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3 mai 2025
Femmes
UN FESTIVAL POUR LE RENOUVEAU DU CINÉMA AFRICAIN
"Films Femmes Afrique", dont c’est la troisième édition, a pour mission de sensibiliser le public au septième art et à des problématiques socio-culturelles
Matteo Maillard |
Le Monde Afrique |
Publication 01/03/2018
Sur le chemin de l’école, non loin d’un village éthiopien, Hirut, 14 ans, est enlevée par des cavaliers. Ils répondent au « telefa », une coutume ancestrale qui veut qu’un homme kidnappe la femme qu’il souhaite épouser. Plus tard, en représailles d’un viol, Hirut tuera son ravisseur.
Cette scène du film éthiopien Difret, sorti en 2015, ne manque pas de faire frissonner les lycéennes de l’établissement d’excellence Mariama-Bâ, sur l’île de Gorée, au Sénégal. « À la fin du film, toutes les élèves ont applaudi pendant dix minutes. Même si l’Ethiopie est de l’autre côté du continent, le problème est similaire ici. Les jeunes filles craignent d’être soumises à des mariages forcés et de devoir quitter l’école », avance Martine Ndiaye, responsable du festival Films Femmes Afrique (FFA). En 2015, selon le Fonds des nations unies pour l’enfance (Unicef), plus de 30 % des Sénégalaises entre 20 et 24 ans avaient été mariées avant l’âge de 18 ans.
Education, environnement, handicap…
Porté par l’association sénégalaise Trait d’union, le festival FFA, dont c’est la troisième édition, a été créé pour aborder des problématiques socio-culturelles entre réalisateurs et spectateurs africains. « Nous avons pour but d’accueillir toutes les voix cinématographiques de l’Afrique afin de les faire résonner haut et fort », explique Martine Ndiaye. Cette année, la thématique choisie est l’éducation, mais le spectre est plus large : « Nous avons sélectionné 50 films qui couvrent des sujets aussi variés que l’environnement, le handicap ou l’inclusion sociale. »
L’objectif est double : faire découvrir le cinéma africain et sensibiliser les jeunes aux thématiques les concernant lors de débats après les projections. « Pendant longtemps, le cinéma africain était réalisé ou produit par des Européens et on avait plus de chances de voir les films tournés sur le continent à Paris qu’à Dakar, affirme l’organisatrice. Les jeunes n’allaient plus au cinéma et les salles avaient commencé à disparaître des capitales. »
Mais récemment, grâce à la démocratisation du matériel cinématographique numérique, une nouvelle génération de jeunes Africains a réussi à redonner vie à un septième art exsangue. « Nous avons reçu des dizaines de courts-métrages de jeunes réalisateurs tous très dynamiques », s’exclame Martine Ndiaye.
Des films comme La rue n’est pas ma mère, du Burkinabé Jérôme Yaméogo, sur un enfant des rues exploité dans une école coranique ; Wings of my Dreams, du Nigérian Ike Nnaebue, l’histoire d’une adolescente, marchande de poisson séché dans un bidonville, qui trouve son destin dans les livres ; Aya, de la Tunisienne Moufida Fedhila, qui conte l’histoire d’une fille de 7 ans se rebellant dans une famille salafiste ; ou encore Down Side Up, du Ghanéen Peter Owusu, sur un enfant pauvre qui aide les camarades de son quartier à faire leurs devoirs jusqu’au jour où il trouve le moyen de rejoindre lui aussi les bancs de l’école.
De nouvelles salles de cinéma ont ouvert
Afin d’amener le cinéma dans les quartiers et de le rendre accessible au plus grand nombre, les projections ont été organisées dans 27 lieux ouverts à travers Dakar. Des places publiques, des centres socioculturels, des écoles et même des salles de cinéma, alors que ces dernières avaient presque toutes disparu. Mais depuis deux ans, deux nouvelles salles ont ouvert leurs portes : le 37 Cinq en janvier 2016 et le Canal Olympia (du groupe Vivendi) en mai 2017. Et une troisième, le complexe Sembène-Ousmane, du nom d’un des plus grands réalisateurs sénégalais, décédé en 2007, doit être bientôt inaugurée.
« Nous arrivons au bon moment pour accompagner ce nouvel engouement pour le cinéma africain, affirme Martine Ndiaye. J’ai été surprise du nombre de jeunes de 20 ans qui m’ont dit que c’était la première fois qu’ils allaient voir un film sur grand écran. » Afin d’appuyer ce mouvement ascendant, le FFA a décidé de remettre cette année un prix du meilleur court-métrage, doté de 1 million de francs CFA (1 500 euros), afin d’aider un jeune cinéaste à trouver un producteur et à réaliser son premier long-métrage.
