SenePlus | La Une | l'actualité, sport, politique et plus au Sénégal
26 avril 2025
Diaspora
LES DICTATEURS PERDENT TOUJOURS À LA FIN
La journaliste Peggy Sastre bouscule les idées reçues dans sa tribune publiée ce lundi dans Le Point. Derrière la lenteur et les compromis des démocraties se cache une force insoupçonnée que les dictatures sous-estiment systématiquement à leurs dépens
(SenePlus) - Ce lundi 21 avril 2025, la journaliste et chroniqueuse Peggy Sastre signe un éditorial remarqué dans Le Point, intitulé "La leçon que les dictateurs refusent d'apprendre : la démocratie gagne toujours à la fin". Dans cette tribune, l'autrice défend vigoureusement la supériorité du modèle démocratique face aux régimes autoritaires, malgré les apparentes faiblesses qu'on lui prête.
Peggy Sastre part d'un constat : dans le climat politique actuel, les démocraties sont souvent taxées de "mollesse" tandis que les régimes autoritaires séduisent par leur apparente efficacité et leur capacité de décision rapide. Elle réfute cette vision binaire qu'elle juge non seulement trompeuse mais "pernicieuse".
"La force de la démocratie ne réside ni dans la violence ni dans la pureté idéologique, mais dans sa complexité assumée, sa plasticité, sa capacité à absorber le conflit sans se désagréger", écrit-elle, défendant ce qu'elle nomme la "psychologie modérée" comme l'un des piliers essentiels de la démocratie libérale.
L'éditorialiste s'appuie notamment sur les travaux de Nassim Nicholas Taleb pour développer son argumentation. Elle explique que la démocratie appartient à la catégorie des systèmes "antifragiles" - ceux qui, loin de se briser face aux chocs, s'améliorent grâce à eux. "Ce qui passe pour de l'instabilité est en réalité une formidable capacité d'adaptation", souligne-t-elle.
À l'inverse, Peggy Sastre pointe la fragilité intrinsèque des régimes autoritaires : "Leur vision est unique, imposée d'en haut, leur hostilité à la critique est farouche – autant d'ingrédients d'une solidité de façade." Elle illustre son propos par plusieurs exemples historiques, de l'URSS à l'Irak de Saddam Hussein, en passant par le Venezuela chaviste et la Libye de Kadhafi.
"La démocratie est d'une autre nature. Plus humble dans ses promesses. Plus apathique dans ses décisions. Mais plus robuste, précisément parce qu'elle ne prétend pas tout contrôler", conclut-elle dans cet éditorial qui intervient dans un contexte mondial marqué par la montée de discours autoritaires et la fragilisation de plusieurs démocraties.
VIDEO
LA COURSE CONTRE LE TEMPS D'HAMPÂTÉ BÂ
Du papier carbone au fichier numérique, l'héritage colossal d'Amadou Hampâté Bâ, témoin de l'Afrique précoloniale à postcoloniale, traverse les époques pour atteindre les nouvelles générations
"En Afrique, chaque fois qu'un vieillard meurt, c'est une bibliothèque qui brûle." Cette phrase célèbre prononcée par Amadou Hampâté Bâ à l'Unesco en 1960 résonne aujourd'hui avec une actualité particulière alors que la Fondation qui porte son nom s'attelle à préserver un trésor inestimable de connaissances africaines.
Né vers 1901 au Mali, Amadou Hampâté Bâ a consacré sa vie à sauvegarder les traditions orales africaines menacées de disparition. Ayant lui-même reçu une éducation à la croisée de plusieurs mondes - école coranique, école coloniale française et traditions ancestrales - il était particulièrement bien placé pour comprendre l'urgence de préserver ce patrimoine immatériel.
"Il a vu l'Afrique avant la première administration coloniale, pendant la colonisation et après les indépendances. Il a traversé le siècle et compris les enjeux", explique sa fille Roukiatou Bâ, qui dirige aujourd'hui la Fondation à Abidjan.
L'héritage documentaire est impressionnant : plus de 3000 manuscrits numérisés à ce jour, des milliers de pages de notes, de conférences et de témoignages recueillis pendant 55 années de recherche. Ces archives abordent des sujets aussi variés que l'histoire africaine, les traditions religieuses, la place de la femme ou l'avenir de la jeunesse.
La professeure Diané Assis, spécialiste de l'œuvre d'Hampâté Bâ à l'Université d'Abidjan, souligne l'importance de ce qu'elle nomme son "triple héritage" : "Il a su intégrer les traditions africaines, l'influence arabo-musulmane et la culture occidentale pour créer une œuvre accessible à tous."
Face à la rupture des modes traditionnels de transmission, causée notamment par la colonisation et l'école occidentale, Hampâté Bâ a fait le choix d'utiliser l'écrit, principalement en français, pour toucher un public plus large. "Les initiations traditionnelles ne pouvaient plus se faire car les jeunes devaient suivre le calendrier scolaire", rappelle la professeure Assis.
Aujourd'hui, la Fondation fait face à de nouveaux défis. La conservation des documents dans un environnement à 97% d'humidité représente un défi quotidien, malgré les déshumidificateurs installés. "Certains documents sont super fragiles, sur des papiers carbone. Chaque manipulation les abîme", s'inquiète Roukiatou Bâ.
La numérisation systématique est en cours, document par document, mais les moyens manquent. "On lance un appel à tous les Africains pour s'impliquer. Les États eux-mêmes devraient porter cette initiative", plaide la directrice de la Fondation.
L'enjeu est désormais de faire le pont entre l'écrit et le numérique, pour atteindre une jeunesse connectée. "Comment nous, détenteurs de contenu authentique, pouvons-nous le rendre accessible à la jeune génération sur des supports susceptibles de les attirer?", s'interroge Roukiatou Bâ, rappelant que son père avait déjà anticipé l'importance de l'audiovisuel, car "l'image prédomine dans la pensée africaine".
La Fondation Amadou Hampâté Bâ reste ouverte aux chercheurs et aux jeunes désireux de s'abreuver à cette "source inaltérée toujours d'actualité". Un trésor culturel qui, grâce à la persévérance d'un homme visionnaire, n'a pas entièrement brûlé.
