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2 mai 2025
Economie
L'ANACARDE POURRIT EN CASAMANCE
La pandémie de coronavirus pourrait entrainer la mévente de 30.000 tonnes d’anacarde et "un manque à gagner" estimé à 50 milliards de francs CFA aux dépens des producteurs de la région
La pandémie de coronavirus pourrait entrainer la mévente de 30.000 tonnes d’anacarde et "un manque à gagner" estimé à 50 milliards de francs CFA aux dépens des producteurs d’anacarde des trois régions de la Casamance (sud), a déclaré l’ingénieur agronome Abdourahmane Faye.
"On annonce une mévente record de 30.000 tonnes d’anacarde et un manque à gagner de 50 milliards pour les producteurs casamançais, qui ne voient pas l’ombre d’un acheteur (…) en ce début de campagne", a écrit M. Faye dans une tribune dont l’APS a obtenu une copie.
"Le désastre sera d’autant plus grand que la campagne précédente était chahutée par une chute drastique des prix aux producteurs, qui était due à une surproduction au niveau mondial", a souligné l’ingénieur agronome et expert chargé de la formation et de l’emploi à l’Initiative prospective agricole et rurale (IPAR), un "espace de réflexion" sur "les politiques publiques dans le secteur agricole et rural en Afrique de l’Ouest".
Ce sont des hommes d’affaires indiens qui venaient souvent acheter la production d’anacarde aux producteurs des régions de la Casamance (Kolda, Sédhiou et Ziguinchor), selon M. Faye.
Un collectif d’acteurs de la filière anacarde locale a fait part de son "désarroi", déplorant l’absence des partenaires commerciaux indiens et mauritaniens, qui ne peuvent se rendre en Casamance à cause de la pandémie de coronavirus, a-t-il expliqué.
La morosité de la filière anacarde va affecter le port de Ziguinchor, qui connaissait chaque année un regain d’activité pendant la campagne de vente des récoltes de noix de cajou, selon l’ingénieur agronome.
Les services portuaires prévoient une baisse importante de leur chiffre d’affaires à cause de la mévente des récoltes d’anacarde.
"C’est toute une filière, à l’entame de son envol, qui prend du plomb dans l’aile avec ce Covid-19, qui n’épargnera même pas la mangue, pour la même raison, le manque d’acheteurs", a souligné Abdourahmane Faye.
"Les deux mamelles principales de l’économie agricole sont ainsi infectées dans cette partie du Sénégal, qui présente déjà une comorbidité lourde liée aux effets des changements climatiques, à la salinisation des terres, à la baisse de la fertilité et de la productivité des sols, au sous-équipement des exploitations agricoles, etc.", a ajouté M. Faye.
Selon lui, à cause de la fermeture des marchés hebdomadaires ruraux, en raison de la pandémie de coronavirus, les paysans sont privés de "débouchés commerciaux" et ne peuvent pas vendre leurs produits agricoles et d’élevage pour subvenir à leurs "besoins monétaires et alimentaires".
"Dans plus de 80% des cas, les ménages agricoles épuisent leurs stocks vivriers six mois après récoltes et dépendent, pour le reste de l’année, de ces marchés pour s’acheter de la nourriture", a expliqué l’expert d’IPAR.
"Les restrictions imposées dans les transports intérieurs et extérieurs ont perturbé le fonctionnement des chaînes logistiques d’approvisionnement et de livraison [des] exploitations agricoles", a-t-il écrit.
par Kako Nubukpo
CONTROVERSE BÉNIN/SÉNÉGAL SUR LA DETTE : LA RENAISSANCE DU DÉBAT AFRICAIN
La tribune du ministre béninois des Finances apparaît comme la contestation du leadership sénégalais en construction et la réponse du ministre sénégalais des finances, comme une « commande » présidentielle
Jeune Afrique |
Kako Nubukpo |
Publication 04/05/2020
Si la pandémie du coronavirus n’avait qu’une seule vertu, ce serait la renaissance du débat africain qu’elle provoque à l’heure actuelle. En effet, rarement les décideurs et intellectuels africains se sont autant exprimés par voie de tribunes, d’articles, d’appels divers et variés.
Dans la foison de contributions plus stimulantes les unes que les autres générée par la pandémie de Covid-19, la passe d’armes récente entre le ministre béninois de l’Économie et des Finances, Romuald Wadagni, et le ministre sénégalais des Finances et du Budget, Abdoulaye Daouda Diallo, autour de la question de l’annulation de la dette africaine, mérite d’être soulignée à plus d’un titre.
En effet, dans une tribune publiée le 23 avril, Romuald Wadagni a exprimé son hostilité au moratoire et a fortiori à l’annulation de la dette africaine, au motif du signal négatif que cette annulation enverrait aux marchés financiers, engendrant de facto une hausse de la prime de risque et donc des taux d’intérêts exigés par les créanciers pour acquérir les dettes africaines futures.
En réponse à cette prise de position, son homologue sénégalais des Finances a publié le 28 avril une tribune intitulée : « Annuler la dette des pays africains est vertueux et bien fondé », dans laquelle il fait explicitement référence à celle de son collègue du Bénin pour la contrer point par point.
Trois raisons justifient l’importance et le caractère singulier de ce combat à fleurets mouchetés :
La tribune du ministre béninois des Finances, qui n’a pu être publiée sans l’aval de son chef d’État, apparaît dès lors comme la contestation de ce leadership sénégalais en construction et la réponse du ministre sénégalais des finances, comme une « commande » présidentielle.