Cette année, la lauréate est une réalisatrice rwandaise, Marie-Clémentine Dusabejambo, 30 ans. Son troisième court-métrage, Une place pour moi, contant l’histoire d’Elikia, fillette albinos de 5 ans qui tente de se faire une place à l’école malgré les moqueries de ses camarades, a séduit le jury composé de lycéennes. Après les acclamations d’un public venu en nombre, le festival a quitté Dakar, dimanche 25 février, pour partir en tournée dans le reste pays pendant une semaine. Une étape fondamentale à l’accomplissement de sa mission : faire découvrir les films du continent à tous les Sénégalais, des villes comme des campagnes.
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LA DÉPIGMENTATION TRANSCENDE LES GENRES AU SÉNÉGAL
Une responsable de Plan International pour l’Afrique de l’Ouest estime à 35% le nombre de Sénégalaises mariées avant d’atteindre la majorité. Ce chiffre est-il avéré ?
«Au Sénégal, environ 35 % des filles sont mariées avant l’âge de 18 ans. Ce qui est quand même un niveau qui reste assez élevé », a notamment dit la directrice régionale de l’influence et du partenariat de Plan International pour l’Afrique de l’Ouest, Awa Faly Bâ.
Dans un article publié par Seneweb, le 21 octobre 2017, elle se prononçait sur les mariages précoces, au cours d’un atelier à Dakar.
Ce pourcentage correspond-il à la réalité ? Africa Check a cherché les preuves.
Des données vieilles de 7 ans
Africa Check a contacté Awa Faly Bâ qui a indiqué que «48 % des femmes actuellement âgées de 45-49 ans et 33 % de celles âgées de 20-24 ans sont mariées avant l’âge de 18 ans ».
«C’est cela que j’ai partagé avec les médias », a-t-elle indiqué, ajoutant s’être basée sur les données de l’Enquête démographique et de santé à Indicateurs multiples au Sénégal (EDS/MICS) datant de 2011. Elle a souligné que sa déclaration portait surtout sur la disparité selon les générations.
Que disent les données les plus récentes ?
Jointe par Africa Check, Kerry MacQuarrie, auteure principale du rapport du Demographic and Health Surveys (DHS) sur la santé des adolescents en 2015, a fourni des compléments d’information.
D’après les estimations continues et annuelles du DHS, en 2010-2011, le pourcentage de filles mariées avant la majorité au Sénégal s’élevait précisément à 32,9 %. «Depuis lors, le rapport de 2016 a été publié et il indique que cette proportion a légèrement baissé, s’élevant désormais à 31,5 % », a indiqué la chercheuse.
Elle ajoute que ces données se basent sur le calcul de la probabilité des mariages survenant chez les filles âgées de 15 à 24 ans. Les chiffres mentionnés sont disponibles via l’application StatCompiler du DHS.
«L’évolution a ralenti ces derniers temps »
Le rapport 2015 de l’UNICEF intitulé «Mariages d’enfants, grossesses précoces et formation de la famille en Afrique de l’Ouest et du Centre » indique qu’au Sénégal, le pourcentage de femmes âgées de 20 à 24 ans ayant été mariées ou en couple avant l’âge de 18 ans s’élève à 32,89 %.
Notant une grande diversité de cette prévalence dans toute la région Afrique de l’Ouest et du Centre, le rapport affirme que l’évolution de ce phénomène a ralenti ces derniers temps.
En outre, une augmentation de l’âge médian au premier maraige (âge auquel la moitié d’une population donnée a déjà vécu un événement donné, et l’autre non) a été observée au Sénégal, en Côte d’Ivoire, au Ghana, au Libéria et au Nigéria.
«Il est intéressant de noter qu’au Sénégal, le pourcentage de femmes mariées avant l’âge de 18 ans est près de huit fois moins élevé chez les bénéficiaires d’une éducation secondaire ou supérieure que chez les femmes sans instruction (48,4 % contre 6,1 %) », ajoute le rapport.
Conclusion : le chiffre est caduc
La directrice régionale de l’influence et du partenariat dnternational pour l’Afrique de l’Ouest de Plan International a déclaré que 35 % des filles sont mariées avant la majorité au Sénégal.
Awa Faly Bâ a précisé qu’elle a plutôt fait mention de 33 %. Elle a ajouté s’être basée sur une étude de l’EDS/MICS datant de 2011, soit sept ans auparavant.
La chercheuse Kathy MacQuarrie du DHS a confié à Africa Check que selon les données les plus récentes, l’estimation correcte s’élève plutôt à 31,5 %. Il s’agit d’une légère baisse par rapport à l’étude citée par Awa Faly Bâ.
