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29 avril 2025
Diaspora
LE FRANC CFA, UN BOULET POUR L'AFRIQUE SELON DUPONT-AIGNAN
La position de la France se dégrade dangereusement en Afrique à cause du franc CFA. C'est l'avertissement lancé par le député, qui voit dans cette monnaie le symbole d'une tutelle postcoloniale désormais rejetée par les peuples africains
Lors d'une table ronde à l'Assemblée nationale sur la souveraineté monétaire en Afrique le 29 mai, le député Nicolas Dupont-Aignan a appelé à une refonte complète du système monétaire entre la France et ses anciennes colonies, jugeant que le franc CFA est désormais vu comme "le maintien d'un lien ancien" dont il faut se défaire.
S'exprimant devant la Commission des Affaires étrangères, le président de Debout la France a estimé que "la dégradation de la position de la France en Afrique est catastrophique" en raison notamment du franc CFA. "Si nous continuons comme cela, nous aurons un sérieux problème", a-t-il mis en garde.
"Il n'y a pas de souveraineté nationale sans souveraineté monétaire", a asséné M. Dupont-Aignan, ajoutant: "Moi je comprends totalement la volonté des peuples africains de retrouver leur liberté monétaire qui est indissociable de la construction de leur avenir."
Dénonçant "un contre-sens total que la France s'arqueboute sur cette zone franc CFA", il a jugé que Paris "en devient le bouc émissaire et nous sommes en train de nous fâcher avec toute l'Afrique à cause de cela."
Sur le plan économique, le député souverainiste a plaidé pour que les pays africains puissent ajuster leur taux de change, actuellement arrimé à l'euro au sein de la zone franc. "Quand on a une monnaie trop chère, on ne peut pas se développer", a-t-il tranché, citant l'exemple du Sénégal qui "importe tout".
"C'est quand même incroyable de voir que tous les pays ont utilisé la dévaluation pour se développer et qu'on le nie à ces pays", a-t-il poursuivi, appelant à s'inspirer des stratégies monétaires menées par Singapour, l'Asie et les États-Unis.
M. Dupont-Aignan a donc plaidé pour "un retour à des monnaies nationales dans les pays qui le peuvent, Sénégal, Côte d'Ivoire, etc." Reconnaissant les défis pour les États les plus fragiles, il a souligné que "la difficulté est énorme" mais qu'une "vraie formation à la gestion d'une monnaie nationale" permettra d'y arriver.
Cette prise de position intervient sur fond de critiques grandissantes en Afrique sur le franc CFA, vu comme un symbole du néo-colonialisme français. Plusieurs pays ont déjà engagé une réforme, mais M. Dupont-Aignan appelle à aller plus loin pour rompre définitivement avec "le maintien d'un lien ancien".
L'ENFER DES PÈLERINS D'AIR SÉNÉGAL
Alors que de nombreux pèlerins attendaient déjà un vol retardé, la compagnie nationale a de nouveau déçu en annulant un vol prévu ce weekend. Depuis, près de 300 personnes sont bloquées à l'aéroport, sans informations fiables
Décidément, Air Sénégal est en train de devenir un fleuron à problèmes. Alors que sa responsabilité est engagée dans le retard d’un jour du vol A 1B devant transporter 290 pèlerins, la compagnie nationale a récidivé. En effet, les passagers du vol HC7023 de Air Sénégal dont le départ était prévu le samedi 1er juin à 06 40 à l’Aéroportinternational Blaise Diagne (Aibd) sont toujours cloués à Dakar.
Convoqués le vendredi 31 mai à 23 heures, les pèlerins ont déjà fait les enregistrements. Sauf qu’à l’heure de l’embarquement, Air Sénégal leur a dit qu’il n’y a pas de vol. Ils sont restés désemparés à l’aéroport. Non seulement, ils n’ont pas pu voyager à l’heure indiquée mais Air Sénégal les a fait attendre toute la journée au sein de l’aéroport, sans aucune information. C’est finalement vers 17 heures qu’Air Sénégal les a acheminés dans trois hôtels différents à Dakar notamment à Pullman, Novotel et Onomo. Jusqu’à hier, dans la soirée, les pèlerins étaient dans ces hôtels à attendre leur vol alors qu’ils ont payé leurs billets d’avion et fait leurs réservations d’hôtel à Médine.
Parmi les pèlerins de vol toujours cloués à Dakar à cause de Air Sénégal, il y en a qui sont pris en compte par les voyagistes privés. Le voyagiste privé Unacois Yoonu Maka dont au moins 98 pèlerins sont concernés attendent dans des hôtels de Dakar alors que l’Agence a payé les billets et rempli toutes les formalités du pèlerinage à La Mecque.
Il faut rappeler que ce vol annulé ce samedi faute d’avion est différent de celui du jeudi qui devait transporter 290 pèlerins. Finalement, après un retard d’un jour, ils ont pu trouver un vol dans la journée du samedi. Cheikh Bamba Dièye, directeur général de Aibd : «nous reconnaissons le tort qu’Air Sénégal vous a causé».
