SenePlus | La Une | l'actualité, sport, politique et plus au Sénégal
29 avril 2025
International
PAR Man Bene
LE (FAMEUX) RÈGNE FRANÇAIS N’EXISTE QUE POUR CEUX QUI Y CROIENT
Il faut cesser de prêter à la France un pouvoir qu’elle n’aurait jamais dû avoir. Un pays ne peut pas prendre en otage 14 Etats déterminés à veiller au grain de leur indépendance, pour peu qu’ils y croient fermement
Il y a deux choses essentielles auxquelles tout Africain doit croire fondamentalement : la liberté de penser et la constante vigilance à la digne autonomie. Sans ces deux paravents, il est difficile de s’envisager entier. C’est précisément dans cet ancrage paradigmatique que s’inscrit la logique de cet article au sujet de la polémique qu’attise la prise de parole de l’ambassadeur de France au Burkina Faso au sein de l’opinion publique.
L’Afrique est-elle vraiment indépendante, comme la revendiquaient les nationalistes de la première heure ? La réponse est sans appel : non ! Au-delà des drapeaux qui flottent au-dessus des palais à l’intérieur desquels trônent des assoiffés du pouvoir ad vitam aeternam, il va sans dire que la souveraineté des jeunes Etats africains, au sortir du tournant des années 60, a été biaisée. Le coupable n’est pas le bourreau ; puisque le crime aura été une collaboration d’avec la gent locale, héritière post-indépendance de la prétendue décolonisation.
En effet, il a manqué une forme de perpétuation de la résistance devant l’occupant qui feignait de lever l’ancre. On ne crache pas sur le bénéfice de facilité. La France (néo) coloniale était donc dans son rôle de veiller au maintien de ses intérêts sur le pré carré qu’elle avait douloureusement constitué depuis trois à quatre générations. Il revenait à l’Afrique des 14 Etats issus de ce terreau colonial d’affirmer sa foi en sa liberté, son attachement à sa dignité à retrouver et sa persistance à veiller à son autonomie réelle.
Pourtant, il faut s’en convaincre, des espèces de collabos (puisque malheureusement il y en a eu) indigènes cette fois-ci, ont cru bon de garder le lien d’avec le maître pour asseoir ce qu’il appelaient alors un transfert d’autorité réussi entre le colon et les nouveaux régimes dont la mise en place nécessitait, disaient-ils, l’encadrement, le suivi et l’accompagnement. La mise sur pied des idées telles que la Francophonie institutionnelle et la nébuleuse Françafrique naîtront sous l’instigation de Senghor et Houphouët Boigny. Ces deux présidents pensaient qu’une indépendance brutale de l’Afrique obligerait ce continent à une déroute assurée. Dès lors, la progressivité du désengagement de la France en Afrique s’imposait, pour eux, comme une garantie de sécurisation des jeunes institutions et de construction des jeunes nations.
Le rêve fou d’un tel postulat avait tôt fait d’embrigader les 14 Etats francophones dans une sorte de « servitude volontaire », telle que théorisée par Etienne de La Boétie. D’ailleurs, Cheikh Anta Diop voyait en une manœuvre pareille le refus qui serait celui d’un esclave affranchi de définir sa nouvelle existence en dehors de la tente de son ancien maître. Au lieu de s’en éloigner, parce que conscient des difficultés qui seront les siennes et face auxquelles il devra désormais apprendre à y réfléchir en termes de solutions à trouver, cet esclave opte plutôt pour un recours de fainéant : revenir se soumettre à l’autorité de son oppresseur auprès duquel il semble s’être accommodé d’actes humiliants.
Ce sont ainsi des Africains qui ont, historiquement, hésité à décider radicalement d’être effectivement indépendants. Le pain béni, quand en plus il nous vient de la personne la plus inattendue, on ne le rejette pas du revers de la main. On s’en sert et le consomme gloutonnement. Personne, en lieu et place de la France, n’aurait craché sur l’appel des 14 Etats africains à bénéficier de la continuité du tutorat français qui suppose ipso facto les bénéfices économiques et la gratuité quasi salope des ressources naturelles de chaque pays envisagé.
59 ans après les indépendances supposées des 14 Etats francophones, il demeure mal aisé, pour l’élite gouvernante en place et une certaine classe d’intellectuels africains, d’affirmer avec véhémence la responsabilité qui est celle des Africains eux-mêmes dans ce malheur, s’il convient de le nommer ainsi, qui leur arrive. On continue d’actionner l’attitude victimaire selon laquelle l’enfer (africain), c’est les autres (en l’occurrence la France). La pauvreté, le non décollage du continent, la mainmise ou l’ingérence, l’impérialisme économique via les institutions de Bretton Woods et le diktat monétaire à travers le franc CFAsont à attribuer à la France qui aurait ainsi libéré la chèvre en retenant par-devers elle la corde. Vue de cette façon, l’Afrique serait un innocent non actionnaire de sa misère multiséculaire.
C’est précisément contre ce type de discours passif, faux et pleurnichard que le docteur Elisée Coulibaly s’insurge. Le responsable en chef de la déroute de l’Afrique des 14 est bel et bien les 14. Si l’Afrique ne peut se défendre et défendre ses intérêts, nul ne le fera à sa place. Au contraire, sa crédulité devra assurer les intérêts des autres, car le monde mondialisé dans lequel on vit sera une opportunité pour ceux qui veillent et quêtent les privilèges de ceux qui sommeillent.
Au lieu donc que le nommé Larba Israël LOMPO, rédacteur de la « Lettre ouverte » à l’ambassadeur de la France au Burkina Faso, s’indigne devant la crudité des propos tenus par le diplomate (« que les leaders politiques dans votre pays et encore plus au Mali d’ailleurs arrêtent de raconter n’importe quoi sur mon pays »), il devrait plutôt entendre le son de cloche du docteur Elisée Coulibaly pour qui l’ambassadeur « fait son job, c’est-à-dire défendre les intérêts de son pays. Mais dans notre pays, le Burkina Faso, il y a aussi des Autorités mandatées par leur peuple pour défendre ses intérêts. Ces autorités du Burkina Faso ont le droit de mettre fin au mandat de l’Ambassadeur de France si elles le souhaitent. Alors, pourquoi ne prennent-elles pas leur responsabilité puisque les accords internationaux le permettent ? »
Cette question du docteur Coulibaly s’arme d’une verve ironique dans la mise à l’index des gouvernants de façade à la tête des Etats africains. En réalité, il a raison de conclure que « nos populations [sont] désorganisées par 60 ans de mauvaise gouvernance de la part de dirigeants indépendants mais inconscients et partisans du moindre effort. » ce qu’il y a lieu de dénoncer, c’est bel et bien, pour les dirigeants africains, ajoute-t-il, l’ « incapacité à assumer l’indépendance de nos pays ».
Voilà où il faut battre le fer, tant il chauffe encore. Alain Mabanckou pointait déjà du doigt l’instinct d’immobilisme africain à travers ce qu’il appelait le « sanglot de l’homme noir » dont la particularité est qu’il tend à justifier ses retards sous le prétexte d’un pouvoir hégémonique de la France sur son pré carré et qui empêcherait ce dernier non seulement de s’émanciper, mais aussi de penser positivement son essor. Non ! La France, si elle a colonisé les 14 Etats francophones, n’est pas en mesure de continuer de les maintenir collectivement sous sa coupole. Curieusement, les 14 continuent de lui accorder un pouvoir qu’elle n’a pas, qu’elle n’a plus. La liberté s’arrache et, une fois acquise, on se tâche de l’affirmer jalousement. Elle n’est pas un fait de simple proclamation. Elle se vit psychologiquement, matériellement, concrètement donc.
La qualité de la lettre de sieur LOMPO est d’avoir au moins le courage de demander la démission d’un ambassadeur français coupable de zèle diplomatique. On se souvient qu’effectivement du temps de Bongo père, ce dernier avait le pouvoir de choix et de renvoi des autorités françaises jugées indélicates ou non compatibles à son goût. Il est tout à fait légitime de démettre de ses charges un émissaire métropolitain mal inspiré, si les intérêts du cru sont soumis à rude épreuve. Toutefois, le propos de sieur LOMPO nous renvoie à une manière de raisonner qui déresponsabilise l’Afrique, ses dirigeants, ses intellectuels et ses populations de leur état d’esprit premier qui est de s’estimer autonomes.
Cette autonomie commence par la coupure du cordon ombilical colonial qui lie encore certains africains à la France ; et elle s’accompagne d’une « décolonisation de l’esprit », telle que recommandée par Ngugi wa Thiongo. Ce n’est qu’ainsi que se mettront en place les canons du développement intégral de l’Afrique qui vient. Chercher le coupable du piétinement de l’Afrique en dehors de l’Afrique, c’est militer vraisemblablement pour la politique de l’autruche.
Il faut cesser de prêter à la France un pouvoir qu’elle n’aurait jamais dû avoir. Un pays ne peut pas prendre en otage 14 Etats déterminés à veiller au grain de leur indépendance, pour peu qu’ils y croient fermement.
"À L'ORIGINE, BOKO HARAM ÉTAIT UN MOUVEMENT TRÈS POPULAIRE"
Cela fait 10 ans, que le groupe terroriste déstabilise le nord-est du Nigeria, mais aussi une bonne partie des rives du lac Tchad. Pour parler de ces racines, entretien avec Yan St-Pierre, directeur du cabinet Mosecon, spécialisé dans le contre-terrorisme
Cela fait maintenant 10 ans, que le groupe terroriste Boko Haram déstabilise le nord-est du Nigeria, mais aussi une bonne partie des rives du lac Tchad. Tout est parti de Maiduguri. À l'origine c'est une secte religieuse implantée dans le nord du Nigeria, où la charia est appliquée depuis le début des années 2000. Boko Haram, qui signifie « l'éducation occidentale est un pêché », était animé par plusieurs étudiants et parmi eux, un prédicateur religieux, Mohamed Yusuf. Pour parler les racines de ce mouvement, Bineta Diagne s'entretient avec Yan St-Pierre, directeur du cabinet Mosecon, spécialisé dans le contre-terrorisme.
