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25 avril 2025
Développement
par Korassi Téwéché
LUMIERES SUR LE SENTIMENT ANTIFRANÇAIS
Y-a-t-il un ‘sentiment antifrançais’ en Afrique ? Ou bien, est-ce l’éveil d’une conscience africaine planétaire qui appelle au bon sens devant l’Histoire ?
Y-a-t-il un ‘sentiment antifrançais’ en Afrique ? Ou bien, est-ce l’éveil d’une conscience africaineplanétaire qui appelle au bon sens devant l’Histoire ? « Lève-toi dit-elle, Afrique ! Réfléchi. Quelle est ta misère ? Comment rétablir chez toi la justice et le droit ? » De l’autre côté, on entend dire : « Le Temps de l’Afrique viendra ». « Mais non, dit La Conscience : Il est là ! Qui a des yeux, peut le voir : il n’y a ni ombre ni ‘malédiction’. La monnaie, les matières premières, la banque, le marché… ne sont pas à venir. Ils font l’Afrique. Notre génération veut en rendre compte. Maintenant. L’Afrique s’est désenchantée ! » Vous l’avez peut-être aussi appris : une nouvelle ère s’ouvre ; une quête réelle d’autonomie. Des gens s’interrogent, partout en Afrique : « Comment stopper la banalité du crime, les sodomies autour des matières premières et ces orgies républicaines bizarres ? » Mais je me demande : qui parle ? À qui s’adresse-t-il ? « L’interlocutrice n’est ni la France, ni la Russie, me dit-on. L’Afrique converse avec elle-même. Des faits sont là : de Yaoundé à Abidjan, de Bamako à Kinshasa, de Dakar au Caire… des crimes attendent une réparation. La scène, c’est l’Afrique ! » Certes, mais que vient faire la France dedans ? « Posons-lui la question, me réponds-t-on. Comment se retrouve-t-elle là, comme par hasard, à ces heures indues, sur chaque scène de crime ? Qu’elle prouve son innocence, et on la laissera tranquille ! » Il semble que la France refuse de témoigner. Elle garde silence. C’est son droit.
Néanmoins, une révolution est en marche, dit-on. L’Afrique se regarde en face. Elle brise la glace. Auto-procès peut-être. Je pose la question : s’agit-il de vraies critiques ou simplement d’émotions ? Car tout cela a déjà été entendu et vu. Ce qui nous manque, ce sont des actions. Des vraies. Celles des Architectes : qui connaissent le terrain, maitrisent la composition du sol, l’alchimie des pierres, la vitesse du vent, la densité de la pluie... qui savent mesurer, compter… qui savent voir et apprécier la vie, le travail et l’intelligence, au-delà des guerres identitaires. Car, démolir une hutte en sable, et bâtir un château de cartes, n’est-ce pas perdre son temps ? Dites-moi, où sont donc ces architectes de l’Afrique ? « Ils sont là ; me réponds-t-on. Ces gens influencent le présent et l’avenir de nos enfants. » Soit ! Mais l’influence seule suffit-elle ? Ne faut-il pas d’autres moyens ? D’abord les choses simples : le travail assidu et honnête, le respect mutuel, la sagesse et la lucidité au quotidien... Bref, partir de soi-même. Puis, monter. De bas en haut. J’appelle cela l’architecture villageoise ou la politique vue par ma grand-mère. Doit-on continuer à invoquer l’Histoire, à incriminer les ‘sorciers’ ou les ‘dieux’, alors que ce B-A-BA de nos savoirs ancestraux nous échappe ? Ce qu’il nous faut c’est l’action. Certes. Mais qu’est-ce que l’action ?
Une nouvelle conscience s’ouvre en Afrique, peut-être. Elle abhorre la honte et le mensonge. Elle accuse et s’accuse. Dans cette auto-censure, elle quête ses repères et ses bouc-émissaires. Elle s’agrippe sur ses luminaires d’hier – l’Angleterre, la France… – et explore d’autres planètes – la Chine, la Russie… –. Tout ça, elle le fait en même temps. C’est son droit. Mais qu’a-t-elle fait de ses Architectes ? Au lieu de graviter frénétiquement autour de ses concubines extérieures, ou de singer bougrement ses nouveaux ‘prophètes’, saura-t-elle réinventer chez elle une poétique du travail et de la reconnaissance mutuelle qui respecte chaque vie et chaque intelligence, par-delà les clivages religieux, linguistiques, nationaux et ethniques ? Car, quand on parle d’architecture ou de révolution, c’est peut-être d’abord de cela qu’il s’agit : des choses simples. À bon entendeur…
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PAULIN HOUNTONDJI, LA MODERNITÉ D'UN PÈRE FONDATEUR
Paulin Hountondji, philosophe béninois né en 1942, est l’un des pères fondateurs de la philosophie africaine moderne. Il a développé une philosophie de l’engagement et a travaillé sur l’universel
Paulin Hountondji, philosophe béninois né en 1942, est l’un des pères fondateurs de la philosophie africaine moderne. Son ouvrage Sur la « philosophie africaine » : critique de l’ethnophilosophie (1976) a amplement contribué à clarifier le débat sur ce qu’était la philosophie africaine en l’affranchissant d’un regard colonial qui la résumait à un ensemble de croyances de type mythologique.