Malgré la polémique, il faut noter qu’Air Sénégal n’a fait aucune communication pour s’expliquer. Mais dans une vidéo disponible sur les réseaux sociaux, le Directeur général de l’AIBD s’est expliqué devant des pèlerins sur la situation. Sans donner les raisons de ces retards de vol enregistrés, Cheikh Bamba Dièye s’est contenté de reconnaître le désagrément causé par la compagnie nationale aux pèlerins. «Nous reconnaissons le tort et le désagrément qu’Air Sénégal vous a causé. Nous reconnaissons et assumons nos responsabilités dans ce retard. Nous allons prendre toutes nos responsabilités pour vous chercher un avion. Nous n’allons pas vous donner de fausses informations», a reconnu le Directeur de l’Aibd S.A non sans ajouter : «Il n’y a pas de solution possible. On ne peut pas vous mettre sur d’autres vols, c’est pourquoi on vous prie d’attendre, ne serait-ce qu’un jour, le temps de nous permettre de nous organiser et de vous convoyer.»
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UNE NÉCESSAIRE REFONDATION MORALE
Rompre avec le passé, punir les fautes, réformer et rassembler : l'universitaire Mamadou Diouf détaille les chantiers titanesques qui attendent le nouveau pouvoir afin de transformer durablement le pays
Pour l'éminent historien et professeur à Columbia University, Mamadou Diouf, l'avènement du duo Bassirou Diomaye Faye et Ousmane Sonko à la tête du Sénégal représente une formidable opportunité de "transformer en profondeur le système politique et institutionnel hérité depuis l'indépendance". C'est le message fort qu'il a livré dans l'émission "Objection" de Sud FM.
Analysant la rupture induite par cette nouvelle équipe dirigeante, le Professeur Diouf a relevé "leur organisation politique novatrice, leur capacité à se constituer en force autonome sans passer par les réseaux confrériques traditionnels". Un vent de fraîcheur et d'indépendance pour "permettre une véritable déconstruction du système clientéliste et néo-patrimonial".
Selon lui, les défis à relever sont immenses pour ces nouveaux leaders: "Non seulement rompre avec les pratiques antérieures, réformer en profondeur, mais aussi punir les fautes, tout en portant un projet rassembleur de reconstruction nationale et morale". Un chantier titanesque pour "recréer une citoyenneté dynamique" et "restaurer le rêve et le bonheur des jeunes sénégalais".
Pour y parvenir, Diouf a conseillé de puiser dans l'héritage de Senghor, "en s'appuyant sur le modèle des 'petites patries', où s'enracinent les solidarités communautaires". Un projet d'"enraciner le nouveau dans l'ancien" pour asseoir une véritable légitimité populaire.
Cependant, l'universitaire a également insisté sur le rôle crucial d'une opposition forte, entretenant "un dialogue permanent avec le peuple, seul détenteur légitime du pouvoir". Contrôler, mais aussi contribuer dans un esprit de "construction citoyenne".
Face aux immenses attentes, l'invité de Baye Omar Gueye a rappelé qu'"ils ne pourront relever les défis qu'avec les Sénégalais et en accord avec eux". Un chemin semé d'embûches, mais une perspective historique de changement véritable pour ce pays qui, selon lui, a urgemment besoin d'une "refondation morale globale".
LE SAHEL, UN ENFER POUR LES VOIX DISSIDENTES
Au Mali, au Burkina et au Niger, les juntes ont instauré un régime de terreur. Exils forcés, enlèvements, emprisonnements arbitraires... Telle est la cruelle réalité pour ceux qui osent s'élever contre la férule des nouveaux maîtres de la région
(SenePlus) - Depuis les coups d'État militaires au Mali, au Burkina Faso et au Niger entre 2020 et 2023, les juntes au pouvoir ont muselé toute opposition, traquant sans relâche les voix critiques. Hommes politiques, acteurs de la société civile et militaires sortis du rang se voient contraints à l'exil, au silence forcé ou à la prison, comme le rapporte une analyse du journal Le Monde.
L'avocat Guy Hervé Kam, figure de la contestation burkinabè, en a fait l'amère expérience fin mai. Brièvement libéré après son enlèvement en janvier, il a été de nouveau kidnappé le soir même par des hommes armés. Même traitement pour le lieutenant-colonel Emmanuel Zoungrana, ex-chef des redoutables "Mambas verts", incarcéré à plusieurs reprises depuis 2022.
Au Burkina, le régime du capitaine Traoré s'est "transformé en machine répressive infernale". L'ancien ministre Ablassé Ouedraogo, 70 ans, arrêté en décembre, a été envoyé 3 mois au front avant d'être libéré et de s'exiler au Canada. La junte a récemment prolongé son pouvoir de 5 ans sans ses opposants.
Au Mali voisin, Boubacar Karamoko Traoré, critique de la junte, a été arrêté lundi pour "atteinte au crédit de l'État". Oumar Mariko, vétéran de l'opposition, en exil à Paris, raconte sa fuite en mai 2022 pour "échapper à la traque des putschistes" après avoir dénoncé un massacre de civils imputé à l'armée et aux mercenaires russes de Wagner.
"A partir de ce moment-là, je ne suis plus retourné chez moi et suis entré en clandestinité", confie-t-il, fuyant d'abord vers la Côte d'Ivoire avant de rejoindre la France, d'où il organise des réunions en ligne avec ses militants.
Face à l'horizon démocratique bouché, des exilés ont formé samedi un "gouvernement civil de transition symbolique" pour diriger le Mali, appelant à manifester le 7 juin contre la vie chère. Mais seuls les pro-juntes peuvent désormais manifester librement à Bamako, Ouagadougou et Niamey.
"La vie politique s'est repliée sur les réseaux sociaux car il est désormais interdit d'exprimer des opinions contraires", déplore Chékaraou Barou Ange, ex-conseiller du président nigérien déchu, Mohamed Bazoum, détenu avec son épouse.
