SenePlus | La Une | l'actualité, sport, politique et plus au Sénégal
4 mai 2025
Développement
"JE PENSAIS QUE CE N’ÉTAIT PAS PLUS GRAVE QU'UNE GRIPPE SAISONNIÈRE"
Contaminé par le Covid-19, le chanteur et écrivain Gaël Faye a vécu quinze jours d’isolement total. Il avoue avoir sous-estimé la maladie et a accepté de raconter son expérience à Jeune Afrique
Jeune Afrique |
Léon Pajon |
Publication 03/04/2020
Le 31 mars, Gaël Faye postait un court message sur les réseaux sociaux pour rassurer sa communauté. On le savait malade, mais on ignorait qu’il avait été contaminé par le nouveau coronavirus. Après quinze jours de courbatures, de maux de tête, de quintes de toux et de problèmes respiratoires, l’écrivain et chanteur de 37 ans pouvait enfin sortir de son isolement pour côtoyer à nouveau sa famille.
Il a accepté de nous livrer son témoignage à partir du moment où il n’était pas personnellement « mis en avant », et en espérant que son expérience puisse être utile à nos lecteurs.
La contamination de l’artiste remonte au 11 mars : « J’assurais une journée de promotion où je devais présenter à une cinquantaine de journalistes le film adapté de mon livre Petit Pays, raconte-t-il. J’ai serré beaucoup de mains, je ne me posais pas encore beaucoup de questions sur la distance à garder avec les autres. »
Il avoue avoir été « laxiste » par rapport aux préconisations déjà mises en avant à cette date, et sous-estimé le danger. « À ce moment-là, on emmenait encore les enfants à l’école, on gardait une vie normale. Comme beaucoup de gens, je pensais que ce n’était pas plus grave qu’une grippe saisonnière et que ça affecterait surtout les personnes âgées… En plus, je suis en bonne forme physique, je fais du sport quotidiennement et tombe très rarement malade. »
Deux jours plus tard, le 13 mars, il commence à ressentir des courbatures et des maux de tête. « Il y a plusieurs jours durant lesquels on pense ne pas être malade, et on propage le virus », rappelle-t-il.
Isolé pendant quinze jours
L’auteur se trouve alors à Reims, dans le nord-est de la France, pour une avant-première. « Avant les premiers symptômes, le virus restait irréel. Et puis j’ai appris que la sortie du film était repoussée. J’ai parlé avec un ami dont un membre de la famille avait failli mourir et avait été placé en réanimation… J’ai décidé de m’isoler dans ma chambre, à Reims. »
Sa famille reste à proximité, lui dépose à manger devant sa porte. Il ne la voit pas durant les quinze jours que dure son confinement. Seul son téléphone lui permet de garder contact avec le monde extérieur.
« Je connais des épidémiologistes, j’ai beaucoup échangé avec eux, mais leurs avis divergeaient. Au départ, je pensais que ça allait passer avec du repos. Je ressentais des courbatures, un mal en bas du dos incroyable, je vomissais, mais je n’avais pas de fièvre et je ne pensais pas que mon cas était suffisamment grave pour prendre la place de quelqu’un d’autre à l’hôpital… Je ne me suis jamais dit que j’allais appeler le Samu. »
Sensation d’étouffement
Le 17 mars, dans la nuit, les symptômes s’aggravent. « Pendant cinq minutes, j’ai eu une vraie sensation d’étouffement, je n’arrivais plus à respirer, je sentais une très grande chaleur dans ma poitrine. »
Il décide d’appeler un docteur le lendemain matin et de commencer à vraiment se soigner. La « visite » se passe en visioconférence : des tests de respiration, des questions, permettent au médecin de ville de se faire un avis. L’artiste demande à faire un test pour être sûr qu’il est contaminé, mais, en l’absence de fièvre, cela n’est pas possible.
Pour le médecin néanmoins, c’est bien le Covid-19. Entre-temps, d’autres membres de l’équipe du film Petit Pays sont d’ailleurs tombés malades et ont été testés positifs.
« Le docteur m’a prescrit des antibiotiques qui me permettaient de respirer un peu plus profondément… Avant, je ne pouvais pas inspirer plus de trois secondes, j’avais le sentiment que mes poumons étaient à moitié remplis d’eau, je n’avais jamais vécu ça. Bien sûr, ça fait un peu paniquer. Et puis j’avais une sensation de brûlure dans la cage thoracique. En revanche, je ne pense pas avoir perdu le goût et l’odorat. »
Sa convalescence se déroule en dents de scie. « Ce qui est bizarre avec ce virus, c’est qu’on peut parfois avoir le sentiment d’être totalement guéri alors que ce n’est pas le cas. Un matin, je me suis levé et senti parfaitement bien, je suis même descendu dans la cour de l’immeuble pour marcher et faire de la corde à sauter ! L’après-midi, j’étais cassé, KO, avec à nouveau des vomissements et des courbatures… Ce qu’il faut rappeler, c’est que la maladie est très longue. Quinze jours de convalescence, c’est vraiment le minimum. »
Le Rwanda plus rigoureux ?
Après quinze jours d’isolement total, Gaël Faye a enfin pu retrouver sa famille. Mais il reste à distance, garde un masque, est attentif aux choses qu’il pourrait toucher et contaminer.
L’auteur était passé au tout début de mars au Rwanda, où il avait constaté qu’un dispositif plus rigoureux avait été mis en place plus rapidement qu’en France. « À l’aéroport, nous avions été accueilli par du personnel médical, qui nous soumettait à des questionnaires et qui prenait notre température… À l’entrée de la salle de cinéma, tous les spectateurs devaient aussi répondre à des questionnaires médicaux. »
Mais il ne veut pas critiquer frontalement la gestion de la crise en France. « On est dans une période où il faut essayer d’être souples dans les avis qu’on a les uns sur les autres. Tout le monde tâtonne, même les politiques. »
Pour lui, la pandémie questionne avant tout nos modes de vie. « Dans nos sociétés ultra-perfectionnées, tout peut s’arrêter pour un virus qui sort du corps d’un animal… Ça nous ramène à un peu d’humilité. »
Face à ses propres contradictions
Favorable depuis longtemps aux idées des décroissants, il estime que la crise sanitaire le met aussi face à ses propres contradictions : « Pour travailler, j’ai besoin de faire des concerts ultra-polluants, avec des tour-bus, des gens qui prennent leur voiture, je prends parfois l’avion pour parler d’un livre à l’autre bout du monde… »
Il espère néanmoins que cette période amènera aussi à réfléchir « les gens qui ne croient pas au changement climatique, qui pensent que le capitalisme est la fin de l’histoire et qu’il faut réduire les budgets des services publics ».