Paulin Hountondji s’est également intéressé à ce qui pouvait fonder une science africaine en travaillant sur les savoirs endogènes. Il a développé une philosophie de l’engagement et a travaillé sur l’universel.
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L'ÉLITE POLITIQUE SÉNÉGALAISE VUE PAR EL HADJI OMAR DIOP
L'enseignant-chercheur à la Faculté de Droit de l'Ucad, analyse la situation sociopolitique nationale et convie le pouvoir et l'opposition à négocier à l'Assemblée nationale au cours de la prochaine législature
L'enseignant-chercheur à la Faculté de Droit de l'Ucad, analyse la situation sociopolitique nationale et convie le pouvoir et l'opposition à négocier à l'Assemblée nationale au cours de la prochaine législature. Il est l'invité de Baye Omar Gueye dans l'émission dominicale Objection sur Sud FM.
GABOU, PORTE DU BOUNDOU ET TERRE D'ÉMIGRÉS
C'est l’une des 12 communes du département de Bakel. Enclavée et difficile d’accès, elle sort petit à petit de l’ornière grâce à l’émigration, l’agriculture, le commerce et l’élevage
Gabou est l’une des 12 communes du département de Bakel. Enclavée et difficile d’accès, elle sort petit à petit de l’ornière grâce à l’émigration, l’agriculture, le commerce et l’élevage. À la découverte de la porte du Boundou, de son histoire et de ses spécificités.
Quelque 25 km séparent Bakel de la commune de Gabou. Mais le voyage semble durer une éternité. Si l’axe Kidira-Toumbacounda est bien goudronné, bien luisant, ce n’est pas le cas pour la distance Bakel-Gabou. C’est le parcours du combattant pour le voyageur. Il slalome les crevasses, bondit sur les nids de poule. Pire, il est souvent obligé de quitter la chaussée pour des pistes latéritiques… Plus d’une heure de calvaire, avant de voir le bout du tunnel.
Ce lundi matin, on tombe sur une commune en effervescence. C’est l’un des mérites du marché hebdomadaire qui mobilise des milliers d’acteurs économiques. Les camions ne cessent de convoyer les denrées telles riz, maïs, etc. Sous le chaud soleil, les dockers débordent d’énergie, suent à grosses gouttes.
De l’autre côté, la vente d’habits attire l’attention de plusieurs jeunes qui ont fini d’installer leurs tentes. À côté de l’humain, le bétail broute l’herbe, dans une pittoresque et verdoyante nature. Avenants mais vigilants, les éleveurs veillent sur les centaines de têtes.
À Gabou, les huttes ont presque chuté. La plupart des maisons sont en dur. Comptant plus de 24.000 habitants répartis dans 44 villages dont 39 électrifiés, elle est la porte du Boundou. Sa population est constituée par les Peuls, qui sont les premiers à s’y installer, viennent ensuite les Soninkés et les Bambaras. « Les Peuls sont les premiers à s’installer à Gabou. La famille Sy qui assure la Chefferie a ensuite accueilli les autres groupes. Les Bambaras viennent du Mali et sont descendants d’une femme appelée Aïssa Coulibaly qui a rejoint son mari à Gabou avec beaucoup de ses parents. Les Soninkés proviennent de la famille maraboutique Wagué venue du Fouta et accueillie par mon arrière-grand-père pour diriger les prières », détaille le chef de village de Gabou, Bocar Sy.
Terre d’émigrés
Pendant que le marché hebdomadaire bat son plein. Des jeunes se débrouillent dans un atelier de menuisier. L’un d’eux, Modou, a acquis l’expertise à Dakar pour monnayer son talent auprès des siens car il n’y a pas beaucoup de professionnels dans ce domaine. « Ces métiers sont rares ici, car la plupart des jeunes émigrent avant même l’âge de 20 ans. Il y a une forte colonie de Gabou en France. Ce sont eux qui portent quasiment l’économie. Les maisons en dur que vous voyez sont construites pour la plupart par eux. Idem pour les boutiques et cosmétiques », explique-t-il.
Devant un dépôt, Abdoulaye Faye manipule sa calculatrice. Très courtois et souriant, le bonhomme de grande taille propose une séance de thé. Le temps de parcourir les spécificités de la localité. « À mon avis, la première activité, c’est l’émigration. Après, viennent l’agriculture, l’élevage et le commerce. Ce sont les émigrés qui gèrent les maisons. Sans eux, les gens allaient mourir de faim et boire dans les mares », assure le commerçant au teint noir. « Rares sont les familles qui n’ont pas de parents en France. C’est leur destination préférée. Ainsi on compte, au minimum, un émigré par famille », souligne-t-il.
À côté de lui, Ousmane a fini de ranger quelques billets dans un portefeuille noué à la ceinture. Il n’est pas originaire de Gabou, mais il y séjourne depuis plusieurs années dans le cadre de ses activités économiques.