Un ancien ministre en exil estime que "le changement ne viendra pas des politiques mais de l'armée" face à la répression des juntes. "Il faut attendre que des militaires plus raisonnables viennent mettre un terme à leur pouvoir", espère-t-il, dans une région où la démocratie semble aujourd'hui une chimère.
par Patrick Chamoiseau
IL N'Y A PAS D'ULTRAMARINS, IL N'Y A QUE DES PEUPLES-NATIONS ENCORE SANS ÉTAT
La Kanaky (convulsive sous le mépris, la violence et la mort) offre à la vieille République française une occasion de se moderniser. Sa revendication exige une autre vision du monde. Elle demande un réexamen de ce qui se « crie » tristement « Outre-mer »
La Kanaky (maintenant convulsive sous le mépris, la violence et la mort) offre à la vieille République française une occasion de se moderniser. Sa juste revendication exige une autre vision du monde. Elle demande aussi un réexamen de ce qui se « crie » tristement « Outre-mer ». Cette estampille ténébreuse camoufle ensemble un système et un syndrome.
Système, parce que, depuis des décennies (déjouant les mannes européennes et les paternalistes plans de développement), tous les indicateurs mortifères attestent d'une évidence : ces situations humaines demeurent largement en dessous du niveau de bienêtre humain que l'on pourrait attendre de terres dites « françaises ». Syndrome, parce que dans ces pays-là, les signes pathologiques d'assistanat, de dépendance ou de déresponsabilisation sont les mêmes et sévissent de concert.
La mondialité
Via la Kanaky, ces pays méprisés par la France offrent à la compréhension du monde une réalité encore inaperçue. Celle-ci ne peut se percevoir par l'unique prisme du « colonial », comme le pensent encore les activistes décoloniaux. Le fait (ou mé-fait) colonial n'est qu'une donnée parmi d'autres. Il nous faut sortir de la prégnance occidentale (seule aujourd'hui à raconter le monde), et entreprendre d'inventorier, une à une, toutes les forces visibles et invisibles qui ont œuvré à l'accouchement de notre époque. En attendant, commençons par ouvrir notre focale à la mondialité.
Le poète Édouard Glissant appelait ainsi la résultante d'un tourbillon complexe. On y trouve enchevêtrées, les évolutions impénétrables du Vivant, les emmêlées des peuples, cultures et civilisations, résultant des chocs coloniaux, du broiement des empires, puis du capitalisme protéiforme. Une des résultantes cruciales de ce chaosmos : l'individuation. Cette force a éjecté des millions d'individus des vieux corsets communautaires pour précipiter leurs combats, leurs rêves, leurs idéaux, vers des accomplissements imprévisibles dans la matière du monde. Les individus les plus accomplis (ceux qui, de par leurs divers engagements, habitent sinon des communautés mais des multitudes de « Nous ») forment aujourd'hui une matière noire du monde bien plus décisive que celle des communautés archaïques ou des vieux États-nations. Dès lors, si la mondialisation économique est un standard barbare, la mondialité est une matrice vivante ; un en-commun infra-planétaire où les « Nous » s'entremêlent et relient par des agentivités créatives tout ce qui se trouvait séparé. C'est de cette matrice encore invisible à nos yeux que va surgir, tôt ou tard, un autre monde, encore imprédictible.
La relation
Cette mondialité peut nous aider à comprendre la Kanaky, et à mesurer combien la Constitution française est maintenant obsolète. Surtout inacceptable. Elle verrouille (sous une fiction absurde de « départements », « régions », « collectivités » ou « territoires » d'Outre-mer) des complexités territoriales, historiques et humaines qui lui sont étrangères. Ce ne sont pas des choses « ultramarines ». Ce sont des peuples-nations, encore dépourvus de structures étatiques ! Ils ont surgi d'une alchimie que les anthropologues reconnaissent maintenant comme étant une « créolisation ». Ce terme souligne ce qui se produit quand, de manière immédiate, massive et brutale, des peuples, des civilisations, des individus (mais aussi des interactions amplifiées entre les écosystèmes, biotopes et biocénoses) imposent aux existences une entité globale de référence : celle de Gaïa qu'aimait Bruno Latour, de cette Mère-patrie dont parle Edgar Morin, ou de ce chaosmos poétique que Glissant nomme Tout-monde.
Cet entremêlement inextricable du Vivant et des Hommes se serait inévitablement produit car notre planète est ronde et parce que le vivant est avant tout une mobilité. Prenons, la traite des Africains, l'esclavage de type américain, le système des plantations et des extractions massives. Ajoutons-y, la colonisation, le capitalisme, la prolifération urbaine et les systémies technoscientifiques, on aura alors à peine esquissé le plus visible d'un processus insondable : celui de la Relation. Cette notion du tout relié à tout dans des fluidités inter-rétro-actives constitue le principe actif de la créolisation. C'est d'elle qu'ont surgi ces peuples-nations que la Constitution française ne comprend pas. Elle les verrouille sous un effarouchement « indivisible » et fonde sa cinquième République sur un aussi fictif que monolithique « peuple français ». Elle réduit ainsi à de simples « populations » les entités humaines formidables que son bond colonial et son histoire relationnelle ont rendu solidaires de sa présence au monde.
Peuples ataviques et peuples composites
Mais le plus important, c'est ceci : dans la Relation, dessous le couvercle « Outre-mer », il y a aujourd'hui deux types de peuples : les peuples ataviques et les peuples composites. Les peuples ataviques (mélanésiens de Kanaky ; polynésiens ; mahorais ; peuples originels de Guyane…) disposent d'une antériorité multimillénaire sur l'emprise du mé-fait colonial.
