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26 avril 2025
International
PAR Thierno Bocoum
LA VÉRITÉ FACE À LA MANŒUVRE
La prétendue victoire n’est donc qu’un rideau de fumée. La loi interprétative a été retoquée, ses intentions démasquées. Le bluff ne prend plus. Ce que les juges constitutionnels ont réellement fait, c’est mettre à nu une entreprise politique grossière
« Nous avons gagné, notre objectif est atteint, les crimes pourront être jugés malgré l’amnistie. » Voilà le nouvel argument fabriqué à la hâte pour maquiller un désaveu aussi éclatant qu’embarrassant. Une tentative de manipulation, encore une pour cacher une défaite juridique retentissante.
Soyons clairs : cet argument est totalement fallacieux. Le respect des engagements internationaux du Sénégal en matière de torture, de traitements inhumains ou dégradants n’a jamais dépendu de cette loi. Les juridictions compétentes étaient déjà en mesure de s’y référer, avec ou sans texte interprétatif.
Invoquer cela aujourd’hui pour sauver la face est un non-sens juridique.
Ce que les juges constitutionnels ont réellement fait, c’est mettre à nu une entreprise politique grossière, celle de déguiser en loi d’interprétation une tentative d’amnistier des actes que le droit international considère comme des crimes imprescriptibles. Une manœuvre qui visait à blanchir, sous couvert de liberté publique, des faits d’une extrême gravité.
Le Conseil constitutionnel, dans un considérant limpide numero 31, a rappelé l’évidence « Considérant qu'au sers de l'alinéa 2 de la loi attaquée, les faits tenus pour criminels d'après les règles du droit international, notamment l'assassinat, le meurtre, le crime de torture, les actes de barbarie, les traitements inhumains, cruels ou dégradants, sont inclus dans le champ de l'amnistie lorsqu'ils ont un lien avec l'exercice d'une liberté publique ou d'un droit démocratique ; qu'en incluant ainsi dans le champ d'application de la loi portant amnistie des faits imprescriptibles au regard des engagements internationaux à valeur constitutionnelle du Sénégal, l'alinéa 2 de l'article premier de la loi n° 08/2025 du 02 avril 2025, viole la Constitution »
La prétendue victoire n’est donc qu’un rideau de fumée. La loi interprétative a été retoquée, ses intentions démasquées. Le bluff ne prend plus.
Et comme à chaque fois que l’argumentaire ne tient pas, les éléments de langage sont distribués comme des tracts, répétés en boucle par des relais sans esprit critique, sans lecture préalable, sans recul.
Mais le peuple n’est pas dupe. Nous connaissons les ficelles des manipulateurs. L’enjeu aujourd’hui, c’est que celles et ceux qu’ils cherchent à tromper soient assez lucides et informés pour ne pas tomber dans leur piège. Car la lumière finit toujours par percer les ténèbres de la supercherie.
Thierno Bocoum est juriste, ancien parlementaire, président AGIR.
par Ousmane Sonko
LE PASTEF CONFORTÉ PAR LES SAGES
Cette décision du Conseil constitutionnel constitue un véritable revers contre une certaine opposition, haineuse au point de vouloir assimiler l’exercice d’une liberté politique et civique de manifester à des crimes de sang et de torture
Je me serais bien gardé de me prononcer sur la décision rendue par le Conseil constitutionnel sur la loi dite « interprétative », si les résidus d’opposition sénégalaise ne s’étaient pas précipités, dans une tentative désespérée de récupération politicienne, de conclure à un revers juridique du groupe parlementaire Pastef-Les-Patriotes.