Âgé de 52 ans, il dépeint une localité fortement marquée par la solidarité familiale. « Ici, tu as l’impression que les gens n’ont aucun souci. Tellement ils sont modestes. Mais il y a plusieurs hommes et femmes qui détiennent la nationalité française et se déplacent quand ils veulent. Cela est, à mon avis, favorisé par une solidarité familiale ancrée dans leurs cultures. Si un émigré s’en sort bien, son premier réflexe est de transformer la maison familiale et ensuite de payer le billet pour son frère. Ça, c’est une réalité », soutient le commerçant.
Agriculture et élevage, les activités dominantes
Malgré la forte canicule imposée par une température qui a atteint les 40 degrés, Gabou vibre au rythme de l’activité économique et commerciale. Des centaines d’éleveurs guettent les clients et s’égosillent pour interpeller les passagers à bord des divers véhicules. En pantalon bouffant, le « tengadé » (chapeau traditionnel) sur la tête, Aboubacar a, devant lui, une trentaine de têtes. Et Gabou est son principal point de chute. « C’est un carrefour. Gabou est â 25 kilomètres de Bakel et à 40 kilomètres de Kidira. C’est un passage obligé pour tout voyageur. Et nous en profitons pour exposer nos troupeaux au bord de la chaussée. Et les voyageurs n’hésitent pas à acheter », sourit-il, déplaçant difficilement un abreuvoir. Aliou Sylla a quasiment le même accoutrement. Du boubou aux chaussures en plastique, il est tout en bleu. À l’aide d’un bâton solide, il oriente et canalise sa dizaine de têtes de moutons et de chèvres. Vivant à Gabou, il capitalise 25 années dans le secteur de l’élevage. Il y est né d’ailleurs. Et c’est son filon, son gagne-pain. « La forêt est immense. Donc l’élevage est une activité propice à Gabou. Et nous nous en sortons, même si nous souffrons des braquages et du vol de bétail. Nous approvisionnons même des marchés hebdomadaires », dit-il, à un taximan, qui assure la traduction.
Non loin de cette aire de repos et de business des éleveurs, les plants poussent. C’est la rayonnante verdure. En tee-shirt vert, Moussa Gaye, travailleur saisonnier, se confond avec la nature. Dans ce champ, ses collaborateurs et lui cultivent de la carotte, du chou et d’autres légumes. Les récoltes sont ensuite acheminées vers les marchés permanents et hebdomadaires. « À côté de l’élevage, il y a l’agriculture, notamment le maraîchage. Ici, les légumes ne sont pas chères, car les productions sont importantes. En un mois, certains gagnent près d’un million de FCfa », indique le trentenaire. Même si l’activité marche bien, il souffre des difficultés d’accès à l’eau. « Parmi les problèmes auxquels nous sommes confrontés, il y a la maîtrise de l’eau. Les systèmes modernes d’arrosage ne sont pas assez développés. L’eau des mares est également polluée par endroit. Son utilisation comporte des risques », décrie Moussa.
Du social et des initiatives de développement
À Gabou, deux choses sont chères aux populations, notamment les émigrés. L’une est la solidarité familiale, l’autre est l’implication pour un meilleur cadre de vie et le développement. Ainsi souligne Ousmane, dans plusieurs villages de la commune, les populations qui se sont mobilisées pour la construction d’infrastructures telles que les écoles, les garderies d’enfants. « Je peux compter plusieurs villages dans lesquels l’Etat n’intervient que pour l’affectation d’enseignants et du personnel de santé. Car les émigrés s’impliquent et n’hésitent pas à se cotiser pour construire ou réhabiliter une école ou un poste de santé », dit-il. Abdoulaye Faye embouche la même trompette. « Certes l’Etat a électrifié près de 40 villages et accompagné les éleveurs et les agriculteurs, mais les populations, fortement appuyées par les émigrés, jouent un rôle essentiel ». « Des millions sont investis chaque année dans des projets sociaux, contribuant ainsi au bien-être des populations », assure Abdoulaye Faye.
Pour le chef de village, Bocar Sy, les émigrés jouent un rôle à la fois social et économique. « Les émigrés accompagnent l’Etat. Ils ont contribué à la construction d’un forage, d’un château d’eau et à l’installation des robinets partout dans le village. Ainsi que d’autres infrastructures telles que la grande mosquée de Gabou. Pendant la fête de Korité, des tas de viande sont distribués aux populations », informe le chef de village de Gabou, Bocar Sy.
Le Peul, le taureau et l’origine du nom Gabou
D’où viennent les noms des villes et villages ? C’est une question qu’on se pose souvent. À Gabou, le secret est dévoilé. Et tout est parti d’une prédiction d’un soufi se basant sur un taureau et un berger peul. « Il y a eu des tiraillements et un marabout leur a dit qu’il allait mettre le pouvoir sur le taureau noir. L’endroit où il se couchera est le lieu où il faudra s’installer », raconte le chef de village, Bocar Sy. « Dieu a fait qu’ils ont suivi le taureau jusque dans un village. Subitement, l’animal se coucha à côté d’un Peul. Comme ce dernier s’appelait Gabou Ndendé, Gabou a été retenu comme nom du village. Cet homme venait du Fouta, précisément de Kobilo », indique-t-il.
