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28 avril 2025
Développement
par Mamoudou Ibra Kane
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2020 S’ANNONCE DÉJÀ SEXY
Au regard de ses enjeux, le Sénégal est à la veille d'un basculement, à l'image d'une femme en gésine - Le pays le choix entre le décollage définitif ou l'atterrissage en catastrophe - Ce sera l'émergence ou l'immergence
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Mamoudou Ibra Kane |
Publication 27/12/2019
Pour sa toute dernière chronique de l’année 2019, Mamoudou Ibra Kane fait le choix de regarder davantage dans son pare-brise que dans le rétroviseur. Plus de perspectives que de rétrospectives. Séduit par la sexy 2020 qui arrive avec son lot de bénédictions ou de bénédictions. Au delà des clivages, tous sont interpellés pour faire de la nouvelle décennie qui arrive le point de départ d’une émergence tant attendue, estime-t-il dans cette chronique qui veut regarder 2020 d’un air des plus optimistes.
Par Mamadou Oumar NDIAYE
CES VIEILLARDS QUI REFUSENT TOUJOURS LE SEVRAGE…
Soixante ans après les indépendances, il est tout simplement inacceptable que nos chefs d’Etat tètent encore au sein (maternel !) de la France. Cet allaitement que réclament encore nos dirigeants est indécent et immoral
Pourquoi diable nos dirigeants refusent-ils de grandir ? De se comporter enfin comme de adultes responsables ? De prendre en main les destins de leurs peuples ? Qu’est-ce qui explique qu’ils ne veuillent toujours pas s’affranchir de leur servitude vis-à-vis de la France ?
Alors que la plupart de nos pays vont commencer à célébrer dans quelques semaines le soixantième anniversaire de leur accession à la souveraineté internationale, il est plus que dommage que les questions ci-dessus puissent encore continuer à être posées. Nos dirigeants politiques, présidents de la République en tête — et même ceux d’entre eux nés après les indépendances hélas ! — se comportent toujours comme ces esclaves qui, bien qu’affranchis et libérés de leurs chaînes, sont obligés de revenir dans la maison de leur maître car, n’ayant jamais joui de leur liberté, ne savent pas quoi en faire. Et qui, donc, préfèrent leur servitude à leur état d’hommes libres !
C’est exactement le cas de nos dirigeants. Depuis 1960, nos pays sont dans leur grande majorité « indépendants » mais refusent, hélas, d’assumer ce statut. Prenons deux domaines essentiels à l’exercice de toute souveraineté que sont la défense et la monnaie. Six décennies après la fin officielle de la colonisation, nos Etats s’abritent toujours sous le parapluie militaire de la France. Laquelle maintient un peu partout sur le continent ses bases et se charge de nous défendre contre les menaces extérieures.
La « menace » soviétique jusqu’en 1989, date de la chute du Mur de Berlin et de l’effondrement de l’URSS, puis ou concomitamment la « menace » libyenne pour ce qui est du Tchad, la « menace » algérienne lorsque des « Jaguars » français s’envolaient de la base de Dakar pour aller bombarder des colonnes du Front Polisario — c’était l’époque où le président Senghor disait joliment que « je n’ai pas le complexe du « Jaguar » ! — et puis, de nos jours, la « menace » djihadiste !
A croire que la France a toujours besoin d’agiter une « menace » réelle ou illusoire pour maintenir sa présence militaire et apeurer nos dirigeants !.
La France dont chaque nouveau président, sitôt installé, jure croix-de-bois croix de-fer si je mens que j’aille en enfer, que la « Françafrique », c’est fini, les interventions militaires en Afrique également, avant de se lancer à son tour dans sa petite guerre africaine ! Citons la guerre giscardienne contre les « rebelles » du Katanga lorsque les paras français ont « sauté » sur Kolwezi, une ville minière évidemment, la guerre mitterrandienne contre la Libye, la guerre ivoirienne de Jacques Chirac, celle libyenne encore — au cours de laquelle le Guide Mouammar Kadhafi a été tué ! — mais de Nicolas Sarkozy cette fois-ci, celle malienne « Serval » de Français Hollande, et l’actuelle « Barkhane » du petit Emmanuel Macron ! Décompte non exhaustif, bien sûr, puisqu’on en oublie incontestablement. Plutôt que de développer de véritables armées nationales professionnelles bien formées, entraînées, convenablement équipées et aptes à accomplir leur mission de défense de l’intégrité de nos territoires, nos présidents ont laissé se développer de armées de soudards et de parade, plus douées à organiser des coups d’Etat et à réprimer les populations qu’elles sont censées défendre qu’à sanctuariser les frontières nationales contre toutes formes de menaces. Le tout avec la bénédiction de la France, bien sûr, qui avait tout intérêt à la déconfiture de ces armées pour rendre plus indispensable la présence de ses troupes.
De ce point de vue, dans un domaine aussi essentiel de la souveraineté, la faillite de nos chefs d’Etat est plus que patente : criminelle. On retiendra juste que 60 ans après nos « indépendances », les Africains de l’Ouest sont toujours incapables de se défendre contre les menaces qu’ils auront identifiées et en sont réduits à quémander le parapluie sécuritaire de la France. Aujourd’hui, contre des terroristes en motos « Djakarta » ! Lesquels infligent des raclées mémorables à nos troupes qui battent en retraite face à leur avancée ! Dans ces conditions, évidemment, le président Macron peut se permettre d’admonester nos chefs d’Etat et de les convoquer pour qu’ils viennent s’expliquer devant lui à Pau sur le « sentiment anti-français » supposé de leurs peuples. Au rapport, chefs d’Etat du « G5 Sahel » !
Abracadabra, que le CFA devienne ECO !
L’autre domaine essentiel de souveraineté dans lequel nos dirigeants refusent de s’assumer c’est, bien sûr, celui de la monnaie. Depuis nos indépendances nominales, ils ont peur de battre leur propre monnaie et de couper le cordon ombilical qui les lie à l’ancien colonisateur. Soixante ans après, il a fallu la permission de la France et la « décision » du président Macron de réformer le « CFA » pour que nos chefs d’Etat osent enfin changer le nom de cette monnaie et l’appeler « ECO » ! Dire qu’il y a quelques semaines à peine, nos présidents, en tête desquels Alassane Dramane Ouattara et Macky Sall, plus zélés gardes chiourmes de l’ordre français sur le continent, ces présidents, donc, assuraient que le CFA était une excellente monnaie. Et que, par conséquent, ils ne voyaient aucune nécessité à faire bouger les lignes ou introduire des changements dans son fonctionnement. Ce au moment où les peuples africains, les jeunesses, les activistes, d’importants pans de la Société civile et des économistes de renom, réclamaient à cor et à cris l’abandon pur et simple du CFA. Et brusquement, ces mêmes présidents, mais aussi les fonctionnaires de la BCEAO dont on se demande s’ils ne se croiraient pas en DOM-TOM !, deviennent « graves » — comme disait Hugo — s’enhardissent et décident non seulement, donc, de débaptiser le CFA qui va s’appeler ECO, mais encore de rapatrier les réserves de change qu’ils avaient l’obligation de loger au Trésor français.
