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29 avril 2025
International
MURIEL PENICAUD RÉUSSIT L'HOMMAGE À TONI MORISSON LE PLUS INSULTANT DE L'HISTOIRE
Dans son hommage à Toni Morrison, la ministre française du Travail a considéré que l'écrivaine avait permis aux Noirs "d'entrer par la grande porte dans la littérature". Donnant le sentiment de faire fi de toute une lignée de grands auteurs noirs
Aimé Césaire et Léopold Sedar Senghor se retournent dans leurs tombes. Ce mercredi 7 août, la ministre du Travail, Muriel Pénicaud, a tenté de rendre hommage à l'écrivaine Toni Morrison, lauréate du prix Pulitzer en 1988 et du prix Nobel de littérature en 1993 décédée mardi 6 août. Pour l'occasion, l'ancienne DRH de Danone s'est fendue de ce tweet, aux relents de paternalisme colonial : "Hommage à une très grande dame, écrivaine, poète et militante, Toni Morrison. Grâce à elle, les noirs ont enfin pu entrer par la grande porte dans la littérature. Les mots réveillent les consciences et les coeurs, ils font reculer le racisme et la haine. Les mots ont un pouvoir."
La ministre a supprimé ce premier tweet, avant d'en republier cet après-midi une version expurgée de son analyse, au mieux très maladroite, selon laquelle les Noirs seraient "entrés dans la grande porte dans la littérature" avec Toni Morrison. Un commentaire qui peut rappeler la sortie de Nicolas Sarkozy à Dakar en en juillet 2007, lorsque le président de la République fraichement élu avait déclaré, dans un discours rédigé par son conseiller Henri Guaino, que le "l'homme africain n'[était] pas assez entré dans l'histoire".
L'ultime essai de l'écrivaine américaine Toni Morrison, The Source of Self-Regard, paraîtra en français le 3 octobre sous le titre La source de l'amour-propre, a annoncé mercredi son éditeur.
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UNE SÉNÉGALAISE RETROUVÉE MORTE A SON DOMICILE
Le corps sans vie de Bineta Sagna a été retrouvé ce mardi 06 août 2019, à son domicile établi à Bruxelles en Belgique, d’après une information d’un membre de la famille
Le corps sans vie de Bineta Sagna a été retrouvé ce mardi 06 août 2019, à son domicile établi à Bruxelles en Belgique, d’après une information d’un membre de la famille reprise par Brussels Information Press.
Les circonstances du décès ne sont pas encore élucidées à ce stade. Mieux, il faudra, toujours selon la même source, attendre les résultats de l’enquête ouverte par la police qui a été informée par un proche de la victime.
Bineta Sagna était la fondatrice et présidente de l’Agence de relations publiques Media et Communication la Sénégauloise. D’origine Sénégalaise, née en France, elle avait été classée, en 2017, parmi les leaders qui faisaient l’Afrique par le Tropics Magazine de Johannesburg.
Bineta Sagna était aussi présente dans l’organisation de la soirée « Rire contre le racisme » en septembre 2015 à Bruxelles. Militante féministe, elle refusait le « rôle » que certains hommes imposent aux femmes : « Soyez des femmes non-conventionnelles qui se jouent du poids des stéréotypes et embrassent des professions soi-disant dites masculines ».
Après des études universitaires en droit et en commerce, Binta Sagna fonde son agence de communication : une agence de Consulting qui s’occupe de la mise en place de projets et de leur médiatisation. Avec celle-ci, elle réussit la création d’un puissant réseau de femmes africaines qui gèrent des projets et événements d’envergure internationale.
"LES AMÉRICAINS ONT LE SENTIMENT QUE LA RACE BLANCHE EST MENACÉE"
Accusé d’attiser la haine raciale, Trump s’est rendu mercredi à El Paso et à Dayton, théâtres de tueries ce week-end. Selon le démographe Hervé Le Bras, le racisme reste ancré dans la culture américaine
«Notre nation doit condamner d’une seule voix le racisme, le sectarisme et le suprématisme blanc», a déclaré lundi Donald Trump. Deux jours plus tôt, un homme de 21 ans tuait 22 personnes dans un centre commercial d’El Paso, ville à la frontière mexicaine. Avant de passer à l’acte, il avait publié sur le forum 8Chanun manifeste dans lequel il dénonçait l’«invasion» hispanique du Texas et embrassait la théorie du «grand remplacement» de l’extrémiste Renaud Camus.
