Le Bureau Politique de la Ligue Démocratique "Debout" (LD Debout) s'est réuni le samedi 3 février 2024 à Dakar pour discuter de sa mobilisation en vue de la campagne électorale et du scrutin présidentiel prévu le 25 février.
La réunion a rassemblé les membres du Secrétariat Exécutif National, les délégués des fédérations départementales ainsi que les représentants des organisations des Cadres, des Femmes, des Jeunes et des Ainés, selon la déclaration finale consultée.
Après les mots de bienvenue de la Fédération de Dakar et l'introduction du Secrétaire Général Papa Sarr, plusieurs communications ont été présentées. Ousmane Ndoye a ainsi dressé un tableau du "contexte politique et des forces en présence", tandis que Daouda Faye a insisté sur "les tâches d'organisation urgentes" en vue de la mobilisation.
Abdoulaye Bathily Jr a quant à lui livré une "réflexion sur la communication, l'agitation et la propagande comme support d'une stratégie électorale victorieuse", selon le texte.
C'est alors que les membres du Bureau Politique ont appris "en pleine séance de travail" le report du scrutin présidentiel au 25 février, annoncé dans un discours à la Nation du président Macky Sall.
Ce dernier a alors "encore une fois manipulé pour se maintenir au pouvoir au mépris de la Constitution", dénonce la LD Debout dans sa déclaration finale. Le parti juge cette décision comme "un coup d’état institutionnel" et une "nouvelle forfaiture d'un régime en perte de vitesse".
La LD Debout appelle "à la mobilisation de toutes les forces vives pour le respect du calendrier électoral" et "exigé le départ de Macky Sall le 3 avril 2024". Le parti met également "en garde le président de la République" face "aux conséquences que ce report pourra entraîner".
Il invite enfin le Forum pour une Alternative Politique (F24) "à immédiatement réunir l’ensemble des forces vives politiques et sociales du pays pour organiser la lutte pour la défense de notre Constitution et de notre démocratie".
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MACKY SALL JOUE LA MONTRE
En reportant sine die la présidentielle ce samedi 3 février, "le président cherche avant tout à gagner du temps", décrypte Momar Thiam, directeur de l'École des hautes études en communication de Dakar
C'est la douche froide au Sénégal. À la surprise générale, le président Macky Sall a pris la décision inédite d'abroger le décret convoquant le corps électoral et de reporter l'élection présidentielle prévue le 25 février.
Officiellement, Macky Sall évoque un conflit entre l'Assemblée nationale et le Conseil constitutionnel. Mais pour beaucoup d'observateurs, ces motifs ne sont pas légitimes.
"Le président cherche avant tout à gagner du temps", décrypte Momar Thiam, directeur de l'École des hautes études en communication de Dakar, dans l'émission Objection de Sud FM.
Les conséquences ne se font pas attendre. Dès l'annonce du report, le secrétaire général du gouvernement, Abdou Latif Coulibaly, a présenté sa démission. L'opposition et la société civile sont vent debout, dénonçant un « coup d'État » institutionnel.
Affaibli, discrédité, Macky Sall joue désormais sa survie politique. Il doit impérativement fixer une nouvelle date d'élection avant la fin de son mandat en avril, sous peine de plonger le Sénégal dans une crise majeure, estime l'invité de Baye Omar Gueye.
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MACKY SALL DANS L’ILLÉGALITÉ APRÈS LE REPORT DE LA PRÉSIDENTIELLE
Le mandat présidentiel en cours prenant fin le 2 avril, le pays se retrouvera dans une situation de vide juridique total si d'ici là l'élection n'a pas eu lieu, indique le chercheur en science politique Maurice Soudieck Dione
Le coup de théâtre est total à Dakar. À trois petites semaines du scrutin présidentiel, le président Macky Sall a annoncé hier le report du vote, évoquant une "situation grave et confuse". Derrière ce prétexte, difficile toutefois de ne pas voir une manœuvre politicienne, selon Maurice Soudieck Dione.
En réalité, cette décision fait suite au rejet par le Conseil constitutionnel de la candidature de Karim Wade, fils de l'ancien président Abdoulaye Wade et rival désigné de Macky Sall. Le prétexte ? Une double nationalité franco-sénégalaise. S'en est suivie une levée de boucliers du camp Wade, aussitôt soutenu par la majorité présidentielle. Résultat : le scrutin est repoussé sine die.