« Bien sûr, on peut être scandalisé, et je le suis, par la différence de traitement du Covid-19 : l’urgence quand ça touche l’Occident, les pays riches, et le peu d’efforts pour apporter des solutions à Ebola ou au paludisme… Mais ça ne doit pas être une excuse pour négliger la dangerosité du coronavirus. Les gens sont grands, ils font ce qu’ils veulent. Moi, je reste chez moi car je n’ai pas envie d’avoir sur la conscience la maladie de mon voisin. Dans nos sociétés de plus en plus individualistes, ce virus nous oblige à plus de solidarité. Aujourd’hui, si je prends soin de moi, je prends aussi soin de l’autre. »
par boubacar badji
LE COUP DU DIABLE
EXCLUSIF SENEPLUS - Nous attendions que tu ressortes des vestiaires de l’hôpital Fann avec ce regard d'espoir devenu ta marque de fabrique. Hélas, pour une fois, le temps s'est s’arrêté, ce match était ton dernier
Boubacar Badji de SenePlus |
Publication 03/04/2020
C'est un coup de sifflet final qui retentira à jamais dans nos têtes. Habitués à tes grandes victoires marquées par des prouesses colorées en vert jaune et rouge, nous te croyions invincible jusqu'à 31 mars. Nous savions tous, dès le coup d'envoi que ce match était plus qu'un derby. Mais combien de derby n'as-tu pas remporté armé seulement de ton courage ?. Le temps est vite passé. Ton entrée dans les vestiaires Fann était pour nous un classique. Mais là aussi, nous savions qu'elle était différente de celles où tu longeais difficilement le couloir du vélodrome pour en ressortir, 15 minutes après, revigoré et déterminé à revenir au score d'abord avant de renverser la tendance en ta faveur lors des classicos.
Combien de victoire n'as-tu pas arraché dans les temps additionnels grâce à ton vaillant cœur de lion face aux enjeux financiers et parfois racistes ? Et nous attendions que tu ressortes de ces vestiaires de l’hôpital Fann avec ce regard d'espoir devenu ta marque de fabrique.
Hélas, pour une fois, le temps semble s’arrêter. Et il nous a fallu beaucoup de temps avant de comprendre que pour ce match, le diable ne s'est pas contenté de déjouer les pronostics. C'est lui-même en virus floqué du numéro Covid-19 qui jouait pour ne pas perdre face à toi. Et personne n'avait prévu son coup. Certes, il a gagné ce match mais le monde du foot soulèvera la coupe en ton nom. Quid de la manière ? Nous nous en ''footons''. Et même si c'est dans les dernières secondes que nous scellerons sa mort, l'essentiel pour nous est de rejouer au foot sans aucun diable encore moins de Covid-19 sur la pelouse.
Pardonnes-nous Pape Diouf. Nous n'avions pas pensé à formuler des prières collectives comme pour Moustapha Guirassy parce que tu nous as habitués à ne fêter que des victoires en grande pompe. Reposes en paix !
LE REMPART MOUSSA SEYDI
Aux avant-postes lors de l’épidémie d’Ebola, l’infectiologue de nouveau au front contre le coronavirus, est peint par ses amis et collègues comme un travailleur acharné et un leader pragmatique. Il demeure l’espoir de tirer le pays de cette mauvaise passe
Au Sénégal, toute la stratégie médicale contre le coronavirus repose sur lui. Professeur Moussa Seydi est, depuis quelques jours, au centre de toutes les attentions. La moindre de ses prises de parole est guettée, en ces temps où la Covid-19 étend ses tentacules et n’épargne personne. L’infectiologue avait été aux avant-postes, lors de l’épidémie d’Ebola. Le voici de nouveau au front contre la pandémie. Peint par ses amis et collègues comme une personne humble, un travailleur acharné et un leader pragmatique, il demeure l’espoir de tirer le pays de cette mauvaise passe. ‘’EnQuête’’ vous le fait découvrir.
Ce n’est pas la première fois que le professeur Moussa Seydi est sous les feux de la rampe. Il y a 6 ans, les projecteurs avaient été braqués sur lui, le plaçant au centre d’un emballement médiatique qu’il n’avait pas appelé de ses vœux. Lorsque les autorités annoncèrent, le 29 août 2016, un cas d’Ebola, l’affolement s’empara de la capitale Dakar. Alors, le Pr. Seydi se dressa pour vite éteindre le début d’incendie allumé par cette maladie virale dangereuse. Il glana, cette année-là, le titre d’Homme de l’année.
En 2020, bis repetita, avec des circonstances aggravantes, cette fois-ci. Moussa Seydi, plus habitué des retraites savantes dans ses laboratoires d’essai ou des joies simples de l’amitié et de la bienveillance, est encore au centre de l’intérêt médiatique, mais surtout au cœur du dispositif national de lutte contre un mal qui répand sa terreur sur la terre entière : le coronavirus.
Au Sénégal, le chef du Service des maladies infectieuses et tropicales de Fann est considéré comme le rempart et le bouclier anti-coronavirus. C’est l’espoir de tout un pays qui espère venir à bout de la maladie qui a officiellement installé ses quartiers, le 2 mars 2020, au Sénégal.
Professeur Moussa Seydi est une fierté koldoise, né il y a 56 printemps dans le Ndoukoumane, précisément à Kaffrine, d’où est originaire sa mère Astou Ba. Son père, Samba Seydi, est lui originaire du Fouladou, de Saré Gagna et de Saré Guéladio, notamment. D’ailleurs, l’influence de ce paternel n’est pas étrangère à son choix de carrière, puisqu’il était agent vétérinaire. Moussa lui doit la fière chandelle de l’avoir inscrit très tôt à l’école primaire de Koungheul, puis à Kaolack, au collège privé catholique Pie 12. C’est dans cet établissement qu’il obtint son Baccalauréat série D à 19 ans. Il déposa ses baluchons à la faculté de Médecine, de Pharmacie et d’Odontostomatologie de l’université de Dakar. Le reste n’était qu’une formalité, vu ses capacités d’apprentissage énormes. Notamment le concours d’internat des hôpitaux de la promotion 1993 et son agrégation, en passant par les autres examens qu’il réussit haut la main. Professeur Moussa Seydi a fait toutes ses études au Sénégal.