À l’origine, Boko Haram était une secte religieuse, radicale, dirigée par Mohammed Yusuf, tué en juillet 2009 par l’armée nigeriane venue déloger les islamistes à Maidiguri. Qui était-il ?
Yan St-Pierre : Mohammed Yusuf était un prêcheur, un religieux très charismatique. Originaire de Maiduguri, il avait à l’époque des liens avec la secte Izala, une autre secte islamique radicale qui avait aussi ses racines dans le sud du Niger, dans la région de Diffa.
Quelles étaient ses idées à l’origine ? Que prônait-il ?
Il prêchait une approche très « orthodoxe » de l’islam, qu’on pourrait considérer aujourd'hui comme islamiste ou salafiste. Mais surtout, il se servait du discours religieux pour dénoncer les carences, les griefs et les problèmes du gouvernement nigérian et de l’armée. Il s’est servi du mécontentement populaire pour construire ses idées, sa structure idéologique et religieuse. Ainsi, en se servant des principes religieux, il est parvenu à transformer ou du moins à appliquer ses idées politiques fondées sur la charia, sur l’idée d’un islam pur pour contrer ce qu’il considérait comme la mauvaise gestion du gouvernement nigérian.
Nous sommes alors au début des années 2000. Qui était derrière cette secte et qui en faisait partie ?
C’était un mouvement très populaire, composé de personnes ayant du mal à toruver un emploi, de beaucoup de fermiers, des mal-aimés de la société nigériane, qui ont trouvé dans les discours de Mohammed Yusuf quelque chose qui leur plaisait beaucoup. C’est quelqu’un qui avait un grand charisme et il arrivait à relier les gens de différentes factions.
À partir du moment où les autorités ont commencé à remarquer son influence, son prestige, il a bénéficié d'un appui de structures formelles. Il y avait des accusations à l’époque de l’ancien gouverneur Kashim Shettima. Un ensemble de différentes personnes assez influentes dans l’est du Nigeria se sont mises à appuyer Boko Haram, semble-t-il, même si certaines d'entre elles avaient des craintes sur l’influence et la tendance du groupe. C’était néanmoins perçu comme un atout politique, et donc progressivement, ce mouvement très populaire est devenu un mouvement avec des figures de proue assez influentes au Nigeria.
Comment et pourquoi ce mouvement s’est-il rebellé ?
En raison de son influence grandissante, ce mouvement a souhaité instrumentaliser son action à des fins politiques. Plusieurs incidents ont révélé comment Boko Haram était utilisé pour la collecte de fonds, comme force, mais aussi comme facteur d’intimidation dans les campagnes électorales, à des buts politiques.
Peu à peu, cette influence-là s’est transformée en atout politique pour Boko Haram, un atout politique qui est devenu dangereux pour les autorités. Le mouvement s'est alors mis à se rebeller parce que ses appuis originels, ses appuis formels, ont commencé à se distancier de lui progressivement. Parce qu’il avaient grandi en influence, [ces appuis] sentaient que le mouvement était là pour commencer à imposer ses idées, commencer à dénoncer pleinement ce qu’il considérait comme une société impie et injuste. Et donc, il a tenté d’imposer ses propres idées. C’est le début du mouvement rebelle.
Quel a été le moment-clé qui a fait basculer ce mouvement non armé dans la violence ?
Le moment-clé, c’est juillet 2009. Cela commence essentiellement par un rassemblement organisé par Boko Haram à Maidiguri et à Bauchi. À partir de ce moment-là, des partisans de Yusuf ont tenté de s’organiser et ont voulu participer à cet événement. Le gouvernement intervient, donc la police du Nigeria intervient. Ce conflit cause plusieurs décès. S’ensuivent des émeutes pendant une journée. Finalement, l’armée décide d’arrêter Mohammed Yusuf trois jours plus tard, le 29 juillet, et l’exécute en public.
À partir de ce moment-là, le mouvement prend vraiment sa force. Il arrive à démontrer que les raisons pour lesquelles il se bat ou se rebelle sont justifiées. Et c’est à partir de ce moment-là qu’Abubakar Shekau prend le contrôle du groupe et lui donne une autre orientation.
Avec Abubakar Shekau, quel est ensuite le mode opératoire principal de ce groupe ?
C’est à partir de 2010 que l'action de Boko Haram devient plus « raffinée », plus sophistiqué. Le groupe organise des assauts avec des véhicules et des engins explosifs improvisés. Les attaques sont non seulement dirigées contre des civils, mais elles visent aussi les forces du gouvernement. C’est un modus operandi en pleine mutation. Car il y a un ajustement, une prise de conscience. C’est pour cela que ce modus operandi se transforme beaucoup en 2010 et 2011. Cela se termine justement par l’attentat à l'explosif contre un bâtiment des Nations unies à Abuja en 2011.
10 ANS APRÈS SON APPARITION, BOKO HARAM RESTE UNE FORCE DE NUISANCE CONSIDÉRABLE
Depuis 2009, le groupe terroriste a fait plus de 27 000 victimes et a poussé 2,5 millions de personnes à quitter leurs foyers, déstabilisant totalement le nord-est du Nigeria et des îles du Lac Tchad
Implanté dans le nord-est du Nigeria depuis le début des années 2000, Jamā‘at ahl al-sunna li’l-da‘wa wa’l-jihād, alias Boko Haram, est à l’origine une secte radicale. Depuis 2009, le groupe terroriste a fait plus de 27 000 victimes et a poussé 2,5 millions de personnes à quitter leurs foyers, déstabilisant totalement le nord-est du Nigeria et des îles du Lac Tchad.
Début des années 2000. C’est dans la ville de Maiduguri, capitale de l’État de Borno, qu’un petit groupe d’étudiants prône une application rigoriste de la charia, en vigueur dans les États du nord du Nigeria. Parmi eux, Mohamed Yusuf, un prédicateur charismatique, qui s’appuie sur une idéologie salafiste et revendique une approche orthodoxe de l’islam.
Il remet notamment en question, le système éducatif, tel qu’enseigné dans les écoles publiques. D’où le nom de Boko Haram : « l’éducation occidentale est un pêché ». « Mohamed Yusuf a un discours religieux pour dénoncer les carences et les griefs du gouvernement nigérian », explique Yan St-Pierre, qui dirige le Mosecon, un centre d’analyse en contre-terrorisme. Bon orateur, Mohamed Yusuf véhicule ses idées auprès des classes populaires, à travers des réunions, mais aussi « des CD, des cassettes et des émissions de télévision », précise le chercheur à Sciences Po, Corentin Cohen.
De la clandestinité à la violence
À l’origine, cette secte est un mouvement non armé. Mais ses relations avec les forces de l’ordre se tendent : manifestations réprimées, arrestations arbitraires… Les répliques de la secte deviennent de plus en plus musclées. Le 26 juillet 2009, les membres de Boko Haram attaquent plusieurs postes de police.
L’armée nigériane réprime le mouvement, détruit son QG, des centaines de fidèles meurent. L’arrestation puis l’exécution en public de Mohamed Yusuf par les forces de l’ordre font basculer le mouvement dans le terrorisme. En quelques semaines, la répression par l’armée fait plus de mille victimes.
Boko Haram instaure la terreur
L’exécution du prédicateur charismatique alimente une certaine frustration chez les partisans de Boko Haram. Le groupe s’étend et recrute dans les États du nord-est comme Bauchi, Yobe et l’Adamawa. Il s’incruste jusque dans le bassin du Lac Tchad. À sa tête, l’imam Abubakar Shekau instaure la terreur : ses fidèles procèdent à des assassinats, à des attentats-suicides dans des lieux publics. Les Boko Haram ciblent par ailleurs les commissariats, édifices publics et symboles de l’État fédéral. Le groupe n’hésite pas à piller et à confisquer des biens auprès des populations.
Face à un État fédéral peu conscient de l’ampleur que prend ce groupe, les jihadistes frappent fort. En témoigne l’attaque à la bombe, survenue le 26 août 2011, contre le siège des Nations unies, situé dans un quartier diplomatique d’Abuja. L’explosion, provoquée par une voiture piégée en plein cœur de la capitale fédérale, fait 13 morts. L’onde de choc est importante. Et Boko Haram continue de grignoter du terrain dans le nord-est du Nigeria et dans le Lac Tchad : le 20 décembre 2013, les jihadistes détruisent le camp militaire de Bama, le 6 août 2014, les insurgés ne rencontrent aucune résistance pour s’emparer de Gwoza, où ils proclament dans la foulée un « califat islamique ».
Le 24 novembre 2014, Damasak tombe sous le joug des jihadistes : plus de 3 000 habitants partent se réfugier au Niger voisin. Et enfin, le 3 janvier 2015, des centaines de combattants armés de machettes et se déplaçant à moto et dans des pick-up surprennent les habitants de Baga, carrefour commercial abritant une base militaire sur le bord du Lac Tchad. C’est un véritable massacre, les insurgés brûlent une grande partie de la localité. Cette prise est une victoire symbolique puisque Baga hébergeait alors le siège de la Force multinationale mixte regroupant les armées nigériane, nigérienne, tchadienne et camerounaise.
