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4 mai 2025
International
CONDÉ A-T-IL TRAHI LES DÉMOCRATES AFRICAINS ?
"On s’attendait à ce que lui qui a connu les affres de la dictature, ne le fasse pas. Il est arrivé au pouvoir relativement âgé et Il a dû composer avec le système qu’il a trouvé en place et ce système a fait de lui quelqu’un d’autre"
DW Afrique |
Georges Ibrahim Tounkara |
Publication 17/10/2019
Alpha Condé, dont le deuxième mandat s'achève en octobre 2020, a souvent contesté la pertinence de la limitation du nombre de mandats en Afrique - deux maximum en Guinée. Début septembre, il a chargé son Premier ministre de conduire des consultations sur une possible révision de la Constitution, qui ont été boycottées par les principaux partis d'opposition. Le pays est sous tension.
Alpha Condé est l’opposant historique aux différents pouvoirs qui se sont succédé en Guinée depuis l’indépendance en 1958. L’opposant à Sékou Touré, à Lansana Conté et à Moussa Dadis Camara.
Il a connu l’exil et la prison dans son combat pour une Guinée libre et démocratique. En 2010, quand Alpha Condé accède au pouvoir, les Guinéens espèrent qu'il sera l'homme du renouveau.
Aujourd’hui, avec le débat en cours, l’opposant historique devenu président, trahit les idéaux pour lesquels il s'est battu. C’est du moins ce qu’affirme Boubacar Sanso Barry, éditorialiste au Djély.com : "C’est certainement une trahison. On s’attendait à ce que lui qui a connu les affres de la dictature, qui les a subis, ne le fasse pas. Il est arrivé au pouvoir relativement âgé et Il a dû composer avec le système qu’il a trouvé en place et ce système a fait de lui quelqu’un d’autre."
Alpha Condé comme d'autres présidents
Mathias Hounkpe est politologue et administrateur du programme de gouvernance politique à l’Open society initiative for west Africa (OSIWA). Pour lui, Alpha Condé est en train de détruire l’estime que de nombreux Africains avaient encore pour lui : "Alpha Condé fait partie pour nous de ceux qui ont combattu pendant des décennies pour la démocratie et les droits de l’homme dans nos pays. Et cela nous fait mal de voir que par son silence, il contribue à jeter une sorte d’opprobre sur cet héritage qu’on voudrait bien garder de lui."
Pour Gilles Yabi, analyste politique et président du groupe de réflexion WATHI, Alpha Condé prouve qu’il n’est pas différent de la plupart de ses homologues en Afrique : "Ce ne serait pas la première fois qu’on aurait sur le continent une personnalité qui aurait pris des engagements sur la démocratie et les droits de l’homme et qui à l’exercice du pouvoir, aura montré des variations par rapport à ces principes. A l’exercice du pouvoir, on a vu un Alpha Condé avec un mode de gestion assez autoritaire et des pratiques politiques qu’on a connues auparavant et qu’il dénonçait."
Le président guinéen pourrait s’exprimer dans les jours qui viennent en réponse aux manifestations qui secouent le pays et ont fait au moins six morts.
"NE FAITES PAS L'IDIOT !" : L'INCROYABLE LETTRE DE TRUMP À ERDOGAN
"Ne jouez pas au dur ! Ne faites pas l'idiot !": ce langage fort peu diplomatique est celui employé dans une lettre adressée par le président américain à son homologue turc
"Ne jouez pas au dur ! Ne faites pas l'idiot !": ce langage fort peu diplomatique est celui employé dans une lettre adressée par le président américain Donald Trump à son homologue turc Recep Tayyip Erdogan.
"Trouvons un bon accord", suggère M. Trump dans cette missive de quatre paragraphes dévoilée mercredi mais datée du 9 octobre, dont l'authenticité a été confirmée à l'AFP. Elle a donc été adressée au président turc le jour où il a lancé ses troupes à l'assaut des Kurdes dans le Nord de la Syrie.
"Vous ne souhaitez pas être responsable du massacre de milliers de personnes, et je ne veux pas être responsable de la destruction de l'économie turque --ce que je ferais (si nécessaire)", écrit le président américain.
"L'Histoire vous jugera d'un oeil favorable si vous agissez de façon juste et humaine. Elle vous considérera à jamais comme le diable si les choses se passent mal", met en garde M. Trump sans autre précision.
"Ne jouez pas au dur ! Ne faites pas l'idiot !", conclut le locataire de la Maison Blanche. "Je vous téléphonerai plus tard".
par Achille Mbembe
COMMENT SONT NÉS LES ATELIERS DE LA PENSÉE
L'Europe ne constituait plus le centre de gravité du monde - Il était important pour nous que Dakar, notre capitale intellectuelle et artistique à tous par-delà nos nationalités, porte quelque part le nom de cette initiative, à la manière d'une promesse
La troisième session des Ateliers ouvre bientôt ses portes à Dakar. Ce sera le 30 octobre prochain. Nous nous attendons à une magnifique fête de l'esprit. Vous y êtes toutes et tous invité.e.s.
Beaucoup posent la question de savoir dans quelles circonstances sont nés les Ateliers de la pensée.
Je connaissais les travaux de Felwine et il connaissait les miens. Il m'avait d'ailleurs invité à Saint-Louis à l'époque ou il y enseignait. Nous avions parcouru, à deux reprises, dans sa voiture, la distance qui sépare Dakar de cette ville aux portes de la Mauritanie. Et nous avions mis à profit ce précieux moment pour échanger.
Des années plus tard, je suis frappé par le fait que cette longue conversation fut, en réalité, un long examen de "la situation intellectuelle" de notre Continent.
Un ou deux ans plus tard, nous publiames chacun un ouvrage - lui, AFROTOPIA et moi, POLITIQUES DE L'INIMITIÉ. Considérations à première vue à l'opposé les unes des autres ? C'était sans compter avec le fait que quelques années auparavant, j'avais commis SORTIR DE LA GRANDE NUIT et m'étais essayé à ce que j'appelais l'afropolitanisme.
Une fondation allemande - bien au fait de l'évidente complicité - eut l'excellente idée d'organiser un dialogue autour de ces deux textes. Nous nous consultames et, très vite, nous fimes le même constat. Un dialogue entre nous autour de nos deux livres serait sans doute intéressant. Mais il fallait aller plus loin.