Aujourd’hui, il est professeur titulaire de la Chaire des maladies infectieuses de la faculté de Médecine, de Pharmacie et d’Odontostomatologie de Dakar. C’est justement à l’hôpital Fann, en 2014, que beaucoup de Sénégalais ont découvert ce travailleur de l’ombre infatigable. Membre du Conseil d’administration de la Société sénégalaise de gastro-entéro-hépatologie, il est aussi membre de l’Association européenne pour l’étude sur le foie (European Association for the Study of Liver). Il fut le président de la Société africaine de pathologies infectieuses qu’il a dirigé pendant 6 ans. D’ailleurs, c’est son secrétaire général d’alors à ce poste qui fait ce témoignage. Le directeur de l’UFR des Sciences de la santé à l’université Assane Seck de Ziguinchor, Professeur Noël Magloire Manga, connaît l’homme depuis plus de 10 ans. Il fut également son encadreur en interne jusqu’à son concours d’agrégation au Service des maladies infectieuses de Fann.
‘‘Professeur Seydi est mon aîné, très rigoureux dans le travail’’, témoigne Pr. Manga. Il se manifeste, dit-il, à travers les activités de recherche et de publication. Il fait beaucoup de publications dans différents domaines de l’infectiologie, allant des maladies bactériennes aux affections virales, notamment le Vih et les hépatites, surtout l’hépatite B.
Chercheur et combattant
Il pilote beaucoup de projets, aujourd’hui, sur le Vih, à travers la Direction du centre de recherche clinique et de formation qu’on appelle le CRCS, renseigne son désormais collègue. ‘’Je ne suis pas étonné que l’homme ait pu sentir que la problématique de la chloroquine est prometteuse. Parce qu’il a l’habitude des essais cliniques, comme Didier Raoult. Ces gens-là sentent ce qui marche et ce qui ne pourrait pas marcher. L’autre volet sur lequel il travaille, c’est celui des hépatites, avec des projets qu’il porte au niveau national et des collaborateurs à l’international’’.
Dans le cadre de ses projets, poursuit Pr. Manga, son aîné implique tout le monde. ‘’Il veut aujourd’hui porter au plus haut le flambeau de l’infectiologie au niveau national. C’est un chercheur aguerri, qui mène ses recherches avec beaucoup de rigueur et de sérieux. Il aimait bien dire que lorsqu’une stratégie est trop compliquée, elle est inapplicable. Lorsqu’elle est trop simple aussi, elle peut manquer d’efficacité’’, raconte-t-il.
Au-delà de l’aspect chercheur, sur le plan de la pratique, c’est un monsieur très pragmatique, témoigne-t-on. Une attitude pratique qui lui permet d’aller directement au but. ‘’Il n’a pas tendance à tergiverser. Il réfléchit sur ce qui est faisable et bénéfique pour le malade avec les connaissances et les moyens qui sont disponibles à l’heure’’. C’est ce qui lui a donné d’ailleurs, informe le chef du Service d’infectiologie à l’hôpital de la Paix de Ziguinchor, la possibilité, devant cette crise, de pouvoir faire face et de diriger, malgré tous les problèmes auxquels ils sont confrontés, son équipe. Celle-ci est en train de faire un suivi spectaculaire des cas, même si on a un décès pour l’instant.
Parce que, pour ce faire, souligne-t-il, il faut qu’il y ait un coordonnateur de prise en charge qui soit un bon manager. ‘’Il est à sa place. Je ne me fais pas de souci pour lui. C’est un combattant. J’ai apprécié, là également, ses qualités de bon dirigeant, de bon meneur. Il est toujours à l’écoute de tous, mais arrive à trancher de manière efficace et juste, quand il y a des problèmes’’.
L’urologue à l’hôpital Aristide Le Dantec et à l’hôpital militaire de Ouakam, Professeur Babacar Diao, porte aussi en haute estime l’infectiologue. Il trouve que c’est un privilège de parler du Pr. Seydi. ‘’J’ai une grande admiration pour ce monsieur qui s’est battu pour rester au Service des maladies infectieuses de Fann, à une époque où rien ne lui était favorable. Professeur Seydi est un homme qui a pris de la hauteur que ni les titres universitaires ni la recherche de la célébrité ne sauraient ébranler. C’est un guerrier. Son intégrité morale et son éthique ne souffrent d’aucun doute’’, témoigne le Pr. Diao. À son avis, l’infectiologue fait partie des rares professeurs qui ne cherchent pas la célébrité, qui travaillent pour leur pays et se taisent. ‘’S’il ne s’était pas battu, il ne serait jamais resté aux Maladies infectieuses. Il sait ce qu’il veut et personne ne peut l’intimider’’.
Un grand sportif, spécialiste des arts martiaux
Professeur Moussa Seydi se soucie beaucoup des conditions de travail de son personnel, renseigne Pr Manga. ‘’C’est une grande qualité humaine. Il n’aime pas les injustices. Il adore insister sur le fait que ceux qui travaillent doivent être payés à la hauteur des efforts fournis’’. En tant qu’enseignant, c’est un bon pédagogue, qui donne beaucoup de conseils à ses collaborateurs. ‘’Il a un franc-parler, va droit au but et dit ce qui doit être dit, sans état d’âme. Pour lui, le fait de tergiverser ne permet pas de régler les problèmes. Quand on a un problème en face de soi, il faut le décrire comme il est. Cela permet de mieux le cerner et de le régler. C’est comme ça qu’il est’’, atteste le Pr. Manga. Un avis que partage le Pr. Diao. Lui aussi souligne son franc-parler et son humilité. Mais, surtout, son engagement au service de la médecine et sa rigueur scientifique qui font de lui un enseignant-chercheur très respecté par ses pairs.
Très discret, le Pr. Seydi est aussi généreux. Professeur Noël Magloire Manga : ‘’Je ne peux dire à quel point il aime les gens. Il aide dans la discrétion et sans rien attendre en retour. Il n’aime pas faire du bruit sur ce qu’il fait. Quand il voit une personne dans des difficultés pour une raison ou pour une autre, il est du côté des plus faibles.’’ Ce grand travailleur, informe le Pr. Manga, ne se fatigue jamais. Il suit beaucoup de malades et malgré ses nombreuses charges, il est toujours actif. ‘’Ce que vous voyez sur le terrain n’est qu’une partie de l’iceberg. Je lui dis très souvent de se ménager, parce qu’il faut qu’il se repose. C’est aussi un grand sportif. Je sais que le sport l’aide beaucoup à tenir. Il pratique les arts martiaux. De temps en temps, pour se détendre, il fait du kata. Il a de la maitrise de soi‘’.