Les peuples composites (Martinique, Guadeloupe, Réunion...) sont des surgissements (des créolités) de la créolisation. Complètement nouveaux, ils sont les derniers peuples de l'aventure humaine à être apparus sur cette terre. Ils n'ont pas d'antériorité qui se perd dans la nuit des temps. Ils sont nés dans le vortex relationnel où se retrouvent les communautés fracassées et les individuations. Ils mélangent presque toutes les présences anthropiques planétaires. La conscience qu'ils ont désormais d'eux-mêmes en fait de véritables nations qui attendent d'être reconnues comme telles — ce que ne nul ne sait faire, à commencer par les politiciens français qui distinguent encore à peine les peuples ataviques et rechignent à comprendre leur revendication d'une existence au monde.
La Martinique, la Guadeloupe ont vécu la « désapparition »2 de leurs peuples ataviques. En Kanaky, le peuple atavique des Kanaks a traversé héroïquement les exterminations. Il constitue une part déterminante du peuplement actuel qui, avec les diverses migrations et le choc colonial, est dorénavant une entité post-atavique. Car le mé-fait colonial et ses fluidités migrantes collatérales ont installé des complexités anthropologiques désormais inextricables. Elles obligent les peuples ataviques à composer avec des implantations nées de la colonisation et des mouvements relationnels du vivant. C'est la beauté de Nelson Mandela d'avoir su admettre la présence blanche dans le devenir de l'Afrique du Sud alors qu'il avait le pouvoir de la frapper. C'est la beauté de Mahmoud Darwich et des grands politiques palestiniens confrontés à l'irréversible implantation des Juifs. C'est surtout la beauté de Jean-Marie Tjibaou d'avoir accepté l'hybridation caldoche alors que cette dernière avait (conserve encore) de son sang sur les mains… L'agentivité de ces hommes ne s'est pas laissée enfermer dans un imaginaire communautaire ancien ou dans les frappes et contres-frappes coloniales : elles les ont dépassés pour deviner la mondialité et pour donner une âme fraternelle à la Relation. Ces hommes ont maintenu ainsi — pour tous, au nom de tous — une espérance.
L'éthique d'un nouveau vivre-ensemble
Dès lors, une éthique de la Relation s'impose. Quand le peuple atavique subsiste dans une sédimentation composite, la bienséance du nouveau vivre-ensemble exige de lui remettre la prééminence sur le devenir de son pays : nul ne saurait démanteler ce qui l'unit à sa terre, laquelle est toujours faite (comme le disait Jean Guiart) du sang noble de ses morts.
Quand le composite est entièrement fondateur d'un nouveau peuple, il faut — non pas ignorer son existence (comme cela se fait actuellement en France pour la Guadeloupe ou pour la Martinique), mais considérer qu'il y a là une entité nouvelle, qui n'est réductible à aucune de ses composantes, qu'elle soit dominée, qu'elle soit dominante, et qui détient une autorité légitime sur le devenir de sa terre.
Le devenir des peuples ataviques est d'être post-atavique, et progressivement composite, dans l'énergie relationnelle du vivant. Celui des peuples d'emblée composites, est d'aller de la manière la plus haute, la plus humaine, la plus poétiquement ouverte et fraternelle, aux fastes de la Relation.
C'est cet imaginaire de la Relation qui nous donnera le goût de la diversité qui est au principe du vivant, d'en percevoir la profonde unité qui n'a rien à voir avec l'Universel occidental, et d'en goûter l'inépuisable diversité dont le trésor est cette insaisissable unité qui ne vit, ne s'accomplit, que dans son évolutive diversité.
Une Kanaky Kanak
Cette éthique oblige donc que le corps électoral de Kanaky n'autorise aux votes déterminants que les Kanaks. Que s'y adjoignent ceux qui, venus d'ailleurs, ont été identifiés par les accords de Nouméa (1988,1998). C'est l'autorité à venir, à prépondérance kanake, qui seule pourra décider des évolutions de son système électoral.
Kanaka signifiait : être humain. Kanak signifie pour nous, pour tous, l'espérance possible d'un nouvel humanisme. Restituée à son imaginaire kanak, la Kanaky disposera de toutes les chances pour trouver un nouvel espace-temps, échapper à la gravité morbide du trou noir capitaliste, réenchanter notre rapport au vivant, et habiter enfin poétiquement la terre selon le vœu de ce cher Hölderlin.
Quant à la modernisation relationnelle de la Constitution française, elle est très simple : il suffit de proclamer une sixième République ; de la rendre capable d'accueillir en pleine autorité tous les peuples-nations (peuples nouveaux de la Relation) qui le voudraient ; d'inaugurer ainsi le pacte républicain ouvert qu'exige la nouvelle réalité (post-coloniale, postcapitaliste, post-occidentale) qu'annonce notre mondialité.
L'exploitation du nickel, le domaine maritime, la biodiversité, l'activité spatiale ou le souci géostratégique doivent désormais s'inscrire dans le respect des peuples concernés. Nous avons rendez-vous là où les océans se rencontrent, disait mystérieusement Glissant. Que disparaisse dans cette rencontre l'Outre-mer de la France !