Les défis étaient énormes, auxquels faisaient face l'Afrique et ses diasporas. Dans presque tous les domaines de la vie publique, artistique et du savoir, des individualités faisaient l'expérience de succès personnels sur les scenes internationales. Il fallait cependant faire corps si, véritablement, nous voulions avoir une voix.
Pourquoi ne pas mettre en place une plateforme indépendante qui réunirait à intervalles réguliers la plupart d'entre nous et nous permettrait de frayer de nouveaux chemins pour la pensée ? Les temps n'étaient-ils pas propices ? L'Europe ne constituait plus le centre de gravité du monde. L'heure de la refutation et de l'apologie était terminée. S'ouvrait une nouvelle ère, celle de l'affirmation. D'autres géographies de la pensée critique s'esquissaient à l'échelle planétaire. Sans nous, le monde ne pouvait guère être monde. Pourquoi ne pas assumer ouvertement nos responsabilités ?
Très vite, nous trouvames un nom - les Ateliers de la pensée de Dakar. Il était important pour nous que Dakar, notre capitale intellectuelle et artistique à toutes et a tous par-delà nos nationalités, porte quelque part le nom de cette initiative, à la manière d'une promesse.
Nous convoquames les unes et les autres et la réponse fut unanime. Depuis lors, nous avançons. La tête haute.
A très vite donc, pour le prochain tour à Dakar.
PAR Yoro DIA
LE TROISIÈME MANDAT, UN PARI PASCALIEN À L’ENVERS
Condé a toujours déclaré que modifier la Constitution pour un 3e mandat équivaudrait à trahir ses idéaux. On ne peut que constater qu’entre les délices du pouvoir et les principes qu’il a toujours défendus, son choix est fait
Il y a quelques années dans un pays d’Afrique centrale, j’ai frôlé l’incident diplomatique. Dans ce pays très démocratique, j’avais été désigné au pied levé pour être le discutant d’un ministre sur la limitation des mandats. Dans ce pays, le pouvoir avait décidé de modifier la Constitution pour limiter les mandats à deux.
Quand le Président sortant qui a été au pouvoir pendant deux décennies a fini ces deux mandats, le même pouvoir s’était subitement rendu compte que la limitation des mandats n’était pas très démocratique. Selon l’argumentaire bien huilé de Monsieur le ministre, la limitation n’est pas démocratique, car la souveraineté appartenant au Peuple, pourquoi brider la volonté du Peuple en lui imposant la limitation, car ce même Peuple souverain peut, lors des élections, choisir l’alternance.
Pour mieux étayer son point de vue, Monsieur le ministre choisit les exemples de l’Angleterre (la mère des démocraties) et l’Allemagne, où Angela Merkel en était à son troisième mandat. Naturellement, dans ces pays où la liberté d’expression est très encadrée et où l’on s’attend à ce qu’un intellectuel soit un «intellectuel organique», le ministre s’attendait à ce que je confirme sa thèse. Dans le journalisme, c’est ce que l’on appelle une question orientée. Je répondis au ministre que sa thèse, sur le plan strictement théorique, est presque parfaite, sauf sur un point qui différencie fondamentalement son pays de l’Angleterre et de l’Allemagne qu’il a recrutées comme exemples pour dénoncer le caractère anti démocratique de la limitation des mandats.
La différence fondamentale entre ce pays d’Afrique centrale et l’Angleterre ou l’Allemagne, le Sénégal ou l’Afrique du Sud, est que dans ces pays, l’élection est un mécanisme de remise en jeu du pouvoir, alors que dans la plupart des pays africains, l’élection est un mécanisme de relégitimation du pouvoir en place. Dans la plupart des pays africains, on croit qu’on n’organise pas des élections pour les perdre, ce qui fait que les élections deviennent une simple formalité. Merkel renonce à se présenter parce qu’elle sait qu’avec l’usure du pouvoir, elle va perdre les prochaines élections. En Angleterre, personne ne doute de la sincérité des élections. Ce qui fait que dans ces pays, la souveraineté du Peuple est une réalité, contrairement à l’Afrique ou l’Asie, où la souveraineté du Peuple est une fiction juridique derrière laquelle avance masquée la souveraineté d’un homme qui instrumentalise la Constitution selon ses intérêts du moment. Ce simple argument sur la sincérité des élections fit effondrer comme un château de cartes l’édifice théorique de Monsieur le ministre. Le changement, même à l’intérieur du système comme en Angola ou en Mauritanie, ou l’alternance comme au Sénégal ou en Tunisie, permet à la démocratie de respirer afin de ne pas se fossiliser comme le Cameroun de Paul Biya ou le Zimbabwe sous Mugabe.
Le Sénégal a réglé la question du troisième mandat en congédiant démocratiquement Wade après son forcing légal, parce que dans notre pays, l’élection est un mécanisme de remise en jeu du pouvoir. On ne peut pas dire la même chose de la Guinée de Alpha Condé qui, contrairement au Sénégal, n’est pas encore détribalisée ou des-ethnicisée. Alpha Condé a toujours déclaré que modifier la Constitution pour un 3e mandat équivaudrait à trahir ses principes et les combats pour lesquels il s’est battu toute sa vie. On ne peut que constater qu’entre les délices du pouvoir et les principes qu’il a toujours défendus, son choix est fait. En voulant faire du forcing, le Pr Condé mène un combat anachronique qui l’enferme dans un pari pascalien à l’envers : à tous les coups il va perdre. Après avoir perdu, il pourra, en écrivant ses mémoires, lire tranquillement Montesquieu qui, de façon fort sage, nous dit : «Le pouvoir corrompt, le pouvoir absolu corrompt absolument.» Mais Montesquieu, c’est de la lecture pour opposant. Au pouvoir on préfère le florentin.
AU TCHAD ON ENREGISTRE DÉJÀ 48°C A L'OMBRE
Le sommet "Climate Chance" africain s'ouvre mercredi à Accra, au Ghana. Hindou Oumarou Ibrahim, coordinatrice d'une association de femmes peules au Tchad, dresse les enjeux de ce rassemblement visant à lutter contre le réchauffement climatique.