Du moins 50 % de ces réserves. Dire que lorsque le président Abdoulaye Wade avait réclamé le rapatriement de ces réserves, ses autres collègues de l’UEMOA lui avaient volé dans les plumes ! Pour en revenir à la « décision » macronienne, surtout, on nous jure la main sur le cœur que, désormais, il n’y aura plus de représentants de la France au sein de nos instances monétaires. Ah bon, parce qu’ils y étaient et y jouaient un rôle ? Je me rappelle encore cette sortie de ce jeunot, directeur de l’Agence nationale de la BCEAO, Al Amine Lô je crois, qui soutenait crânement que la France n’avait pas son mot à dire dans notre politique monétaire, laquelle selon lui était gérée toute seule et comme un grande par la Banque centrale commune aux huit pays de l’UEMOA. Dans un éditorial que j’avais fait pour lui rabattre le caquet, je lui demandais comment se faisait-il, dans ce cas, qu’un petit ministre français — M. Michel Roussin, inculpé plus tard pour corruption — puisse se permettre de convoquer à Dakar, en 1994, 16 chefs d’Etat africains pour leur annoncer la « décision » (décidément !) de la France balladurienne de « dévaluer » le CFA ! Vingt-trois ans après, c’est un jeune et prétentieux chef d’Etat français qui, sur les rives de la lagune Ebrié, annonce sa « décision » de réformer notre monnaie !
Des réformes cosmétiques, en réalité, puisque l’objectif stratégique, ce que souhaitent les peuples africains, c’est une monnaie commune aux 16 pays de la CEDEAO. Comme des enfants ou d’innocentes proies qu’il conviendrait de défendre face à l’ « ogre » nigérian qui risquerait de les dévorer, la France a donc tranché : l’ECO s’arrêtera aux huit pays de l’UEMOA. Un point, un trait. L’histoire se répète : dans les années 90, pour torpiller l’envol de la CEDEAO bien partie pour mettre en œuvre le Plan d’Action de Lagos, la France avait déjà trouvé une idée de génie : créer l’UEMOA qui regrouperait ses néo-colonies. De la même manière, l’ECO Canadian dry tue dans l’œuf la future monnaie commune de la CEDEAO ! Ce alors qu’une opportunité unique était offerte à nos pays de se raccrocher à la locomotive de la première économie du continent, celle du Nigeria. Et d’y retrouver un wagon comme le Ghana, autre solide économie de notre sous-région.
Bonneteau monétaire
Oh certes, on nous prédit le pire, un chaos, un scénario à la zimbabwéenne avec une inflation à des milliers pour cent, une monnaie de singe et tous les scénarios cauchemardesques imaginables si nous refusons cette garantie que, fort obligeamment, la France veut encore continuer à accorder à notre monnaie. Et que nos dirigeants, Ouattara et Sall en tête, la supplient à genoux de continuer à nous accorder.
En même temps, bien sûr, que la parité fixe vis-à-vis de l’Euro ! Autrement dit, et comme l’illustre si pertinemment l’activiste ivoiro-suisse Nathalie Yamb, Macron peint un vélo en bleu et nous dit qu’il s’agit d’une bicyclette ! Un tour de passe-passe qui ne trompe personne, bien sûr, sauf nos dirigeants qui font semblant de croire à la prestidigitation. « Abracadabra, que le CFA soit désormais un ECO », a dit le petit magicien Macron et nos chefs d’Etat ont applaudi à tout rompre ! Plus exactement, il s’est agi d’un numéro de bonneteau, ce « niéti khob » ou « bi gagne bi perte » dans lequel on s’est tous laissé prendre ! A tous les coups, nos présidents tiraient la mauvaise carte, ils le savaient mais ont tenté de nous faire croire le contraire. Encore une fois, les activistes ont raison car il serait dommage de se contenter de cette illusion d’optique. La « garantie » monétaire de la France doit sauter et nos dirigeants doivent être contraints de couper ce honteux cordon ombilical qui les lie encore à la puissance de second ordre qu’est devenue la France. Soixante ans après les indépendances, il est tout simplement inacceptable que nos chefs d’Etat tètent encore au sein (maternel !) de la France. Cet allaitement que réclament encore nos dirigeants est indécent et immoral. Quant on est un jeune homme, à dix-huit ans, on doit se résoudre à quitter le toit familial pour apprendre à être responsable, à gérer sa vie. Hélas, nos dirigeants, six décennies après les « indépendances » octroyées de1960, s’accrochent toujours à l’allaitement de Marianne…
PS : L’économie du Nigeria s’est-elle effondrée parce que la monnaie de ce pays n’est pas « garantie » par la France ou la Grande-Bretagne ? Celles du Maroc, de l’Algérie, de la Tunisie, de la Mauritanie, de l’Afrique du Sud, du Ghana etc. pour ne citer que ces quelques pays africains ontelle piqué du nez ou plongé dans le marasme parce qu’elles n’ont as eu la « garantie » d’une puissance européenne ? Mais pourquoi diable nous dit-on qu’hors la garantie de la France ce serait le déluge pour les pays de l’UEMOA ? Les banquiers centraux de la BCEAO seraient-ils incapables congénitalement de mener une politique monétaire sans les instructions de la France ? Seraient-ils dénués de la rigueur et de la technicité que suppose la gestion d’une monnaie ? Ou bien alors seraient-ils tout simplement des hommes liges, pour ne pas dire des agents de l’ancien colonisateur ? Qu’est-ce qui explique donc leur réticence, qui confine à l’obsession, à s’affranchir et à couper le cordon ombilical avec lui ? Pour le reste, qu’on ne vienne surtout pas nous parler de « sentiment antifrançais » car c’est un faux débat puisque s’il y a bien un continent qui représente l’avenir de la langue française —et donc de l’élargissement de l’influence culturelle mais aussi économique de la France —, c’est bien l’Afrique. Qui est aussi le dernier continent où le Vatican et aussi les églises évangéliques recrutent ! Simplement, ce que réclament les Africains, c’est des relations de partenariat et non plus de servitude vis-à-vis de la France. Des relations de respect et non plus de mépris. Des relations égalitaires et non plus du cheval et du cavalier, avec eux dans le rôle de la monture. Anti-Français ? Non ! Anti-Une certaine France dominatrice et colonisatrice, raciste et arrogante ? Oui ! Mille fois Oui !
BILAN ANNUEL ALARMANT DE LA GOUVERNANCE DE MACKY SALL
2019 a été une année d’élections truquées, suivie d’un troisième dialogue national organisé pour faire diversion - Le temps économique des prochaines années sera lourd - DÉCLARATION DE PRESSE D'ABDOUL MBAYE
SenePlus publie ci-dessous, la déclaration de presse de l'ancien premier ministre et président de l'ACT, Abdoul Mbaye, en date de 27 décembre 2019, à propos de la situation socoipolitique du pays au cours de l'année finissante.
"De quelques grands choix pour reconstruire le Sénégal
2019 était annoncée année électorale puisque d’élection présidentielle. La fin de l’année 2018 avait donc été consacrée à la préparation de cette élection majeure au Sénégal.
Nous avions ainsi fait le choix d’attirer l’attention des citoyens et électeurs sur l’importance qu’il convenait d’accorder au sens de la vérité et du respect de la parole donnée qui habiterait les futurs candidats, hommes ou femmes. Que vaut en effet un programme prononcé ou présenté par une personne dont l’électorat ou le monde entier a déjà pu retenir sa capacité à ne pas respecter des engagements pris ? Qu’étaient devenues les ruptures promises qui devaient mettre « la patrie avant le parti », instaurer une « gestion sobre et vertueuse du bien public », « réduire un mandat de sept à cinq ans »… ?