Le moral des troupes nigérianes est bas. D’autant que les soldats se heurtent régulièrement à un déficit de moyens : lorsqu’ils manquent d’armes ou de munitions, les soldats n’hésitent pas à anticiper une éventuelle attaque des jihadistes et à quitter leurs postes.
Face à cette progression rapide, Abuja est dépassé. C’est seulement en 2013 que les autorités fédérales décrètent l’état d’urgence dans trois États : Borno, Yobe et Adamawa. Elles mettent du temps à prendre conscience de la gravité de la situation. « Probablement, au début (de l’insurrection), nous – je veux dire mon équipe et moi-même -, avons sous-estimé les capacités de nuisance de Boko Haram », reconnait le président Goodluck Jonathan, dans un entretien au quotidien This Day à la veille de sa défaite à la présidentielle de 2015.
La vie des habitants dans le nord-est est totalement chamboulée. Les paysans n’ont plus accès à leurs terres. Craignant l’insécurité, beaucoup ont délaissé leurs champs où ils cultivaient la tomate, le blé ou le riz pour s’installer dans des abris de fortune, établis autour de grandes villes comme Abuja ou Lagos. Il y a à ce jour, selon les Nations unies, 1,8 million de déplacés internes au Nigeria.
Les femmes et les jeunes sont des cibles privilégiées des insurgés de Boko Haram. Mariées de force à des jihadistes, les femmes sont aussi employées pour recruter de potentiels jihadistes. Quand elles ne sont pas utilisées comme kamikaze pour commettre des attentats dans des lieux publics.
Pour marquer les esprits, Boko Haram n’hésite pas à s’en prendre aux jeunes. Dans la nuit du 14 au 15 avril 2014, des jihadistes prennent d’assaut un internat de Chibok. Ils embarquent 276 lycéennes de force. Par chance, 57 jeunes parviennent à s’échapper. Mais l’essentiel des adolescentes – la plupart chrétiennes - reste captif des jihadistes qui sèment la terreur en diffusant des vidéos les montrant voilées, converties à un islam radical. Ces images, qui font le tour des réseaux sociaux, marquent l’opinion publique internationale.
Divisé, Boko Haram demeure une menace permanente
En février 2015, Muhammadu Buhari, militaire de carrière, est élu président. L’ancien général à la retraite est élu sur une promesse : celle d’éradiquer Boko Haram. Muhammadu Buhari veut réintroduire la transparence et la discipline dans les rangs d’une armée, accusée de commettre des crimes extrajudiciaires dans le nord-est du pays. L’image d’une armée corrompue lui colle aussi à la peau. En témoigne l’arrestation le 1er décembre 2015 du colonel Sambo Dasuki, ancien Conseiller national à la Sécurité sous Goodluck Jonathan, accusé d’avoir détourné près de 2 milliards de dollars dans le cadre de l’achat d’armement destiné à lutter contre Boko Haram.
Le nouveau président, Muhammadu Buhari, originaire de Katsina (nord), décide de déplacer le centre de commandement des opérations militaires d’Abuja à Maiduguri, épicentre de l’insurrection de Boko Haram. Sur le terrain, les forces de sécurité s’appuient davantage sur les groupes civils d’autodéfense, à l’origine composés de chasseurs qui se sont mobilisés pour bouter les jihadistes hors de leurs terres. Cette approche porte ses fruits. Boko Haram n’occupe plus les grandes villes du nord-est du Nigeria. Les jihadistes perdent notamment la forêt de Sambisa, une zone stratégique située au sud-est de Maiduguri.
Pour l’armée, c’est une victoire importante. Car ce terrain hostile de 60 000 km² était depuis le début de la crise, la base de repli d’Abubakar Shekau. Cet ancien fief de Boko Haram est situé à la frontalière avec le Cameroun, partenaire privilégié du Nigeria dans cette lutte : depuis la création de la Force multinationale mixte en 2015, soldats nigérians et camerounais échangent des informations sur les déplacements des jihadistes et coordonnent leurs opérations.
Acculés, les jihadistes décident en 2015 de prêter allégeance au groupe État islamique. Des drapeaux de l’EI flottent désormais sur leurs 4x4. Au-delà des affinités idéologiques et politiques, à travers cette allégeance, « Abubakar Shekau recherche une certaine reconnaissance », analyse le chercheur Corentin Cohen. Seulement, ce geste amplifie les divisions internes. L’EI désigne Abu Musab Al Barnawi à la tête du mouvement, au détriment de Shekau, régulièrement annoncé pour mort ou grièvement blessé. Deux factions émergent, avec deux stratégies radicalement différentes.
D’un côté, la faction fidèle à Abubakar Shekau, présente à la frontière avec le Cameroun et celle du Niger. Elle incarne une ligne dure et sectaire.
De l’autre, la faction de la province islamique en Afrique de l’Ouest (Iswap), ancrée sur les îles et le pourtour du Lac Tchad. Influencée par Mamman Nur, cette tendance se montre plus ouverte vis-à-vis des populations locales. « Cette faction agit en quasi État, observe Vincent Foucher, chercheur au CNRS : ils ont un accès à la santé, ils régulent les marchés et organisent les filières commerciales. Ils ont compris qu’il fallait adopter une attitude moins sectaire », poursuit cet analyste. « Cela fait partie de la nouvelle offensive qu’ils emploient depuis 2016-2017 pour relancer l’offensive », conclut ce chercheur.
Ces groupes sont divisés, mais leurs capacités de nuisances restent considérables. Entre juillet et décembre 2018, on recense au moins 22 attaques menées par Iswap contre des bases militaires, qui perdent à chaque fois de nombreux éléments et surtout des armes que les terroristes saisissent. Malgré le volontarisme du président Muhammadu Buhari, qui ne cesse de répéter que « Boko Haram est techniquement vaincu », sur le terrain, les forces armées nigérianes semblent parfois peu réactives. Ou encore sous-équipées. Ainsi, à Arege, le 29 novembre 2018, alors que des membres de Boko Haram débarquent à bord de motos et de pick-up, brandissant des kalachnikovs, « les soldats étaient à court de munitions après avoir repoussé avec succès l’attaque », confie un officier sous couvert d’anonymat.
L’armée nigériane peine à en venir à bout. Engluée dans des problèmes récurrents de corruption « l’armée nigériane manque de ressources et ses tactiques ne sont aucunement ajustées », estime pour sa part Yan St-Pierre, expert en contre-terrorisme. Quant à la Force multinationale mixte (FMM), elle tarde encore à être pleinement opérationnelle, faute de financements.
BALADE DANS KIGALI, VILLE-RUCHE QUI SE RÊVE EN "SINGAPOUR AFRICAIN"
La capitale rwandaise se métamorphose à grande vitesse et bâtit depuis vingt ans sa propérité sur les nouvelles technologies
Le Monde Afrique |
Pierre Lepidi |
Publication 26/07/2019
Le dôme est devenu un point de repère. Depuis les collines environnantes les yeux reviennent toujours au Convention Centre et à ses centaines de lumières. L’architecture ce lieu circulaire inauguré en 2016 s’inspire de l’irongo, la hutte traditionnelle dans laquelle les rois du Rwanda ont rendu la loi du XIVe siècle jusqu’aux années 1960.
Depuis la terrasse très prisée de la Westerwelle Start-Up Haus (WSH), la vue sur le dôme est imprenable. En octobre 2018, cette association allemande, qui promeut la démocratie et l’économie de marché, a ouvert face au Palais des congrès un espace de cotravail qui héberge une quarantaine de start-up. Le lieu a connu un succès rapide puisque, après quelques mois seulement, Savah Rukundo, community manager de la WSH se félicitait d’« afficher déjà un taux d’occupation de 70 % ». Dans les locaux, répartis sur deux étages, c’est la ruche : les « start-upeurs » s’activent sur leur secteur de prédilection, de la microfinance à l’irrigation des cultures, en passant par l’activité numérique ou la téléphonie mobile.
Incubateur de start-up
Dans ce cadre convivial, où la moyenne d’âge ne dépasse pas 25 ans, un laboratoire de recherche et des imprimantes laser sont à disposition des utilisateurs de l’incubateur. « Nous mettons en place un réseau, des infrastructures et des services pour que les sociétés que nous accueillons se développent », explique Sangwa Rwabuhiri, le directeur général. Dans ce pays d’une superficie comparable à celle de l’Auvergne, on peut créer une société en quelques heures. « Le Rwanda permet de tester des innovations sans prendre de gros risques financiers. Mais si une appli numérique fonctionne ici, on peut espérer qu’elle poursuive son développement à une échelle supérieure dans des pays comme la Tanzanie ou le Kenya. », ajoute-t-il. Et le centre de gravité de cette effervescence est le Palais des congrès, au croisement des districts de Kimihurura et Kacyiru.
C’est là que se concentrent les fleurons de la technologie. A Kimihurura, la start-up Awesomity Lab, qui propose une gamme de services de mobilité, est mondialement connue pour avoir développé un système de gestion de véhicules pour la marque Volkswagen. A deux pas de Kigali Heights, un centre commercial ultramoderne avec ses terrasses, ses restaurants branchés, ses magasins, son supermarché, des hommes d’affaires en costumes parfaits y croisent des étudiants dans une ambiance de campus américain. Car, au sein même du mall existe, depuis 2017, une école de business et de management. « L’African Leadership University, qui compte 600 élèves, forme les leaders africains de demain, assure Gaidi Faraj, le doyen. Le Rwanda séduit de plus en plus et Kigali reflète cette Afrique qui marche ! »
A quelques encablures, dans le quartier de Kacyiru, au sixième étage d’un immeuble cossu se trouvent les locaux de KLab, un espace d’innovation né il y a sept ans. C’est l’incubateur historique du Rwanda, le plus dynamique aujourd’hui encore. « Plus de 200 sociétés sont nées entre ces murs pour chercher des solutions innovantes dans l’agriculture, le transport ou le paiement, assure Aphrodice Mutangana, l’un des fondateurs de la plateforme. On considère que 58 % de la population rwandaise a moins de 25 ans. Ici, on aide ces jeunes : ils viennent avec leurs idées et on les aide à les réaliser. » L’espace KLab est ouvert vingt-quatre heures sur vingt-quatre et ne ferme qu’un jour dans l’année : le 7 avril.
