« 54 % des prostituées œuvrant dans la capitale sénégalaise ont été étudiantes ou élèves (…) Pour les élèves, elles ont été victimes de viols, suivis de grossesses. Pour les étudiantes, grossesses non-désirées nées d’une relation adultérine », voici ce qu’on peut lire dans un article publié par le site d’informations sénégalais Senego.
C’est un « mouvement qui prône la défense et la lutte contre les violences faites aux femmes », renseigne sa page Facebook.
D’où vient cette statistique ?
Africa Check est entré en contact avec Ismail Kamby qui affirme avoir mené avec ses collaborateurs une étude sur la prostitution au Sénégal.
« Nous l’avons réalisée (l’étude) avec un cabinet sur un échantillon de 112 anciennes étudiantes et 98 anciennes élèves », explique-t-il sans donner plus de détails sur comment l’étude a été menée.
Sur l’échantillonnage, M. Kamby précise que les personnes interrogées « sont des prostituées, et parmi les prostituées il y avait d’anciennes étudiantes et élèves ».
L’étude n’est pas encore finalisée
Nous lui avons demandé si l’étude était disponible au public et aux médias.
« Non pas encore », nous a-t-il répondu. « C’est une partie de l’étude qui ne concerne que la région de Dakar qui a été publiée. Nous n’en avons pas encore fini », répond M. Kamby qui ne nous a pas fait parvenir la partie de l’étude portant sur Dakar.
Pour la date de finalisation de l’étude le coordonnateur de « Touche pas à ma sœur » répond ne pas savoir « d’autant plus que ce sera à l’échelle nationale ».
Que disent les autres données disponibles ?
L’Agence nationale de la statistique et de la démographie, ANSD, n’a aucune donnée récente sur la prostitution au Sénégal.
Moise Gning, documentaliste à l’ANSD a fait savoir à Africa Check que la structure ne dispose pas de statistiques actuelles sur la prostitution à Dakar et au Sénégal. Il dit que l’agence avait réalisé une étude sur ce sujet dans les années 80 mais les résultats ont été retirés de la base de données car ils sont aujourd’hui obsolètes et non utilisables.
A Dakar, le service d’hygiène sociale de l’Institut d’Hygiène Sociale de Médina (IHS) est chargé de répertorier les prostituées dans un fichier national. Il s’agit, précisément, des travailleuses du sexe légalement reconnues comme exerçant le métier de prostitution.
« L’expérience que nous avons infirme cette production-là (le pourcentage 54 %). Ça n’exprime pas la réalité des faits que nous avons ici », souligne Dr Ibrahima Traoré, médecin généraliste à l’IHS.
« On a une idée sur celles (les prostituées) qui viennent s’inscrire au fichier. Mais cela n’a rien à voir avec celles qui le font (se prostituent) et qui ne viennent pas s’inscrire ».
Dr Traoré indique également que les prostituées qui viennent s’inscrire et qui détiennent un carnet de santé, représentent « au moins 90 % d’entre elles (qui) n’ont pas fait l’école ».
« La plupart des gens qui viennent s’inscrire ici c’est vraiment des gens qui n’ont pas fait l’école. 90 à 95 % d’entre elles : (soit) elles sont illettrées, (soit) elles sont allées jusqu’au CM2. On a peut-être 1 ou 2 % qui ont fait des études au-delà du Brevet de fin d’études moyennes (BFEM). 0,7 ou 1 % ont fait l’université ».
Dr Traoré dit que ces statistiques sont basées sur le fichier sanitaire des travailleurs du sexe. Toutefois nous n’avons pas pu consulter ce fichier parce que le médecin nous a indiqué qu’il s’agit de données sensibles.
Enda Santé ne peut confirmer le chiffre 54 % non plus
Ibrahima Ba, chargé du volet suivi et évaluation d’Enda/Santé a indiqué à Africa Check que l’organisation n’est pas en mesure de corroborer ni de se prononcer amplement sur la statistique de 54 % et qu’elle ne détient aucune étude sur le sujet non plus.
« Nous ne pouvons pas confirmer ce pourcentage et nous ne détenons aucune information allant dans ce sens », a déclaré Ibrahima Ba.
Conclusion : Pas de preuve que 54 % des prostituées à Dakar ont été étudiantes ou élèves
Ismail Kamby, coordonnateur du mouvement « Touche pas à ma sœur », a affirmé que 54 % des prostituées à Dakar ont été étudiantes ou élèves.
Contacté par Africa Check, il a précisé que cette donnée est tirée d’une étude pas encore finalisée.
Les données de l’Institut d’Hygiène Sociale (IHS) de Dakar, structure habilitée à répertorier les prostituées dans un fichier national, ne confirment pas cette donnée.
Selon le Dr Ibrahima Traoré, médecin généraliste à l’IHS, la majorité des travailleuses du sexe répertoriées par l’institut n’ont pas fait d’études ou se sont arrêtées à l’école primaire.
MACKY À PARIS POUR LUTTER CONTRE L'EXTRÉMISME SUR INTERNET
Le président quitte Dakar ce 14 mai 2019 pour prendre part, le 15 mai à l’Elysée, à cette réunion - Outre le Sénégal, l'Allemagne, l'Australie, le Canada, entre autres y prennent part, de même que les géants du net - COMMUNIQUÉ DE LA PRÉSIDENCE
SenePlus publie ci-dessous, le communiqué de la présidence, daté du 13 mai 2019, relatif à la participation de Macky Sall, à une réunion internationale sur l'extrémisme violent, à Paris.
"Sur invitation conjointe de Son Excellence Monsieur Emmanuel Macron, président de la République Française et de Son Excellence Madame Jacinda Ardern, Premier Ministre de la Nouvelle-Zélande, Son Excellence Monsieur le président Macky Sall quitte Dakar ce 14 mai 2019 pour prendre part, le 15 mai à l’Elysée, à une réunion internationale de haut niveau consacrée à la lutte contre les contenus en ligne à caractère terroriste ou relevant de l’extrémise violent.
Outre le Sénégal, l’Union Européenne et les pays suivants sont également invités à cette rencontre : Allemagne, Australie, Canada, Grande Bretagne, Indonésie, Irlande, Japon, Jordanie et Norvège ; de même que de grands groupes comme Amazon, Apple, Dailymotion, Facebook, Google, Microsoft, Mozilla Foundation, Snap, Twitter et You Tube.