Patrick Chamoiseau, poète, romancier, essayiste, a construit une œuvre protéiforme couronnée de nombreuses distinctions (Prix Carbet de la Caraïbe, Prix Goncourt, Gallimard,1992, Prix marguerite Yourcenar en 2023…) et traduite dans le monde entier. Son esthétique explore la créolisation et les poétiques relationnelles du monde contemporain. Il est aujourd’hui une des présences littéraires les plus importantes de la Caraïbe.
Ce texte a paru en version réduite dans le Libération du 24 mai.
par Nioxor Tine
DES AUTOROUTES DE LA DÉMOCRATIE ET UN TRAIN EXPRESS DU RENOUVEAU
L’Etat hyper-présidentialiste et directif, en vigueur jusque-là, reposant sur le triptyque : « police politique – justice instrumentalisée – assemblée aux ordres » ne peut servir à construire le nouvel ordre décolonial
Ce serait faire preuve de mauvaise foi, que de tenter de sous-estimer le rôle capital que le Pastef et ses dirigeants ont joué dans l’avènement de ce que beaucoup d’observateurs qualifient volontiers de la révolution du 24 mars 2024, différente, à tous points de vue, de l’alternance survenue, douze ans auparavant, presque jour pour, un certain 25 mars 2012.
Pour ce qui est du président Macky Sall, il s’agissait de la rébellion d’un cadre politique "docile" et loyal, ayant occupé de prestigieuses fonctions étatiques, contre son tout-puissant mentor, Me Wade, désireux de procéder à une dévolution monarchique du pouvoir au profit de son fils biologique. Cela allait, lui ouvrir, accidentellement, la voie à la magistrature suprême, surtout après la dislocation de Benno Siggil Sénégal, regroupant des hommes politiques expérimentés issus de la gauche socio-démocrate et marxiste.
Quant à Ousmane Sonko, son activité politique s’est toujours déroulée sous le sceau de la collégialité, reposant sur un solide socle programmatique, centrée sur la rupture avec l’ordre néocolonial obsolète, ainsi que sur la promotion des valeurs de bonne gouvernance, de justice sociale, de souverainisme et de panafricanisme.
Autant dire, que la démarche politique du Pastef présentait beaucoup de similitudes avec celle des partis de gauche ou nationalistes de la période post-indépendance, je veux parler du PAI historique, du RND, du MSU et d’AND-JEF, ainsi que des nombreuses formations politiques, qui en sont issues. C’est pourquoi, on retrouve dans sa direction des hommes politiques bien connus, qui ont osé tenter l’aventure avec les jeunesses patriotiques.
A contrario, d’autres partis, dont la contribution aux avancées démocratiques de notre pays est remarquable, ont fait montre d’une hostilité incompréhensible à l’endroit du Pastef, qui ne faisait que parachever, à sa manière, le combat, qu’ils avaient entamé, sans pouvoir le terminer, n’ayant peut-être plus la force ou les convictions d’antan. C’est ce qui les a conduits à devenir des défenseurs inconditionnels, voire des flagorneurs zélés du régime de régression démocratique et sociale de Benno Bokk Yakaar, frôlant le despotisme, qu’ils voulaient même pérenniser, en s’alliant avec une personnalité emblématique de cette tristement célèbre bourgeoisie bureaucratique, qui pille notre pays depuis plus de 60 ans.
C’était sous-estimer le niveau de conscience politique du vaillant peuple sénégalais, qui a résolu, de manière magistrale, cette équation politique simple (rupture ou continuité), que plusieurs opérateurs politiques bien ou malintentionnés n’ont eu de cesse de vouloir, complexifier.
Il s’en est donc suivi la victoire éclatante de la « Coalition Diomaye Président » au premier tour, qu’on doit se garder d'assimiler, trop rapidement, à un blanc-seing en faveur du Pastef et ses alliés, mais qui semble plutôt relever d’un ras-le-bol populaire contre le régime de Macky Sall et ceux qui l’ont précédé depuis plus de 60 ans, tous auxiliaires du système néocolonial.
Les masses populaires sénégalaises, à l’instar de celles des pays voisins frères, ont choisi de rompre d’avec la domination impérialiste, mère de la confiscation de nos souverainetés, de la prédation de nos ressources, de l’atteinte à nos droits et libertés et de l’injustice sociale.
Il s’agit, maintenant, pour le camp patriotique, de matérialiser cette profonde aspiration populaire pour un véritable changement, dont le premier chantier doit être celui de la reddition des comptes, qui devra, dorénavant, devenir systématique.
A observer le nouveau régime, qui s’apprête à boucler ses soixante jours et avant la fin de la période de grâce des cent jours, on ne peut manquer de se dire, qu’il est impossible d’accomplir l‘exaltante œuvre de « transformation systémique » sans refondation institutionnelle, c’est-à-dire un démantèlement radical de l’ancienne armature institutionnelle. Il faudra également garantir la préservation pleine et entière des espaces politiques et civiques, c’est-à-dire le respect des droits et libertés des opposants politiques, des travailleurs ou des professionnels de la presse…etc.
Il s’agit, avant tout, de construire des autoroutes de la démocratie et un Train Express du Renouveau, en s’inspirant de l’héritage des Assises nationales.
L’Etat hyper-présidentialiste et directif, en vigueur jusque-là, reposant sur le triptyque : « police politique – justice instrumentalisée – assemblée aux ordres » ne peut servir à construire le nouvel ordre "décolonial", qui ne peut émerger, que sous l’action volontaire et combinée des diverses classes et couches sociales intéressées à son avènement.