LE RIZ DE PLATEAU TRACE SON SILLON DANS LE BASSIN ARACHIDIER
Installer la culture du riz dans les mœurs agricoles dans une zone où l’arachide est encore roi. C’est l’ambition du gouvernement du Sénégal dans le cadre de son programme de souveraineté alimentaire
Installer la culture du riz dans les mœurs agricoles dans une zone où l’arachide est encore roi. C’est l’ambition du Gouvernement du Sénégal dans le cadre de son programme de souveraineté alimentaire. Dans la région de Kaffrine, des producteurs s’y essaient avec plus ou moins de bonheur.
Au bout d’un chemin vicinal ceint par de hautes herbes et des champs épanouis de maïs et de mil que surplombent des arbres géants par-ci, par-là, une petite exploitation rizicole d’une superficie d’un hectare et demi fleurit à côté d’un champ d’arachide. Pas de bas-fonds ni de terres inondées ; les touffes de feuilles étroites et dressées d’un vert clair poussent sur une terre moite. Les cultures, de la variété Nerica 8, sont au stade R1. Le propriétaire, Elhadji Babou Dieng, a procédé aux semis le 11 juillet dernier dans cette écologie de plateau située dans le village de Bouchra, à deux kilomètres de la commune de Ndiognick, département de Birkilane, région de Kaffrine.
Zone arachidière par excellence, le bassin arachidier, constitué des régions de Kaolack, de Kaffrine et de Fatick, renferme un potentiel rizicole très peu exploité jusque-là. Mais, avec les stratégies du Gouvernement appuyées, dans un passé récent, par ses partenaires, comme le Japon, dans le cadre du Projet d’appui à la production durable du riz pluvial dans le bassin arachidier (Prip) 2015-2019, la culture du riz est en train de se faire, petit à petit, une place à côté de l’arachide et du mil.
Cette diversification agricole vise à transformer le bassin arachidier en zone agricole conformément au souhait du Président de la République, selon le Ministre de l’Agriculture et de l’Équipement rural, Moussa Baldé, jeudi dernier, à l’issue de sa visite à Ndiognick. « Avec ce que nous avons vu ici, on peut dire que le Sine-Saloum n’est plus seulement un bassin arachidier, mais un bassin agricole pour toutes les spéculations. Ici, on peut sauter d’un champ de riz à un champ de maïs et d’un champ de mil à un champ de niébé. Cela prouve que la souveraineté alimentaire du Sénégal peut être très rapidement atteinte avec la région de Kaffrine puisque partout, on peut maintenant faire du riz, alterner avec l’arachide, du mil, du maïs, du niébé », s’est-il réjoui. Non sans féliciter les producteurs de la région pour leur engagement ainsi que l’administration territoriale, le Directeur régional du Développement rural et toute son équipe pour avoir fait en sorte que la mise en place des intrants soit optimale. Le Ministre est d’avis qu’avec les emblavures de cette année, la donne va changer et que la souveraineté alimentaire, une priorité pour le Gouvernement, pourra être une réalité au Sénégal.
Diversifier pour bien et mieux se nourrir
Les orientations étant claires, les efforts sur le terrain pour le développement de la culture du riz de plateau commencent à porter leurs fruits, selon les acteurs. Pour eux, l’enjeu est de diversifier les cultures pour ne plus être à la merci des caprices du ciel. Ainsi, il est devenu quasiment rare de voir, dans le Sine-Saloum, des périmètres où ne pousse qu’une seule spéculation. « Je cultive du riz sur un hectare et demi, l’arachide sur 10 hectares, le maïs sur six hectares, le mil sur quatre hectares et aussi du niébé fourrager », confirme Elhadji Babou Dieng. Selon lui, l’époque où l’on estimait que le riz ne pouvait pas pousser dans le Saloum à cause de la salinité des terres ou des pauses pluviométriques est révolue. « Les temps ont changé. Je l’expérimente depuis 2016. Nous avons juste besoin de matériels de récolte et de transformation pour s’y engager davantage », indique ce producteur. En effet, selon lui, l’absence de batteuse est un frein, car ici, les femmes n’ont pas l’habitude de la transformation manuelle du riz comme elles le font avec le mil, par exemple. « Parfois, il faut se rendre jusqu’en Gambie pour la transformation. Si nous avons l’équipement nécessaire, il n’y aucune raison que la culture du riz ne se développe dans le bassin arachidier. Les possibilités existent et on n’a pas besoin de beaucoup d’engrais. Par exemple, pour cette parcelle, je n’ai mis que deux sacs et demi d’urée, plus de l’engrais organique composé de résidus de coques d’arachide. Il n’y a aucun engrais chimique », explique Elhadji Babou Dieng.
Le maire de Ndiognick et nouvellement élu député pour le compte du département de Birkilane, Ndéry Loum, abonde dans le même sens. Il encourage les producteurs à diversifier les cultures parce que c’est la voie vers l’autosuffisance alimentaire.