Initiée par la Nouvelle-Zélande et la France, cette réunion de haut niveau fait suite aux attaques terroristes mortelles de Christchurch du 15 mars 2019 contre la communauté musulmane néo-zélandaise. Elle vise à sensibiliser le grand public et à mobiliser les pouvoirs publics et les grandes compagnies du secteur privé actives dans les réseaux sociaux, contre toutes les formes d’idéologies extrémistes et violentes.
La rencontre sera clôturée par l’adoption d’un Appel à l’action de Christchurch pour éradiquer le contenu terroriste et extrémiste en ligne.
Au cours de son séjour, le Chef de l’Etat prendra également part au Sommet Tech for Good, au Salon Vivatech et à la biennale d’architecture de Versailles.
Le retour du Chef de l’Etat est prévu le 18 mai 2019."
LIBERTÉ À SALIF, RÉPRESSION CONTRE MARIUS ET BARTH
EXCLUSIF SENEPLUS - Si l’on a arrêté Dias sur la base de deux chefs d’inculpation légers, que devrait-on faire à celui qui demande de créer des comités de résistance contre « l’envahisseur sénégalais » ?
Il y a quelques jours, Salif Sadio, le chef de l’aile combattante du mouvement des forces démocratiques de la Casamance (MFDC), avait lancé un communiqué pour revendiquer son droit à liberté d’expression telle que stipulée dans la déclaration universelle des droits de l’homme. En voici la teneur : « Suivant les accords de Rome du 22 février 2014 et 26 octobre 2017 dans le concours de négociation en cours entre le gouvernement du Sénégal et les forces démocratiques de la Casamance MFDC alors accord basé sur l'article 19 de la Déclaration universelle des droits de l’homme adoptée et proclamée par l'Assemblée générale des Nations Unies le 19 décembre 1948 stipulant ceci « tout individu a droit à la liberté d'opinion et d'expression ce qui implique le droit de ne pas être inquiété pour ses opinions et celui de chercher de recevoir et de répandre sans considération de frontière les informations et les idées par quelques moyens d'expression que ce soit. »Le Mouvement des forces démocratiques de la Casamance organise une rencontre Populaire le 27 avril 2019 à Koundjoughor pour informer les populations concernant le processus de négociation en cours. A cette occasion le mouvement des forces démocratiques de la Casamance invite les populations, les sympathisants du MFDC et tous ceux qui s'intéressent à la question, à venir massivement assister à cette rencontre. »
Dans ce communiqué qui en dit long sur les revendications indépendantistes, Salif Sadio ne fait point référence à l’Article 10 de la Constitution sénégalaise qui consacre la liberté d’expression. Dans sa démarche, le chef d’Attika est cohérent puisqu’il ne peut pas invoquer un tel article auquel lui et ses combattants ne croient point. Et par ce communiqué, il mettait en garde les autorités sénégalaises pour toute tentative d’empêchement, voire d’arrestation de ceux-là qui dirigeraient la rencontre de Koundjoughor. Méfiant, il s’est fait représenter par des émissaires dont certains sont avec des kalachnikovs en bandoulière quand Ousmane Diédhiou faisait son speech de 18 minutes. Rien de cette rencontre n’a concerné le processus de paix en Casamance. Il s’agissait plutôt d’une opération de communication et de propagande de leurs idées indépendantistes formulées à l’endroit des populations casamançaises. A entendre Ousmane Diédhiou, porte-parole de Salif Sadio lors de cette rencontre de Koundjoughor, le MFDC n’est pas dans une dynamique de négociation mais de revendication d’une souveraineté extorquée par les colonisateurs sénégalais : « Le MFDC s'est levé avec un seul objectif : celui de chasser le Sénégal envahisseur de la Casamance pour que vive une Casamance libre indépendante et souveraine. Il n’y a pas autre chose que de faciliter le départ du Sénégal envahisseur de la Casamance. Salif Sadio n'a pas d'autre préoccupation que de libérer le peuple casamançais de l'esclavage du Sénégal. L’indépendance de la Casamance est réelle, imprescriptible, non aliénable et non négociable. » En sus, Ousmane Diédhiou n’a pas été tendre avec feu le capitaine Mbaye Diagne qu’il considère comme un criminel avec le général Abdoulaye Dieng. Même le héros national du Sénégal, Lat Dior Ngoné Latyr Diop, qu’il considère comme un « vulgaire fuyard », en a pris pour son grade. Son opération de communication semble avoir bien réussi puisque l’assistance visiblement séduite ne manquait, par intermittences, d’applaudir son discours incendiaire contestataire. Mais l’envoyé spécial de Salif Sadio s’est exprimé au nom de la liberté d’expression sur une partie du territoire que l’Etat sénégalais considère comme partie intégrante du Sénégal, il a violé les articles 5 et 10 de la Constitution sénégalais même s’il ne les reconnait pas. L’article 5 déclare : « Tout acte de discrimination raciale, ethnique ou religieuse, de même que toute propagande régionaliste, pouvant porter atteinte à la sécurité intérieure de l’Etat ou à l’intégrité du territoire de la République, sont punis par la loi ». Et l’article 10 complète : « Chacun a le droit d’exprimer et de diffuser librement ses opinions par la parole, la plume, l’image, la marche pacifique, pourvu que l’exercice de ses droits ne porte atteinte ni à l’honneur et à la considération d’autrui, ni à l’ordre public ». Cette intervention a porté atteinte à l’honneur de Mbaye Diagne mort en héros au Rwanda, au général-gouverneur Abdoulaye Dieng et à toute la communauté sénégalaise dont Lat-Dior est le héros national.
Malgré ces violations de la Constitution du Sénégal par un « étranger », cela n’a pas empêché ce même Etat sénégalais d’accorder la liberté à Salif Sadio d’organiser une autre rencontre le 4 mai à Thionck-Essyl. L’émissaire, porte-parole du commandant en chef des irrédentistes casamançais, Abdoulaye Mané, s’est inscrit dans le même sillage qu’Ousmane Diédhiou. Son discours est un justificatif de la non-sénégalité de la Casamance. A cet effet, il a déclaré : « Dans toute lutte de libération nationale, il y a des traitres qui, pour leurs propres intérêts, s'allient à l'ennemi pour tuer leur propre peuple. Ils sont nombreux ces Casamançais, ces vampires, alliés du Sénégal envahisseur pour maintenir la Casamance dans l'esclavage ». Ainsi au nom de la liberté d’expression, des hommes revendiquant leur casamancité exclusive, se sont permis de tenir des discours désintégrateurs qui, si l’on se fie à la charte fondamentale du Sénégal, remettent en cause l’intégrité nationale.