Le sommet "Climate Chance" africain s'ouvre mercredi à Accra, au Ghana. Hindou Oumarou Ibrahim, coordinatrice d'une association de femmes peules au Tchad, dresse les enjeux de ce rassemblement visant à lutter contre le réchauffement climatique.
Le smmet africain sur le Climat qui s’ouvre mercredi 18 octobre à Accra, au Ghana, est l’occasion pour des organisations non-gouvernementales intervenant sur le continent africain de se réunir pour mettre en lumière l'engagement du continent dans la lutte contre le réchauffement climatique. L’heure est au bilan, après le sommet international des chefs d’État sur le cIimat qui s’est réuni à New York, en septembre. L’heure est aussi aux actions communes pour faire bouger les lignes des politiques et du secteur privé.
C’était lors d’une convention des Nations unies sur le climat. J’avais rejoint un groupe de travail pour donner le point de vue des peuples autochtones. Ce groupe cherchait à impliquer davantage de femmes, de jeunes, parce que nous avons des solutions à apporter, basées sur notre connaissance et notre expérience. C’était le premier pas vers une coordination inter-ONG, hors des États. Et chaque année depuis 2015, des conférences s’organisent, des personnes nous rejoignent. On a fini par créer un réseau d’ONG nommé "Climate Chance".
Que se passe-t-il dans ce type de sommet ?
Je peux rencontrer une organisation qui est complémentaire à la mienne, échanger des expériences, des contacts, cela maximise nos impacts. Nous cherchons à coordonner un message commun, qui interpelle non seulement les gouvernements mais aussi le secteur privé. Ils sont responsables des émissions de CO2 et de nos malheurs ! Surtout dans le Sahel. Si on est beaucoup, on peut faire passer le message : il n’y a pas de business durable sans un environnement durable.
Bien sûr, nous n’avons pas la force de contraindre les gouvernements ou le secteur privé, mais nous pouvons porter la voix des peuples, faire pression. Nous sommes au courant des législations au niveau international, national et régional. Nous rappelons à nos gouvernements que les décisions qu’ils prennent ont des conséquences sur les peuples. Or avec nos moyens de la société civile, nous pouvons changer les vies des communautés, les gouvernements africains sont en mesure de faire bien davantage !
Comment faire bouger un gouvernement comme celui du Tchad ?
Le niveau international est très important. Prenez l’accord de Paris, signé par tous les pays du lac Tchad : Cameroun, Niger, Nigeria et Tchad et même la Centrafrique. La difficulté est maintenant d’obtenir sa transcription dans le droit national. Les engagements politiques ne sont pas assez forts. Ou si les gouvernements commencent à bouger, les financements finissent dans des ateliers et des conférences dans les capitales. Or on a besoin de vraies actions au niveau local, maintenant.
On dit qu’on a 10 ans pour inverser la trajectoire de 1,5 degré. Cette trajectoire a déjà été dépassée chez nous. Au Tchad, on prévoit une augmentation de 4 à 5 degrés ! Or déjà, en saison sèche, on enregistre 48 degrés à l’ombre. C’est déjà invivable, ça le sera d’autant plus. D’où l’importance de prendre des actions sur le terrain maintenant. Les communautés doivent faire valoir leur dignité et leurs droits, pour la restauration de leurs terres.
Sur le terrain, quelles sont les préoccupations ?
Le changement climatique a des conséquences directes sur les ressources naturelles : l’eau, le pâturage et la terre. Les saisons sont en train de changer. Cette saison de pluie est particulièrement imprévisible. Elle devrait être finie, or il a plu hier, et une pluie trop tardive peut inonder les terrains et endommager les récoltes, d’autant qu’elle est suivie ensuite par une grande sécheresse. Nous subissons des pertes de revenu agricole et de l’insécurité alimentaire. Prenez le lac Tchad : les eaux se sont réduites de 90 % en 40 ans. Quand l’eau se retire, les communautés se battent pour accéder aux terres humides et fertiles. Il faut atténuer les conflits.
Dans une crise perpétuelle, climatique, comme autour du lac Tchad, le rôle du gouvernement est primordial. Non seulement le gouvernement du Tchad, mais ceux de tous les pays limitrophes du lac. La vulnérabilité des communautés s’est accentuée, les conflits continuent et des groupes armés sèment la terreur. Dans ma communauté, on est transhumants et transfrontaliers en fonction des saisons, on peut traverser les frontières pour s’installer au Niger, au Nigeria, au Cameroun, et on revient au Tchad. Maintenant, les gens ne peuvent plus traverser au Nigeria ! Et pas même au Cameroun. La Centrafrique, c’est pareil. On reste entre le Niger et le Tchad. Pendant la saison sèche, le bétail broute habituellement dans les petits îlots, maintenant on ne peut plus traverser pour s’y rendre, on redoute les groupes armés. Alors tout le monde reste du côté du Tchad, ce qui fait que les ressources sont insuffisantes et les conflits sont accentués entre les communautés.
Mais il ne faut pas seulement prendre des mesures sécuritaires et militaires au niveau du G7 Sahel ! Ce n’est pas une kalachnikov qui va remplir le ventre des gens et répartir les ressources naturelles. Il faut écouter les communautés et leurs besoins. Or le problème aujourd’hui est la législation tchadienne sur la répartition des terres. L’accès au foncier est très difficile pour des individus qui ne peuvent pas acheter des terres parce qu’ils ne sont pas assez riches. Des militaires accaparent les terres autour du lac : les généraux, les colonels, les ministres peuvent acheter des terres qui devraient revenir aux communautés. La décision politique devrait redonner aux communautés leur droit sur les terres, pour assurer leur survie.
"LE PEUPLE GUINÉEN A TROP SOUFFERT..."
Abdoulaye Bathily demande à Alpha Condé le retrait du projet de nouvelle Constitution en faveur d'une concertation nationale
SenePlus publie ci-dessous, l'intégralité du message que le professeur Abdoulaye Bathily, ancien conseiller spécial de l’ONU à Madagascar a envoyé par Whatsapp ce mardi 16 octobre 2019 au président guinéen Alpha Condé. Abdoulaye Bathily répondait ainsi à un message que lui avait transmis Alpha Condé sur la tension politique en cours à Conakry
MESSAGE ENVOYÉ PAR ALPHA CONDÉ : "La transition démocratique, est un processus qui consiste de passer d'un pouvoir non-démocratique (dictature comme le Cameroun) à un pouvoir démocratique (comme la République de Guinée).