En conséquence, le chiffre est caduc, vu qu’il n’est plus en phase avec la situation actuelle.
PENDA MBOW AU PALAIS DES NATIONS-UNIES, LE 8 MARS
L'éditorialiste de SenePlus, historienne, militante de la société civile et ancienne ministre de la Culture, interviendra à Genève sous le thème "Égalité Homme-Femme sous le regard de militantes"
Un panel sur le thème "Égalité Homme-Femme sous le regard de militantes" aura lieu le 8 mars au Palais des Nations à Genève à l’occasion de la Journée internationale des femmes, en présence de l’historienne Penda Mbow, a appris l’APS.
La rencontre organisée par la diplomatie africaine, à Genève, et l’association Continent Premier s’inscrit "en droite ligne de la thématique générale proposée par les Nations Unies +L’heure est venue : les activistes rurales et urbaines transforment la vie des femmes+", selon les organisateurs.
A travers ce panel, ils veulent ainsi "donner en exemples des femmes dont les activités ont transformé ou transforment la vie des femmes au niveau de leurs différentes communautés".
Dans une note d’information, les organisateurs soulignent qu’il "s’agira à travers des témoignages de Femmes de terrain reconnues de voir comment leurs actions ont eu un impact sur l’évolution du statut des femmes dans leur pays".
Le panel sera marqué par les interventions de Anne Emery Torracinta (Suisse)-Conseillère d’Etat (République et Canton de Genève) en charge de l’Instruction publique, du Pr Penda Mbow (Sénégal) Historienne, militante de la société civile, ancienne ministre de la Culture, et du Dre. Caroline Dayer (Suisse), chercheuse et formatrice, experte en prévention des violences et des discriminations pour le Canton de Genève.
Les débats seront modérés par le journaliste sénégalais El Hadji Gorgui Wade Ndoye, Directeur du magazine panafricain ContinentPremier.Com.
CONNAÎTRE SON CORPS POUR MIEUX SE L’APPROPRIER
Codou Bop, co-auteur du livre "Notre corps, notre santé : Santé et sexualité des femmes en Afrique Subsaharienne" invite la gente féminine à s'intéresser davantage à leur organisme pour mieux se l'approprier
La femme doit connaître son corps pour mieux se l’approprier, a estimé la journaliste Codou Bop, co-auteur du livre "Notre corps, notre santé : Santé et sexualité des femmes en Afrique Subsaharienne".
"Les femmes [doivent] accorder de l’importance à leur corps. Elles s’occupent de la santé des tous les membres de la famille et savent qui est malade dans la maison, mais n’accorde pas de l’importance à leur propre santé et à leur corps", a-t-elle dit.
Elle s’exprimait, jeudi, lors d’une conférence au musée de la femme Henriette Bathily sur le thème "La santé des femmes".
La journaliste estime qu’en prenant soin et en veillant "mieux’’ sur la santé de leur corps, les femmes pourront "négocier avec leur époux, leur belle-mère et la communauté pour que leurs problèmes de santé et de sexualité soient pris en charge et qu’elles accèdent à la prise de décision et aux ressources leur permettant de se prendre en charge".
Elle a également a appelé à la numérisation de cet ouvrage édité en 2004 chez Harmattan-Paris", afin de permettre aux femmes d’accéder à l’information sur leur corps.
"L’ouvrage doit être remis à jour et distribué dans les écoles pour être enseigné", a-t-elle plaidé encore.
Il a été édité par des membres du Réseau de recherche en santé de la reproduction en Afrique francophone dans un contexte particulier avec "la pandémie du SIDA et la féminisation de cette maladie" sous la direction de la sociologue Fatou Sow et Codou Bop.
Une équipe pluridisciplinaire des médecins, biologistes et autres agents de la santé, des sociologues, des juristes, des journalistes et autres spécialistes des sciences sociales y a contribué, notamment le professeur Awa Marie Coll Seck, ancienne ministre de la Santé, l’historienne Penda Mbow, etc.
Il avait pour objectif, d’"apporter aux femmes des informations pas évidentes, complètes et fiables pour connaitre leur corps et l’aimer".
Le livre de 28 chapitres est organisé autour du cycle de la vie de la femme, de l’enfance à l’âge adulte.
Toutes les questions concernant la femme y sont posées : "Femmes vivant avec un handicap, santé et environnement", "Notre corps : quelles perceptions sociales ?", "Prendre soin de soi", "Femmes et société", "L’accouchement et les suites de couches", "la sexualité et la fécondité des femmes", etc.
La sexologue Jeanne Diaw qui appuie l’initiative de la diffusion de l’ouvrage, soutient qu’il faut "savoir comment utiliser son corps". "La connaissance du corps est très importante pour la femme et pour l’homme", dit-elle.