Le Ministre Moussa Baldé promet le soutien de l’État aux producteurs de la zone en matière d’équipements de récolte et de transformation. Une aide qui serait la bienvenue, d’autant plus que, dans le cadre du programme Projet de valorisation des eaux pour le développement des chaines de valeur (Provale-Cv), 20 hectares de riz sont en cours d’exploitation dans la commune de Ndiognick et 18 hectares à Keur Birame. « On veut manger le riz qu’on cultive comme on mange notre propre mil et maïs. On veut qu’on retrouve, dans chaque famille, au minimum un demi hectare ou un hectare de riz », martèle Elhadji Babou Dieng. Assurément, dans le bassin arachidier, où le potentiel d’emblavure est non négligeable, les gens commencent à prendre conscience de l’importance de cultiver du riz à côté des spéculations traditionnelles. Les techniques de production de cette céréale ayant été assimilées par les producteurs qui s’y intéressent.
TOUSSAINT MANGA DÉMISSIONNE DU PDS
L’ancien député libéral a quitté le parti à travers une lettre adressée au secrétaire général national, Abdoulaye Wade. Candidat malheureux aux locales de janvier, M. Manga n’a pas été investi lors des dernières législatives
L’ancien député libéral, Toussaint Manga, a quitté le Parti démocratique sénégalais (Pds). Il a annoncé sa démission à travers une lettre adressée au secrétaire général national, Me Abdoulaye Wade.
« C’est avec beaucoup d’émotions que je vous adresse ces quelques mots pour vous présenter ma démission de toutes les instances du parti (Secrétariat national, Comité directeur et Fédération de Ziguinchor) et par conséquent la fin de mon militantisme au sein du Parti démocratique sénégalais », a-t-il dit dans sa note qu’il a publiée, ce dimanche, sur sa page Facebook.
Toussaint Manga a, par ailleurs, rendu « un vibrant hommage » au ‘’Pape du Sopi’’ qu’il a également remercié pour tout ce qu’il a « fait pour l’humanité, l’Afrique, le Sénégal et pour moi-même durant mes 23 ans de militantisme actif dans le parti. Je vous en serai éternellement reconnaissant ».
Candidat malheureux aux élections territoriales de janvier 2022, M. Manga n’a pas été investi lors des dernières Législatives. D’ailleurs, au cours d’un point de presse, il avait dénoncé un « mépris politique », constatant l’absence des Libéraux dans les choix faits par l’inter-coalition ‘’Yewi-Wallu’’ au niveau des départements de Bignona, d’Oussouye et de Ziguinchor.
LE BILAN DE LA JUNTE MALIENNE AU POUVOIR JUGÉ CATASTROPHIQUE
Pour le Cadre d'échange réunissant une dizaine de partis et regroupements de partis, la situation se dégrade dans presque tous les domaines et de graves menaces pèsent sur l'unité et la souveraineté nationales
Au Mali, une coalition de partis juge "catastrophique" le bilan de la junte après deux ans d'exercice du pouvoir. Dans un communiqué, le Cadre d'échange fait ainsi entendre une rare voix dissonante.
Le 18 août 2020, un groupe de colonels, dont le futur chef de la junte Assimi Goïta, a renversé le président Ibrahim Boubacar Keïta après des mois de contestation contre l'incapacité à stopper l'expansion jihadiste et la violence, le marasme économique et la corruption. Un second coup d'Etat en mai 2021 a renforcé leur emprise.
Les expressions dissidentes sont devenues exceptionnelles, étouffées par les injonctions à l'unité nationale et les mesures répressives.
Une coalition s'est cependant alarmée de la situation.
"Le bilan est catastrophique et la situation est inquiétante", dit la coalition regroupée sous le nom de Cadre d'échange, dans un communiqué reçu samedi par l'AFP.
Le Cadre d'échange réunit une dizaine de partis et regroupements de partis, dont le Rassemblement pour le Mali de l'ancien président Keïta et le Yelema de l'ancien Premier ministre Moussa Mara.
Pour lui, "la situation se dégrade dans presque tous les domaines et de graves menaces pèsent sur l'unité et la souveraineté nationales".
La "presque totalité du territoire" est sous le contrôle des jihadistes qui "montent visiblement en puissance"; "le panier de la ménagère n'a jamais été aussi vide"; "les libertés fondamentales sont régulièrement violées", détaille-t-il.
Par ailleurs, le Mali "s'enfonce dans un isolement diplomatique inédit", dit-il.
Le deuxième anniversaire du 18 août 2020 n'a donné lieu à aucune manifestation officielle. C'est après le putsch de 2021, l'investiture du colonel Goïta comme président et la nomination d'un nouveau Premier ministre qu'a été engagée une politique de rupture.
La junte s'est tournée vers la Russie et a rompu avec la France et ses alliés. Le dernier soldat de l'opération antijihadiste française Barkhane a quitté le Mali lundi.
Les autorités s'enorgueillissent d'avoir résisté aux pressions internationales et restauré la souveraineté du pays et d'acculer les jihadistes à la défensive.
L'état-major a revendiqué samedi dans un communiqué d'avoir "neutralisé" depuis début août 81 jihadistes lors de différentes opérations. Il a fait état de quelques blessés dans les rangs de l'armée. Il a rapporté les premières frappes d'un Soukhoi-25 livré en août par le partenaire russe.
Toutes ces données sont quasiment invérifiables.