Une justice à géométrie variable
Si nous avons évoqué ces rencontres, ce n’est pas pour revenir sur le problème du Sud du Sénégal et disserter sur la sénégalité ou la non-sénégalité de la Casamance, mais c’est pour dénoncer cette justice à deux vitesses qui s’applique au Sénégal selon la tête du manifestant. Il est loisible à Salif Sadio et à ses troupes qui pensent que la Casamance n’est pas sénégalaise d’user de leurs documents, leur propagande et même leurs armes pour défendre leurs convictions. Mais cela ne doit pas pousser les autorités sénégalaises à adopter une attitude passive ou pleutre qui laisserait croire que ce qui est toléré au sud est sévèrement réprimé à l’ouest.
Après le procès de Khalifa Sall, Barthélemy Dias a fait six mois en prison « pour outrage à magistrats et appel à l'insurrection ». Si l’on a arrêté la maire de Mermoz sur la base de ces deux chefs d’inculpation légers, que devrait-on faire à l’endroit de celui qui a remis en cause la souveraineté du Sénégal en déclarant publiquement « de chasser le Sénégal envahisseur de la Casamance pour que vive une Casamance libre indépendante et souveraine », à celui qui demande aux populations casamançaises de créer des comités locaux de résistance du MFDC pour s’insurger contre « l’envahisseur sénégalais » ? L’outrage à magistrat est-il plus grave que le discrédit jeté sur nos militaires morts et notre héros national, symbole de la résistance sénégalaise contre l’occupation coloniale ?
La dernière injustice en date est l’arrestation sauvage des activistes Guy Marius Sagna, Abdourahmane Sow, Babacar Diop et Ousmane Ndiaye qui, devant l’Assemblée nationale, manifestaient leur opposition au projet de loi supprimant le poste de Premier ministre. Pourtant sans kalachnikov, ils ont voulu simplement jouir d’un droit constitutionnel qu’un pseudo arrêt « Ousmane Ngom » leur interdit illégalement. On les arrête pour non-respect d'un « acte administratif de l'autorité préfectorale », « trouble à l'ordre public » et « tentative de jeter du discrédit sur une institution de la République ». Ainsi ce que l’on permet à Salif Sadio, on le refuse le 1/5 à Barthélémy Dias, à Guy Marius Sagna et Cie.
Et que dire de ceux qui remettent publiquement en cause l’intégrité du territoire national, de ceux qui déclarent que le Sénégal occupe illégalement la Casamance, de ceux qui insultent la mémoire de nos soldats, de ceux qui déclarent urbi et orbi, armes à la main, qu’ils vont chasser « l’envahisseur de la Casamance » ? Au Sénégal, nous ne sommes nullement égaux devant la loi. La répression, c’est pour les légalistes, et l’impunité pour les contrevenants à la loi sénégalaise. On réprime férocement ceux qui respectent la légalité constitutionnelle, et l’on pouponne couardement ceux qui remettent en cause l’intégrité territoriale et discréditent ses héros. Nous n’osons pas croire que Machiavel ait raison en écrivant que « les bonnes armes font les bonnes lois ».
La Mauritanie, dernier pays à abolir l’esclavage en 1981, ce ne sera qu’en 2007 qu’une loi criminalisant l’esclavage verra le jour. Près de 50 000 esclaves sont dans ce pays qui a mis plus d’activistes en prison que ceux qui se livrent à l’esclavage
Dernier pays à abolir l’esclavage en 1981, ce ne sera qu’en 2007 qu’une loi criminalisant l’esclavage verra le jour. Près de 50 000 esclaves sont dans ce pays qui a mis plus d’activistes en prison que ceux qui se livrent à l’esclavage. La Mauritanie a traversé une paralysie politique et le gouvernement en a profité pour négliger l’application de cette loi.
Le gouvernement ne coopère pas avec la société civile, ne lance pas des campagnes de sensibilisation, ni ne fournit une assistance juridique ou financière aux victimes. La relation esclave-maître est paternaliste, le maître fournit la nourriture, les vêtements et l’abri contre un travail non rémunéré dans de très mauvaises conditions. Ils travaillent souvent comme bergers, gardes ou domestiques.
L’esclavage au 21e siècle
L’esclavage en Mauritanie est présent aussi bien dans les communautés afro-mauritaniennes à cause du système de castes, que dans les communautés arabes. Il ne faut pas tomber dans le piège de penser que l’esclavage en Mauritanie est exclusivement lié à des considérations raciales. On assiste à l’esclavage traditionnel comme le ligotage, mais aussi à l’esclavage avec des variantes plus modernes telles que l’exploitation des domestiques.
Avec une croissance de 3,6 %, la Mauritanie a un taux de pauvreté de près de 35 %. La Mauritanie a aussi un taux de chômage de 31 % et près de la moitié de la population n’a pas accès à l’eau potable, donc un pays très pauvre. Ces esclaves font partie de ces pauvres, qui sont analphabètes, qui n’ont nulle part où aller et qui sont sans ressources financières. Ils sont exploités et maltraités, les femmes sont exploitées sexuellement et les enfants ne reçoivent pas d’éducation. Pays essentiellement désertique et disposant seulement de moins de 1 % de terres arables, certains esclaves sont utilisés pour travailler la terre en échange d’une part de la récolte. Cependant, les maîtres peuvent décider de les chasser sans explication et de ne pas leur donner leur part de la récolte ni les héberger.
Les autorités vivant dans le déni, disent que les esclaves sont libres de partir, cependant, ils ne veulent pas accepter que les séquelles de l’esclavage qu’ils vivent soient les raisons pour lesquelles ils ne partent pas. Certains de ces esclaves ignorent leur droit et certains ne savent pas qu’il y a une loi criminalisant l’esclavage. Ceux qui connaissent cette loi sont illettrés et ne savent pas comment s’y prendre dans le système judiciaire. L’assistance juridique étant inexistante, il faut compter sur les ONG pour leur fournir un avocat et les aider dans les procédures légales. Le gouvernement n’a pas créé des abris pour les réinsérer socialement, ni de fonds social dans ce sens, donc ils sont aussi complices de ce fléau, qui les arrange aussi, car ils en bénéficient.