LE CRIME DE LÈSE-BUDGET N’EXISTE PAS !
EXCLUSIF SENEPLUS - Même si la Haute cour de justice est une juridiction d’exception, les juges ne manqueraient pas de convoquer le principe de l’opportunité de poursuivre Macky Sall pour haute trahison sur la seule base d’une dette sous-évaluée
Honorable député, l’honneur, la réputation et l’avenir de ce pays dépasse Macky et vous dépasse …nous dépassent tous. L’exécutif et le groupe parlementaire Pastef ne doivent pas vous suivre, vous leur faites prendre le risque d’un revers juridique et politique inutile.
Faisons semblant de croire qu’un tel projet n’a pas eu l’aval préalable de sa hiérarchie politique. Le député, M. Guy Marius Sagna, a convoqué ce 11 avril 2025 les dispositions de l’alinéa 1 de l’article 101 de la Constitution de 2001 et la loi 2002-10 modifiée portant loi organique sur la Haute cour de justice, afin de demander la mise en accusation du président Macky Sall, pour des faits susceptibles de relever de la haute trahison dans l’exercice de ses fonctions présidentielles. C’est une accusation très grave, car la haute trahison est un crime.
Ce nouveau « projet » de mise en accusation est malvenu et est voué à un cinglant échec pour des raisons juridiques et démocratiques, et pourrait avoir des incidences politiques mais aussi économiques et sociales très néfastes. L’image du pays et celle des nouvelles autorités pourraient également en être affectées à l’international.
Nous ne sommes pas en Roumanie en 1989 et le président Macky, aussi diabolisé soit-Il, n’est pas un totalitaire autoproclamé « Danube de la pensée » ou « génie des Carpates » et ne s’appelle pas Nicolaë Ceausescu.
Il ne s’appelle pas non plus Nelson Mandela, ni Walter Sisulu. Oui, rappelons-le ! Rappelons que Nelson Mandela, l’un des hommes politiques les plus respectés au monde, et son compagnon de lutte Sisulu, furent condamnés pour haute trahison par une mise en accusation de la part des « maîtres de Pretoria », alors au summum de l’injustice et de la pire politique de développement séparé que l’Afrique et le monde eurent connue. Mais rappelons également que Nelson Mandela finira réhabilité par sa libération après 27 années de prison, un Nobel de la paix et son accession à la présidence de la république sud africaine. Ce projet porte le risque d’un revers judiciaire majeur pour Pastef.
L’impertinence juridique du projetde liquidation du président Sall
Selon plusieurs spécialistes et parlementaires crédibles, la proposition de M. Guy Marius Sagna devait, aux termes de l’article 91, être présentée par une des commissions de l’Assemblée nationale au risque d’irrecevabilité. Elle pourrait donc être mort-né.
Mais Pastef étant ultra majoritaire à l'Assemblée nationale, pourrait, s’il porte « le projet » de l’hyperactif député, par le mécanisme de l’interprétation, ou un autre jeu de passe-passe dont lui seul a le secret, déclarer le projet de M. Sagna recevable.
On passerait alors à l’étape de l’instruction. Durant cette phase, le texte passerait inéluctablement par les filtres impartiaux des juges professionnels qui se feront le plaisir de le passer au scanner du corpus pénal, bien plus précis et plus rigoureux que le cocktail de généralités aussi ambiguës qu’imprécises qui héberge cette notion pourtant constitutionnelle, mais dépassée.
La « haute trahison » est une notion malaisante pour les juristes modernes. Elle fait partie de ces dispositions-fantômes qui hantent les textes codifiés des procédures judiciaires au 21e siècle. Elle ne fait plus recette depuis la fin des monarchies et des dictatures. Elle sera un casse-tête chinois pour nos magistrats qui seront face à un manque criant de précédents et d’un vide jurisprudentiel. Et même en allant à la recherche de bois mort dans les lointaines forêts du droit comparé, leur mémoire ne rapporteraient que quelques fagots qui ne leur permettraient pas de poursuivre ou de se forger une intime conviction.
La haute trahison n’est même pas reconnue pas la CPI, parce qu’elle est obsolète et « remplacée » par des infractions plus précises et plus facilement documentées comme le génocide, le crime contre l’humanité, le crime de guerre et les crimes d’agression.
En effet, la « haute trahison » est morte, victime de la démocratie et de l’État de droit. Même si la Haute cour de justice est une juridiction d’exception, les juges ne manqueraient pas de convoquer le principe de l’opportunité de poursuivre l’ex-président Macky Sall pour haute trahison sur la seule base d’une dette sous-évaluée.
De l’opportunité de la poursuite du président Macky Sall devant la Haute cour de justice
La procédure de la Haute cour de justice est dérogatoire du droit commun, du moins en certaines de ses dispositions mais le juge professionnel ne se privera pas de passer le « projet » de M. Sagna au tamis de ce grand principe.
La haute trahison est une notion vague. Le juge judiciaire aime « travailler » le Droit promu Science juridique de la façon la plus …scientifique possible. Le principe de l’opportunité de la poursuite lui impose de s’assurer de détenir les éléments probants et factuels des poursuites dont il est le seul maître.
Il s’agira en l’espèce de prouver le respect des procédures et la véracité des chiffres de l’audit du rapport de la Cour des comptes et y isoler les actes constitutifs d’un crime qualifiable de « haute trahison ». Ce sera sûrement la tâche la plus ardue de l’instruction judiciaires, si on en arrive à ce stade.
Il va falloir mobiliser une armée d’experts budgétaires et autres spécialistes de la matière financière, pour les expertises et les contre-expertises.
Cette procédure coûtera très cher au contribuable sénégalais. Parce que la procédure ne sera pas expéditive. L’accusé, redoutable stratège politique, aguerri et préparé, ne bradera pas son avenir pour le franc symbolique. Il sera combatif et ne se pressera point pour monter les sinistres marches qui mènent à l’échafaud politique et n’aidera sûrement pas son bourreau à préparer et à lubrifier le noeud coulant qui l’étranglerait, le cas échéant. L’État de droit garantirait un procès loyal car le monde nous regarde.