‘’Il aime l’infectiologie, elle le fascine’’
Son ami de la Faculté de médecine, qui veut garder l’anonymat, se rappelle de leurs moments de galère, au début de leur carrière. Le professeur en cardiologie confie que le Prof Moussa Seydi s’est beaucoup battu, alors qu’il était interne au Service des maladies infectieuses de Fann. ‘’Il est difficile de progresser quand vous avez un professeur qui ne vous aime pas. Son chef de service aux Maladies infectieuses a tout fait pour gâcher sa carrière, pour le renvoyer. Mais devant la détermination de Moussa et son courage, rien de cela n’est arrivé. Il est très calme, mais il impose le respect’’, témoigne-t-il. Avec fierté, il ajoute : ‘’Si Dieu continue de l’aider, il va s’en sortir. Il en a l’habitude. Cette maladie n’est pas compliquée à traiter, pour lui. Il suffit qu’on lui donne ce qu’il demande’’.
La bonté de l’homme, le cardiologue ne veut même pas en parler. ‘’Il fait parfois des choses qui me dépassent. Il a grand cœur et trop lent à la colère. C’est une référence. Il n’aime pas la célébrité. Je me demande d’ailleurs comment il vit, actuellement. Il n’aime pas s’afficher du tout. C’est un père de famille humble et très généreux. Un gentleman. Trop généreux, je vous dis’’. A ses yeux, son seul problème, c’est son amour du travail. Il travaille beaucoup jusqu’à s’oublier. ‘’Même chez lui, il travaille jusque tard dans la nuit. Il passe tout son temps à travailler. Il se tue dans la recherche. Les essais cliniques, c’est son dada’’, confie-t-il.
En plus de son amour pour le travail, le professeur Moussa Seydi est un homme qui cultive la piété. ‘’Il m’a appris beaucoup de choses sur la religion. Il trouve du plaisir à partager son savoir. Un jour, alors qu’on devait sortir rendre visite à un ami, nous ne sommes pas partis, parce que tout simplement, il priait pour un malade qui était dans un état critique. Un médecin qui porte ses patients dans ses prières… Il est formidable’’.
par Bosse Ndoye
LE SÉNÉGAL DES PAILLETTES VS LE SÉNÉGAL DES PAILLOTES
Avec une société de plus en plus matérialiste, où la réussite personnelle est*t jugée à l’aune du matériel, il n’est pas étonnant d’y voir certaines frontières mentales s’ériger entre les différents citoyens, vivant dans réalités différentes
S’il n’existe pas une ou des frontières physiques coupant le territoire sénégalais en deux ou plusieurs parties - comme l’atteste souvent cette phrase devenue proverbiale : Réew mi benn bopp la, kenn manu koo xar ñaar -, il semble bien exister des frontières mentales pouvant être considérées comme étant l’une des conséquences de la division de fait du pays. Celle-ci a donné naissance entre autres à ce qui peut être appelé le Sénégal des paillettes et le Sénégal des paillotes. D’aucuns diront que c’est le fruit d’une mauvaise volonté politique là où d’autres voient le résultat d’une longue période de domination de l’entreprise coloniale qui, il faut le rappeler, non seulement met en valeur certains endroits au détriment d’autres dans un même pays le temps que dure son exploitation mais encore divise souvent les peuples conquis en une petite minorité dite évoluée et une grande masse de non évolués. Mais, en tout état de cause, cette césure mentale semble à son tour avoir engendré entre autres deux types de citoyens, dont les trajectoires, sont souvent parallèles, rarement perpendiculaires.
La divergence de leurs chemins commence dès la naissance et peut se poursuivre durant toute leur vie. Dans le Sénégal des paillettes, on accouche généralement dans un hôpital sinon une clinique, voire à l’étranger pour ceux qui en ont les moyens. Ses enfants vont parfois à la crèche puis au jardin d’enfants avant d’avoir l’âge de se rendre dans une école privée, où ils feront presque tout leur cursus scolaire leur ouvrant le chemin d’études universitaires, qui en France, qui au Canada, qui aux États-Unis, qui dans un institut supérieur du pays moyennant d’onéreux frais. Le visage de l’enseignement public n’étant plus des plus reluisants, parce que balafré par les grèves endémiques et la baisse de niveau avérée qui l’ont complètement défiguré, ceux qui disposent de moyens trouvent refuge dans les écoles et universités privées pour mieux préparer l’avenir de leurs enfants.
Pendant ce temps, dans le Sénégal des paillotes, on donne encore naissance sur des charrettes ou dans des endroits dépourvus du minimum nécessaire pour souhaiter la bienvenue au monde à un nouveau-né dans les meilleures conditions. Dès lors, le taux de mortalité infantile y reste encore élevé comparé à ce qui se passe dans le Sénégal des paillettes. Certains enfants, s’ils ont la chance de pouvoir bénéficier de l’enseignement public gratuit, s’entassent encore dans des cases faisant office de classes. Il n’est pas rare d’en voir quelques-uns faire plusieurs kilomètres à pied par jour pour pouvoir s’instruire. Beaucoup d’entre eux s’éclairent encore aux lampes torches et/ou de tempête pour apprendre leurs leçons parce qu’il n’existe pas d’électricité dans leur bled négligé ou oublié par l’État. L’eau courante peut aussi y être une denrée rare. En cas de maladie grave nécessitant une intervention de qualité rapide, nombreux sont les Sénégalais des paillotes qui sont encore obligés, souvent difficilement, d’aller se faire soigner du côté de leurs compatriotes des paillettes parce qu’ils manquent de tout, même de matériels pour prodiguer les premiers soins. Alors que, de l’autre bord, les malades sont envoyés vers des hôpitaux occidentaux s’ils ne trouvent pas satisfaction dans les meilleurs hôpitaux et cliniques du pays qui peuvent parfois tout bonnement être ignorés. Donc, de la naissance à la mort les chemins de ces deux types de citoyens peuvent ne pas se croiser
Cette dichotomisation de fait n’est pas sans déteindre sur les comportements des uns et des autres, souvent par ignorance. Aussi n’est-il pas rare de voir certains sénégalais des paillettes – comme l’a fait récemment une actrice - regarder de haut leurs concitoyens des paillotes ; d’esquisser ou d’étouffer de petits sourires moqueurs lorsqu’ils mentionnent le nom de leur village ou lieu de provenance ; de les affubler de sobriquets méprisants tels que Waa gëbla gi,Waa àll ba, Wàccibees yi...Cela est d’autant moins étonnant que l’aliénation est souvent plus grande du côté du Sénégal des paillettes pour avoir plus durement subi les effets de la colonisation. C’était le cas de nombre de citoyens des quatre anciennes communes : Dakar, Gorée, Saint-Louis, Rufisque, qui regardaient avec dédain certains de leurs congénères indigènes tout simplement parce qu’ils n’avaient pas eu la chance ou la malchance d’être nés dans l’une de ces villes. Sembène Ousmane, dans Le dernier de l’empire, et Amadou Hampaté Bâ, dans Oui, mon commandant, ont bien dénoncé ce problème qui n’a pas complètement disparu. Loin s’en faut.
