LA VÉRITÉ SUR LE RAPPORT DE LA CNRI
MISES AU POINT DE MAMADOU LAMINE LOUM, VICE-PRÉSIDENT DE LA COMMISSION

Mamadou Lamine Loum s’est expliqué, hier, sur le rapport que la Commission nationale de réforme des institutions (Cnri), dont il est le vice-président, a déposé sur la table du chef de l’Etat. Et c’est pour des mises au point.
Vice-président de la Commission nationale de réforme des institutions (Cnri), Mamadou Lamine Loum, après les multiples critiques qui ont émané de partout, suite au dépôt sur la table du chef de l’Etat du rapport de la Cnri et de l’avant-projet de Constitution, a rompu le silence. Et c’est pour apporter des éclairages sur un certain nombre de propositions dégagées par la Commission dirigée par Amadou Mahtar Mbow et qui ont suscité l’ire de certains hommes politiques, notamment dans le camp du Président Macky Sall.
Il a d’emblée rappelé que tout ce qui a été fait par la Cnri l’a été à la demande du Président Sall. Tout a été fixé par le décret et les termes de références signés par le chef de l’Etat.
Parlant du projet de Constitution, il a fait valoir que «c’est une Constitution du citoyen sénégalais et non politique. Maintenant, nos dirigeants, nous voulons qu’ils aient un bail à durée déterminée strictement avec nous. Il ne peut pas être question que chacun vienne avec sa Constitution». D’où donc la limite
des mandats à deux fois 5 ans.
Et, évoquant l’âge plafond à 70 ans pour être candidat à la présidence, l’ancien premier ministre d’Abdou Diouf a fait savoir que «c’est une demande sociale. Nous avons une Constitution qui marchait sur un pied parce qu’elle avait légiféré pour le plancher à 35 ans, mais pas le plafond».
Pourquoi 70 ans comme âge plafond ?
Invité de l’émission «Opinion» sur Walf Tv, hier, Mamadou Lamine Loum de souligner que «c’est une question qui revient tout le temps. Donc, il y a deux solutions possibles, pour parler d’options et de fondamentaux dans la Constitution. Il y a des choses fondamentales qui ne peuvent pas être
marchandées, ce n’est pas un catalogue.
Vous avez des choses qui sont optionnelles. L’idée, c’est de dire on peut supprimer les 35 ans et ne rien faire, ni comme plancher, ni comme plafond. Mais on peut aussi dire qu’on choisit un plafond».
Sur les critères qui ont prévalu pour choisir 70 ans comme âge limite, l’ancien ministre du Budget et ancien Premier ministre de dire : «C’est l’âge sur lequel il y a eu un consensus à peu près accepté, disons, par les acteurs politiques et les citoyens. Et deuxièmement, ça correspond à un vécu historique
au Sénégal.
Le premier Président quittait le pouvoir à 75 ans. Si on ramène ça au mandat actuellement de 5 ans, pour quitter à 75 ans, il faut ne pas dépasser 70 ans. Quand on y rentre, cela veut dire qu’on peut être Président jusqu’à 75 ans».
«Il est temps que les équipes qui doivent arriver au pouvoir y viennent plus jeunes»
Aussi, soutient-il, «nous avons aujourd’hui 5% de Sénégalais qui ont plus de 60 ans. Je pense qu’il est temps de faire en sorte que les équipes qui doivent arriver au pouvoir y viennent plus jeunes. Il faut faire en sorte que nous ayons des règles générales impersonnelles. Parce que vous ne pouvez pas dire à quelqu’un vous ne pouvez plus officier comme docteur à plus de 65 ans, vous devez sortir de l’administration à 65 ans, et puis à 75 ans, vous dites je continue à diriger le pays».
Pour Mamadou Lamine Loum, il y a un problème à ce niveau. «5% je vous laisse ce chiffre», a-t-il lancé avant de souligner que, «cela vous donne une idée que même en 2050 nous serons plus de 9% à avoir plus de 60 ans et la classe d’âge des gens de 15 ans à 60 ans passera de 50 à 60 et quelques pour cents. Il faut aujourd’hui qu’on y retrouve quelqu’un de ce prototype pour diriger les affaires et il faut également là aussi qu’on arrête de juger par rapport à l’âge d’un tel ou d’un autre. Personne n’est
sorti de la cuisse de Jupiter pour occuper le devant de la scène».
Rappelant que la «question de l’âge est une vieille question», il ajoute : «Si vous vous reportez à l’histoire du Sénégal, c’est une question qui existe depuis qu’on a rédigé cet âge plancher». Pour M. Loum, «d’ici 2050, cela fera 35 ans et si on s’arrête à la règle des deux mandats, on aura 3 Sénégalais sur le million 500 000 foyers ou les 14 millions de Sénégalais qui auront l’honneur de diriger la République. N’ergotons pas sur l’âge de 70 ans, c’est de peu d’importance».
Plus de Président personne morale de son de parti
Le vice-président de la Cnri a abordé également la question des partis politiques en persistant que le président de la République ne doit plus être la personne morale de son parti. «Si vous êtes partisan de la séparation des pouvoirs, vous ne pouvez pas avoir une séparation réelle des pouvoirs avec un président
à qui on demande de se lever, d’être le champion de l’unité nationale, de l’intégrité du territoire, etc. et qui doit en même temps s’occuper des questions de son parti et des questions de l’Assemblée nationale, des problèmes de députés, de problèmes de postes.
Si vous voulez avoir un parti qui s’émancipe de son chef, maintenant que les dirigeants sont nommés à durée déterminée, et que dans ce parti émergent d’autres compétences qui, demain, vont prendre la relève, parce qu’au bout de 10 ans ou maximum vous avez un changement, il faut que les partis apprennent à s’émanciper de leur chef, à être des officines de production dans l’offre politique», a défendu M. Loum, avant de préciser qu’«on n’a pas demandé au président de la République de démissionner de son parti.
On lui demande de ne plus occuper la tête». Toutefois, Mamadou Lamine Loum de préciser que la Cnri propose juste que le Président de la République ne soit «pas personne morale» de son parti, mais il en reste membre. «Si demain il y a un problème et qu’on doit dissoudre le parti ou vous sanctionner,
il y aura problème». «La loi sur les partis politiques, si on l’applique, je ne suis pas sûr qu’il y aura un parti qui ne serait pas dissout, si on reste dans l’application stricte des règles qui sont prévues dedans», a asséné M. Loum pour relever le fait que les partis politiques au Sénégal ne respectent nullement
la loi.
«La loi sur les partis politiques, si on l’applique, il n’y aura pas un parti qui ne serait pas dissout»
«Est–ce qu’il serait bon que celui à qui nous avons confié nos destinées et qui sera celui qui sera appelé en responsabilité à trancher, puisse être partie prenante ?», s’est-il aussi interrogé avant de clamer : «Nous avons fait preuve de réalisme, nous avons proposé justement que pour tout ce qui concerne les
partis politiques, pas seulement pour le chef de l’Etat, mais également les autres partis, que la mise en conformité avec les règles qui existeraient et les règles anciennes, se ferait à la fin du mandat actuellement».
«C’est une prise d’effet différée dans le temps encore jusqu’en 2017 et d’ici là nous pensons que largement le président aura les moyens de trouver un remplaçant dans son parti, de trouver celui qui l’aidera à gérer son parti jusqu’à ce qu’il termine son mandat», conseille-t-il.