Sur le plan diplomatique, les tribunes des deux ministres s’inscrivent dans un contexte où le président en exercice de l’Union africaine, le Sud-africain Cyril Ramaphosa, vient de désigner quatre personnalités emblématiques d’une Afrique mondialisée pour négocier, au nom de l’Afrique, les moratoires et/ou annulations des dettes africaines.
La tête de file de ce quatuor, Tidjane Thiam, ancien ministre, assureur et banquier franco-ivoirien internationalement connu et reconnu, a d’ailleurs répondu au ministre béninois des Finances sur la chaîne de télévision francophone TV5, en des termes fort peu amènes : « personne n’oblige un État à accepter un moratoire ou une annulation de sa dette ». On a connu des technocrates plus respectueux des ministres et des chefs d’États en exercice…
De fait, l’apparition de « nouveaux acteurs » venus du monde de la finance internationale, mais sans responsabilité exécutive à l’heure actuelle, sort de leur torpeur les ministres africains, généralement peu diserts en matière de partage de leurs convictions théoriques et empiriques.
Ces contestations – celle « par le haut » de la compétence des ministres africains en exercice dans leur capacité à représenter le continent dans les enceintes internationales et celle des commissaires de l’Union africaine (après tout, ils sont payés pour cela) – créent un nouvel espace de jeux et d’enjeux autour du leadership sur la représentation africaine sur le plan international et vient compléter la contestation « par le bas » portée par les organisations de la société civile africaine.
Sur le plan économique, les deux ministres des Finances semblent opter pour deux niveaux distincts de l’analyse économique : le ministre béninois est clairement dans une logique microéconomique, plus précisément dans l’économie du risque, de l’incertain et dans la théorie des jeux répétés. Son raisonnement consiste à dire qu’une suspension ou une annulation de la dette africaine provoquerait dans le jeu répété qui a cours entre débiteurs et créanciers, une perte de confiance de ces derniers engendrant une dégradation de la réputation et de la crédibilité des premiers, dont le coût cumulé sur longue période sera plus élevé que le gain immédiat.
Ce résultat bien connu de la théorie dite des « incitations », produit de la nouvelle économie institutionnelle, plaide en faveur du marché qui serait le meilleur allocataire des ressources en dépit de son caractère d’optimum de « second rang ». Au contraire, le ministre sénégalais opte pour une approche d’emblée macroéconomique, plus étatiste, ciblée sur la nécessité d’obtenir des marges de manœuvres budgétaires additionnelles pour faire face à la pandémie du Covid-19. De ce point de vue, il élargit l’espace d’appréhension de la crédibilité du débiteur en mobilisant l’Etat sénégalais qui aurait « un profil d’émetteur souverain de référence ».
Dans la mesure où en théorie, l’État est le meilleur débiteur par excellence car doté d’une durée de vie infinie, le tour est joué. En s’inscrivant au fond dans la nouvelle macroéconomie keynésienne, il pourrait revendiquer l’incomplétude et l’imperfection des marchés financiers pour justifier sur le plan pratique un moratoire ou même une annulation de la dette africaine.
Pour finir, il convient de souligner l’absence dans les deux contributions ministérielles des causes structurelles des dettes africaines, notamment l’étroitesse de la base productive et l’absence d’une souveraineté monétaire pouvant permettre la monétisation de la dette à l’instar de la pratique actuelle de tous les pays riches et émergents de la planète.
En effet, pour sortir du cercle vicieux de la dette africaine, il faudrait augmenter et orienter le crédit public et privé (bancaire et non bancaire) vers l’investissement productif et la création de capacités additionnelles de production. De fait, la demande africaine pourrait être assurée pour l’essentiel par l’offre africaine de biens et services, avec à la clé une réduction des importations et donc du solde courant de la balance des paiements.
Le processus de production africaine permettrait, pour sa part, de créer de nouveaux emplois, d’engendrer des revenus additionnels et de payer des impôts supplémentaires indispensables à une résorption pérenne des déficits budgétaires récurrents et donc la réduction drastique des stocks de dette extérieure.
La reconquête par l’Afrique de ses instruments de souveraineté politique, diplomatique et économique est la condition permettant de ne plus apporter des réponses conjoncturelles à une question structurelle et de sortir par le haut du débat salutaire entre le Bénin et le Sénégal sur les dettes africaines.
ABDOULAYE DAOUDA DIALLO SIFFLE LA FIN DU LAXISME DANS LE FONCIER
Le ministre des Finances et du Budget corse les procédures d’attribution ou de régularisation par voie de bail pour mettre fin aux litiges fonciers, source d’insécurité juridique et de frustration pour bon nombre d’usagers
Le ministre des Finances et du Budget corse les procédures d’attribution ou de régularisation par voie de bail pour mettre fin aux litiges fonciers, source d’insécurité juridique et de frustration pour bon nombre d’usagers. Désormais, les baux seront établis par les bureaux des domaines sur la base de critères que le ministre des Finances et du Budget mentionne dans une note qu’il a adressée à la Direction Générale des Impôts et Domaines.