L’ouverture sur le monde offerte par les multiples chaînes internationales via le câble, l’accès plus facile à l’internet dans le Sénégal des paillettes y font naître et attiser le désir de ressembler à l’autre – pris comme modèle -, dans ses manières, son langage, son habillement… Ce qui fait parfois qu’on s’y habille comme lui, y communique comme lui et dans sa langue au détriment de celles parlées dans le pays. Ce désir de ressembler à l’autre souvent lointain fait qu’on néglige ou minimise ses compatriotes vivant dans le Sénégal des paillotes, considérés généralement comme arriérés ou pas très évolués pour utiliser le langage colonial. Le Sénégal des paillettes - bien que des qualités n’y manquent pas -, demeure une société d’apparence. Les relations interpersonnelles y sont plus artificielles, parce qu’il faut généralement faire preuve de ruse et avoir un comportement caméléonesque pour se faire une place dans ce monde du paraître, du faux et du faux-semblant. On y montre souvent une fausse image de soi et y expose ce que l’on ne possède pas. Contrairement à ce qui passe dans le Sénégal des paillotes où les relations sont plus terre-à-terre et plus dénuées d’artifices…
Malgré certaines difficultés d’ordre matériel, nombre de sénégalais des paillotes sont épargnés de certains problèmes auxquels sont confrontés leurs compatriotes du côté des paillettes. Ils ne connaissent pas de grèves ou de marches de protestation pour dénoncer l’augmentation des factures de courant et/ou d’eau ... Car beaucoup d’entre eux en sont encore au forage et aux lampes tempêtes.
Il n’existe pas toutefois d’étanchéité entre ces « différents mondes ». Se sentant délaissés par un État quasi absent - car avec l’absence d’industries, l’agriculture, qui est souvent l’activité principale du côté du Sénégal de paillotes, devient de moins en moins attrayante du fait de la rareté des pluies et de l’absence de matériels adéquats pour mieux rentabiliser les cultures - certains Sénégalais des paillotes finissent par envahir le côté des paillettes puisque l’herbe y semble plus verte. Par conséquent, le village peut s’importer en ville avec parfois son lot de conséquences : surpopulation, bidonvilles, errance, vagabondage ...Sans oublier que d’un autre côté, des villages se meurent : l’exode et l’émigration s’offrent comme les seules solutions ou alternatives. Des retournements de destin peuvent aussi faire bouger les lignes.
En définitive, ce n’est pas tant le lieu de vie d’un homme qui détermine sa valeur que la qualité de son comportement ; ce n’est pas parce qu’on habite dans une capitale que l’on est meilleur, plus intelligent, plus raffiné que celui qui vit dans une brousse ou dans un bled perdu ; ce n’est pas parce qu’on habite dans un immeuble, qu’on est connecté à l’internet, qu’on peut regarder toutes les chaînes de télévision que l’on veut que l’on est meilleur que celui qui vit dans une masure dépourvue de tout matériel moderne le reliant au monde extérieur… Nit li muy gëne mooroomam buy sangu du ko summi, comme le dit si bien l’adage wolof. Mais avec une société qui devient de plus en plus matérialiste, où la réussite personnelle est souvent jugée à l’aune de l’argent et du matériel, il n’est pas étonnant d’y voir certaines frontières mentales s’ériger entre les différents citoyens, vivant dans réalités et conditions différentes.
AVIS DE TEMPÊTE SUR LE MARCHÉ DES SMARTPHONES
La pandémie de Covid-19 pourrait conduire à la fermeture de mines congolaises de cuivre, de cobalt et de coltan dont certaines industries sont largement dépendantes, à l’échelle internationale
Jeune Afrique |
Damien Glez |
Publication 03/04/2020
Si la pandémie du coronavirus s’est propagée de l’hémisphère nord vers les contrées du sud, certaines conséquences « extrasanitaires » du Covid-19 pourraient frapper les pays occidentaux comme un boomerang.
Échaudés en premier par la pandémie qui bouleverse 2020, les pays d’Asie, d’Europe et d’Amérique du Nord pourraient manquer de compassion, à l’heure de leur guérison, envers les pays contaminés plus tardivement, notamment les nations africaines qui sombrent avec décalage.
Qu’à cela ne tienne, le sud pourrait se rappeler au « bon » souvenir du nord, conformément à l’« effet papillon » qui veut qu’un événement local puisse provoquer une conséquence inattendue dans une zone très éloignée – le battement d’ailes d’un papillon au Brésil pouvant provoquer une tornade au Texas.
Pénurie de coltan
En se focalisant sur le point nodal de la République démocratique du Congo (RDC), le journal milanais Il Sole-24 Ore a mené l’enquête pour identifier la chaîne de contrecoups technologico-économiques qui pourraient résulter de la chaîne de contamination virale.
Tels des dominos qui se renversent les uns les autres, les faits pourraient s’enchaîner de manière fatale : la pandémie de Covid-19 pourrait conduire à la fermeture de mines congolaises de cuivre, de cobalt et de coltan dont certaines industries sont largement dépendantes, à l’échelle internationale.
Du coltan, mot-valise pour « colombite-tantalite », est notamment extrait le tantale utilisé sous forme de poudre métallique dans la conception de composants électroniques.
L’imparable spirale de conséquences se mettrait alors en place : sans mineur congolais, pas de coltan ; sans coltan, pas de tantale ; sans tantale, pas de condensateurs de téléphones intelligents, ces extensions du cerveau humain qui, grâce à leurs applications de télécommunications, sauvent les confinés occidentaux de la dépression hypocondriaque…
Interdépendance déséquilibrée
Géopolitique fiction ? Déjà, le coltan est au cœur des heurts congolais récurrents, par le truchement d’une extraction illégale et d’une contrebande qui relient milices transfrontalières et sociétés internationales.
Déjà, en 2000, une pénurie mondiale de coltan et une hausse des prix du tantale auraient compromis la fabrication de la fameuse console de jeux PS2.
Comme il y aurait du bon en toute catastrophe, peut-être le consommateur de pays développé apprendra-t-il ainsi à conserver, pour le bien de la planète, son téléphone désuet.