Domaine d’innovation
Si le Rwanda se tourne vers l’avenir en misant sur les nouvelles technologies, il n’en oublie pas pour autant son passé. Le 7 avril 1994 correspond aux premiers massacres du génocide des Tutsi qui a fait 800 000 morts en trois mois selon les Nations unies. Un quart de siècle plus tard, soit le temps d’une génération, les plaies sont encore vives et la douleur reste présente dans tous les interstices de la société.
Lorsque le Front patriotique rwandais (FPR), emmené par Paul Kagame, libère le pays au bout de trois mois, tous les secteurs de l’économie sont en lambeaux. Au début des années 2000, Kigali décide pourtant de faire de ce pays enclavé, dont les ressources proviennent essentiellement de l’agriculture, un carrefour technologique, un « Singapour africain ». Les autorités fixent une série de plans quinquennaux, dont le premier vise notamment à créer un environnement favorable aux nouvelles technologies. Les suivants permettent l’installation d’un réseau de fibre optique, puis assurent le développement de services afin d’exploiter les technologies du numérique. Une vingtaine d’années plus tard, tous les bus du Rwanda ont un réseau Wi-Fi et les poches de sang sont livrées dans les hôpitaux par des drones. C’est à coups de contrats de performance destinés à fixer des objectifs à la population – dans des domaines aussi divers que le taux de scolarisation, l’adhésion à des mutuelles de santé ou la construction de latrines – que le pays, dirigé d’une main de fer depuis 2000 par Paul Kagame, s’est redressé. Il connaît aujourd’hui l’une des plus éclatantes réussites économiques du continent avec un taux de croissance annuel de l’ordre de 6 %.
Kigali change de visage en permanence. « Des nouveaux quartiers se développent à toute vitesse, d’autres se créent, explique Sangwa Rwabuhiri. Incontestablement, le centre de gravité de la capitale se déplace vers l’est », ce qui interroge sur les abords du Convention Centre. Seront-ils toujours le quartier des start-up dans quelques années ? Rien n’est moins sûr. Kigali, inspirée par lexemple de la Silicon Valley américaine, est en train de construire la plus grande cité de l’innovation d’Afrique. Situé dans une zone économique, le domaine va s’étendre sur 70 hectares pour un budget global de 2 milliards de dollars (1,8 milliard d’euros), financé notamment par la Banque africaine de développement (BAD). D’ici deux ou trois ans, la cité accueillera des entreprises des nouvelles technologies et de biotechnologies mondialement connues, entourées de centres commerciaux et de quelques universités.
L'HUMEUR DU DOYEN, PAR ALYMANA BATHILY
RÉPARATIONS !
EXCLUSIF SENEPLUS - Pourquoi donc les Africains et les Africains Américains ne recevraient-ils pas de réparations pour l’esclavage, le colonialisme et néocolonialisme ?
Alymana Bathily de SenePlus |
Publication 26/07/2019
Le 19 juin dernier le Congrès des Etats-Unis d’Amérique a organisé une session d’information pour discuter de la mise en place d’une « commission » pour « étudier et formuler une proposition en vue de payer des réparations aux Africains Américains » et leur adresser un « pardon formel » du gouvernement des Etats-Unis pour « la violation flagrante des droits humains et le crime contre l’humanité perpétré contre les esclaves africains et leurs descendants ».
60 élus et responsables démocrates dont la présidente du Congrès, Nancy Pelosi et l’ancien vice-président de Barack Obama, M. Joe Biden, ont apporté leur soutien à la proposition de création d’une telle commission.
L’acteur Dany Glover a apporté son témoignage, estimant que des réparations contribueraient à soigner les USA des «méfaits causés et par l’esclavage par les politiques d’exclusion raciale (et sont)…un impératif moral, démocratique et économique».
Cependant, l’initiative n’aboutira certainement pas de sitôt puisque la majorité des Américains, particulièrement des Blancs y est encore opposée.
Selon un sondage du Marist de 2016, 81% des Américains blancs s’y déclaraient opposés. 58% des Noirs y étaient par contre favorables. Le parti Républicain qui contrôle le Sénat en plus de la Maison Blanche est carrément hostile à toute forme de réparations.
Le président du groupe parlementaire Républicain du Sénat, le sénateur Mitch Mac Connell déclarant « ce n’est pas une bonne idée de parler de réparations pour quelque chose qui a eu lieu il y a 150 ans. Aucun d’entre nous n’était vivant alors », prévenant que toute motion législative serait introduite au Sénat sera bloquée. Il n’empêche : il sera difficile désormais de revenir en arrière.
La promesse de réparation qui a été formulée dès le lendemain de la Proclamation de l’Emancipation des Noirs, avec l’engagement du gouvernement des Etats-Unis d’alors jamais réalisée de donner à chaque esclave libéré, « 40 acres de terre et une mule », s’imposera désormais de plus en plus aux Américains.
De même en Afrique : l’idée de réparations pour l’esclavage, la colonisation et le néocolonialisme mise sur la table de l’OUA dès 1991 n’a toujours pas aboutie.
De l’OUA à l’Union Africaine, de la résolution 1339 approuvé par le Conseil des ministres du 27 mai - 1 juin 1991, au Groupe d’Eminentes Personnalités sous l’égide du nigerian Chief MKO Abiola, de la première Conférence panafricaine sur les dédommagements pour l'esclavagisme, la colonisation et la néo colonisation africaine (Abuja, Nigeria du 27 au 29 avril 1993) à la Conférence de Durban (Afrique du Sud, 31 Aout au 7 septembre 2001), l’Afrique s’est révélée incapable de parler d’une seule voix sur la question et de s’imposer.
Malgré l’intervention vigoureuse le 23 septembre 2009, à la tribune de l’Assemblée Générale des Nations Unies de Mouammar al Qadhafi, en sa qualité de président de l’Union Africaine. Il demande alors que la colonisation soit déclarée crime contre l’humanité et estime le montant des réparations dues à l’Afrique à 77 700 milliards de dollars US. On sait comment il sera assassiné deux ans plus tard.
Depuis, la question des réparations pour l’esclavage, le colonialisme et le néocolonialisme est restée à l’état de vœux pieux.
Ainsi donc, ni la demande de réparations des Etats africains aux Etats européens pour l’esclavage, le colonialisme et le néocolonialisme, ni celle des Africains américains au gouvernement des USA n’a encore abouti.
Pourtant, il y a au moins un précédent récent de réparations, acceptée par l’ensemble de la communauté des nations, c’est celui de l’Etat d’Israël et du Congrès Juif Mondial à l’endroit de l’Allemagne pour la Shoa et les crimes de la 2ème guerre mondiale.
De nos jours, encore des réparations sont payés aux victimes juives du nazisme notamment pour assurer des soins de santé aux survivants de l’holocauste.
La Claims Conference qui s’emploie à l’indemnisation des victimes de l’holocauste a levé pour l’année 2019, un budget de 480 millions d’euros.
Pourquoi donc les Africains et les Africains Américains ne recevraient-ils pas de réparations pour l’esclavage, le colonialisme et néocolonialisme ? Question de rapport de force sans doute !
Peut être bien que si l’Afrique toute entière s’entendait sur la question, si elle intégrait la lutte des Africains Américains à la sienne, nul ne doute que la donne changerait.
Retrouvez chaque semaine sur SenePlus, le billet de notre éditorialiste, Alymana Bathily
Il fut, dans les années 1970, un grand spécialiste de l’Afrique. Son premier best-seller, « Affaires africaines », marque le début d’une série de livres d’enquêtes, sur l’affaire des diamants offerts par le centrafricain Bokassa à Valéry Giscard d’Estaing
Pierre Péan, l’un des plus grands journalistes d’enquête français, est décédé ce jeudi soir, à l’âge de 81 ans.
Pierre Péan, le grand journaliste d’enquête, est mort jeudi soir 25 juillet à l’âge de 81 ans. Originaire de la Sarthe, il fut, dans les années 1970, un grand spécialiste de l’Afrique. Son premier best-seller, « Affaires africaines », marque le début d’une série de livres d’enquêtes, sur l’affaire des diamants offerts par le dictateur centrafricain Bokassa à Valéry Giscard d’Estaing, sur l’empire TF1, avec Christophe Nick, et sur la jeunesse de François Mitterrand.
Dans cet ouvrage, « Une jeunesse française. François Mitterrand, 1934-1947 », Pierre Péan révèle que le président socialiste a reçu la décoration de l’ordre de la Francisque des mains du maréchal Pétain. Ce sera son plus gros succès en librairie, celui qui le fera connaître du grand public. Il publie aussi une enquête sur le fonctionnement du quotidien « le Monde », dans les années où le journal est dirigé par Edwy Plenel, ou encore un travail minutieux sur la vie tumultueuse de Bernard Kouchner.