La loi de 2007 a été passée comme mesure d’apaisement, mais cette loi n’est pas érigée pour poursuivre les maîtres d’esclaves. Dans les rares cas où des cas d’esclavage sont traduits en justice, les juges, qui sont exclusivement des Maures blancs, recommandent un accord à l’amiable. Les autorités religieuses, qui sont souvent bien vues dans un pays musulman, nient l’existence de l’esclavage en Mauritanie. La raison est qu’eux-mêmes sont propriétaires d’esclaves, pour le pâturage de leur bétail entre autres.
Et maintenant ?
Il faut non seulement créer des programmes pour soutenir les groupes sous-représentés comme les Afro-Mauritaniens, qui sont souvent rejetés par les Maures blancs. Il faut ensuite encourager le gouvernement à appliquer la loi de 2007 criminalisant l’esclavage. Il faut que le gouvernement encourage des poursuites très médiatisées pour décourager les gens de continuer ces pratiques qui affectent les minorités.
Il faut aussi des études indépendantes pour quantifier l’impact social de l’esclavage. Les Maures parlent des conséquences de l’esclavage et non de l’esclavage tandis que les minorités décrient l’esclavage. Il faut que cette étude démontre si la situation est un problème de domination raciale ou s’il s’agit de problème de pauvreté. Certaines informations disent que les Afro-Mauritaniens ont des esclaves de même couleur, donc dans ce cas, il ne s’agirait pas d’esclavage basé sur la race, mais plutôt sur les moyens financiers. Pour faciliter l’étude, il faut une étude globale qui traite la lutte contre la traite des hommes, la défense des droits de l’homme.
Il est impératif que le gouvernement et la société civile travaillent ensemble main dans la main. Pour éradiquer ce fléau, il faut une coordination entre le gouvernement et la société civile. Ils devront élaborer une stratégie avec un suivi et des programmes de surveillance pour une réussite.
Comme on le disait en haut, certains esclaves ne sont pas au courant de quelconque loi qui criminalise l’esclavage, donc il est nécessaire de mener des campagnes de sensibilisation auprès des esclaves et de la population en général. Cette sensibilisation peut aussi se faire avec les chefs religieux locaux pour qu’ils puissent faire passer cette information.
Il faut que le gouvernement prenne ses responsabilités en offrant l’assistance juridique aux esclaves et diversifier les juges et autorités locales. Il faut aussi que ces derniers soient formés à l’implication de la loi criminalisant l’esclavage. La police et la gendarmerie doivent être formées pour pouvoir enquêter sur l’esclavage et dresser un procès-verbal très concis pour le tribunal. Il faudra enfin et surtout former des travailleurs sociaux spécialisés pour pouvoir aider la police à mener une enquête exhaustive. Ils auront aussi pour but d’assister les victimes en leur donnant les abris, la sécurité et l’aide au regroupement familial. Le gouvernement devra prendre ses responsabilités en créant des abris et en imposant la scolarisation des enfants.
Enfin
Il faut que les autorités acceptent qu’il existe un problème d’esclavage d’abord et arrêter de vivre dans le déni. Une fois qu’ils acceptent le fait, il faudra travailler avec la société civile et les ONG pour éradiquer ce problème. Il est nécessaire que le monde fasse quelque chose fasse à ce fléau au lieu de juste détourner le regard. Les Etats-Unis ont exclu la Mauritanie de l’Agoa pendant que l’Afrique et l’Europe restent somnolentes face à cette tragédie. Des procès commencent à voir le jour, mais tant qu’il n’y a pas de pression sur ce pays, cette pratique ne sera jamais éradiquée. Il faut imposer des sanctions et déclencher des discussions et négociations pour que la Mauritanie soit un pays où tous ses citoyens sont libres et égaux.
Durant la mise en œuvre de l’accord de partenariat entre la Mauritanie et la CEDEAO, les sujets ne doivent pas juste être d’ordre économique, politique et sécuritaire, il faut que nous exercions notre pouvoir pour que la Mauritanie reconnaisse et abolisse l’esclavage. La France, qui est deuxième fournisseur de la Mauritanie après la Chine, est aussi en train de fermer les yeux face à ce désastre pour préserver sa balance commerciale excédentaire de plus de 100 millions d’euros.
Nelson Mandela disait que « Personne n’est né avec la haine pour l’autre du fait de la couleur de sa peau, ou de son origine, ou de sa religion. Les gens doivent avoir appris à haïr, et s’ils peuvent apprendre à haïr, ils peuvent apprendre à aimer car l’amour jaillit plus naturellement du cœur humain que son opposé. »
PAR Fatimatou Zahra DIOP
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POUR FADILOU DIOP !
Ce mardi 14 mai 2019, mon père aurait fêté ses cent ans s’il avait vécu ! Galass comme nous aimions affectueusement l’appeler, était un homme bien ; un homme de foi, d’honneur et de conviction - Je suis fière d’être sa fille, et il me manque tant
Ce mardi 14 mai 2019, mon père aurait fêté ses cent ans s’il avait vécu !
Beaucoup ont magnifié l’homme de foi, le fervent musulman, l’homme épris de justice, l’homme politique, l’avocat défenseur des faibles et des opprimés, etc.
Aujourd’hui, ce qui me vient en mémoire et que je voudrais célébrer, c’est le père extraordinaire qu’il a été ! Un père qui chérissait ses enfants au-dessus de tout, tout en étant intransigeant sur leur éducation. Il nous a inculqués les valeurs de droiture et d’honnêteté, le respect de l’autre qu’elle que soit sa condition, le culte du travail et de l’effort, sans jamais lever la main sur nous.
Je me souviens encore de sa voix me récitant chaque matin, moi sa fille, qu’il avait nommée Zahra (« la fleur »), ces vers de Ronsard :
« Mignonne, allons voir si la rose
Qui ce matin avait déclose
Sa robe de pourpre au soleil,
A point perdu cette vesprée
Les plis de sa robe pourprée,
Et son teint au vôtre pareil »
Je veux célébrer ce père féministe sans l’admettre, qui n’a jamais fait de différence entre moi et mes quatre frères. Ainsi, il m’emmenait chez le coiffeur me couper les cheveux en même temps que mes frères tous les 15 jours parce que je ne supportai ni le peigne, ni les tresses. Il a toujours encouragé chez moi le dépassement de soi pour être indépendante. Les restrictions qu’ils nous imposait dans nos sorties étaient valables pour tous, filles et garçons. Ce père a concilié féminisme et conviction religieuse. Ainsi, fervent musulman, il n’en était pas moins un monogame convaincu.