De même, avec un peu chance, peut-être l’éventuelle crise minière congolaise induite de la pandémie fera-t-elle prendre conscience de l’interdépendance déséquilibrée des hémisphères, dans l’alliage injuste entre matières premières et technologie. À condition que la pénurie de téléphones cellulaires n’occulte pas la tragédie sanitaire congolaise par l’absence de « breaking news » téléphoniques…
VIDEO
TESTER DES VACCINS SUR LES AFRICAINS ? "NOUS NE SOMMES PAS DES COBAYES !"
Sur une chaîne d’information française, deux spécialistes de la santé ont prôné qu’un futur vaccin contre le Covid-19 soit testé sur les populations africaines. L’échange a soulevé un torrent de critiques sur le continent africain et dans la diaspora
Courrier International via Wakatsera |
Publication 03/04/2020
“Révoltant ! Scandaleux ! Incroyable ! Choquant !” Le site Internet du quotidien du Burkina Faso Wakat Séra enchaîne les qualificatifs d’indignation pour dénoncer les propos tenus par deux spécialistes de la santé sur la chaîne d’information en continu LCI. Durant cet échange, le professeur Camille Locht, directeur de recherche à l’Institut national de la santé et de la recherche médicale, et Jean-Paul Mira, chef du service de réanimation à l’hôpital Cochin, espèrent la mise en place rapide à l’échelle mondiale de tests pour évaluer l’efficacité du vaccin contre la tuberculose, le bon vieux BCG, contre le Covid-19.
C’est par le professeur Jean-Paul Mira qu’arrive la polémique : “Si je peux être provocateur, est-ce qu’on ne devrait pas faire cette étude en Afrique, où il n’y a pas de masques, pas de traitements, pas de réanimation ? Un peu comme c’est fait d’ailleurs pour certaines études sur le sida, où chez les prostituées on essaye des choses parce qu’on sait qu’elles sont hautement exposées et elles ne se protègent pas?”
Ce à quoi répond favorablement le professeur Camille Locht, qui affirme qu’une étude sur le continent est en réflexion, tout en précisant que “cela n’empêche pas une étude en Europe et en Australie”.
L’Afrique comme laboratoire
Des propos qui ont déclenché la colère de nombreux internautes africains. “Pourquoi ne proposent-ils pas de tester ces fameux vaccins sur leurs compatriotes qui tombent comme des mouches pulvérisées à l’insecticide?” renchérit Wakat Séra, qui rappelle que la présence du nouveau coronavirus en Afrique trouve principalement son origine en Europe.
“Pourquoi ramener l’Afrique à ce statut de laboratoire grandeur nature, après l’avoir considérée comme une poubelle où tous les déchets occidentaux, matériels comme humains, sont déversés à longueur de journée, malheureusement avec la complicité active ou passive de dirigeants africains uniquement guidés par leurs intérêts personnels et très égoïstes?” poursuit Wakat Séra.
Sur un continent où les fausses nouvelles fourmillent, le dialogue entre les deux spécialistes de la santé prend d’autant plus d’ampleur. Sur les réseaux sociaux, des célébrités africaines, dont les footballeurs ivoirien Didier Drogba et camerounais Samuel Eto’o ont vivement réagi.
“C’est incroyable de cautionner cela. L’Afrique n’est pas un laboratoire. Je dénonce vivement ces propos racistes et avilissants”, a ainsi écrit l’ancien attaquant de Chelsea. L’économiste togolais Kako Nubukpo s’est lui aussi indigné, et a réclamé plus de transparence sur ces essais cliniques.
LE PRÉSIDENT DU NIGER DEMANDE "UN PLAN MARSHALL POUR L'AFRIQUE"
"Même les pays plus développés sont débordés. Nos moyens sont plus faibles, nos systèmes de santé sont plus fragiles. Donc on a besoin d'une expression très forte de la solidarité internationale pour faire face à cette crise"
La pandémie de coronavirus renforce la nécessité d'"un plan Marshall pour l'Afrique", estime Mahamadou Issoufou, le président du Niger, un des pays les plus pauvres au monde, dans une interview diffusée vendredi sur la chaîne France 24. "Déjà avant la pandémie, l'Afrique avait besoin d'un plan Marshall pour son développement, pour lutter contre la pauvreté. Cette pandémie est un argument de plus pour justifier la nécessité d'un plan Marshall pour l'Afrique", déclare le président nigérien.
Le plan Marshall avait été mis en place par les Etat-Unis pour aider à la reconstruction de l'Europe après la seconde guerre mondiale."Même les pays plus développés sont débordés. Nos moyens sont plus faibles, nos systèmes de santé sont plus fragiles. Donc on a besoin d'une expression très forte de la solidarité internationale pour faire face à cette crise", ajoute M. Issoufou.
L'Afrique est encore relativement peu touchée par la pandémie avec plus de 7.000 cas et près de 300 décès officiellement déclarés, selon le dernier bilan de l'AFP. Le Niger a fait état vendredi d'un total de 98 cas et 5 décès. L'Etat nigérien estime à 600 milliards FCFA (900 millions d'euros), soit 7,4% de son PIB, les besoins financiers pour la lutte contre l'épidémie et pour soutenir l'économie et la population de ce pays sahélien.
Dans cette zone sahélienne, plusieurs pays, notamment le Niger, le Burkina Faso et le Mali, luttent aussi contre de nombreux groupes jihadistes qui sèment la violence, entraînant l'exode de centaines de milliers de réfugiés et déplacés, créant une situation humanitaire dramatique. La lutte contre la pandémie de covid-19 est "une mission extrêmement difficile : la crise sanitaire vient s'ajouter à la crise sécuritaire que nous connaissons déjà, qui consomme 17% de nos ressources budgétaires", a souligné le président Issoufou.
Niamey a estimé mercredi que son taux de croissance économique devrait baisser en 2020 de 2,8 points, de 6,9% initialement prévu à 4,1%, entrainant une chute des recettes budgétaires. Le Niger abrite près de 450.000 réfugiés (Nigérians, Maliens et Burkinabè) et déplacés, chassés par les violences jihadistes ou des bandes armées, selon l'ONU.
Jeudi le Programme alimentaire mondial (PAM) a averti que la crise humanitaire dans la région du Sahel central risquait de devenir "ingérable" avec plus de cinq millions de personnes confrontées à une grave insécurité alimentaire, tandis que le coronavirus se propage.
L'Afrique, et en particulier l'Afrique sub-saharienne qui a importé plus de 40 millions de tonnes de céréales en 2018, est le continent le plus menacé par le risque de pénurie alimentaire en raison de la pandémie de Covid-19, a par ailleurs averti le PAM.