Vision humaniste et bienveillante de son métier
Dans les années 1990, il se spécialise dans des enquêtes historiques, sur Jean Moulin, la guerre d’Algérie, sur le banquier suisse François Genoud, exécuteur testamentaire d’Hitler. Un de ses travaux les plus controversés fut « Noires fureurs, blancs menteurs. Rwanda, 1990-1994 », dans lequel il prend la défense du gouvernement français, accusé d’avoir participé au génocide contre les Tutsis.
Pierre Péan détestait le terme « journalisme d’investigation », qu’il jugeait trop inquisitorial, trop accusatoire, trop « yankee ». Il préférait l’expression « enquête » qu’il jugeait plus conforme à l’esprit français. Il avait surtout une vision humaniste et bienveillante de son métier, rappelant à ceux qui le croisaient qu’il fallait toujours « s’attacher à comprendre les trajectoires des personnalités, sans les juger, sans les salir, tout en assumant la révélation des faits ».
Pierre Péan a collaboré à de nombreux journaux, tels que « Libération », « le Canard Enchaîné », « Actuel », mais n’a jamais voulu s’enfermer dans un titre, pour « garder sa liberté de jugement, et surtout avoir le luxe du temps, pour ne pas être prisonnier de la tyrannie de la vitesse ». Ces dernières années, il s’inquiétait de la dérive des médias, de ce qu’il appelait le « pilori de l’instantané ». Il part dans un moment où la question ne s’est jamais autant posée.
ÉCO OU FCFA ? LES CINGLANTES RÉPONSES DE MICHEL NADIM KALIFE
L’avénement de l’euro et la disparition du Franc CFA suscitent un débat vif dans l’espace public africain. Pour l’économiste togolais, la monnaie et le populisme ne font pas bon ménage. Interview
FinancialAfrik |
Adama Wade |
Publication 25/07/2019
La nouvelle monnaie unique de la CEDEAO, Eco, devrait voir le jour en 2020. Comment l’économiste que vous êtes appréhende-t-il cette devise?
Il faudrait peut être attendre de connaître les mécanismes de cette nouvelle monnaie pour se prononcer. Sans vouloir être pessimiste, on peut dire que le jour où la France ne garantira plus le change fixe du Franc CFA en euro, on assistera à des bouleversements. L’Eco non garanti dépendra essentiellement du Nigeria qui représente 70% du PIB de la CEDEAO. Nous verrons alors cette nouvelle monnaie dégringoler comme le Naira en ce moment. Les petits épargnants, les employés du secteur privé, les fonctionnaires, les paysans et les retraités n’auront plus que leurs yeux pour pleurer leur perte de pouvoir d’achat.
Vous voulez dire que tout le monde est perdant dans cette nouvelle monnaie ?
Hélas, seuls les commerçants et les pilleurs de L’État s’en sortiront. Les premiers sauront revaloriser leurs marchandises en fonction de la dépréciation de l’Eco. Les seconds auront toujours les moyens de reconvertir leur butin en € ou en $. Quant aux producteurs de cacao, café, coton, palmistes, de noix de cajou, …tous produits d’exportation, ils verront leurs recettes dégringoler entre le moment où ils auront vendu leur récolte et le moment d’encaisser la somme, parce que durant ce délai la valeur de l’ECO aura chuté… Alors, la civilisation du “DASH”, en vigueur au Nigeria, Ghana, sierra Leone, Gambie, Guinée, s’étendra aux pays de l’UEMOA où les perdants, soit 80%, vont voir leur pouvoir d’achat se déprécier.
Nous vous trouvons bien pessimiste sur ce projet de monnaie unique?
Je suis en effet désolé d’aller dans le sens inverse de la plupart des analystes qui abreuvent notre jeunesse de fausses théories. La monnaie c’est de la réalité immédiate. Gardez bien cette analyse prévisionnelle quelques longues années encore, car il faudra beaucoup de temps à l’ECO pour qu’il soit adopté par tous les 15 pays de la CEDEAO et devenir une monnaie unique remplaçant les 8 monnaies nationales actuelles (FCFA, Naira, Cedi, dollar libérien, livres gambienne et Sierra Leonaise, Franc Guinéen, escudo du Cap Vert), mais, attention!, sans la garantie du Trésor Public français. D’ici là, je serai décédé de vieillesse…mais mon analyse me servira à survivre parmi vous, en honorant ma mémoire pour vous avoir dit une vérité prophétique qui fera honte à tous les pourfendeurs du Franc CFA auxquels leurs moutons de Panurge demanderont des comptes pour leur avoir promis le paradis alors qu’ils vont vivre l’enfer monétaire… Miserere Nobis !
Il s’agit quand même d’un vieux projet, réfléchi pendant de longues années et mis en oeuvre par des experts du domaine ?
Cette histoire de monnaie me rappelle la boutade du président Abdou Diouf lors de la conférence des Intellectuels africains en décembre 1996, à Dakar, sur initiative de son ministre d’État d’alors, Abdoulaye Wade. “La maladie des Africains, c’est la ” Colloquite, celle de faire des colloques sans suite … “, s’était exclamé le président sénégalais. C’est exactement ce qui caractérise le projet de création de la monnaie commune et unique de la CEDEAO, qui avait été projeté à la suite du “Plan de Lagos ” en 1980. J’avais alors, (à travers mes conférences débats données à l’hôtel ” Palm Beach” de Lomé en 1982/1983), proposé deux dénominations : Cauris et Afro. Il a fallu, aux autorités de la CEDEAO, 36 ans pour accoucher de la petite souris “ECO” qui ne fait que reprendre les 3 premières lettres de ” ECOWAS”, acronyme de la CEDEAO en anglais, cela signifiant bien la domination des anglophones, dont le tout-puissant Nigeria !… Alors, je dis : “chapeau!” à Abdou Diouf… Miserere Nobis !
Donc, pour vous, la messe est dite. L’Eco est déjà un échec ?
Non, pas tout à fait. Je dis que tant que nous n’aurons pas L’État de droit et le respect de la supra -nationalité, nous n’aurons pas l’ECO comme monnaie unique remplaçant les 8 monnaies nationales de l’espace CEDEAO… Il faut vous dire que nos régimes présidentiels ont offert à nos chefs d’État le goût du pouvoir personnel. Je les vois mal accepter de limiter leur pouvoir personnel. Les 7 pays à monnaie nationale, dont le Nigeria et le Ghana, ont actuellement la facilité de payer leurs fonctionnaires et leurs forces de l’ordre sans retard, juste en appuyant sur le bouton de la planche à billets… Ils ne voudront pas abandonner ce privilège. En définitive, il y a du chemin avant d’atteindre l’Etat de droit. C’est le seul moyen de s’assurer une monnaie inspirant confiance à ses citoyens.
Vous conviendrez avec nous que la zone Franc n’est pas non plus un paradis avec un spectre de la dévaluation omniprésent ? Pensez-vous qu’une dévaluation est totalement exclue en ce moment ?
il n’y a aucune raison de dévaluer le FCFA chez nous en Afrique de l’Ouest. Par contre, en Afrique centrale, il risque d’y avoir une dévaluation pour leFranc CFA XAF quand nous, en zone UEMOA, nous changerons le nom du FCFA XOF en ECO, sans dévaluer! Tout simplement. Les 8 pays de l’UEMOA adopteront l’ECO à la même valeur du Franc CFA, en définissant le taux de change entre le Franc CFA et l’ECO, tout comme en France, quand on est passé du FF à l’€, sans changer la valeur du FF, mais simplement en convertissant le FF en €, et nous, en zone UEMOA, nous définirons le FCFA en ECO sans changer notre pouvoir d’achat! Donc, pas de dévaluation en vue, parce que les réserves de la BCEAO sont bonnes et bien gérées.
En clair et en définitive, il ne faut pas trop se réjouir de l’arrivée de l’Eco ?
Celà dépend de bien des paramètres dont l’Etat de droit et la discipline monétaire. Il faut comprendre l’économie monétaire, une science aussi difficile à comprendre par un économiste généraliste qu’un médecin généraliste en qui concerne la neurochirurgie. L’ECO est la monnaie de référence envers laquelle chaque monnaie d’un pays membre de la CEDEAO doit définir la sienne, que ce soit le FCFA, le Naira, le Cedi, le dollar libérien, la livre de Sierra Léone ou de Gambie,…ou le Franc guinéen. Les anti-CFA polémiquent par ignorance à mon avis.
La nouvelle monnaie mettra-t-elle fin aux mécanismes du Franc CFA tant décriée par le camp des anti- CFA?