Conséquence : le mandat de Macky Sall prenant fin le 2 avril, le pays se retrouvera dans une situation de vide juridique total si d'ici là l'élection n'a pas eu lieu, indique le chercheur en science politique et professeur à l'Université Gaston Berger de Saint-Louis. Le président sortant n'aura alors plus aucune légitimité. Une crise institutionnelle majeure se profile. Les journées à venir seront décisives pour l'avenir de la démocratie sénégalaise.
LE SÉNÉGAL DANS L'IMPASSE APRÈS LE REPORT DE LA PRÉSIDENTIELLE
Le report sine die de l'élection fait l'effet d'une bombe. Une décision sans précédent qui plonge le pays dans la crise. L'opposition crie au coup d'État. Et même les constitutionnalistes dénoncent l'absence de base légale
Brice Folarinwa de SenePlus |
Publication 04/02/2024
Le président sénégalais Macky Sall a créé la surprise en annonçant samedi le report sine die de l'élection présidentielle prévue le 25 février. Une décision exceptionnelle dans l'histoire du pays qui risque d'aggraver la crise politique. Pour Babacar Gueye, professeur de droit constitutionnel, cette annonce "ne repose sur aucune base juridique valable".
Interrogé par RFI, M. Gueye souligne que "nous ne sommes pas en crise institutionnelle" et que "les institutions de la République fonctionnent correctement". Selon lui, "il n’y avait pas lieu de prendre une décision visant à reporter une élection". Il analyse ce report comme étant motivé par "la volonté d'éviter que des élections ne se tiennent à date échue, peut-être parce que le candidat du pouvoir n’était pas en bonne posture".
L'opposition a vivement réagi à cette annonce "inacceptable". Ousmane Sonko, candidat déclaré du parti Pastef, a appelé à faire campagne "comme si de rien n'était". Khalifa Sall, ancien maire de Dakar emprisonné, a demandé aux Sénégalais de "se lever contre cette décision". Pour M. Gueye, ces réponses politiques traduisent "la frustration" des candidats face à l'annulation de leur investissement de plusieurs mois.
Macky Sall a évoqué l'ouverture d'un dialogue politique mais, selon le constitutionnaliste, "si c'est un dialogue comme les précédents, je ne pense pas que l'opposition acceptera d'y aller". Il met en garde : tout dialogue devra se tenir "dans les limites du mandat du président", qui s'achève le 2 avril. Autrement, cela équivaudrait à "un coup d'État constitutionnel". Avec ce report inédit et controversé, le Sénégal semble donc plus que jamais engagé dans une impasse politique.
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LES OPPOSANTS CRIENT À LA FORFAITURE
Plusieurs candidats ont dénoncé samedi à Dakar, la décision du président d'abroger le décret de convocation du corps électoral. Ils maintiennent leur détermination à lancer comme prévu la campagne dès ce dimanche 4 février 2024
Des candidats à l’élection présidentielle du 25 février, ont dénoncé, samedi, à Dakar, la décision du président de la République Macky Sall portant abrogation du décret convocant le corps électoral.
‘’Il n’y aucune loi qui permet au président de la République de prendre une telle décision’’ s’est indigné Alioune Mamadou Dia candidat à l’élection présidentielle du Parti de l’unité et rassemblement ( PUR).
Alioune Mamadou Dia intervenait lors d’une conférence de presse des candidats de l’opposition suite à la décision du président de la République Macky Sall abrogeant le décret portant convocation de corps électoral .
‘’Il a violé notre constitution et les lois de la République alors que le Sénégal lui a tout donné. Le peuple sénégalais ne mérite pas ce que le président Macky Sall a fait aujourd’hui’’ a-t-il indiqué.
Selon le candidat Cheick Tidiane Dieye, ‘’à partir du 2 avril dit-il ‘’le président de la République Macky Sall ne peut plus être président de la République du Sénégal’’.