COMMENT MACKY SALL SE PROTÈGE DU CORONAVIRUS
Seuls Augustin Tine, Seydou Guèye, Boun Dionne et Diouf Sarr ont encore accès au bureau présidentiel - Les horaires de travail sont limités - La prise de température a été systématisée à l’arrivée au palais et les bureaux sont régulièrement désinfectés
Farid Akele avec Jeune Afrique |
Publication 02/04/2020
Allégement des horaires de travail à la présidence, limitation des échanges avec ses collaborateurs, utilisation de gel hydroalcolique… Jeune Afrique lève le voile sur les mesures prises par le président de la République pour se protéger de la pandémie.
Le coronavirus qui a déjà touché des personnalités jusqu’au plus haut sphère de l’Etat dans certains pays – plusieurs ministres atteints au Burkina Faso – amène nombre de présidents africains à redoubler de vigilance. Selon Jeune Afrique, Macky Sall a limité au strict minimum les échanges physiques avec ses collaborateurs de la présidence. Seuls le directeur de cabinet Augustin Tine, le secrétaire général de la présidence Mahammed Boun Abdallah Dionne, ou encore le porte-parole du gouvernement, Seydou Gueye, sont encore admis dans le bureau présidentiel. Le ministre de la Santé, Abdoulaye Diouf Sarr y a également ses entrées, mais moins souvent, révèle l’hebdomadaire.
Par ailleurs, les horaires de travail ont été redéfinis (9h à 15h, en alternance pour ceux qui partagent un bureau), les assistants des conseillers du chef de l’Etat renvoyés chez eux et les échanges face-à-face bannis au profit des réunions via Skype ou WhatsApp.
Nos confrères indiquent aussi que des bouteilles de gel hydroalcoolique et parfois même des distributeurs équipés de détecteurs de mouvements sont installés dans des couloirs de la présidence afin d’éviter toute contamination par le toucher. La prise de température a été systématisée à l’arrivée au palais, et les bureaux sont régulièrement désinfectés. À chacune des entrées, un lavabo activable avec le genou a été installé, ainsi que des souffleurs pour éviter les essuie-mains, peut-on lire dans Jeune Afrique.
LETTRÉ COMME UN PAPE
Si, depuis son départ de l’OM, il disséminait les bons mots sur les plateaux TV plutôt que dans les vestiaires, il laisse derrière lui autant de souvenirs que de verbes conjugués au subjonctif imparfait...
Pape Diouf n’a jamais gagné de championnat de France, mais Pape Diouf savait parler. Si, depuis son départ de l’OM, il disséminait les bons mots sur les plateaux TV plutôt que dans les vestiaires, il laisse derrière lui autant de souvenirs que de verbes conjugués au subjonctif imparfait... nonobstant ses origines socio-culturelles. Habemus.
En arrivant, il avait demandé un café sans sucre. Puis il s’était assis, en attendant que la salle Albert Haddad de la Maison de l’avocat se remplisse doucement. Il y avait là des badauds curieux, des trentenaires en longue robe noire, leurs pères, leurs mères, parfois même leurs femmes, assis dans un amphithéâtre surélevé au-dessus d’une fosse vide. On vient voir la bête : ce 7 novembre 2014, comme le mime Marceau, Serge Gainsbourg, Salvador Dali ou Fabrice Luchini avant lui, Pape Diouf est l’invité d’honneur de la célèbre conférence Berryer, une joute oratoire vieille de 150 ans exceptionnellement délocalisée à Marseille. Les règles du soir sont simples : deux orateurs débattent chacun leur tour d’un thème en rapport avec l’invité reconnu pour son éloquence, avant de voir leur prestation critiquée par un jury de douze avocats, appelés les « Secrétaires » , des surdoués de la raillerie, féroces, méchants, cruels. L’exercice tient du masochisme : c’est à celui du jury qui aura la meilleure saillie humoristique, qu’elle concerne le fond, la forme, le CV ou le physique, et gloire à celui qui ose se présenter seul dans l’arène, l’objectif étant davantage d’en sortir vivant plutôt que grandi.
Les sujets du soir sont les suivants : « Le Pape peut-il changer la donne ? » et « Où t’es, Pape où t’es ? » La soirée s’allonge, les orateurs déclament, les jurys descendent, et Pape, lui, reste silencieux. Il rit peu. Au bout du bout, la salle se tourne vers lui. Les plaidoiries ont duré trois heures. Il se lève, juste aux côtés de Lucas Montagnier, 29 ans à l’époque, avocat au barreau de Marseille et membre des Secrétaires, et prend la parole : « Au lieu de faire la critique des orateurs comme il est coutume de faire, il a presque retourné le concept, explique l’avocat. Il trouvait ça injuste que le jury se mette à critiquer de manière aussi acide ceux qui avaient eu le courage de débattre d'un sujet aussi farfelu. On sentait que ce qu’il voulait, c’est critiquer ceux qui formulaient des critiques. Il avait une présence incontestable. Ce soir-là, il avait marqué tout le monde. Les pères, les mères de famille de membres du jury. » Les témoins de la scène repartiront médusés, Pape Diouf renforcé de son auréole de défenseur des innocents, des audacieux, des opprimés. Le tout grâce à deux choses : son cerveau, et sa langue.
Homme du mot juste
Pape Diouf était un homme grand et un grand homme, dont la parole portait aussi loin que son aura. C’est d’ailleurs un point commun à la majorité des hommages qui lui sont rendus depuis mardi soir : on y souligne au choix son « phrasé » si particulier, son « verbe » élégant ou son « langage de haute tenue » . Diouf était, de fait, de ces hommes qu’il élève d’écouter, dont la parole était autant respectée pour sa pertinence que pour son raffinement, et dont l’origine, elle, reste un secret. Comment lui, l’immigré sénégalais, le renvoyé du collège Sacré-Cœur de Dakar, l’ancien coursier, le manutentionnaire, le pointeur du port de Marseille, a-t-il appris à utiliser le mot « nonobstant » ? Cette partie de l’histoire reste évasive.
Mais voilà pour sûr « le Black le plus intelligent que je connaisse » - comme lui dit un jour Bernard Tapie -, capable de découper un joueur en pièce tout en levant l’auriculaire. « Un jour, un joueur de l’OM l'a pris de haut, nous confiait mercredi Jean-Paul Delhoume, journaliste à La Marseillaise, canard de gauche pour lequel Diouf a travaillé de 1975 à 1987. Pape lui a dit dans son langage châtié : "Je crois que nous allons en arriver à des extrémités physiques regrettables..." - pour lui dire : "Je vais te casser la gueule." » On déguste ses tirades comme on lit du Proust, et il est d’ailleurs intéressant de constater qu’il fait partie des rares acteurs du monde du foot à avoir ses propres citations compilées sur le site dédié du Monde, ou à être occasionnellement cité aux Grosses Têtes, avec George Best et Cantona.