L’audit lui-même pose déjà son propre débatn car il est contesté par des experts et par le gouvernement sortant. La dette cachée n’est pas un scoop, ni une découverte inédite faite par l’audit de la Cour des comptes. Elle est une « vieille connaissance » des experts du FMI, une pratique à laquelle se sont prêtées de grandes démocraties comme la France et certains pays africains.
Le FMI, à qui on fait dire ce qu’il n’a pas dit a voulu être clair. Il n’a pas vocation à certifier, ni les chiffres de l’audit, ni un éventuel respect des étapes de son élaboration comme le respect du principe du « contradictoire » et donc son impartialité politique. Interrogé sur la question, à l’issue de sa visite du 18 au 26 mars 2025, le « monsieur Sénégal » du FMI, Edward Gemayel, considère que « seul l’Etat du Sénégal peut confirmer les chiffres … ». Il va plus loin , lui l’expert budgétaire : « …je ne dirais pas détournement…ces conclusions mettent en lumière de graves lacunes dans le contrôle budgétaire et la reddition des comptes, soulignant l’urgence de mettre en œuvre des réformes structurelles. La mission a cherché à mieux cerner l’ampleur des écarts et les insuffisances juridiques, institutionnelles et procédurales qui les ont rendus possibles » .
Il s’agira de prouver que de « graves lacunes » peuvent constituer un crime assez grave pour entraîner des poursuites contre un ancien chef d’Etat et sa condamnation pour haute trahison.
Les juges professionnels seront intransigeants et ne suivront pas les délires d’illuminés, comme ils n’ont pas suivi le président Macky lorsqu’il a voulu attenter à l’État de droit en préconisant le report des élections de 2024.
Il faudrait également arriver à mettre sur le dos du président sortant la responsabilité des « insuffisances juridiques, institutionnelles, procédurales » ayant rendu possible ce crime de lèse-budget, alors que des centaines de hauts fonctionnaires, experts et responsabilisés travaillent avec les ministres de l’économie et des finances à l’élaboration, au contrôle et au fonctionnement du budget.
Où étaient ces hauts fonctionnaires qui doivent refuser d’exécuter tout ordre manifestement illégal ? Et la Cour des comptes d’alors qui a « validé » sans « vérifier » et quelle est la part de responsabilité de tout ce beau monde ? Bref, on n’est pas sorti de l’auberge !
Même si on peut légitimement douter de l’impartialité des députés « Pastefiens » membres de la haute cour de justice, on peut espérer que les juges professionnels ne seront pas partisans et vont se fonder sur des expertises budgétaires et financières sérieuses et éclairées pour se forger une conviction.
On peut être certain que ces juges du siège, parmi lesquels le premier président de la Cour suprême, indépendants de l’exécutif, ne voudront pas faire moins que l’honorable Badio Camara ( PSL).
A l’issue de toute cette procédure, Macky pourrait bénéficier d’un non-lieu, d’une relaxe pure et simple, ou très peu probablement condamné. Au pire des cas, il serait responsable mais pas coupable.
Mais un objectif politique, s’il en est, pourrait être atteint, avant la fin de la très longue, coûteuse et energivore procédure : Macky pourrait ne pas fouler le sol sénégalais d’ici 2029, dates des prochaines élections présidentielles pour galvaniser ses troupes et faire face à un Pastef déjà fragilisé par une gouvernance de cinq années très difficiles. Et si c’était l’objectif d’un député en service commandé ?
Cette procédure est antidémocratique et ne reflète pas la volonté populaire.
Honorable député, votre « projet » trahit la volonté populaire et l’esprit des mécanismes démocratique
Cette démarche est brutale, elle n’est ni sénégalaise, ni démocratique. Ce que M. Guy Marius Sagna propose n’est pas la suite naturelle et logique d’une alternance démocratique paisible. Cette démarche est un mésusage notoire de l’outil démocratique. La haute trahison est légale, mais sa mise en œuvre en l’espèce n’est pas démocratique.
La démocratie semble être le chemin préféré par Pastef pour conquérir le pouvoir. Il n’a pas choisi l’insurrection. La transition, l’une des modalités de cette démocratie est utilisée depuis un quart de siècle par le peuple-électeur qui, non plus, n’a pas choisi l’insurrection.
Ce peuple a réitéré son choix l’année dernière en portant Pastef au pouvoir, en dépit des regrettables soubresauts politiques qui avaient enveloppé notre pays dans un linceul de violence, rouge du sang de dizaines de jeunes martyrs et qui ont failli enterrer notre belle stabilité dans les cimetières de l’histoire démocratique.
Si cet exploit fut possible, c’est parce que ce peuple a pu compter sur nos solides institutions qui ont démontré avoir assimilé, à leur tour, « l’esprit » de la volonté populaire de façon inaliénée et définitive. La démocratie est donc le choix définitif du peuple sénégalais.
Cette démocratie, pour être viable exige une respiration périodique, qui est l’occasion offerte aux électeurs de sanctionner ou non les dirigeants qui auront déçu leurs espoirs. Aussi, l’alternance est-elle la seule sanction prévue par la démocratie à l’issue d’élections libres et transparente. Elle est un élément essentiel de maintien de la paix, un élément constitutif de l’État de droit et une preuve de vitalité démocratique.
Il faut laisser notre démocratie, construite de longue luttes et de grands sacrifices finir tranquillement sa respiration périodique. C’est une exigence démocratique. C’est la suite naturelle du processus de transmission pacifique du pouvoir que de laisser partir le chef de l’état qui a organisé les élections, accepté sa défaite et accueilli son successeur dans les règles protocolaires les plus républicaines. Il a déjà été sanctionné par les urnes. La politique c’est aussi le fair-play. Elle est belle dans l’élégance. La démocratie n’est pas un jouet pour apprentis politiciens, c’est un outil sérieux au service d’une nation et son usage est hautement sensible.
Accuser un ancien président de haute trahison et demander sa traduction devant une Haute cour de justice est un saut périlleux dans le vide sidéral qui sépare la politique politicienne et le droit pur qui s’y frotte s’y pique !
Les incidences économiques d’une telle procédure
Cette procédure, si elle est enclenchée, viendra rajouter une couche de discrédit à la déjà fragilisée réputation budgétaire internationale du Sénégal.