Les anti-CFA font dans l’émotion. Le Franc CFA est une monnaie garantie par le Trésor public français sur la base de 1€=655,957FCFA tant que la BCEAO le souhaitera en respectant les règles de convertibilité prévues dans leurs accords de change illimité. Et parmi ces conditions, il y a le fait que la BCEAO doit déposer 50% de ses réserves sur le compte du son garant, le Trésor public français, ouvert à la Banque de France, moyennant rémunération de ces dépôts à un taux supérieur de 0,65% par rapport au taux international de rémunération à vue (pourquoi à vue, parce que ces dépôts varient d’une seconde à l’autre pour payer les importations de la zone UEMOA). C’est cela que ne comprennent pas les anti-FCFA parce qu’ils n’ont jamais été de grands importateurs ni servi dans l’un des 32 comptes d’opérations de la BCEAO, dont le plus important est celui ouvert à la Banque de France, qui, seul, rémunère les dépôts de la BCEAO à 0,65%, au dessus du taux pratiqué par les 31 autres comptes ouverts à travers le monde. C’est pourquoi, au lieu d’y déposer les 50% obligatoires, les Banques centrales africaines (BCEAO, BEAC) y déposent la quasi totalité des réserves pour obtenir un supplément annuel d’intérêts de 50 à 80 milliards FCFA par an, selon les années. Mais, les anti-FCFA ignorent tout cela, parce que leurs meneurs, pourtant bien informés de la chose, se gardent bien de les en informer pour pouvoir mieux les mener comme des moutons de Panurge… C’est déplorable ! Donc, pour en revenir à la monnaie commune, l’ECO, elle ne deviendra unique qu’après que tous les 15 pays de la CEDEAO aient réussi à stabiliser le change de chacune des monnaies nationales, ce qui va permettre de remplacer chaque monnaie nationale par l’ECO, sans problème, puisqu’elle lui est devenue équivalente tout en ayant l’avantage de favoriser les échanges entre les 15 pays de la CEDEAO du fait qu’il n’y aura plus de problème de change entre leurs anciennes monnaies nationales. Mais la grave question qui se présente est la suivante: Combien d’années de bonne gouvernance faudra-t-il pour les 6 pays à monnaie nationale (Naira, Cedi,dollar libérien, livres gambienne et de Sierra Léone, Franc guinéen) pour rejoindre les critères de convergence de l’ECO ? Par contre, seuls le Franc CFA, dont les 8 pays membres sont déjà convergents depuis la dévaluation de 1994, ainsi que l’escudo du Cap Vert, soit 9 pays sur 15, respectent et respecteront les sept critères de convergence. Les autres 6 pays, à mauvaises habitudes de gestion budgétaire et donc monétaire, auront beaucoup de mal à ne plus user de leur planche à billets pour combler leurs déficits et autres habitudes menant à la dépréciation à répétition de leur monnaie nationale. C’est pourquoi le Franc CFA peut dès à présent définir son change avec l’ECO, tandis que les autres monnaies évolueront leur taux de change, mois après mois, du fait de leur dépréciation continue sur le marché international, notamment vis à vis du Franc CFA, qui demeure la monnaie la plus stable et la plus forte du monde, même plus forte que l’€ en laquelle il est aujourd’hui défini, du seul fait que la monnaie du Trésor public français est l’€. Car, si un jour l’€ éclate, le FCFA survivra fort et stable, grâce a la garantie du Trésor Public français qui sera toujours là pour nous protéger contre les attaques des cambistes et autres spéculateurs…grâce aux accords de coopération qui lient la France à l’UEMOA, tant que celle ci en respectera les conditions. Quant à l’ECO, l’autre question grave sera de savoir si son institut d’émission, s’il est placé à Abuja, comme l’exige le Nigeria, respectera les règles de bonne gestion monétaire pour assurer sa stabilité et ne pas faire fuir nos épargnes à l’étranger pour les protéger contre la d’évaluation…. That is the question.
Comment analysez-vous les prises de position du président Ouattara, ouvertement militant pour une monnaie unique à change fixe par rapport à l’euro?
Le président Ouattara est un grand économiste. Ce n’est pas pour rien qu’il a su à la fois redresser l’économie ivoirienne à la vitesse grand V et faire remonter les réserves de la zone Franc cfa de la BCEAO. Il est le seul à être en mesure de tenir tête à l’impérialisme du Nigeria qui veut nous absorber comme des nains de la CEDEAO… Le président ivoirien connaît l’économie monétaire, et donc le FCFA, mieux que tous! De tous les chefs d’État de la CEDEAO, il est le seul spécialiste monétaire. C’est pourquoi, il mènera la barque de l’ECO tant qu’il est président de Côte d’Ivoire… Malheur à nous, pays de l’UEMOA, le jour où il sera remplacé par un non économiste monétariste !!! Car le Nigeria va absorber l’ECO en en faisant équivalent au Naira, en l’imprimant à Abuja. La dégringolade sera inévitable. Les classes moyennes qui pensaient sortir de la “servitude monétaire”, théorie chère aux anti-CFA , n’auront que leurs yeux pour pleurer. Devrais-je le rappeler, le président Ouattara s’occupait du Franc CFA quand il évoluait au sein du FMI. Il a aussi officié en tant que gouverneur de la BCEAO et a bien négocié la dévaluation indispensable du Franc CFA en janvier 1994.
Donc, vous êtes d’accord avec le président Ouattara quant à la parité fixe de l’Eco avec l’euro et non au panier de devises défendu par certains économistes ?
Certainement. L’option du président Ouattara de conserver la parité FCFA/€ tant que la monnaie commune Eco (qui est une monnaie de référence vers laquelle doivent tendre les diverses monnaies autres que le Franc CFA pendant la longue période de transition) n’est pas devenue monnaie unique !!! Alors, ceux qui n’ont pas étudié la monnaie, je leur demande de considérer ce domaine spécifique en dehors des comportements politiciens. Sinon, ce sera la pagaille comme avec les anti FCFA.
Cela dit, l’option défendue par le président Ouattara n’est autre que le schéma suivi par tous les pays européens qui ont intégré la monnaie unique € après avoir traversé la longue épreuve de convergence des 6 premières monnaies de la zone € dont les monnaies suivantes: DM (Allemagne), FF (France), florin ou DFl(Pays-Bas), FB (Belgique et Luxembourg), Lira( lire italienne), ptas(Espagne), qui mirent 24 ans pour converger de 1975 à 1999 vers la monnaie commune avant de l’adopter en 3 ans comme monnaie unique entre 1999 et 2002, trois ans au cours desquels la nouvelle monnaie commune remplaça progressivement chaque monnaie nationale. Alors, cela m’étonnerait que nous autres, 15 pays CEDEAO, où l’Etat de droit est loin d’être en vigueur, mettions moins de temps que ces 6 pays européens avancés…
Certes, les 8 pays UEMOA conserveront leur FCFA durant la période de convergence qui exige que chaque pays qui veut adopter l’ECO s’aligne sur les exigences des 7 critères de convergence (dont le déficit budgétaire inférieur à 5%, le taux d’inflation inférieur à 3%, le déficit du commerce extérieur inférieur à la marge restante après la limite de 20% du taux des réserves monetaires par rapport à la circulation monétaire dans le pays concerné,… Etc). A défaut d’y parvenir, chaque pays restera dans la période de transition vers l’ECO sans l’adopter, l’ECO restant une référence vers laquelle il faut tendre. Ce n’est que lorsque tous les15 pays membres de la CEDEAO auront réussi à respecter ces 7 critères de convergence que l’ECO sera adoptée comme monnaie unique en remplacement du FCFA de même que des 7 autres monnaies nationales (Naira, Cedi, dollar libérien, franc guinéen, escudo du Cap vert, livre de sierra Léone,…Dalasi de Gambie). Je crains que cela ne prenne plus que les 24+3=27 ans pris par les 6 premiers pays de la zone €…. Alors, laissons le temps au temps comme disait le génie politique François Mitterrand.
Finalement, à quoi sert de changer l’appellation du franc en eco?
Tout d’abord, cela va calmer les ardeurs anti-FCFA et anti- françaises qui font florès. Ensuite, si l’ECO est adopté par les autres pays de la CEDEAO – à la condition qu’ils respectent la discipline monétaire, ce qu’ils n’ont jamais respectée jusqu’ici, malgré leurs promesses datant de 1997 en vue de la monnaie commune-, cela peut aider la région à condition que la discipline monétaire soit respectée. Mais si le Nigeria et le Ghana continuent à refuser la garantie de change de l’ECO par la France, le taux de change risque de se déstabiliser à la moindre baisse des prix des matières premières d’exportation (pétrole, cacao, coton, café, cajou, palmistes, OR, bois, …). Autre scénario à éviter, le cas de figure où les importations de la CEDEAO dépassent ses exportations, ou encore s’il y a un désordre politique provenant de coups d’État ou d’attaques djihadistes. Tout le problème de confiance des investisseurs se trouvera là… Ce qui est le plus à craindre, c’est qu’il n’y aura plus Alassane Ouattara pour défendre la bonne gestion du FCFA devenu ECO, et que ce soit alors le Nigeria (géant dominant la CEDEAO avec 70% de son PIB et de sa population, et qui ne réfléchit qu’en fonction de ses propres intérêts, comme il l’a prouvé en rejetant l’accord APE entre l’UE et la CEDEAO signé à Dakar en janvier 2014) qui dirige la CEDEAO en y transposant sa malheureuse gestion du Naira… Ce qui fera dévaluer l’ECO à répétition, avec toutes ses conséquences sur le pouvoir d’achat des populations, qui seront obligées de recourir à des pratiques illicites pour rattraper leurs pertes de pouvoir d’achat…ce qui signifie que la corruption redeviendra systémique, touchant tout le monde, comme au Nigeria, à la différence de l’actuelle zone FCFA où la corruption est limitée aux rouages du pouvoir (douanes, justice, police,…). Pour conclure, il y aura risque de dévaluations à répétition de l’ECO dès que le Nigeria arrivera à l’adopter en remplacement du Naira. Car le poids du Nigeria, 70% de la CEDEAO, décidera de l’avenir de l’ECO, surtout qu’il n’y aura plus le président Ouattara pour veiller à la rigueur de gestion de cette monnaie commune, en tenant tête au président nigérian.
MALTE, UN ELDORADO POUR LES MIGRANTS AFRICAINS ?
Île à l’économie prospère, Malte attire les migrants africains en quête de travail. Mais face à leur afflux de plus en plus massif, l’archipel veut fermer ses ports et demande le soutien de l'Union européenne
Dans la rue commerçante San Guzepp, juste à l’entrée d'Il-Hamrun, dans l'est de Malte, l’enseigne, qui arbore une carte d’Afrique, ne paie pas de mine. Il est 18 h et le ballet incessant de migrants africains ne faiblit pas. "Mandela Travel Center" n’est pas une de ces nombreuses ONG qui servent de refuge pour les rescapés de la Méditerranée, mais bien une agence de voyage.