Vendredi, les partisans de l'imam Mahmoud Dicko, influent personnage public qui avait été la figure tutélaire de la contestation en 2020, avait juqé que "la situation politique et sécuritaire et politique du pays (restait) préoccupante malgré quelques avancées dans certains domaines".
"Le pays est en train de s'enliser dans un mode de gouvernance caractérisé par la promotion de la propagande, la diversion, le bâillonement de la liberté d'expression, les crises diplomatiques avec nos partenaires, la distinction (entre) bons et mauvais Maliens", disaient-ils dans un communiqué.
LA RTS ET E-MEDIA SE DISPUTENT L'EXCLUSIVITÉ DES DROITS DE RETRANSMISSION DU MONDIAL
Chacun des deux groupes de presse prétend détenir le paquet exclusif de la diffusion des matches sur toute l’étendue du territoire sénégalais
Énorme quiproquo dans le secteur de l’audiovisuel sénégalais ? À quelque trois mois du début de la Coupe du monde « Qatar 2022 », la Rts et E-media Invest s’arrogent les droits de retransmission de la plus prestigieuse compétition de football qui soit. Chacun des deux groupes de presse prétend détenir le paquet exclusif de la diffusion des matches sur toute l’étendue du territoire sénégalais.
À la suite de la publication, jeudi dernier, d’un communiqué par la Radiodiffusion télévision sénégalaise (Rts) faisant état de l’acquisition des droits exclusifs de retransmission de la Coupe du monde « Qatar 2022 », le groupe de presse privé E-media Invest est immédiatement monté au créneau pour apporter quelques éléments de précision. En effet, cette exclusivité réclamée par la télévision nationale n’a pas fait bon écho au sein du groupe de Mamoudou Ibra Kane.
Dans un communiqué publié sur son site, ledit groupe a affirmé détenir depuis plusieurs semaines ces droits exclusifs, par le biais d’un contrat en bonne et due forme signé avec le détenteur des droits de distribution de la compétition en Afrique subsaharienne. « À 95 jours du coup d’envoi de la 22e édition de la Coupe du Monde « Qatar 2022 », la Rts a publié un communiqué annonçant avoir acquis les droits exclusifs de retransmission de cette compétition grâce à l’appui de l’État du Sénégal. Pourtant, le groupe E-media Invest dispose, depuis plusieurs semaines, des droits de diffusion en exclusivité sur tout le territoire national, via ses différents supports (radio, télé et digital), droits acquis auprès de son partenaire New World TV LTD, le groupe basé à Lomé, au Togo, détenteur des droits de distribution de la compétition en Afrique subsaharienne. Un contrat en bonne et due forme, en cours d’exécution, comme prévu, malgré les manœuvres souterraines, la désinformation et les coups de pression d’ici ou d’ailleurs », peut-on lire dans le communiqué.
Or, la télévision nationale Rts a informé un peu plus tôt avoir acquis le paquet exclusif concernant la diffusion en direct des matches sur tous ses supports, le visionnage en public (fanzone, projections dans les salles de cinéma), diffusion des cérémonies d’ouverture et de clôture, les highlights et les replays. La Coupe du monde, étant un rendez-vous majeur qui offre des opportunités de communication inédites, les deux groupes de presse vont sans doute se livrer une farouche bataille pour obtenir l’exclusivité des droits de retransmission. Même si toutes les deux parties brandissent des contrats pour légitimer les accords signés sous le contrôle effectif de la Fifa en échange sans doute d’une somme colossale d’argent, aucune d’elles ne voudra voir l’autre chaîne diffuser la même compétition dans la même zone géographique.
« New World Tv » tranche le débat
Alors que les partenaires et annonceurs sont plus que jamais suspendus aux lèvres des autorités de la société adjudicataire des droits en Afrique pour en connaître un peu plus sur l’issue de cette bataille, Me Louis Biyao, avocat de New World Tv, la société adjudicataire des droits de diffusion en Afrique auprès de la Fifa, a donné la position du groupe qu’il représente. Selon nos confrères de « Dakar actu », le juriste a confirmé la signature d’un contrat avec le groupe E-media le 24 juin 2022. Mais, toujours selon l’avocat, « le groupe n’a pas respecté ses engagements. Ce qui entraîne la résiliation avec effet immédiat dudit contrat ». Ainsi donc, affirme Me Louis Biyao, « la Rts qui s’est acquittée de tous ses devoirs est la seule détentrice des droits de diffusion de la Coupe du monde au Sénégal ».
PAR Emmanuel Dongala
PLEINE LUMIÈRE SUR LA LITTÉRATURE AFRICAINE
Désormais émancipés de la tutelle intellectuelle occidentale, décolonisés d’esprit, les écrivains africains saisissent à bras-le-corps leur(s) histoire(s) dans toute leur complexité et la racontent sans concession, en créant leur propre esthétique
La déferlante des écrivains d’Afrique et de la diaspora, déjà présente depuis une décennie au moins, s’est transformée cette saison en tsunami. Abdulrazak Gurnah (Prix Nobel 2021), Damon Galgut (Booker Prize 2022), David Diop (International Booker Prize 2021), Boubacar Boris Diop (Neustadt International Prize for Literature 2021), Djaïli Amadou Amal (Goncourt des lycéens 2020), sans oublier bien sûr Mohamed Mbougar Sarr (Prix Goncourt 2021).
