité dans le transport maritime. Actuellement, il n’y a pas de surcharge. Et toutes les dispositions sécuritaires sont respectées. C’est tout à fait différent de ce qui se faisait avant. Je peux dire que tout est impeccable», affirme-til. A noter que que la liaison maritime Dakar-Ziguinchor a repris depuis le 23 septembre dernier, après plusieurs mois de suspension due à la crise sanitaire.