‘’Dans ce processus électoral, le président de la République n’avait qu’une seule prérogative, c’était de convoquer le Corps électorale et il l’avait déjà fait. Il n’a ni le droit ni la capacité d’annuler ou de reporter l’Élection présidentielle’’ a-t-il martelé.
Le candidat du Parti Républicain pour le Progrès Dethie Fall a pour sa part’’ rappelé les engagements du président de la République d’observer et faire observer la constitution’’.
‘’Il n’a pas respecté cet engagement. Mais nous qui avons franchi régulièrement toutes les étapes nécessaires, c’est pas aujourd’hui qu’il va nous demander d’arrêter. Demain, nous avons retenu ensemble de démarrer notre campagne sur la VDN’’ a-t-il annoncé.
Le leader des Serviteurs et candidat à l’Élection présidentielle, Papa Djibril Fall a pour sa part ‘’dénoncé des manœuvres qui n’honorent pas le statut de chef d’Etat du président Macky Sall’’.
LES CRAINTES DE LA CEDEAO
L'Organisation exprime ses inquiétudes quant aux circonstances ayant mené au report du scrutin présidentiel et appelle les autorités compétentes à accélérer les différents processus afin de fixer une nouvelle date
Brice Folarinwa de SenePlus |
Publication 03/02/2024
La Commission de la CEDEAO (Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest) a pris note de la décision des autorités sénégalaises de reporter les élections présidentielles initialement prévues le 25 février 2024, selon un communiqué publié le 3 février.
"La Commission de la CEDEAO exprime ses inquiétudes quant aux circonstances ayant mené au report du scrutin présidentiel et appelle les autorités compétentes à accélérer les différents processus afin de fixer une nouvelle date pour les élections", peut-on lire dans le communiqué. L'organisation régionale "exhorte également l'ensemble de la classe politique à privilégier le dialogue et la collaboration pour des élections transparentes, inclusives et crédibles."
La CEDEAO "salue le président Macky Sall pour son respect de sa décision antérieure de ne pas se représenter pour un autre mandat", et l'encourage à "continuer de défendre et de protéger la longue tradition démocratique du Sénégal." La Commission indique qu'elle "restera attentive à l'évolution de la situation."
WASHINGTON S'INQUIÈTE DU REPORT DE LA PRÉSIDENTIELLE
La diplomatie américaine se dit "profondément préoccupé" après l'annonce de Macky Sall. Elle appelle "tous les participants au processus électoral à s'engager de manière pacifique dans l'effort de fixer rapidement une nouvelle date"
Brice Folarinwa de SenePlus |
Publication 03/02/2024
Le Bureau des affaires africaines du département d'État américain s'est dit "profondément préoccupé" après l'annonce du report de l'élection présidentielle au Sénégal, initialement prévue le 25 février.
Dans un tweet publié samedi soir, l'instance dirigée par l'assistant du secrétaire d'État chargé de l'Afrique a fait part de ses "profondes inquiétudes quant aux perturbations du calendrier électoral présidentiel".
Cette sortie intervient après la décision surprise du président Macky Sall, annoncée plus tôt dans la journée, de repousser le scrutin évoquant une "crise institutionnelle entre l'Assemblée nationale et le Conseil constitutionnel".
Le chef de l'État n'a pour l'instant pas communiqué de nouvelle date pour l'élection. Dans ces conditions d'incertitude, les États-Unis se sont dit "préoccupés par le respect du calendrier électoral" par les autorités sénégalaises.
Le Bureau des affaires africaines a appelé "tous les participants au processus électoral à s'engager de manière pacifique dans l'effort de fixer rapidement une nouvelle date" pour le scrutin.
PAR Abdoulaye Dieye
LES LEÇONS DU FILTRAGE DES CANDIDATURES
EXCLUSIF SENEPLUS - Entre le contrôle controversé des parrainages, les décisions du Conseil constitutionnel questionnées et les tensions pré-campagne, cette phase de détermination des prétendants a soulevé plusieurs interrogations
Cet article a été rédigé avant lé décision de report de la présidentielle annoncée ce samedi 3 février par Macky Sall.