Il en est tout autrement, car cette décision conforte la démarche et les objectifs poursuivis par la proposition de loi interprétative, à savoir :
1. Exclure du champ de la loi initiale les faits qualifiables d’actes d’assassinat, de meurtre, de crime de torture, les actes de barbarie, les traitements inhumains, cruels ou dégradants ;
2. Y maintenir les autres motifs de poursuites de faits se rapportant à des manifestations politiques.
Le Conseil constitutionnel a simplement considéré que le postulat qui fonde la démarche du groupe parlementaire Pastef, selon lequel l’article premier de la loi initiale incluait les faits qualifiables d’actes d’assassinat, de meurtre, de crime de torture, les actes de barbarie, les traitements inhumains, cruels ou dégradants, était superflu car, dans sa version originale, la loi excluait déjà d’office cette catégorie d’infractions, conformément aux engagement internationaux à valeurs constitutionnelles de notre pays (considérant 31).
Le Conseil constitutionnel estime par ailleurs, dans son considérant 32, n’avoir relevé aucun autre motif d’inconstitutionnalité de la loi attaquée, fermant ainsi définitivement toute possibilité de recours contre l’amnistie de tous autres faits se rapportant à des manifestations politiques.
Ainsi, le Conseil a fait une interprétation au-delà de ce qui était recherché par le groupe parlementaire Pastef Les Patriotes.
Cette position du Conseil est complétée par l’ordonnance de non-lieu, rendue par le doyen des juges d’instruction le 27 janvier 2025, qu’il concluait ainsi :
« Par ces motifs
Vu les articles 169, 6 et 171 du code de procédure pénale, la loi 2024-09 du 13 Mars 2024 ;
> Constatons l'extinction de l'action publique pour cause d'amnistie,
> Disons n'y avoir lieu à suivre davantage contre Ousmane Sonko et Bassirou Diomaye Faye des chefs d'inculpation susvisés.
Cette décision du Conseil constitutionnel constitue un véritable revers contre une certaine opposition, haineuse au point de vouloir assimiler l’exercice d’une liberté politique et civique de manifester à des crimes de sang et de torture. Tout ça, pour assouvir le dessein cynique de vouloir renvoyer des milliers de patriotes dans des geôles où ils ont tant souffert déjà.
Qu’avons-nous fait au bon Dieu pour mériter une opposition si indigente ?
Demain au réveil, au lieu de voir la lune que je leur montre, ils vont disserter sur mon doigt qui la leur désigne.
CARDINAL SARAH, L'OUTSIDER AFRICAIN QUI SÉDUIT LES CONSERVATEURS
Ce prélat guinéen au parcours exceptionnel, jadis surnommé "le bébé" par Jean-Paul II, cristallise les espoirs de l'aile traditionaliste de l'Église, malgré des chances d'élection jugées minces par les observateurs du Saint-Siège
(SenePlus) - Au lendemain de la disparition du pape François, les regards se tournent vers les potentiels successeurs au trône de saint Pierre. Parmi les noms qui circulent avec insistance figure celui du cardinal Robert Sarah, une figure discrète mais influente au sein de l'Église catholique, comme le rapporte Le Parisien.
Si le prélat guinéen n'apparaît pas en tête des pronostics officiels, il bénéficie d'un soutien remarquable dans les milieux catholiques traditionalistes, particulièrement en France et aux États-Unis. « C'est la coqueluche des tradis », confirme un vaticaniste cité par le quotidien francilien, soulignant l'engouement que suscite ce défenseur d'une ligne doctrinale conservatrice.
Né en 1945 à Ourouss, en Guinée, Robert Sarah est issu d'un milieu modeste – son père était cueilleur de rôniers, ces fruits récoltés au sommet des palmiers dont on tire du vin. Son ascension au sein de la hiérarchie ecclésiastique relève presque du miracle.
Ordonné prêtre en 1969, il est nommé archevêque de Conakry dix ans plus tard par Jean-Paul II, devenant ainsi le plus jeune évêque de l'époque, au point que le souverain pontife le qualifiait affectueusement de « bébé ». Un détail qui n'est pas anodin dans l'univers très protocolaire du Vatican.
Sa carrière connaît ensuite une progression fulgurante : secrétaire de la Congrégation pour l'évangélisation des peuples sous Jean-Paul II, puis cardinal sous Benoît XVI, avant d'être nommé préfet de la Congrégation pour le culte divin et la discipline des sacrements par le pape François. Il quitte ce poste en 2021, atteint par la limite d'âge de 75 ans.
