L’impact socio-économique sur le monde rural est important. Le secteur emploie 15 000 permanents et réalise un chiffre d’affaires à l’export de 100 millions d’euros. Ces cultures horticoles qui sont possibles seulement durant la saison dite froide, entre novembre et mars, attirent beaucoup d’investisseurs internationaux. L’augmentation sensible des exportations positionne l’« origine Sénégal » sur les marchés de l’Union Européenne.
Le Sénégal dispose d’une importante marge de développement de la filière fruits et légumes, suite à l’intersection des routes maritimes, à proximité de l’Europe (5 heures par avion) et des infrastructures portuaires et aéroportuaires modernes.
En effet, en plus des céréales et des arachides, il faut noter la forte progression des exportations de produits horticoles qui sont passées de 9 300 tonnes en 2000 à 67 000 en 2013, soit une augmentation de 700 %. Cette progression s’est accompagnée aussi d’une diversification des exportations qui sont sorties du mono produit (haricot vert) pour embrasser une gamme élargie (haricot vert, tomate, melon, maïs doux, radis, pastèque...).
Les opérateurs estiment que l’amélioration de certains aspects de la politique d’accompagnement du secteur contribuera à augmenter l’attractivité du Sénégal. Ainsi, la vulgarisation du nouveau code général des impôts dans ses modalités d’application est essentielle pour améliorer les relations entre administrateurs et administrés.
De même que l’application des conventions fiscales avec certains pays de l’Ue, destinataires des exportations, se traduira par une hausse des volumes des produits agricoles labellisés « Origine Sénégal ». La compétitivité de l’horticulture au Sénégal repose certes, sur des facteurs intrinsèques.
Mais aussi, sur un bon accompagnement du secteur et une sécurité juridique et fiscale. La stabilisation du statut des entreprises Franches d’Exportation (Efe) paraît essentielle, en tant que principal cadre de l’exportation des produits horticoles. L’absence de nouveaux agréments délivrés depuis 2013 et les menaces de suppression qui pèsent sur ce régime depuis 2012 poussent les investisseurs à la prudence.
Accordé aux entreprises agricoles, industrielles et aux télé- services qui exportent au moins 80 % de leur production, le statut d’entreprise franche d’exportation (Efe) permet de bénéficier d’un taux d’imposition sur les sociétés à 15 %, en plus de l’exoné- ration de l’impôt sur les salaires, sur les droits d’enregistrement et de timbre, sur la contribution des patentes et les droits et taxes sur l’équipement de production et les matières premières.
En vue d’apporter davantage de sécurité aux investisseurs, l’Etat doit traiter, précise la source, la question foncière soumise aux contraintes environnementales (Code de l’environnement), en clarifiant les prérogatives des différents intervenants. Les risques de spéculation restent importants. La difficulté d’obtenir des baux de l’Etat, l’absence d’une politique systématique de valorisation du capital foncier à travers les titres fonciers font parties des causes, expliquant la frilosité du secteur bancaire pour l’agriculture en général.
LA TIL, DJIPPIIR, LA SOIE, GETZNER, LE BRODE… EN VOGUE
A quelques jours de la célébration de la fête de Korité marquant ainsi la fin du mois de ramadan, les préparatifs sont à leur summum sur le marché. Au marché Hlm, lieu très prisé par la gent féminine dans le domaine de l’habillement, ce sont les getzner, le til, la soie, les brodés, le « djipiir » qui sont à la mode.
A dix jours de la Korité, les préparatifs de la fête vont bon train au marché Hlm. En fait, ce lieu commence à refuser du monde. Malgré la forte canicule qu’il fait sur Dakar, en sus d’observer le jeûne, les haut-parleurs accrochés sur des poteaux distillent de la musique à tout va.
Les vrombissements des moteurs des véhicules mêlés aux bruits provenant des stations radiophoniques, créent une cacophonie indescriptible dans ce marché très prisé par la gent féminine. L’ambiance est au rendez-vous. Il est difficile de se frayer un chemin.
A la limite, on se bouscule pour continuer son chemin au risque de tomber sur les étals des commerçants de chaussures, d’accessoires ou de tissus. Et les étoffes qui marquent l’attention. Trouvé à l’intérieur de sa cantine, le visage dégoulinant de sueur, Abdou Diouf range un rouleau de tissus vide, tandis que ses frères marchandent avec des clientes à propos du til.
«J’ai déjà acheté 3 mètres de til, il me reste le getzner. Comme tous les tailleurs sont pleins en ce moment, je ne pouvais pas prendre du Ganila, qui n’est plus d’actualité. Sur ce, je me suis rabattue sur les tissus légers qui sont faciles à coudre», indique Fatoumata Ndiaye, les traits du visage tirés à cause des effets du ramadan.
Pour cette fête de Korité qui pointe le bout du nez, en plus des tissus traditionnels comme les Thioubes, Ganilas, brodés et métrages, les tissus en vogue sont, d’après, le commerçant Abdou Diouf, la soie duchesse, le geztner, les brodés, le til et le « djipir ». Et les prix oscillent entre 2000 et 20 000 F CFA, le mètre. Le til, qui est très en vogue en ces périodes coute 2500 à 20 000 FCFA le mètre.
La soie duchesse, elle, s’échange contre 2000 FCFA à 2500 F CFA, le mètre. En ce qui concerne la seconde catégorie de tissus brodés, le mètre est entre 1000 et 5000 F CFA. L’original se vend par paquet à 17 000 F CFA. « Les affaires marchent bien actuellement. Les gens donnent beaucoup d’importance à ces fêtes religieuses. Ce samedi, je me suis approvisionnée en 3 balles de 20 rouleaux, mais actuellement il ne me reste que 10», souffle-t-il.
Pour sa part, Mbène Thiam fait savoir que c’est le til, le « djipir » et la soie qui sont les tendances pour cette Korité. Toutefois, la commerçante se désole du fait que l’affluence n’est pas encore au rendez-vous. « Les visiteurs n’achètent pas, la plupart ne viennent même pas.
Les années précédentes, à l’approche des fêtes, mon magasin était plein à craquer. Tel n’est pas le cas pour cette année. Je pense que c’est du fait de la conjoncture et avec le mois de ramadan, les pères de familles privilégient plus la nourriture qu’autre chose», s’est résigné Mbène Thiam, assise sur ses paquets de tissus.
Toutefois, elle garde l’espoir de jours meilleurs, parce que philosophe-t-elle, un vendeur doit toujours espérer vendre, sinon il peut rester chez lui. Debout sur une planche où sont posés des tissus de tous genres, Bour Guéweul montre aux passants les nouveaux arrivages.
Tout comme Mbène Thiam, il lance que ce sont les tils, getzner, brodé Autriche et soie duchesse et la soie qui sont en vogue en cette période. Le mètre du til doré coûte 2500 F CFA. Loin de ressembler aux autres commerçants, Souleymane Faye, lui, expose les tissus « djipiir » Il s’enorgueillit tout en ferrant ses clientes : « je vends du djipiir et je les cède à 5000 F CFA ou plus le mètre.
C’est une sorte de brodé en fil, très pratique pour la couture, elle se garnie elle-même et on le coud avec la soie, le geztner ou la soie duchesse. Il se vend cher à cause de la conjoncture». Néanmoins, à côté du « djipir », Faye cède aussi du til, pour dire que les tendances de la Korité suivent celles de l’été. Tout simplement.
UN PEPIN POUR LES VENDEURS DE GARNITURES
Avec les tissus légers qui sont en mode pour la fête de korité, les femmes n’auront pas à payer des prix élevés aux tailleurs pour la garniture et autres astuces. Car, ces étoffes disposent déjà de garniture. Donc, ils ne nécessitent pas des garnitures pour son embellissement.
Ainsi, les vendeurs de ses accessoires aux multiples formes et couleurs ne se frotte pas les mains en ce moment. Madame Seck en est une. Sur sa petite table posée à côté des vendeurs de tissus légers comme le til et le djipiir, sont visibles ces accessoires avec des tailles et formes variées sous différentes couleurs.
« Le commerce des garnitures n’est pas fructueuse avec la fête qui s’approche. Et par rapport à l’année dernière, il y a une grande différence». Selon cette commerçante, l’arrivage des nouveaux tissus comme le til fait défaut à leur petit commerce. « Les gens préfèrent acheter les tils et djipir pour garnir leurs tissus plutôt que de payer des garnitures ».
Egalement vendeur de garnitures au marché Hlm, Ousmane Gaye gagne sa vie avec ce business qui n’est plus très fructueux à quelques jours de la korité. « Avec les tissus en vogue pour la korité comme les tils, djipiir, les affaires ne marchent pas très bien.
Les clientes viennent rarement et ce n’est pas bon signe», constate le sieur Gaye. Intervenant, sous le couvert de l’anonymat, cette vendeuse de garnitures note que le pouvoir d’achat des acheteurs a baissé cette année. « Sur 5 personnes qui visite ton commerce, ce sont seulement les 3 qui achètent. Mais je ne vends pas en détail. Je cède en gros». Ce, tout en refusant de dévoiler ses prix de vente.
LES ROBES BUSTIERS À LA FENTE TRÈS OSÉE MARQUENT LEUR TERRITOIRE
Apres plusieurs jours de jeun, la korité s’annonce chez les musulmans. Cette fête qui marque la fin du mois de ramadan, très bien attendue par les jeunes et vieux, reste un moment de consolidation des liens. Chaque famille se donnera durant la journée les moyens de préparer des mets copieux. Bien zappés, le soir est réservé à des visites de voisins et proches parents dans le but de se faire pardonner. Mais, cette année, la mode qui revient avec des modèles modernisées, n’a pas vraiment changé.
La souffrance liée à la privation et la dévotion est sur le point de présenter ses adieux aux fidèles musulmans. A pareil moment, l’esprit du fidèle est préoccupé par deux soucis. D’abord, il se lance à un besoin de satisfaire le plat du jour de Korité. En même temps, s’habiller de la plus belles des manières pour montre sa joie d’avoir accompli un mois plein de chasteté.