Je suis fière d’être sa fille, et il me manque tant. En ces temps troubles, où les repères deviennent flous et les fondations vacillent si facilement, heureusement que je garde les valeurs qu’il m’a laissées. Elles me servent de bouclier au quotidien pour affronter les vicissitudes de la vie.
Fadilou Diop, Galass comme nous aimions affectueusement l’appeler, était un homme bien ; un homme de foi, d’honneur et de conviction. Il fut un époux aimant, un père tendre, un militant acharné et un avocat passionné.
Je prie pour lui et sollicite de la famille, des amis et proches des prières pour que le paradis soit sa dernière demeure.
PAR Cheikh Thiam
LES TROIS DÉFIS D'AIR SÉNÉGAL
Macky Sall va voyager ce 14 mai à bord d'un avion d'Air Sénégal SA pour rallier Paris - C'est un acte qui peut-être analysé comme un appel à tous les sénégalais à privilégier la compagnie aérienne nationale, un beau pari sur l'avenir
Le president Macky Sall va voyager ce 14 mai à 9H, à bord d'un avion d'Air Sénégal SA, pour rallier Paris. Cest déjà perçu par certains comme un acte inédit dans la vie protocolaire d'un président de la République au Sénégal.
Mais, au-delà, c'est un acte qui peut-être analysé comme un appel à tous les sénégalais à privilégier la compagnie aérienne nationale, un beau pari sur l'avenir, pari que notre pays peut gagner.
Apres les échecs d'Air Sénégal International (ASI) et de Sénégal Airlines, deux initiatives lancées après 2000, il n'y a plus de place pour l'échec. En effet, il est possible de faire d'Air Sénégal SA une compagnie rentable et un modèle de reussite.
Pour atteindre cet objectif, 3 défis sont à relever :
1/ une forte volonté politique pour soutenir Air Senegal SA. Le soutien financier est tout aussi important car l'économie du transport aérien imposent des besoins financiers colossaux que les banques ne peuvent porter ;
2/ un management de qualité avec des hommes et des femmes sélectionnés sur la base des compétences, de la rigueur et de l'engagement. Les ressources humaines de la ccompagnie doivent être à la hauteur des lourds enjeux ;
3/ un engagement patriotique des Sénégalais pour soutenir le pavillon national. Pour ce faire, un signal fort est attendu du President de la République. Il doit imposer la préférence nationale afin que toutes les personnalités porteuses d'une charge publique (ministres, DG, Députés, etc.) voyagent exclusivement par Air Sénégal SA sur les destinations couvertes par la compagnie. C'est un geste minimal pour doper le patriotisme et le consommer local.
Mais, il faudra cependant éviter le syndrome Air Afrique qui transportait les personnalités des pays membres et leurs familles aux frais de la princesse. Les dettes ainsi accumulées ont en partie causé la faillite de ce fleuron régional.
L'ambassadeur de Turquie, en poste au Sénégal en 2010, me confiait que le succès de Turkish Airways, créé en 1933, a reposé sur 3 défis similaires. Cest un exemple de réussite qui doit inspirer. Turkish Airways est devenu une référence dans le secteur du transport aérien.
Une autre expérience venue d'Afrique de l'est peut servir pour le benchmark. Il s'agit d'Éthiopian Airlines qui est aussi un beau modèle de réussite de compagnie aérienne africaine.
EN 17 ANS, ON N'A EU AUCUN INVESTISSEUR"
La styliste Adama Paris, explique comment elle s'est lancée dans les affaires à la seule force de son travail, sans aucun prêt, ni le recours à un investisseur
Adama Paris, créatrice de mode et entrepreneuse sénégalaise, est à la tête de sa propre marque. Elle organise chaque année le Dakar Fashion Show et a créé la chaîne de télévision Fashion Africa.
La jeune styliste explique qu'elle s'est lancée dans les affaires depuis 17 ans, à la seule force de son travail, sans aucun prêt, ni le recours à un investisseur.
Son envie est d'ériger un pont entre les différents continents du monde.
Adama Paris répond aux questions de Nicolas Négoce.
par Achille Mbembe
LE TEMPS EST VENU DE CHOISIR
Quand historiquement, on dit 'Cameroun', de quoi s'agit-il ? La vérite est qu'il n'existe pas de "république" au Cameroun, en tous cas sous la tyrannie actuelle - Que le Cameroun disparaisse demain ne représentera aucune expérience exceptionnelle
La triple crise (humanitaire, politique et culturelle) à laquelle fait face le Cameroun nous oblige, une fois de plus, à réfléchir - l'urgence de la pensée, avait dit en son temps le Professeur Maurice KAMTO, aujourd'hui prisonnier du plus vieux des tyrans africains.
Mais aussi, la pensée non pas comme une perte de temps ou un refuge, mais en tant que forme spécifique et nécessaire de toute action.
Toute pensée critique commence par formuler des questions qui comptent.
Dans notre cas, la question est de savoir qu'est-ce que c'est que ce pays dont l'identité, paradoxalement, est de n'en avoir aucune, et à dessein ?
Un tel pays peut-il, au fond, se réclamer d'une république ?
Peut-on, en effet, se réclamer de manière convaincante de la forme "républicaine" en l'absence d'une mémoire et d'une conscience historique volontairement nourrie, entretenue et célébrée ?
Le "vide d'histoire" n'est-il pas propice à la tyrannie ?
Dans le cas camerounais, d'aucuns s'efforcent de combler ce vide quasi-ontologique en manufacturant de violentes fantaisies et en inventant des mythes.
L'un d'entre eux est le mythe de "la république une et indivisible" - une republique hypostasiee, sans aucun ancrage dans aucune histoire concrète, et que l'on agite comme un foulard sanglant pour apeurer les masses, intimider les opposants et promettre aux sécessionistes une guerre plus féroce encore que celle qui est d'orès et deja en cours, et qui à cause 1850 morts, plus de 174 villages rases, des centaines de captifs et prisonniers politiques, et la tentative de criminalisation et de décapitation d'une partie importante de l'opposition.
Fantaisie de république et république anhistorique et hypostasiee pourquoi ? Quand on s'arroge arbitrairement le droit et l'autorité de dire le dernier mot sur 'le Cameroun' (autorite imaginaire, à la vérité), quel type d'usurpation est-on en train de commettre, puisque le dernier mot sur qui nous sommes n'appartient qu'au seul peuple camerounais, pas à un individu, encore moins à une faction ?