En 2008, à la descente d’un avion, il était sorti de son habituelle réserve policée, évoquant les « nababs » et les « vizirs » de l’effectif olympien éliminé quelques heures plus tôt par le Zénith Saint-Pétersbourg en 8es de finale de la Coupe de l’UEFA. Ses coups de gueule en avaient, de la gueule. Et il pouvait faire mal. « On sortait le dictionnaire après ses causeries » , avouait récemment Benoît Cheyrou. Lucas Montagnier évoque lui un « homme du mot juste » avec « du recul et de la nuance. » Et plus précisément « une parole aussi respectée que crainte, parce qu’il avait un style très direct. Il ne faisait pas d’effets de styles : lorsqu'il avait fini de parler, on attendait souvent la chute, et elle ne venait pas. Il faisait parfois la conclusion en introduction. Il avait une manière à lui d’exposer ses positions, faisant de lui un homme qu’on écoute. » Son éloquence est même allée jusqu’à intéresser les universitaires, lui trouvant des occurrences avec... Michel Fourniret.
Souverain poncif
Parce qu’il n’y connaît pas grand-chose en football, et surtout parce qu’il habite en Australie, Bert Peeters n’a appris le décès de Pape Diouf que mercredi sur les coups de 15h. Qui ça ? Il fallait raviver les souvenirs : ce linguiste belge réputé, ancien professeur de langues étrangères à l’université de Tasmanie et à l’université Macquarie, à Sydney, s’était intéressé au baryton dans l’une de ses thèses, « Il fallut que je sois fusse... » : à la recherche d’un temps perdu (2001-2012), consacrée à la disparition du subjonctif imparfait dans la langue française. Son travail est divisé en trois parties :
- Allusions qui étonnent
- Usages qui détonnent
- Usages qui divisent
Pape Diouf, sans surprise, est dans la deuxième. « C’est en faisant des fouilles dans ce cadre que je suis tombé sur son nom, qui revenait dans de nombreux papiers comme utilisateur de ce temps presque disparu, à part pour les linguistes comme moi, explique Peeters. Et étant donné ses débuts d’homme noir au Sénégal, c’était assez étonnant qu’il s'exprime dans un français aussi subtil. »
Il s’appuie notamment sur un papier de Libération, « Règlement de comptes à OM Corral » , où le journaliste Michel Henry écrit ces mots : « Il n’y a qu’un seul Pape sur terre. Et il marche sur l’eau du Vieux-Port en chaussures Berluti. Le Pape Diouf Ier, dit « l’Unique » , peut commencer une phrase et la terminer trois jours plus tard sans se tromper dans un imparfait du subjonctif ni exprimer de souverains poncifs. » L’autre exemple cité dans sa thèse est Michel Fourniret, qui utilisait le subjonctif imparfait dans les trois carnets de notes retrouvés dans sa cellule, ceux où il décrivait ses meurtres dans une langue impeccable, et concluant l’un de ses récits par cette phrase devenue culte : « Il fallut bien alors que je l’enterrasse... »
Bert Peeters : « Fourniret, c’était de la stratégie, il faisait n’importe quoi pour se faire remarquer. Mais chez Pape Diouf, on peut lire dans son autobiographie (C'est bien plus qu'un jeu, N.D.L.R) qu’il a une aversion pour la langue de bois. Ça va bien ensemble, et c’est le signe d’une éducation très très poussée. Mais je vais vous avouer quelque chose : je n’ai jamais réellement trouvé d’exemple d’utilisation du subjonctif imparfait par Diouf, malgré la lecture de dizaines de témoignages, à part pour des verbes très simples : faire, aller, être. J’en suis arrivé à la conclusion qu’il y a un mythe urbain qui s’est installé à son propos. Vous avez vu des discours où il utilisait vraiment ce temps-là, vous ? » Les souvenirs s’emmêlent. Était-ce du subjonctif imparfait, du passé simple, du petit lait ? Après tout, peu importe. Pape Diouf parlait bien, parlait mieux que quiconque, descendant dans la crypte des tonalités à mesure que son verbe s’élevait. « Il aurait fait un bon avocat, mais surtout un très bon juge, ose Lucas Montagnier. C’était quelqu’un de juste, et la parole juste se fait rare. » Une pause, puis : « C’est décidément pas facile de parler de lui à l’imparfait. »
"UN DÉPISTAGE DE MASSE NE SE JUSTIFIE PAS ENCORE"
Une opération de dépistage massif au coronavirus ne se justifie pas encore au Sénégal en raison de la limitation des capacités, des défis logistiques et de la situation épidémiologique actuelle du pays, selon le directeur de l’Institut Pasteur de Dakar
Une opération de dépistage massif au nouveau coronavirus ne se justifie pas encore au Sénégal en raison de la limitation des capacités, des défis logistiques et de la situation épidémiologique actuelle du pays, a souligné jeudi à Dakar, le docteur Amadou Alfa Sall, directeur de l’Institut Pasteur de Dakar.
‘’Il ne se justifie pas aujourd’hui un dépistage massif qui présente des limites importantes compte tenu des capacités qui existent et des aspects logistiques’’, a notamment déclaré le docteur Sall lors d’un de presse consacré à l’évaluation de la riposte au Covid-19, un mois après son apparition au Sénégal.
‘’La situation du Sénégal ne le justifie pas et c’est pourquoi jusqu’à présent il a été mis en place cette stratégie pour laquelle chaque personne considérée comme un cas suspect va être prélevée et son échantillon transmis pour test, de même que chaque contact à haut risque’’, a expliqué le directeur de l’Institut Pasteur de Dakar.
Il a insisté sur le fait que dans la stratégie adoptée par le Sénégal, l’accent est mis sur l’identification des cas positifs, le suivi des contacts, notamment ceux à haut risque. ‘’C’est la stratégie qui correspond à notre situation et qui a permis jusqu’à présent de maîtriser l’épidémie’’, a fait valoir le docteur Sall.
Quelque 195 cas positifs au Covid-19 ont été officiellement détectés au Sénégal depuis le 2 mars. Un décès et 55 guérisons ont été enregistrés tandis qu’un malade a été évacué en France à la demande de ses proches, a précisé le ministère de la Santé et de l’Action sociale.