Face aux nombreux litiges qui, parfois, mettent à nu les failles de l’administration des Domaines, le ministre des Finances et du Budget déclare la fin de la frénésie foncière. Le Ministre Abdoulaye Daouda Diallo tient à l’orthodoxie dans l’instruction des demandes d’attribution ou de régularisation de terrains par voie de bail. Il l’a fait savoir d’ailleurs dans une note de service adressée au Directeur général des Impôts et des Domaines dans laquelle il indique désormais la procédure à suivre. Cette décision est motivée par le constat du ministre des Finances et du Budget que l’appréciation des services rendus par «la DGID dans l’exécution de la mission foncière, domaniale et cadastrale révèle une multiplication de litiges fonciers, source d’insécurité juridique et de frustration pour bon nombre d’usagers». Il veut la transparence d’autant que le président de la République avait souligné qu’il reçoit plus d’alertes sur des problèmes fonciers. «En vue de favoriser un mode de gestion transparent et conforme à la réglementation, il apparaît nécessaire d’une part, de procéder à un rappel des règles qui gouvernent les procédures d’instruction des demandes d’attribution ou de régularisation de terrains par voie de bail et d’autre part, de préciser encore une fois les diligences édictées par le manuel de procédures domaniales, à observer lors de la présentation des actes issus des dites procédures à l’approbation», indique Abdoulaye Daouda Diallo dans la note.
A ce propos, il précise que les baux devront désormais être établis par les bureaux des domaines sur la base de la liste nominative des attributaires cités dans les procès-verbaux approuvés par la commission de contrôle des opérations domaniales (CCOD). «En vue de prévenir la survenance de conflits fonciers préjudiciables à la bonne marche des services et à la notoriété de la DGID, les bureaux des domaines devront désormais, préalablement à toute instruction pour une demande de bail ou de régularisation de bail, s’assurer de la disponibilité physique et juridique des assiettes foncières», informe Abdoulaye Daouda Diallo.
Pour ce faire, on doit consulter les services techniques (cadastre urbanisme) et visiter les lieux, exiger un état de droit réel et un plan cadastral portant un NICAD visé par le chef du bureau cadastre. Pour ce qui concerne la présentation des actes à l’approbation, le ministre des Finances et du Budget exige maintenant que les dossiers soient obligatoirement accompagnés du procès-verbal de la commission de contrôle des opérations domaniales comportant la liste nominative des attributaires ; le rapport de la commission de contrôle des opérations domaniales et le plan cadastre portant le numéro d’identification cadastre (Nicad). Quant aux lotissements administratifs, Abdoulaye Daouda Diallo veut que le dossier soit constitué de l’acte portant autorisation de lotir, le plan de lotissement et la liste nominative de tous les attributaires. Par ailleurs, le ministre des Finances et du budget précise que les dossiers ayant reçu un avis favorable de la CCOD datant de plus de deux ans devront être ré instruits avant l’établissement des baux y afférents.
RETOUR A L’ORTHODOXIE OU COUP BAS CONTRE MAME BOYE DIAO ?
Pour beaucoup de nos interlocuteurs, le grand argentier de l’Etat fait ainsi un rappel à l’orthodoxie que ses services violaient depuis des années. Seulement, il se dit dans les chaumières que la note de service de Abdoulaye Daouda Diallo est dirigée contre le directeur des Domaines Mame Boye Diao avec qui il ne serait pas en odeur de sainteté. « Tout le monde sait que c’est Aïssatou Ndiaye qui était le candidat d’Abdoulaye Daouda Diallo à la direction des Domaines. Il est en train de mettre les bâtons dans les roues de Mame Boye Diao qui prend du galon auprès du boss. Il veut le ferrer et exiger que tout passe par lui, mais il s’y est très mal pris, parce qu’il ne sait même pas que cette note n’est pas faisable dans la pratique d’autant plus que les lotissements administratifs sont du ressort du Ministère de l’Urbanisme», confie un inspecteur des Domaines.
Pour un autre agent des Domaines joint par «L’As», il s’agit juste d’un retour à l’orthodoxie, salutaire du reste. « Les Domaines gèrent les assiettes et nous nous occupons de l’aménagement. Malheureusement, ils ont toujours passé outre en zappant l’urbanisme. C’est ce qui explique les bidonvilles, les inondations, maintenant la note remet de l’ordre dans la gestion des domaines », déclare une autre source qui souligne en revanche que la note s’attribue un pouvoir dévolu à son collègue de l’urbanisme.
Quoi qu’il en soit, dans les chaumières politiques, il se dit que le ministre des Finances et du Budget Abdoulaye Daouda Diallo, fidèle parmi les plus fidèles, et le directeur des Domaines Mame Boye Diao, devenu un de plus grands défenseurs du chef de l’Etat, la relation est tombée de Charybde et Scylla. A moins que leur dénominateur commun Macky Sall arbitre et mette fin à cette guéguerre ambiante, ça risque de jaser.
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"LE SÉNÉGAL OFFICIELLEMENT EN RÉCESSION"
L’économiste Khadim Bamba Diagne jette un regard sans froid sur les conséquences économiques de la crise du Covid-19 sur l’économie sénégalaise
Invité du Grand Entretien de JotnaTV, l’économiste Khadim Bamba Diagne a fait une analyse froide des conséquences économiques du Covid-19 sur l’économie sénégalaise.
Il a par ailleurs traité, entre autres questions, des risques économiques du confinement, des dangers d’une récession, de l’impertinence du rapatriement de nos réserves, de la prudence à avoir sur la question du CFA, de la mauvaise nouvelle de la baisse du prix du baril du pétrole, de l’urgence de la réforme fiscale du secteur informel, etc.