Derrière un bureau, Ousmane Dicko, le directeur de la structure, yeux rivés sur l’écran de son ordinateur, est occupé à réserver les vols pour ses clients, un poil débraillés, pressés de trouver un prochain départ pour Rome, Cagliari ou même Stockholm afin de renouveler leur titre de séjour. “Une grande majorité vient du Mali, du Sénégal, de Côte-d’Ivoire ou de Somalie”, explique Ousmane Dicko, un Ivoirien installé à Malte depuis une quinzaine d’années.” Et d'ajouter : "L'Italie est la destination la plus demandée ici. Ils travaillent à Malte mais font le plus souvent l’aller-retour entre Malte et l’Italie, où ils ont été enregistrés, pour renouveler leur titre de séjour ou voir des amis”.
Ousmane Dicko est ravi d’avoir flairé cette affaire en 2014. "Au départ, c'était juste un centre informatique mais beaucoup de migrants venaient imprimer leur billet d'avion ici et ils demandaient conseil", raconte-t-il. "Ma femme, qui est maltaise, et moi avons saisi cette opportunité. La proximité culturelle a fait le reste."
L'agence ouverte en 2014 accompagne les migrants depuis la réservation de leur billet jusqu'à leur embarquement. "Peu instruits, ils ont du mal à réserver eux-mêmes leur vol en ligne et à suivre les consignes. Il arrive parfois qu’ils ratent leur vol parce qu'ils sont perdus dans le hall de l’aéroport”, affirme Ousmane Dicko.
Boom immobilier et tourisme massif
Adama, un migrant malien, doit partir pour Cagliari où il s’est fait enregistré à son arrivée en Europe mais les différents billets d’avion proposés par l’agent de voyage dépassent son budget. Il hésite mais finit par réserver un vol. “Je dois aller urgemment en Italie. Mon titre de séjour expire bientôt. Il faut que j’aille renouveler mes documents”, affirme le jeune effilé de 28 ans, aide-maçon sur le chantier d'un futur hôtel. “Ici, il y a du travail partout. Si tu cherches tu vas en trouver. Mais en Italie...C’est bien plus compliqué.”
Dehors, le ciel du plus petit État de l’Union européenne (316 km2) dominé par des centaines de grues semble lui donner raison. À Malte, dans les cités balnéaires de San Giljan ou de St Paul’s Bay, des immeubles de haut-standing ne cessent de sortir de terre pour accueillir de plus en plus de voyageurs. Un boom immobilier porté par l’essor du tourisme massif et encouragé par la vaste politique de modernisation du Premier ministre de centre-gauche Joseph Muscat. “Tous les jours, de nouveaux immeubles remplacent les vieilles constructions. On casse, on construit. Tout devient nouveau. Cela a l’air artificiel. À ce rythme, il n’y aura presque plus de campagne à Malte”, se plaint Censina Borg, une Maltaise de 59 ans.
En 2018, selon l’Office maltais de statistiques, Malte a accueilli 2,6 millions de touristes, pour un profit estimé à 2,1 milliards d’euros. Un record pour l'île. Pour la période de janvier à mai 2019, ils étaient déjà plus de 813 000 à avoir visité le pays.
Conséquence : les prix de l'immobilier flambent. Selon un rapport du cabinet Knight Frank, les prix des maisons dans l’archipel avaient progressé de 16,9 % au deuxième trimestre 2018 sur un an. Une situation propice aux migrants en quête de pécule et aux entreprises, heureuses de trouver une main d’œuvre moins chère.
Adama quitte l’agence "Mandela Travel Center". Il aurait préféré être à la place de Mohamed*, un migrant ivoirien de 40 ans, qui, lui, a accosté à Malte en 2011. Il est arrivé “par hasard”, comme une grande majorité de migrants africains qui ne peuvent plus rejoindre les côtes italiennes pour diverses raisons : chavirement des embarcations en Méditerranée, opérations de récupération en pleine mer par l’armée maltaise, passeurs les ayant lâchés sur les côtes... “Nous étions 300 à avoir embarqué de Libye en 2011. On partait pour l’Italie mais à cause d’une panne du moteur du zodiac, nous nous sommes arrêtés dans les eaux maltaises. La marine maltaise nous a sauvés de la noyade”, raconte Mohamed, chauffeur de taxi dans son ancienne vie à Yamoussokro, la capitale ivoirienne.
“Arrivés par erreur”
“Depuis 2000, ils sont moins de 20 000 migrants à avoir transité par l’île, contre 800 000 par la Sicile. L’île de Lampedusa ou la Sicile sont des portes vers l’Italie et le continent. Alors que Malte est un cul-de-sac. Les migrants y arrivent par erreur,’’ expliquait à La Croix Nathalie Bernardie-Tahir, géographe à l’université de Limoges et co-auteure de "Méditerranée : des frontières à la dérive", aux éditions Le Passager clandestin . Selon le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugies (UNHCR), pas moins de 17 000 migrants sont arrivés entre 2005-2015 par des bateaux de passeurs sur l’île de miel qui n’est qu’à 320 km des côtes libyennes.
Mohamed a ensuite été placé en détention dans le centre de Safi Barracks, à Malte, pendant douze mois (la durée maximale est de dix-huit mois) comme le sont systématiquement tous les migrants illégaux sur l’île. “Les autorités maltaises se disent matériellement incapables, tant d’accueillir les étrangers qui débarquent par vagues successives, que d’assurer leur éventuelle intégration sur le territoire. Ne disposant pas des structures ad hoc nécessaires, elles règlent la question par des mesures systématiques de placement en détention administrative des étrangers dits 'illégaux', à savoir la grande majorité des migrants, qui arrivent dans ce pays, même lorsqu’ils sont demandeurs d’asile.” détaillait Claire Rodier, juriste du Groupe d’information et de soutien des immigrés (GISTI) pour la revue Cultures et Conflits, en 2005.
Le recours systématique à la détention a été condamné par la Cour européenne des droits de l’Homme. Et Malte a fait mine de ne plus l’appliquer en raison de la baisse des nouvelles arrivées entre 2015 et 2017. Mais face au retour en masse de nouveaux migrants en 2018, l’Italie de Matteo Salvini et de Giuseppe Conte ayant fermé ses frontières, l’archipel a renoué avec ses anciennes pratiques.
Discours de haine
En mai 2012, Mohamed a obtenu une protection subsidiaire en raison de la crise post-électorale de 2011 en Côte-d’Ivoire. Il a rejoint le centre ouvert de Hal-Far, une ancienne caserne aménagée en 2004. “Là, j’étais libre de mes mouvements et je pouvais travailler”, raconte Mohamed, qui a d’abord travailler comme carreleur, avant de trouver un travail stable dans un hôtel 4 étoiles de Buggiba, où il est assistant-magasinier. “À Malte, le plus dur est de quitter la détention. Si tu passes cette étape, tu es sauvé.”
Mais en avril, un événement est venu troubler la quiétude des migrants. L’assassinat par deux militaires maltais de Lassana Cissé, un ouvrier ivoirien de 42 ans qui travaillait dans une usine à Birżebbuġa dans le sud-est de l’île. L'événement a suscité une vive émotion au sein de l’opinion maltaise. “Les mots de haine et de division n’ont pas leur place dans notre société. C’est un signal fort à tous ceux qui répandent un discours de haine que leurs sentiments mal placés ont de graves conséquences", a réagi vivement le Premier ministre travailliste Joseph Muscat, après l’arrestation des militaires en mai.
L’Église maltaise s’est à son tour mobilisée pour dénoncer la xénophobie, la haine et le sentiment d’impunité “qui empoisonnent nombre d’entre nous, les Maltais ». L’archevêque Charles Scicluna a en outre organisé un concert, dont la moitié des recettes était destinée à la famille de Lassana Cissé, restée en Côte d’Ivoire.
Si pour Mohamed, les cas de racisme à Malte sont bien isolés, l’afflux massif de migrants sur cette petite île a changé le paysage politique, avec la montée en puissance de l’extrême droite, emmenée par l’écrivain Norman Lowell, qui préside le parti politique Imperium Europa. Lors des dernières élections européennes, ce parti a obtenu 3,17 % des suffrages, son plus haut score. Il reste tout de même loin derrière les partis traditionnels : le parti travailliste du Premier ministre Joseph Muscat (55 %) et le parti nationaliste du Simon Bussutil (38 %).
“Immigraton bénéfique”
Pour l’éditorialise maltais Matthew Vella, journaliste à Malta Today, si l’île résiste encore à l’extrême droite, c’est aussi parce que malgré les inégalités sociales croissantes, l’économie maltaise “continue de croître grâce à la contribution de milliers d'étrangers. "Cela explique peut-être pourquoi les préoccupations en matière d’immigration à Malte sont compensées par la prise de conscience que cet afflux est bénéfique pour le bien-être financier de la population.” En 2018, seulement 14 % des demandes d’asiles de migrants à Malte ont été rejetées. Mais depuis le début d'année, l'archipel mène des discussions avec d'autres États européens pour répartir les nouveaux migrants. Posture politique ?
En avril, les navires des ONG allemandes Sea Watch et Sea Eye ont débarqué plus d’une soixantaine de migrants chacun, qui seront répartis entre l’Allemagne, la France, le portugal et le Luxembourg. Début juillet, un autre navire l’Alan Kurdi de l’ONG Sea Eye, lui aussi transportant une soixantaine de migrants, a accosté dans le port de La Valette.