Au-delà des promesses non tenues, nous avions insisté sur la place occupée par de nombreux mensonges dans la construction d’un Sénégal miraculeux présenté comme déjà émergent à l’occasion de fêtes ou cérémonies d’inauguration. Un Sénégal de records de productions agricoles jamais atteints, d’un taux de croissance s’emballant et surtout devenu l’un des plus réguliers au monde, cela en opposition à un vécu chaque jour plus difficile des populations.
Le mensonge était aussi celui de l’émergence inéluctable de notre pays avec un maintien du taux de croissance à un niveau élevé porté par une compétitivité des facteurs de production s’accroissant, un renforcement du capital humain, une amélioration des soins de santé et des efforts d’éducation et de formation, une diversification des exportations, une amélioration de l’accès au crédit, avec bien entendu pour corollaire un recul constant et significatif de la pauvreté.
Au bout de ce parcours à moyen terme, le pétrole et le gaz devaient transformer le Sénégal en un petit eldorado. Ce doux rêve avait également pour but de faire oublier les dures réalités de la rigueur économique vécue au-delà des statistiques d’illusion.
Nous avions prévenu que les mensonges ne suffiraient pas pour gagner des élections. Il fallut en effet avoir recours à un système de parrainages inapplicable, inventé dans la précipitation d’une énième révision constitutionnelle pour éliminer des candidats, et surtout pour éviter un deuxième tour à l’élection présidentielle qui aurait pu être fatal au président sortant. Pour assurer la mise en œuvre du système de parrainage, le mensonge fut aussi présent dans le Considérant 10 de la Décision N°2 /E/2019 du Conseil Constitutionnel qui affirme le contrôle du système de parrainage par l’examen effectif de 1,5 millions de signatures en moins d’un mois.
Enfin nous proposions, pour placer le Sénégal dans une trajectoire de renforcement de son système démocratique, de réduire les pouvoirs constitutionnels du chef de l’État, de renforcer ceux de l’Assemblée nationale en même temps que le système d’élection des députés serait réaménagé pour abandonner l’injustice du scrutin à un tour pouvant faire élire plusieurs députés (en 2017, BBY avec 49,47% des voix, a obtenu 125 des 165 sièges, soit une majorité de 75,78%), de garantir l’indépendance de la Justice, et de remettre l’administration au service du citoyen et non du client politique, par des procédures reconstruites, notamment de recrutement.
Nous proposions aussi la nécessité de donner une nouvelle direction à notre stratégie économique en créant la plus-value et donc la croissance dans les secteurs les plus pauvres mais aussi les plus employeurs de main d’œuvre : en particulier l’agriculture pour améliorer le quotidien du paysan sénégalais et réduire la dépendance alimentaire de notre pays ; l’artisanat pour le faire migrer vers une semi-manufacture et plus tard une véritable industrie à l’instar des pays ayant réussi leur transition vers l’émergence.
Les grands travaux devaient se substituer aux grands projets dispendieux, gourmands en endettement extérieur, faisant la part belle aux entreprises étrangères et finalement peu utiles à l’économie nationale mais satisfaisant l’ego d’un Président. Nous proposions aussi un recours accru au Partenariat Public Privé (PPP), y compris à une échelle accessible au citoyen pour l’électrification et l’eau rurales notamment. Cette voie du PPP devient nécessaire face aux limites atteintes par le recours excessif à l’endettement extérieur par le régime de Macky Sall.
Le triste bilan de 2019 ou l’éclatement des mensonges et scandales
Malheureusement pour le Sénégal, nos anticipations n’ont pas été trahies.
2019 a été une année d’élections truquées, suivie d’un troisième dialogue national organisé pour faire diversion et qui après sept mois vient d’être officiellement installé. La grande qualité de quelques-uns des animateurs de ce dialogue ne contredira pas le vrai dessein de son initiateur devenu spécialiste dans le gâchis de compétences.
D’ailleurs, très vite, une révision de la Constitution a été soustraite d’un dialogue considéré comme pas assez sérieux pour se saisir de questions aussi importantes. Au lieu d’être réduit, le pouvoir excessif du président de la République, principale souffrance de notre démocratie et de notre immobilisme économique, a été renforcé par la suppression du poste de Premier ministre et le retrait du pouvoir de censure du gouvernement dévolu à l’Assemblée nationale.
Le scandale du pétrole et du gaz est vite revenu au premier plan, gâchant leurs fêtes de victoire à l’élection présidentielle. Pourtant, dès 2016, nous avions alerté et appelé à des enquêtes. Elles seront donc décidées trois années plus tard mais avec pour objectif manifeste de tout enterrer.
L’échec de la politique économique du régime de Macky Sall a imposé un ajustement structurel déguisé en Instrument de Coordination de Politique Économique (ICPE), mais reposant sur les mêmes objectifs que tout ajustement, à savoir : le resserrement du déficit budgétaire, la priorité au règlement des échéances de la dette extérieure, les ponctions sur le pouvoir d’achat des ménages par la fiscalité et la hausse des prix, le harcèlement fiscal des entreprises sur lesquelles on dit pourtant compter pour porter la relance économique lorsque la capacité d’intervention économique de l’État a été dilapidée par mauvais choix économiques, mauvaise gestion et incompétence.
Ils osent continuer de soutenir que la croissance aurait été maintenue à 6%. Les mensonges de production les plus patents ne peuvent pourtant plus être cachés : la production d’arachides de 1,4 millions de tonnes n’aurait pas permis la collecte de plus de 300 000 tonnes en 2018-2019. Mais pour la campagne qui s’annonce, les prévisions sont encore plus pessimistes. Elles sont le résultat d’une stratégie ignoble visant l’enrichissement de politiciens vendeurs de mauvaises semences dites sélectionnées et subventionnées, aux dépens des paysans et du contribuable sénégalais. J’avais qualifié cette attitude scélérate de financement du sous-développement. Mes tentatives en 2013 de restaurer une production de semences certifiées ont été combattues puis abandonnées.
Où sont donc passées toutes ces quantités de céréales qui auraient été produites ? L’autosuffisance en riz avait été annoncée pour 2017. Nous avions récusé une telle assertion. Le président avait ensuite corrigé pour annoncer son report d’un an en 2018. On en parle désormais plus.
Et de nouveau l’insécurité alimentaire affectera près d’un million de personnes au Sénégal.
Nul n’ignore l’importance de la compétitivité énergétique dans la construction d’une croissance. Le Sénégal avait déjà l’une des électricités la plus chère de la sous-région. L’augmentation des tarifs après celle des produits pétroliers, participe à l’objectif de réduire le déficit budgétaire en même temps que le pouvoir d’achat des ménages. Rien ne la justifie qui ne relèverait d’une compétitivité insuffisante de la Senelec d’une part, et de sa gestion dépendant d’impératifs politiciens d’autre part. En effet, même après prise en compte du relèvement du cours du dollar, les prix de référence du brut restent inférieurs de 24% à avril 2012 en francs cfa. Le régime a en outre choisi de faire supporter au consommateur leurs erreurs de planification et de gestion qui n’ont pas permis la mise en place d’un mix énergétique compétitif.
Une telle situation est courante au niveau des entreprises du secteur parapublic où les résultats électoraux sont demandés à des dirigeants-militants plutôt que des performances profitant aux usagers et aux populations.
Les Sénégalais doivent le savoir : il n’y a d’autre chemin possible que d’ajustement structurel pour une économie non dynamique lorsque le déficit des paiements extérieurs s’aggrave en même temps que celui budgétaire, conséquences de mauvaises options économiques et d’une gabegie innommable. Le temps économique des prochaines années sera lourd non par la faute d’un environnement extérieur, mais comme conséquence de l’attitude ceux que nous aurions choisis pour nous diriger.