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"ON NOUS ENFERME DANS UN SCHÉMA"
Annulation, moratoire, c'est exactement le type de langage dont nous devons sortir - L'écrivain, philosophe et éditorialiste de SenePlus Boubacar Boris Diop parle du coronavirus et plus particulièrement du moratoire accordé par le G20 à la dette africaine
"Annulation, moratoire... Pour moi, c'est vraiment exactement le type de langage dont nous devons sortir dans des moments pareils..." "On nous enferme dans un schéma..."
En ligne de Dakar, au Sénégal, l'écrivain, philosophe et éditorialiste de SenePlus Boubacar Boris Diop nous parle du coronavirus et plus particulièrement du moratoire accordé par le G20 sur la dette africaine. Il vient de co-signer, parmi une centaine d'intellectuels d'Afrique et de la diaspora, une lettre ouverte à destination des gouvernants africains.
LE SUDETEN REVELE UN AUTRE SCANDALE A LA SENELEC
Excellec, c’est le nom de l’autre entreprise pointée du doigt par le Syndicat Unique et Démocratique des Travailleurs de l’Energie (Sudeten).
Alors que la polémique sur le contrat d’Akilee n’a pas encore livré tous ses secrets, un autre scandale présumé éclabousse la Société Nationale d’Electricité (Senelec). Même si le scandale Akilee est le plus célèbre parmi les contrats établis par l’ancienne Direction générale, relève le Syndicat unique et Démocratique des travailleurs de l’Energie (Sudeten), Excellec constitue un cas inique. Face à ces scandales à répétition, les syndicalistes interpellent l’Etat sur le choix des dirigeants des entreprises publiques comme la Senelec, dans l’optique d’asseoir une bonne gouvernance des deniers publics.
Excellec, c’est le nom de l’autre entreprise pointée du doigt par le Syndicat Unique et Démocratique des Travailleurs de l’Energie (Sudeten). En effet, dans un document intitulé manifeste du 1er Mai parvenu à «L’As», les membres du Sudeten estiment que le contrat liant Excellec et la Senelec est un scandale. Ils jugent inappropriée la démarche de la Senelec de produire des poteaux en béton. «La production de poteaux en béton n’est nullement en adéquation ni avec les besoins réels d’exploitation ni avec nos moyens logistiques nécessaires pour leurs manutentions et leurs implantations aux endroits indiqués.
Les poteaux en bois, moins coûteux, plus pratiques et partout utilisés dans le monde sont subitement devenus obsolètes», fulminent les syndicalistes. Selon eux, Excellec est un prête-nom à l’entreprise Myna qui travaillait déjà avec la Senelec dans d’autres secteurs. «Après avoir vécu l’amère expérience des contrats scandaleux de réhabilitation de réseau, de fourniture de transformateurs et poteaux en bois avec l’entreprise Myna, loin d’en tirer des leçons qui s’imposent, une nouvelle idylle est entamée avec le même opérateur qui change d’habillage sous le nom d’Excellec», révèlent les syndicalistes. Par ailleurs, le Sudeten souligne que ces scandales ont déclenché une sérieuse crise de confiance des travailleurs et de l’opinion à l’égard des dirigeants de Senelec, passés comme présents, à l’intérieur de l’entreprise avec des directeurs promoteurs, complices d’Akilee, comme à l’extérieur avec ces anciens directeurs ayant trouvé des planques juteuses.
«Ces responsables, assurés de l’impunité, ragaillardis par le mutisme des autorités de l’Etat, actionnent des activistes par presse interposée, pour prendre leur défense, déformer les faits et tromper l’opinion publique», indiquent les syndicalistes. Ils estiment que si les recommandations de la Cour des comptes avaient été suivies, cet opérateur n’allait plus mettre ses pieds à la Senelec. C’est pourquoi, ils réclament des audits indépendants pour faire la lumière sur tous les «contrats scandaleux» comme Akilee, Excellec et d’autres qui font l’objet de doutes et de suspicion sur leur transparence et leur régularité. S’agissant du contrat Akilee, les syndicalistes demandent tout bonnement sa résiliation en attendant que toute la lumière soit faite sur cette affaire.
«NOUS SALUONS LA POSITION DE L’ACTUELLE DIRECTION GENERALE SUR LE CONTRAT AKILEE»
Saisissant par ailleurs l’occasion de la Fête du Travail, les membres du Sudeten ont posé sur la table ses revendications parmi laquelle la retraite complémentaire. A cet effet, ils demandent à la Senelec de convoquer une rencontre d’échanges et d’informations regroupant les Partenaires Sociaux, la Direction des Ressources Humaines et Amsa assurances sur le contrat.
Toutefois à propos de ses acquis, le Sudeten se félicite d’avoir été le premier à dénoncer tous les scandales au niveau de la Senelec. Aussi, salue-t-il la position de l’actuelle direction générale de Senelec sur le contrat Akilee. Il l’invite à fournir des informations claires et complètes sur les contrats et sur tous les projets de développement du sous-secteur de l’électricité, à venir ou en cours de réalisation (incluant l’information sur les partenaires et les sources de financement).
Enfin, le Sudeten invite les dirigeants de la Senelec à pourvoir à la visibilité maximale des initiatives conjointes, tant en interne auprès du personnel qu’en externe à l’intention d’autres parties prenantes compétentes et de l’opinion publique. Les syndicalistes n’ont pas manqué d’appeler la direction générale à développer la culture d’entreprise, un catalyseur et un moyen de facilitation, pour maintenir la cohésion qui fait écho des aspirations profondes et des comportements responsables des personnes qui composent l’entreprise. En ces temps d’incertitudes et de défis à cause de l’impact du Covid-19, le Sudeten appelle à la solidarité, à l’unité et à la cohésion avec tous les secteurs en lutte au niveau de l’entreprise, du pays comme à l’international, avant de s’incliner sur la mémoire des victimes de la pandémie.
