Euro-2016: Didier Deschamps, la force basque de l'équipe de France

Bayonne, sur le terrain attenant au stade Jean-Dauger, il n'y a plus de cages de foot mais des perches de rugby. C'est pourtant ici que Didier Deschamps a fait ses premiers pas de footballeur. Et de leader. "C'était pas un aboyeur, c'était naturel chez lui", comme on dit ici.
Signe prémonitoire de la tournure que prendra son destin, "en quinze jours, il commandait tout le monde et tout le monde l'écoutait", se souvient son premier coach Norbert Navarro, 69 ans, qui, comme il y a trente-cinq ans, pousse le ballon sur la pelouse, désormais synthétique, où DD s'est entraîné pour la première fois.
A onze ans, le futur champion du monde n'a pourtant jamais joué dans un club de foot. Poussé par des amis, il prend sa licence à la section football de l'Aviron bayonnais après avoir touché à tout: athlétisme et forcément à Bayonne, rugby et pelote basque.
"Par rapport aux gamins de 11 ans, il avait une autre corpulence. Il était benjamin mais on l'a surclassé tout de suite en minimes. Et quand vous avez 15 ans, être commandé par un gamin de 11-12 ans, c'est quelque chose, c'est un gros écart", poursuit Navarro.
"Et lui, il a réussi à se faire accepter. C'était pas un aboyeur, c'était naturel chez lui. Inné. C'est quelqu'un qui voyait le jeu. Très vite, je me suis dit, ce gamin il va aller loin", se rappelle l'ancien cadre technique chez Dassault, incapable de retenir ses larmes au souvenir de Deschamps.
- "Une patate terrible" -
L'entraîneur a gardé de cette époque un classeur. Sur la couverture, le jeune Deschamps avec le maillot du FC Nantes, où il est parti à quatorze ans et demi. A l'intérieur, des coupures de presse et des photos de ses débuts à l'Aviron Bayonnais, rangées religieusement.
Accroupi, les mains sur le ballon, en patron, sur la photo de l'équipe, Deschamps se distingue dès son arrivée par sa "puissance", souligne Navarro.
"Il avait une patate terrible", ajoute le premier entraîneur de DD qui se rappelle que lors d'une rencontre face à Saint-Jean-de-Luz, le gardien adverse avait eu l'avant-bras cassé après un coup-franc de 25 mètres de Deschamps.
"Et quand il démarrait, les autres regardaient l'étiquette" dans son dos, sourit Navarro, en référence à la capacité d'accélération du jeune joueur, champion d'Aquitaine du 1000 mètres.
Lors de sa première saison, DD inscrit 52 buts. Et joue ses matches à domicile dans une enceinte rebaptisée en 2000 stade Didier Deschamps en hommage à l'enfant du pays, qui passera par Nantes, l'OM, la Juve ou Chelsea.
Très vite repéré, sélectionné en équipe de France minimes, DD a depuis son plus jeune âge un tempérament de gagneur, se souvient Navarro, qui a gardé contact avec son ancienne pépite, qu'il a encore vu lors du stage de l'équipe de France à Biarritz, avant l'Euro.
"On a perdu un seul match cette saison-là, il a enlevé son maillot dans le vestiaire et n'a rien dit, ce qui ne lui arrivait jamais", raconte Navarro.
Arrivé en quart de finale de l'Euro - niveau où il s'est arrêté lors du Mondial 2014, sa première compétition sur le banc de l'équipe de France - DD a l'occasion de prouver qu'il peut emmener loin les Bleus, espère Navarro.
"Ils peuvent monter en puissance et créer la surprise", dit-il. Son ancien poulain n'aura certainement pas envie de le décevoir.