Après les attaques à Charleston (2015), Pittsburgh (2018) et San Diego (avril), les Etats-Unis sont donc de nouveau confrontés aux violences d’extrême droite. Selon le centre d’analyse New America, ces dernières ont fait plus de victimes en 2017 et 2018 aux Etats-Unis que les attaques jihadistes. Pour Hervé Le Bras, chercheur émérite à l’Institut national d’études démographiques (Ined), le racisme, que Trump est accusé d’alimenter, reste profondément ancré dans la société américaine.
Comment expliquer que la théorie du «grand remplacement» se propage aux Etats-Unis ?
Là-bas, cette idée ne date pas d’aujourd’hui. Au XIXe siècle, les mouvements nativistes étaient organisés à la faveur du rejet de l’immigration, en particulier des Irlandais, des Italiens puis des populations d’Europe centrale.
Quelles sont les caractéristiques des mouvements adeptes de cette théorie ?
Ceux-ci refusent le mélange et le métissage. Il s’agit de la forme la plus pure du racisme. Dans son Essai sur l’inégalité des races humaines (1855), Arthur de Gobineau, l’un des grands théoriciens du racisme, s’opposait déjà à ce que les Aryens se mélangent. Or l’histoire a montré que le métissage est de plus en plus répandu, y compris aux Etats-Unis, où toutes les unions mixtes sont en progression. Entre 1980 et 2008, la part des jeunes mariés avec un époux ou une épouse de «race» ou «ethnie» différente est passée de 6,7 % à 14,6 %.
La peur du mélange peut-elle s’expliquer par le fait que les sociétés sont de plus en plus métissées ?
Peut-être. Mais si on prend le cas de Gobineau, cette peur du métissage était abstraite. Il s’agissait de quelque chose de plus profond qui repose sur l’idée qu’on ne devait pas mélanger son sang, plus qu’un refus d’un métissage qui progresserait. En 2012, le New York Times publiait par exemple un article intitulé «Les Blancs représentent moins de la moitié des naissances aux Etats-Unis». En réalité, c’est beaucoup plus compliqué que cela…
C’est-à-dire ?
Avec le passé de l’esclavage [1619-1865, ndlr], le pays a pris l’habitude de mesurer les «races», de caractériser les personnes selon ce critère. Les Américains ont le sentiment que ces races sont séparées et que celle dite «blanche» est menacée. Mais quand on regarde en détail leurs statistiques, on voit que la notion de «Blanc» est très restrictive.
Lors du recensement, les Hispaniques, mais aussi les personnes ayant indiqué plusieurs entrées à la question raciale [depuis 2001, plusieurs cases peuvent être cochées : Blanc, Noir, Amérindien, Asiatique, autres] ne sont pas considérés comme des Blancs. Or près de 95 % des Latino-Américains se déclarent Blancs et plus de 6 % des femmes cochent plusieurs cases à la naissance de leur enfant. Donc, certes, les Blancs représentaient moins de la moitié des nouveau-nés aux Etats-Unis il y a sept ans, mais avec cette définition très restrictive de ce qu’est une personne blanche. Dans l’acception la plus large, où l’on compte toutes les naissances pour lesquelles au moins un des parents a indiqué une race blanche, cela concerne près de 80 % d’entre elles.
Peut-on donc dire que l’Amérique est raciste ?
Oui, absolument. Les statistiques excluent le métissage et les origines latines. Il s’agit clairement de l’un des critères les plus forts du racisme. On assiste au retour d’une vieille règle américaine du temps de l’esclavage et de la ségrégation appelée «One Drop Rule» [«la règle de l’unique goutte de sang»], quand on comptait comme «Noir» tout individu ayant au moins un ascendant noir.
Donald Trump contribue-t-il à nourrir la peur de l’immigration ?
Bien sûr. Mais ce qui est plus grave, c’est que ses déclarations, jusqu’à présent centrées sur la question de l’immigration, ont même viré au racisme. C’est de cela dont il est accusé après avoir invité quatre élues démocrates issues de minorités à «retourner d’où elles venaient». Ce climat peut pousser des gens à commettre des attaques en pensant qu’ils agissent pour la bonne cause.