AKILEE OUVRE SON COMPTEUR
Devant la polémique que suscite l’entente Senelec-Akilee, des responsables de cette société sénégalaise ont accepté de rouvrir le contrat. Ils se sont confiés à Sud Quotidien en livrant leur version des faits.
Devant la polémique que suscite l’entente Senelec-Akilee, des responsables de cette société sénégalaise ont accepté de rouvrir le contrat. Ils se sont confiés à Sud Quotidien en livrant leur version des faits.
L’affaire des compteurs dits «intelligents» qui lie Senelec et Akilee Sa (société anonyme sénégalaise), n’a pas encore livré toutes ses vérités. Signé le 11 février 2019 en pleine campagne électorale, entre Akilee Sa et l’ancien directeur général de la Senelec, Mouhamadou Makhtar Cissé, qui avait reçu à l’époque, l’approbation de son conseil d’administration au sein duquel, siégeait l’actuel directeur général, Pape Mademba Bitèye, le contrat réserve bien des surprises aux Sénégalais. Et ce, d’autant que c’est l’actuel Dg de la Senelec qui est aujourd’hui à l’origine de la dénonciation de cette entente, tout en ouvrant une nouvelle brèche avec une entreprise israélienne du nom de Powercom.
Sud Quotidien qui a posé le débat dans sa livraison du jeudi 30 avril, revient avec de nouveaux éléments. Il s’agit d’une version de certains responsables de la société Akilee mais aussi, d’autres syndicats qui naviguent à contrecourant de Sudeten et de Sutelec, lesquels ont affiché leur désapprobation dudit contrat.
COMPTAGE INTELLIGENT ET VALORISATION DES DONNÉES
D’emblée, les responsables de Akilee qui ont pris langue avec Sud Quotidien ont tenu à préciser que «les activités menées par Akilee Sa ont été dès le début, explicitement identifiées comme tournant autour du comptage intelligent et de la valorisation des données pour offrir divers services à Senelec et à ses clients». Ainsi, dès le lancement d’Akilee, le 23 août 2017, la direction commerciale et celle de la distribution de Senelec ont exprimé «leurs besoins d’accompagnement pour améliorer l’expérience client et accroître la performance opérationnelle de Senelec». Nos sources soulignent d’ailleurs que les expressions de besoins respectives de la Senelec ont été formalisées à travers des «termes de références formels», marquant ainsi, le début des négociations sur tous les projets, tels que SmartSEN, AMI (le contrat en question) et AkileePay.
Autrement dit, les différents contrats signés avec Akilee ne sont donc que la résultante des besoins exprimés par les directions opérationnelles de Senelec et de la démonstration de capacité technique et opérationnelle d’Akilee sur la base des premiers projets qui lui ont été confiés, et pour lesquels Senelec, de ses propres dires, «a eu une totale satisfaction». A ceux qui pensent que le contrat a été paraphé dans la précipitation, nos sources soutiennent le contraire. «On a mis 2 ans à discuter pour finaliser ce contrat, avec plusieurs ateliers et des mémos établis par les directeurs techniques de Senelec», confient des responsables de Akilee.
LES TROIS GRANDS DOMAINES DE AKILEE
Nos sources ont aussi tenu à rappeler que «dès la signature du MOU, nous avions clairement exprimé notre objectif de viser 3 grands domaines». D’abord, la satisfaction de la clientèle par une transformation de leur expérience. Ensuite, l’optimisation de l’exploitation par des solutions dédiées à maîtriser les pertes et réduire les charges d’exploitation ; et enfin, par des solutions de maîtrise de la demande à travers le déploiement de solutions d’efficacité énergétique et de production énergétique renouvelable distribuée. Le tout intégré dans une centrale électrique virtuelle.
«Dans notre démarche, nous avons invité Senelec à étudier le modèle de sociétés comme ENEL, EDF, ENGIE, Total… qui sont toutes en train de se déployer dans les services énergétiques du futur, à travers la création de filiales dédiées. Par ailleurs, Senelec s’est définie une stratégie visant à diversifier ses revenus à travers trois véhicules qui ont la vocation de se déployer dans la sous-région et se positionner comme des champions dans les domaines de la production (ERS), de la distribution (Excellec) et du Comptage et des services intelligents (Akilee)», précisent aussi, nos sources.
Quant aux parts (34 % pour Senelec), les responsables de Akilee précisent aussi que «le choix a été fait de prendre des participations significatives en fonction des apports des parties mais, en évitant de donner l’image d’une Senelec qui se déploierait dans les autres pays». En effet, selon eux, «il serait très difficile pour Senelec, pour des raisons de souveraineté, mais également de fierté, de convaincre ses sociétés-sœurs de lui confier un quelconque projet comme ceux portés par ses filiales».
LES DATA, LE PÉTROLE DU XXIÈME SIÈCLE
Selon des responsables de Akilee, certains «cadres» de Senelec qui soutiennent que leur boite n’a pas besoin d’externaliser le marché des compteurs dits intelligents, font fausse route. Et pour cause, soutiennent-ils, «Akilee n’est pas un fabricant de compteurs, pas plus que Senelec ne l'est d'ailleurs. Elle s’approvisionne sur le marché, chez des acteurs de référence qui ont fait leurs preuves».