D’aucuns peuvent penser que cette belle moisson 2021-2022 n’est qu’un hasard heureux, dû à la publication simultanée de quelques bons livres. Il n’en est rien. La réalité est que ces prix ne dévoilent que la partie émergée de l’iceberg de l’immense réservoir d’écrivains talentueux originaires du continent et de sa diaspora. Pour preuve, dans la plupart des cas, d’autres auteurs africains figurent dans la liste des finalistes. Ainsi, sur la liste finale du Booker Prize dont Damon Galgut est sorti vainqueur, se trouvait également une écrivaine somalienne, Nadifa Mohamed. Plus parlant encore, deux des cinq de la short list du Booker 2020 étaient Africaines, la Zimbabwéenne Tsitsi Dangarembga et l’Ethiopienne Maaza Mengiste.
Une explosion sur la totalité du continent
Dans le même sens, il faut aussi prendre en compte tous ces écrivains dont les ouvrages sont retenus dans la liste des «Meilleurs livres de l’année» établie chaque année par des grands magazines littéraires. Ainsi, pour le New York Times Book Review, le meilleur roman 2021 a été celui de l’écrivaine camerounaise Imbolo Mbue. Ces talents se retrouvent également dans les domaines dont on parle moins: citons la Nigériane Nnedi Okorafor, couronnée deux fois, respectivement par le Hugo Award et le Nebula Award, les deux prix les plus prestigieux de la science-fiction.
Enfin, il faut rappeler que bien avant Abdulrazak Gurnah et Damon Galgut, les Nigérians Wole Soyinka et Ben Okri ont été respectivement lauréats du Prix Nobel (1986) et du Booker Prize (1991). Je ne peux m’empêcher ici de mentionner un prix non littéraire, le Prix Pritzker d’architecture, considéré comme l’équivalent du Nobel de la discipline, attribué au Burkinabé Diébédo Francis Kéré, une première pour un Africain.
L’un des aspects les plus gratifiants de cette explosion littéraire à laquelle nous assistons est qu’elle se manifeste sur la totalité du continent, du Cap à Dakar, de Yaoundé à Addis-Abeba, de Zanzibar au Mozambique. Elle touche aussi bien les aires anglophone que francophone et lusophone où le Prémio Camões, le prix le plus prestigieux dans cette langue, a été décerné à la Mozambicaine Paulina Chiziane pour l’ensemble de son œuvre. Je ne peux que recommander la lecture de son roman Le Parlement conjugal: une histoire de polygamie (Actes Sud, 2006).
Pourquoi la reconnaissance a-t-elle attendu?
Une chose d’importance à noter également: la contribution à ce boom littéraire est paritaire, les écrivaines y participent autant que les écrivains, comme le démontrent les quelques exemples que j’ai cités plus haut.
Pourquoi cette littérature n’acquiert-elle cette haute visibilité que maintenant? Cela est dû à la conjonction de plusieurs facteurs. D’abord, le monde est plus ouvert à la diversité. Il fut un temps où, en France, seule Présence Africaine (et peut-être un peu Le Seuil) publiait les auteurs africains. Aujourd’hui, toutes les grandes maisons françaises d’édition les publient, non pas en leur offrant une niche en tant qu’«auteurs africains», mais en les traitant comme tout auteur, sur le seul critère de la valeur littéraire de l’œuvre. Cela a permis de susciter une riche émulation créatrice.
ENTRE POLÉMIQUE ET RUPTURE, OUSMANE SONKO COMPTE BIEN POURSUIVRE SON ASCENSION
Il est surtout l’élu de cooeur d’une partie de la classe moyenne et de la jeunesse du pays. Il accuse Macky Sall et la France de l’empêcher de se présenter à la présidentielle. Il s’est déclaré candidat le 18 août dernier, avant tout le monde. Portrait
À 49 ans, sorti renforcé des législatives, Ousmane Sonko est un poids lourd de la politique au Sénégal. Ce ténor de l'opposition n’en est pas moins polémique, accusé de viols répétés sur une jeune femme ce qu'il nie. Il est surtout l’élu de coeur d’une partie de la classe moyenne et de la jeunesse du pays. Il accuse Macky Sall et la France de l’empêcher de se présenter à l’élection présidentielle. Il s’est déclaré candidat le 18 août dernier, avant tout le monde. Portrait.
Il est loin, le temps où Ousmane Sonko officiait en tant qu’inspecteur principal des impôts. Le poste était certes prestigieux, mais depuis, l’opposant s’est un peu plus affranchi des chiffres, pour rejoindre le monde verbeux des figures politiques. Le passage ne s’est peut-être pas fait tout en douceur, mais l’ascension elle, est fulgurante, en tout cas autant qu’elle puisse l’être à l’échelle de la politique.
