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27 avril 2025
L'ENFER DE LA DÉTENTION HOSPITALIÈRE AU NIGÉRIA
Il s'agit d'une pratique courante lorsque les patients, en particulier les femmes qui viennent d'accoucher, n'ont pas les moyens de payer leurs frais médicaux
Avant que sa vie ne change irrévocablement, Folake Oduyoye était une femme ordinaire qui travaillait comme créatrice de mode dans la ville animée de Lagos, au Nigeria. « Elle adorait son travail », se souvient son mari, Adeyemi Oduyoye. Il lui demandait souvent de ne pas travailler trop tard, afin qu'ils puissent partir en même temps et rentrer chez eux pour s'occuper de leurs trois enfants. « Je lui disais de faire de son mieux et de laisser le reste pour le lendemain », dit-il avec un sourire triste.
Fin août 2014, Folake se rend à l'hôpital pour accoucher de son quatrième enfant. Après avoir subi une césarienne, elle contracte une infection, puis est transférée dans un établissement public, le Lagos University Teaching Hospital (LUTH), pour des soins d'urgence. La facture de son séjour en soins intensifs s’élève à 1,4 million de nairas, soit environ 4 000 euros, une somme que le couple n’a pas les moyens de payer.
L’hôpital refuse de laisser partir Folake. Elle est transférée dans une aile surveillée et emprisonnée avec les autres patients qui ne peuvent pas payer leurs frais médicaux. Non seulement elle n'a pas le droit de quitter le service, mais elle n’a pas non plus le droit d’y recevoir un traitement. La nuit, Adeyemi dort à ses côtés. La journée, il essaie de convaincre le personnel de l'hôpital de le laisser payer la facture par versements mensuels et de libérer sa femme, qui aimerait être à la maison pour Noël. Mais l'hôpital refuse. « Nous avons passé un mois et treize jours là-bas, sans traitement, sans rien, jusqu’à ce que ma femme commence à tousser », dit Adeyemi.
Une toux qui lui sera fatale. Quelques jours plus tard, le matin du 13 décembre, Folake décède d'une septicémie doublée d’une pneumonie. Aujourd'hui, Adeyemi, un homme mince à la voix douce, pleure encore quand il pense à sa défunte compagne. « Ces gens ont fait de moi un veuf, et de mes enfants des orphelins », dit-il au sujet du personnel de l'hôpital. Depuis, les responsables du LUTH et leur avocate, Onmonya Oche Emmanuel, nient cette accusation, une chose qu’Adeyemi n'accepte pas. « Je veux que justice soit faite. Si je me tais, ils continueront. »
« Dans certains cas, elles ne peuvent pas voir la lumière du soleil et sont obligées de dormir par terre. On ne leur donne même pas à manger. Bien souvent, ces conditions de détention s’apparentent à de la torture » – Onyema Afulukwe, représentante de l’Afrique auprès du Center for Reproductive Rights.
Cinq ans plus tard, le Women Advocates Research and Documentation Centre(WARDC), qu’Adeyemi a contacté après la mort de son épouse, tente toujours de tirer cette affaire au clair. Cette organisation basée à Lagos fournit bénévolement des services juridiques aux femmes victimes de violations des droits humains, notamment de violences domestiques et d’attaques à l'acide. Elle a depuis intensifié ses activités pour prévenir la pratique illégale qui a causé la mort de Folake – un phénomène connu sous le nom de détention hospitalière.
L'incarcération d'une personne dans un hôpital constitue bien entendu une violation du droit à la liberté – et pourtant, cette pratique est étonnamment courante et s’étend bien au-delà du Nigeria. Il s'agit d'un phénomène mondial qui se produit généralement dans les pays où les soins d'urgence ne sont ni gratuits, ni couverts par l’assurance, et où les hôpitaux reçoivent peu ou pas de financement. Les femmes courent un plus grand risque d'être détenues parce que l'accouchement implique souvent des soins d'urgence imprévisibles, comme la césarienne ou le traitement des hémorragies du post-partum. Il est possible que des milliers de personnes au Nigeria soient détenues dans des hôpitaux chaque année, mais sans données, il est difficile de confirmer le nombre exact, rapporte Onyema Afulukwe, représentante de l’Afrique auprès du Center for Reproductive Rights (CRR), basé au États-Unis.
Dans les bureaux du WARDC, l’avocate Emmanuela Azu travaille sur l’affaire Folake. Son sourire facile cache une détermination inflexible. « Dans la culture nigériane, lorsqu'une femme meurt en couches, c'est un acte de Dieu. Mais dans ce cas précis, le décès n’était pas dû à un cas de force majeure. Il était dû à la négligence de quelqu'un », dit-elle.
On retrouve cette même réflexion dans un rapport de 2008 que la WARDC a produit en collaboration avec le CRR sur le taux élevé de mortalité maternelle au Nigeria – qui se classe au deuxième rang mondial. Chaque année, le pays perd environ 40 000 femmes pendant la grossesse et l'accouchement. « Le but du rapport était d'identifier les facteurs cachés ou ignorés qui sont à l’origine d’un grand nombre de décès maternels qui auraient pu être évités », déclare Onyema Afulukwe.
De gauche à droite : Folake Oduyoye pendant, puis avant sa détention à l’hôpital. Photos publiées avec l'aimable autorisation d'Adeyemi Oduyoye
Au cours d'une enquête anonyme dans les hôpitaux nigérians, Afulukwe et ses collègues du WARDC ont découvert plusieurs cas de femmes – souvent celles qui avaient accouché – détenues illégalement. « Ces femmes sont généralement gardées dans un service séparé. Dans certains cas, elles ne peuvent pas voir la lumière du soleil et sont obligées de dormir par terre. On ne leur donne même pas à manger, dit-elle. Bien souvent, ces conditions de détention s’apparentent à de la torture. »
Selon le WARDC et le CRR, la détention des femmes exacerbe le taux déjà élevé de mortalité maternelle dans le pays, notamment en dissuadant les femmes enceintes de demander des soins médicaux par crainte d'être incarcérées.
Dans ce contexte, l'histoire de Folake a été un puissant carburant pour la campagne de sensibilisation du WARDC contre la mortalité maternelle au Nigeria. « Cela a permis de mettre sur la table la plupart des problèmes que nous avons soulevés au fil des ans, comme les frais élevés, la détention et la négligence », explique Emmanuela Azu.
« L'État devrait disposer d'un mécanisme pour faire payer les gens, et non pour les arrêter et leur refuser leur droit à la liberté et à la santé » – Emmanuela Azu, avocate
C’était également l’occasion unique de désigner l'État comme étant directement responsable des décès de femmes dans les établissements de santé. Abiola Akiyode-Afolabi, fondatrice du WARDC, explique que l'organisation se concentre généralement sur des cas comme celui de Folake Oduyoye pour traiter les principaux problèmes d'égalité des sexes au Nigeria – des cas qui « peuvent devenir des recours collectifs, qui peuvent aborder des problèmes à une plus grande échelle », dit-elle. En 2015, ils ont porté l'affaire devant les tribunaux, Adeyemi étant le principal témoin contre l'État.
Pour le WARDC, c’est l'incapacité du gouvernement à fournir un service d'aide sociale fonctionnel à l'hôpital qui contraint l'institution à recourir à des moyens illégaux pour faire payer les gens, poursuit Emmanuela Azu. « L'État devrait disposer d'un mécanisme pour faire payer les gens, et non pour les arrêter et leur refuser leur droit à la liberté et à la santé. »
Mais après plus de deux ans de procédures vaines, l'affaire Oduyoye a été annulée en mai 2018 par la Haute Cour fédérale du Nigeria pour des raisons techniques. « J'étais vraiment très déprimée, dit Emmanuela Azu. Le procès était très frivole et l'affaire n'a même pas été examinée. »
Abiola Akiyode-Afolabi a ses propres soupçons : « Il est évident que l'État essayait simplement de trouver un moyen de classer l'affaire, car si nous avions été jusqu’au bout, cela aurait mis en lumière d'autres affaires dans tout le Nigeria, dit-elle. Ils ne veulent vraiment pas que ce précédent soit établi, et c'est pour cela que nous retournons au tribunal. » Le WARDC a l'intention de continuer à défendre le cas Oduyoye, motivé par le sort de tant d'autres femmes qui en dépendent.