Attention à ces actes éminemment politiques qui ont vocation a entraîner des conséquences économiquement désastreuses. Car l’économie est la caisse de résonance de la politique. Les institutions financières, les bailleurs et autres investisseurs sont tapis dans l’ombre de notre politique intérieure, elle n’hésiteront pas à l’inscrire sur le compte déjà débiteur de nos notes souveraines.
Les investisseurs attendront que la stabilité revienne au Sénégal avant de s’y aventurer à nouveau.Les conséquences macroéconomiques de cette procédure auront des retombées micro-économiques dramatiques .
LES COULISSES DE L'APRÈS-FRANÇOIS
Comment se déroule la succession d'un pape ? La mort de Jorge Mario Bergoglio ce lundi vient de déclencher l'un des rituels les plus codifiés au monde. Derrière les murs du Vatican, cardinaux et prélats s'activent déjà selon une chorégraphie immuable
(SenePlus) - C'est un ballet parfaitement orchestré qui s'est mis en marche ce lundi 21 avril 2025 au Vatican, quelques minutes après l'annonce du décès du pape François. Comme le rapporte le quotidien Le Monde, le pontife argentin s'est éteint à 7h35, ouvrant ainsi une période transitoire minutieusement encadrée par des règles séculaires.
"Au Vatican, le protocole est roi", souligne Sarah Belouezzane dans les colonnes du Monde. Rien n'est laissé au hasard dans cette transmission de pouvoir si particulière. Le dernier précédent d'une mort en fonction remonte au 2 avril 2005, avec la disparition de Jean Paul II, mais l'institution a soigneusement préservé sa mémoire procédurale.
La dernière révision majeure du protocole date de 1996, sous Jean Paul II, avec quelques ajustements apportés par Benoît XVI en 2007 et 2013. Le pape François lui-même a simplifié le rite funéraire en 2024, sans en modifier la structure fondamentale.
Dès l'annonce du décès, le camerlingue Kevin Farrell, cardinal irlandais en poste depuis 2019, est entré en action. Son rôle est crucial : c'est lui qui "constate la mort du pape dans sa chapelle privée avant d'informer le cardinal vicaire de Rome, à qui revient la charge de prévenir le reste du monde", précise le journal.
Parallèlement, le doyen du Collège des cardinaux, l'Italien Giovanni Battista Ré, a lancé la convocation des cardinaux du monde entier pour deux types d'assemblées : la congrégation générale, qui réunit tous les cardinaux quelle que soit leur âge, et la congrégation particulière, composée du camerlingue et de "trois cardinaux tirés au sort – et renouvelés tous les trois jours par le même procédé – afin de traiter les affaires courantes d'importance mineure".
Les décisions les plus importantes relèvent de la congrégation générale. Selon Le Monde, elle devra déterminer "le jour, l'heure et la manière dont la dépouille sera présentée aux fidèles en la basilique Saint-Pierre" pour permettre le recueillement. Point notable mentionné par le quotidien : "Le corps du pape sera exposé directement dans un cercueil, sans la crosse à côté et sans objets symboliques à l'intérieur."
La date des funérailles sera également fixée par cette assemblée, sachant qu'elles doivent avoir lieu "entre le quatrième et le sixième jour après la mort, soit entre le 25 et le 27 avril, à Saint-Pierre". Enfin, les cardinaux devront décider "du jour et de l'heure du début des opérations de vote pour le prochain souverain pontife".
Théoriquement, un délai de quinze jours est prévu pour permettre aux cardinaux électeurs de rejoindre Rome, bien qu'une disposition de 2013 autorise un démarrage plus rapide si "le collège est déjà réuni et vote en ce sens". En tout état de cause, "au bout de vingt jours au plus, le conclave doit commencer".
Un défi logistique se profile déjà à l'horizon. Comme le signale Le Monde, "la constitution fixe un nombre théorique maximal de cent vingt cardinaux électeurs. Sous François, on compte 135 cardinaux âgés de moins de 80 ans", alors que seulement "cent vingt neuf chambres" sont disponibles dans l'enceinte du Vatican pour les héberger pendant le conclave.
Une fois les cardinaux installés à la résidence Sainte-Marthe, le conclave sera placé sous le sceau du secret absolu. "Les électeurs n'auront plus le droit de communiquer avec l'extérieur, ni par voie postale ni par téléphone", indique le journal, qui précise que "tous ceux présents, y compris ceux occupant des fonctions subalternes, doivent prêter serment, le non-respect du secret du vote étant passible d'excommunication".
L'isolement est si strict que même les rencontres fortuites sont encadrées : "À tous ceux qui [...] viendraient à rencontrer fortuitement l'un ou l'autre des cardinaux électeurs pendant l'élection, il est absolument interdit d'entretenir une conversation, sous quelque forme que ce soit, avec quelque moyen que ce soit et pour quelque motif que ce soit".
Le scrutin se déroulera dans la chapelle Sixtine, à raison de "deux suffrages le matin, et deux l'après-midi", par bulletin secret déposé dans une urne. Pour être élu, un cardinal devra recueillir les deux tiers des voix. Si "le nombre des bulletins ne correspond pas au nombre des électeurs, il faut les brûler tous et procéder aussitôt à un deuxième vote", précise le protocole cité par Le Monde.
Après trois jours sans majorité qualifiée, une pause sera observée pour permettre "un temps de prière" – et probablement des négociations discrètes, bien que "il soit officiellement interdit d'établir des accords avant l'élection".
Chaque journée sans résultat se conclura par la traditionnelle fumée noire s'échappant du toit de la chapelle Sixtine, jusqu'à ce qu'une fumée blanche signale l'élection d'un nouveau pape.
Une fois le choix arrêté, le cardinal doyen s'adressera à l'élu avec une formule immuable : "Acceptez-vous votre élection canonique comme souverain pontife ?" Après son acceptation, le nouveau pape choisira son nom pontifical, qui sera annoncé aux fidèles depuis le balcon de la basilique Saint-Pierre.
Il apparaîtra ensuite en personne pour donner sa première bénédiction "urbi et orbi" (à la ville et au monde). À cet instant précis, comme le conclut Le Monde, "les catholiques ont un nouveau pape".