Laissons-donc de côté les édits dogmatiques qui n'engagent que ceux qui les prononcent.
Revenons à la question. Quand, historiquement, on dit 'Cameroun', de quoi s'agit-il en vérité ?
D'abord d'une pure invention coloniale.
Tous les historiens le savent. Les Portugais qui visiterent nos cotes bien avant tous les autres Européens parlaient bel et bien d'une "Rivière des Crevettes" (Rio dos Camaroes).
Mais dans leur imaginaire, la "Riviere des Crevettes" n'était pas un Etat. Le terme ne s'est jamais référé à quelque nation que ce soit, du moins dans le sens moderne du terme.
"La Rivière des Crevettes" des explorateurs et commercants portugais était un simple accident géographique. Elle était habitée par des "peuplades inconnues", mais elle etait surtout connue pour sa population de crustaces. Ce n'était ni un concept, encore moins une idée.
Ce sont les Allemands qui, en 1884, tentent pour la première fois de donner vie et matérialité à cet accident en lui taillant un territoire, en le dotant de frontières, d'infrastructures et autres institutions, en en prenant possession dans le but de l'assujettir et de l'exploiter pour le bien de leurs compagnies commerciales et pour leur propre prestige parmi les nations.
Strictement parlant, le Kamerun moderne est donc une création germanique, le résultat de l'hubris (orgueil et sens de la demesure) de Nachtigal et de Bismarck, un assemblage de terroirs, une combinatoire de communautes qui, bien qu'ayant parfois entretenu entre elles des relations plus ou moins pérennes, participaient de faisceaux historiques multiples, sinon relativement distincts.
Si ancrage historique il doit y avoir pour que prospère un Etat moderne sur cet espace géographique taille par les Allemands, ampute et re-agence au gre des vicissitudes de la politique mondiale, ce doit nécessairement être un ancrage dans la multiplicité.
Seul un concept, une idée, permet de tenir la multiplicité. C'est ce que comprirent les pères de l'indépendance pour lesquels le nom 'Cameroun' renvoyait essentiellement à un projet - celui de se tenir debout par soi-même, le projet d'auto-détermination et le projet de la réunification.
Il est donc vrai qu'un Cameroun non-réunifié ne serait pas celui dont rêverent les grands nationalistes, ceux-la qui ont été engloutis dans le tombeau mémoriel devenu notre marque de fabrique, le lieu vide d'un Etat sans conscience historique.
Il faut répéter ces banalités afin de bien faire comprendre que contrairement à ce que prêchent les grands prêtres de la stagnation, ce pays n'a pas toujours existé. Et n'existera pas tant que ceux qui le gouvernent estiment qu'il n'a pas d'histoire, et que de toutes les facons, il faut remplacer l'histoire par des mythes.
Davantage encore, lorsque ce pays a existé, il ne l'a jamais été sous une forme unique, intangible et inamovible. Il a fait, à plusieurs reprises, l'objet de partitions, de découpages, de multiples démembrements et de remembrements.
Il n'y a qu'à considérer l'histoire de ses différentes frontières avec le Tchad, l'Oubangui-Chari, les pays de la Sangha-Ngoko, le Rio Muni et même le Gabon, pour ne pas parler du Cameroun occidental.
Il fallut, en 1961, poser séparement au Cameroun occidental et septentrional la question de savoir s'il voulait rejoindre l'entité anciennement dominee par la France ou le Nigeria.
Qu'est-ce qui, aujourd'hui, empêche de lui poser la question de savoir s'il veut toujours rester, ou si, anachronisme historique sans doute, il préfere se rattacher au Nigéria voisin puisque dans les conditions de la politique mondiale de l'époque, il n'était jamais envisagé qu'il deviendrait un Etat souverain, contrairement à la nouvelle mythologie inventée par les Ambazoniens ?
Il faut rappeler ces banalités pour bien faire comprendre que de "Cameroun", on ne peut en parler que comme une invention purement historique, et jamais comme une table de la loi tombée du ciel.
Il faut le rappeler pour dire qu'aucun Etat ni aucune nation ne sont voués à l'éternité. Cela n'existe pas.
Que le Cameroun disparaisse demain ne représentera aucune experience exceptionnelle. La perspective d'une telle disparition ne devrait theoriquement donner lieu à aucun état anxiogene. Encore moins à quelque chantage que ce soit, dont le but en dernier ressort est de légitimer la stagnation et l'immobilisme.
Ce que l'histoire requiert de nous, c'est d'oser, et non pas de succomber à l'anxiété. Et si les choses ne viennent pas vers nous, de demeurer stoiques et de reprendre a zero.
Les Etats et les nations naissent et meurent, ou se donnent la mort, lorsqu'ils ne servent plus à rien, arrêtent de créer. Ce qui les anime, c'est-a-dire ce qui leur insuffle vie, c'est un esprit, un concept, une idée, un projet.
Se perpetuer au pouvoir n'est pas un projet. Encore moins une idée et un concept. C'est rendre un culte à la stérilité.
Pour qui ne crée strictement rien, durer pour durer - aspiration apparemment suprême du satrape camerounais - est peut-être un gage de réussite d'une tyrannie.
Ce n'est en rien le meilleur gage de survie d'un Etat moderne. Car les nations modernes sont celles qui ont domestique le genie du renouvellement et de la transformation permanente.
Il est donc curieux d'entendre les apôtres de l'immobilisme et de la stagnation nous enjoindre de célébrer en choeur le culte de la stérilité.
Il est troublant de les voir ériger des statues non à la memoire de ceux qui se sont effectivement battus pour décoloniser l'idée même du Cameroun, mais a on ne sait quelle mystique républicaine au nom de laquelle ils sont prêts à mener une guerre plus feroce encore dans le Cameroun occidental, et au nom de laquelle ils appellent ouvertement a l'élimination de ceux qui exigent le changement de la forme de l'Etat.
Comme les adorateurs du veau d'or de la Bible, ils se prosternent devant un artefact colonial, un instrument originellement concu pour les asservir, et qu'ils utilisent aujourd'hui pour tuer leurs frères et emprisonner ceux qui refusent de courber l'échine.
Ou est donc passé l'esprit critique et le sens historique ?
La vérité est qu'il n'existe pas de "république" au Cameroun, en tous cas sous la tyrannie actuelle.
Dans son sens moderne, l'idée républicaine ne se conjugue pas avec la tyrannie.
Pour parler comme nos tautologues, "une tyrannie est une tyrannie". Elle n'est pas une "république".