La candidature informelle du cardinal Sarah « bénéficie depuis plusieurs années de relais médiatiques forts aux États-Unis ou en France », précise Le Parisien. Parmi ses soutiens les plus influents figurent son éditeur Fayard et le milliardaire français Vincent Bolloré, « catholique fervent ». Sa médiatisation avait d'ailleurs provoqué une controverse en juillet 2022, lorsque son portrait avait fait la Une de l'hebdomadaire Paris Match.
Sur les réseaux sociaux, la mobilisation en sa faveur est particulièrement visible depuis l'annonce du décès du pape François. Le Parisien cite notamment un tweet qui a recueilli plus de 74 000 « j'aime » : « The next Pope should be Cardinal Robert Sarah » (Le prochain pape devrait être le cardinal Robert Sarah).
Malgré cette popularité dans certains cercles, l'influence réelle du cardinal Sarah au sein du Vatican serait à nuancer. « En réalité, au Vatican, il n'a pas la même surface médiatique et la même influence. Il a ses amitiés, comme le cardinal Gerhard Ludwig Müller [...] mais ne fédère pas au-delà des anti-François », confie au Parisien un vaticaniste familier des arcanes du Saint-Siège.
Le prélat guinéen représenterait « un courant plutôt marginal, alors que l'église en synode, ouverte, celle voulue par François, est majoritaire au Vatican », poursuit cette source. Son principal atout réside dans « sa spiritualité, son attachement à la liturgie et aux valeurs traditionnelles de l'Église, comme le célibat des prêtres », plus que dans sa maîtrise des rouages politiques vaticans.
Robert Sarah s'est imposé comme un gardien de l'orthodoxie catholique. « Être catholique est plus qu'une identification culturelle, c'est une profession de foi. Sortir de ce contenu, tant dans la croyance que dans la pratique, c'est sortir de la foi », déclarait-il lors d'un séjour à Washington en juin dernier, selon Le Parisien.
Il exprime régulièrement « sa grande peur de la déchristianisation de l'Europe » et s'inquiète de l'évolution des pratiques religieuses dans le monde occidental. « Les États-Unis ne sont pas comme l'Europe. La foi y est encore jeune et en pleine maturation. Cette jeune vitalité est un cadeau pour l'Église », avait-il ajouté lors de cette même intervention.
Lorsqu'il évoquait en 2022 l'hypothèse de devenir pape, le cardinal Sarah affirmait : « Ça ne m'intéresse pas. Ce qui compte, c'est de retrouver Dieu. » Il soulignait également sa relation respectueuse avec les trois pontifes sous lesquels il a servi : « Celui avec lequel j'ai le plus de liens, c'est Benoît XVI, mais j'admire autant François, qui sait parler à tous, avec qui l'échange est toujours libre et auquel on a eu tort de m'opposer. »
Malgré la présence accrue de cardinaux africains au prochain conclave, les chances d'élection du cardinal Sarah demeurent minces. D'après Le Parisien, « la dynamique du collège des cardinaux penche en faveur des représentants européens ou sud-américains, globalement plus proches de l'église horizontale prônée par le défunt François ces dernières années. »
Néanmoins, comme le rappelle judicieusement le quotidien français, le nom qui sortira dans quelques semaines de la Chapelle Sixtine « reste encore un mystère et a souvent réservé des surprises. » L'histoire de l'Église catholique est jalonnée d'élections papales inattendues, et celle à venir pourrait bien en être une nouvelle illustration.
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SONKO EST EN TRAIN DE CRÉER SON PROPRE MONSTRE
Le journaliste Ibou Fall évoque la confrontation entre Thierno Alassane Sall et le Premier ministre, révélant comment ce dernier pourrait renforcer involontairement son opposant en lui accordant une attention médiatique démesurée
Dans une récente intervention, le journaliste et chroniqueur Ibou Fall a livré une analyse sur le défi lancé par Thierno Alassane Sall à Ousmane Sonko pour un débat public, et sur la réaction de ce dernier.