Il passe en revue et analyse l’étape de détermination des acteurs devant participer à l’élection présidentielle de février 2024. C’est la Constitution elle-même qui dispose en son article 29 que les candidatures sont déposées au greffe du Conseil constitutionnel, soixante jours (60) francs au moins et soixante-quinze (75) jours francs au plus avant le premier tour du scrutin. L’article L57 du code électoral précise que toute candidature à une élection présidentielle et aux élections législatives, présentée par un parti politique légalement constitué, par une coalition de partis politiques légalement constitués ou une entité regroupant des personnes indépendantes est astreinte au parrainage.
Pour être recevable, toute candidature doit être accompagnée soit de la signature au minimum de 44.231 électeurs et au maximum, de 58.975 électeurs du fichier électoral (avec obligation de recueillir au moins 2000 signatures dans 7 régions différentes); soit de la signature de 13 députés ; soit de 120 élus locaux (Présidents de Conseil départemental ou Maires).
Il est précisé à l’article R 76 al 8 du code électoral modifié par le décret n°2023-1935 du 19 septembre 2023 que le contrôle et les vérifications sur les listes de parrainage sont effectués dès le dépôt, selon l'ordre de passage issu du tirage au sort et dans les conditions fixées par la structure chargée de la réception des dossiers de déclaration de candidature.
Le Conseil constitutionnel à travers sa décision du 24 novembre 2023 a fixé les modalités de réception des dossiers de déclaration de candidature et les règles de fonctionnement de la Commission de Contrôle des Parrainages pour l'élection présidentielle du 25 février 2024. Cette Commission a organisé un tirage au sort déterminant l'ordre du contrôle des parrainages des candidats. Il est précisé à l’article R 76 cité plus haut que l’ordre issu du tirage au sort est maintenu durant tout le processus électoral.
Les membres de la Commission des Parrainages sont les suivants :
- les membres du Conseil constitutionnel ;
- le chef du greffe ;
- le personnel administratif et technique en service au Conseil Constitutionnel ;
- les représentants de la Commission nationale électorale autonome (CENA) ;
- les personnalités indépendantes ;
- le représentant de l'Administration.
A l’ouverture de la période de collecte des parrainages, le 29 septembre 2023, 266 mandataires d’aspirants à la candidature ont retiré des fiches de parrainage au niveau de la DGE (Direction Générale des Elections). Après la phase de dépôt de la caution à la CDC, 93 ont déposé leur dossier de candidature au greffe du Conseil constitutionnel.
Le contrôle des parrainages au niveau du Conseil constitutionnel a produit des résultats qu’il convient d’analyser avant d’aborder les étapes ultérieures.
Leçons tirées de l’analyse des résultats publiés par la commission de contrôle des parrainages.
Le Conseil constitutionnel, au cœur du processus, a organisé les opérations de parrainage. Les leçons suivantes peuvent être tirées de l’analyse des résultats de ce parrainage :
Il ressort de la décision n° 1/E/2024 du Conseil constitutionnel du 12 janvier arrêtant la liste des candidats que 03 candidats ont retiré leur candidature ; que 69 candidatures ont été déclarées irrecevables et 21 candidatures ont été déclarées recevables.
Il est possible de tirer de cette décision que certaines irrecevabilités se justifient par des dossiers de candidats n’ayant pas obtenu le minimum requis de parrainages ; certaines sont dues au caractère inexploitable de fichiers composant les dossiers concernés ; que d’autres, enfin, au caractère incomplet de certains dossiers. En rangeant O. Sonko, dans ce lot et en justifiant le caractère incomplet de son dossier par le fait qu’il n’a pas produit l’attestation confirmant le dépôt de la caution à la Caisse des Dépôts et consignation, le Conseil suscite beaucoup d’interrogations. Pourquoi le juge n’a pas évoqué le défaut de parrainages ? Se serait-il contenté du PV d’huissier ayant constaté la carence de la DGE ? Si oui, pourquoi n’a –il pas eu la même attitude concernant la carence de la CDC ? Puisque pour être éligible, il faut être électeur, le juge considère- t-il que O. Sonko est bien dans le fichier électoral, autrement dit, que sa radiation pour cause de condamnation par contumace a été annulée ? Des questions, pour le moment, sans réponses.