Ce protocole séculaire, mêlant tradition et solennité, garantit une transition ordonnée à la tête de l'Église catholique, dans ce moment crucial que constitue la succession du pape François, premier pontife latino-américain de l'histoire.
PROJET DE PURGE AU DÉPARTEMENT D'ÉTAT AMERICAIN
Fermeture d'ambassades, suppression de bureaux entiers et refonte complète du recrutement : un document en circulation dessine les contours d'une diplomatie en rupture totale avec les décennies précédentes, malgré les démentis officiels
(SenePlus) - Selon un projet d'ordre exécutif qui aurait fuité et circulerait au sein du Département d'État américain, une réorganisation majeure serait prévue sous l'administration Trump. Les changements proposés incluent la fermeture de plusieurs ambassades en Afrique subsaharienne, le démantèlement des bureaux axés sur le climat, les réfugiés, les droits humains, la démocratie et l'égalité des genres, ainsi que la réduction des opérations diplomatiques au Canada.
Le Bureau des Affaires africaines, le Bureau des Organisations internationales et le Bureau des questions mondiales concernant les femmes seraient parmi ceux éliminés. L'ordre propose de réorganiser le Département d'État en quatre bureaux régionaux — Indo-Pacifique, Amérique latine, Moyen-Orient et Eurasie — et de réorienter les affectations du personnel diplomatique vers des postes régionaux spécifiques à vie.
Les bourses Fulbright seraient limitées aux programmes de master en sécurité nationale, et les bourses liées aux programmes de diversité et d'inclusion, comme celles avec l'Université Howard, seraient supprimées. Le projet prévoit également la fin de l'examen du service étranger, l'embauche étant basée sur l'alignement avec la politique étrangère présidentielle. Cependant, le Secrétaire d'État Marco Rubio et le Département d'État ont rejeté ce projet comme étant faux. Des documents internes supplémentaires suggèrent d'autres réductions potentielles, notamment une réduction budgétaire de 50% et la fermeture de nombreuses ambassades et consulats.
Si elle était mise en œuvre, cette réorganisation marquerait l'une des modifications les plus importantes de l'infrastructure de politique étrangère américaine depuis 1789.
LE PAPE FRANÇOIS S'ÉTEINT À 88 ANS
Le Vatican a annoncé ce matin la disparition du pontife, décédé à 7h35. Figure clivante mais respectée bien au-delà du monde catholique, Jorge Mario Bergoglio avait été élu en mars 2013 avec la mission de restaurer "le visage défiguré de l'Église"
(SenePlus) - Le pape François est mort ce lundi 21 avril 2025 à 7h35, à l'âge de 88 ans, a annoncé le Vatican. Jorge Mario Bergoglio, premier pontife latino-américain de l'histoire, laisse derrière lui un héritage complexe après plus de douze années passées à la tête de l'Église catholique, rapporte Le Monde dans sa nécrologie publiée ce jour.
Élu le 13 mars 2013 pour succéder à Benoît XVI qui avait pris la décision historique de renoncer à sa charge, François aura profondément marqué l'Église par son style direct et son approche réformatrice. Comme le souligne Cécile Chambraud dans les colonnes du Monde, le pape argentin avait pris "sa mission à bras-le-corps" dès son élection, conscient qu'à 76 ans, il n'avait "pas de temps à perdre s'il voulait agir en profondeur".
"Comme je voudrais une Église pauvre et pour les pauvres !", s'était-il exclamé peu après son élection, donnant ainsi le ton d'un pontificat qui allait s'attacher à recentrer l'institution sur l'évangélisation d'un monde qu'il jugeait en proie "au matérialisme et au relativisme". Selon les informations du quotidien français, il demandait à l'Église de se concevoir comme "un hôpital de campagne après une bataille", de sortir de son penchant "narcissique", appelant les catholiques à ne pas se transformer en "momies de musée".
Dès le début de son pontificat, François a rompu avec l'image traditionnelle de la papauté par des gestes symboliques forts. D'après Le Monde, refusant l'appartement pontifical au cœur du palais apostolique, il s'était installé à la résidence Sainte-Marthe, prenant ses repas à la cantine où "il choisissait chaque jour sa table et ses commensaux". Il avait également renoncé à la villégiature de Castel Gandolfo, résidence papale depuis le XVIIe siècle.
"J'essaie d'être libre", résumait-il pour expliquer ces choix qui visaient à le maintenir au contact des réalités quotidiennes et à échapper à l'isolement que peut entraîner la fonction papale, précise le journal.
François aura fait des migrants l'une des grandes causes de son pontificat. À Lampedusa en juillet 2013, lors de son premier grand déplacement, il avait dénoncé "la mondialisation de l'indifférence" face aux tragédies en Méditerranée. Le Monde rappelle qu'il avait lancé aux députés européens en novembre 2014 à Strasbourg : "On ne peut tolérer que la mer Méditerranée devienne un grand cimetière".
L'écologie fut l'autre combat majeur du pape argentin, qui publia en 2015 l'encyclique "Laudato Si'", premier texte magistériel d'un pape entièrement consacré à l'environnement. Ce document dénonçait également les inégalités économiques mondiales, François n'hésitant pas à fustiger, selon les termes rapportés par Le Monde, "le fumier du diable", ce "désir sans retenue de l'argent qui commande".
Le pape François s'était également attelé à une profonde réforme de la Curie, l'administration vaticane qu'il qualifiait de "dernière cour d'Europe" traversée par "un courant de corruption", selon les informations du quotidien français. Pour mener à bien cette tâche, il s'était entouré d'un conseil de neuf cardinaux issus de tous les continents.
La mise en ordre des finances du Vatican fut l'une de ses priorités, face à une situation que Le Monde décrit comme "anarchique". Dans ce domaine sensible, François n'hésita pas à faire appel à des cabinets d'audit externes et à l'expertise de laïcs, une nouveauté qui fut "vécue comme un quasi-sacrilège" dans certains cercles du Vatican.
Mais cette réorganisation ne fut pas sans heurts, "émaillée en coulisse d'impitoyables batailles et de manœuvres sinon de sabotage, au moins de retardement", selon l'article de Cécile Chambraud. Le scandale de l'achat d'un immeuble de luxe à Londres, qui aurait entraîné une perte de 150 millions d'euros pour le Vatican, a notamment entaché ces efforts de réforme.