Ayons le courage d'accoler ce nom à cette machine à tuer, née de la colonisation, et que près de 40 ans d'impunité et de huis-clos autoritaire ont permis d'aguerrir.
Il n'y a de "république" qu'en tant que lieu de liberté - liberté d'entrer, mais aussi liberté de sortir.
Il n'y a de république que la ou est possible la rencontre entre un sujet une offre de liberté.
Cette rencontre a lieu ou elle n'a pas lieu.
Apres près de 40 ans de tyrannie, nous sommes en très bonne position pour constater qu'elle n'a pas eu lieu, et qu'il est temps de passer à autre chose.
Afin de nous empêcher de passer à autre chose, les apôtres de la stagnation font comme si "la république" était une realité métaphysique et comme si l'on entrait en république comme l'on entre dans un culte.
Ce faisant, ils ne produisent pas des analyses, mais des mythes virulents, du genre qui, en près de 40 ans, ont transformé le Cameroun en une violente poubelle.
Une véritable république est justement cette forme de l'Etat au sein duquel l'expérience n'est pas seulement possible, mais encourage ; ou des singularités emergent ; ou l'altération à sa place.
Il n'existe au monde aucun Etat intouchable par définition. L'heure d'expérimenter a sonne. Cela prendra du temps, mais une nouvelle étape de la lutte pour l'émancipation commence, et rien n'arrêtera désormais ce nouveau cours.
par Madiambal Diagne
DANS CHAQUE NICHE, IL Y A UN CHIEN QUI MORD
Le gouvernement ne saurait être crédible si des responsables publics continuent de se livrer, avec une certaine arrogance, à des libéralités ou des dépenses somptuaires
Nous sommes tenté d’adresser au Président Macky Sall la même mise en garde que le député français, Gilles Carrez, président de la Commission des finances de l’Assemblée nationale, avait adressée au Président François Hollande, à savoir : «Dans chaque niche il y a un chien qui mord.» En effet, le nouveau mandat du Président Sall s’inscrit dans une dynamique qui risque de heurter bien des situations économiques et sociales et des mesures vont fatalement impacter avec dureté la vie des citoyens. Le Sénégal semble rattrapé par la réalité de sa situation économique, au point de ne plus pouvoir continuer à donner l’impression de faire comme dans un pays riche, un pays aux ressources financières intarissables et qui se permettrait certaines largesses sociales. De nombreuses situations vont devoir être remises en cause.
L’amère pilule de refuser toute hausse des salaires des fonctionnaires
Le Président Macky Sall, un brin contrarié par les revendications des syndicalistes, avait voulu, le jour de la dernière fête du travail, tenir un langage de franchise, de vérité aux syndicalistes, leur indiquant sans ambages qu’il ne saurait plus être question d’augmentation des salaires des fonctionnaires. La déclaration a pu susciter l’émoi, mais la sécheresse des chiffres des comptes publics indique à suffisance que l’Etat du Sénégal est arrivé à un point où il ne pourrait plus faire, à tout le moins dans le court terme, un pas supplémentaire en matière de politique d’augmentation généralisée des salaires des agents publics. Il resterait toujours au gouvernement le levier d’une éventuelle baisse de la fiscalité sur les salaires, comme ce fût le cas, en janvier 2013. A cette occasion, les salariés du public comme du privé avaient pu bénéficier d’un gain de pouvoir d’achat supplémentaire. L’Etat avait consenti de renoncer à des recettes fiscales de l’ordre de 29 milliards de francs au profit des salariés. On se demande si une telle mesure serait encore possible dans un contexte où on commence à déplorer la faiblesse de la part des ressources de fiscalité intérieure pour financer le budget de l’Etat. Dans tous les cas, la masse salariale des agents de la fonction publique sénégalaise n’a eu de cesse d’augmenter à un rythme effréné de 50 à 60 milliards, d’une année à une autre. Dans le budget 2019 du Sénégal, la hausse de la masse salariale est de 60,4 milliards de francs Cfa, soit une hausse relative de 8,6%, alors que la croissance économique moyenne au Sénégal est de 6,6% depuis 2014, c’est-à-dire durant la période d’exécution du Programme Sénégal émergent (Pse). En d’autres termes, si on consulte le Titre II du budget général de l’Etat pour l’année 2019, on constate que la masse salariale se chiffre à 743,41 milliards de francs, compte non tenu des rémunérations des employés des différentes agences publiques, des universités ou les salaires des corps émergents, entre autres. En outre, les rémunérations de personnel consacrées au fonctionnement des différentes institutions de l’Etat comme l’Assemblée nationale, le Conseil économique, social et environnemental (Cese), le Haut conseil des collectivités territoriales (Hcct) et autres institutions, compilées dans le Titre IV du budget général, donne un total de quelque 1 000 milliards en dépenses de personnel pour moins de 2 500 milliards de recettes fiscales. Ainsi, le Sénégal consacre 40% de ses recettes fiscales à la prise en charge de ses fonctionnaires. Ce ratio «grille» la norme communautaire de l’Uemoa qui est de 35%. Dans la présentation de la loi de finances, le ministère des Finances alertait déjà, indiquant que «le gouvernement doit surveiller sa masse salariale». Comment en est-on arrivé à ce résultat ?
Il convient de rappeler qu’en 2012, la masse salariale était de 428 milliards de francs pour des effectifs de 91 mille 401 fonctionnaires et autres agents de l’Etat. Les dépenses en personnel de l’Etat ont donc augmenté de plus de 75%, le temps d’un septennat. Les effectifs sont aujourd’hui à 140 mille agents publics. Les augmentations de salaire ont alourdi la charge. 3/4 des effectifs de la fonction publique ont bénéficié d’augmentations de salaire. Les secteurs qui ont été les plus servis sont ceux de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur, de l’Armée, de la santé et les agents de l’Administration judiciaire (magistrats et greffiers). Un haut fonctionnaire s’est risqué à un commentaire : «Tous les secteurs qui bougent sur le front syndical ont engrangé des hausses de salaires et autres indemnités.» Ainsi, seules certaines catégories professionnelles comme les économistes, les juristes, les planificateurs n’ont pas bénéficié des largesses de l’Etat. Cette assertion est à relativiser, car ces catégories de fonctionnaires ont pu bénéficier par ailleurs d’avantages substantiels comme des parts assez confortables de fonds communs qui n’apparaissent pas dans la nomenclature des dépenses de personnel.