Le Conseil constitutionnel semble être revenu sur sa décision n°3/E/98 du 15 avril 1998 dite jurisprudence « Insa Sankharé ». Elle avait considéré que lorsqu’en matière électorale, une défaillance est clairement et formellement établie du fait des agissements de l’administration et mettant en péril la liberté de candidature (risque d’irrecevabilité), le dossier de candidature est recevable. Le dépôt du cautionnement avait été refusé au mandataire du candidat Insa Sankharé, alors qu’il s’était présenté avant l’heure limite de fermeture des bureaux de l’administration.
Parmi les 93 dossiers, il y’en a 4 qui ont été déposés avec le parrainage parlementaire (il s’agit de ceux de Habib Sy, de Khalifa Ababacar Sall, de Karim Wade et de Ousmane Sonko)[1], 88 dossiers avec le parrainage citoyen et 1 dossier (celui du candidat Amadou BA), avec le parrainage des élus locaux.
Pourquoi, un candidat qui estimait avoir recueilli plus de trois millions de parrainages a opté pour la voie des élus locaux ? L’interrogation est d’autant plus pertinente que le code électoral a prévu que si le nombre d'électeurs représentatif du maximum, soit 58.975 parrains, est dépassé, il n'est pas tenu compte du surplus qui est nul et non avenu. Manque de confiance pour les uns, simple utilisation de la technique d’assèchement pour d’autres. La technique d’assèchement consiste à réduire le champ des signatures «valides » à accorder et à faire essaimer les doublons externes. Le doublon externe, c’est quand sur la liste du candidat figure un nom qui figure en même temps sur la liste d’un autre candidat. Dans ce cas, le candidat a 48 heures pour régulariser sa situation.
Le doublon interne, c’est quand sur la liste du candidat figure un nom plusieurs fois. Face à cette situation, le candidat est dans l’impossibilité de régulariser.
1-3. Le communiqué de la CENA considérant qu’elle n’a pas dans son site le fichier électoral actualisé est la preuve d’un dysfonctionnement dans le processus électoral. Faut-il le rappeler, c’est à la C.E.N.A que le législateur sénégalais (art L5 et L6 du code électoral) a reconnu le pouvoir de contrôler et de superviser l’ensemble des opérations électorales et référendaires. Elle a le pouvoir d’intervenir à tous les niveaux du processus électoral depuis l’inscription sur les listes électorales jusqu’à la proclamation provisoire des résultats. Elle doit apporter les correctifs nécessaires à tout dysfonctionnement constaté. Si la C.E.N.A qui doit faire respecter la loi électorale se limite à prendre l’opinion à témoin alors que la loi lui reconnait même un pouvoir de prendre des décisions immédiatement exécutoires d’injonction, de rectification, de dessaisissement, de substitution d’action, elle administre la preuve de son impuissance et de son inutilité.
Leçons de la décision n°2/E/2024 en date du 20 janvier 2024 du Conseil constitutionnel
Il s’agit de la décision ayant arrêté la liste définitive des candidats admis à se présenter à l'élection présidentielle du 25 février 2024. Nous y avons trouvé des motifs de satisfaction mais aussi des éléments d’interrogations.
Ce qu’il y a à saluer dans la décision
La CDC remise à sa place
La Caisse des Dépôts et Consignations –CDC- a pour mission, entre autres, de gérer, aux termes de la loi n°2006-03 du 04 janvier 2006, les dépôts et de conserver les valeurs appartenant aux organismes et aux fonds qui y sont tenus ou qui le demandent, de recevoir les consignations administratives et judiciaires ainsi que les cautionnements, de gérer les services relatifs aux caisses ou aux fonds dont la gestion lui est confiée.
En matière électorale, la CDC n’est impliquée qu’en tant qu’organisme devant recevoir le cautionnement des candidats. C’est l’article L 122 du code électoral qui astreint les candidats au dépôt d'une caution. II est délivré une quittance confirmée par une attestation signée par le Directeur général de la Caisse des Dépôts et Consignations.