L’année 2019 s’est achevée avec une importante réforme du franc cfa, consacrant le retrait total de la France de la gestion de cette monnaie. C’est une victoire de dignité de la jeunesse africaine. C’est une lueur d’espoir qui laisse espérer qu’un jour prochain cette dignité sera réclamée à leurs dirigeants. Je reste encore étonné par le silence de notre Exécutif face à une réforme aussi importante affectant notre monnaie. Des pistes de réflexion doivent maintenant s’ouvrir pour en moderniser la gestion sans l’affaiblir, et en renforçant son caractère de monnaie africaine par son évolution vers l’ECO en partage avec d’autres pays de la CEDEAO.
Au nombre des scandales de 2019, et par pudeur, je n’évoquerai que par quelques mots les trafics de drogue et de faux billets semblant mêler au Sénégal mafieux et politiciens intouchables.
L’année 2020 et l’avenir politique de l’ACT
Dans le prolongement de la mise en œuvre de la politique d’ajustement structurel se substituant à une fausse « phase 2 du PSE », l’année 2020 sera une année de tensions économiques et sociales : la dépense publique sera resserrée au détriment du fonctionnement de l’administration de l’éducation et de la santé, lorsque le gaspillage en voitures et voyages pourrait être poursuivi. La dépense sociale souffrira également des priorités accordées à quelques grands projets à terminer dont des immeubles administratifs inoccupés.
Le pouvoir d’achat des ménages sera pressurisé. Le harcèlement fiscal des entreprises sera renforcé. Il est à cet égard annoncé que le déficit budgétaire devrait, d’après de curieuses projections, se réduire très rapidement grâce à une pression fiscale augmentant de 20% en deux années !
Pour éviter tout débordement face à la montée de la colère sociale, la « soft dictature » sera habile à restreindre les libertés, parfois en violation de la Constitution, en particulier le droit aux manifestations pacifiques dont on craint le succès.
Pour l’année qui s’ouvre, nous refuserons la sujétion au temps politique que Macky Sall, en bon politicien professionnel, cherche à imposer avec son dialogue national.
Nous opterons pour une attitude de sentinelle, poursuivant notre rôle d’éveil des consciences, afin qu’un jour, les Sénégalais connaissent mieux les raisons du non-développement de leur pays et choisissent mieux leurs dirigeants à l’occasion d’élections. C’est le sens que nous donnons et donnerons à notre action politique.
Nous continuerons à dénoncer les élections trafiquées, afin que le peuple et la communauté internationale ne soient pas dupes.
Nous combattrons le recul démocratique organisé par Macky Sall.
Ces postures citoyennes se poursuivront :
Par le suivi de la plainte pour faux et usage de faux en document administratif qui a permis d’attribuer des permis pétroliers à Frank Timis et à son partenaire privilégié Aliou Sall, même si depuis cinq mois le Doyen des juges refuse d’y donner suite au plan local.
Par la promotion de projets utiles à nos concitoyens tel le projet « REXODUS ». Ce dernier consiste à organiser le retour dans leurs pays d’origine des immigrés de première et de deuxième génération dans le secteur productif grâce à leurs employeurs, PME européennes délocalisant ou dupliquant une partie de leur activité, en co-investissant avec leurs employés émigrés et des nationaux du pays de retour.
Nous ne négligerons pas non plus cette formation des femmes à la production de savon, eau de javel, vinaigre et autres petites productions, à la tenue de caisse de micro-crédits. Les compagnons de notre parti ont déjà reçu la recommandation de s’associer à toutes activités citoyennes dans leurs quartiers, villages et localités.
Cette posture résolument citoyenne sera nôtre dans le cadre de l’espace déjà élargi que constitue le Congrès de la Renaissance Démocratique (CRD), mais qui reste ouvert à d’autres mouvements et forces citoyennes et politiques toutes conscientes que les alliances ne doivent pas se nouer et se dénouer pour « aller à la soupe », mais autour de valeurs partagées pour la recherche du progrès de notre cher Sénégal.
Je vous remercie de votre attention et vous souhaite à toutes et à tous, mes meilleurs vœux de nouvel an.
Dieu garde et protège le Sénégal !
Deweneti"
Par Edgard GNANSOUNOU
SORTIR DE LA CONFUSION MONÉTAIRE
Pourquoi, en effet, avoir fait sortir la France des instances de la politique monétaire de l’UEMOA, s’être émancipé du Franc CFA, pour ensuite demander à la France de maintenir sa garantie en période de crise ?
Au lendemain de la décision du 21 décembre 2019, il apparaît, après un recoupement de différentes interventions médiatiques en particulier celles du Président et du Ministre des Finances de la France, que les réformes annoncées sont principalement à l’initiative de la France.
Il importe pour nos dirigeants, de mettre fin aux polémiques en cours en jouant la transparence envers l’opinion publique ouest-africaine. J’aimerais féliciter toutes les personnalités africaines qui ont négocié la mise en oeuvre de cette décision française et nous l’ont servie astucieusement comme un sursaut de dignité venant de nos Chefs d’Etat - ces Présidents francophones qui auraient voulu prendre de l’avance sur les autres partenaires de la CEDEAO.
Cependant, cette communication pèche par manque de cohérence voire de maladresse. Pourquoi, en effet, avoir fait sortir la France des instances de la politique monétaire de l’UEMOA, s’être émancipé du Franc CFA, pour ensuite demander à la France de maintenir sa garantie en période de crise ? Pourquoi la France aurait-elle accepté de se faire éjecter tout en continuant à apporter sa garantie à huit pays « souverains » qui revendiquent à ses dépens leur souveraineté? La France serait telle devenue subitement masochiste ?
Pourquoi, si ce n’est qu’elle est à l’initiative de cette opération qui apparaît, avant tout, comme une réponse à un regain d’impopularité de ce pays dans notre sous-région. Il faut aussi déplorer l’image qui nous est donnée d’une UEMOA « francophone » qui réunit, à part la Côte d’Ivoire et le Cap-Vert, six des pays les plus pauvres de la sous-région, mais prétend « damer le pion » à des pays comme le Ghana et surtout le Nigéria. La décision de créer une monnaie censée prendre le nom Eco est une initiative de la CEDEAO et si une approche progressive devait être empruntée, elle aurait dû être conçue par ou au sein de la CEDEAO et non par l’UEMOA qui, sauf erreur, n’est pas un comité exécutif de la CEDEAO.
Il importe de corriger cette posture calamiteuse qui peut contribuer à nuire à une intégration politique de la sous-région. Je continue de soutenir qu’il faut se réjouir de la fin symbolique du Franc CFA, de la clôture du compte d’opérations géré par la France, de la responsabilité entière donnée par la France de Macron à ses protégés de gérer eux-mêmes leurs réserves de devises. Il est cependant frustrant que, comme c’était le cas de l’Indépendance, cette émancipation nous ait été octroyée par la France.
Comment alors, ne pas comprendre le doute et parfois la colère exprimés par certains intellectuels de notre sous-région ?
Mais point n’est nécessaire de diaboliser nos frères et soeurs qui ont négocié cette émancipation. Il faudrait, de manière précise, situer les enjeux et faire des propositions concrètes pour la suite.
En 2018, la province indienne du Kerala a subi une inondation qui a fait des centaines de morts. C’était une crise humanitaire et non financière mais l’Inde a décliné les offres d’assistance et les dons d’autres pays. Le gouvernement de l’Etat fédéral Indien affirmait qu’il lui revenait comme Etat souverain de faire face à cette situation de crise humanitaire !