En d'autre terme, de la transition à la démocratie. Donc la transition démocratique dans un pouvoir démocratique comme le nôtre, est un processus par lequel le pouvoir politique, par la voie démocratique doit achever le reste de la transition pour une démocratie participative. C'est à dire d'une démocratique partielle à une démocratie totale et sans ambiguïté.
Dans le contexte actuel de la République de Guinée, jusque-là, nous n'avons pas définitivement enterrés le processus de la transition, tant que nous fonctionnons sur la base d'un seul élément de la transition, celui de la Constitution d'un pouvoir militaire à une période donnée de la transition.
La transition démocratique en Guinée est un processus qui consiste de passer d'une constitution issue de la transition à une nouvelle Constitution votée par le peuple. C'est de ça qu’il s'agit, c'est-à-dire de la transition à la démocratie. Ceux qui comprennent autrement, dans la mesure où nous sommes dans un pouvoir démocratique, sont affectés par la naïveté politique.
La question de la nouvelle Constitution en Guinée n'est pas une aspiration politique, mais plutôt une vocation citoyenne au-delà des calcules politiques. En aucun cas, les États-Unis ne pourront dire à la Guinée de ne pas se doter d'une nouvelle Constitution légale et légitime.
Allons Au Référendum..."
RÉPONSE D'ABDOULAYE BATHILY : "Le peuple de Guinée a trop souffert, trop de sang, de larmes, de déplacements forcés, trop de citoyens ont subi un séjour carcéral pour des raisons politiques qui auraient dû être évitées depuis toujours.
Cette tragédie, vous pouvez y mettre un terme aujourd’hui même en annonçant le retrait de ce projet de nouvelle Constitution en faveur d'une concertation nationale sur la base d'un engagement solennel à ne pas briguer un troisième mandat.
Une telle décision vous grandirait, vous donnerait une place exceptionnelle dans l'histoire de la Guinée martyre.
L'Afrique vous serait reconnaissante en cette période particulièrement décisive pour l'avenir de nos peuples pour lesquels vous, nous et d'autres camarades, se sont engagés depuis plus de cinq décennies.
C'est à mon avis la meilleure voie pour une transition apaisée et durable.
Sentiments fraternels renouvelés. »
MAIS OÙ VA LA GUINÉE ?
Alors que le pays compte encore ses morts après les premières manifestations contre un éventuel troisième mandat d'Alpha Condé, les pistes de sortie de crise politique se font rares
Le Point Afrique |
Viviane Forson |
Publication 15/10/2019
La Guinée semble s'enfoncer dans l'instabilité. Au moins cinq manifestants et un gendarme ont été tués lundi dans des heurts entre les forces de sécurité massivement déployées dans la capitale Conakry et des milliers d'opposants à un éventuel troisième mandat de l'actuel président Alpha Condé, rapporte l'AFP dans un dernier bilan. Alors que le pays compte encore ses morts, les sources surgissent de toutes parts, rendant difficile le travail de vérification des chiffres tant les images et les vidéos circulent rapidement de plusieurs endroits à l'intérieur du pays et à l'extérieur aussi.
Appel à manifester
Ce que l'on sait, c'est que des milliers de Guinéens sont descendus dans les rues lundi et mardi à l'appel d'un collectif d'opposition et de la société civile. D'après de nombreux témoignages publiés sur les réseaux sociaux ou les médias, des violences ont émaillé les différents cortèges. L'Agence France-Presse relate que « des centaines de jeunes très mobiles ont érigé des barricades, brûlé des pneus et lancé des pierres sur les policiers et gendarmes à nouveau massivement déployés à Cosa, Koloma ou encore Bambéto, quartiers périphériques de la capitale et fiefs de l'opposition ». Ajoutant que le bilan « des heurts s'est encore alourdi, passant à cinq manifestants tués après la mort d'un chauffeur de 27 ans, atteint par balle à l'abdomen, selon le médecin qui l'a traité et son père ». Les autorités ont fait état, elles, de deux morts, dont un gendarme.
En effet, le gouvernement avait prévenu qu'il ne céderait « pas le moindre centimètre carré au règne de l'anarchie ». Le ministre de l'Intérieur, le général Bouréma Condé, a indiqué que la mobilisation s'était limitée à « quelques regroupements et échauffourées ». Plusieurs personnes ont été arrêtées et « les forces de l'ordre maîtrisent globalement la situation », a-t-il dit dans un communiqué. Et pourtant c'est une tout autre histoire que racontent plusieurs Guinéens.
« Comme d'habitude, des forces de sécurité ont débarqué à Conakry en partance de Kindia pour aller réprimer les manifestants à Conakry, plus particulièrement dans la banlieue de la commune de Ratoma, Hambdallaye, Bambéto, Cosa, Sonfonia, etc. Il faut également souligner que les acteurs politiques sont confinés chez eux par la police et la gendarmerie ; des acteurs de la société civile (membre du Front national pour la défense de la Constitution (FNDC), dont Abdourahmane Sano (coordinateur de la PCUD et du FNDC) ; Sékou Koundouno (coordinateur du Balai Citoyen), Alpha Soumah (Bill de Sam, membre de l'UFR), Ibrahima Diallo, Badra Koné (2e vice-maire de la commune de Matam, Malal Diallo (l'un des responsables du mouvement politique MoDeL, Élie Kamano (artiste) ont été arrêtés manu militari dans leurs domiciles pour certains, et d'autres lors des manifestations. Tout cela, sans compter les jeunes manifestants arrêtés à Conakry et à l'intérieur du pays », explique au Point Afrique Bah Oumar Rafiou, un agent administratif membre actif de la société civile actuellement basé en Belgique. Photos et vidéos reçues depuis son pays d'origine, ce dernier a confié que les Guinéens se préparaient depuis un long moment à de telles actions.
