LA TELECOMMANDE, UNE SOURCE DE TENSION DANS LES FOYERS
La télévision réunit toute la famille le soir. Mais, parfois, elle est source de quelques tensions, chacun voulant suivre son programme et bonjour les frustrations.

Il est 12h40 à l’Unité 4 des Parcelles assainies de Keur Massar. Le soleil darde ses rayons dans la cour de la maison des Sow. Fatou, la cadette, est une petite fille de 12 ans. La mine frêle, elle est rentrée de l’école un peu plutôt aujourd'hui. Dans une démarche joyeuse, elle se dirige vers le salon où se trouve, sur le divan, sa grande sœur Fatima. Avec une diplomatie propre aux enfants, elle demande à celle-ci de zapper la télé vers Tiji. « C'est l'heure de Polly Pocket », fait-elle entendre (Ndlr : un dessin animé qui met en scène une petite fille de 11 ans qui a le pouvoir de rétrécir grâce à une amulette magique). Son injonction se heurte à un refus catégorique de sa sœur qui attend le début d'une série qu'elle suit particulièrement sur Passion Tv, une chaîne du bouquet Canal. « Il s'agit d'un feuilleton intitulé « La promesse ». Une série indoue qui met en exergue les déboires d'une fille pauvre devant un homme puissant et riche qui est amoureux d'elle et refuse de l'accepter », explique avec intérêt la grande sœur. Fatou, après maintes supplications se heurtant toujours au niet de sa grande sœur qui reduiert le silence, se résigne à suivre la série tout en posant une multitude de questions au passage de chaque personnage. Des interrogations auxquelles Fatima est aujourd'hui habituée. Une telle situation est relevée par Mactar, un jeune community manager.
Avec humour, ce jeune homme, résidant à Tivaouane Peul et croisé au rondpoint Keur Massar, raconte que son père, depuis qu'il a pris sa retraite, passe le plus clair de son temps devant la télévision, cassant ainsi les habitudes de programme de sa mère et de sa tante. Il affirme que le pater, après la dernière prière du soir, prend le contrôle de la télécommande. « Il la pose juste sur son ventre pour s'assurer de bien en avoir le contrôle. Vu qu'il aime les films d'action et autres émissions d'informations, ses préférences ne sont pas les mêmes que celles de ma mère qui aime suivre ZeeMagic, une chaîne qui passe des films indous », indique le jeune homme à l'habillement raffiné. Quant à lui, il se contente de suivre son programme télévisuel sur son ordinateur portable. « Ainsi, tu ne déranges personne et tu ne seras pas dérangé », dit-il avec malice.
Guéguerre
Mais, il arrive des moments où sa petite sœur, qui est apparemment « l'amie du père », le convainque de leur laisser la commande. « Ça arrive rarement », précise-t-il. S'il y a une personne qui ne s’inquiète que rarement de cette guéguerre pour le contrôle de la commande, c’est bien le vieux Diop. Fonctionnaire à la retraite depuis trois ans, cet ancien militaire a trouvé une solution toute simple depuis plus de cinq hivernages : acheter deux téléviseurs. « Ainsi, une bonne dose des frustrations sera gérée et je pourrai suivre tranquillement mes documentaires et autres matchs de football », renseigne-t-il.
A l'intérieur de sa maison à étage sise au quartier Bankhass de Keur Massar, un poste téléviseur est supporté par une table basse dans le salon extérieur. À cette heure de la mi-journée, il n'y a pas de programme qui intéresse la maisonnée, ce qui justifie le fait que la télé soit éteinte. Dans le salon intérieur, une autre télé écran plat est suspendue au mur, elle aussi éteinte. « Les enfants sont à l'école et ma femme est dans la cuisine. En plus, les programmes les plus intéressants passent généralement la nuit », fait savoir le sexagénaire. Ce que reconnaît, d’ailleurs, sa femme Nabou, la cinquantaine, le front ruisselant de sueur.
Dans son grand boubou en wax déchiré sur un côté, la mère de famille avoue que malgré les deux téléviseurs à la maison, parfois, il y a des tensions entre les enfants et elle. « Lorsque je suivais la série « Mbettel » sur la Rts chaque mardi et samedi, à 21h, les enfants, voyant leur père dans l'autre salon, étaient obligés de se plier à ma volonté. Mais, avant la fin de la saison, ils étaient plus assidus que moi pour suivre la série », laisse-t-elle entendre dans un éclat de rire.