Selon Ibou Fall, Ousmane Sonko est en train de désigner délibérément Thierno Alassane Sall comme son adversaire politique, bien que ce dernier ne soit pas encore considéré comme un "poids lourd" électoral. "Chacun choisit ses adversaires," explique Fall, tout en soulignant que c'est précisément ainsi qu'on "crée" des figures politiques importantes.
Le chroniqueur met en garde contre cette stratégie : "Un homme politique, ce qui le tue, c'est l'indifférence. Mais dès que tu commences à répondre à quelqu'un, c'est parti, il est en train de créer un adversaire." En répondant à Thierno Alassane Sall, Sonko lui offre une visibilité considérable et pourrait involontairement renforcer sa stature politique.
Ibou Fall estime qu'un gouvernant devrait plutôt se concentrer sur sa mission première : "La seule attitude d'un gouvernant, c'est de gouverner, régler les problèmes des Sénégalais, ce n'est pas autre chose." Il critique cette tendance à créer des ennemis et à donner de la visibilité à des adversaires politiques au lieu de s'attaquer aux véritables problèmes du pays.
Si Fall reconnaît que Thierno Alassane Sall, en tant que député de l'opposition, est "dans son rôle" d'être virulent, il s'interroge sur les motivations de Sonko à le cibler spécifiquement parmi les nombreux autres opposants. Il met en garde contre ce qu'il considère comme une "grave erreur" : "On peut se tromper en disant 'lui, je vais lui marcher dessus'."
Le chroniqueur avertit que cette stratégie pourrait se retourner contre Sonko s'il continue à négliger les problèmes urgents des Sénégalais : "Ils vont se créer de vrais opposants parce que, un, tu ne règles pas les problèmes des Sénégalais, et deux, tu donnes de la visibilité à tes adversaires." Avec une formule frappante, il résume le danger : "C'est très bien, il va se créer un monstre."
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DERRIÈRE LES RAILS DU TER, L'HUMANITÉ BROYÉE
Pendant que le "Sénégal émergent" de Macky Sall célébrait son Train Express Régional, Mamadou Khouma Gueye filmait l'autre réalité : celle des expulsions massives. Son film "Liti Liti" documente avec sensibilité le déracinement de plusieurs impactés
(SenePlus) - Dans le paysage cinématographique sénégalais, une œuvre singulière fait son apparition. Le réalisateur Mamadou Khouma Gueye signe son premier long-métrage, « Liti Liti », un documentaire intime qui aborde frontalement les conséquences humaines des grands projets d'infrastructure au Sénégal, comme le rapporte RFI.
L'œuvre suit le parcours de Sokhna Ndiaye, la propre mère du cinéaste, contrainte de quitter sa maison située dans le quartier de Guinaw Rail, en banlieue de Dakar, après y avoir passé quarante années de sa vie. Cette expulsion n'est pas un cas isolé : elle s'inscrit dans le vaste programme de déplacement qui a touché près de 250 000 riverains pour permettre la construction du Train Express Régional (TER) reliant Dakar à Diamniadio.
« Pendant plus de cinq ans, le réalisateur capte des images à la fois intimes et marquées par la froideur des grands travaux, interrogeant au fil du récit le sens du progrès et la mémoire des lieux », souligne la correspondante de RFI à Dakar, Juliette Dubois. Ce contraste entre l'humanité des récits personnels et la rigidité technique du chantier constitue l'une des forces du film.
Le TER, présenté comme l'un des symboles phares du « Sénégal émergent » promu par l'ancien président Macky Sall, illustre parfaitement cette tension entre développement national et destins individuels. Dans le film, Sokhna Ndiaye « évoque toutes les péripéties liées au déguerpissement dont elle et ses voisins ont été victimes, pour les besoins de la réalisation des infrastructures du TER », précise RFI.