La plupart des travaux du WARDC sur les violations des droits maternels tournent autour de cas plus généraux de faute professionnelle médicale dans les établissements publics, comme des retards dans les soins et des personnels en sous-effectif et sous-payés – des questions qui, après tout, relèvent de la compétence du gouvernement.
Cette approche leur a donné de bons résultats dans le passé. Dans un cas, leur signal d’alarme a donné lieu à une enquête publique dans un hôpital gouvernemental qui avait refusé de soigner une femme. Elle a fait une hémorragie après avoir accouché et est décédée peu de temps après. Dans un autre cas, cinq femmes sont décédées en l'espace d'une semaine après avoir reçu chacune une transfusion sanguine. Le WARDC a découvert qu’une banque de sang locale avait fourni du sang contaminé et l'établissement a été fermé.
Afin de traiter d'autres cas comme celui-ci, le WARDC organise des formations qui enseignent aux avocats comment naviguer de manière créative dans la constitution nigériane pour plaider les cas impliquant les droits maternels, sexuels et reproductifs. En 2017, il a formé 24 juges sur ces questions dans plusieurs tribunaux nigérians. Emmanuela Azu ajoute que l'organisation emploie également une équipe de 20 personnes qui s’occupe du problème en première ligne : à l'intérieur même des hôpitaux.
Ces « observatrices de santé maternelle » sont « des femmes que nous formons à l’espionnage, qui vont à l'hôpital pour enquêter sur leur état », explique Abiola Akiyode-Afolabi. Ces femmes circulent dans une trentaine d'hôpitaux, principalement à Lagos et dans l'État de Kaduna. Elles signalent les cas de négligence hospitalière et identifient également les nouveaux cas de détention illégale.
Funmi Jolade Ajayi est l'un de ces 20 observatrices et travaille comme bénévole pour le WARDC depuis 2012. Elle explique que sa présence a un effet dissuasif sur les mauvais traitements infligés aux patients dans les trois hôpitaux publics où elle travaille régulièrement. « Ils savent que je suis activiste et que je surveille les torts du gouvernement pour les corriger, dit-elle. Ma présence est une menace pour eux. » Elle sollicite également l'aide des femmes enceintes de sa communauté pour rendre compte de la situation dans les hôpitaux et recueillir des preuves photographiques qu'elle partage directement avec la police.
Après la mort de Folake Oduyoye, le WARDC a pris conscience de l'importance d'identifier formellement les cas de détention à l'hôpital à l’aide de son réseau d'observatrices. Le fait d'amener les femmes à parler de leur histoire pourrait révéler l'ampleur nationale de ce phénomène. « Le fait que nous n'ayons pas de données signifie que les gens ne savent pas ce qui se passe », estime Abiola Akiyode-Afolabi.
Le prochain objectif du WARDC est de construire progressivement une action collective contre le gouvernement composée de femmes ayant été détenues. Mais très souvent, et à juste titre, ces femmes veulent prendre leurs distances par rapport au traumatisme. De plus, beaucoup ignorent qu’elles ont des droits censés les protéger contre ces abus.
Par conséquent, la mise en place d’une action collective passe aussi par l’éducation des femmes, ce qui fait partie des principes fondateurs de l'organisation. Le chemin est long, mais Abiola Akiyode-Afolabi est catégorique : « Nous devons nous battre pour plus de responsabilité. Nous pouvons prévenir la détention si nous insistons et si les gens sont prêts à se battre jusqu'au bout. »
LA GUINÉE DISQUALIFIÉE DU MONDIAL U17 AU PROFIT DU SÉNÉGAL
Le jury disciplinaire de la CAF a disqualifié la Guinée, finaliste de la dernière édition de la CAN U17 en Tanzanie, pour fraude sur l’âge concernant deux de ses joueurs
Selon le communiqué, la Guinée est "exclue du tournoi organisé en Tanzanie et ses résultats obtenus durant cette CAN sont annulés".
La Guinée poursuit, le communiqué, est ainsi "empêchée de représenter l’Afrique à la prochaine coupe du monde FIFA U17" en novembre prochain
Les deux joueurs guinéens, en l’occurrence Aboubacar Conte et Tidiane Keita sont "interdits d’exercer toute activité liée au football pour une période de deux ans".
La Guinée, finaliste de la dernière édition de la Ca U17, est aussi "suspendue des éditions 2019 et 2021 de la CAN U17 en vertu des textes de la CAF". Elle devra aussi rendre les médailles d’argent décernés lors de la finale perdue face au Cameroun.
La Fédération guinéenne de Football est sanctionnée d’une amende de 100.000 USD (cent mille dollars américains) pour la falsification des informations communiquées concernant la participation des joueurs au tournoi AFCON U17 organisé en Tanzanie
Le Sénégal au Mondial U17 à la place de la Guinée
Selon le communiqué de la CAF, la Commission d’Organisation sera invitée à "réintégrer le Sénégal et le Comité́ Exécutif d’approuver la participation du Sénégal en tant que 4ème représentant de la CAF à la Coupe du monde de la FIFA U17 qui se jouera en 2019".
Pour rappel, les deux joueurs guinéens Aboubakar Conté et Ahmed Tidiane Keïta avaient fait l’objet d’accusations de la part de la Fédération Sénégalaise de Football, qui estimait qu’ils disposaient de deux passeports différents. Les deux joueurs guinéens avaient notamment participé à un tournoi au Japon quelques mois avant le début de la CAN U17 avec des passeports différents de ceux enregistrés par la CAF lors de la CAN U17.
Le jury disciplinaire de la CAF après avoir examiné les preuves apportées par le Sénégal, a saisi le Japon pour disposer de toutes les informations nécessaires. La CAF a, par la suite, constaté des irrégularités sur les deux passeports des deux footballeurs guinéens qui n’avaient pas les mêmes dates de naissance, encore moins les mêmes dates de délivrance. Le jury disciplinaire a ainsi décidé de sanctionner le Syli national au sortir de cette CAN U17.
par Servan Ahougnon
JERRY RAWLINGS, PUTSCHISTE ROMANTIQUE ET DICTATEUR BIEN AIMÉ
Il n’est pas un saint - Mais pour sa contribution au développement du Ghana, l’ancien président n’a jamais quitté les mémoires de la population locale, malgré son retrait de la vie politique
Au Ghana, tous les chefs d’États vivent dans son ombre et sont comparés à « J.J », comme l’appelait affectueusement la population. D’ailleurs, à une époque, beaucoup d’enfants ghanéens ont rêvé d’être « J.J ». Pas tous, parce que résumer celui qui fut surnommé le « Che Africain » à un simple héros d’une histoire manichéenne enlèverait au personnage toute sa complexité et son ambiguïté. Non, Jerry Rawlings n’est pas un saint. Mais pour sa contribution au développement du Ghana, l’ancien président n’a jamais quitté les mémoires de la population locale, malgré son retrait de la vie politique. Malgré tout, à Accra et dans les autres villes du pays, alors que les élections présidentielles approchent, certains pensent encore à l’inoubliable « J.J ».
Il y a quelques semaines, l’ancien président ghanéen John Dramani Mahama a annoncé son intention de se présenter aux élections présidentielles de 2020. Ce choix, Jerry Rawlings aurait pu le faire à de nombreuses reprises, après avoir quitté le pouvoir en 2001. Mais, depuis, l’ancien chef d’Etat s’est progressivement éloigné de la gestion du pays. Aujourd’hui, il refuse même de bénéficier de la reconnaissance, toujours vivace, acquise durant les presque 20 années passées à la tête du Ghana. Le mois dernier, il a refusé que son nom soit donné à une université. La raison, un de ses principes, rendu public il y a plusieurs années : l’ancien président avait toujours clamé ne vouloir aucun monuments national ou bâtiment portant son nom. Qu’à cela ne tienne. Sa personne même est un monument que les Ghanéens ne sont pas prêts d’oublier.