En refusant de délivrer au candidat O. Sonko une attestation après avoir remis une quittance à son mandataire, la CDC s’érigeait en acteur du processus électoral pouvant demain barrer la route à un candidat. Notons que c’est le défaut de cette attestation qui a été invoqué par la commission de contrôle des parrainages pour invalider le dossier du candidat O. Sonko. Le Conseil constitutionnel, en considérant que l’absence de l’attestation ne lui est pas imputable mais résulte plutôt de défaillances de la Caisse des Dépôts et Consignations (CDC), remet cet organisme à sa place et confirme sa jurisprudence de 1998. Elle n’a pas à créer ses propres défaillances (fermer avant l’heure ou s’arroger le droit d’apprécier la validité de candidatures) pour éliminer des candidats.
Une clarification salutaire à propos des « non identifiés au fichier »
Le juge constitutionnel nous apprend que le rejet d'un parrain sous la mention « non identifié au fichier général » ne signifie pas nécessairement que celui-ci n'est pas inscrit au dit fichier. Cette précision a le mérite de lever certaines craintes nées de la lecture qu’en avaient faite les candidats recalés considérant que les non identifiés, au nombre de plus de neuf cent (900), ne voteraient pas car ne figurant plus au fichier. Le juge nous apprend que ce qui est assimilé à une disparition du fichier est la conséquence d’une transcription inexacte de l'un des éléments d'identification de l'électeur, en l'occurrence les prénoms, nom, numéro d'identification national, numéro de la carte d'électeur, circonscription électorale d'inscription ou date d'expiration de la carte nationale d'identité CEDEAO figurant sur la fiche de parrainage[2]. Autrement dit, il s’agit d’une défaillance au niveau des candidats qui entraîne l'impossibilité pour le dispositif informatique d’identifier le parrain dans le fichier général des électeurs. Le contrôle automatisé exige une concordance parfaite des données transcrites sur la fiche de parrainage avec celles figurant sur le fichier général des électeurs. En clair, nul ne peut se prévaloir de ses propres turpitudes.
Ce qu’il y a à déplorer dans la décision
La démarche difficilement compréhensible du Conseil constitutionnel
Le dossier du candidat O. Sonko a été jugé irrecevable à l’étape du contrôle des parrainages. Le Conseil a justifié le caractère incomplet de son dossier par le fait qu’il n’a pas produit l’attestation confirmant le dépôt de la caution à la Caisse des Dépôts et consignation (voir supra). C’est le seul grief retenu par le juge pour expliquer l’irrecevabilité du dossier. Le même juge constitutionnel revient dans sa dernière décision (celle du 20 janvier) pour considérer que le candidat Ousmane Sonko, à l'appui de sa requête, soutient que l'absence de I ‘attestation confirmant le versement de sa caution, qui a motivé l’irrecevabilité de sa candidature, ne lui est pas imputable, mais résulte plutôt de défaillances de la Caisse des Dépôts et Consignations (CDC), qui a reçu son chèque certifié, lui a délivré une quittance le 30 novembre 2023 et refusé de lui remettre une attestation. Il considère que l’absence de l'attestation de versement de la caution et des fiches de parrainage est le résultat du refus des autorités administratives compétentes. Il considère enfin et surtout que le fait que le dossier d'Ousmane Sonko ne contenait pas toutes les pièces exigées par la loi ne saurait lui être reproché, puisqu'il est indépendant de sa volonté. C’est pourtant ce qui a expliqué le fait que le Conseil constitutionnel dans sa décision n° 1/E/2024 du12 janvier n’a pas retenu la candidature d’Ousmane Sonko parmi les vingt et une (21) autres candidatures déclarées recevables.
La déclaration sur l’honneur, une formalité pour la galerie, en dehors de recours
Parmi les pièces énumérées à l’article L.121 du Code électoral qui accompagnent le dossier de candidature figure la déclaration sur l’honneur par laquelle le candidat atteste que sa candidature est conforme aux dispositions des articles 4 et 28 de la Constitution, qu’il a exclusivement la nationalité sénégalaise et qu’il sait écrire, lire et parler couramment la langue officielle et celle par laquelle le candidat atteste être en règle avec la législation fiscale du Sénégal.