Au-delà du simple témoignage, « Liti Liti » se veut une réflexion profonde sur le coût humain du progrès. Comment concilier modernisation des infrastructures et respect des communautés établies ? Quelle place accorder à la mémoire des lieux dans une vision du développement parfois technocratique ? Le film ne prétend pas apporter de réponses définitives, mais pose ces questions essentielles à travers le prisme d'une histoire familiale.
Cette démarche documentaire, qui mêle l'intime et le politique, s'inscrit dans une tradition cinématographique sénégalaise riche, héritière d'Ousmane Sembène et Djibril Diop Mambéty. Mamadou Khouma Gueye y apporte sa sensibilité propre, transformant l'expérience douloureuse du déracinement en une œuvre artistique qui interroge les fondements même du développement urbain.
À l'heure où de nombreux pays africains intensifient leurs projets d'infrastructures, « Liti Liti » offre un contrepoint nécessaire aux discours triomphalistes sur le progrès, rappelant que derrière chaque grand chantier se cachent des histoires humaines, des souvenirs et des attachements que nul dédommagement ne peut totalement compenser.
Le film a été présenté au festival Visions du Réel, comme l'indique RFI, confirmant l'intérêt international pour cette œuvre qui dépasse le cadre sénégalais pour toucher à l'universalité des questions d'aménagement du territoire et de mémoire collective face aux impératifs de modernisation.
par Aziz Fall
CE MOMENT DE NOTRE HISTOIRE
Nous sommes un petit pays. Mais refusons d’être un petit État, car la valeur d’une nation ne se mesure pas à sa taille. Soyons cette grande nation, habitée par l’humilité et portée par une foi inébranlable dans l’effort collectif et la discipline
« Nous traversons le présent les yeux bandés », nous avertit Milan Kundera. C’est sans doute la raison pour laquelle nous peinons à percevoir l’ampleur des transformations qui s’opèrent, souvent en silence, dans notre pays, notamment dans un domaine aussi stratégique que l’énergie.
Le 8 juillet 2023, Senelec a joué un rôle déterminant dans l’interconnexion des réseaux électriques des quinze pays membres de la CEDEAO à l’exception du Cap Vert, dans le cadre du West African Power Pool (WAPP), une initiative régionale visant à instaurer un véritable marché de l’électricité en Afrique de l’Ouest. Les implications socioéconomiques et géostratégiques de cette avancée sont majeures, et il faudra du recul pour en saisir pleinement la portée : baisse des coûts, meilleur accès à l’énergie, et intégration économique renforcée. Il est désormais techniquement possible de produire de l’électricité au Ghana et de l’acheminer jusqu’au Sénégal, ou inversement, de fournir le Burkina Faso depuis notre propre réseau. Au-delà de la prouesse technique se dessinent, à terme, des vies changées : une couturière de Tambacounda qui pourra désormais travailler tard dans le soir sans craindre les coupures ; un centre de santé à Bignona bientôt alimenté en continu ou un jeune développeur à Thiès, confiant de pouvoir coder sans interruption. L’énergie devient ainsi un levier puissant de convergence régionale avec des retombées économiques considérables, à l’image de ce que l’Union européenne a su réaliser.
Un peu plus tôt dans ce même mois de juillet, la demande électrique du Sénégal atteignait pour la première fois le seuil symbolique d’un Gigawatt, nous plaçant aux côtés du Ghana, de la Côte d’Ivoire et du Nigeria dans le cercle restreint des puissances énergétiques régionales. Le 1er juin 2024 marque une autre étape historique : notre pays produit son premier baril de pétrole. Six mois plus tard, en décembre, les premiers mètres cubes de gaz sont extraits du site GTA, à la frontière maritime avec la Mauritanie. En ce mois d’avril, le premier chargement de Gaz Naturel Liquéfié (GNL) quitte le port de Dakar, amorçant notre entrée sur la scène énergétique mondiale.
Ces développements dépassent la seule ambition d’un accès universel à l’électricité – objectif désormais à portée de main. Ils reconfigurent notre place sur l’échiquier international. Le Sénégal devient membre à part entière d’un club exclusif de nations capables d’influer sur les grandes dynamiques mondiales.