Ainsi, le pratiquant se mettant dans des préparatifs hâtifs ne se donne plus le choix. Calculatrice en main, l’heure semble être, à l’estimation des budgets de korité. Sous ce registre, les hommes qui cherchent à remplir le rôle de père de familles, font en sorte que les besoins financiers soient réglés.
Quant aux femmes, elles se bousculent au marché des tissus et chez les tailleurs. Un tour aux étages de l’immeuble Touba Sandaga, réservé aux couturiers montre que la classe et l’élégance promettent d’être au rendez-vous. Ici, le bruit des machines de couture informe à bien des égards sur l’activité des locataires de ce bâtiment. Tout le monde s’active.
Certains, sur les tables de coupes et d’autres s’affairent à repasser les habits déjà prêts. Et, dans ce bruitage des machines, une bonne partie du personnel se charge de la couture en question au moment où, des femmes, assises à même le sol, font les perlages.
Le travail se fait en chaine. Chacun essaye de remplir sa fonction. Dans cette dynamique de groupe, les brodeurs, en véritable maître dans leurs arts, brodent de manière énergique. « Nous avons préparé de jolies vêtement pour nos clients.
Actuellement, il fait chaud. Les filles optent pour des tailles basses bustiers et robes sans manches. Et, pour les grande dames, nous faisons des robes tailles Mame avec gros file ou le 217 », informe Diokhané, entouré de ses machines, dans un bruitage assourdissant.
Ce jeune homme, âgé de 30 ans, habillé d’un Lacoste bleu de nuit, assortis d’un jean, promet à ses clients qu’il n’y aura pas de réclamations. « Nous sommes en avance sur l’heure », relève-t-il. A cet effet, il a été constaté que les filles ne lésinent pas sur les moyens pour se faire belles.
Quelques soit le prix, elles sont prêtes, disent-elles, à attirer les attentions sur elles. En termes de modes, les robes bustiers à la fente très visible, marque son territoire. N’empêche, les « Tuniques » et les « Grands boubous » pour les bonnes dames sont aussi très perceptibles.
Les hommes ne sont pas en reste, les hommes aux ciseaux leur proposent des kaftan, Abasanjo, Grand boubou etc. « Pour cette année, personnes n’est laissée en rade, ils seront tous bien vêtus », promet Modou ciseau, un couturier très reconnu pour ses coupes d’enfer.
PAR FATIMATA LY
AU GRAND BONHEUR DES INDUSTRIES COSMÉTIQUES
LE NOUVEAU CODE GÉNÉRAL DES IMPÔTS RENVOIE AUX CALENDES GRECQUES LA LUTTE CONTRE LES PRODUITS DÉPIGMENTANT
En 2015, le marché des produits dépigmentant (ou éclaircissants), à l’échelle mondiale, vaudra 10 milliards de dollars (5000 Milliards de francs CFA), un enjeu économique énorme pour les industries cosmétiques !
Les entreprises spécialisées dans la fabrication de ces produits cosmétiques sont implantées essentiellement dans les pays développés mais elles sont également retrouvées dans les pays en développement dont le Sénégal. Ces dernières années, une profusion de produits cosmétiques soi-disant spécialisés pour les peaux noires et métissées a fait son apparition sur le marché dans les grandes villes africaines, européennes, américaines et asiatiques.
« Achetées à Paris » Il convient de préciser d’emblée que les différences structurelles et physiologiques entre d’une part les peaux noires et métissées et d’autre part les peaux blanches sont minimes en dehors de la différence notable en mélanine, pigment majeur responsable de la couleur de la peau.
Ainsi donc les produits cosmétiques, quelle que soit leur forme (savon crème, gel, lotion, pommade et lait) conçus pour la peau blanche sont tout à fait adaptés aux peaux noires et métissées.
Les arguments brandis par les fabricants de produits cosmétiques dits « spécifiques des peaux noires et métissées » sont purement commerciaux et ne reposent sur aucune base scientifique ! Ces arguments cachent simplement la volonté de mettre sur le marché des produits éclaircissants sans avoir l’air d’y toucher !
Il faut simplement préciser que la plupart de ces produits dits spécialisés pour les peaux noires et métissées sont recensés comme produits dépigmentant par l’AFSSAPS* (Agence Française de Sécurité Sanitaire des produits de santé) et le GTPN** (Groupe thématique peau noire de la Société Française de Dermatologie).
Ces listes sont disponibles sur les sites internet de ces groupes, en les consultant on y retrouvera ces produits dits « haut de gamme ! », « achetés très chers !» « à Paris ! » mais qui contiennent néanmoins de l’Hydroquinone et ou du propionate de clobétasol (corticoïde de très forte activité). Actuellement, on assiste à une profusion de ces produits cosmétiques dépigmentant (QEI*Paris, Pr Françoise Bedon Carotte*, Makari de Suisse*) sur le marché sénégalais avec une stratégie marketing agressive, une publicité outrageuse et mensongère qui font croire aux consommateurs que ces produits sont haut de gamme donc dénués de risque sanitaire !
Cependant, les composés retrouvés dans ces produits dits haut de gamme sont identiques pour la plupart aux autres produits dépigmentant car il est IMPOSSIBLE de fabriquer des produits dépigmentant à l’échelle industrielle SANS Hydroquinone SANS Corticoïde et SANS Mercure !
Certes, il existe d’autres produits dépigmentant tels que l’arbutine et l’acide Kojique, mais dont les coûts limitent la fabrication industrielle. En tout état de cause, les fabricants ne semblent guère préoccupés par la santé des consommateurs dont le droit à l’information n’est pas respecté.
En effet, ni l’emballage ni l’étiquetage ne respectent les normes requises (mention illégale ou non conforme, imprécision de la composition et concentrations des ingrédients), ce qui serait inconcevable si les produits étaient commercialisés au niveau des pays développés.
Les consommateurs (trices) berné(e)s
Les consommateurs (trices) sont souvent berné(e) s par une publicité mensongère qui fait croire qu’il y aurait des produits dépigmentant de qualité supérieure parce que plus chers. Les mêmes types de complications dermatologiques sont observés avec les produits pré- cités.
Malheureusement, les consommateurs ne sont pas informés des dangers liés l’usage au long cours de ces produits dépigmentant ; et il faut déplorer à ce niveau l’inertie des associations de consommateurs. Il est à noter que d’une manière générale les associations consumériste sont tendance à se mobiliser plus pour les denrées de première nécessité, les services de consommation courante (eau, électricité et téléphone) que pour les produits qui ont un impact négatif sur la santé des populations (produits cosmétiques dépigmentant, médicaments de la rue, bouillons culinaires, ..).
En dehors des associations consuméristes, l’état sénégalais doit se porter garant des intérêts des citoyens, en particulier veiller à la santé des populations par une prévention des risques sanitaires. En quoi faisant ? En assainissant le marché des produits cosmétiques, notamment par l’interdiction de l’utilisation de médicaments à visée cosmétique, en incitant les industriels du secteur cosmé- tique à respecter les normes industrielles, en interdisant (à l’instar du Burkina Faso) la publicité des produits dépigmentant, en informant le consommateur sur les dangers liés à l’usage des produits dépigmentant.
La réalité est que les enjeux économiques sont énormes ! Et l’état ne semble pas encore prêt à renoncer aux recettes substantielles que génèrent les taxes sur les produits cosmétiques dépigmentant. En effet, les récentes modifications intervenues dans le code des impôts renvoient aux calendes grecques l’interdiction de la commercialisation des produits dépigmentant.
A la lecture du nouveau code général des impôts 2013, en particulier dans ses articles 441 et 442 du CHAPITRE IX portant sur la TAXE SUR LES PRODUITS COSMETIQUES, on est tenté de croire que la route est encore longue qui mène à adopter une législation sur la régulation des produits cosmétiques dépigmentant :
Concernant le Champ d’application , il est mentionné à la SECTION I ( Article 441) que la taxe s’applique notamment aux produits suivants : les produits de beauté ou de maquillage préparés et préparations pour l’entretien ou les soins de la peau, autres que les médicaments, y compris les préparations antisolaires et les préparations pour bronzage, pour bains et douche et préparations pour manucure ou pédicure ; Concernant le taux, il est mentionné au niveau de l’Article 442 de la section II que le taux de la taxe est fixé à 10%.
Toutefois, ce taux est porté à 15% pour les produits dépigmentant figurant sur une liste établie par arrêté conjoint du Ministre chargé des Finances et du Ministre chargé de la Santé. Nous ne pouvons-nous empêcher de faire au moins deux commentaires : Tout d’abord, au niveau de l’article 441, les médicaments sont exclus des produits cités dans le champ d’application de la taxe sur les produits cosmétiques.
Les corticoïdes sont des médicaments donc comme tels ne devraient pas être inclus dans le champ d’application mais ne devraient pas également être commercialisés en dehors du circuit officiel du médicament. « L’état cautionne-t-il ces produits » Ensuite au niveau de l’article 442 ou le taux de la taxe est fixé à 10% à l’exception des produits dépigmentant ce qui semble vouloir dire que l’état cautionne l’importation et la commercialisation des produits dépigmentant malgré leur impact négatif sur la santé des populations.
En outre dans le même article 442, il est précisé que la liste des produits dépigmentant sera établie par arrêté conjoint du Ministre chargé des Finances et du Ministre chargé de la Santé. Il parait paradoxal que le ministère de la santé et de la Prévention conscient des effets sanitaires néfastes de la dépigmentation établisse une liste de produits dépigmentant autorisés au détriment de la santé des populations indépendamment du coût économique de la pratique de la dépigmentation artificielle.
Ce coût économique représente 18% du revenu des ménages (Douzima PM et al 2008) et comporte le coût direct de l’achat des produits dépigmentant, le coût indirect de la prise en charge des complications médicales de la dépigmentation artificielle (Xeesal).