«Ce qui a poussé Senelec à développer des liens capitalistiques et contractuels avec Akilee, ce n’est certainement pas le souhait de s’approvisionner en compteurs, fussent-ils intelligents. L’essentiel est dans les data, c’est le pétrole du XXIème siècle», confient nos sources. L’enjeu pour Senelec serait donc de s’assurer qu’elle aura la maîtrise des données. «Lequel d’entre nous paye pour utiliser Google, Facebook, WhatsApp… ?», s’interrogent nos sources. «La raison en est simple, c’est qu’on ne paie pas en cash, mais en données à partir desquelles ces géants développent des services à haute valeur ajoutée. Le système SenAMI que nous avons conçu permet de s’assurer de la souveraineté sur le système et sur les données, au service de tous», révèlent-ils.
Avant de se poser les questions suivantes : «Pourquoi cela n’a pas été fait jusqu’à présent ? Pourquoi, c’est nous qui avons proposé de généraliser le comptage intelligent alors même que la stratégie initiale de Senelec était de limiter les compteurs intelligents aux quelques 10.000 clients grands comptes et d’équiper tout le reste (99,5%) de compteurs à prépaiement. Compteurs qui, en vérité, exposent encore plus Senelec à la fraude, parce qu’à l’heure actuelle, un client Woyofal n’a aucun autre contact énergétique avec Senelec, si ce n’est la livraison de l’énergie, et cela pose problème.
Pourquoi on n’a pas développé ces logiciels en interne ? Pourquoi à ce jour les quelques compteurs intelligents déployés sont venus avec un système entièrement fourni et géré par des Chinois ?»
Autant d’interrogations auxquelles les services de l’actuel directeur général de la Senelec, Pape Mademba Bitèye, qui, lui, opte pour la piste israélienne, devraient apporter des réponses.
LA SOCIETE DAKAR DEM DIKK RISQUE GROS
En effet, là où des sociétés comme Aftu ont reçu de la part de l’Etat une subvention de 500 millions d francs Cfa par mois, la société Dakar Dem Dikk n’a pour sa part reçu que 600 millions par mois comme compensation de la part de l’Etat du Sénégal.
La société de transport Dakar Dem Dikk risque de tomber en faillite si la pandémie du Coronavirus dure longtemps au Sénégal. Cette entreprise a enregistré 95 % de pertes de recettes depuis le début de la crise. Espérant relancer la boite avec la subvention accordée par l’Etat pour compenser les pertes, la direction générale de cette société est finalement déçue par l’enveloppe que le gouvernement vient de dégager pour soutenir 3D.
En effet, là où des sociétés comme Aftu ont reçu de la part de l’Etat une subvention de 500 millions d francs Cfa par mois, la société Dakar Dem Dikk n’a pour sa part reçu que 600 millions par mois comme compensation de la part de l’Etat du Sénégal.
A cause des mesures des restrictions en matière de déplacement des populations prises par les autorités pour freiner la propagation du coronavirus, la société Dakar Dem Dikk a changé son emploi du temps. En plus du nombre réduit de places (moitié), les horaires de rotation ont connu de fortes modifications. L’intervalle de mise en circulation est compris entre 7h15 à 15h. Ce qui n’est pas sans conséquences pour la société de transport. Le réseau interurbain (Sénégal Dem Dikk) a été également suspendu depuis le début du couvre-feu au Sénégal.
Pour permettre à cette société de faire face à ses charges et de survivre après la pandémie du Covid 19 l’Etat avait promis de le soutenir. Aujourd’hui, 3D vient de recevoir une enveloppe du gouvernement. Mais selon nos sources ce montant est jugé «dérisoire» par la direction générale de Dakar Dem Dikk. «Cela ne suffit même pas pour notre petit déjeuner ! Mais ce n’est pas en période de guerre que les militaires vont entrer en mutinerie», a lâché un haut responsable de la société, joint au téléphone par Sud Quotidien.
En effet là où des sociétés qui n’ont pas les mêmes charges que 3D ont reçu de la part de l’Etat une subvention de 500 millions par mois, la société Dakar Dem Dikk n’a pour sa part reçu que 600 millions de francs par mois comme compensation de la part de l’Etat du Sénégal. Un montant jugé très peu par la direction de la société de transport sénégalais qui a enregistré 95 % de pertes de ces recettes durant cette période de pandémie.
Selon notre interlocuteur, la société versait 40 millions de recettes par jour. Mieux là où d’autres sociétés de transport travaillent par jour avec un chauffeur et un receveur de 5 heures du matin à 22 heures, DDD travaille avec 3 chauffeurs et 3 receveurs pour la même tranche horaire sans oublier les (RSP) -Réserves sans programmes- (des chauffeurs en stand by). Aussi ses dépenses en carburant sont estimées à 150 millions de francs Cfa par semaine. Si la pandémie perdure alors que l’Etat ne revient pas sur sa décision en augmentant la subvention, la société Ddd risquerait tout bonnement de mettre la clé sous le paillasson.
par Serigne Filor
L'AFRIQUE ET LE COVID-19, À QUOI POUVONS-NOUS NOUS ATTENDRE AU LENDEMAIN ?