Ramener les dissidents au sein de la CEDEAO, une équation insoluble pour le Sénégal ? Après leur retrait, le Mali, le Burkina et le Niger semblent bien décidés à persister dans cette voie loin des "règles démocratiques" de l'organisation ouest-africaine
(SenePlus) - En visite officielle à Bamako et Ouagadougou jeudi 3 mai, le président sénégalais Bassirou Diomaye Faye s'est donné pour mission de convaincre le Mali, le Burkina Faso et le Niger de revenir au sein de la Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest (Cédéao), dont ils ont annoncé leur retrait en janvier. Une tâche ardue, selon une analyse de RFI.
"Leur décision est irréversible", ont martelé à plusieurs reprises les dirigeants de ces trois pays formant l'Alliance des États du Sahel (AES). Pourtant, à l'issue de sa visite, Diomaye Faye a jugé la position malienne "rigide, mais pas totalement inflexible", espérant poursuivre ses efforts de médiation.
Mahamadou Konaté, enseignant en relations internationales à l'Université de Bamako et directeur du Bureau d'études Donko, doute du réalisme d'une telle démarche. "C'est osé ! Lui-même sait que cela va être laborieux et que rien n'est gagné d'avance", déclare-t-il à RFI.
Selon Konaté, le retrait de la Cédéao est une "stratégie qui a fort bien réussi" pour l'AES, n'ayant essuyé aucune sanction depuis son annonce. "De leur côté, on peut sentir une unité très affirmée, une détermination. De l'autre côté, malheureusement, on sent de la division et de l'hésitation", poursuit l'analyste.
"Les États du Sahel qui ont choisi de se retirer de la Cédéao l'ont fait après un calcul", rappelle Konaté. Le Mali a déjà mis en place un comité dédié, réuni une première fois en avril, tandis que la consolidation de l'AES, présentée comme alternative à la Cédéao, avance à grands pas.
"Ils ont ficelé les projets de texte qui doivent organiser la confédération de l'AES, et qui seront bientôt validés par le sommet des chefs d'État", explique Konaté. "Pour le moment, la priorité c'est l'AES. Il ne faut pas se faire d'illusions : tant que ces pays ne jugeront pas nécessaire d'organiser des élections crédibles, rien ne bougera."
En effet, revenir dans la Cédéao impliquerait d'en accepter les règles démocratiques, une perspective qui n'intéresse guère les dirigeants de l'AES pour l'heure, même en cas de réforme de l'organisation sous-régionale.
Face à la détermination apparemment inébranlable des pays du Sahel, le président Diomaye Faye semble avoir un défi de taille pour les convaincre de renoncer à leur trajectoire de consolidation de l'AES
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LA RTS DÉNONCE DES TENTATIVES D'ENTRAVER LES RÉFORMES
La RTS monte au créneau pour défendre le cap du gouvernement. Dans un plaidoyer offensif, la chaîne publique dénonce les manœuvres déstabilisatrices et réaffirme son soutien à l'agenda de changement radical promis par le nouveau pouvoir
Dans un élément diffusé ce vendredi 31 mai 2024 sur ses antennes, la RTS a dénoncé les tentatives répétées de déstabilisation visant à saper la dynamique de rupture promise par la nouvelle équipe dirigeante. Selon la chaîne dite de service public, "pour les pourfendeurs de la nouvelle équipe gouvernementale, désormais aucune occasion n'est de trop pour saper la dynamique de rupture en cours."
La RTS a pointé du doigt les efforts constants déployés "pour empêcher au chef de l'État et son premier ministre de dérouler l'agenda" de changement radical tant attendu par la population. Malgré les axes clairement définis, il a reconnu que "des lignes vont forcément bouger une fois le travail achevé", ce qui semble déranger certaines sphères.
Évoquant "le milieu politico-affairiste organisé en lobby", la RTS estime que ce dernier était "décidé à faire face" au nouveau pouvoir, arrivé aux affaires avec "un score qui frôle presque le plébiscite". Cependant, prévient la chaîne de télévision, "vouloir se poser de cette façon, c'est s'engager dans une voie sans issue, un long tunnel où l'on risque de ne jamais voir le bout."
L'exemple le plus récent de ces tentatives de déstabilisation, selon la RTS, concerne "l'affaire Mélenchon et le faux débat sur les LGDTQ+", éclipsant le discours marquant du président sur les relations Afrique-Occident lors de la visite du leader français. Un discours qui "a fait écho dans le monde car fixant les nouveaux contours qui devront désormais gouverner un partenariat qui jusque-là était en défaveur de l'Afrique et du Sénégal."
De même, la polémique autour de la nomination de l'officier général Kandé comme attaché de défense a été balayée comme "une énième tentative de détourner l'opinion publique des pas positifs posés par le gouvernement". Citant le décret du 24 mars 2024, la chaîne a rappelé que cette nomination relevait "parfaitement" des prérogatives du chef de l'État.
PAR Yoro Dia
MONSIEUR LE PRÉSIDENT, LE TEMPS NE CHÔME PAS
Les assisses de la justice confirme la perte de temps parce que le président est tombé dans le piège des rentiers de la tension. Sonko confine Diomaye au Palais et dans les airs pour mener des combats idéologiques anachroniques
Le président de la République est parti des « assises pour redorer le blason de la justice » dans son discours du 3 avril à la nécessité d’éviter le « gouvernement des juges » dans le discours du 28 mai. Il a mis beaucoup d’eau dans son bissap. Immense paradoxe car quand on veut éviter un gouvernement des juges on reconnait au moins que la justice est un tant soit peu indépendante car on parle de gouvernement des juges dans un système où les juges sont trop puissants et ne sont donc pas à la botte de l’exécutif ou du moins n’écrivent pas sous sa dictée. Donc le président confirme que ces assises sont une perte de temps. Au Sénégal, l’Etat est soumis au Droit. Il n’y a que dans un pays où l’Etat est soumis au Droit que le Conseil constitutionnel censure l’exécutif plusieurs fois en quelques semaines et qu’un juge de province puisse en toute indépendance annuler une décision de l’Etat ou un avocat général va l’encontre de la volonté de l’Etat.