« Lors de son dernier séjour aux États-Unis, le chef de l'État, Alpha Condé, avait exprimé sa volonté de changer la Constitution en appelant ses militants à se préparer pour le référendum et les législatives, alors qu'il avait instruit son Premier ministre à mener des consultations afin de donner l'opportunité aux acteurs politiques, organisations de la société civile et syndicats d'exprimer leurs avis sur la Constitution », poursuit-il. « Mais les principaux acteurs politiques ont refusé de participer parce qu'ils estiment que c'est légitimer un projet qu'ils considèrent être une farce », conclut-il.
Éventuel troisième mandat
En effet, la tension n'a cessé de monter depuis l'appel à la manifestation lancé il y a une semaine par le Front national pour la défense de la Constitution (FNDC). Cette coalition rassemblant des partis d'opposition, des syndicats et des membres de la société civile s'oppose résolument à une révision de la Constitution évoquée par le pouvoir. Elle permettrait à Alpha Condé de se présenter pour un troisième mandat, alors que la Constitution en limite le nombre à deux.
L'opposition s'attend à ce qu'il officialise bientôt la tenue d'un référendum constitutionnel. Elle dénonce un projet de coup d'État institutionnel et la dérive « dictatoriale » de celui qui fut lui-même un opposant historique ayant connu la prison pour son engagement contre différents régimes autoritaires, avant de devenir le premier président démocratiquement élu de cette ex-colonie française d'Afrique de l'Ouest.
Le point de départ de ces mobilisations ? L'appel du président Alpha Condé à devoir réécrire la Constitution actuelle après des consultations générales. Mais pas seulement. Le contexte est très complexe, puisque l'article 27 de la Constitution guinéenne indique que « la durée du mandat présidentiel est de cinq ans, renouvelable une fois. En aucun cas, nul ne peut exercer plus de deux mandats présidentiels, consécutifs ou non. » Seulement, Alpha Condé, élu une première fois en 2010 puis réélu en 2015, achèvera son deuxième et dernier mandat en 2020. Il lui est impossible de modifier l'article 27 en cas de révision constitutionnelle, car « le nombre et la durée des mandats du président ne peuvent faire l'objet d'une révision » (article 154). Reste alors, pour le dirigeant guinéen, la possibilité de réécrire une nouvelle Constitution ensuite, de faire accepter ce projet par le Conseil constitutionnel, en passant par l'avis consultatif des députés, puis d'organiser un référendum afin que le peuple valide le texte.
Un contexte explosif
Plusieurs facteurs expliquent la dégradation de la situation en Guinée : d'une part, malgré une amélioration par rapport aux sombres régimes précédents, des dizaines de manifestants ont été abattus par les forces de sécurité depuis l'accession du président Alpha Condé à la présidence en 2010. Plusieurs policiers et gendarmes ont été tués par des manifestants. Depuis plus d'un an, le gouvernement interdit de fait les manifestations de rue, dit l'ONG Human Rights Watch. « Étant donné leur bilan désastreux [en termes de respect des libertés, NDLR], les autorités doivent prendre des mesures immédiates pour briser le cycle de la violence avant qu'il n'échappe à tout contrôle », a dit Amnesty International dans un communiqué.
D'autre part, le niveau de vie de la population ne s'est pas amélioré depuis 2010. Malgré les revenus tirés de ses minerais (notamment de la bauxite, mais aussi de l'or, du diamant ou du fer), la Guinée reste un pays pauvre, classé 182e sur 188 sur l'échelle du développement humain du Programme des Nations unies pour le développement (Pnud). Après les espoirs suscités en 1984 par le décès de Sekou Touré, héros de l'indépendance nationale devenu dictateur, l'essor économique ne concerne que des secteurs très limités. Tandis qu'une minorité, gravitant autour du pouvoir, s'enrichit, la majorité des habitants a de plus en plus de mal à vivre.
Vives réactions
Parmi les réactions à l'international, celle du secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres, qui « suit la situation avec une inquiétude grandissante », selon son porte-parole Stéphane Dujarric à New York. Il exhorte tous les acteurs au dialogue et appelle les forces de sécurité à une « retenue maximale ».
Afin de trouver une issue à la crise, le président de la République s'est adressé aux Guinéens à travers un communiqué dans lequel il appelle à l'apaisement, regrette aussi le manque de dialogue avec toutes les parties. Il avance aussi quelques pistes pour rétablir la confiance de l'opposition. Il a notamment proposé de revoir le chronogramme des élections législatives promises pour la fin décembre 2019 – et qui pourraient être reportées afin d'être plus inclusives. Enfin, hier, lundi, le directeur général de la police judiciaire a été limogé de ses fonctions.
TEXTE COLLECTIF
JUSQU'OÙ LAISSERONS-NOUS PASSER LA HAINE DES MUSULMANS ?
90 personnalités, parmi lesquelles Omar Sy, Céline Sciamma ou Christine Delphy, demandent à Emmanuel Macron, dans une tribune au « Monde », de condamner l’agression d’une accompagnatrice scolaire voilée
Le Monde |
Texte Collectif |
Publication 15/10/2019
L’image a fait le tour des réseaux sociaux : celle d’une femme réconfortant dans ses bras son propre fils, en pleine assemblée plénière du conseil régional de Bourgogne-Franche-Comté, à Dijon, après son agression verbale par un élu d’extrême droite. Si l’image nous révolte tant, c’est parce que nous en sommes tous collectivement responsables.
Ce vendredi 11 octobre, Julien Odoul, président du groupe d’extrême droite Rassemblement national, s’en est pris violemment en public à cette dame en s’adressant à la présidente de région, la socialiste Marie-Guite Dufay. « Madame la Présidente, je vais vous demander, s’il vous plaît, au nom de nos principes laïcs, de bien vouloir demander à l’accompagnatrice qui vient d’entrer dans cette salle de bien vouloir retirer son voile islamique. Nous sommes dans un bâtiment public, nous sommes dans une enceinte démocratique. Madame a tout le loisir de garder son voile chez elle, dans la rue, mais pas ici, pas aujourd’hui. (…) C’est la République, c’est la laïcité. C’est la loi de la République, pas de signe ostentatoire.(…) C’est une provocation insupportable, la vigilance citoyenne, c’est aussi ça, madame la Présidente. » Juste avant de quitter l’assemblée comme il avait menacé de le faire, l’élu d’extrême droite a lancé : « On ne peut pas débuter la session par une minute de silence pour les victimes de la Préfecture de police et accepter ça. »
Disons-le d’emblée, comme l’a fait savoir, en pleine séance, la présidente du conseil régional : rien, ni dans le règlement ni dans la loi, ne justifiait que cette femme soit poussée vers la sortie de l’assemblée régionale. Elle avait tout à fait le droit d’y être, vêtue de son foulard. Cette scène, ces mots, ce comportement sont d’une violence et d’une haine inouïes. Mais par notre lâcheté, par nos renoncements, nous avons contribué, petit à petit, à les laisser passer, à les accepter.