Le Conseil constitutionnel, dans sa décision n° 1/E/2024 du12 janvier arrêtant et publiant la liste des candidats, a déclaré la candidature de Karim Meïssa Wade recevable. Suite au recours de Thierno Alassane Sall (fondé sur le fait que son nom figurant encore sur la liste électorale de Versailles en France à la date du 16 janvier 2024, Karim Meïssa Wade n'est pas exclusivement de nationalité sénégalaise), le Conseil a finalement rejeté la candidature de Karim Wade en considérant que sa candidature avait été déclarée recevable sur la foi d'une déclaration sur l'honneur inexacte. Pour le Conseil, le candidat qui avait déposé sa déclaration le 2l décembre 2023, n'avait pas exclusivement la nationalité sénégalaise compte tenu des termes de l'article 27-l du Code civil français selon lesquels les effets du décret consacrant la perte d'allégeance de Karim Meïssa Wade à l'égard de la France (décret du 16 janvier 2024, publié te 17 janvier 2024) ne sont pas rétroactifs.
Cela signifie qu’il y a eu contrôle et sanction parce qu’il y a eu recours et que, certainement, en l’absence de recours d’autres déclarations erronées n’ont pas été sanctionnées. C’est très probable dans la mesure où l’on se demande encore comment certaines candidatures ont pu être déclarées recevables en dépit de l’exigence constitutionnelle de pouvoir écrire, lire et parler couramment le français.
Les suites du processus électoral jusqu’à la proclamation des résultats.
L’étape à franchir avant le scrutin du 25 février, c’est la campagne électorale.
La campagne électorale
En matière électorale, la régulation de la couverture médiatique de la campagne électorale est du ressort du CNRA. Cet organe est chargé d’assurer l’égalité des candidats dans l’utilisation du temps d’antenne. Le nombre, la durée et les horaires des émissions ainsi que les modalités de leurs réalisations sont fixés après avis du CNRA. En vérité, c’est la seule période où l’on note le respect du principe d’égalité entre les candidats. Il faut le dire, en effet, les « tournées économiques », les « inaugurations tous azimuts » d’un des candidats, ont été des moments forts de propagande électorale et ont constitué une véritable rupture d’égalité entre les candidats. Pourtant, l’article L 61 du Code électoral prévoit clairement que durant les trente (30) jours précédant l'ouverture officielle de la campagne électorale, est interdite toute propagande déguisée ayant pour support les medias nationaux publics et privés ; …que sont assimilées à des propagandes ou campagnes déguisées, les visites et tournées à caractère économique, social ou autrement qualifiées, effectuées par toutes autorités de l'Etat sur le territoire national et qui donnent lieu à de telles manifestations ou déclarations.
Pendant ce temps, le camp de l’opposition s’est vu notifier beaucoup d’interdictions de manifestation et d’organisations de caravanes avec des motifs divers.
La marche vers le scrutin de 25 février
Il faut noter que le législateur a voulu tenir compte de toutes les éventualités pouvant se réaliser. Ainsi, suivant que le processus est perturbé ou ne l’est pas, une réglementation est prévue.
En cas de perturbation du processus
Il peut s’agir d’un empêchement définitif ou du retrait d’un des vingt candidats retenus entre le 20 janvier et le 25 février prochain. Le cas échéant, l’élection est poursuivie avec les autres candidats en lice. La date du scrutin est maintenue.
Dans l’hypothèse d’un second tour, si un des deux candidats décède, est définitivement empêché ou se retire et si cela se réalise entre le 25 février et la proclamation provisoire des résultats, ou entre celle-ci et la proclamation définitive des résultats du premier tour, un autre candidat est repêché. Il s’agit de celui qui suit dans l'ordre des suffrages au premier tour et qui est admis à se présenter au second tour. Il en est d’ailleurs de même si la «vacance» intervient entre la proclamation des résultats définitifs du premier tour et le scrutin du deuxième tour, le candidat suivant sur la liste des résultats du premier tour est admis au deuxième tour.
Si maintenant le décès, l'empêchement définitif, ou le retrait d'un des deux candidats arrivés en tête se produit entre la proclamation provisoire des résultats et avant la proclamation des résultats définitifs du deuxième tour, le seul candidat restant est déclaré élu.
Il appartient au Conseil constitutionnel de constater le décès, l'empêchement définitif ou le retrait des candidats
Sans aucune perturbation du processus
Le scrutin aura lieu le dimanche 25 février prochain.