32 ans, la tête dans les airs, mais les pieds bien ancrés dans la réalité ghanéenne
On est en 1979 quand le Ghana découvre le visage qui a certainement le plus influencé son histoire contemporaine; celui de Jerry Rawlings. Le trait qui frappe le plus quand on s’y attarde est sa barbe, qui ressemble beaucoup à celle du Che Guevara. L’homme a d’ailleurs de nombreuses choses en commun avec le révolutionnaire d’Amérique latine. Ils s’affichent tous deux parés d’un uniforme militaire dont l’autorité est adoucie par une candeur juvénile.
Effectivement, à l’époque où le monde découvre Jerry Rawlings, il n’a que 32 ans. A cette époque, le grand public connaît peu le jeune capitaine de l’armée de l’air ghanéenne. Mais au sein de l’armée, il bénéficie déjà d’une importante renommée, notamment au sein de ses camarades de promotion.
Au sein de l’armée, il bénéficie déjà d’une importante renommée.
Cela est peut-être dû au « Speed Bird Trophy », la distinction récompensant le meilleur pilote de chasse de sa promotion. Selon les rumeurs, le Ghanéen aurait réussi, durant une de ses nombreuses cascades, à faire passer le chasseur-bombardier Soukhoï Su-7, qu’il pilotait, sous le célèbre pont d’Adomi.
Selon les rumeurs, le Ghanéen aurait réussi, durant une de ses nombreuses cascades, à faire passer le chasseur-bombardier Soukhoï Su-7, qu’il pilotait, sous le célèbre pont d’Adomi.
En dehors de ses prouesses à bord de son avion, ses origines sont totalement obscures pour la majorité du grand public. En fait, l’intéressé est né en juin 1947 à Accra. Sa mère, Victoria Agbotui, est ghanéenne, tandis que son père est un chimiste écossais nommé James Ramsey John. A l’État civil Jeremiah John Rawlings, leur enfant, que tout le monde finit par appeler Jerry, débute ses études à l'école d’Achimota. Il les poursuivra au collège de la ville, avant de rejoindre l’armée de l’air. En janvier 1969, il est nommé sous-lieutenant d'aviation. Il poursuit son évolution au sein de l’armée de l’air jusqu’en 1978, année où il est nommé capitaine d'aviation, à 31 ans.
A 32 ans, il décide alors de prendre les choses en main.
Durant son service dans l'armée, Jerry Rawlings se plaint de la détérioration de la discipline et de l’influence de la corruption au niveau du conseil militaire suprême (SMC). Au fil des promotions, il se rend compte de la perte des valeurs et de l’injustice cautionnée par le SMC. A 32 ans, il décide alors de prendre les choses en main.
Un coup d’Etat pas comme les autres
En 1979, le jeune capitaine d'aviation en a assez de la corruption qui mine la redistribution des richesses au Ghana. Mécontent du gouvernement d'Ignatus Acheampong, qu’il accuse de corruption, mais également de maintenir le Ghana dans sa dépendance des puissances coloniales.
A cette époque, Jerry Rawlings est membre du mouvement pour une Afrique libre, créé clandestinement par des officiers militaires souhaitant unifier le continent par une série de coups d'État.
A cette époque, Jerry Rawlings est membre du mouvement pour une Afrique libre, créé clandestinement par des officiers militaires souhaitant unifier le continent par une série de coups d'État.
Le 15 mai 1979, Jerry Rawlings et six autres soldats organisent un coup d'État contre le gouvernement du général Fred Akuffo, qui a également pris le pouvoir par putsch, quelques semaines plus tôt grâce au soutien du SMC. Seulement, rien ne se passe comme prévu. Le coup d’État échoue et Rawlings et ses compagnons sont arrêtés. Publiquement condamnés à mort en cour martiale, l’exécution de Jerry Rawlings et ses compagnons devra pourtant attendre. En effet, leurs discours, durant le procès, sur les injustices sociales et la corruption leur a valu la sympathie de la population qui réclame leur libération.
Publiquement condamnés à mort en cour martiale, l’exécution de Jerry Rawlings et ses compagnons devra pourtant attendre. En effet, leurs discours, durant le procès, sur les injustices sociales et la corruption leur a valu la sympathie de la population qui réclame leur libération.
Finalement, Jerry Rawlings sera libéré le 4 juin 1979 par un groupe de soldats souhaitant purger le gouvernement de sa corruption pour développer le Ghana. L’ancien de l’armée de l’air guide alors le groupe qui arrache le pouvoir à Fred Akuffo et au SMC. Jerry Rawlings crée alors le conseil révolutionnaire des forces armées qui deviendra le conseil provisoire de défense nationale. A sa tête, il organise l’exécution des acteurs qu’il juge responsable de l’état du pays. 8 officiers militaires, ainsi que les 3 anciens chefs d'État : Akwasi Afrifa, Ignatus Acheampong et Fred Akuffo seront exécutés. De nombreuses autres exécutions suivront. Après ce « nettoyage », Jerry Rawlings organise des élections auxquelles il ne participe pas, désirant laisser les civils diriger le futur du pays.
Après ce « nettoyage », Jerry Rawlings organise des élections auxquelles il ne participe pas, désirant laisser les civils diriger le futur du pays.
Hilla Limann est élu. Son gouvernement ne durera qu’une année et demi. Indigné par un retour plus important de la corruption, Jerry Rawlings reprend le pouvoir en 1981, toujours par un coup d’État, mais décide cette fois de rester au pouvoir.
Mon dictateur bien aimé
En décembre 1982, il annonce son programme économique de 4 ans qui se caractérise par la création d'un monopole d'État sur le commerce d'import-export dans le but d'éliminer la corruption entourant les licences d'importation et de réduire la dépendance du commerce vis-à-vis des marchés occidentaux. Chaque dépense de l’État est contrôlée et suivie de manière stricte. Dans le même temps, au plan social l’accent est mis sur le bien être des Ghanéens. L’équipe de Jerry Rawlings crée des comités de défense des travailleurs et du peuple. Les prix des aliments sont revus pour soulager la grande majorité des populations. Pourtant, la politique économique de Jerry Rawlings aboutira à une crise économique en 1983. Les idéaux de l’ancien de l’amée de l’air doivent ployer le genou devant les lois du marché.
Pourtant, la politique économique de Jerry Rawlings aboutira à une crise économique en 1983. Les idéaux de l’ancien de l’amée de l’air doivent ployer le genou devant les lois du marché.
Jerry Rawlings est obligé d’adopter un plan d’ajustement structurel strict. Il a besoin des bailleurs de fonds pour régler les problèmes économiques de son pays. Ces derniers exigent de lui le plan structurel, le retour du multipartisme et des élections. Ce sera chose faite en 1992, lorsque Jerry Rawlings fait rédiger la constitution qui crée la IVème république ghanéenne.
Pendant ce temps, il utilise les prêts du FMI pour un vaste programme de réformes qui réduit les difficultés économiques du pays. Lors des élections présidentielles de 1992, Jerry Rawlings est massivement élu. Il sera réélu 4 ans plus tard, avant de céder le pouvoir, en application de la constitution qui n’autorise que deux mandats successifs. Il s’éloigne progressivement de la vie politique en laissant le Ghana, sur le plan économique, dans un bien meilleur état que lorsqu’il a pris le pouvoir. La corruption a fortement baissé et les institutions de l’Etat sont capables de fonctionner.
Un héritage que le peuple ghanéen n’oubliera pas.
Après lui, le pays ne vivra que des transitions politiques apaisées. Un héritage que le peuple ghanéen n’oublie pas. D’ailleurs, malgré les années écoulées, Jerry Rawlings est toujours très populaire auprès de la population. Récemment, alors qu’il était coincé dans un embouteillage, l’ancien président est sorti de sa voiture pour réguler la circulation et fluidifier le trafic. Il a alors été applaudi par toutes les personnes présentes. Au Ghana, personne n’a oublié qui est « J.J.»
