SENEGAL-MALI... ET ÇA RECOMMENCE

Les préliminaires sont toujours les mêmes, quand l’équipe nationale est de sortie. Comme au temps des vieilles querelles autour des bornes-fontaines, les mêmes rengaines appellent les mêmes réparties.
Alors que se profile Sénégal-Mali pour le 5 mars à Paris, le disque rayé est de nouveau sur la platine. A un mois de ce rendez-vous, on n’est pas dans les débats techniques et les perspectives d’évolution des «Lions». Il faudra sans doute devoir d’abord évacuer un débat plus terre-à-terre, plus vénal. Et l’environnement médiatique, ces prochains jours, pourrait être pollué par les histoires d’argent. On va mégoter, ergoter comme autour d’un étal de vendeur de poissons, pour voir combien «allonger» pour les «Lions», en direction de cette prochaine date-Fifa.
Sauf agréable surprise, on s’entendra dire que le ministère n’a pas (assez) d’argent. Que mars arrive trop tôt pour que le budget, même si on en connaît les grandes et les petites lignes, soit en place. Qu’il y a peu d’espoir à nourrir du côté du Trésor public, où les fonds répondent actuellement à des urgences et à des priorités plus sérieuses. Que l’arbitrage budgétaire pour les compétitions internationales n’étant pas encore effectué, il peut être risqué d’y aller au pif. Car quand on avance devant du vide, l’élémentaire prudence revient à éviter de se casser l’appendice nasal.
Du côté de la Fédération sénégalaise de football, la stratégie de conquête des fonds est aussi éculée. Les charges identifiées, les besoins estimés, on vient taper à la porte de l’autorité. Qu’importe si un jour on a voulu jeter le ministre dans une piscine tout habillé, en boubou et en babouches, c’est dans le besoin qu’on reconnaît ses «amis».
Cette fois, la quête porterait sur 70 millions de francs. Cela fait la moitié des 150 millions que coûte, en moyenne, une sortie des «Lions». Mais puisqu’avec la partie adverse on est entre gens de commune indigence, on se partage les charges.
Si aucun bruit de fond (de fonds, plutôt) ne monte du côté de Bamako, qu’on ait aussi, ici, la grandeur de ne pas entrer dans une logique d’épicier. Traitant avec un pays étranglé par l’effort de guerre, on aurait même dû ne pas chercher à couper les cheveux en quatre. Encore que les nécessiteux ne sont peut-être pas du côté qu’on croit. Notamment quand il s’agit de foot.
Rayon prestige et donc ce qu’il en coûte, les Maliens ont été servis plus qu’on ne peut en rêver dans les conditions d’évolution du football sénégalais. On peut chercher des équivalences au sommet, entre «Lions» et «Aigles», mais la régularité des clubs maliens dans le carré d’excellence des compétitions africaines est de loin supérieure. Ce n’est pas le top africain, mais il y a des indicateurs qui forcent le respect.
Par-delà cette parenthèse, les exigences qui entourent ce Sénégal-Mali du 5 mars prochain tiennent au fait que ce match est fort utile. Il ne s’agit pas de marquer une date, mais d’engager un processus.
Cette rencontre pose le premier repère de l’an 2 de Giresse, année de la rupture ou de la continuité. Elle s’ouvre sur le véritable objectif qui fixe le contrat du sélectionneur national, à savoir une qualification à la Can-2015. Après le dérivatif qu’a pu constituer la quête d’une qualification pour le Mondial, la quête la plus urgente est là.
Ce match survient aussi après une errance de 12 mois où le sélectionneur national, perdu dans plusieurs culs-de-sac, s’est enfin réveillé sur les hommes qui semblent aptes à porter le jeu et à s’exprimer par le talent et par l’engagement. C’est un match qui jette une lumière en direction des qualifications pour la Can qui démarrent en septembre prochain.
On peut rester dans la petite misère qui porte à préparer et à engager les équipes nationales avec des bouts de ficelle. Ce serait trahir les pulsions positives dégagées après le nul de Casablanca contre la Côte d’Ivoire. Apprêter Léopold Senghor pour la prochaine date Fifa du mois d’août et pour les qualifications à la Can devient un investissement rentable si la dynamique positive reste maintenue dans la «Tanière». Cela repose sur une valorisation de l’environnement, élément indispensable à la performance.
Le dernier match de Casablanca a dopé les envies. Il ne faut pas que ce pouvoir attractif s’étiole. Le standard auquel on attend Giresse et les «Lions» a atteint une hauteur qui ne souffre pas non plus de marchandage de bas niveau. I faut que ce Sénégal-Mali reste dans le juste prix. Et on sait bien ce qu’est le prix du juste dans la quête de performance.