Donc autant d’argent détourné de l’alimentation, de la scolarisation, de l’hygiène et autres besoins élémentaires de la famille qui permettrait de réduire le gap nous séparant des OMD à dé- faut de les atteindre. Cet enjeu économique de la dépigmentation artificielle est énorme et les lobbies s’exercent de toutes parts face à la hausse récente des taxes.
Conscients des enjeux économiques que pourrait induire la hausse des taxes sur leurs activités, les industriels spécialisés dans la fabrication de produits cosmétiques ont réagi par une lettre adressée au ministre du commerce et du secteur informel.
Dans cette correspondance, les industriels prônent «l’annulation immédiate de ces taxes et la mise en place d’une exonération systématique de la taxe sur l’alcool pour la parfumerie …».
En plus de booster la compétitivité, l’annulation de ces taxes permettrait de sauver les 5000 emplois directs que génère ce secteur. Il est tout à fait légitime pour ces industriels de protéger leur secteur d’activité mais autant il faut favoriser l’entreprenariat national par une réduction des taxes, autant il faut se soucier de la santé des populations à court, long et moyen terme.
Or annuler les taxes reviendrait à rendre encore plus accessibles les produits dépigmentant (donc éclaircissants) dont l’effet délétère sur la santé des consommateurs n’est plus à démontrer.
Pr Fatimata LY Dermatologue-Vénérologue
LE CHEF DE L’ETAT INVITE LA JEUNESSE À MÉDITER SUR LE PARCOURS DES ANCIENS COMBATTANTS
Les anciens combattants sénégalais de la seconde Guerre mondiale ont eu droit aux honneurs de la nation et à ceux de la France. Douze vétérans ont été décorés des Ordres nationaux des deux pays pour leur contribution à un monde libre. Aujourd’hui, vu leur « parcours exceptionnel », le chef de l’Etat les donne en exemple à la jeunesse.
A la suite de leur camarade, le vétéran Cheikh Fall, décédé le 12 mars dernier, douze autres anciens combattants ont été décorés dans les Ordres nationaux sénégalais et français. Hier, à l’occasion de la traditionnelle levée des couleurs au Palais présidentiel, le chef de l’Etat Macky Sall a remis aux anciens combattants de la Seconde guerre mondiale, les insignes de l’Ordre national du Lion.
Ils se nomment Ndigou Dièye, Ibra Diouf, Dahmane Diouf et Saïdou Sall et ont tous combattu pour la France, à travers des campagnes menées en Afrique et en Europe. Leur bravoure, leur combativité et leur efficacité sur les différents théâtres d’opération ont été reconnues et saluées par la France.
C’est pourquoi, à la suite du chef de l’Etat, Macky Sall, le Grand Chancelier de la Légion d’honneur française, le général Jean-Louis Georgelin leur a remis « la plus haute distinction française ».
Même si pour des « raisons médicales et à cause du poids de l’âge », huit autres anciens combattants n’ont pu faire le déplacement, le chef de l’Etat leur a transmis les remerciements de la nation toute entière. « Si nous sommes, aujourd’hui, une Nation libre et debout, c’est parce que, par votre présence massive au front, vous avez aussi prouvé que tous les hommes sont nés libres et égaux », a indiqué le président Macky Sall.
Il a d’ailleurs souhaité que le peuple tout entier puisse se rappeler l’acte de bravoure de ces « vaillants soldats » au péril de leur vie, de leur liberté. « Je souhaite que toute la Nation, la jeunesse en particulier, puisse méditer sur votre parcours exceptionnel et voir en vous un miroir resplendissant qui reflète ces valeurs essentielles si nécessaires à notre épanouissement individuel et collectif », a mentionné le chef de l’Etat.
Tout en soulignant « l’immense reconnaissance » de son pays, la France, à ces anciens combattants, le Grand Chancelier de la Légion d’honneur estime que ces décorations commémorent « une page sombre » de notre histoire, la Seconde guerre mondiale. « Nous sommes les héritiers de l’histoire. Ces années anniversaires de la libération et de la fin des combats en Europe nous le rappellent. C’est aussi la vocation des Ordres nationaux d’inscrire dans la mémoire des générations futures les mémoires de ceux qui ont servi la Nation », a ajouté le général français.
Il a rappelé en ce sens que la défaite de l’Allemagne nazie a été rendue possible grâce à l’importante contribution des Tirailleurs sénégalais, spahis d’Afrique du Nord, goumiers algériens, etc. qui ont mené des batailles en Tunisie, en Corse et en Italie, etc. « 300 ans d’histoire nous rassemblent Français et Sénégalais », selon le général Jean-Louis Georgelin.
Le chef de l’Etat a enfin magnifié le geste de « haute portée » de la France qui, selon lui, « participe de notre commun devoir de mémoire collective ». Ceci, quelques mois seulement après la remise, par le président François Hollande, des archives de Thiaroye 1944.
UN MILLIARD DE FRANCS POUR L’ACQUISITION DE LOGEMENTS SOCIAUX
Le ministère du Renouveau urbain, de l’Habitat et du Cadre de vie, la Banque de l’habitat du Sénégal (BHS) et le Fonds de garantie des investissements prioritaires (FONGIP) ont signé, lundi, une convention qui vise à garantir les prêts pour l’acquisition ou la construction de logements sociaux dont la première dotation est d’un milliard de FCFA.
La convention-cadre relative au Fonds de garantie pour l’acquisition de logements (FOGALOG) garantit les prêts bancaires octroyés aux primo accédants à acquérir ou à construire la résidence principale.
’’Il s’agit de compléter la garantie hypothécaire et de faciliter ainsi l’accès aux financements des personnes à revenus modestes ou irréguliers principalement les artisans, les acteurs du secteur informel et les sénégalais de la diaspora’’, a expliqué l’Administrateur général du FONGIP, Doudou Ka
Le FOGALOG mis en place par le FONGIP et la BHS permettra aux personnes évoluant dans le secteur informel d’accéder aux financements bancaires pour acquérir un logement décent, a t-il souligné.
’’Cette convention entre le ministère du Renouveau, de l’Habitat vise également à permettre à l’ensemble du secteur bancaire, de jouer leur rôle car leur intervention était limitée par l’absence ou la faiblesse des garanties requises’’, a dit le directeur du FONGIP.
Le directeur général de la BHS, Mamadou Bocar Sy a soutenu pour sa part que la signature de la convention vient compléter une série de mesures prises avec les acteurs intervenant dans l’acquisition ou la construction de logement sociaux.
’’Le fonds de garantie nous permettra de rendre plus équitable la distribution des prêts ou crédits destinés aux logements sociaux’’, a-t-il dit précisant que les prêts peuvent aller jusqu’à 20 millions.
Venu présidait la signature de convention, le ministère du Renouveau urbain, de l’Habitat et du Cadre de vie, Diène Farba Sarr a prôné l’intensification des constructions sociaux par la mise en place de mécanismes de suivi et d’accompagnement.
’’Nous devons mettre en place des mécanismes de suivi efficaces en s’informant de tout temps sur l’état d’avancement des procédures d’acquisition ou de construction de logements sociaux’’, a-t-il dit.
Diène Farba Sarr a également rappelé l’engagement du gouvernement de prendre en compte les logements sociaux dans la réalisation des différents pôles urbains du pays, particulièrement dans la région de Dakar, à travers une planification efficiente et une organisation rigoureuse.
Le rappeur Pacotille, de son vrai nom Cheikh Sidaty Fall, est décédé ce samedi, à la suite d'un malaise. Amis rappeurs, camarades de parti, amis d'enfance et parents lui ont rendu un dernier hommage, lors de son inhumation à Thiaroye. Son talent pour la musique et son engagement politique ont été vivement salués.
"Il est où ? Laissez-moi le voir pour une dernière fois" ; "Pacotille était le principal soutien de la famille. C'est lui qui se chargeait de toutes les dépenses de la famille" ; "C'est trop dur cette nouvelle. Je n'y crois pas." Ces litanies ont rythmé samedi la journée, dans la maison de Cheikh Sidaty Fall alias Pacotille.
Dès l'annonce de la mort du rappeur, sa maison au quartier Abdoulaye Ndao, une localité de la commune de Yeumbeul Sud en banlieue dakaroise, a été prise d'assaut. Le rappeur politicien, connu pour sa fidélité au pape du Sopi Me Abdoulaye Wade, est parti sur la pointe des pieds et à la surprise générale. Il avait une autre particularité, celle de porter en public des chaussures en plastique, communément appelées "tic tic".
La mort de Pacotille a créé une onde de choc dans le monde musical, notamment au sein de la communauté des rappeurs, mais aussi politique et dans la banlieue qui a perdu l'un de ses plus grands représentants et défenseurs. A la maison mortuaire, nombreux sont ses inconditionnels et proches qui ont craqué.
La sœur du défunt, Dieynabou Fall, surprise comme tout le monde par cette disparition brutale, a confié qu'elle a appris la nouvelle par téléphone, mais qu'elle n'était pas au courant d'une quelconque maladie de son petit frère. Dans le concert de désolations, des proches soutiennent que le vendredi, l'auteur de "guinar gui" a appelé son père pour lui dire qu'il a changé de numéro de téléphone. Croulant sous le poids de l'âge et écrasé par la tristesse, ce dernier n'a pas souhaité se prononcer.
"Il avait quelques soucis de santé"
Finalement, c'est Bouna Ndiaye, ami d'enfance, qui a levé un coin du voile en révélant que "depuis un certain temps, il évoquait des problèmes de santé". Toujours est-il que, lorsqu'il a fait un malaise, "les jeunes avec qui ils habitaient l'ont acheminé à bord d'une voiture.
Durant tout le trajet, il ne cessait de réciter des versets du Saint Coran. C'est comme cela que les choses se sont passées". Bouna Ndiaye explique qu'il a rendu l'âme en cours de route. "Il était mon ami. Vendredi, on s'est parlé au téléphone à 22h. Il avait jeûné au moment de rendre l'âme. Il avait juste quelques soucis de santé."