Cette volonté réformatrice a valu à François aussi bien des soutiens fervents que des oppositions farouches. "Les progressistes ont voulu voir en lui l'un des leurs après la longue ère conservatrice de Jean Paul II et de Benoît XVI", note Le Monde, mais ces mêmes progressistes "n'ont pas pipé mot lorsqu'il a comparé le recours à l'IVG à l'embauche d'un 'tueur à gages'". À l'inverse, "les catholiques conservateurs, champions des 'racines chrétiennes' ou tentés par le rite ancien, se sont étranglés quand il a vanté une société 'multiculturelle' et marginalisé la messe en latin".
"Avec Bergoglio l'Argentin, les lignes politiques habituelles ne recoupaient pas toujours celles du Credo", résume le quotidien, soulignant ainsi la complexité d'un pontificat qui s'est joué "des catégories paresseuses".
Au terme de ce pontificat plus long que prévu – François avait confié qu'il durerait "peu de temps, deux ou trois ans" – le bilan est contrasté. D'après Le Monde, la constitution apostolique promulguée en mars 2022 a donné au pape "davantage de capacité de contrôle de son administration" et a permis "à des laïques, donc à des femmes, de diriger des grands départements de la curie", bien que "la féministation n'avance qu'à pas comptés".
Jorge Mario Bergoglio était né le 17 décembre 1936 à Buenos Aires, fils d'immigrés italiens. Premier pape non-européen depuis la fin de l'Antiquité et premier jésuite à accéder au trône de Pierre, il avait été choisi par un collège cardinalice "réputé conservateur" pour restaurer ce que Benoît XVI avait nommé "le visage défiguré de l'Église", conclut le quotidien français.
LA TOILE D'INFLUENCE DE MACKY SALL
Depuis Marrakech, l'ancien président maintient son influence grâce à une garde rapprochée fidèle et déterminée qui, chaque jeudi, se réunit à Dakar pour coordonner la riposte face au nouveau pouvoir de Bassirou Diomaye Faye
(SenePlus) - Un an après sa défaite électorale et son installation à Marrakech, l'ancien président Macky Sall continue d'exercer son influence sur la politique de son pays. Selon Jeune Afrique, malgré son absence physique, il peut toujours compter sur "une armée de vétérans pour mener la barque" et maintenir la flamme de son parti, l'Alliance pour la République (APR).
Depuis avril 2024, Macky Sall s'est établi au Maroc "par tradition républicaine", mais reste très impliqué dans la vie de son parti. L'APR a instauré des "réunions du jeudi" au siège du parti à Dakar, "dont Macky Sall suit l'avancée avec attention", rapporte JA.
Le parti a également entrepris une restructuration importante. "En mars, l'APR a acté l'agrandissement de son Secrétariat exécutif national (Sen), passé d'une cinquantaine de personnes à 487. Un Sen 'élargi, rajeuni, féminisé', selon les termes de l'un de ses secrétaires", précise le magazine.
Cette réorganisation permet au parti de "satisfaire les différentes tendances d'un groupe qui peine à s'unir en l'absence de son chef", tout en donnant l'opportunité à "un large panel de responsables de pouvoir donner leur avis".
Plusieurs figures de premier plan demeurent fidèles à l'ancien président. Sidiki Kaba, "son dernier Premier ministre, figure respectée et consensuelle de l'APR", préside généralement les réunions hebdomadaires. Il est épaulé par Amadou Mame Diop, ancien président de l'Assemblée nationale, "qui continue de recevoir les confidences de Macky Sall et de conduire les délégations en son nom".
D'autres figures importantes incluent Mansour Faye, frère de l'ex-première dame, qui a récemment "obtenu de la justice sénégalaise l'autorisation de quitter le territoire après plusieurs tentatives infructueuses". Yoro Dia, ancien porte-parole de la présidence, "gère quant à lui la bataille de l'opinion".
Face aux difficultés juridiques rencontrées par plusieurs membres du parti, "un collectif des avocats républicains a été mis sur pied", révèle Jeune Afrique. Ce groupe comprend "des ténors du barreau sénégalais", dont El Hadj Amadou Sall, Aïssata Tall Sall et Oumar Youm, tous anciens ministres.
L'équipe juridique défend non seulement les responsables politiques "interdits de quitter le territoire", mais aussi des personnalités périphériques comme "le commissaire Cheikhna Keïta, arrêté pour avoir évoqué une 'bagarre' au palais présidentiel". Macky Sall a également "engagé l'avocat français Antoine Vey" pour des affaires personnelles.
Depuis Marrakech, l'ancien président développe ses propres activités. Jeune Afrique révèle qu'après l'ouverture d'un cabinet de conseil, il a créé "un cabinet immobilier, Semo Real estate", co-dirigé avec "l'expert-comptable marocain Tariq Berrada El Azizi".
Selon le magazine, "certains responsables estiment que leur chef est toujours intéressé par le poste de secrétaire général des Nations unies". Il reste également "mobilisé sur la réforme de la gouvernance financière internationale" et dirige une fondation "spécialisée dans les questions de paix et de développement".
Cette distance ne l'empêche pas de réagir aux déclarations du président actuel, Bassirou Diomaye Faye. Lorsque ce dernier a affirmé lors d'une interview que Macky Sall "fait des choses en douce", l'APR a immédiatement dénoncé des "propos et insinuations inqualifiables, dépourvus d'élégance et de dignité".
Comme le confie un proche de l'ancien président à Jeune Afrique, "même s'il avait décidé d'abandonner la politique, les accusations portées contre lui le forcent à se relancer". La présence de Macky Sall continue donc de planer sur la politique sénégalaise, entretenue par ses fidèles qui espèrent un retour au premier plan.
LE CRÉPUSCULE COMBATIF DU PAPE FRANÇOIS
Le pape François refuse de voir son autorité diminuer avec sa santé. Après avoir "frôlé la mort à deux reprises", le pontife multiplie les apparitions publiques et les décisions importantes, contrant ainsi les rumeurs d'une succession imminente
(SenePlus) - Malgré une santé fragile qui l'a obligé à alléger considérablement sa participation aux célébrations pascales, le pape François, 88 ans, montre sa volonté de rester maître de son pontificat. Comme le rapporte Le Monde dans son édition du 20 avril 2025, le souverain pontife "entend rester souverain en son royaume et seul maître du calendrier".