PAR Sidy Diop
BURKINI ET FUREURS
Quand on a la liberté de tout dévoiler, de se montrer nu(e) à la une de magazines grand public, bref de s’effeuiller comme un arbre en automne, on doit admettre le droit des autres à tout cacher
La France, qui se targue d’être le pays de la Liberté au point de l’inscrire dans sa devise, perd trop souvent la tête sur les sujets liés à l’Islam. A gauche, à droite, au centre comme aux extrêmes, la manière de vivre des femmes musulmanes provoquent des éruptions colériques aux antipodes des traditions héritées de la philosophie des «Lumières». Un ancien ministre de droite s’est même permis de dire stoïquement à la télé que «le burkini est un coup de canif porté aux valeurs de la République».
Diantre, de quelle République parle-t-on ? De cette République qui tolère le nudisme sur certaines de ses plages, qui fait la queue dans les boites hot pour se rincer les yeux devant des strip teaseuses… ? Quand on a la liberté de tout dévoiler, de se montrer nu(e) à la une de magazines grand public, bref de s’effeuiller comme un arbre en automne, on doit admettre le droit des autres à tout cacher. A moins que cette liberté clamée soit à géométrie variable. La philosophie des Lumières nous a appris que «la liberté des uns s’arrête là où commence celle des autres». Une idée piquée au philosophe écossais John Stuart Mill et mal appliquée au pays de la «raison pensante».
Ici, au pays de Voltaire et de la guillotine, la part des uns n’est pas forcément la même que celle des autres. Cela dépend des rapports de pouvoir. Et c’est ce que l’on constate souvent lorsqu’il s’agit de traiter la question de l’Islam. Si l’on y respectait vraiment les libertés, la France serait à l’abri de beaucoup de fureurs.
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QU'EST-CE QUE L'ÉCO, FUTURE MONNAIE OUEST-AFRICAINE ?
La remplacer le franc CFA devrait voir le jour courant 2020. Mais comment son nom a-t-il été choisi et qu'est ce que cela implique ? Éléments de réponse avec le sociologue, Mahamadou Lamine Sana
L'éco la fameuse monnaie qui doit remplacer le franc CFA devrait voir le jour courant 2020. Mais comment son nom a-t-il été choisi et qu'est ce que cela implique ? Mahamadou Lamine Sagna, sociologue est l'invité du Journal Afrique.
par Damien Glez
SAMUEL JACKSON, LE GABONAIS D'HOLLYWOOD ?
L’acteur de « Pulp Fiction » et « Incassable » a fait son retour vers le « continent racine ». Entre le Gabon et le Ghana, il a lui aussi célébré « The Year of Return »...
Jeune Afrique |
Damien Glez |
Publication 07/08/2019
Les Africains ont appris à se méfier des stars planétaires – donc majoritairement anglo-saxonnes – qui se pavanent sur le continent africain en quête d’appropriation culturelle, comme Beyoncé, ou d’adoption « maternaliste », comme Madonna. Il reste la légitimité afro-américaine de la quête d’identité, quand la célébrité cherche moins à alimenter son œuvre ou sa progéniture qu’à retracer ses origines.
Storytelling artificiel sur Instagram ? Voilà Samuel L. Jackson, le comédien de Jungle Fever et Incassable, sur la piste de son sang gabonais. Convaincu d’avoir des origines au cœur du peuple benga, l’acteur hollywoodien a débarqué au Gabon le 23 juillet. Il vient d’en repartir avec un passeport du pays.
La visite s’inscrivait dans une tactique mutuelle. Côté gabonais, en 2017, le président Ali Bongo Ondimba promettait de faciliter le retour des afro-descendants qui le souhaitaient. Côté américain, Samuel L. Jackson n’a pas caché que son périple était semi-privé, semi-professionnel. Il participe au tournage d’une série documentaire intitulée Enslaved : six épisodes consacrés à l’histoire de la traite négrière en Afrique.
Après le Gabon, c’est en direction du Ghana que l’avion de la star s’est envolé. Destination cohérente si l’on considère, d’une part, le décor historique que constitua la Gold Coast dans la déportation esclavagiste et, d’autre part, l’appel du président Nana Akufo-Addo à faire de 2019 l’année du retour au pays des Ghanéens de la diaspora et des descendants d’esclaves.