"Il m'avait dit qu'il avait dernièrement eu un malaise, à cause d'un problème de cholestérol. Son médecin lui avait demandé de faire 3 séances d'entraînement de 30mn, par semaine", a ajouté son manager Abdou Ndiaye. Toutefois, il a tenu à souligner qu'il n'y avait rien d'alarmant.
D'ailleurs, "il disait qu'il voulait se rendre à Thiès, chez moi, pour un 'ndogu' (coupure de jeun)". Bouna Ndiaye a confié qu'ils se sont longuement entretenus au téléphone le vendredi soir et qu'il était convenu que lui vienne à Dakar, le lendemain, car il voulait l'entretenir de quelque chose. "J'ai donc quitté Thiès, arrivé à hauteur de Rufisque, Bachir Diawara m'a téléphoné pour me dire que Paco a eu un malaise. J'ai eu un mauvais pressentiment qui s'est confirmé", at-il raconté.
Autopsie
A 14h, l'émotion a atteint son paroxysme avec l'arrivée de la dépouille. Il y avait là ses proches, ses amis musiciens dont Bakhao de Da brains et Fou malade et ses camarades de parti dont Babacar Gaye, Amadou Tidiane Wane et Habib Faye, neveu de l'ex-chef de l'Etat Me Abdoulaye Wade.
Ce même jour, Pacotille a été inhumé, après 17h, au cimetière musulman de Thiaroye Kao. Au grand dam d'un proche qui aurait aimé une autopsie. Agé de 42 ans et père de deux enfants, il menait de front sa carrière dans le Hip hop et ses activités politiques au sein du Pds.
Le Rappeur politicien
Sans fioritures, il s'est présenté au public sénégalais avec ses "plastiques" vers la fin des années 1990. Mince avec sa barbichette, le rap "wolof " en avant, il a su vite s'imposer et conquérir des cœurs. Depuis, le rappeur Cheikh Sidaty Fall aka Pacotille poursuivait son bonhomme de chemin jusqu'à ce samedi où il est parti à jamais. EnQuête revient sur le parcours de l'artiste au style particulier.
Pacotille est de cette génération de rappeurs qu'on peut catégoriser dans la middle school. Même si conventionnellement, l'on ne reconnaît que la old school et la new generation et les underground.
Pacotille est arrivé sur la scène du hip-hop en 1997, au moment où le hip-hop sénégalais commençait à gagner en crédibilité. Et le rappeur de Yeumbeul a vite gagné sa place dans la sphère des cultures urbaines, grâce à son style atypique. Au moment où les jeunes pensaient que le "possee", c'étaient des "timberland" et des "baggies", lui a opté pour des "tic tic".
Ces derniers sont des chaussures en plastique bon marché et que nul n'a osé porter sur scène avant lui. Cherchant toujours à être unique, il ne prestait presque jamais sans son ballon de foot. Car l'autre talent de Pacotille, c'était bien le jonglage qu'il réussissait à merveille et qui lui a valu le surnom de "Pacoteul".
Pacotille ne s'est pas imposé uniquement grâce à son accoutrement et ses talents de jongleur. Mais aussi et surtout par son franc-parler. En 1997, dans un wolof châtié, des termes clairs, un flow net et un beat appréciable, il a su participer à l'évolution du mouvement hiphop.
Pacotille était très engagé. Dans "faits divers", qui est l'une des chansons qui l'ont fait connaître, il disait d'emblée : "xibaar yi niouye dialgati laay beugueu netali, si digg bi laay diaar mou nex wala mou nakhari". Et c'est ce qu'il a fait dans le texte, en dénonçant dans un langage cru des faits de société, des comportements qu'ils jugeaient incorrects.
Un engagement qui se sent dans toute sa discographie composée de 3 productions. Dans "taxi bu russ", le dernier album en date, il dénonçait diverses attitudes vicieuses de membres de la société allant du père de famille "correct" à la jeune fille "prostituée clandestine", aux étrangers trafiquants de cocaïne.
Dans son single "sama diabarou nidiaye", il dénonce également les comportements peu honorables d'épouses d'émigrés et expose le problème d'un jeune harcelé par la femme de son oncle établi à l'étranger. Au-delà de l'engagement, dans les textes de l'artiste, on sentait le côté farceur du hip-hoppeur.
Qui n'a pas ri, en écoutant "Guinaar". Une chanson dans laquelle il traitait tous les consommateurs de poulets de "deum". Cela aurait pu choquer, mais, tel n'a pas été le cas, tellement le texte était rigolo, le ton taquin. Pacotille était sans nul doute un grand artiste, un membre éminent du mouvement hip-hop. Il est aussi l'un des rares rappeurs à avoir fait des featurings avec d'éminents chanteurs de "mbalax", à l'image de Youssou Ndour, Baaba Maal, Viviane Chédid ou encore Fatou Laobé avec qui elle a chanté un titre hommage au réalisateur feu Tidiane Aw.
A travers ses écrits, on sentait également un homme spirituel qui faisait souvent référence au Coran et à Dieu. Dans "sama diabarou nidiaye", expliquant le refus du garçon de coucher avec sa propre tante, il disait : "Sou plaisir tewee tamit, dee dana am. Mak wala ndaw tamit, kou nek dina niam, bekham loumou ligueyal pakham. Dou lolou nieupeu ko kham ?" Il traduisait par là un certain attachement à son Créateur et une peur du péché. Ceux qui le connaissaient bien disent qu'il maîtrisait le Coran. Ceux qui étaient présents témoignent qu'à ses dernières minutes, le rappeur aux "tic tic" récitait le Coran.
"Mon combat"
Sur le plan politique, le Yeumbeulois était très engagé et faisait même partie du comité directeur du Parti démocratique sénégalais. Il soutenait l'ancien Président Abdoulaye Wade et son fils Karim Wade. D'ailleurs, ceux qui fréquentaient la salle de la cour de répression de l'enrichissement illicite (CREI) du tribunal de Dakar l'ont souvent vu aux audiences de Karim Wade. Et sur le plan musical, il a mené le combat avec "Dindi tuuma" dédié à Wade fils et "souma nekoon Président", chanson dans laquelle il étalait ses ambitions.
Cet engagement lui a valu beaucoup de critiques venant de ses pairs. Car, c'est au moment où la majorité des Sénégalais était contre le pouvoir de Wade et que beaucoup de rappeurs menaient une rude bataille pour le départ de dernier que lui a décidé de le supporter.
Il doit au chef de file du Pds le studio qu'il a installé dans son quartier à Yeumbeul et où, selon Modou Diagne Fada, il a commencé à enregistrer son quatrième album qu'il comptait intituler "mon combat". Son "combat" sur terre s'est malheureusement arrêté brusquement, ce samedi 4 juillet 2014. Repose en paix l'artiste.
Le système de santé est malade de ses distorsions qui ont pour noms mal gouvernance pathogène, inefficience des systèmes de contrôle et culte du maquillage. Le rapport de la Cour des comptes a mis l'index sur le détournement d'objectifs qui fragilise la santé des populations sénégalaises.
La Cour des comptes a décelé, dans le rapport qu'elle vient de publier, des manquements dans la gestion du Programme national contre le paludisme (Pnlp), de même que celle du Programme national de lutte contre la tuberculose. C'était dans le cadre d'un contrôle de performance des exercices 2005 à 2010.
Un exemple illustratif de pratiques longtemps décriées aussi bien par des partenaires techniques et financiers que par la société civile, avec comme soubassement : la corruption ou le détournement d'objectifs.
La cour des comptes a ainsi épinglé le Docteur Moussa Thior et M. Malamine Diédhiou, respectivement coordonnateur et gestionnaire et comptable des matières du Pnlp, lors d'une vérification de performance avec comme "objectif global de déterminer si la mise en œuvre des activités de lutte contre le paludisme déroulées par le PNLP a favorisé l'atteinte des objectifs du programme, de même, si elle s'est faite avec une utilisation rationnelle des ressources disponibles".
En remettant en cause l'efficacité du contrôle de qualité interne dans les districts et les hôpitaux et en soulignant le défaut de conception et de mise en œuvre d'un programme, entre autres, le rapport a mis en relief un des facteurs bloquants dans l'atteinte des objectifs de plusieurs programmes de lutte.
La Cour des comptes le souligne en ces termes : "Dans l'exécution financière, des virements internes de crédits sont opérés en violation des règles de la comptabilité publique et des ressources issues des prêts détournées de leurs objectifs".
Il s'y ajoute que "l'existence d'un système d'information adéquat au niveau central est avérée, mais n'est pas complétée par une production de données fiables au niveau opérationnel. L'efficacité du PNLP est largement compromise par une définition peu claire des méthodes de calcul des taux de mortalité et de morbidité, pour apprécier avec plus d'objectivité les performances réelles du Programme".
Conséquence : "les objectifs spécifiques du programme, notamment l'objectif sur la prise en charge des cas de paludisme et l'objectif sur le traitement préventif intermittent (TPI) n'ont pas été atteints." L'actuel coordonnateur du programme de lutte contre le paludisme, le Dr Mady Bâ, dit s'inscrire, pour sa part, dans une démarche de rupture, avec une gestion conforme aux exigences de bonne gouvernance.
"La transparence est de mise. Le système de santé est le plus audité au Sénégal. Tous les bailleurs disposent de leur système d'audit. Une politique de rupture est opérée dans ce sens, ces dernières années". Il se réjouit d'avoir enregistré des avancées notables, grâce au culte de la rigueur.
Le maquillage, ce fléau ronge le système de santé au Sénégal
Pour autant, le rapport de la Cour des comptes arrive aux mêmes conclusions que les rapports publiés ces dernières années sur la gouvernance dans le secteur de la santé. Ils ont mis en lumière une image au rabais d'un système malade de ses pratiques malsaines entretenues par des réseaux souterrains bien structurés qui sucent des milliards de F Cfa au détriment du malade sénégalais, parfois sans éveiller des soupçons.