Ils sont d’une violence et d’une haine inouïes pour tous ces enfants de CM2, âgés d’à peine 10 ans, venus assister à cette assemblée plénière de rentrée du conseil régional dans le cadre de l’opération Ma République et moi. Objectif de la démarche : initier les enfants à la vie publique.
Ils sont d’une violence et d’une haine inouïes pour ces instituteurs, soucieux, dans un souci de transmission du savoir, de donner à voir à leurs élèves l’illustration de l’exercice du débat démocratique. Quel fiasco...
Ils le sont encore plus pour le fils de cette femme, qui a assisté, impuissant, à l’humilia tion de sa propre mère. Devant la haine de l’at taque, il n’a pu s’empêcher d’éclater en san glots dans ses bras, avant de quitter l’assemblée. Qui se soucie du mal qu’il a subi? Qui se préoccupe du traumatisme que peut représen ter une telle agression dans la tête d’un gamin d’à peine 10 ans? Quelles seront les conséquences d’une telle humiliation publique si ce n’est renvoyer à cet enfant qu’il demeure un citoyen de seconde zone, indigne d’être pleinement français et reconnu comme tel ?
Mais ils sont surtout d’une violence et d’une haine inouïes pour cette femme, victime d’un amalgame inacceptable associant la pratique de sa religion à l’attentat de la Préfecture de police de Paris. Une femme publiquement piétinée, chosifiée, déshumanisée, devant le groupe d’en fants qu’elle accompagnait bénévolement. Comme si elle pouvait être écrasée, bafouée dans sa dignité, sans que cela ne suscite la moin dre indignation collective digne de ce nom. C’est pourtant ce qu’il s’est produit.
Certes, quelques élus, des personnalités, des anonymes aussi ont usé de leur voix sur les canaux de leurs réseaux sociaux pour dire leur colère, mais où est l’indignation générale ? Où sont les émissions de télévision, de radio, hormis quelques billets et tribunes comme celleci pour condamner cette agression ? Où est la pa role publique de premier niveau, celle de nos élus, des partis politiques, celle des ministres, celle du président de la République pour refuser l’inacceptable ?
UNE LAÏCITÉ DÉVOYÉE
De fait, l’émotion légitime qui devrait s’exprimer dans l’opinion est aux abonnés absents : trop nombreux sont ceux qui se disent : « Elle l’a bien cherché », « Nous ne sommes plus chez nous », ou qui légitiment les stigmatisations en vers les musulmans au nom de la lutte contre la radicalisation et le terrorisme. N’est-ce pas le ministre de l’intérieur lui-même, Christophe Castaner, qui a listé à l’Assemblée nationale « la pratique régulière et ostentatoire de la prière » et «la pratique exacerbée de la religion en période de ramadan » comme autant de « signes de radi calisation » à signaler, alors qu’il ne s’agit ni plus ni moins que de conduites religieuses tout à fait banales chez les musulmans pratiquants ?
Ne nous y trompons donc pas. L’extrême droite a fait de la haine contre les musulmans un outil majeur de sa propagande, mais elle n’en a pas le monopole. Des membres de la droite et de la gauche dites républicaines n’hésitent pas à stigmatiser les musulmans, et en premier lieu les femmes portant le voile, souvent « au nom de la laïcité ». Le ministre de l’éducation nationale, Jean Michel Blanquer, voit ainsi dans le port du foulard par des mères d’élèves accompagnant bénévolement des sorties sco laires, en soutien des équipes enseignantes, du « prosélytisme » et du « communautarisme ». In terrogé par BFMTV sur l’agression de la mère d’élève à Dijon par l’élu RN Julien Odoul, le ministre a certes condamné son comportement, mais a tout de même affirmé : « Le voile n’est pas souhaitable dans notre société.» N’est-ce pas ici l’illustration même d’une stigmatisation assumée jusqu’au plus haut niveau de l’Etat ?
La laïcité, consacrée par la loi de 1905, c’est certes la séparation de l’Etat et du religieux, mais c’est aussi la liberté de croire ou de ne pas croire, la liberté d’exercer sa foi ou de ne pas l’exercer, la liberté de manifester ses convictions dans les limites du respect de l’ordre public. Malgré les nombreuses alertes des associations et des militants, malgré le travail de déconstruction des universitaires, nous avons trop longtemps laissé la voie libre aux interpré tations dévoyées du principe de laïcité, semant la division et la haine. Cette femme et son fils en payent le prix aujourd’hui, comme d’autres avant eux, mais qu’en seratil demain ?
Jusqu’où laisserons-nous passer ces haines ? Des plateaux télé dans leur course au buzz et à l’audience permanente, de nos rangs d’élus et de décideurs avides de gains électoraux, sans parler de nos sphères privées elles aussi imprégnées d’intolérances, jusqu’à quand allons-nous ac cepter que des citoyennes, des citoyens soient insultés, agressés, attaqués, stigmatisés en raison de leur religion ? Jusqu’à quand allons-nous accepter que la laïcité, socle de notre République, soit instrumentalisée pour le compte d’une vision ségrégationniste, raciste, xénophobe, mortifère de notre société ? Acceptons-nous de nous laisser sombrer collectivement ou disons-nous stop maintenant, tant qu’il est encore temps ?
Hier, Latifa Ibn Ziaten, mère du militaire Imad Ibn Ziaten, victime des attentats de Mohamed Merah, huée lors d’un colloque à l’Assemblée nationale en raison de son foulard ; hier encore, une femme de 24 ans, portant elle aussi un foulard, poignardée devant son conjoint et leurs enfants à SuryleComtal (Loire). Aujourd’hui, cette femme humiliée dans une assemblée de la République française. Aujourd’hui encore, l’université de Cergy Pontoise qui demande à son personnel de lui faire remonter les «signaux faibles » de détection de radicalisation d’étudiants ou de collègues, ciblant uniquement les personnes de confession musulmane.