Oui, nous sommes un petit pays. Mais refusons d’être un petit État, car la valeur d’une nation ne se mesure pas à sa taille, mais à son caractère et à sa volonté. Soyons donc cette grande nation, habitée par l’humilité protectrice et portée par une foi inébranlable dans l’effort collectif et la discipline. Dans un monde troublé, le leadership, dans sa forme la plus inclusive, est plus que jamais nécessaire. Un leadership qui réveille le goût de l’effort, qui fédère au-delà des ambitions individuelles, et qui s’enracine dans le destin commun d’une société consciente que son avenir ne peut être fragmenté. Chaque citoyen a un rôle à jouer, qu’il soit sans diplôme mais animé du désir de contribuer, ou professeur au pinacle de son art. À chaque fois qu’un individu foule aux pieds nos valeurs culturelles, un autre, issu du même socle, rappelle la noblesse de notre peuple.
En définitive, ces lignes de l'ouvrage "Les promesses d'une devise" s'imposent encore une fois : « Il n’y a rien de mal ni de mauvais dans ce peuple qui ne puisse être corrigé et guéri par tout ce qu’il y a de bien et de noble dans ce même peuple. »
Le Sénégal traverse aujourd’hui un moment de test grandeur-nature dans sa marche vers son destin : un défi narratif d’envergure. Quelle histoire voulons-nous raconter ? Quel récit portera notre identité ? Devons-nous concentrer nos énergies sur notre potentiel, ou devrons-nous nous épier à la recherche de défauts disqualifiants voire fatals chez l’autre ?
Un immense espoir, celui d’une nation et d’une génération entière, repose sur les épaules de ce nouveau leadership à la tête du pays. Ce ne sera pas une sinécure, mais une période d’épreuves presque permanentes où les prières pour sa réussite croiseront les souhaits de son échec. La rupture proposée suscite autant d’attentes que d’inquiétudes. Le peuple le soutiendra parce qu’il a souhaité, et attendu son avènement et s’est battu pour cela, mais il l’observera aussi.
Dans cette conjoncture difficile, notre force collective sera mise à l’épreuve. Il nous faudra dire non aux raccourcis, et oui à la douleur de l’effort intellectuel, de l’effort moral, de l’effort professionnel. Un peuple capable de réalisations telles que celles accomplies, entre autres, dans le domaine énergétique ne doit ni trembler ni douter face aux défis présents, aussi formidables soient-ils. Car ces défis ne sont qu’une occasion de mettre en lumière notre résilience et notre désir intarissable de sursaut collectif. Ce ne sera pas facile.
Mais c’est précisément parce que c’est difficile qu’il faut se mettre au travail, les manches retroussées.
À l'initiative de 24 députés menés par Abdou Mbow, le Conseil constitutionnel vient de trancher : le texte voté le 2 avril 2025 et destiné à restreindre le champ d'application de la loi d'amnistie est contraire à la Constitution
(SenePlus) - Le Conseil constitutionnel vient de rendre une décision majeure en déclarant contraire à la Constitution l'article premier de la loi n°08/2025 adoptée par l'Assemblée nationale le 2 avril 2025.
Selon la décision n°1/C/2025 rendue le 23 avril 2025, le Conseil constitutionnel a été saisi par une requête introduite le 8 avril 2025 par le député Abdou Mbow et 23 autres parlementaires. Ces derniers contestaient la conformité constitutionnelle de la loi interprétative qui restreignait le champ d'application de la loi d'amnistie n°2024-09 du 13 mars 2024.
Le cœur du litige portait sur une disposition qui excluait du bénéfice de l'amnistie "les faits se rapportant à des manifestations ou ayant une motivation politique, lorsque ces faits ne sont pas liés à l'exercice d'une liberté publique ou d'un droit démocratique". Selon les requérants, cette restriction constituait non seulement une atteinte au principe d'intelligibilité de la loi, mais violait également le principe constitutionnel de non-rétroactivité des lois pénales plus sévères.