Les détournements d'objectifs constatés au niveau du Programme national de lutte contre la tuberculose (Pnt) par la Cour des comptes sont tout aussi révélateurs d'un fléau qui infecte le secteur de la santé. Si le rapport 2013 dénonce le fait que "dans les districts de Khombole et de Saint-Louis, les tests de diagnostic rapide (Tdr) mis à la disposition des chargés de traitement pour le dépistage du VIH sont périmés et continuent d'être utilisés", c'est parce que l'argent destiné à renouveler le stock est souvent utilisé à d'autres fins.
Ce qui remet en cause la fiabilité des résultats". Il s'y ajoute que l'inefficience du système de contrôle du matériel décontaminé est aussi mise en évidence dans ce rapport qui lève un coin du voile sur les frais de séjour à l'étranger qui violent les normes, avec un lourd préjudice subi par les "tuberculeux".
"Il arrive qu'un ministre vous dise : j'ai besoin de 10 millions, débrouillez-vous !"
Des pratiques récurrentes exercées par ceux-là qui cherchent à bénéficier des privilèges indus par leurs fonctions. En 2008, le rapport de l'Agence de régulation des marchés publics (Armp) avait épinglé la ministre Awa Ndiaye, pour des détournements de biens publics de 1 338 247 290 F CFA. Des marchés qui "ont été passés et exécutés, sans qu'il ne soit possible de les retracer".
La ministre a été finalement blanchie au mois de janvier dernier par le Doyen des juges, vu qu'il n'a pas pu établir sa responsabilité dans l'attribution de ces marchés. Une décision qui a été remise en cause par des experts qui jugent qu'un ministre est généralement l'ordonnateur des dépenses.
Explication d'un ancien conseiller d'un ministre de la Santé de l'alternance : "La plupart des ministres ne sont certes pas des ordonnateurs, mais ils donnent des directives. Il arrive souvent qu'un ministre vous dise : j'ai besoin de 10 millions de francs, chaque week-end. Débrouillez-vous pour voir comment le justifier."
Dans une logique de complaisance, rares sont les administrateurs ou techniciens comptables qui refusent de s'exécuter, ajoute notre interlocuteur. Ils vont user, pour la plupart, des subtilités de détournement de fonds, bénéficiant en retour de commissions rentières.
Leur modus operandi : "Dans la nomenclature budgétaire d'un ministère ou d'un programme, il y a des rubriques pour la prise en charge d'un groupe d'activités. Pour chaque groupe, il est prévu un montant dans l'exercice budgétaire. En guise d'exemple, si un programme de lutte contre une maladie prévoit un budget affecté à la presse, lors d'un séminaire, quand le ministre ou le coordonnateur exige un détournement d'objectifs, on use de subterfuges pour maquiller ce budget. Il arrive également qu'on détourne un budget pour confectionner par exemple des tee-shirts ou banderoles à l'effigie du ministre pour ses activités politiques à la place de tee-shirts pour le paludisme ou le sida, par exemple. L'appellation est conforme, mais les fonds ont servi à autre chose." Les bailleurs n'y voient le plus souvent que du feu.
Du coup, la santé passe pour une véritable vache laitière qui ouvre la voie à toutes sortes de pratiques qui ont déstabilisé le secteur, avec comme conséquence, une vulnérabilité accrue des populations sénégalaises. A cause de multiples artifices, des auditeurs ont du mal à détecter une certaine traçabilité.
Un directeur d'un programme national, mis à l'écart sous le régime de Macky Sall, confirme cette thèse. "Ce sont des pratiques enracinées dans nos us. Le budget affecté à un programme de lutte aiguise de grands appétits. Parce que j'ai refusé de cautionner ces pratiques, j'ai été combattu et mis en quarantaine", témoigne notre interlocuteur, qui a également préféré requérir l'anonymat.
Il a été contraint de monnayer ses talents dans les organismes internationaux, à cause d'une présence jugée encombrante. Il n'en pense pas moins que l'index doit être pointé vers les administrateurs comptables, cerveau de ces opérations. "On n'a jamais vu des auteurs de telles pratiques emprisonnés, dans notre pays. Il arrive que des responsables de programme soient relevés de leurs
fonctions, mais les comptables qui ont la latitude de dire non à leur tutelle méritent de purger une peine de prison", dit-il.
Des artifices et subterfuges non perceptibles
Une étude sur la Gouvernance et la corruption dans le système de la santé au Sénégal par le Forum civil, en partenariat avec le Centre de recherche pour le développement international (Crdi), a mis en lumière ces artifices qui favorisent une "nonlisibilité des procédés" et témoignent de "la complexité dans l'organisation du système de santé."
Pour pénétrer le système et déceler ces failles qui engraissent toute la chaîne, les chercheurs ont porté, entre autres, la casquette de stagiaire. Déjà en 2004, le Forum civil faisait savoir que "l'espace des cercles vertueux se restreint. Entre autres entorses, la corruption, passerelle de tous les vices, a infecté toute une chaîne, allant du petit personnel au sommet avec ceux qui occupent des positions privilégiées dans les structures de santé".
Ils sont nombreux à user d'ingéniosité pour maquiller les "bons payés et non livrés", les commandes fictives, les surfacturations. Il s'y ajoute l'installation de "taupe" par les fournisseurs au sein des commissions de passation de marchés, pour en maîtriser les règles internes et remettre en cause l'équité proclamée", selon toujours le rapport du forum civil.
Le rapport a également mis à nu le culte du maquillage et de la dissimulation érigé en règle d'or et "imperceptible aux yeux des personnes étrangères à la formation sanitaire". D'autres chercheurs ont décelé une imbrication entre les pratiques corruptives et le fonctionnement réel quotidien des services de l'État.
La corruption, une exigence de la morale ostentatoire en vigueur
Si la corruption a la peau dure au Sénégal, c'est parce qu'elle répond à une exigence d'une société très portée sur la morale ostentatoire. Une société qui a tendance à légitimer l'enrichissement rapide.
À travers une approche anthropologique, des chercheurs ont montré que la corruption est une résultante de cette "générosité ostentatoire" et d'une forte pression sociale exercée par l'entourage. Pour lutter contre cette pratique, il faudra s'attaquer à tout un système soutenu par la culture locale.
Dans une étude, qui date d'octobre 200, 1'intitulé : "La corruption au quotidien en Afrique de l'Ouest, Approche socio-anthropologique comparative : Bénin, Niger et Sénégal", financée par la Commission des Communautés européennes et la Direction du développement et de la coopération suisse (DDC), les auteurs révèlent un système de corruption généralisée aussi bien dans notre pays que dans la sous région. Ils mettent le doigt sur les tares de ce système qui privilégie l'ostentation, en annihilant le sens de l'intégrité.
"Toute une morale de l'ostentation et de la générosité ostentatoire va dans le même sens, et accentue une pression qui, de plus, est exercée directement par la famille proche, les parents, le conjoint ou la conjointe, les enfants".
La corruption "justifiée" et "excusée" est également motivée par "cette exigence d'avoir à "tenir son rang" (sous peine d'être atteint par la "honte"), ou simplement à faire preuve d'un minimum de savoir-vivre ou de générosité (les deux vont de paire), ajoutée au grand nombre de dépendants (parents) qu'il faut souvent entretenir.
Elle implique une pression monétaire constante sur les fonctionnaires (mais aussi sur d'autres catégories socioprofessionnelles), due au décalage entre les besoins sociaux incessants de numéraire et des salaires faibles ou très faibles ; nous appellerons par commodité (et loin de tout vocabulaire économique spécialisé) "sur-monétarisation" cette pression, ce décalage, qui obligent à une quête permanente d'argent liquide (emprunts, dépannages, petits boulots... ou corruption)".
Il s'y ajoute également que "le fait de savoir profiter" du poste occupé (profitoo en wolof ) est ainsi perçu comme un signe de caractère, de forte personnalité, d'audace (dëgër fit en wolof ). Celui qui a su exceller dans cet art est donc, du moins tant que la chance lui sourit, respecté pour avoir relevé le défi, pour s'être distingué des autres.
Du reste, le corollaire de cette admiration, à peine voilée dans les propos de nos interlocuteurs, est une sorte de renversement des valeurs qui débouche sur la ridiculisation des pratiques d'intégrité : celui qui a profité d'un poste "juteux" n'est pas un "fou", mais au contraire quelqu'un d'"éveillé" (en wolof : "doful, ku yeewu là").
En revanche, le fonctionnaire qui ne sait pas "moraliser" avec les gens, non seulement "manque de dignité" ou de "personnalité" (en wolof : "dafa ñàkk fullà ou faayda"), mais il est même antipathique (ku soxor en wolof ) car il ne croit que dans le travail (gëm liggééy en wolof ) et ne s'adonne pas aux plaisanteries (amul caaxaan en wolof ). Dans un contexte dominé par l'incertitude sur le plan économique, on fait l'éloge des capacités personnelles de négociation (en wolof : waxaale), de la compétence dans la recherche de consensus (en wolof : maslaa) et dans la "débrouille" (en wolof : lijjënti)".
Dans cet ordre idée, les enquêteurs ont manifesté leur étonnement par le fait que ‘dans les trois pays concernés (Bénin, Niger, Sénégal), et dans les secteurs pris en compte (douanes et transports, justice, santé, marchés publics), il existe "une étonnante convergence, tant dans les dysfonctionnements administratifs que dans les diverses pratiques "corruptives" (au sens large, rappelonsle) auxquels ces dysfonctionnements ouvrent la voie.
"On se doutait, certes, que d'un secteur à l'autre et d'un pays à l'autre, on relèverait nombre de comportements analogues : nous avons partout retrouvé les mêmes "tendances lourdes" : les mêmes procédures de "détournements" (et détournements de procédures), les mêmes prélèvements indus, les mêmes "arrangements", les mêmes "combines", le tout enchâssé dans une même déliquescence de l'État, un même clientélisme généralisé, et une même impuissance des élites politiques. Même s'il reconnaît l'existence de "fonctionnaires intègres, déplorant tous la gravité du mal, et se désolant de leur impuissance".