Parmi ces signaux: «l’arrêt de consommation de boissons alcoolisées », « l’arrêt d’utilisation des réseaux sociaux », « le port de la barbe sans moustache » ou encore « l’intérêt soudain pour l’actualité nationale et internationale »... Depuis, l’université a dit regretter « d’avoir pu heurter ou choquer », mais le mal est de nouveau fait. Et des questions demeurent : qui est à l’initiative de ce procédé infâme et gravissime ? A quand une en quête ? Est-ce donc cela « la société de la vigi lance » qu’appelle de ses vœux le président de la République : un fichage et des dénonciations de personnes de confession musulmane au sein d’une institution publique française ?
CESSER LES AMALGAMES
Jusqu’où pouvonsnous tolérer encore ces dis cours et actes de haine contre une partie de nos concitoyens ? Que laisserons-nous passer de main ? Qu’expliquerons-nous à nos enfants lorsque, dans quelques années, ils nous deman deront, à juste titre : « Qu’aviezvous fait ? »
Nous, personnalités d’horizons divers, unies par la devise de notre République, «liberté, égalité, fraternité», attachées au principe de laïcité tel qu’inscrit dans la loi, demandons urgemment au gouvernement français et au président de la République, Emmanuel Macron, de condamner publiquement l’agression dont cette femme a été victime devant son propre fils ; de dire, avec force, que les femmes musulmanes, portant le foulard ou non, et les musulmans en général ont toute leur place dans notre société ; de refuser que nos concitoyens musulmans soient fichés, stigmatisés, dénoncés pour la simple pratique de leur religion et d’exiger solennellement que ces sent les discriminations et les amalgames envers une partie de notre communauté nationale. Il en va de l’avenir de notre pays.
Leïla Alaouf, journaliste; Zahra Ali, sociologue ; Sarah Al-Matary, maîtresse de conférences en littérature française ; Hakim et Mustapha Amokrane, artistes membres du groupe Zebda ; Salah Amokrane, responsable associatif ; Rebecca Amsellem, fondatrice de la newsletter « Les Glorieuses » ; Chadia Arab, géographe, chercheuse au CNRS ; Meziane Azaïche, directeur du Cabaret sauvage; Pénélope Bagieu, dessinatrice; Béatrice Barbusse, sociologue ; Lauren Bastide, journaliste et productrice; Julie Billy, productrice; Isabelle Boni-Claverie, réalisatrice et scénariste ; Yassine Bouzrou, avocat; Samira Brahmia, chanteuse et comédienne ; Isabelle Cambourakis, éditrice et enseignante ; Casey, artiste ; Samia Chabani, responsable associative; Amelle Chahbi, comédienne, réalisatrice ; Chadia Chaibi-Loueslati, dessinatrice; Hugues Charbonneau, producteur; Aya Cissoko, auteure, triple championne du monde de boxe ; Laurence De Cock, historienne; Christine Delphy, sociologue et directrice de recherches CNRS ; Vikash Dhorasoo, ancien footballeur, ambassadeur d’Oxfam ; Rokhaya Diallo, journaliste et réalisatrice ; Karima Dirèche, historienne, directrice de recherche au CNRS ; DJ Snake, artiste ; Nassira El Moaddem, journaliste; Jules Falquet, sociologue, féministe ; Eric Fassin, sociologue, professeur à l’université Paris-8; Marina Foïs, actrice; Sébastien Fontenelle, journaliste; Geneviève Garrigos, défenseure des droits humains ; Florence Gastaud, productrice; Amandine Gay, réalisatrice; Sébastien-Abdelhamid Godelu, journaliste, animateur TV ; Alain Gresh, journaliste ; Faïza Guène, autrice; Nora Hamadi, journaliste; Nadia Hathroubi-Safsaf, rédactrice en chef du « Courrier de l’Atlas », auteure, élue locale ;Jérôme Jarre, influenceur humanitaire ; Marion Jobert, juriste ; Georgi Joseph, basketteur professionnel; Léopold Lambert, rédacteur en chef de « The Funambulist » ; Laurence Lascary, productrice; Michel Leclerc, réalisateur ; Titiou Lecoq, journaliste et autrice; Gwenaëlle Lenoir, journaliste; Matthieu Longatte, humoriste; Baya Kasmi, scénariste, réalisatrice ; Raphaël Kempf, avocat; Kyan Khojandi, auteur; Sofia Manseri, conseillère municipale d’Aubervilliers (Seine-Saint-Denis) ; Tonie Marshall, réalisatrice, productrice ; Madjid Messaoudene, élu de Saint- Denis; Guillaume Meurice, humoriste; Marwan Mohammed, sociologue; Rosa Moussaoui, grand reporter à «L’Humanité»; Ron Mvouika, basketteur professionnel; Géraldine Nakache, actrice et réalisatrice ; Nekfeu, artiste ; Judith Nora, productrice; Danièle Obono, députée (La France insoumise) ; Océan, auteur et comédien ; Ugo Palheta, sociologue; Cyril Pedrosa, auteur; Mabrouck Rachedi, écrivain; Elisa Rojas, avocate; Marina Rollman, humoriste; Aurélie Saada, chanteuse; Eros Sana, militant des quartiers populaires ; Céline Sciamma, réalisatrice, scénariste; Fabienne Servan-Schreiber, productrice; Patrick Simon, sociodémographe à l’INED ; Maboula Soumahoro, enseignante-chercheuse à l’université de Tours ; John Sulo, animateur TV ; Hélène Sy, présidente de l’association Cekedubonheur; Omar Sy, acteur; Amara Sy, basketteur professionnel ; Syra Sylla, journaliste sportive ; Ilhame Taoufiqi, grand reporter TV5 Monde ; Sylvie Tissot, sociologue, université Paris-8 ; Aïda Touihri, journaliste et productrice ; Shahin Vallée, économiste; Naïma Yahi, historienne; Raphäl Yem, animateur TV ; Camille Zabka, autrice ; Rébecca Zlotowski, réalisatrice.
par Tierno Monénembo
QUE L'ON M'ARRÊTE AUSSI !