L’enjeu, ici, n’est pas qu’une question de fierté ou de dignité, c’est aussi et surtout une volonté de consolidation d’une crédibilité internationale acquise de longue date et cultivée quotidiennement. Mais nous ne sommes pas des Indiens et certains des nôtres pour des raisons purement pragmatiques mais aussi par conviction continuent de faire preuve d’un complexe d’infériorité. Au fond, ils sont convaincus de notre incapacité à nous prendre en charge et donc de la nécessité de nos « supérieurs » à décider pour nous. Il s’agit là d’un syndrome de « colonisés attardés » dont nos psychologues devront rechercher les causes profondes. Mais en attendant quelles propositions pourrions-nous faire pour nous placer sur le chemin de la crédibilité ? La France sort de la zone CFA – UEMOA mais ne lâche pas ses protégés
Les protégés nous expliquent que l’attelage est provisoire et vise uniquement à maintenir la confiance des investisseurs. Mais le même objectif n’aurait-il pas pu être atteint autrement ? Je propose que l’attelage transitoire soit mis en place non pas avec la France mais entre la zone Eco, qui ne doit pas se limiter aux ex-colonies françaises, et la zone euro. Un accord direct entre la BCEAO rénovée et la Banque Centrale Européenne (BCE) ne suffirait-il pas ?
Pour le reste, je plaide auprès de tous pour que le processus de création de la monnaie unique de la CEDEAO soit revu. Le Nigéria s’est lancé dans une politique ambitieuse de création d’une économie nationale. Pour le moment, son économie est très dépendante des recettes de pétrole et reste donc vulnérable aux cours internationaux du pétrole. Ce pays frère qui constitue un de nos principaux atouts dévalue sa monnaie nationale pour ajuster ses recettes en naira en cas de baisse des cours de pétrole.
Comme l’Allemagne a imposé ses conditions pour abandonner le mark fort et permettre la création de l’euro, le Nigéria, malgré toutes les résolutions de tous les Conseils de Chefs d’Etat de la CEDEAO, le Nigéria dis-je, n’abandonnera jamais le naira pour l’Eco si les dirigeants Nigérians n’ont pas la garantie qu’ils pourront se servir de l’Eco comme ils se servent du naira.
Si l’Allemagne a imposé un taux d’inflation faible pour protéger les revenus de ses retraités, le Nigéria n’en a cure ; sa priorité est de maintenir ses recettes en monnaie nationale et poursuivre la diversification de son économie, ce qui implique, pour de nombreuses années encore, « un minimum » de protection douanière contre les importations trop compétitives, y comprises celles relayées par les pays voisins comme le Bénin. Ainsi, il est illusoire de soumettre la création de la zone Eco à des critères de convergence inspirés de l’euro. Nos économies ne sont pas européennes et ni l’UEMOA « francophone », ni le Nigeria n’est l’Allemagne.
Les autres pays membres de la CEDEAO ne sont pas obligés de se soumettre au rythme de mutation de l’économie nigériane car leurs économies sont structurellement différentes. C’est donc de volonté politique qu’il s’agit et non pas de critères de convergence dont l’atteinte est très vulnérable à des conjonctures indépendantes de la gestion des économies nationales. En effet, ces conjonctures peuvent s’inscrire dans la durée (exemple : longue période de prix élevé ou faible des cours des matières premières). Non, c’est de volonté politique qu’il s’agit et non de critères de convergence !
Par exemple, avant de se fédérer tous les Etats n’attendent pas d’avoir la même performance économique. Après la chute du mur de Berlin, quand l’Allemagne de l’Ouest a « accueilli » la partie Est du pays, elle n’a pas attendu que les nouveaux venus montrent des performances économiques convergentes avec les siennes. Il nous faut donc absolument sortir de mécanismes prétendument technocratiques qui sont largement en deçà des enjeux !
Nous avons besoin d’une grande ambition, cette ambition doit être la nôtre, pas celle de la France ni d’aucun autre pays peu concerné par les défis que nous devons relever : une population en croissance forte, ce qui ne peut être un atout que si nous nous donnons les moyens de son éducation ; une pauvreté qui se maintient voire s’aggrave alors que notre sous-région est riche. Cette ambition est à notre portée si nous avons l’énergie pour faire un bon psychologique qui nous permettrait de sortir des sentiers battus, du morcellement territorial et du nationalisme étriqué et de la servitude volontaire !
Les quatorze pays de l’Afrique de l’Ouest doivent former une deuxième fédération, la Fédération Sahélo-Guinéenne (FSG) pour se doter d’une économie moins vulnérable que le sont les économies des nations actuelles. L’Eco doit devenir la monnaie de la FSG, mais l’Eco la vraie, pas celle garantie par la France. Ce sursaut est une exigence pour nous tous, pas uniquement pour les Chefs d’Etat, ou les partis au pouvoir. La lutte pour exercer le pouvoir politique est certes légitime et respectable mais son impact est condamné à être très limité si son horizon ultime est la gestion de la rareté et de la précarité dans une sous-région aux potentiels économiques énormes, une sous-région qui nous échappe déjà par absence de sursaut !
Alors soutenez une Eco au service d’une vision ambitieuse, celle d’une économie nouvelle, industrielle assise sur de nouvelles valeurs, fédérales, démocratiques, solidaires, durables, pro-libertés sociales et économiques. Soutenez la fédération Sahélo-Guinéenne, une seconde fédération en Afrique de l’Ouest pour lancer avec la fédération nigériane une dynamique socioéconomique à la mesure des enjeux.
Alors même que ce dialogue national devrait servir à pondérer les résultats biaisés de l’élection présidentielle, on semble s'y engager en cumulant des malentendus - Que d'illustres inconnus hier à la salle des banquets !
Puisque la répétition est pédagogique, il serait intéressant de revoir à nouveau nos commentaires au sortir de l’élection Présidentielle en 2019. Les chiffres étaient suffisamment éloquents qui disaient l’état de délabrement avancé de notre « système » dit démocratique. La définition la plus simple de la démocratie étant : la « forme de gouvernement dans laquelle la souveraineté appartient au peuple. » L’unanimité n’étant pas courante, la majorité suffit à exprimer la volonté populaire et à légitimer la Délégation de pouvoir du Peuple souverain aux élus. Examinons, sous ce prisme, le résultat de la dernière élection présidentielle dans notre pays.
Le nombre d'Inscrits était de 6 683 043. Sur une population estimée autour de 16.000.000 dont une large majorité n'a certainement pas encore atteint l’âge de voter.
Le nombre de votants à été de 4 428 680. Ce qui porte le nombre d’abstentions à 2 254 363, ce qui est un chiffre très important qui exprime, entre autres, le désenchantement vis-à-vis d'un système dont on n'attend plus la prise en compte de nos aspirations et l’expression de nos volontés. Mauvais signal !
Puis, les résultats officiels se sont décomposés comme suit :
Macky Sall : 2 555 442 élu au premier tour
Idrissa Seck: 899 556
Ousmane Sonko: 687 523
Issa Sall: 178 613
Madicke Niang: 65 021
Bulletins blancs et nuls: 42 541
Ces résultats, à y regarder de près, établissent la légitimité fragile du Président élu Macky Sall. Et c'est cela qui explique, pour l’essentiel, l'appel au dialogue national le lendemain même de la proclamation des résultats. En effet, en cumulant le total des voix de l'opposition aux voix abstentionnistes, le Président se retrouve élu par une minorité du corps électoral. Cela est contraire à la définition de la démocratie. Stricto sensu. Cela n'est pas un plébiscite qui aurait donné les coudées franches pour gouverner, dans la sérénité, pour un dernier mandat du point de vue de la Constitution en vigueur.