Dimanche 20 avril, alors que la messe pascale se déroulait sans lui sur le parvis de la basilique Saint-Pierre, le pape recevait le vice-président américain J.D. Vance dans ses appartements. Un choix de timing significatif puisque, selon Le Monde, c'est "durant cette messe, l'un des moments les plus sacrés de l'année pour les chrétiens, que les services du Saint-Siège ont choisi de diffuser un communiqué pour annoncer cette 'rencontre privée de quelques minutes'".
Après la célébration, François est apparu brièvement au balcon de la basilique, visiblement affaibli. "Chers frères et sœurs, joyeuses Pâques", a-t-il simplement pu prononcer "dans un souffle" devant les 35 000 fidèles rassemblés. La traditionnelle bénédiction urbi et orbi a dû être lue par l'archevêque Diego Ravelli.
Moins d'un mois après sa sortie de l'hôpital Gemelli, où il a "frôlé la mort à deux reprises, de l'aveu de son propre médecin", le pape multiplie les apparitions publiques. Dimanche encore, après son bref message, "il s'est offert un bain de foule, parcourant pendant une quinzaine de minutes les allées de la place à bord de sa 'papamobile'".
Pour les observateurs cités par Le Monde, cette omniprésence vise à contrer les spéculations sur sa succession. Dès 2024, François écrivait dans son autobiographie : "Pour revenir à mes hospitalisations, elles m'ont donné beaucoup de matière à réflexion, mais pendant ce temps, certains se sont davantage intéressés à la politique, à mener une campagne électorale, pensant presque à un nouveau conclave."
"S'il veut éviter que la fin de son pontificat soit polluée par ces sujets, il doit occuper le terrain", analyse un observateur du Vatican dans les colonnes du quotidien français.
Le pape François se trouve aujourd'hui face au même dilemme que ses prédécesseurs : "voir son autorité s'effilocher en même temps que sa santé, ou renoncer". La question est d'autant plus délicate que, comme le souligne le quotidien français, "le pape a exercé, durant son pontificat, un pouvoir extrêmement personnel".
Pour l'heure, selon des sources vaticanes, "la curie fonctionne principalement par inertie, dans la continuité des décisions prises ces derniers mois". Mais si le pape souhaite "continuer à s'impliquer dans le détail des dossiers, il va devoir déterminer ses priorités".
L'une d'entre elles semble être le synode sur l'avenir de l'Église, "qui vise à rendre le fonctionnement de l'Église plus inclusif et plus ouvert (aux laïques et aux femmes en premier lieu)" et dont le calendrier, s'étendant jusqu'en 2028, a été détaillé par écrit par le pontife alors même qu'il était encore hospitalisé.
Le pape montre également "une impatience parfois troublante", comme en témoigne la publication le 15 avril d'une réforme de la formation des nonces apostoliques, un sujet qui "devait être tranché dans le cadre du synode". Une précipitation que résume un observateur cité par Le Monde : "Il est pressé".
L'IRRÉSISTIBLE ASCENSION DU CAFÉ TOUBA
Du Gabon à la conquête du monde, le café Touba s'est imposé comme un pilier de l'identité sénégalaise. Rapporté par Cheikh Ahmadou Bamba en 1902, ce breuvage épicé est aujourd'hui consommé par deux Sénégalais sur trois
(SenePlus) - Devenu incontournable dans la vie sociale sénégalaise, le café Touba s'est imposé comme une véritable institution nationale. À la fois symbole culturel, opportunité économique et boisson distinctive, ce breuvage aux épices conquiert les palais bien au-delà des frontières du pays. D'après BBC Afrique, "le café Touba véritable s'est imposé au fil des années comme un élément incontournable de la culture sénégalaise".
Le café Touba tire son nom de la ville sainte fondée par Cheikh Ahmadou Bamba, figure emblématique du mouridisme. Selon BBC Afrique, "la légende raconte que c'est le fondateur du Mouridisme, Cheikh Ahmadou Bamba, connu aussi sous le nom de Serigne Touba, qui a rapporté le breuvage à son retour d'exil du Gabon en 1902". Plus qu'une simple boisson, il est devenu "un symbole de résilience et d'appartenance culturelle, mêlant la dévotion à la prière et la solidarité communautaire".
Ce café occupe une place centrale dans les rituels religieux, particulièrement lors du Grand Magal, pèlerinage annuel où "des millions de personnes sirotent le café qui est distribué gratuitement", souligne le média.
La particularité du café Touba réside dans sa préparation singulière. BBC Afrique précise que "la saveur distinctive du Café Touba provient de grains de café torréfiés et infusés avec du poivre de Guinée ou grains de Selim (un piment d'Afrique de l'Ouest) et des clous de girofle". Le reportage ajoute que "les vrais amateurs de café vous diront que le goût du café Touba est proche du goût d'expresso et celui du poivre de Guinée".
Préparé principalement à partir de café Robusta originaire de Côte d'Ivoire, cette boisson "contient presque deux fois plus de caféine" que l'Arabica et possède "un goût plus corsé et plus amer", indique l'article.
Le café Touba ne se limite pas à sa dimension culturelle ; il représente également une activité économique florissante. Selon les données de l'Agence Nationale de la Statistique et de la Démographie (ANSD) citées par BBC Afrique, "cette boisson est consommée par deux Sénégalais sur trois, soit plus de 66% de la population".
L'activité génère des revenus substantiels pour de nombreux jeunes vendeurs. "C'est un business qui marche. Chaque jour, je peux avoir un bénéfice allant de 5 000 francs à 7 000 francs CFA", confie Mame, vendeur de café Touba à Bourguiba, un quartier de Dakar, interrogé par BBC Afrique.
Son accessibilité financière contribue également à sa popularité : "Dans les rues des villes sénégalaises, il n'est pas rare de croiser de jeunes vendeurs ambulants de café Touba, qui, munis d'un fourneau, d'une bouteille isotherme (thermos) et d'une pile de gobelets, proposant au passant le liquide sucré pour la modique somme de 50 francs CFA la tasse".