C’est la panique à bord du paquebot Alpha Condé. La funeste idée du troisième mandat ne passe pas. La colère du peuple fait trembler les laquais. Alors, on gesticule, on réprime à tout va. On sent les derniers soubresauts d’un régime policier aux abois
Vision Guinnée Info |
Tierno Monénembo |
Publication 15/10/2019
L’arrestation de Abdourahamane Sano, et des autres dirigeants du FNDC est arbitraire. C’est un acte délibéré d’abus de pouvoir. C’est aussi une maladresse politique d’un infantilisme alarmant.
Décidément, c’est la panique à bord du paquebot Alpha Condé. La funeste idée du troisième mandat ne passe pas. La colère du peuple gronde. Elle fait trembler les laquais. Elle ébranle les certitudes du chef. Alors, on gesticule, on crie, on accuse à tort et à travers, on réprime à tout va. On sent les derniers soubresauts d’un régime policier aux abois.
Mais cette cruelle injustice, cette offense au droit, ce crime contre la démocratie, je ne me contenterai pas de la condamner. Je ne me contenterai pas de m’indigner. Je ne me contenterai pas de protester. J’écris ces mots pour réaffirmer mon adhésion totale aux idéaux, aux principes et aux causes que défend le FNC. Je suis membre à part entière du FNDC. J’ai adhéré à ce mouvement librement au vu et au su de tout le monde. Cela veut dire que je suis partie prenante de ses faits et gestes, de ses paroles et de ses actes.
En particulier, je fais mienne sa toute récente déclaration que je trouve patriotique et hautement salutaire. Oui, ce régime est un régime de barbares, un régime de brigands, un régime de satrapes qui veut détourner la loi, qui veut escroquer un troisième mandat pour continuer à piller les richesses du pays pour ses intérêts personnels, mais aussi et surtout pour les intérêts de ses maîtres étrangers.
Si Abdourahamane Sano et les autres ont commis un délit, eh bien, c’est que j’ai commis le même délit. S’ils ont commis un crime, j’aurai alors commis le même crime. S’ils méritent la prison, je mérite la même cellule qu’eux. S’ils méritent la mort, je mérite la même potence, le même gibet, le même bucher qu’eux.
Alors, trêve de tergiversations, que l’on vienne m’arrêter aussi !
LA GUINÉE TOUJOURS SOUS TENSION
De nouveaux heurts ont opposé des centaines de manifestants et les forces de l'ordre guinéennes à Conakry mardi, au deuxième jour de manifestations contre un éventuel troisième mandat du président Alpha Condé
De nouveaux heurts ont opposé des centaines de manifestants et les forces de l'ordre guinéennes à Conakry mardi, au deuxième jour de manifestations contre un éventuel troisième mandat du président Alpha Condé. Les affrontements de lundi auraient fait entre deux et cinq victimes, selon les sources. Le président guinéen déplore « la rupture du dialogue ».
Des centaines de jeunes très mobiles ont érigé des barricades, brûlé des pneus et lancé des pierres sur les policiers et gendarmes à nouveau massivement déployés à Cosa, Koloma ou encore Bambéto, quartiers périphériques de la capitale et fiefs de l’opposition, selon un journaliste correspondant de l’Agence France-Presse et des témoins présents sur place.
Les forces de l’ordre ont riposté par des tirs de lacrymogènes. Des habitants ont fait état d’irruptions de soldats et de policiers dans certains quartiers pour procéder à des arrestations accompagnées de violences.
Par ailleurs, le bilan des heurts de lundi s’est alourdi, passant à cinq manifestants tués après la mort d’un chauffeur de 27 ans, atteint par balle à l’abdomen, selon le médecin qui l’a traité et son père. Les autorités ont fait état, elles, de deux morts, dont un gendarme.
Le FNDC maintient ses appels
Les tensions en Guinée n’ont cessé d’augmenter depuis que le Front national pour la défense de la Constitution (FNDC), coalition de partis d’opposition, de syndicats et de membres de la société civile, a appelé les Guinéens la semaine dernière à manifester contre le projet prêté au président sortant de briguer sa propre succession à la fin de son deuxième mandat en octobre 2020.
Malgré l’arrestation de ses responsables et les violences meurtrières de lundi, le FNDC a appelé sur les réseaux sociaux à continuer à manifester « jusqu’à l’abandon total du projet de troisième mandat et l’arrêt de la mascarade électorale visant à octroyer au parti présidentiel la majorité nécessaire à l’adoption d’une nouvelle Constitution ».
Dans un communiqué, le FNDC assure que son appel à la mobilisation a été très largement suivi lundi et a provoqué une « paralysie totale » des activités sur tout le territoire. Il dénonce « la répression sanglante » de la contestation, les « dérives autoritaires » du pouvoir et réclame la libération de ses dirigeants arrêtés depuis samedi. Il accuse par ailleurs le gouvernement de préparer la dissolution, « dans les jours à venir, de toutes les organisations de la société civile » opposées à un changement de la Constitution.
Alpha Condé regrette « la rupture du dialogue »
Dans un communiqué diffusé lundi soir par les services de la présidence, Alpha Condé a regretté « la rupture du dialogue entre les acteurs » et affirmé son « engagement total pour la démocratie ainsi que par le souci constant du bien-être de ses compatriotes qui, de tout temps, aspirent à la paix pour eux-mêmes et leur pays dont la sécurité et la stabilité demeurent l’affaire de tous ».
Et s’il « a insisté sur le libre exercice des droits et des libertés reconnus à tous les citoyens , comme le droit de manifester », le texte réaffirme également que la mobilisation est illégale. Le président guinéen a « rappelé la pratique en la matière : l’information et l’implication des autorités concernées pour qu’en accord avec les organisateurs, un itinéraire soit défini, des mesures de sécurité appropriées soient prises pour encadrer les manifestations, sécuriser les manifestants, afin d’éviter aussi tout débordement, tout acte de violence, toute atteinte aux droits et à la liberté d’autrui. »
Alpha Condé fera connaître « le moment venu », dans un discours solennel, les conséquences qu’il tire des consultations sur la Constitution qu’il a confiées en septembre au gouvernement, a précisé la présidence.