La seule urgence en matière de justice touche à l’économie qui est la seule et grande du pays. L’urgence en matière de justice est comment améliorer la sécurité juridique et judiciaire pour l’investissement et la croissance et en la matière la décision du président de la République et du Premier ministre d’arrêter arbitrairement les travaux sur la corniche est un mauvais signal pour l’investissement. Le président de la République n’est pas François 1er dont le « bon plaisir devient la loi » et la punition collective au-delà de violer le Droit est une injustice contre ceux qui ont fait l’effort d’être en règle. Un jour j’avais demandé au patron d’une grande entreprise de BTP pourquoi le choix du Sénégal en dehors de l’Allemagne pour un investissement de plusieurs milliards et sur plus de 20 ans. Il me répondit que pour des investissements aussi lourds le Sénégal avaient des avantages comparatifs : stabilité politique et sécurité juridique et judiciaire. La sécurité juridique judiciaire ne doit pas dépendre des humeurs du président et de son Premier ministre ou d’un courtisan affairiste.
Les assisses de la justice confirme la perte de temps parce que le président est tombé dans le piège des rentiers de la tension. Après les assises de la justice, ils vont lui proposer les assises du code électoral et réforme du système électoral dans un pays où notre grande administration peut organiser une présidentielle en 3 semaines et une transition entre deux présidents en 10 jours. Ils ne vont pas manquer de proposer naturellement une CENI sans oublier les assises de la décentralisation. Le candidat Amadou Ba proposait de faire gagner 5 ans au Sénégal dans sa marche vers l’émergence avec le gaz et le pétrole dont nous attendons incessamment les premiers barils. Malgré le pétrole et le gaz on est parti non pas pour gagner 5 ans mais pour en perdre avec un président sous la coupe des rentiers de la tension et un Premier ministre qui confine le président dans un rôle de Roi d’Angleterre ou de président d’Allemagne ou d’Israël. Sonko confine Diomaye au Palais et dans les airs pour mener des combats idéologiques anachroniques comme le souverainisme désuet. Le confinement politique du président permet au Premier ministre de s’approprier ses pouvoirs propres comme la politique extérieure et la défense où il étale son ignorance et surtout l’anachronisme de ses combats.
Lors de la deuxième guerre mondiale, le Japon qui a été dévasté par deux bombes atomiques américaines abrite encore des bases américaines. Il en est de même pour l’Allemagne qui abrite des bases américaines malgré leur défaite face aux américains parce que ces deux pays après avoir défini la géographie de leur intérêt national en ont conclu que l’alliance avec leur vainqueur étaient encore dans leur intérêt. Un célèbre ambassadeur de France à Dakar me racontait la torture d’être ambassadeur de France dans un pays francophone d’Afrique en disant quand tu ne dis rien, on dénonce l’indifférence et dès que tu ouvres la bouche on dénonce l’ingérence. Comment Sonko qui se dont le souverainisme n’est le refoulement du désir de résonance de la France peut reprocher à Macron de ne pas s’être ingéré dans nos affaires intérieures après avoir reçu fièrement chez lui des émissaires de l’Elysée. Dommage que Sonko ait reconnu que le Projet n’existe pas parce que au fond notre Premier ministre qui est un excellent dramaturge car la scénographie, le suspens de l’attente du projet a été digne du « mandat » de Sembene ou le « en attendant Godot » de Beckett. Donc en attendant Godot pardon le Projet en décembre comme le promet Sonko, espérons que Pastef sorte de l’indigence intellectuelle pour lui trouver au moins un nom. Maintenant que tout le monde sait que le Projet n’existe pas après les aveux de Sonko dans le communiqué du Conseil de Ministres du 24 avril, on est aussi parti pour 5 ans de tâtonnements en matière de politique défense et de politique extérieure où le feeling et les humeurs de notre Premier vont se substituer à la vision et stratégie.
Quand on voit que les amis de notre Premier ministre (Goita du Mali, Coulibaly du Burkina, et Tiani) ont tous renvoyé la tenue des élections aux calendes grecques, on a une idée de la déviation que va prendre notre politique extérieure qui va se fonder sur la négation des valeurs du Sénégal. La négation du Sénégal est une constante chez notre Premier ministre qui préfère parler de Sénégambie méridionale, de Tirailleurs africains alors que le terme consacré est tirailleurs sénégalais. Négation du Sénégal quand, au pays de Diouma Dieng Diakhate, de Colle Ardo Sow, notre Premier ministre choisit un accoutrement fort bizarre pour recevoir Mélenchon. Au-delà de la faute de gout, une autre forme de négation du Sénégal. Négation du Sénégal quand il pose fièrement avec un casseur dans un Tweet pour faire l’apologie de la violence contre les Forces de l’ordre et avance masquer pour faire exiler le Général Kande qui s’est couvert de gloire en Casamance en faisant face aux casseurs de la République que sont les maquisards du MFDC. Le cannibalisme du populisme doit s’arrêter à la porte des camps et des casernes. C’est pourquoi il faut regretter les propos du nouveau Haut Commandant de la Gendarmerie qui parle de « réconcilier la gendarmerie avec le peuple » lors de son installation. La gendarmerie n’a aucun problème avec le peuple. Entre le déshonneur de voir la République s’effondrer face à l’insurrection et l’honneur d’aller au front pour la sauver afin qu’elle reste debout, elle a choisi de faire son devoir dans l’honneur. Le populisme ne doit franchir la porte des camps et des casernes car le maintien de l’ordre n’a pas de couleur politique et est consubstantiel à l’Etat et à la République.