Concernant les bienfaits attribués au café Touba, la prudence est de mise. BBC Afrique rapporte les propos de l'Association Nutrition Alimentation au Sénégal : "À ce jour, il n'y a pas eu d'études spécifiques permettant d'affirmer qu'il y a un effet positif ou négatif du Café Touba sur l'organisme".
Madame Adama Diouf, Assistante à cette association, précise : "Le fait qu'il existe plusieurs types de café Touba préparé avec différents ingrédients font qu'il peut y avoir un effet sur l'organisme. La seule chose que tous ces cafés Touba partagent, c'est la caféine qu'ils contiennent et qui a des effets positifs comme négatifs en fonction de l'état physiologique ou pathologique de la personne".
Le poivre de selim, appelé "Jar" en wolof, est néanmoins "utilisé pour ses vertus médicinales en particulier contre la grippe, les bronchites et contre la dysenterie", note l'article.
Aujourd'hui, le café Touba transcende les frontières du Sénégal pour s'imposer comme un produit typique "made in Senegal" qui "commence à devenir un véritable produit typique", conclut BBC Afrique.
Par Babacar Faye
LES ARTISTES À L’ASSAUT DES ASSIGNATIONS
En explorant des médiums variés — photographie, vidéo, performance, installations interactives —, une nouvelle vague d’artistes ne se contente pas d’interroger les récits muséaux : elle bouscule les pratiques institutionnelles
Si son héritage colonial est tenace, le musée peut devenir un espace de vie commun et disruptif.
Souvent perçu comme déconnecté des réalités sociales, l’art possède pourtant une portée tangible qui incite à l’action. En réintégrant les femmes noires au sein de paroles plurielles, authentiques et multidimensionnelles, il joue un rôle crucial dans les efforts de décolonisation des narratifs muséaux. Longtemps enfermées dans des représentations stéréotypées, souvent marquées par des regards exotisants ou coloniaux, notamment dans les espaces muséaux occidentaux, les figures féminines noires sont aujourd’hui au cœur d’une redéfinition historique portée par des artistes contemporains. Leurs œuvres interrogent la mémoire, le genre et la résistance, et dépassent les formats d’exposition traditionnels en sollicitant activement la participation du public.
Un lieu dynamique
En explorant des médiums variés — photographie, vidéo, performance, installations interactives —, une nouvelle vague d’artistes ne se contente pas d’interroger les récits muséaux : elle bouscule les pratiques institutionnelles. Kara Walker et Zanele Muholi, par exemple, déconstruisent les stéréotypes issus des imaginaires coloniaux tout en utilisant une grammaire visuelle puissante pour révéler les violences historiques et les stigmates de l’histoire esclavagiste américaine. Muholi, en documentant la vie des femmes noires en Afrique du Sud, leur redonne visibilité et dignité.
Le musée, longtemps figé dans son rôle de conservatoire statique, devient alors un territoire dynamique et évolutif. En intégrant la création contemporaine à leurs expositions, les institutions muséales instaurent un dialogue critique entre passé et présent. L’approche intersectionnelle adoptée par plusieurs artistes complexifie également la lecture des œuvres. En collaborant avec des artistes issus des diasporas africaines et afrodescendantes, les musées peuvent remettre en question les modèles curatoriaux traditionnels, autrefois unilatéraux, au profit de processus co-créatifs. Ce dialogue entre artistes, institutions et publics enrichit leur mission éducative et sociale. Il ouvre aussi des espaces de discussion essentiels sur la justice sociale, les droits humains et la réappropriation du patrimoine culturel.
Revisiter les récits historiques
De nombreux artistes contemporains participent à la redéfinition muséale en réinterprétant l’histoire. Lubaina Himid, par exemple, revisite les récits liés aux diasporas africaines en Europe, redonnant une visibilité aux figures effacées des collections muséales, particulièrement à l’occasion de l’exposition « Thin Black Line(s) » dont elle a été la commissaire au Tate Britain, à Londres en 2011-2012. Ces démarches s’inscrivent dans une dynamique plus large de décolonisation de l’art, où les discours ignorés trouvent enfin leur place au sein d’institutions culturelles. Héritier des luttes anti-racistes des années 1960-1970, le Black Arts Movement explore les thématiques de résistance et de fierté identitaire à travers divers supports : peinture, photographie, performance. Ce courant, qui centre la femme noire comme sujet, en souligne le rôle actif dans les mouvements de transformation sociale.
Inscrit dans la dynamique du féminisme de la quatrième vague, The Intersectional Feminist Art Movement met en lumière la créativité et la richesse des voix féminines racisées, en affirmant leur autonomie et leur force politique. Certaines photographes afro-américaines comme Carrie Mae Weems réinterprètent les corps féminins noirs en les présentant comme des symboles de dignité et d’auto-détermination, en particulier dans sa série d’autoportraits « Four Women », datant de 1988. D’autres encore questionnent les pratiques muséales héritées du colonialisme, comme Faith Ringgold, notamment depuis sa participation à l’exposition collective « The Art of the American Negro » au Harlem Cultural Council en 1966.
Enfin, l’Afrofuturisme, revisite les récits historiques en imaginant des futurs où les femmes noires occupent une place centrale dans la fabrique des mondes possibles. Cette vision se matérialise dans l’exposition « A Fantastic Journey » de la Kényanne Wangechi Mutu au Brooklyn Museum en 2013, ou encore dans la série « A Haven. A Hell. A Dream Deferred », présentée au New Orleans Museum of Art par la Libério-Britannique Lina Iris Viktor en 2018. En mêlant science-fiction, mythologie africaine et esthétique futuriste, ce mouvement réinscrit la femme noire dans des utopies actives.
Tous ces courants artistiques poursuivent un même objectif : subvertir les structures coloniales et patriarcales encore présentes dans les musées et institutions culturelles, en Occident comme en Afrique, tout en révélant la puissance narrative des subjectivités féminines noires. Par ces réinterprétations, le musée cesse d’être un simple lieu de conservation : il a le potentiel de devenir un espace de transformation.