La logique voudrait que l’on se fixe des objectifs dont les atteintes seront profitables pour tous. Les « décideurs » doivent cesser de se réjouir de la pitance donnée par le FMI et la banque mondiale qui veulent faire de nous des « quémandeurs »
La pandémie du Covid-19, crise inédite de par sa nature, a chamboulé toutes les dynamiques d’évolution des économies du monde (celui-ci a connu, avec cette épidémie, une certaine « démocratie de la létalité »). En effet, malgré que chaque pays du monde mette en place un dispositif de riposte contre ce virus, assez rigide de par les coûts humains et matériels qu’il demande, celui-ci continue librement d’étancher sa « soif d’âmes » en abattant chaque jour des milliers de personnes à travers le monde. Ainsi, les seules « mesures prises pour atténuer la contagion et préserver des vies humaines a des conséquences négatives sur l’activité économique mais doivent être considérées comme un investissement important dans la santé humaine et économique à long terme ». Ces coûts sont supportés par des économies. Certaines d’entre elles ont une capacité de résilience importante (celles de la plupart des pays « développés ») tandis que d’autres (celles d’un grand nombre de pays « en voie de développement » que l’on rencontre davantage en Afrique) sont moins résilientes. Notons, pour écarter toute ambiguïté relative à la compréhension du terme « résilience économique », qu’en dépit de certains décalages de point de vue par rapport à ce concept chez les auteurs qui ont eu à en fournir des définitions (les facteurs pris en compte pour le définir se différencient chez eux), nous retenons que la résilience d’une économie est sa capacité à maintenir sa production autour du potentiel suite à des chocs.
Selon FMI, l’économie mondiale devrait connaître une forte contraction de 3% en 2020 et croître de 5,8% en 2021. Les économies occidentales, nos « références », subissent de plein fouet, toutes sans exceptions, les conséquences de cette crise. Notre chère amie, la France, n’est pas en reste, si on s’en remet aux propos de Tristan-Pierre Maury, professeur d’économie à l’Edhec, sur le quotidien Affiches Parisiennes: « En cette période de confinement, l’activité française est réduite d’un tiers. Chaque mois de confinement coûte environ 70 milliards d’euros soit à peu près 3% du PIB ». Les petites entreprises comme les grands groupes français sont touchés par la crise ; « le CAC40 a perdu un quart de sa valeur depuis le début de la crise tandis que les TPE (toute petite entreprise) sont en grande difficulté ». Les prévisions faites autour du PIB ne sont pas aussi favorables : l’institut national de la statistique et des études économiques (INSEE) a pronostiqué le 1er avril une baisse minimum de 6% alors que FMI prédit le 9 avril une chute de 7,2% et le Gouvernement français a annoncé une chute de 8% le 14 avril, selon toujours les Affiches parisiennes. Le choix d’un tel pays pour illustrer les conséquences de cette pandémie sur les économies occidentales pourrait être sévèrement condamné, mais assez compréhensible pour un panafricaniste qui nous dirait que nous avons une liaison avec la France jugée inévitable par nos dirigeants et telle qu’elle est notre « référence » sur tous les aspects de la vie sociale, sociétale, économique, politique,…
Quant aux pays africains, aux économies qui boitent, faibles dans la tendance, les statistiques fournies par des entités trop occupées à fournir des simulations d’une atteinte d’objectifs économiques visés depuis longtemps en Afrique, à une époque où même ma grand-mère, à peine s’appuyant sur une canne pour marcher n’était pas encore née (pour ne pas citer FMI, Banque Mondiale,…), ne font pas trop voir la moindre blancheur des dents d’un africain conscient. Ainsi, dans un communiqué de presse de la banque mondiale publié le 09 avril 2020 dans le site de cette institution, on nous informe déjà que la pandémie de Covid-19 entraîne l’Afrique subsaharienne vers sa première récession depuis 25 ans ; cette crise « risque également de provoquer une crise alimentaire en Afrique, la contraction de la production agricole risquant d’atteindre entre 2,6% dans le scénario optimiste jusqu’à 7% en cas de blocages commerciaux… Les importations de denrées alimentaires vont elles aussi fortement reculer passant de 13 à 25% plombées par des coûts de transaction plus élevés et une demande intérieure en baisse ». Et tant d’autres informations qui témoignent, selon eux, l’urgence pour nous autres pays africains d’adopter des mesures pour « sauver » nos économies. Le FMI, de son côté, approuve une « aide » près de 900 millions de dollars, soit plus précisément 886,2 millions de dollars à la Côte d’Ivoire (je rappelle qu’Alassane Dramane Ouattara est le Président de la Cote d’Ivoire et Président de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest, celui que les panafricanistes accusent d’être animé d’un sentiment de contentement inédit du seul fait d’avoir serré la main à Macron) et lance avec la banque mondiale un appel commun stipulé comme suit : « Le Fonds monétaire international, la Banque mondiale et des dirigeants africains ont appelé vendredi 17 avril à une rapide action internationale pour aider les pays d’Afrique à faire face à l’épidémie de coronavirus qui va provoquer cette année une contraction de 1,25% de l’économie du continent, un peu plus bas inédit ».
La plupart des pays d’Afrique voient leur croissance économique future fauchée par les effets de cette crise. L’agence de presse sénégalaise (APS) nous rappelle que l’économie sénégalaise qui espérait réaliser un taux de croissance de 6,8% à la fin de cette année n’en connaitra que 3% (d’après les propos de Son excellence M. Macky Sall lors du précédent discours à la nation). C’est la même tendance pour la majeure partie des pays africains.