Test ADN
C’est par un test ADN très en vogue depuis 2016 que Jackson aurait tracé sa « gabonitude ». Grâce à des sociétés comme AncestryDNA et African Ancestry, la papesse des talk-shows Oprah Winfrey a découvert ses racines libériennes, camerounaises et zambiennes et l’actrice Whoopi Goldberg ses origines bissau-guinéennes. Même Barack Obama – dont le lien avec l’Afrique ne passait censément pas par la case « esclavage » – se serait découvert un ancêtre esclave rebelle, John Punch, dans la Virginie du XVIIe siècle – ancêtre par sa mère… blanche.
BARROW EFFACE "JAMMEH"
Près de trois mois après leur impression, la Banque centrale de Gambie a mis en circulation depuis ce mardi les nouveaux billets de dalasi. Avec ces nouveaux billets de dalasi, le processus d’effacement de l’image de l’ancien président Yahya Jammeh entre
BANJUL - Près de trois mois après leur impression, la Banque centrale de Gambie a mis en circulation depuis ce mardi les nouveaux billets de dalasi. Avec ces nouveaux billets de dalasi, le processus d’effacement de l’image de l’ancien président Yahya Jammeh entre dans son ultime phase. Il faut dire que depuis 2015, tous les billets de la monnaie gambienne étaient à l’effigie de l’ex-dictateur gambien. Désormais figurent sur les nouveaux billets des images de la nature et autres patrimoines historiques du pays.
C’est en marge d’une audience avec le président Adama Barrow que Bakary Jammeh, le gouverneur de la Banque centrale de Gambie a profité pour présenter à la Nation les spécimens des nouveaux billets de Banque.
Selon lui, mettre en circulation des nouveaux billets de Banque signifie que cela se fait par l’intermédiaire des banques commerciales. Et le timing n’est pas fortuit, l’institution bancaire a profité du contexte d’avant tabaski avec la forte demande de liquidités pour les mettre en circulation. Dans cette déclaration, il précise que les anciens billets seront toujours valables jusqu’à nouvel ordre.
TOURNER DÉFINITIVEMENT LA PAGE JAMMEH ?
Et dans un contexte où les Etats de l’Afrique de l’Ouest discutent d’un projet de monnaie commune en 2020, le flou persiste sur ce qu’envisagerait la Gambie. Cependant beaucoup d’économistes restent sceptiques à l’idée d’intégrer cette zone monétaire pour le moment. Que gagnerait la Gambie à changer ses billets de Banque actuellement ? Les économistes sont unanimes, il s’agit plutôt d’une question symbolique pour tourner la page Jammeh.
Depuis février 2015, les billets de 5 à 200 dalasis étaient tous à l’effigie de l’ex-président gambien. Les images de l’ancien président et d’autres caractéristiques qui n’ont rien à voir avec le pays ont été supprimées des nouveaux billets », a ajouté le Gouverneur.
Sur les nouveaux billets, figurent des images de la nature, différentes espèces d’oiseaux, des sites historiques et différents corps de métiers. Cependant, des membres influents de la société civile ont mis des critiques sur les visages de nouveaux billets. Ils regrettent le manque de consensus avant l’impression de ces nouveaux spécimens.
À noter que ces nouveaux spécimens comprennent des coupures de 5, 10, 20, 50, 100 et 200 dalasis.
LA PHOTO D'UN NOIR TENU AVEC UNE CORDE PAR LA POLICE MONTÉE PROVOQUE UN TOLLÉ AUX ÉTATS-UNIS
Le chef de la police d'une ville du Texas s'est excusé face à l'indignation suscitée par une photo de deux de ses agents escortant un Noir tenu par une corde alors qu'eux-mêmes montaient à cheval
De nombreux internautes ont été choqués par cette photographie devenue virale, évoquant selon eux l'époque abhorrée des lynchages dans l'Amérique esclavagiste.
Le suspect, Donald Neely, arrêté pour une violation de propriété et menotté, aurait normalement dû être conduit au poste de police dans un véhicule à moteur, mais seulement des agents de la police montée étaient disponibles, a justifié lundi soir Vernon Hale, le chef de la police de Galveston.