Le Conseil a jugé que cette disposition permettait "la poursuite de faits déjà amnistiés" et qu'elle était "plus sévère que la loi n°2024-09 du 13 mars 2024 portant amnistie". La décision souligne également que cette loi contrevenait aux engagements internationaux du Sénégal concernant les crimes imprescriptibles selon le droit international.
Composé du Vice-président Aminata Ly Ndiaye, et des membres Youssoupha Diaw Mbodj, Awa Dieye, Cheikh Ndiaye et Cheikh Ahmed Tidiane Coulibaly, le Conseil a ordonné la publication de sa décision au Journal officiel de la République du Sénégal.
L'ÉTAU SE RESSERRE SUR SEPT RESPONSABLES DE L'ANCIEN RÉGIME
Les députés Salimata et Moustapha Diop verront leur immunité examinée dès le 25 avril, tandis que les ex-ministres Moustapha Diop, Mansour Faye, Gladima, Madior Fall et Salimata Diop seront devant la Haute Cour après la plénière du 8 mai
(SenePlus) - L'Assemblée nationale vient de franchir une étape décisive dans l'affaire de la gestion des fonds Force Covid-19, avec l'organisation d'un calendrier précis pour l'examen des procédures judiciaires visant plusieurs hauts responsables de l'ancien régime.
Selon le compte-rendu de la conférence des présidents organisée ce mercredi et parvenue à SenePlus, le ministre de la Justice a adressé une lettre officielle demandant la levée de l'immunité parlementaire des députés Salimata Diop et Moustapha Diop, préalablement à leur mise en accusation, conformément à l'article 52 du Règlement intérieur.
Un calendrier serré a été établi :
Mise en place d'une commission ad hoc le vendredi 25 avril 2025 à 10h
Plénière de ratification le lundi 28 avril à 10h
Plénière de levée d'immunité le vendredi 2 mai 2025 à 10h
Mise en accusation de cinq anciens ministres
Parallèlement, le ministre de la Justice a également transmis une demande de mise en accusation devant la Haute Cour de Justice pour cinq anciens ministres :
Moustapha Diop
Mansour Faye
Aissatou Sophie Gladima
Ismaila Madior Fall
Salimata Diop
Pour ce volet, la commission des Lois se réunira le vendredi 2 mai à 15h, suivie d'une plénière prévue le jeudi 8 mai à 10h.
Ces procédures s'inscrivent dans le cadre de l'enquête sur la gestion des fonds Force Covid-19. La semaine dernière, le procureur général Malick Fall avait annoncé que les dossiers de ces anciens responsables avaient été transmis au Parlement, ouvrant ainsi la voie à une possible saisine de la Haute Cour de justice.
L'enquête concerne huit rapports portant sur différents ministères : Géologie et Mines, Culture, Sports, Santé, Femme et Famille, Développement industriel, Petites et Moyennes Entreprises, ainsi que Développement communautaire.
En parallèle, la Division des investigations criminelles (DIC) poursuit ses investigations, avec plusieurs mises en cause ayant recouvré leur liberté après versement de consignations. Comme l'a précisé le procureur Ibrahima Ndoye, "notre objectif, ce n'est pas de mettre les gens en prison, mais de recouvrer l'argent du contribuable".
D'autres interpellations pourraient intervenir prochainement dans le cadre de cette affaire qui touche plusieurs hauts responsables de l'ancien régime.
CÉDÉAO-AES, TENTATIVE DE RAPPROCHEMENT À ACCRA MALGRÉ LES TENSIONS
Réunis en session extraordinaire les 22 et 23 avril 2025 à Accra, les ministres de la Cédéao évaluent les conséquences du retrait annoncé des trois pays sahéliens.
La Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cédéao) tient une session ministérielle extraordinaire les 22 et 23 avril 2025 à Accra, au Ghana, afin d’évaluer les conséquences du retrait du Burkina Faso, du Mali et du Niger. Cette rencontre intervient dans un contexte tendu, marqué par la reconfiguration des alliances régionales en Afrique de l’Ouest.