Mais enfin cette épisode est dépassé. Ce qui le ramène à nos souvenirs c'est l’installation (enfin !) de la Commission pour le Dialogue National. Alors même que ce dialogue devrait servir à pondérer les résultats biaisés de l’élection présidentielle, on semble s'y engager en cumulant des malentendus. Partant de la légitimité fragile identifiée plus haut, interrogeons d’abord celle des « représentants du peuple » au dialogue national. Interrogeons la représentativité des personnalités aperçues hier à la salle des banquets à l'occasion de la cérémonie solennelle d'installation de la commission. Au plan politique, et au vu des résultats des dernières élections présidentielles, les deux poids lourds de l'opposition en l’absence du PDS, premier parti de l’opposition parlementaire, sont Idrissa SECK et Ousmane SONKO. Ils étaient absents. Le PDS n'a pas pris part à cette rencontre. Les nouvelles forces sociales en mouvement, dédaigneusement qualifiées d’activistes, non plus. Plusieurs autres acteurs politiques constants sur la scène publique n’étaient pas à la salle des banquets. En revanche que d'illustres inconnus !
Le dialogue national semble donc parti sur un bien mauvais pied. À moins qu'avec l’habileté et le préjugé favorable dont il jouit, le Président Famara Ibrahima Sagna ne se donne les moyens de convaincre les récalcitrants pour légitimer les résultats attendus du dialogue national. Cela semble prioritaire dans un contexte d’ajustement structurel et de morosité économique pour les ménages. Même si les taux de croissance affichés voudraient nous faire croire le contraire.
En un mot comme en mille, les coups de bluffs, les tours de passe-passe et les arnaques politico-constitutionnelles permettent de passer en force ou de maintenir l’illusion. Mais la réalité est la seule vérité. Elle est têtue par définition. Il y'a des moments où il faut se donner les moyens d’entrer dans l’Histoire. Les petites ruses et les astuces ne relèveront toujours que de la petite histoire…
VIDEO
KÉMI SÉBA CONDAMNÉ PAR LA JUSTICE BURKINABÈ
Le président de “Urgences panafricanistes” poursuivi pour « outrage à chef de l’Etat et à d’autres chefs étrangers », a écopé ce jeudi de deux mois de prison avec sursis
Kémi Séba a été jugé le jeudi 26 décembre 2019 au Tribunal de grande instance de Ouagadougou (TGI). Le président de “Urgences panafricanistes” était poursuivi pour « outrage à chef de l’Etat et à d’autres chefs étrangers » suite aux propos qu’il a tenus le 21 décembre 2019 lors de sa conférence avec des étudiants de l’université Joseph Ki-Zerbo.
Kémi Séba a longuement été interrogé par le parquet, les juges et son avocat, Me Prosper Farama, ce jeudi 26 décembre 2019. Il s’est expliqué après la projection de quelques séquences vidéo de la conférence.
Pour le président de “Urgences panafricanistes”, dire qu’ «il faut que le président Kaboré retrouve ses testicules », qualifier Mahamadou Issoufou de « fou » ou Alassane Ouattara de « drame », ce ne sont pas « des outrages », mais, dit-il, « c’est le cri de douleur d’un fils ».
« Ce ne sont pas des injures, ce sont des qualificatifs politiques (…) L’outrage vient de la manière dont les autorités françaises parlent aux présidents africains (…) Ce sont les propos d’un enfant qui aime son père, ses pères », a indiqué Kémi Séba.
Après épuisement des débats, le parquet a requis que Kémi Séba soit déclaré coupable et a demandé « une peine d’un an de prison assortie de sursis et une amende de deux millions de FCFA ».
Pour Me Farama, les mots utilisés par son client à savoir « passoire politique » ou « il faut que le président Kaboré retrouve ses testicules » sont une « image », « une figure de style ». Et l’avocat insiste en indiquant que ce procès est « politique ». Pour lui, l’infraction n’est pas constituée.
Au verdict, le tribunal a déclaré Kémi Séba coupable des faits. Il a été condamné à deux mois et amende de 200.000f CFA assortis de sursis.
Rappelons que selon le procureur, aucune plainte n’a été déposée contre Kémi Séba par les victimes à la suite des propos tenus par ce dernier. Le parquet s’est auto-saisi.
Notons qu’une affaire connexe à celle de Kémi Séba est née. Il s’agit de la plainte déposée par Hervé Ouattara, ancien président du Citoyen africain pour la renaissance (CAR) dont la maison avait été assiégée par des jeunes « 200 environ », le samedi 21 décembre 2019, après la conférence avec les étudiants. « Une plainte a été déposée contre Luc Arnaud Compaoré, chargé de mission au ministère de la famille », a révélé Hervé Ouattara.
par Bosse Ndoye
INDISCIPLINE, QUAND TU NOUS TUES !
Pour ceux qui croyaient que le comble avait été atteint avec le passage du chauffeur de taxi sur une passerelle piétons il y a quelques années à Dakar, l’accident macabre sur la route de l'aéroport a été un douloureux et triste moment de dessillement
La plus grande chose que la politesse puisse nous faire perdre, de temps en temps, est une place dans un autobus bondé, a dit Oscar Wild. L’indiscipline, elle, combinée avec le laxisme, l’incivisme et l’indifférence constituent un cocktail explosif susceptible de miner beaucoup de secteurs socio-économiques dans notre pays.
Sur ce plan, on croyait avoir déjà tout vu : de grandes personnes uriner dans les rues ; d’autres traverser l’autoroute à pied pendant des heures de pointe ; d’autres encore jeter leurs déchets sur la place publique sans états d’âme ; des chauffeurs sortir de leur voiture pour en venir aux mains en pleine circulation ; un conducteur soucieux de sa sécurité et de celle de ses concitoyens se faire klaxonner, voire insulter quand il essaie de respecter les règles de la circulation en s’arrêtant au feu rouge …. Tout ceci se passant parfois dans l’indifférence totale de nos concitoyens et/ou sans sanction de la part des autorités publiques.
Pour ceux qui croyaient que le comble avait été atteint avec le passage du chauffeur de taxi sur une passerelle réservée aux piétons il y a quelques années à Dakar, l’accident macabre sur la route de l'aéroport a été un douloureux et triste moment de dessillement. Pour certains, il serait le résultat d'une course-poursuite entre camions frigorifiques alors que pour d'autres un excès de vitesse et des freins défectueux en seraient à l'origine
En tout état de cause, aussi incompréhensible que cette indiscipline qui sévit sur nos routes et dans beaucoup de secteurs du pays puisse paraître, elle n'en reste pas moins symptomatique d’une société qui s’affaisse sous le poids du désordre, du non-respect des normes, de l'absence de sanctions, du fatalisme, du je-m'en-foutisme, de l’insouciance et surtout de la perte de repères et de valeurs… Dans un pays où la capacité d’indignation est à son niveau plancher, il n’est étonnant que nombre de gens soient mithridatisés...Personne ne semble se souvenir des appels à l’introspection lancés ça et là à la suite de quelques catastrophes précédentes…
En réalité, l’amnésie règne sans adversité dans ce pays. On en est arrivé à oublier qu’il y a plus d'une dizaine d’années, au lendemain du naufrage du bateau le Joola, le pays avait voulu faire une union sacrée pour ressusciter une véritable prise de conscience sur l’importance du civisme et de la discipline. Le naturel a, depuis, repris le dessus. Dès lors, plutôt que de seriner ad nauseam des projets d’émergence économique, nos dirigeants feraient bien d’insister sur l’émergence mentale. D’autant qu’elle est la base sur laquelle se construisent toutes les autres. Cela passera forcément par le respect des valeurs de base nécessaires au bon fonctionnement d’un pays.