Mohamed regrette que ces nouveaux migrants n'aient pas la chance de rester sur l'archipel, où il a trouvé "son bonheur". "Je partais en Italie mais Malte a été une chance pour moi. Ils m'ont sauvé de la mort et m'ont donné du travail. Je ne peux que rendre grâce."
*Nom d'emprunt
LE SÉNÉGAL VICTIME DE SA COOPÉRATION FISCALE AVEC MAURICE
En signant en 2002 une convention de non double imposition avec l’Île Maurice, le pays aurait perdu la bagatelle de 257 millions de dollars en recettes fiscales sur une période de 17 ans
En perdant environ 257 millions de dollars en recettes fiscales sur une période de 17 ans, le Sénégal apparaît comme une victime tragique de la convention de non double imposition signée avec l’Île Maurice en 2002. Une situation que le chef de l’Etat a dénoncée et entend corriger. Comme l’Afrique du Sud, l’Inde ou le Kenya l’ont réussi.
Les pays africains ayant subi (volontairement) les méfaits d’une coopération fiscale déséquilibrée avec Maurice sont nombreux. Le Sénégal en fait partie. En signant en 2002 une convention de non double imposition avec l’Île Maurice, notre pays aurait perdu la bagatelle de 257 millions de dollars en recettes fiscales sur une période de 17 ans, ont indiqué des fonctionnaires des Impôts et Domaines à Icij. Soit l’équivalent d’environ 128 milliards de francs Cfa (au taux d’un dollar à 500 francs Cfa).
En 2011, le géant canadien de l’ingénierie SNC-Lavalin gagne un marché de 50 millions de dollars visant à construire une usine de transformation de minerai au Sénégal au profit de l’entreprise Grande Cote Opérations (GCO). Mais au lieu de réaliser les travaux elle-même, SNC-Lavalin se souvient qu’elle a une filiale basée dans le paradis fiscal qui s’appelle… Maurice, SNC-Lavalin Mauritius. Celle-ci prend donc en charge le contrat pour profiter de la convention de non double imposition que l’Etat mauricien avait signé auparavant avec le Sénégal (en 2002). Les West Africa Leaks en avaient fait la révélation au cours de leurs publications de mai 2018.
Depuis, la vigilance des autorités sénégalaises s’est réveillée avec l’annonce par le président Macky Sall de son intention de dénoncer la convention susmentionnée. Ce qui reste de prendre du temps car, comme l’ont montré les investigations menées par le Consortium international des journalistes d’investigation (Icij), les autorités mauriciennes sont décidées à résister aux Etats souhaitant dénoncer les accords de non double imposition avec elles. Interrogé par Icij, Maguèye Boye, inspecteur des impôts et principal négociateur de l’Etat a fait le commentaire suivant : « De tous les traités signés par le Sénégal, c’est le plus inégal. (…) C’est un énorme pipeline pour l'évitement fiscal. »
Au-delà de Maurice, le Sénégal s’est lancé dans un processus de négociations avec beaucoup d’autres pays. Celle signée récemment avec le Luxembourg a suscité beaucoup de commentaires. Pour l’expert fiscal Elimane Pouye, en service à la Direction générale des impôts et domaines (DGID), il y a danger. Surtout « en l’absence de véritables relations économiques bilatérales », comme entre le Sénégal et Maurice.
« (…) En signant plus de 15 conventions fiscales bilatérales et en ayant près d’une vingtaine de conventions dans le processus de négociation, notre pays s’est engagé dans une politique (…) imprudente qui accroît le risque d’évasion fiscale et d’une utilisation abusive (des dits accords) par des multinationales dans leurs stratégies fiscales agressives », nous disait-il dans une interview parue l’année dernière.
L’INDE A PERDU 2,2 MILLIARDS DE DOLLARS EN RECETTES FISCALES
Selon le Consortium international des journalistes d’investigation, faire entendre raison n’est pas facile, comme certains pays l’ont expérimenté. «Les renégociations peuvent prendre des années. (…) L'Afrique du Sud a signé un nouveau traité avec Maurice, qui a d'abord ignoré sa demande de modifier le texte de 1997, puis a résisté pendant des années », rapporte Icij.
« Les multinationales occidentales ont fait pression sur le parlement sud-africain pour qu'il rejette la renégociation et ont menacé de transférer leurs opérations offshore à Dubaï. Le nouveau traité est entré en vigueur en 2015. » "L'ancien traité a fondamentalement cédé le magasin", a déclaré Lutando Mvovo, un ancien fonctionnaire du Trésor sud-africain qui a pris part aux négociations.
L’Inde a aussi les mêmes difficultés à obtenir un changement dans sa coopération fiscale avec Maurice. « Pendant des années, les gouvernements indiens successifs ont contesté la légalité du traité de Maurice de 1982. Et ils n'arrêtaient pas de perdre. Dans une affaire historique de 2012, la Cour suprême de l'Inde a statué que le bureau des impôts ne pouvait remettre en question l'acquisition par le géant britannique des télécommunications Vodafone d'un rival indien d'une valeur de 11 milliards de dollars par une société mauricienne. La décision a coûté à l'Inde 2,2 milliards de dollars en recettes fiscales perdues. » Selon un responsable indien qui s’est confié à Icij, « il a fallu 20 cycles de négociations sur 20 ans pour que l'Inde pousse Maurice en 2016 à supprimer les dispositions abusives du traité original de 1982. »
En Egypte, en Ouganda, au Lesotho, au Zimbabwe, en Tunisie, en Zambie, en Thaïlande…, les fonctionnaires qui ont parlé aux reporters de Icij ont été unanimes à dénoncer le caractère déséquilibré des conventions signées par leur pays avec Maurice. "Personnellement, nous regrettons d'avoir signé le traité ", a déclaré Setsoto Ranthocha, fonctionnaire de la Lesotho Revenue Authority, qui participe actuellement à un effort de renégociation. Le traité du Lesotho avec Maurice date de 1997. "(Seules) les entreprises sont les gagnantes, a dit M. Ranthocha. "Ça me rend fou."
En mars dernier, « la Haute Cour du Kenya a annulé le traité conclu par ce pays avec Maurice pour des raisons techniques. Tax Justice Network Africa a déposé la plainte, arguant que le traité permettrait aux entreprises de "siphonner" abusivement de l'argent hors du Kenya, rapporte l’enquête.
par Ange Olivier Grah
ARRÊTONS DE NOUS EN PRENDRE À L'ÉCO
Au sein de la CEDEAO existe un groupe de pays, dont les dirigeants à la différence de la quasi-totalité de leurs populations, désirent rester dans le FCFA et sont donc opposés à l’entrée en vigueur de l’ECO en 2020 comme le prévoit le calendrier commun
Évitons de prendre au premier degré les déclarations du Président Alassane Ouattara sur cette monnaie alors qu’il en est le premier ennemie. La réalité c’est que la CEDEAO dans son ensemble a initié une monnaie commune appelée Eco, appellation sur laquelle elle a de façon indubitable un monopole indiscutable.
Au sein de la CEDEAO existe un groupe de pays, ceux de l’UEMOA, dont les dirigeants à la différence de la quasi-totalité de leurs populations, désirent rester dans le FCFA et sont donc en réalité opposés à l’entrée en vigueur de de l’ECO en 2020 comme le prévoit le calendrier commun. Vu l’impopularité de leur position dans leurs propres pays, ils n’ont pas eu le courage de l’assumer au cours des travaux et ont choisi comme stratégie de fuite en avant, de faire aux autres, deux propositions qu’ils savent impossibles à accepter par ces derniers.
C’est-à-dire de renoncer à leur indépendance monétaire en intégrant la zone du FCFA avec ses conséquences ou d’accepter qu’un changement de façade qui consiste seulement à voir le nom d’Eco se substituer à celui du FCFA sans changement de la situation actuelle des pays de l’UEMOA qui vont conserver leur banque centrale rattachée au Trésor français. Naturellement, ils ont obtenu ce qu’ils voulaient des autres pays de la CEDEAO qui refusent logiquement ces propositions, avec même le Nigéria qui menace de sortir du processus.
La deuxième étape de la stratégie consiste à faire accepter par leurs populations le maintien du FCFA. La stratégie de communication qu’ils adoptent est de démolir l’image de l’Eco en leur sein. La meilleure manière de le faire est d’utiliser leur aversion non seulement du FCFA en annonçant que la monnaie unique de la CEDEAO ne sera qu’un avatar du FCFA et en utilisant le sceptre de la dévaluation car tout en affirmant que la parité va demeurer la même, on prend le soin de démontrer le contraire en diffusant sur les réseaux sociaux et dans la presse un tableau de parité qui laissent présumer une dévaluation d’au moins 100% de la monnaie si nous passons à l’Eco.
Presque personne ne fait attention au propos du Président Alassane qui annoncent pourtant le report de la mise en œuvre de l’Eco au motif que les pays hors-UEMOA qui pourtant gèrent déjà leurs propres monnaies n’auraient pas réuni les mystérieux et opaques critères de convergence, termes techniques volontairement utilisés sans explications pour embrouiller la population pour qu’elles ne comprennent pas le stratagème. Sortons donc de la manipulation en continuant à soutenir l’Eco comme monnaie unique des pays de la CEDEAO, dans sa seule version envisageable, c’est-à-dire avec une banque centrale unique et qui entre effectivement en vigueur en 2020.
Arrêtons donc les diatribes injustifiées et contreproductives contre cette monnaie qui n’a jamais cessé sauf dans la communication des manipulateurs qui rament à contre-courant de leurs peuples, d’être ce que nous en attendons, un autre pas vers la souveraineté réelle de nos pays.