Et c'est parce que, dans ces différentes couches sociales, la corruption a fini par être érigée en norme.
De nouvelles conditionnalités fixées par les bailleurs
Les détournements d'objectifs et autres pratiques corruptives poussent de plus en plus les bailleurs de fonds à définir de nouvelles conditionnalités pour le décaissement des fonds.
"Les bailleurs de fonds injectent l'argent des contribuables américains qui sont très exigeants quant à l'utilisation de leurs ressources financières. Ils ont du mal à admettre qu'une manne financière assez importante ne puisse permettre d'atteindre des objectifs fixés par les programmes. Ils bloquent des ressources à défaut de fixer de nouvelles règles du jeu", souffle un observateur du fonds mondial.
S'il souligne que la plupart des responsables de programmes sont "de mauvais élèves", ceux-ci vont devoir faire face à des exigences fermes de leurs bailleurs qui exigent, de plus en plus, des pièces justificatives. "Ils ont de plus en plus tendance à comptabiliser toutes les activités, en envoyant des groupes d'experts pour vérifier si les objectifs ont été atteints. Ils ont leur manuel de procédures. Ils bloquent les fonds s'il s'avère que des justifications ne sont pas conformes.", dit-il .
Les conséquences sont assez lourdes. Les bailleurs ont de plus en plus tendance à serrer la ceinture, suite à des audits. "Ils ne peuvent concevoir qu'ils continuent de financer alors que des malades meurent, faute de prise en charge". Par contre, le coordonnateur du programme national de lutte contre le paludisme, Dr Mady Ba, considère que "la diminution des financements est globale, en raison de la crise économique au niveau mondial". Face à cette situation, ajoute-t-il, "le programme a pu pallier ce déficit, grâce aux ressources locales, par le biais du partenariat privé-public." Non sans faire remarquer que "dans tout système, il existe des gens qui font correctement le travail".
Dr Mady Bâ : "La mafia existe partout"
Ainsi, plusieurs programmes sont en quête de ressources additionnelles pour relever des défis. Les propos de la secrétaire exécutive du Conseil national de lutte contre le Sida (Cnls) ont été diversement interprétés, lorsqu'elle a souligné que "des réformes structurelles sont en vue pour une meilleure prise en charge de la lutte contre le sida". Pour des experts, cela prouve l'absence d'orthodoxie dans la gestion des fonds qui a incité des partenaires techniques financiers à définir des objectifs stratégiques.
"L'Usaid, l'Ue, la Banque mondiale, etc. vont-ils mettre autant de milliards sans les contrôler ? C'est l'argent du contribuable. Les bailleurs doivent rendre compte. Ils ont des experts qui évaluent, qui regardent la structuration. Les Etats donateurs s'inscrivent dans une stratégie de sécurité d'Etat...", confie un observateur du Fonds mondial. Pourtant, selon le Dr Mady Bâ, "la mafia existe partout. Il y aura toujours des brebis galeuses. Si les bailleurs se rendent compte qu'il y a des défaillances dans la gestion, ils bloquent les financements ou exigent des comptes. On peut dire qu'il y a une bonne gouvernance dans le secteur de la santé car c'est un système axé sur les résultats".
PAR FODÉ MANGA ET MIGUEL GODONOU DE SENEPLUS
VIDEO
7 ANS OU 5 ANS ?
Des Sénégalais se prononcent sur la promesse de Macky Sall de réduire son mandat
FODÉ MANGA ET MIGUEL GODONOU DE SENEPLUS |
Publication 06/07/2015
(SenePlus.Com, Dakar) - Sur les plateaux de télévision, sur les ondes des radios, dans les colonnes des jounaux et sur la toile, la question fait débat : Macky Sall doit-il s'en tenir à son mandat de 7 ans ou respecter sa promesse de réduire celui-ci de deux ans ? Le débat est comme monopolisé par les rares privilégiés qui écument ces médias. Les uns sont pour, les autres contre. Naturellement.
Mais qu'en pense le Sénégalais lambda ? Celui qui, souvent, n'appartient à aucune chapelle politique et fait toujours la différence lors des élections. Nous avons tendu le micro à l'homme de la rue. Pour l'essentiel, les opinions convergent : "Macky Sall doit respecter l’engagement qu’il a pris de réduire son mandat", entend-t-on dans cette vidéo de www.seneplus.com. Même si certaines personnes interrogées reconnaissent qu'il sera "difficile" pour le chef de l'État de matérialiser cette volonté qu'il ne cesse de réaffirmer depuis que sa sincérité a commencé à être remise en cause.
LA «BOMBE» FONCIERE RISQUE DE DETONNER AU SENEGAL
RUEE VERS LES TERRES, ACCAPAREMENTS, EXPROPRIATIONS ET REFORME
Le récent forum foncier mondial tenu à Dakar, du 12 au 15 mai 2015, a servi de tribune aux représentants des différentes contrées expropriées par l’Etat au profit d’investisseurs étrangers ou nationaux. En sonnant l’alerte, ils ont pour la plupart signalé que les appétits fonciers en cours pourraient plonger le Sénégal dans l’insécurité alimentaire, la pauvreté, mais surtout la violence. Aussi, malgré une réforme foncière en cours pour réguler le secteur, le Sénégal riche de ses terres risque-t-il d’aller droit dans le mur si on ne prend pas garde aux nombreux conflits que pourrait engendrer une mauvaise gouvernance dans ce secteur. Sud Quotidien revient sur ce dossier explosif pour faire le point de la situation du Nord au Sud de notre pays.
En Mars 2000, au lendemain de la première alternance, le foncier a acquis un grand intérêt au point d’aiguiser les appétits des investisseurs nationaux et étrangers, au détriment des populations locales qui se retrouvent spoliées de leurs parcelles. Si bien que le ministre de l’Agriculture, Dr Papa Abdoulaye Seck, dans son discours officiel de lancement du 7e forum foncier mondial qui s’est déroulé à Dakar du 12 au 15 mai dernier, a promis que l’Etat n’accepterait pas une marchandisation de la terre. En pratique, c’est tout le contraire qui est constaté. La boulimie foncière observée depuis le début des années 2000 est toujours de mise. Aux milliers d’hectares de terres octroyés par l’ancien régime à des particuliers ou des industriels s’ajoutent d’autres qui, malgré la réforme foncière commanditée par le président de la République, risquent d’installer le pays dans une instabilité sociale sans précédent. Le premier exemple est illustré par le soulèvement des jeunes Lébous de Ngor, Yoff et Ouakam, vendredi 15 mai 2015, pour réclamer les terres d’un site situé près de l’aéroport Léopold Sédar Senghor de Dakar. Les jeunes qui voulaient organiser un sit-in sur le site dont ils revendiquent l’appartenance ont finalement fait face aux forces de l’ordre mobilisées sur place pour surveiller le périmètre en question. Une bagarre s’en est suivie qui a occasionné des dégâts matériels, des blessés et quelques arrestations. Récemment, en visite sur le périmètre de l’aéroport international Léopold Sédar Senghor de Dakar, le 26 mai dernier, Abdoulaye Diouf Sarr, ministre du Tourisme et des Transports aériens, a découvert que des spéculateurs fonciers avaient déplacé le mur de l’aéroport sur une superficie de 26 000 mètres carrés, à l’insu de l’Agence des aéroports du Sénégal (Ads). Si l’on évalue le risque ambiant autour de ces dossiers, on se rend compte que le syndrome de Fanaye guette les différentes localités du pays.
Fanaye a vécu le drame
En effet, le 26 octobre 2011, le conseil rural de Fanaye (département de Podor), lors d’une délibération, avait octroyé 20 000 ha de terres à Prince Edward, investisseur italien, Président directeur général de la filiale sénégalaise de la société Senhuile-Senethanol sa, pour la production de bioéthanols. Consciente du danger que représentait cette délibération sur leur sécurité, une partie de la population de Fanaye s’était rendue au siège du conseil rural, pour contester la décision prise par le président du conseil rural, Karasse Kane et ses partisans. Durant cette folle journée du 26 octobre, plusieurs assaillants armés de coupe-coupe, de gourdins et de pierres avaient pris d’assaut la maison communautaire. Des affrontements entre populations (pour ou contre) s’en étaient suivis occasionnant vingt-trois blessés dont deux vont succomber à leurs blessures par armes à feu.
Pour calmer les ardeurs, sans qu’il n’ait été réglé, le problème a été filé comme une patate chaude aux populations du Ndiael, sis entre les communes de Gnith et Rosso dans la région de Saint-Louis, où 20 000 hectares sont déclassés de la réserve naturelle pour être attribués à Senhuile-Senethanol sa. Le Ndiael, site protégé, polarise une quarantaine de villages de près de 9000 personnes qui vivent d’agriculture et d’élevage. Il couvre 46 550 hectares et est classé site Ramsar (convention internationale pour la protection des zones humides) depuis 2004.
Le Ndiael refuse de céder
Les populations du Ndiael regroupées au sein d’un collectif ont engagé le combat pour recouvrer leurs terres spoliées. Le conflit est latent dans cette zone car le collectif de défense des intérêts du Ndiael est prêt à tout pour la restitution de leurs terres. « Nous luttons contre l’installation d’un projet agroindustriel qui s’est vu attribuer 20 000 ha juste avant le 2e tour de la présidentielle de 2012 », a déclaré Ardo Sow, membre dudit collectif. « Nous demandons au gouvernement qui n’a pas fini de mentir encore aux populations à qui ils avaient promis monts et merveilles de revoir sa position par rapport à ce projet. Tout ce que nous demandons c’est qu’on arrête le projet pour qu’on puisse évaluer ses capacités et qu’on remette les terres aux populations qui s’adonnent à l’agriculture et à l’élevage », poursuit-il. Selon lui, on a déclassé une réserve d’avifaunes où vivaient 37 villages d’éleveurs avec plus de 100 000 têtes de bétails composés de bovins, d’ovins et de caprins. « Aujourd’hui, ces 37 villages sont appelés à partir, à quitter cette zone. L’autre préjudice est qu’il n’existe plus de terres dans la commune de Gnith, une commune très récente de 840 km2 », explique-t-il.