Donald Neely a donc été escorté à pied, tenu par une corde, entre deux agents montés à cheval.
« Même s'il s'agit d'une technique enseignée et la meilleure des pratiques dans certaines circonstances, j'estime que nos agents ont pris une mauvaise décision », a déclaré le responsable policier dans un communiqué publié sur Facebook.
De nombreuses personnes ont demandé que les agents soient sanctionnés voire renvoyés de la police pour avoir infligé à M. Nelly ce traitement dégradant, rappelant les esclaves enchaînés, les Noirs lynchés ou encore les condamnés volontairement exhibés sur la voie publique.
« Nous sommes en 2019, pas 1819 », a ainsi réagi James Douglas, président de l'antenne de Houston de la NAACP, la première organisation de défense des Noirs américains, cité dans le quotidien Houston Chronicle.
« Un homme noir traîné par une corde par des agents de police, en 2019. [...] On doit dénoncer ce dont il s'agit : du racisme à l'oeuvre », a de son côté commenté le Texan Beto O'Rourke, candidat démocrate à la présidentielle de 2020.
Le chef policier Vernon Hale a fait savoir qu'il avait décidé de mettre un terme à cette méthode pour convoyer des personnes interpellées.
« D'abord et avant tout il est de mon devoir de m'excuser auprès de M. Neely pour cet embarras inutile », a-t-il ajouté.
"TONI MORRISON NOUS RAMÈNE CONSTAMMENT AU MONDE"
La Prix Nobel de littérature en 1993, s'est éteinte dans la nuit du 5 au 6 août, à 88 ans. Christiane Taubira, l'éditrice Dominique Bourgois, la traductrice Christine Laferrière et le journaliste François Busnel lui rendent hommage
franceinter.fr |
Pierre Weill |
Publication 07/08/2019
Christiane Taubira se souvient avoir découvert Toni Morrison en Guyane, après ses études : "Je suis tombée, ou plutôt je me suis hissée, dans cette littérature qui tranchait complètement avec ce que j'avais déjà lu, y compris en matière de ce qu'on qualifie de littérature africaine américaine". L'ancienne garde des Sceaux évoque sur France Inter une "magnifique, profonde et puissante littérature, à l'esthétique éblouissante" où "la vie bouillonne, effervescente".
Aux yeux de Christiane Taubira, Toni Morrison était une "irréductible optimiste", grâce à une profonde lucidité qui lui permettait de créer des personnages complexes. "Elle est allée au plus profond de l'humanité dans l'esclavage, mais elle nous ramène constamment au monde", souligne l'ancienne ministre.
"Autorité morale"
"Toni Morrison était une autorité morale, mais elle avait l'élégance de ne pas le revendiquer", ajoute l'éditrice Dominique Bourgois. "C’était un modèle pour beaucoup d’écrivains. C’est dans ses livres qu’elle était militante, exigeante. Pas en signant des manifestes".
"Hélas, les derniers mois de sa vie ont été complètement bouleversés par l’élection du président Trump. C’est resté sa rage quotidienne", déclare Dominique Bourgois.
Pour le journaliste François Busnel, directeur de la rédaction de la revue "America", la grande force de l'autrice est "qu’elle a réussi à nous faire comprendre que si nous voulions parler de Trump il fallait revenir à l’écriture et à la littérature".
"Richesse, rigueur, et vigueur"
Comment définir la littérature de Toni Morrison ? Par sa "richesse", sa "rigueur"et sa "vigueur", répond Christine Laferrière, traductrice des quatre derniers ouvrages de l'écrivaine.
Selon Christine Laferrière, Toni Morrison "a réussi à analyser tous les problèmes de l’Amérique, à toutes les époques, sous toutes les formes. Les conflits entre les Blancs et les Noirs, entre l’idéologie et la pratique, les conflits entre les femmes dans leurs relations familiales, intimes et sociales. Pour elle l’art était politique".