"L'AFRIQUE A UNE GRANDE HISTOIRE ET UN GRAND AVENIR"
Bientôt de retour dans une émission sur Vox Africa, l'ex-secrétaire d'État française Rama Yade, a rejoint la Banque mondiale - Aujourd'hui, c'est pour le continent qu'elle a décidé d'œuvrer
Le Point Afrique |
Eva Sauphie |
Publication 17/05/2019
Éloignée de l'arène médiatique depuis 2017, Rama Yade aura profité de ce silence pour mûrir ses projets et se retourner. Ses déceptions digérées – les législatives de 2012 et la présidentielle de 2017 –, elle est désormais prête à revenir devant les caméras. Sans totalement mettre entre parenthèses la politique, on la retrouvera dès la rentrée prochaine dans un talk-show consacré à l'actualité africaine qu'elle animera sur la chaîne Vox Africa. En attendant, la consultante à la Banque mondiale de Washington entend bien renouer avec le combat qui l'anime depuis toujours, celui des droits humains… toujours en Afrique. Toujours entre deux escales, c'est à Paris, à l'occasion du gala annuel Bridge The Gap – association luttant contre l'illettrisme en France et sur le continent –, que la native de Dakar s'est confiée au Point Afrique.
Le Point Afrique : Travailler pour l'Afrique, une évidence ?
Rama Yade : Oui, j'y ai passé les dix premières années de ma vie. Je n'ai jamais été indifférente à son sort. Pourtant, au cours de ma carrière politique, on m'a souvent reproché de ne pas m'intéresser aux Africains. Or, quand le continent souffre, je souffre ; quand il va bien, je vais bien. Mon engagement pour l'Afrique se concrétise aujourd'hui à travers deux sphères. La première est celle de l'enseignement. Je délivre à Sciences Po Paris un cours intitulé « L'Afrique au centre du monde ». J'aime tellement enseigner que je vais doubler mes heures de cours l'année prochaine. L'Afrique a retrouvé sa centralité dans le monde. Il y a incontestablement un moment africain qui ne s'explique pas seulement par la croissance économique mais aussi par la planétarisation des enjeux africains, pour reprendre la pensée d'Achille Mbembe. À Washington, où je vis désormais, je travaille pour la Banque mondiale sur les questions relatives à la jeunesse, d'une part, et au handicap, d'autre part.
Pour aller jusqu'au bout de votre démarche africaine, avez-vous songé à rejoindre un organisme implanté sur le continent, par exemple la Banque africaine de développement ?
J'avais envie d'expérimenter le rêve américain, de rebattre les cartes après dix ans de politique. Je suis en train d'écrire une nouvelle page, sur une feuille blanche. Je migre, car c'est ma vocation de traverser les frontières, quelles qu'elles soient. L'Amérique est un pays qui m'a toujours fascinée. À Washington, lieu du pouvoir mondial, je suis aux premières loges pour comprendre comment les choses du monde se décident. En France, les politiques se posent la question. De mon côté, j'essaie d'avoir une réponse. C'est une expérience exceptionnelle ! Je viens d'ailleurs d'être nommée senior fellow dans l'un des plus éminents think tanks américains, l'Atlantic Council. Le 22 mai prochain, je vais y modérer ma première conférence sur la République démocratique du Congo.
L'afro-optimisme ambiant n'est-il pas contre-productif ?
Ces dernières décennies, je crois plutôt que c'est un excès d'afro-pessimisme qui a nourri les préjugés sur un continent majeur. À l'heure où il entame un nouveau cycle de son histoire, il revient donc aux philosophes, aux journalistes, aux enseignants et aux poètes de raconter leur Afrique pour qu'elle ne se fasse pas malmener par des récits mortifères. En outre, sur les dix pays qui ont le taux de croissance le plus élevé en 2017, six sont africains. Le continent abrite 60 % des terres arabes. Selon la Banque mondiale, « l'Afrique pourrait être au bord d'un décollage économique, tout comme la Chine il y a 30 ans et l'Inde il y a 20 ans ».
Justement, quel regard portez-vous sur l'émergence africaine ?
La croissance n'est pas uniquement économique. Elle est aussi démographique. L'Afrique constituera un quart de l'humanité en 2050. Depuis la grande saignée de l'esclavage, l'Afrique perdait ses hommes et ses femmes. Désormais, elle est en croissance. Il y a derrière cela un enjeu de mobilité : à cet égard, des préjugés sont à combattre. Sur les quelque 29 millions d'Africains qui vivent à l'étranger, 70 % n'ont pas migré vers l'Europe. C'est à l'intérieur des frontières du continent qu'ils s'installent d'abord. Il y a aussi un enjeu d'urbanité : c'est en Afrique que les villes se rénovent avec les smart cities (NDLR : villes intelligentes utilisant la transition numérique pour améliorer les conditions de vie des habitants). Sur le plan économique, une classe moyenne de 350 millions d'Africains a émergé. C'est un immense marché qui s'annonce. D'autre part, le secteur de l'innovation ne cesse de se développer, les Gafa investissent en Afrique, notamment dans l'intelligence artificielle qui connaît une vraie dynamique en Afrique. Idem pour l'écologie, la révolution a lieu en Afrique. Ce continent, qui a une grande histoire, est en passe d'avoir un grand avenir. Cela a d'ores et déjà d'immenses conséquences sur la marche du monde.
Quel constat tirez-vous des révolutions ? Le peuple africain est-il prêt pour la démocratie ?
Ce qui s'est passé en Algérie et au Soudan dernièrement démontre une volonté farouche des Africains d'embrasser la démocratie. El-Bechir et Bouteflika sont partis, et pourtant le peuple est encore dans la rue. Il ne compte pas se faire voler sa révolution. Les populations veulent aller jusqu'au bout. C'est le signe d'une maturité démocratique. Plus personne ne pourra dire, comme je l'entends depuis toujours, que la soi-disant stabilité des régimes autoritaires est préférable à la démocratie. D'autres pays annoncent aussi leur désir d'ouverture, comme le Cameroun et la RDC. Tous ces pays sont d'ailleurs des continents à eux seuls, qui étaient très importants du temps des empires africains. Je suis satisfaite qu'ils sortent de leur invisibilité et qu'ils retrouvent leur place sur la carte du monde. Sans ingérence, il faut montrer que l'on est derrière eux, parce qu'ils font face à un appareil très répressif.
La question des droits humains continue d'être votre cheval de bataille…
Elle est ma matrice. Mon seul combat, c'est l'homme… et bien sûr la femme. J'ai été ministre des Droits de l'homme. C'était très dur, un combat solitaire. J'ai renforcé la charte contre le phénomène des enfants soldats, j'en ai fait adopter une autre à l'ONU pour la dépénalisation universelle de l'homosexualité, fait des droits des femmes la priorité de l'UE durant ces années-là. En France, en tant que ministre de la Santé et des Sports, j'ai lutté contre l'homophobie et le racisme dans les stades, pour les droits de la femme dans le sport féminin… Mais il y a eu des moments de grâce, comme le jour où j'ai remis à l'hôpital de Panzi, en RDC, le prix de la République françaiseau docteur Denis Mukwege, aujourd'hui Prix Nobel de la paix, pour son action auprès des survivantes de violences sexuelles.
Justement, quel regard portez-vous sur la place des femmes en Afrique ?
Historiquement, les femmes ont toujours eu en Afrique un leadership exceptionnel : des candaces en Nubie qui en sept cents ans fondèrent plus de pyramides que les pharaons d'Égypte en deux millénaires aux femmes de Nder qui s'immolèrent par le feu pour résister à l'invasion maure au Sénégal. Les femmes africaines ont un rôle que je n'ai jamais vu ailleurs. Ce n'est pas un hasard si elles sont en première ligne dans la révolution soudanaise actuelle. Il y a une historicité.
Les femmes africaines produisent aujourd'hui 80 % des denrées alimentaires et représentent 70 % de la force agricole du continent. Selon la Banque mondiale, la production agricole du Burkina Faso augmenterait de 20 % si l'on procédait à un échange des terres cultivées entre mari et femme. Autrement dit, les hommes travaillent moins – quatre-vingt-seize minutes de moins chaque jour. En Côte d'Ivoire, plus de 60 % des entreprises sont dirigées par des femmes. Au Rwanda, les femmes occupent 51 des 80 sièges de l'Assemblée nationale (27 % en France). Malgré ces chiffres, la femme africaine supporte beaucoup !