Des agriculteurs sans terres
Ce qui est paradoxale dans cette partie du pays, c’est le manque de terres arables. Selon Ardo Sow, le projet Senhuile-Senethanol a créé des agriculteurs sans terres dans la commune de Gnith. « Alors que les agriculteurs autochtones recherchaient des terres pour étendre leurs exploitations, ils avaient demandé un déclassement d’une partie de la réserve, ce qui leur était refusé par l’Etat qui a affecté ces terres à l’entreprise Senhuile-Senethanol. Ce qui fait que toutes ces populations n’ont plus accès à des terres dans leur zone», soutient-il. Toujours selon lui, les populations du Ndiael sont obligées d’aller dans les autres communes pour louer des terres, à l’image de ce qui est arrivé dans la commune de Ronkh dans le département de Dagana où il n’y a plus de terres. Un autre préjudice dénoncé par Ardo Sow est l’impact du projet sur le bétail. Il estime d’ailleurs que c’est le plus énorme préjudice. « Les 37 villages du Ndiael n’ont plus d’espace pastoral, d’espace où ils peuvent jouir de leurs activités socioéconomiques et culturelles. Les éleveurs sont confrontés à des problèmes d’alimentation de leur bétail. Ils sont obligés de parcourir plusieurs kilomètres pour longer les pistes ouvertes par l’entreprise à la recherche de pâturage », fustige-t-il.
« Auparavant, avant l’implantation du projet, le bétail pouvait rester toute l’année dans la zone, mais il est obligé aujourd’hui de partir un peu partout pour survivre. Toutes les pistes, toutes les voies de communication sont fermées. Les femmes sont obligées de parcourir des kilomètres pour aller chercher de l’eau », dit-il pour étayer ses propos. Dans son réquisitoire contre ledit projet, Ardo Sow, a révélé qu’il a « empêché le Prefelac (projet d’adduction d’eau déjà financé) de brancher tous les villages autour du lac de Guiers en eau potable, en creusant en contrepartie des bassins de rétention dont l’eau stagnante est impure à la consommation humaine et même animale».
Ardo Sow a aussi émis sa réserve sur la capacité de l’entreprise de mettre en valeur 1500 hectares sur les 20 000 qui lui sont affectés. Pis, «elle est en train de licencier des personnes alors qu’elle avait promis de créer 5000 emplois. Il y a moins de deux mois, elle a licencié près de 112 employés et c’est sûr qu’elle va encore en licencier d’autres », laisse-t-il entendre. Le Ndiael est une zone humide dont la configuration géophysique est favorable à l’agriculture. Par conséquent, sa jeunesse n’aurait même pas besoin d’émigrer si elle était valorisée. Elle dispose de suffisamment d’eau et d’espace pour assurer sa survie et son autosuffisance alimentaire. C’est le même phénomène d’accaparement de terres qui est aussi observé à Diass dans le département de Mbour (région de Thiès) où pour les besoins de la construction du nouvel aéroport international Blaise Diagne (AIBD), l’Etat du Sénégal s’est octroyé plus de 22 000 ha de terres.
Diass mis en lambeaux
Déjà morcelé comme un rouleau de tissu à se partager en famille à l’occasion d’une fête, Diass n’a pas échappé à l’appétit foncier de l’Etat. En effet, par le décret n°2001-666 du 30 août 2001 transmis au Conseil rural de Ndiass, l’aéroport international Blaise Diagne (AIBD) s’est vu affecter 2601 ha qui seront étendus à 4000 ha. Les populations lasses d’être expropriées de leurs terres ont dénoncé l’accaparement de leurs terres par l’Etat du Sénégal. En vain. Car comme si cela ne suffisait pas, le gouvernement s’était également attribué 14 000 ha destinés à la création d’une Zone économique spéciale intégrée aux alentours du nouvel aéroport Blaise Diagne. Le village lébou de Yène, Poponguine et Diass se situent dans la délimitation de cette nouvelle zone. Dans le souci de créer une autre zone spéciale, qui devrait abriter le marché de Dubaï, l’ancien régime avait aussi délimité 718 ha pour usage d’industries, d’habitations et d’affaires. Du coup Diass a perdu son âme. Atteinte dans ses entrailles, cette localité historique, berceau des migrations Sérères en provenance du Fouta au 16e siècle, est complètement défigurée au plan géomorphologique. Elle n’a pas échappé à la ruée vers la terre, tout comme Ourour qui se rebelle.
Ourour réclame ses 2700 ha
Pour encore éviter un drame à l’image de celui de Fanaye, les populations de la commune de Ourour située non loin de Guinguinéo ont marché le 26 avril dernier avec des brassards rouges pour protester contre l’affectation en 2007 par le conseil municipal de près de 2700 ha de terres à l’entreprise African oil Corporation (Anoc) dans le cadre du plan de retour vers l’agriculture (Reva) lancé par le président Abdoulaye Wade pour lutter contre l’immigration clandestine des jeunes à l’époque. Dans le cadre dudit projet, il était prévu d’employer les jeunes de la localité dans la culture du jatropha à raison d’un pécule de 75 000 FCFA pour les maintenir sur place. Malheureusement, l’entreprise n’a pas respecté les closes du contrat, et s’adonne aujourd’hui à la culture de l’arachide sans employer les jeunes de la commune. Par conséquent, les populations exigent de la nouvelle municipalité en place la désaffectation des terres en question à leur profit pour leur permettre de les exploiter elles-mêmes.
L’exploitation du Zircon fait scandale à Diogo
Interpellé sur l’état des lieux dans la zone des Niayes, Ndiakhate Fall, membre de l’Union des groupements paysans de Mékhé (UGPM) a signalé que l’accaparement des terres est devenu une réalité au Sénégal depuis les années 2002 avec la mise en place au niveau étatique d’un certain nombre de politiques qui ont favorisé le phénomène avec la Grande Offensive Agricole pour la Nourriture et l’Abondance (GOANA), le plan de Retour Vers l’Agriculture (REVA), entres autres. Il a aussi signalé qu’au niveau international, le « Doing business » a favorisé l’investissement dans les pays sous-développés dans les filières agricoles. Ce qui a contribué, à son avis, à la ruée vers les terres dans notre pays et ailleurs en Afrique.
Cet état de fait, dit-il, met en danger les intérêts des paysans dans toutes les zones du Sénégal. C’est dans cette perspective qu’un décret en date de 2006 et tenu secret jusqu’en 2013 a affecté 46 400 ha à une entreprise étrangère pour l’exploitation minière du zircon dans la zone des Niayes à Darou Khoudoss et à Diogo. « Ce qui veut dire que toute la zone comprise entre Cayar et Lompoul fait partie du périmètre d’exploitation. Même à l’intérieur de cette zone, il y a d’autres usines. Et des gens viennent encore faire des sondages dans toute la zone pour voir si c’est une zone minière ou pas. Ce qui est inquiétant pour les paysans. Donc l’ampleur est énorme », révèle Ndiakhate Fall. La société australienne Mineral Deposit Limited (MDL) a d’ailleurs commencé d’extraire le zircon à Diogo, au Nord de Mboro, où elle a obtenu un permis d’exploration sur une surface de 450 km2, soit un gisement de 800 millions de tonnes.
« Aujourd’hui, quand tu vas à Beud Dieng, village situé dans la commune de Médina Ndakhar, il y a un accaparement des terres par des étrangers italiens qui sont venus cultiver du jatropha. Le décret date de depuis 2004 et les populations ne connaissent même pas la surface qui a été mise à la disposition de ces Italiens, car les chiffres qu’on montre au niveau de la communauté rurale sont différents des chiffres qui sont à l’APIX. Tout s’est fait à l’insu des populations qui n’ont pas été consultées.», regrette-t-il.
Le zircon, prochaine source de conflit en Casamance
Le phénomène d’accaparement des terres n’épargne pas la Casamance, au Sud du Sénégal. En effet, depuis le 26 novembre 2004, la société australo-chinoise Carnégie-Astron a bénéficié par arrêté ministériel n°10455 MEM-DMG d’une autorisation d’exploiter le Zircon sur les côtes de la Casamance, du Nord vers les côtes Gambiennes jusqu’au Sud à la frontière avec la Guinée Bissau. Alors que les populations voyaient les limites du projet à Niafrang dans la zone d’Abéné, elles ont été scandalisées de découvrir qu’il s’étend sur environ 750 km2 des côtes de la région. En effet, c’est toute la zone comprise entre Kafountine au Nord et Boukote Wolof au Sud, en passant par Diogué, Carabane, Elinkine, Nhikine, Loudia Wolof, Diakène Wolof, Bouyoye et Diembéring. Ousmane Sané, activiste associé aux habitants de la localité, et appuyé par les ressortissants de la diaspora, est en train de se battre pour alerter l’opinion sur ce scandale foncier qui remet en cause leur droit d’usage des terres, mais aussi l’environnement naturel. Une source qui a requis l’anonymat a d’ailleurs laissé entendre que ce dossier du zircon risque d’être la cause d’un autre conflit en Casamance. Selon lui, les populations ont déjà gagné la sympathie des hommes du maquis qui leur ont promis d’intervenir dès que les responsables du projet feront le déplacement sur les lieux. Et de signaler qu’une forte escorte militaire les avait encadrés jusque là lors de leur dernière visite sur le site Nord du projet.
Raoul Barroso fort de 80 000 ha à Kédougou
En 2008, un scandale foncier a éclaté à Kédougou où pour les besoins d’un parc animalier et d’infrastructures hôtelières un investisseur espagnol s’est vu octroyer plus de 80 000 ha. Dans leur colère, les populations soutenues par la société civile pointent des doigts les trois présidents des communautés rurales de Saraya, Bandafassi et Tomborongkoto. Les populations impuissantes devant les travaux de terrassement déjà entrepris par le promoteur dans la zone de Tomborongkoto ont regardé en juin 2008 les bulldozers déraciner les troncs des grands arbres centenaires qui les ont vues naître et grandir. Cet accaparement des terres est aussi vécu comme un traumatisme par les populations qui ont assisté à l’abattage de leurs arbres fruitiers et à la dégradation de la nature, sans même l’intervention des autorités locales, ni des agents des Eaux et Forêts.