La publication définitive des candidats par le Conseil, le 20 janvier a révélé une chose inédite : la pléthore de candidats en dépit des filtres que constituent le cautionnement et le parrainage. Mais quel serait le nombre de candidats sans ces filtres ? En tout état de cause, le Code électoral prévoit en son article L 78 al 2 que l'électeur peut choisir cinq (5) bulletins au moins si le nombre de candidats en compétition est supérieur ou égal à cinq (5).
Si à l’issue du vote, un candidat obtient la majorité absolue c’est-à-dire la majorité plus un des suffrages exprimés, il est élu au premier tour. Les suffrages exprimés sont obtenus en retranchant les bulletins nuls des votants.
Si aucun candidat n'obtient la majorité requise, il est procédé à un second tour de scrutin le deuxième dimanche qui suit la décision du Conseil constitutionnel. Seront admis à se présenter à ce second tour, les deux candidats arrivés en tête au premier tour. En cas de contestation, le second tour a lieu le deuxième dimanche suivant le jour du prononcé de la décision du Conseil constitutionnel.
Au second tour, la majorité relative suffit pour être élu.
Au premier tour, on choisit. Au second tour, on élimine. Cet aphorisme se vérifiera certainement en 2024.
[1] Seuls les candidats de Benno, de Taxawu Sénégal, du Pds et de Yewwi ont ce nombre de députés requis (13 ou plus).
[2] Conformément à l'arrêté n° 032005 du 25 septembre 2023 du Ministre de l'Intérieur fixant les formats et contenus des fiches de collecte des parrainages.
LATIF COULIBALY, SECRÉTAIRE GÉNÉRAL DU GOUVERNEMENT, DÉMISSIONNE
"Après mûre réflexion, j’ai pris la décision de tirer toutes les conséquences de tout cela, pour quitter le gouvernement. Je recouvre ainsi ma pleine et entière liberté, pour pouvoir défendre mes opinions et mes convictions politiques."
Latif Coulibaly, secrétaire général du gouvernement, frère d'un membre du Conseil constitutionnel, vient d’annoncer sa démission. SenePlus publie l'intégralité de sa déclaration ci-dessous.
"J’ai communiqué cette après-midi au chef de l’Etat ma décision de quitter mes fonctions de Ministre Secrétaire général du gouvernement. Je lui indiquais qu’en ayant constaté les faits qui se déroulent à l’Assemblée nationale et ayant également pris très bonne note de l’adresse au peuple sénégalais, j’ai décidé de partir.
Après mûre réflexion, j’ai pris la décision de tirer toutes les conséquences de tout cela, pour quitter le gouvernement. Je recouvre ainsi ma pleine et entière liberté, pour pouvoir défendre mes opinions et mes convictions politiques.
J’ai par ailleurs, expliqué au président de la République que j’’attendais enfin sa parole, pour procéder à l’envoi de ma lettre de démission. Je lui ai aussi expliqué que je tenais à partir, en réaffirmant que durant toute ma carrière de journaliste, mon frère, Cheikh Ahmed Tidiane Coulibaly, n’a jamais été mêlé, ni de près, ni de loin à mon travail, sinon que de lire, à chaque fois qu’il en avait envie.
Vive la République. En elle nous croyons profondément. Et en elle nous continuerons toujours de croire. Car c’est elle, le seul rempart fiable, parce que solide comme un roc, face à toutes les aventures périlleuses vers lesquelles tentent de nous mener certains !
Abdou Latif Coulibaly."
LE SÉNÉGAL RESTERA DEBOUT POUR LE RESPECT DE LA CONSTITUTION, RÉAGIT BARTH
A la suite de la déclaration du président Sall actant le report sine die de l’élection présidentielle, les réactions de la classe politique se poursuivent.
A la suite de la déclaration du président Sall actant le report sine die de l’élection présidentielle, les réactions de la classe politique se poursuivent.
Pour le maire de Dakar, Macky Sall cherche à se maintenir au pouvoir « sans avoir le courage de t’assumer »
« Triste et dommage pour toi! Le Sénégal restera debout pour le respect de la Constitution… Le 23 juin était une histoire de l’Assemblée Nationale….On connaît la suite… Le peuple souverain saura apprécier… À bientôt… », a écrit Barthélémy Dias sur sa page Facebook.