L’indiscipline n’est l’apanage d’aucune société, mais une certaine attitude des autorités peut l’aider à s’enraciner et à se développer. Mais, une justice sociale, une application normale des lois, des institutions fortes, prêtes à sanctionner tous les contrevenants aux règlements peuvent être un début de solution pour juguler le mal de l’indiscipline.
De plus, au-delà de l’éducation, la peur d’une sanction pécuniaire et celle du gendarme semblent être les armes les plus efficaces pour pousser les gens à bien se comporter en société. Quand l'indiscipline devient mortelle, il devient urgent d'agir !
par Siré Sy
DIALOGUE NATIONAL, FABRIQUE POLITIQUE ET SOCIALE
Le président Sall aura compris et le Dialogue national aura permis, de nous rendre compte enfin, que la politique, le débat, la recherche du consensus, ne devrait pas être seulement une affaire d'Etat institutionnalisé
Durant les régimes des présidents Senghor, Abdou Diouf et Abdoulaye Wade, la conjoncture politique et les conflictualités électorales, débouchaient sur des Dialogues politiques, comme portes de sorties de crise. Avec le président Macky, la conjoncture politique et les conflictualités électorales, débouchent sur le Dialogue national, ‘’annualisé’’ depuis le 28 mai 2016.
Le Dialogue politique est une affaire des partis politiques et des seuls acteurs politiques. Le Dialogue national parle à la Nation, dans ses composantes les plus représentatives (partis politiques, société civile, Femmes & Jeunesse, Chefferie traditionnelle, Pouvoir religieux, Secteur privé, Communautés géographiques, Communautés académique, Corps de métiers, etc…..). Un Dialogue politique est exclusif. Le Dialogue national est inclusif. Un Dialogue politique est conquête et accaparement (du pouvoir d’Etat). Le Dialogue national est solidarité et partage sur le système de gouvernance démocratique et sur la fabrique politique, sociale, économique et culturelle.
L’un des traits de style très caractéristique du président Macky Sall, c’est aussi d’avoir compris qu’il était nécessaire de revisiter les paramètres de la Gouvernance au Sénégal, parce que le modèle de l’Etat-Nation (en Afrique), calqué du modèle Nation-Etat en Occident, est source de tensions et de désordre parce que le modèle classique de l’Etat-Nation se résume à un transfert de l’ensemble des ressources et du pouvoir à une minorité qu’on appelle les Partis politiques et les Politiciens (professionnels).
Le président Sall aura compris et le Dialogue national aura permis, de nous rendre compte enfin, que la Politique, le débat, la recherche du consensus, ne devrait pas être seulement une affaire d'Etat institutionnalisé, une affaire de partis politiques, mais aussi l'affaire de forces politiques vives (traditionnelles, religieuses, associatives, secteur privé, monde académique, corps de métiers, etc…..) parfaitement efficaces dans leur domaine et omniprésentes même dans les aspects les plus modernes du Sénégal d'aujourd'hui. Et souvent très démocratiques à leur façon. Les héritages sociaux et économiques, la persistance des communautés, des pouvoirs traditionnels et des croyances originelles, sont plus pertinents souvent à l'échelle locale que nos Etats institutionnalisés et institutions surpra-nationales dans de nombreuses régions.
En Occident, des Nations ont créé des Etats et en Afrique, des Etats veulent créer des Nations. Et si la mayonnaise n’a pas toujours pris depuis 60 ans, c’est que nous avions oublié que l’Afrique (le Sénégal) est faite de Communautés (géographiques, linguistiques, religieuses) avant d'être un Etat institutionnalisé. Avant tout. Après tout. Par dessus tout.
L'OPPOSITION ANCRÉE DANS LE PROCESSUS DU DIALOGUE POLITIQUE
Nous porterons la voix du peuple, celle des agriculteurs qui veulent vendre leur arachide au meilleur prix, celle des populations confrontées aux soucis fonciers, celle des enseignants, des étudiants... - DÉCLARATION DE PRESSE
SenePlus publie ci-dessous, la déclaration des participants de l’opposition au dialogue, en date du 26 décembre 2019.
« L’installation du Comité de pilotage du dialogue national est pour nous l’occasion de réaffirmer, à travers la présente déclaration, notre volonté de poursuivre, avec loyauté et esprit de suite, notre participation aux concertations, dans le seul et unique but de voir restaurée une vie démocratique apaisée parce que normale.
Les difficultés intérieures liées aux conditions de vie des populations et aux problèmes de sécurité dans un environnement sous-régional hautement anxiogène justifient largement l’initiative de l’organisation de ce dialogue. C’est la raison pour laquelle nous avons répondu positivement à l’appel, comme nous le disions le 28 mai passé.
Nous avons noté avec satisfaction les progrès réalisés dans la prise en compte de certaines de nos demandes comme la libération de Khalifa Ababacar Sall. Nous nous attendons tout naturellement à ce que Khalifa Ababacar Sall et Karim Meïssa Wade retrouvent la plénitude de leurs droits civiques et politiques.
Nous nous réjouissons également de la libération du docteur Babacar Diop et certains de ses codétenus et demandons la libération de Guy Marius Sagna et des autres manifestants encore en prison.
Plus généralement, il nous paraît souhaitable de faire respecter le droit à la manifestation. Ce ne serait que bénéfice pour la notoriété démocratique de notre pays, tandis que l’usage de la méthode forte ne fait que compliquer l’établissement d’un climat de paix et de stabilité durables dans le respect des droits des uns et des autres et l’assomption de ses devoirs par tout un chacun.
Nous réitérons notre confiance à M. Famara Ibrahima Sagna, président du Comité de pilotage. Ceux d’entre nous qui le connaissent se sont appuyés sur son parcours et les services éminents qu’il a rendus à notre pays pour penser qu’il a l’étoffe et la carrure pour conduire la mission. Nous le félicitons d’avoir accepté ce nouveau sacerdoce et lui souhaitons bonne chance et plein succès.
Nous associons à ces vœux le Général Mamadou Niang qui dirige d’ores et déjà, avec intelligence et tact, la commission politique du dialogue national.
Les participants de l’opposition adressent également leurs vives félicitations à tous les membres du Comité de Pilotage pour le choix porté sur leurs personnes.
Le Sénégal appartient à l’ensemble de ses filles et fils. Toutes les forces vives de la Nation ont leur mot à dire sur la situation de notre pays. Nous apporterons notre contribution avec d’autant plus d’ouverture que le président de la République a déjà accepté l’application de tous les consensus auxquels nous serons parvenus.
Il ne s’agira pas bien évidemment de parler de tout et de rien. A notre avis, le but ne saurait être ni, pour le pouvoir, de déléguer la définition de la politique nationale ni, pour l’opposition, de se poser en conseiller ou consultant du pouvoir.