Monsieur le président, le temps ne chôme pas, Gardez-vous d’en perdre et d’en faire perdre au pays en vous consacrant à l’essentiel : l’économie et la croissance.
par Oumou Wane
DIOMAYE-SONKO EN ACTION
EXCLUSIF SENEPLUS - Les épisodes en cours partagent un fil conducteur évident : l'héritage encombrant de Macky. Forts de la légitimité que leur a conférée le peuple, le pouvoir en place n'hésitera pas à bousculer les derniers bastions de l'ancien régime
Le discours du Premier ministre Ousmane Sonko sur la RTS hier soir et du Colonel Abdoul Aziz Ndao sur la TFM le matin même laissent entrevoir une atmosphère politique particulièrement électrique. L'opinion publique est en ébullition, et les sous-sols du pouvoir semblent agités par des courants tumultueux.
Décryptons les propos du Colonel Ndao. Sans détour, il a évoqué des manœuvres de déstabilisation en cours, exhortant les services de renseignements à démasquer les conspirateurs. Il aurait cité le journal Africa Confidentielle comme source d'informations sur l'affaire du Général Kandé, mais ce média a vigoureusement démenti. Face à la polémique, un autre média a dû présenter des excuses pour avoir faussement cité ce site.
Le Premier ministre Sonko, lui, a martelé que personne ne peut ébranler le Sénégal. Selon lui, ceux qui s'agitent le font car ils redoutent la marche de reddition des comptes initiée par le nouveau régime. Peu importe les manœuvres en coulisses, les sanctions tomberont sur les personnes épinglées par les divers rapports de contrôle.
Le Colonel Ndao n’a pas mâché ses mots. En pointant du doigt des manœuvres de déstabilisation, il a renforcé le climat de suspicion. Mais Sonko n'a pas tardé à répliquer, affichant une détermination implacable à poursuivre la reddition des comptes. Ces échanges tendus révèlent une bataille féroce pour le contrôle narratif de la situation politique.
Il y a quelques jours, le ministre de la Justice, Maitre Ousmane Diagne, avait également été très clair : des sanctions allaient tomber, et les DAGE de plusieurs ministères de l'ancien régime étaient sur la sellette dans le dossier Covid-19. Le message est sans équivoque : la justice est en marche, et nul ne sera épargné.
Ces événements convergent vers une figure centrale : l'ancien président Macky Sall. Son ombre plane sur des affaires sensibles, telles que l'amnistie fiscale pour la presse, un décret signé mais resté lettre morte, et la polémique autour de l'affectation d'un chef d'état-major en Inde, amplifiée par des médias supposés de l'opposition. Ces faits, qu'ils soient avérés ou manipulés, politisent un contexte déjà inflammable.
La pétition pour le rapatriement de Macky Sall ajoute une pression supplémentaire sur le nouveau régime. Si elle recueille un large soutien populaire, il sera difficile de ne pas répondre aux attentes d'une population assoiffée de justice. Macky Sall pourrait bien se retrouver piégé par cette dynamique, accélérant une éventuelle confrontation judiciaire.
Pour couronner le tout, le projet de loi sur l'homosexualité, proposé par la députée Awa Ndiaye Gniby, jette de l'huile sur le feu déjà ardent de la scène politique. Cet élément controversé ajoute une couche supplémentaire de complexité à une situation déjà explosive. L'affaire Doro Gaye, dont on ne perçoit que les premiers éléments de l'enquête, ressemble déjà à une grosse poudrière prête à s’embraser.
Les épisodes en cours partagent un fil conducteur évident : l'héritage encombrant de Macky Sall. L'amnistie fiscale pour la presse, l'affectation controversée en Inde, tout cela n'a fait que politiser des faits qui auraient dû rester techniques. La presse et la politique se mêlent dangereusement, créant un cocktail potentiellement détonant.
Tous ces événements sont les prémices de jours orageux à venir. Il sera prudent de se mettre à l'abri, car le tandem Diomaye-Sonko semble bien décidé à aller au bout de sa croisade contre les dérives passées, quels qu'en soient les coûts. Forts de la légitimité que leur a conférée le peuple, ils n'hésiteront pas à bousculer les derniers bastions de l'ancien régime. Les pousser dans leurs retranchements à peine huit semaines après leur arrivée au pouvoir est un pari risqué.
Nul ne peut prétendre connaître les secrets des dieux, mais cette confrontation frontale ne fera qu'attiser les braises et accélérer la course folle des événements. Les forces en présence détiennent assurément plus d'informations que le commun des mortels. Dans cette tempête annoncée, la prudence reste de mise pour les citoyens lambda.
Le ministre de l'Intérieur, le Général Tine, aura fort à faire pour gérer cette situation explosive qui s'annonce. Restons donc observateurs avisés de ces bouleversements à venir.
Oumou Wane est présidente de Citizen Media Group – africa7.