On la voit avec le bidon sur la tête, le bébé sur le dos, tout en travaillant sur les marchés… Ce n'est pas un poncif. On fait supporter à la femme africaine des souffrances que l'on n'imaginerait même pas faire endurer à une Suédoise. En France, ce n'est pas mieux. On voit les femmes, qui sont souvent co-épouses avec cinq ou six enfants, prendre le RER à 5 heures du matin direction La Défense pour aller faire le ménage chez les décideurs. Il est temps d'en finir avec ce schéma doloriste assigné à la femme africaine.
Quelles sont les solutions ?
Il faut des rôles modèles de femmes africaines enseignantes, chercheuses, médecins qui montrent aux jeunes filles que c'est possible. Pour cela, il est primordial de miser sur l'éducation. Au Sénégal, maintenant, les fillettes sont plus scolarisées que les garçons. Mais le bât blesse au collège quand les jeunes filles se marient. C'est là que l'éducation nationale doit intervenir et créer une véritable action pour lutter contre la déscolarisation.
Continuez-vous à vous intéresser à la vie politique française ?
D'où je suis, à Washington, la France me paraît toute petite. Mais, à mes yeux, elle reste grande et a la capacité de jouer un rôle original sur la scène mondiale. Mais le souhaite-t-elle ? Si les Français sont malheureux, c'est parce qu'ils déplorent le déclassement de leur pays, du 5e au 7e rang mondial. Une information qui est d'ailleurs passée sous silence depuis longtemps. La France ne maîtrise plus l'agenda international, qu'elle doit partager avec les pays émergents du Sud. Bertrand Badie l'avait très bien expliqué : l'entre-soi des puissances occidentales est désormais terminé, contesté.
La France fait face à de nombreuses critiques vis-à-vis de ses interventions militaires, de son action humanitaire, de sa domination linguistique, de sa politique migratoire, de son rôle en Afrique… Pourtant, ce pays représente 1 % de la démographie mondiale et devrait pouvoir peser sur la marche du monde. Mais, pour cela, la France doit aussi manifester sa présence aux côtés des peuples qui luttent pour leurs libertés. Elle doit promouvoir les libertés individuelles et collectives par un soutien aux mouvements de solidarité internationale, par un message et une action de paix.
De quoi avez-vous envie de témoigner pour l'Afrique ?
De l'homme, de la vie humaine. S'il y a bien un combat à mener, c'est celui de montrer que la vie d'un Africain compte autant que celle des autres. Des violences policières faites à l'encontre des Noirs au sort des migrants en Méditerranée et au Sahara, en passant par la prostitution des Nigérianes et les viols de guerre à l'est du Kivu (NDLR : RDC), on a le sentiment que la vie d'un Africain vaut si peu. Et que même une partie des Africains l'a intégré. Cela m'est insupportable. Tout cela est lié aux séquelles de l'esclavage. Tant que l'on contestera l'humanité de certains hommes sur cette terre, je ne dormirai pas tranquille. Raison pour laquelle je suis en mouvement, plus que jamais.
PAR L'ÉDITORIALISTE DE SENEPLUS, DEMBA NDIAYE
VIDEO
LE FONCIER, UNE VÉRITABLE POUDRIÈRE
EXCLUSIF SENEPLUS - Voyage à hauts risques avec Cheikh Oumar Ba, directeur exécutif de l’Initiative prospective agricole et rurale (Ipar), au coeur des problèmes fonciers, agricoles du Sénégal et de la sous-région
Demba Ndiaye et Youssouf Ba |
Publication 17/05/2019
Après une première partie consacrée aux multiples cas où des milliers de populations (agriculteurs, particuliers) font face à de féroces attaques contre leurs terres et terrains, SenePlus poursuit le voyage au coeur de ce qui pourrait bien être les prochaines causes de puissantes révoltes sociales contre les injustices et les politiques du béton.
On l’ignore sans doute, mais notre pays regorge de chercheurs qui ont dédié leur vie pour la défense de l’agriculture. Parmi ces organisations, l’Initiative prospective agricole rurale (Ipar).
Notre éditorialiste Demba Ndiaye a rencontré son Directeur Exécutif Cheikh Oumar Ba, pour un voyage à hauts risques au coeur des problèmes fonciers, agricoles du Sénégal et de la sous région.
Voir l'entretien vidéo réalisé par Demba Ndiaye.
PAR Ouly S.
ÊTRE NOIRE À DAKAR
C’est tout de même ahurissant qu’en 2019, il y ait toujours des hommes, et des femmes d’ailleurs dont le premier et principal critère de beauté est la peau claire, THE light skin
Combien de fois avons-nous entendu des propos similaires ? Apparemment c’est très normal, personne n’y voit jamais d’inconvénient. Et c’est justement ce qui est inquiétant.
Pourquoi à Dakar, Sénégal, pays africain en Afrique (je me trompe ?) avons-nous cette fâcheuse habitude d’associer la noirceur à la mocheté? Et encore pardonnons-nous ce « défaut » aux hommes (en fait on leur pardonne tout dans cette société, mais on y reviendra plus tard). Ñoom daal, « na ñu taali rek, teh gaaw loxo ci poss »… Mais sacrilège s’il s’agit d’une femme !
C’est tout de même ahurissant qu’en 2019, il y ait toujours des hommes, et des femmes d’ailleurs (premières ennemies de la femme, mais ça aussi, on y reviendra plus tard) dont le premier et principal critère de beauté est la peau claire, THE light skin. Quelles que soient vos autres caractéristiques physiques, du moment que vous êtes claire de peau, vous êtes directement classée au-dessus des… Noires. Pourtant, nous sommes bien en Afrique où nous sommes supposés, à l’heure actuelle, assumer notre histoire et notre identité. Pourquoi devrions-nous nous blanchir la peau pour prétendre être belle ?
Comme je disais donc, cela est gracieusement pardonné à ces messieurs, qui eux-mêmes (ñuul teh ñaaw… non je rigole) exigent depuis leurs trônes des femmes claires de peau. Résultat ? Skinlight, saabù carotte et autres produits à l’hydroquinone se vendent à un rythme ahurissant. Un business très rentable, si si, je vous assure. Avec, en plus, beaucoup d’innovations dans le domaine : crèmes, comprimés, sérums, injections… Tout ça pour quoi ? Avec tous les risques sanitaires encourus, et malheureusement, bien connus.
Je vous entends d’ici… Bien sûr, elles ne sont pas obligées de le faire. Et évidemment, toute femme devrait pouvoir s’aimer et s’assumer telle qu’elle est, telle que Dieu l’a créée. MAIS vous connaissez bien notre société : tout tourne autour du mâle Alpha… Ou Arona whatever. Les filles sont souvent éduquées très tôt dans une logique de tout faire pour plaire aux hommes et, à terme, en arriver au mariage : le saint graal (un autre point à aborder plus tard). Tous les moyens sont donc bon pour attirer, séduire, retenir.
La responsabilité est donc partagée. D’une part, les femmes doivent s’accepter, s’assumer, et surtout prendre conscience qu’elles sont belles quelles que soient leur couleur de peau et leur morphologie. Dieu merci, j’ai grandi dans un environnement sain qui m’y a aidée, mais ce n’est malheureusement pas le cas de toutes… Ce qui nous amène au deuxième point : l’entourage. Pour qu’elles puissent faire ce travail sur elles-mêmes, il est important qu’elles soient soutenues : appréciez les telles qu’elles ou, à défaut, évitez toute remarque superflue, désobligeante et non constructive. « Yow temps yi da nga ñuul dh »… ne les aidera sûrement pas dans le processus. De plus, il serait vraiment réducteur de ne considérer que notre physique, quand on a tellement plus à offrir au monde.
Enfin, les hommes. Ah les hommes… Je vous l’accorde, vous faites des efforts récemment. Mais daal, gën leen goorgorlu. Évitez de complexer gratuitement les femmes ! On ne le dira jamais assez, il est important de savoir choisir ses mots (quelle que soit la situation d’ailleurs) parce qu’ils ont un impact certain et qu’on ne peut revenir en arrière pour atténuer les dégâts. Et quand bien même les femmes noires ne seraient pas à votre goût (waaw su leen neexeh deh), de grâce, avancez tranquillement, laissez, il y aura toujours des Hommes pour les aimer et apprécier leur beauté à leur juste valeur.
Et puis saax, Yalna ñu deff ni Rwanda, tereh xessal. Ñuul force, ameen !