MANU DIBANGO, BÂTISSEUR ENTRE LES AFRIQUES ET L'OCCIDENT
Légende de la musique africaine, ambassadeur de l'afro-jazz, l'artiste camerounais revient sur 60 ans d'une carrière exceptionnelle, avec toujours autant de projets de métissages musicaux
"Nous sommes des bâtisseurs de ponts entre l'Occident et les Afriques, c'est une chance". Légende de la musique africaine, ambassadeur de l'afro-jazz, Manu Dibango revient sur 60 ans d'une carrière exceptionnelle, avec toujours autant de projets de métissages musicaux.
A 85 ans, "Manu" n'a pas changé. Débordant d'énergie, chemise multicolore et rire communicatif, l'"Afro-Européen" né au Cameroun reste lucide sur son succès: "chacun a son karma. C'est un ensemble, une addition de beaucoup de bonnes et mauvaises choses. Il faut faire face à l'échec comme au succès. Il faut toujours surnager".
"Le matin, je me dis: +tiens je suis encore en vie+ et +qu'est-ce que je vais faire+. Mon problème c'est: +quel est mon programme?+. Ce n'est pas: +Ah hier, c'était formidable, la nostalgie...", confie-t-il à l'AFP avant un concert au festival "Jazz In Marciac" (Gers), dont il est un habitué.
Pas de nostalgie donc, même quand on est l'auteur d'un des plus grands tubes planétaires de la musique africaine, avec Soul Makossa (1972). Etonnant destin pour cette face B d'un 45 tours dont le titre phare était un hymne pour l'équipe de foot du Cameroun à l'occasion de la Coupe d'Afrique des Nations (CAN) à Yaoundé.
Repéré par des DJs new-yorkais avant d'être plagié par Michael Jackson sur un titre de l'album "Thriller": "ça n'avait pas été tellement fait dans les règles" mais un accord financier a été trouvé. Et "cela a fait revivre la chanson, c'est devenu un standard" aujourd'hui repris par "beaucoup de gens, Rihanna et tout dernièrement Beyoncé".
"Papa Manu" aurait pu ne jamais se relever d'un tel succès planétaire. Mais il a au contraire promené sa grande silhouette à travers les époques en puisant à différentes sources, du reggae au rap en passant par la musique électronique, imposant son style inimitable entre rythmes traditionnels de l'Afrique centrale et notes jazzy plus contemporaines.
- "Chasser les fantasmes" -
Né dans une famille protestante du Cameroun, ce précurseur de la World Music a intégré dès son enfance des influences très diverses: "Mon oncle paternel jouait de l'harmonium, ma mère dirigeait la chorale. Je suis un enfant élevé dans "Alléluia". Ca n'empêche que je suis Africain, Camerounais et tout ça".
"J'ai l'harmonie des Bach et des Haendel dans l'oreille avec les paroles camerounaises. C'est une richesse de pouvoir avoir au minimum deux possibilités. Dans la vie, je préfère être stéréo que mono", dit-il.
Envoyé par son père dans une famille en Sarthe dès l'âge de 15 ans, Manu Dibango a davantage vécu en Europe qu'en Afrique. Pas question pour lui de se laisser enfermer dans une case.
"Je suis simplement un gars qui est musicien, ni musicien européen, ni africain. Je suis musicien d'origine africaine".
"La musique, il ne faut pas la mettre en prison. Beaucoup de gens écoutent la musique avec des oeillères", ajoute le génial saxophoniste.
"Car forcément, les gens fantasment sur vous. Vous êtes musicien africain, donc vous jouez du djembé, du balafon, de la kora. Si vous jouez du saxo, oups, c'est plutôt noir-américain, vous n'êtes déjà plus tellement africain dans la tête de certains".
"Et si en plus vous jouez du piano, alors vous êtes mal barré et pourtant il y a des pianos dans tous les hôtels en Afrique. Dans tous les orchestres, il y a des guitares".
"Ce sont des fantasmes que les gens mettent sur vous. Et peut-être qu'une partie de votre vie, c'est de les chasser. C'est très difficile. Même pour moi".
Et après six décennies de musique, qu'est-ce qui fait encore rêver Manu Dibango ?
"Quand on ne rêve plus, on n'est plus. Cet été, je joue avec des orchestres philharmoniques, symphoniques. C'est une autre façon de parler. Le langage n'est pas le même quand vous êtes 70 (musiciens). Le rendu et les frissons que vous pouvez avoir n'ont rien à voir. C'est comme si vous voyagiez en première".