Au sein des différentes commissions, nous porterons la voix du peuple, celle des agriculteurs qui veulent vendre leur arachide au meilleur prix, celle des populations confrontées à la remise en cause de leurs droits fonciers, celle des enseignants et des étudiants en lutte, celle des marchands ambulants en quête d’espaces de commerce, celle des pêcheurs, des éleveurs, celle des jeunes en quête d’emploi, celle des femmes et du troisième âge, celles de toutes les catégories de la population. Et nous œuvrerons de toutes nos forces pour que ces différentes catégories sociales voient une amélioration de leur situation à l’issue de ce dialogue.
Nous souhaitons que les points à aborder soient ciblés de façon précise : des questions d’intérêt national controversées, des problèmes nécessitant un consensus transcendant les partis et les régimes, des réformes longtemps différées et arrivées à maturité, etc.
Nous sommes disposés à examiner sereinement l’ensemble des points retenus en vue de contribuer, en toute bonne foi, à la formulation de conclusions consensuelles praticables et pérennes.
Sur chacun de ces points, nous soumettrons avec esprit de responsabilité notre vision et nos propositions, dont une première synthèse figure dans les différents documents que nous remettrons au président du comité de pilotage.
Pour tout dire, nous sommes armés de notre seule volonté de faire avancer le Sénégal vers plus de démocratie et de progrès social.
Enfin, comme vous le savez, de nombreux Sénégalais se plaignent de la récente hausse du prix de l’électricité qui a entraîné une surchauffe légitime du front social. Nous nous faisons leur porte-parole pour demander au président de la République de bien vouloir faire en sorte que cette augmentation soit revue.
Bonne et heureuse année 2020.
Pour les participants de l’opposition
Le Coordonnateur
Moctar Sourang"
"
par l'éditorialiste de seneplus, serigne saliou guèye
LETTRE OUVERTE AU HAUT-COMMISSAIRE DES NATIONS UNIES AUX DROITS DE L’HOMME
EXCLUSIF SENEPLUS - Nous vous demandons d’interpeller l’Etat du Sénégal pour que cessent ses agressions publiques des forces de l’ordre et ses violations itératives de l’intégrité physique sur des manifestants inoffensifs
Serigne Saliou Guèye de SenePlus |
Publication 26/12/2019
Nous venons par la présente, porter à votre attention les violations flagrantes des droits fondamentaux des Sénégalais. Le 29 novembre dernier, l’activiste Guy Marius Sagna et huit autres personnes (dont cinq libérées récemment) manifestant contre la hausse du prix de l’électricité ont été illégalement arrêtés lors d’un mini-rassemblement devant le palais de la République. Aujourd’hui, ce Guy Marius Sagna et quatre autres manifestants sont détenus en prison pour avoir simplement exercé un droit constitutionnel. Je vous signale que c’est la énième fois que le régime du président Macky Sall utilise, en violation flagrante de la loi constitutionnelle, la violence sur des Sénégalais chaque fois qu’il s’est agi de marcher pour manifester conformément à l’article 8 de notre Constitution. Pourtant, le 16 avril dernier, de jeunes militants du parti présidentiel, proches du maire Aliou Sall (frère du président Macky Sall) ont nuitamment secoué les grilles du Palais de la République pour exprimer leur mécontentement quand le nom de leur leader a été biffé de la liste des candidats à la députation de 2017 par le chef de leur coalition politique. Et aucune sanction n’a été prise à l’encontre de ces jeunes trublions nocturnes qui ont eu le toupet de perturber le sommeil présidentiel. C’est la politique des deux poids deux mesures. Pour les mêmes faits, Guy Marius et quatre manifestants sont maintenus en prison depuis le 29 novembre alors que les jeunes militants du frère du président de la République ont bénéficié d’un laxisme effarant de la part des agents qui sont chargés de la sécurité du locataire du Palais.
Madame la présidente,
Depuis que M. Macky Sall a été élu président de la République le 25 mars 2012 et réélu le 26 février 2019, il n’est pas rare de voir des manifestations de l’opposition ou des mouvements citoyens être interdites par le préfet de Dakar sur la base d’un arrêté dit d’Ousmane Ngom et qui prohibe de façon permanente toute manifestation entre l’avenue Malick Sy et le Plateau. Le jour du vote de la loi sur le parrainage le 18 avril 2018, toutes les manifestations sur toute l’étendue du pays ont été interdites dans le seul but de faire passer sans débat contradictoire une forfaiture. Et tous les leaders de l’opposition et autres citoyens ayant osé braver l’interdit préfectoral pour aller manifester légalement devant l’Assemblée nationale contre cette loi scélérate qui compromet leur avenir politique, se sont retrouvés placés en garde-à-vue dans les différents commissariats de Dakar.
Paradoxalement, le candidat Macky Sall était avant 2012 avec ses actuels alliés parmi tous les démocrates épris de justice qui se sont farouchement battus pour la liberté de manifester sans restriction aucune. Une telle interdiction de manifester dans un espace qualifié de névralgique ne peut être que ponctuelle et non permanente. Donc limitée temporellement. Mais avec cet arrêté inique, le droit de manifester qui doit être la règle en République devient une exception pour ne pas dire une impossibilité au Sénégal.
Le respect de l’État de droit implique la restauration de la hiérarchie des normes qui encadrent l’intervention de la puissance publique. C’est pourquoi l’arrêté Ousmane Ngom, contenu dans le bloc réglementaire qui occupe l’avant-dernière strate de la hiérarchie des normes, ne peut nullement transcender notre bloc de constitutionnalité qui se trouve au sommet de la pyramide normative.
Madame la présidente,
Nous attirons votre attention sur le manque de respect systématique des droits fondamentaux des manifestants incarcérés. Le docteur Babacar Diop, enseignant de philosophie l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar, appréhendé lors de la manifestation contre la hausse du prix de l’électricité devant le palais et incarcéré à la prison de Rebeuss, a dénoncé les sévices corporels dont il a été victime le jour de son élargissement. Et le démenti tardif et ambigu de la part de l’administration pénitentiaire nous conforte que le Dr Diop a été passé à tabac sans aménités par ceux-là qui sont garants de son intégrité physique dans l’espace carcéral.
Pourtant, notre pays est signataire du Pacte international des Nations unies relatif aux droits civils et politiques dont l’article 10 stipule que « toute personne privée de sa liberté doit être traitée avec humanité et le respect de la dignité inhérente à la personne humaine ».
Toute cette violence n’a qu’un seul but : museler le peuple face à la volonté du pouvoir d’augmenter le prix de l’électricité et d’exiger la transparence dans la gestion de nos ressources naturelles.
En votre qualité de Haut-commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme, nous vous demandons d’interpeller dans les meilleurs délais l’Etat du Sénégal pour que cessent ces agressions publiques des forces de l’ordre sur ces manifestants inoffensifs et ces violations itératives de l’intégrité physique des manifestants au nom du droit inaliénable de tout peuple à s’exprimer librement et à manifester pacifiquement pour le respect de la Constitution et de la démocratie.
Tout en espérant que vous interpellerez au plus vite les autorités sénégalaises concernées par l’objet de cette missive, je vous prie, Madame le Haut-commissaire, d’agréer l’expression de ma profonde considération.
PS : Toute ressemblance avec une lettre écrite le 1er février 2012 à Mme Navi Pillay, Haut-Commissaire des Nations unies aux droits de l’homme entre 2008 et 2014, par un ancien Premier ministre du Sénégal, ancien président de l’Assemblée nationale du Sénégal et candidat d’une coalition politique à l’élection présidentielle de 2012 n’est que purement fortuite.