SIBETH NDIAYE, PAS DEAD, LA MEUF
La conseillère médias de Macron devient porte-parole du gouvernement et révèle une drôlerie décontractée qui fait pièce à sa réputation de dureté
Libération |
Luc Le Vaillant |
Publication 17/05/2019
On ne s’était jamais rencontrés. Alors, tandis que le photographe dressait son estrade, on est restés là, debout, à regarder par les grandes fenêtres qui donnent sur le jardin. Je me suis étonné des deux poules qui picoraient la pelouse d’un palais que vous trouvez bien silencieux. J’ai compris que les volatiles emplumés avaient débarqué à l’époque Castaner, premier porte-parole du gouvernement Philippe, auquel Griveaux a succédé, le temps qu’un engin de chantier percute la grille d’entrée, et avant que votre tour ne vienne. De fil en aiguille, et parce qu’en civil, vous avez la parole labile et le coq-à-l’âne ductile, l’humour guilleret et le rire claironnant, on en est vite venus à évoquer Nemo, le corniaud du Président, qui se met à l’affût dans la mare de l’Elysée pour y guetter les derniers canards. A l’évocation de cette grande maison où vous étiez conseillère médias, j’ai senti passer comme un friselis de mélancolie sur l’étendue de votre énergie, comme il arrive quand on vire de bord et qu’on se demande si l’on n’a pas lâché la proie pour l’ombre.
Vous étiez la verrouilleuse, vous voilà chargée des opérations portes ouvertes. Vous deviez rationner et compartimenter la parole du maître, vous voilà tenue de l’enluminer et de la magnifier. Vous deviez repousser des hordes de solliciteurs, vous voilà intronisée voix autorisée. Disons que la mutation qui vous attend est aussi difficile que de s’improviser communicant après avoir été journaliste.
Liquidons les affaires courantes. 1) Le chewing-gum ? Vous en mâchez allégrement. Je vous ai même vue le cracher et le cacher dans la poubelle de votre nouveau bureau, mais vous avez compris qu’il vaut mieux s’en dispenser à l’Assemblée, quand on siège au banc du gouvernement. 2) Vous n’avez pas envoyé par SMS «yes, la meuf est dead !» en parlant de Simone Veil. Enfin, pas tout à fait… Mais vous auriez pu et cela n’aurait rien enlevé à votre sincère admiration pour la dame. 3) Fan des super-héros de chez Marvel comme de Rihanna, vous dansez sur les tubes des années 80 et vous avez la jactance décontractée, l’expression imagée et la modernité anglicisée. Alors oui, vous allez faire le «job», comme vous dites. Mais la question est de savoir si vous serez une messagère qui se contentera d’ânonner ou une diva du storytelling qui saura dessiner un horizon, mettre en perspective, articuler l’éparpillé.
Vous êtes une «marcheuse» des origines. Militante à l’Unef, bossant pour Bartolone, puis pour Montebourg, vous n’étiez pas génétiquement programmée pour le «en même temps». La fonction, le hasard et les affinités électives ont fait le reste. Dans le premier entretien qu’il vous a fallu relire, Macron s’en prenait aux 35 heures de votre amie Aubry. Beau contre-pied initial. Dansle Point, la journaliste écrivaine Gaël Tchakaloff vous décrit «confidente, gendarmette, régisseuse, habilleuse, maquilleuse du candidat», puis «doberman et duègne du Président», mais toujours «caporal obtus, écran revêche entre Emmanuel et le reste du monde» (1). Et elle note que votre «langue ne prend pas de gants» et que ces refus frontaux vous valent «l’unanimité de la détestation des médias».
Le souvenir de cette époque «mégère», comme vous dites, n’a pas l’air de vous déplaire. L’on entrevoit une première piste quand vous vous définissez comme un parent «très autoritaire» pour vos trois enfants. Et une seconde hypothèse quand vous racontez comment les trotskistes de l’OCI, qui tenaient alors l’Unef, vous ont appris «la dureté» nécessaire et le courage physique «quand on mesure 1,57 m»pour «tenir les "coords" [les coordinations étudiantes, ndlr] à Rennes-II, face aux gauchos». Car n’oublions jamais que les lambertos de l’OCI détestent les gauchos…
Au début, Macron vous traitait de «gauchiste». Aujourd’hui, c’est vous qui réservez ce qualificatif à votre mari. Il est directeur d’un office HLM dans le 93 et, dans l’appartement du IXe parisien où vous résidez après avoir vécu à Saint-Denis, «les débats sur les APL ou la loi Elan sont devenus d’énormes tabous». Comme vos copains, vous auriez dû voter Hamon ou Mélenchon en 2017. D’autant que vous n’avez pas le profil accommodant des transfuges qui n’attendaient que le prétexte Macron pour glisser à droite et retrouver leur paradis perdu. Vous me faites valoir que vous croyez au «socialisme du réel», que DSK, que vous avez aidé, était très social-libéral. Vous ajoutez «qu’il faut de la discipline et du travail pour que ça marche», et que le revenu universel vous a toujours semblé suspect.
Vos enfants se pensent «caramel», parce que votre mari est «vanille» et vous «chocolat» (2). Ils portent des prénoms africains et un patronyme français du Sud-Ouest, et cela vous ravit. Vous ne vous êtes aperçue que vous étiez noire qu’à votre arrivée à Paris. Votre père, qui luttait alors contre un cancer, tenait à ce que vous veniez étudier en France, comme il l’avait fait. Dans les années 60, vos parents militaient pour les indépendances africaines et se sont rencontrés à la cité universitaire d’Antony. Lui était fils de tirailleur sénégalais et pupille de la nation. Elle se nommait Mireille Bronner, mi-allemande mi-togolaise. Il a fait de la politique et des affaires, devenant PDG de Canal + Afrique. Elle était juriste de haut vol, présidente du Conseil constitutionnel du Sénégal. Il était musulman, elle était catholique, «assez tradi», mais vous faisait réciter Rimbaud et chanter Brassens. Vous êtes «athée» depuis que le décès de votre père vous a appris que le ciel était vide. Mais vous rêvez du «rapport apaisé à la religion» du pays fantasmé de votre enfance. Il vous a d’ailleurs fallu attendre la mort de votre mère pour demander la nationalité française. Vos trois sœurs sont bien plus âgées que vous. Elles sont pharmacienne, banquière et conseillère à l’ONU. C’est elles que vous avez appelées quand il s’est agi de sortir de l’ombre.
On parle des tenues de Macron, de ses chaussettes qui se voyaient quand il se tenait debout, «fashion no-no» auquel il a fallu mettre bon ordre. Vous aimez coudre, en manuelle à qui il plaît de démonter les machines pour voir ce qu’elles ont dans le ventre. Le jour de notre rencontre, vous portez une robe noir et jaune qui vient de chez «Héroïnes», «oui, avec un "s"». Elle va bien à une silhouette que vous qualifiez, avec allégresse, de «rondouillette». Et, tout en vous tâtant les bourrelets, vous ajoutez : «Ça convient à celles qui ont du bidou.» Du bidon ? Non, non, «du bidou» !
Chère Sibeth, ce mot assez chou vaudra une perpétuelle indulgence à la terrible macronista que vous demeurez avant tout.
(1) Le Point du 2 août 2018.
(2) Le Parisien du 7 avril.
1979 Naissance à Dakar. 1986 Arrive en France. 2002 Prend sa carte au Parti socialiste. Mai 2017 Conseillère presse à l’Elysée. Mars 2019 Porte-parole du gouvernement Edouard Philippe.
SÉNÉGAL-RWANDA, DEUX PAYS FRÈRES RÉUNIS À PARIS POUR LE DIGITAL
Le président et son homologue rwandais ont visité ce vendredi le salon Viva Technology, à Paris - Les deux nations, aux trajectoires différentes dans ce secteur, y ont défendu leur stratégie digitale respective
Jeune Afrique |
Marième Soumaré et Romain Gras |
Publication 17/05/2019
En visite express à Paris, le président rwandais Paul Kagame participait, pour la deuxième année consécutive, au salon Viva Technology, dédié aux innovations et aux start-up. Il y a retrouvé cette année son homologue et « frère » sénégalais Macky Sall, lui même en visite dans la capitale, où il a participé mercredi à la signature de l’Appel de Christchurch contre la diffusion des contenus terroristes en ligne. Les deux chefs d’État ont participé à un panel animé par le président du conseil de surveillance de Publicis Groupe, Maurice Lévy, proche de Paul Kagame.