Convoquée pour examiner les modalités du désengagement des trois pays sahéliens, désormais membres de la Confédération des États du Sahel (AES), la réunion vise également à statuer sur le sort des institutions et agences de la Cédéao encore actives dans ces pays. Elle coïncide avec le lancement officiel des célébrations du 50e anniversaire de l’organisation régionale, prévues également à Accra.
Dans un geste d’apaisement, le président ghanéen John Dramani Mahama, récemment engagé dans une tournée diplomatique dans les trois capitales sahéliennes, a invité les dirigeants du Burkina Faso, du Mali et du Niger à participer aux festivités. Une tentative de rapprochement entre deux blocs désormais en opposition, alors que les États sahéliens reprochent à la Cédéao d’être sous l’influence de puissances extérieures, notamment la France.
Pour rappel, le Burkina, le Mali et le Niger ont annoncé leur retrait de l’organisation en janvier 2024, une décision qui, conformément aux textes de la Cédéao, deviendra effective en janvier 2025.
Au-delà de cette question centrale, les ministres des Affaires étrangères et des Finances des pays membres discuteront également d’autres dossiers régionaux, sur fond de tensions diplomatiques et de défis sécuritaires croissants dans l’espace ouest-africain.
DE LA MISE EN ACCUSATION DEVANT LA HAUTE COUR DE JUSTICE
Comment fonctionne ce mécanisme sans appel ? Qui peut être jugé ? Quels sont les enjeux politiques et juridiques de cette justice d'exception ? Pourquoi cette procédure est-elle si rare ? Éléments d'explications
Alors que le député Guy Marius Sagna a déjà saisi l’Assemblée nationale d’une proposition de mise en accusation devant la Haute Cour de justice visant l’ancien président Macky Sall, d’autres anciens ministres proches de ce dernier sont également visés par une procédure similaire, après avoir été cités dans le rapport de la Cour des comptes sur la gestion des fonds « Force Covid-19 ». Retour sur la procédure d’examen d’une mise en accusation devant la Haute cour de justice.
Mais au fait, qu’est-ce qu’une mise en accusation ?
Derrière cette expression apparemment claire se cache une procédure exceptionnelle, strictement réservée aux plus hauts responsables de l’État. Elle est encadrée par la loi n°2002-10 du 22 février 2002.
En résumé, lorsqu’un président de la République, un Premier ministre ou un ministre est soupçonné d’avoir commis un crime ou un délit dans l’exercice de ses fonctions, l’Assemblée nationale peut voter une résolution permettant leur traduction devant la Haute Cour de justice.
Concrètement, cette résolution – encadrée par les exigences strictes de l’article 101 de la Constitution – doit préciser les noms, les fonctions des personnes visées, les faits reprochés, ainsi que les textes de loi invoqués pour justifier les poursuites.
Petite précision importante : les députés membres de la Haute Cour sont exclus du vote et des débats pour garantir l’impartialité de la procédure.
Aucune voie de recours !
À signaler que dans un cadre strictement encadré par la loi, la procédure de mise en accusation devant la Haute cour s’ouvre dans les 24 heures suivant la réception de la résolution, avec une notification formelle du Procureur général au président de la Haute cour et à celui de la Commission d’Instruction. Cette dernière est immédiatement convoquée, et chaque inculpé est invité à choisir un défenseur, sous peine d’en voir un désigné d’office.
Le président de la Commission peut, en amont de la réunion plénière, mener des actes d’instruction et émettre des mandats. Dès sa première séance, la Commission confirme ces décisions et poursuit l’instruction selon les règles du Code de procédure pénale, tout en garantissant les droits de la défense.
Aucune voie de recours n’est ouverte contre ses actes. Elle statue sur les nullités de procédure et peut, en cas d’apparition de faits nouveaux, transmettre le dossier au Procureur général pour une éventuelle extension de la mise en accusation.
À l’issue de ses travaux, la Commission décide, le cas échéant, du renvoi devant la Haute cour, sans pouvoir modifier la qualification des faits initialement retenus.