On notera que les enseignants, qui constituent 51% des effectifs de la fonction publique, captent 53% de la masse salariale de l’Etat. Aussi, la mise en œuvre des accords conclus entre le gouvernement et les syndicats enseignants va impacter pour 64 milliards de francs supplémentaires en dépenses de personnel pour l’année 2019. Un membre du gouvernement se demandait s’il ne valait pas mieux, avec l’enveloppe de 60 milliards de francs en plus par an, recruter plus d’agents de sécurité (policiers et gendarmes), plus d’agents de santé, d’agents du Service d’hygiène ou d’agents dédiés à la préservation des ressources environnementales et autres agents de développement communautaire ou même d’autres enseignants. De tels besoins en personnels existent encore.
Le gouvernement envisage également de rationaliser les dépenses dans le secteur diplomatique et dans d’autres administrations comme les agences de l’Etat. Une autre opération qui va fâcher du monde, c’est celle de la restructuration de la Poste qui est devenue inévitable. Les partenaires du Sénégal avaient fini de tirer la sonnette d’alarme sur les déficits creusés, d’année en année, par la gestion de la Société nationale La Poste. Le budget de l’Etat a été systématiquement sollicité pour éviter le dépôt du bilan à La Poste.
L’impossible luxe de payer plus de 250 milliards pour le secteur de l’énergie
L’Etat du Sénégal a mené une politique sociale qui a sans doute pu soulager le consommateur, mais qui aura été menée au prix de graves tensions de trésorerie. La décision de baisse de 10% du prix de l’électricité en 2017 a fortement éprouvé les finances publiques. Cette décision que le gouvernement avait voulu présenter comme un geste social s’est révélée être une patate chaude. Les cours mondiaux des hydrocarbures avaient flambé, un facteur combiné au renchérissement du dollar américain sur les marchés financiers. Le gouvernement avait aussi décidé du blocage du prix du carburant à la pompe, en refusant d’appliquer au consommateur la vérité des prix. Il fallait bien sûr quelqu’un pour payer. L’Etat s’était, de ce fait, dévoué à suppléer aux manques à gagner de la Senelec et à compenser les pertes commerciales de la Société africaine de raffinage (Sar) et des autres pétroliers. Les différentes subventions et autres dettes dues à la Senelec ont monté, courant 2018, à plus de 177 milliards de francs. Devant ce gouffre, l’Etat du Sénégal avait été obligé de conclure un accord avec la Senelec qui permettrait de rembourser tous les ans la bagatelle de 25 milliards de francs. En attendant, la Senelec pourra recourir aux marchés financiers pour lever des emprunts avec les garanties fournies par l’Etat. Qui se souvient encore qu’en 2015 la subvention de l’Etat du Sénégal à la Senelec était tombée à 0 franc Cfa ? Les prix du baril du pétrole et les cours du dollar américain ont de nouveau repris la tendance haussière.
Le gouvernement se trouve obligé de faire face à d’autres situations dont la remise en cause pourrait elle aussi provoquer une ire sociale. C’est notamment la question de la politique d’affectation de bourses et d’aides sociales à plus de 120 mille étudiants, avec une enveloppe de 60 milliards par an, sans aucune rigueur dans les critères d’attribution ou dans le contrôle. Il en sera de même de la décision, depuis 2013, de payer des frais de scolarité pour plus de 47 mille étudiants, orientés dans les universités et instituts privés d’enseignement supérieur, pour plus de 8 milliards de francs par an. L’Etat du Sénégal a poursuivi la politique qui a permis de caser des étudiants qui ne trouvaient pas d’inscription dans les universités publiques aux capacités largement dépassées. L’idée était d’accélérer les chantiers de réalisation des Universités Amadou Makhtar Mbow de Diamniadio et Cheikh Ibrahima Niass de Kaolack. Malheureusement, les dysfonctionnements observés dans la conduite de ces chantiers ont eu pour conséquence que l’Etat continue encore à supporter la facture salée, réglée au secteur privé de l’enseignent supérieur. La panacée qui se voulait provisoire de caser le trop-plein d’étudiants dans les universités privées va ainsi demeurer. Jusqu’à quand ? Et s’il faudrait y mettre un terme, quel en serait le coût social et politique ?
La politique de réduction des dépenses de fonctionnement de l’Etat ne manquera pas d’avoir des répercussions sur certaines couches sociales. Le budget de fonctionnement de l’Etat a baissé de 12,5% du Pib en 2012 à 7,5% en 2018. Les dépenses de fonctionnement du budget général de l’Etat, sur la base des lois de règlement votées, indiquent qu’en 2012, 30% du budget de l’Etat ont été consacrés au fonctionnement, contre 24% en 2017. Le Président Sall a imposé une certaine rigueur dans les dépenses publiques. Ainsi, l’Etat a mieux dépensé, car la qualité et le volume des services publics fournis n’en ont point souffert. Pourtant, on notera que dans le même temps, la richesse nationale a augmenté avec un taux de croissance qui a évolué de 3,2% du Pib à une moyenne de 6,6%. Ce regain de richesse nationale a été consacré à des dépenses sociales comme la distribution de bourses familiales, des politiques sociales comme la Couverture maladie universelle, la carte d’égalité des chances, entre autres.
Il reste que la résiliation de nombreux baux de maisons louées par l’Etat pour y loger des administrations publiques va éroder le pouvoir d’achat des bénéficiaires, même si d’un autre côté les entreprises de construction auront trouvé de nouvelles commandes. L’Etat dépensait annuellement 8 milliards de francs Cfa pour des baux administratifs. La politique de construction de sphères ministérielles à Diamniadio et dans les régions, ainsi que la réfection du Building administratif auront cependant le mérite de mieux loger les administrations publiques et devraient permettre de faire des économies sur la dépense publique.
Que tout le monde se serre la ceinture !
Il va donc falloir une politique d’austérité. Toutefois, une telle politique ne serait acceptée par les populations que grâce à de gros efforts d’explication et de dialogue. Mais il faudra prêcher par l‘exemple. Une certaine diète sociale ne saurait être imposée aux populations alors qu’elles ne perçoivent pas des efforts de réduction du train de vie des autorités publiques. En effet, le gouvernement ne saurait être crédible si des responsables publics continuent de se livrer, avec une certaine arrogance, à des libéralités ou des dépenses somptuaires. Qui accepterait de se priver en assistant au spectacle qui montre ceux qui incarnent l’Etat, donnant l’impression de se servir goulument ?