Hub numérique
Les deux chefs d’État étaient conviés, vendredi 17 mai, à échanger sur l’impact de la technologie sur les économies africaines. Et ce, alors que le Rwanda a une longueur d’avance sur le Sénégal en termes de développement numérique. Souvent présenté comme l’un des principaux hubs digitaux du continent, le Rwanda, qui s’est hissé au 29e rang du dernier classement Doing Business de la Banque mondiale – soit le 2e pays du continent derrière Maurice -, souhaite faire de Kigali une terre d’expérimentation pour les entreprises de la tech.
Preuve de la bonne santé de l’environnement numérique au Rwanda, les start-up de ce pays de 12 millions d’habitants ont réussi à lever 19 millions de dollars en 2018 – soit 8 millions de plus que l’Éthiopie. “Ce chiffre est le résultat de notre investissement dans les technologies. Aujourd’hui, il est simple de créer une entreprise au Rwanda. L’expansion de la fibre optique à travers le pays et la présence de structures comme KLab (un incubateur de start-up) facilitent la création d’un environnement favorable”, explique Soraya Hakuziyaremye, la ministre rwandaise du Commerce et de l’Industrie, présente dans la délégation du président Kagame à Paris.
Macky Sall, quant à lui, voit le digital comme un outil indispensable pour accéder à l’émergence. « L’Afrique a raté la révolution industrielle, elle ne va pas rater la révolution numérique », a prévenu le chef de l’État sénégalais. Ce dernier se donne comme objectif de voir le secteur peser 10% du PIB, en favorisant la création d’emplois et les gains de productivité. Cité du savoir de Diamniadio, supercalculateur livré en juillet prochain, mise en place d’un mécanisme de financement de l’entrepreneuriat, investissements dans les infrastructures de fibre optique, accent mis sur l’éducation scientifique et informatique…
Macky Sall a présenté plusieurs mesures témoignant de sa « volonté politique » de voir son pays bondir vers une société moderne, changeant la perception du continent dans le monde : « L’Afrique n’exporte pas que de grands joueurs ou de grands musiciens, mais aussi des grands cerveaux et des ingénieurs », a-t-il voulu rappeler.
Le président rwandais, de son côté, a insisté sur la nécessité d’investir en parallèle dans la formation pour exploiter pleinement le potentiel des start-up africaines. “L’Afrique a beaucoup de gens talentueux mais ils servent le reste du monde. Si nous développons le bon environnement, ils serviront aussi l’Afrique”, a-t-il affirmé lors du panel, citant l’exemple de l’Université américaine Carnegie, qui a lancé son antenne africaine, basée à Kigali, au printemps 2015.
Le méga-projet Kigali Innovation City, nouveau quartier dédié aux nouvelles technologies, censé regrouper à terme d’autres écoles et universités, des laboratoires et des entreprises, est toujours en cours d’élaboration. Selon la ministre rwandaise du Commerce, le Rwanda espère lever près de 100 millions de dollars cette année pour ce projet.
L’enjeu du financement
Après leur intervention, les deux présidents ont entamé une visite conjointe de l’espace Africatech, dédié aux start-up africaines. Quelques 160 jeunes pousses issues du Maroc, d’Algérie, de RDC ou encore de l’île Maurice y exposaient leurs innovations et partageaient l’espace avec l’un des poids lourds du numérique : Jumia, une plateforme de e-commerce récemment introduite en bourse à New-York. L’Organisation internationale de la Francophonie (OIF), qui a élu l’ancienne ministre rwandaise Louise Mushikiwabo à sa tête en octobre 2018, y comptait pour la première fois son pavillon.
Le salon est une opportunité pour les jeunes entreprises d’attirer l’attention des investisseurs internationaux et des géants du numérique. “L’enjeu, aujourd’hui, en termes d’investissement, est de faire en sorte que les entrepreneurs et les compagnies déjà existantes puissent avoir accès à des financements moins coûteux, ce qui est un challenge, surtout au regard des taux que le système bancaire applique à l’échelle de l’Afrique. Il faut s’ouvrir à différentes sortes de financements, comme les levées de fonds privées, et mettre en place les régulations nécessaires pour créer un environnement sain pour les investisseurs”, a expliqué Soraya Hakuziyaremye.
La délégation de Macky Sall était composée notamment de la ministre de l’Économie numérique et des télécommunications, Ndeye Tické Ndiaye Diop, du ministre des Affaires étrangères, Amadou Ba, et de l’ambassadeur français à Dakar, Christophe Bigot. Le président sénégalais s’est également entretenu avec le ministre français de l’Économie, Bruno Le Maire. Avec vingt-cinq start-up présentes et un pavillon national au sein du salon, le Sénégal a souhaité montrer qu’il avait lui aussi sa place dans le domaine du numérique.
Un moyen de s’aligner sur son « frère » rwandais, dont il a reconnu le leadership dans le domaine des technologies de l’information et de la communication. « Le Rwanda est un exemple pour le Sénégal » dans le domaine du digital, a également concédé la ministre sénégalaise de l’Économie numérique. « Notre pays n’est pas en reste », a-t-elle immédiatement poursuivi : « Nous n’avons pas le choix. L’Afrique se développera par le numérique, qui est le socle de l’émergence de nos pays. »
Internet trop cher
Pour soutenir ses start-up, le Sénégal s’est ainsi doté d’un fonds dédié aux jeunes et aux femmes, dépendant directement de la présidence. Papa Amadou Sarr est à la tête du dispositif : « Nous avons un fonds de plus de 30 milliards de francs CFA (50 millions d’euros) par an pour pousser les entrepreneurs, via des ressources financières, un accompagnement technique et des formations. Pour le cas concret du numérique, nous avons mis en place un fonds de 15 milliards de FCFA (environ 25 millions d’euros) » pour soutenir le lancement des start-up, détaille-t-il.
Macky Sall a toutefois reconnu un obstacle à la croissance impulsée par le digital : le coût de la connexion Internet. « Internet reste très cher en Afrique », a rappelé le chef de l’État sénégalais, pour qui un accès généralisé à la connexion reste un défi sur le continent.
La visite en France de Macky Sall, qui doit s’achever samedi, s’est poursuivie par une rencontre avec Valérie Pécresse, la présidente de la région Île-de-France. Le président Paul Kagame, qui a ensuite rendu visite à la secrétaire générale de la Francophonie, son ancienne ministre des Affaires étrangères Louise Mushikiwabo, dans les locaux de l’OIF, quittera Paris le même jour.
40% DES SÉNÉGALAIS SOUFFRENT D’HYPERTENSION ARTÉRIELLE
Au Sénégal, l’hypertension artérielle (Hta) cause des dégâts énormes chez les patients. Sa prise en charge est couteuse aussi bien pour les malades que pour l’Etat. Selon la cardiologue Dr Marième Ly,
Considérée comme le tueur silencieux, l’hypertension artérielle qui fait partie des maladies non transmissibles (Mnt) fait des ravages dans les pays sous-développés comme le Sénégal. A la veille de la Journée mondiale de l’hypertension artérielle qui sera célébrée aujourd’hui, un diagnostic sur les facteurs de risque, les conséquences et les moyens de prévention de la pathologie a été établi. Selon la cardiologue Dr Marième Ly, 40% de la population sont hypertendus.
Au Sénégal, l’hypertension artérielle (Hta) cause des dégâts énormes chez les patients. Sa prise en charge est couteuse aussi bien pour les malades que pour l’Etat. Selon la cardiologue Dr Marième Ly, les causes de cette pathologie sont surtout liées à l’hérédité et à l’alimentation notamment la consommation excessive de sel. «Si les parents sont hypertendus, cela peut favoriser l’installation d’une hypertension artérielle», explique-t-elle.