Une ascension éclair
En 2014, il crée son propre parti, « Pastef les patriotes ». En 2016, il est radié de la fonction publique, selon des informations du journal Le Monde, pour avoir accusé le frère de Macky Sall de fraude fiscale. Il devient célèbre. Trois ans plus tard, le voilà élu député. En janvier, il est élu maire de Zinguinchor, principale ville de Casamance. La suite est connue de tous, au delà-même des frontières sénégalaises. En 2019, il brigue la présidence et arrive troisième. Jusque-là un opposant parmi d’autres, il est aujourd’hui le seul à pouvoir faire face à Macky Sall, les autres opposants ayant pour la plupart rejoint la coalition présidentielle.
Aux législatives du 31 juillet dernier, Sonko fait vaciller la majorité présidentielle grâce à l’alliance de sa coalition « Yewwi Askan Wi » (« Libérer le peuple » en wolof) avec celle de « Wallu Sénégal » (« Sauver le Sénégal »), menée par l'ex-président Abdoulaye Wade. L’alliance obtient 80 sièges face aux 82 sièges du parti présidentiel. Le chiffre est historique. Le camp présidentiel conserve la majorité absolue d'une courte tête grâce au ralliement d'un député élu.
"La coalition au pouvoir est à bout de souffle. La cherté des denrées, le renchérissement du prix de l'eau, les pratiques autoritaires autour des manifestations suivies de morts, expliquent ce vote-sanction contre le président", souligne à l'AFP l'analyste politique Maurice Soudieck Dione.
Souverainisme et panafricanisme
Ousmane Sonko est un défenseur du panafricanisme et encourage les solidarités avec d’autres pays d’Afrique. Il a notamment affiché un soutien appuyé au colonel Assimi Goïta, à la tête des autorités de transition du Mali, s’étant emparées du pouvoir suite à deux coups d’État en 2020 et 2021. Il dit "encourager le président Assimi Goïta parce qu'il n'a pas perdu la face ».
Sous sa direction, le Mali s'est détourné de la France et de ses anciens alliés et s’est tourné vers la Russie.
Ousmane Sonko tient d’ailleurs un discours souverainiste. Il défend l’indépendance du Sénégal et dénonce l’ingérence de la France dans les affaires du pays. L’ancienne puissance coloniale et les multinationales auraient selon lui une emprise économique et politique sur Dakar. Le responsable politique accuse également le président en exercice, Macky Sall, de travailler de concert avec la France pour l’empêcher de se présenter à l’élection présidentielle de 2024.
Selon lui, M. Sall serait à l'origine des dossiers « de terrorisme, de rébellion, de viol imaginaire fabriqués avec le soutien de la France ».
Ousmane Sonko s’adresse aussi à la population avec un discours social, dénonçant les élites du pays et la corruption. Ses détracteurs l’accusent de populisme. Ses nombreux partisans voient plutôt en lui un homme intègre, religieux, honnête.
Une ombre au tableau
Il est certes le champion de l’opposition, d’une partie d’une jeunesse issue de la classe moyenne et de petits fonctionnaires s’estimant mis à l’écart de la croissance économique. Pourtant, Ousmane Sonko traine avec lui des casseroles. Entre juin 2020 et février 2021, il est accusé d’avoir violé à plusieurs reprises une masseuse. Adji Sarr a aujourd’hui 22 ans. Depuis février 2021, elle vit comme une prisonnière dans la maison de sa tante, protégée en permanence par trois policiers.
Elle est encouragée à porter plainte par ses collègues, dit-elle dans une interview avec le journal Le Monde, le 2 février 2021, après avoir témoigné de plusieurs viols perpétrés par Ousmane Sonko au sein du salon de massage dans lequel elle travaille alors, dans un quartier résidentiel de Dakar. Elle accuse publiquement le chef de file politique. L’immunité parlementaire de Sonko est levée. Soutenu par ses partisans et d’autres responsables politiques qui parlent de « complot », il se rend à sa convocation au tribunal le 3 mars 2021. Sur le chemin, il est arrêté pour « troubles à l’ordre public » par le pouvoir en place.
Sonko, celui qui draine les foules
Le pays s’enflamme. Des milliers de jeunes en colère sortent dans les rues. Leur icône sous les barreaux, ils se mettent à jeter des pierres, s’attaquent aux supermarchés, les pillent. Face aux forces de l’ordre armées de gaz lacrymogènes et de jets d’eau, treize personnes meurent, près de 600 personnes blessées, selon les chiffres de la Croix Rouge. Les émeutes ne prennent fin qu’au 8 mars, jour de la libération d’Ousmane Sonko.
Depuis, l’enquête piétine. Le camp d’Ousmane Sonko accuse le régime de vouloir éliminer le principal opposant à Macky Sall, dont on ignore encore les vélléités de se présenter une troisième fois à l'éléction présidentielle ce que lui interdit la Constitution en l'état.
En juin 2022, de nouvelles manifestations éclatent dans le pays, entre jeunes en colère et policiers. Le parti d’opposition d’Ousmane Sonko est empêché de manifester. Il entendait protester contre l'invalidation par le Conseil constitutionnel de la liste de YAW, sur laquelle Sonko concourait pour être réélu à l’Assemblée nationale.
Cela n’aura pas empêché le carton plein de l’opposition aux législatives, pour qui le scrutin ne serait qu’une répétition de la présidentielle de 2024.