Le cas de Mbane
La communauté rurale de Mbane est l’une des plus célèbres du Sénégal pour avoir enregistré le premier scandale foncier d’envergure nationale porté à la presse. Mais comme pour dire qu’une fois n’est pas coutume, la localité est encore inscrite au livre des records de scandales du Sénégal durant la période comprise entre les deux tours de la présidentielle de 2012. Bassirou Fall, installé comme président de la délégation spéciale à la suite du découpage de Mbane par le décret n°2011-653 du 1er juin 2011 du Président Abdoulaye Wade, avait été limogé par l’ex-ministre de la Décentralisation et des Collectivités locales, Aliou Sow, sur arrêté ministériel. Bassirou Fall avait déjà déclaré sur les ondes de Sud FM le dimanche 20 mai 2012 qu’il avait refusé de signer un document lui présenté par le sous-préfet de Mbane pour octroyer 4312 ha à la compagnie sucrière sénégalaise (CSS).
Pour alerter sur le danger de ce dossier brûlant qui pourrait être source de conflits, le président élu de la communauté rurale de Mbane, Pr Aliou Diack, avait saisi le président Macky Sall. «La cadence des événements dans la communauté de Mbane m’oblige à vous saisir, par cette voie expresse et publique, pour stopper une forfaiture en cours. En effet, au moment où vous avez instruit votre ministre de l’Aménagement du territoire et des Collectivités locales, de définir les modalités pratiques de réinstallation des présidents des collectivités locales victimes des découpages administratifs conformément à vos promesses au peuple sénégalais, des plans sont ourdis dans la communauté rurale de Mbane pour saborder l’entreprise et mettre les autorités devant un fait accompli lourd de tous les dangers, par la spoliation systématique des terres», avait-il écrit au président de la République. En effet, les populations de Pathé Badio (10 villages d’éleveurs Peulh) refusent de céder leurs terres pour la culture de la canne à sucre parce qu’elles y habitent depuis plus de plus de deux cent ans. Par conséquent, elles ne sont pas prêtes de voir leurs mosquées, leurs écoles et leurs cimetières spoliés. Ce qui peut-être une source de conflit.
Depuis toujours, les humains ont accordé une importance particulière à la terre. Si l’entendement populaire la considère comme la mère universelle, la terre constitue au plan scientifique, religieux ou ésotérique, avec l’eau, l’air et le feu, l’un des quatre éléments à la source de la vie. De la terre sont nés les hommes et c’est vers la terre qu’ils retourneront. Elle a servi depuis les temps immémoriaux à abriter les habitats, héberger les tombes et nourrir l’humanité. Au Sénégal, la réforme foncière en cours a un enjeu particulier car la loi 64-46 du 17 juin 1964 est désormais jugée inappropriée. Les directives volontaires proposées par la FAO recommandent de prendre en compte les droits coutumiers. D’où l’intérêt de réformer conformément au vœu du président de la République, Macky Sall. Par souci de mettre tous les acteurs à contribution, la société civile a entamé depuis quelques semaines une tournée nationale pour consulter les populations afin de trouver un consensus dans le cadre de la réforme foncière en cours. Mais il faut reconnaitre qu’avec les expropriations et les accaparements observés un peu partout, le foncier pourrait entrainer des troubles graves dans notre pays si on ne prend pas garde. Espérons que la réforme foncière pourrait corriger certaines erreurs.
ARTICULATION ENTRE AGRICULTURE FAMILIALE ET AGROBUSINESS : REFORMER POUR CORRIGER LES DESEQUILIBRES
Le président de la Commission nationale de réforme foncière (CNRF), Pr Moustapha Sourang, a estimé qu’il est bien possible d’allier l’agriculture familiale à l’agrobusiness. Pour lui, il suffit tout simplement de réformer pour corriger les déséquilibres existants.
« Nous avons reçu l’encouragement des plus hautes autorités en disant qu’il ne faudrait pas que la réforme foncière crée des déséquilibres que nous ne pourrons plus contrôler. Mais en même temps, comme l’agriculture est un bien économique, il faut voir comment mettre en place un dispositif équilibré entre l’agriculture familiale et l’agriculture d’affaire », a laissé entendre Pr Moustapha Sourang, Président de la Commission nationale de réforme foncière qui s’exprimait le 3 juin dernier, à l’occasion de la conférence de bilan de son institution. Selon lui, « il n’est pas question de renouveler les expériences antérieures de 3000 ou 4000 hectares donnés comme ça ». Cette situation a été possible, de son point de vue, grâce à une défaillance des outils de gestion.
« Ce qui s’est souvent passé, c’est que ces contrats ont été donnés sans que l’ensemble des structures soient informées. C’est peut-être un ou deux conseillers qui viennent et qui donnent. Mais il faut de la transparence dans les procédures. Nous avons estimé qu’il doit y avoir un contrôle social car aucun Etat n’a intérêt à déséquilibrer », soutient-il, tout en signalant qu’il y a bien de « la place pour l’agriculture familiale et pour l’agriculture d’affaires ». Et de poursuivre : « Nous ne privilégions pas du tout l’agrobusiness. Les deux peuvent coexister dans le cadre d’un partenariat bien défini et dans lequel les intérêts des populations sont bien préservés. Nous parlons de protection de l’investissement privé national ou étranger. Un observatoire sera mis en place pour suivre la mise en œuvre de ces partenariats ».
Pour ne pas que le Sénégal perde son âme, Pr Moustapha Sourang estime que le concept de « terres, biens culturels » ne doit pas être aliéné. Mais il a tenu à révéler que dans certains CRD, les populations ont signalé qu’elles ne s’opposent pas à l’arrivée de partenaires qui vont travailler avec elles dans des stratégies gagnant-gagnant, car il est clair que la terre doit être mise en valeur. « Il ne faut pas qu’ils viennent prendre toutes nos terres et qu’ils repartent en nous laissant des trous nous ont-elles dit. Ce qui peut bien se comprendre. D’autre part aussi, il ne faudrait pas tomber dans l’excès inverse de céder des milliers d’hectares alors que d’autres peuvent les cultiver », a-t-il déclaré.
PHENOMENE D’ACCAPAREMENT DES TERRES : Vers un audit des délibérations irrégulières
Le «Doing Business», investissement des pays occidentaux en Afrique, au début des années 2000, a favorisé un véritable «tsunami» agroindustriel en Afrique de l’Ouest, particulièrement au Sénégal, où plusieurs milliers d’hectares de terres ont été livrés à des investisseurs étrangers, et même nationaux avec l’agrobusiness. Ce phénomène a entrainé des troubles sociaux à quelques endroits avec une révolte des populations ayant causé mort d’hommes, à Fanaye. Pour régler ces irrégularités, la commission nationale de réforme foncière (CNRF) prévoit un audit des différentes délibérations soupçonnées d’irrégularités. L’annonce est faite par Pr Abdoulaye Dièye, Juriste foncier, membre de la commission technique de la Commission nationale de réforme foncière (CNRF).
Les populations du Sénégal qui sont dépossédées de leurs terres par des délibérations irrégulières doivent se réjouir des travaux de la Commission nationale de réforme foncière. Un audit de toutes les délibérations jugées irrégulières est prévu. « L’un des principes fondamentaux de notre travail, c’est l’audit qui sera fait par rapport à ces délibérations là. Au-delà d’un certain seuil, on va voir si la délibération est régulière, si elle a été faite dans les règles de l’art, pour la mettre en corrélation avec la capacité de mise en valeur », a signalé le Pr Abdoulaye Dièye, Juriste foncier, membre de la commission technique de la Commission nationale de réforme foncière (CNRF). Selon lui, « il est hors de question de dire qu’il y a des gens qui peuvent se prévaloir de 20000 hectares déjà et qu’on doit les transformer automatiquement en baux ». De son point de vue, un audit s’impose. « Nous étions là. Nous sommes conscients qu’il y a eu des délibérations qui ont été faites dans des conditions irrégulières, par rapport à la GOANA. Nous sommes bien conscients de ce phénomène et les mesures idoines vont être prises », a-t-il signalé à l’occasion du point de presse tenu le 3 juin dernier pour livrer le bilan d’étape de la CNRF. Le Pr Abdoulaye Dièye, Juriste foncier, membre de la commission technique de la Commission nationale de réforme foncière (CNRF), estime que s’il y a eu accaparement des terres c’est bien parce que la loi n’a pas été appliquée. « Nous avons vécu un phénomène d’accaparement des terres parce qu’en réalité on n’a pas appliqué la loi. Si on avait appliqué strictement la loi, il n’y aurait pas eu d’accaparement de terres. La loi sur le domaine national est claire et nette avec le principe de l’appartenance à la collectivité », a-t-il signalé.
Le titre foncier est inaliénable
Dans une autre mesure, le juriste foncier a évacué la question des titres fonciers. Il a révélé que malgré une durée de 400 ans au plus, le titre foncier reste inattaquable et inaliénable. « En matière de titre foncier, on ne peut pas dire que ça date de 1900, donc ce n’est plus valable. Le titre foncier est inattaquable. Il n’y a pas de péremption du titre foncier », a-t-il laissé entendre en donnant l’exemple du fameux titre foncier de Bambilor. Cette réponse semble avoir également vidé le cas des titres fonciers de la famille Khayat à Ouassadou. « Le titre foncier est toujours valable tant que l’Etat n’exproprie pas son propriétaire. On ne peut pas dire que c’est un vieux titre foncier, donc ce n’est plus valable. Cela n’existe pas en droit foncier. Il peut durer 400 ans, c’est toujours un titre foncier », explique-t-il.