Les manifestations de l’hypertension chez un sujet qui en souffre sont des maux de tête, des bourdonnements d’oreille, parfois des flous visuels ou l’impression de voir des mouches volantes et des vertiges. «La plupart du temps, il n’y a presque pas de symptôme, ce qui fait la gravité de cette pathologie. Les Anglo- saxons parlent du tueur silencieux, puisque chez la plupart des personnes, il n’y a aucun signe. C’est lorsqu’on fait un contrôle que l’on voit qu’il y a l’hypertension artérielle», indique-t-elle tout en évoquant sur les Accidents vasculaires cérébraux (Avc) qui peuvent être favorisées par l’Hta. «L‘excès de cholestérol et le diabète aussi sont des facteurs favorisants d’Avc.
Toutes ces pathologies étant des facteurs de risque cardio vasculaire. Quand on dit cardiovasculaire, c’est le cœur et les vaisseaux ; cela peut être les vaisseaux cardiaques ou les vaisseaux cérébraux», précise Dr Ly qui détecte deux types d’Avc. «Il y a le type ischémique qui se définit comme un caillou qui se détache soit au niveau du cœur, soit au niveau des vais- seaux du cou pour aller obstruer une artère cérébrale. Souvent, cela laisse des séquelles comme la paralysie d’un côté. L’autre type d’Avc, c’est celui hémorragique. Là, c’est le vaisseau ; une artère se déchire et on assiste à une inondation de sang dans le cerveau.
Pour ce type d’Avc, c’est souvent difficile de s’en remettre, c’est exceptionnel que la personne soit sauvée», alerte-t-elle. Dans le même sillage, Dr Marième Ly renseigne qu’il existe un Avc qui n’est pas causé par l’hypertension artérielle, mais qui découle plutôt d’une malformation. « Il y a une malformation au niveau du cerveau et quand un vais- seau se déchire, c’est difficile de sauver la personne. On a pu sauver quelques cas en faisant une intervention chirurgicale. Mais dans plus de 80% des cas, c’est fatal», soutient-elle.
«IL FAUT QUE LES PERSONNES ATTEINTES DE HTA ÉVITENT DE MANGER TROP SALÉ APRÈS LA RUPTURE DU JEÛNE»
Selon Dr Marième Ly, les sujets qui souffrent de Hta doivent éviter de manger trop salé durant le ramadan. «En réalité, il n’y a pas de contre-indication s’il s’agit d’une hypertension artérielle simple. On demande juste à la personne de prendre ses médicaments et d’éviter de manger trop salé. Avec le rama- dan, nous avons tendance le soir à manger trop salé et en excès. Il faut contrôler régulièrement la tension et veiller à ce que l’alimentation ne soit pas trop salée le matin et le soir», recommande-t-elle.
A propos des moyens de prévention, certains facteurs ne sont pas modifiables comme l’hérédité et l’âge. «Mais, il y a lieu de privilégier la prévention surtout au niveau alimentaire et de la pratique du sport». Jusqu’à la ménopause, explique Dr Marième Ly, les femmes sont souvent protégées.
«Le principal motif de consultation de nos patients est l’hypertension artérielle, seule ou associée à d’autres facteurs de risques. Au Sénégal, 40% de la population sont hypertendus d’après les enquêtes que l’on a faites sur le terrain aussi bien en milieu hospitalier que dans le privé et même dans les visites annuelles que nous faisons dans les entreprises», renseigne-t-elle.
Par Samboudian KAMARA
LES DEUX MAMELLES D’UNE DÉMOCRATIE «APAISÉE»
Une idée voudrait faire croire que le consensus est vital en démocratie - Au contraire, il peut devenir l’un de ses pires ennemis surtout quand l’unanimisme fait taire les différences, gomme les originalités
Une idée voudrait faire croire que le consensus est vital en démocratie. Au contraire, il peut devenir l’un de ses pires ennemis surtout quand l’unanimisme fait taire les différences, gomme les originalités. Du moins, c’est ainsi que l’on conçoit cette dynamique d’échanges dans les démocraties occidentales. Mais en Afrique, peut-on en faire l’économie ?
Certes, il est souligné à longueur de traités de science politique que l’accord préalable des acteurs sur « les règles du jeu », en particulier les modalités d’organisation des scrutins, est nécessaire pour labelliser un processus, mais jusqu’où opère cette exigence ? Ici, un nouveau round de pourparlers a été entamé entre les différentes parties prenantes du jeu politique avec comme enjeu la construction d’un dialogue national.
Hier, la majorité a exprimé sa volonté de ne pas s’opposer à l’idée d’une commission cellulaire dirigée par une personnalité « neutre » pour conduire les discussions. Ça fleure bon le début des années 90 quand la classe politique avait réussi à se retrouver autour du juge Kéba Mbaye (1924-2007) pour adopter, en 1992, un Code électoral « consensuel ». Que nous réservent ces nouvelles assises plurielles ? Les contextes sont naturellement différents. Il y a 27 ans, le pays sortait de sa première expérience d’un gouvernement ouvert à l’opposition.
Le Pds et le Pit avaient, en effet, accepté de rejoindre le Parti socialiste au pouvoir après le douloureux épisode de la présidentielle de 1988 qui avait été marquée par une crise politique majeure née de la contestation du scrutin et des tensions qui l’avaient suivie (émeutes, état d’urgence, couvre-feu, emprisonnement de leaders de l’opposition dont Me Abdoulaye Wade et ses principaux lieutenants de l’époque) avec, au bout, une année scolaire et universitaire déclarée « blanche » par le gouvernement. Le président en exercice, Abdou Diouf, s’était rallié à l’idée que le « sharing power » avec l’association de l’opposition aux affaires, était la voie idéale de sortie de crise. Deux ans après, un retentissant discours tenu à La Baule le 20 juin 1990 par le président François Mitterrand, enjoignait les pays d’Afrique subsaharienne à se reconvertir à la démocratie pluraliste.
Des conférences nationales suivirent, qui ouvrirent les esprits et les usages au pluralisme… Aujourd’hui, aucune « crise » visible et incommode ne balafre la « vitrine démocratique » sénégalaise si ce n’est la rupture de confiance entre les acteurs politiques, particulièrement entre le président Macky Sall et « ses » oppositions. Le dernier indice de cet état de fait est le refus des candidats malheureux à la dernière présidentielle de reconnaître la victoire du quatrième président de la République à ce scrutin même si aucun recours n’a été déposé par leurs soins aux fins de contester les résultats ! Il est vrai que cette même opposition avait été échaudée par un premier « dialogue politique », le 28 mai 2016, dont l’organisation au finish, selon elle, n’aurait servi qu’à donner « un cadre justificatif à la libération » de Karim Wade alors en détention suite à sa condamnation dans l’affaire dite de « la traque des biens mal acquis ».
Et le parrainage citoyen instauré pour réguler les candidatures à la magistrature suprême (pour permettre justement un scrutin organisable) était venu ajouter une couche dans la sédimentation des rancœurs de l’opposition contre un régime qui surfe sur une vague de succès électoraux depuis son installation en 2012. Le fait est qu’a priori, aucune crise institutionnelle ne leste le déroulement du processus démocratique pour justifier cette initiative généralement instruite pou dégoupiller des situations inextricables. Pourquoi donc un dialogue national alors que le chef de l’Etat dispose de toutes les majorités nécessaires au déroulement de son magistère ? C’est que le péril politique est latent ; que malgré la validation des scrutins par les observateurs nationaux et internationaux ; que malgré la légalité des nouvelles lois et réformes attestée par le Conseil constitutionnel, des acteurs trouvent toujours à redire à propos de la méthode.
Alors que la tonalité de sa politique est fortement économique et sociale, enrobée dans un pragmatisme qui se déroule sans états d’âme avec l’obsession de résultats palpables par ses concitoyens, dans une nouvelle séquence qui le voit aborder son deuxième mandat avec tous les instruments de pouvoir en sa disposition, le président Macky Sall semble vouloir accélérer le retour du caractère « apaisé » de notre démocratie. Le succès des entreprises tendant à légiférer pour accorder un statut au chef de l’opposition et définir les modalités de financement est conditionné par un nouvel état d’esprit des acteurs. De nécessaires concessions sont donc inéluctables de part et d’autre. In fine, il faudrait réhabiliter le concept même de consensus dans la vie politique courante, et ne pas attendre des situations d’urgence nationale pour en apprécier la pertinence démocratique.