Au vu de toutes ces situations défavorables pour l’Afrique, loin de se conformer aux multiples prédictions tournant autour d’un lendemain africain funeste et sombre tenues par les institutions « bidon » pilleuses, nous pouvons dire sans la moindre ambigüité que la Covid-19 n’a pas été gentille pour l’Afrique comme tant d’autres pays figurant sur sa « carte d’exploration ». Cette situation ne demeure pas totalement méconnue. Ce qui l’est, c’est ce lendemain africain que certaines institutions aptes à mal poser les problèmes africains pour en proposer d’odieuses solutions s’attèlent à décrire. Nous autres dignes fils de l’Afrique, sommes assez légitimes pour proposer nous-mêmes des solutions relatives à la « redynamisation » des économies africaines. C’est carrément insensé, voire immoral, de s’attendre à des solutions proposées par un sadomasochiste occidental, un bipède balloté par les mêmes déséquilibres de la vie, alors que nous avons là une intelligentsia africaine (dont je ne figure pas d’ailleurs) capable de les fournir par le biais de la seule « provocation intellectuelle » utile.
Tout d’abord, il faut noter que les économies africaines d’après-crise ne devront pas être celles précédentes ou jusque-là adoptées par les pays africains bâties sur une rigide dépendance à l’extérieur qui nimbe tout d’un coup leurs diverses potentialités. Il faudrait penser à mettre en place des économies qui se foutent de la « norme anormale » établies par les économies occidentales prescrivant inconsciemment pendant longtemps la non prise en compte des normes environnementales dans les actions de développement à poser. Les économies à mettre en place devront également être résilientes telles que la résilience sera définie en prenant en considération les secteurs les plus intéressants de la vie sociale des pays africains, à savoir la santé, l’éducation,… en augmentant leur capacité de résistance par le biais d’investissements de masse qui seront faits par les pouvoirs publics. A l’heure où la technologie offre de nombreux avantages, l’éducation et l’enseignement supérieur ne devraient pourtant pas connaître un arrêt définitif inévitable dans certains pays africains provoqué par cette crise. Hélas ! C’est chose remarquée. Un déséquilibre parmi tant d’autres que les « nouvelles économies » seraient aptes à résorber sans grand effort.
Ensuite, il convient aussi pour les pays africains de se fixer des objectifs conformément aux défis qu’ils ont à relever, par ordre de prépondérance économique et sociale, de s’établir des dynamiques d’évolution authentiques et d’éviter de se perdre dans une spirale « dictature du comparatisme », dans une certaine littérature utilisée par Pr Felwine SARR. Ainsi n’avonsnous pas besoin de la construction de monuments et d’autres futilités dans un pays où la faim frappe des milliers de citoyens. De la même manière, l’aveugle n’a nullement besoin d’une télévision pour des besoins d’informations, il a justement besoin d’une radio, pour écouter, savoir ce qui se passe dans le monde. Cela pour dire tout simplement que les Etats africains habilités à prendre des décisions pour l’amélioration des conditions de vie de leurs populations doivent élaborer des politiques économiques aptes à répondre aux rationnelles exigences de celles-ci. Le recours à l’économie de débrouille, largement développée par Serge Latouche dans son ouvrage intitulé « Entre mondialisation et décroissance : l’autre Afrique » et dont les performances peuvent se juger à travers la frugalité (la simplicité dans la consommation) qu’elle préconise, doit être fait car étant une réelle alternative pour atteindre ces objectifs. L’adéquation de ce type d’économie avec le contexte africain peut être vue du seul fait que dans les pays africains le lien social et la stabilité politique sont au rendez-vous ainsi que son aspect quelquefois informel. Il faudrait encourager la consommation locale. Et que les Etats eux-mêmes élaborent, d’un autre côté, des politiques qui seront dans une droite de soutenir les transformateurs et les entreprises nationaux comme, par exemple, au lieu de mettre en vigueur des législations strictes qui les mènent souvent vers la faillite, ils pourraient être tolérables et essayer de tirer ce qu’il y a de nécessaire pour eux et pour leurs pays dans la plupart de leurs activités souvent informelles.
Enfin, il faut retenir que nous pouvons nous attendre à une Afrique meilleure si l’on commence désormais à tirer des leçons de cette crise. Les gouvernements des pays africains devront se rendre compte de leurs faillibilités et prendre des décisions fermes pour les corriger.
L’économie dont les pays africains ont besoin est singulière et se détache de toute comparaison avec celles que nous jugeons performantes car, disons-le, l’Afrique est un continent particulier ; elle a su établir la vie humaine en société. La logique voudrait que l’on se fixe des objectifs dont les atteintes seront profitables pour toutes les populations. Pour faire donc régner la logique, les « décideurs » doivent cesser de se réjouir de la pitance donnée par le FMI et la banque mondiale qui veulent plus que jamais faire de nous des « quémandeurs », d’évaluer comme une réussite l’accord avec la France et d’autres pays. La corruption, la captation et les malversations devront également être anéanties, supprimées de notre existence dans l’Afrique d’après-crise.
En définitive, la Nouvelle Afrique devra être celle telle que les vices africains seront absents, les influences négatives exterminées et les liens de dépendance coupés. Ainsi, l’on laissera le travail et la détermination déterminer son devenir, conformément aux divins consentements.
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"LE CORONAVIRUS MONTRE AUX PAYS DÉVELOPPÉS CE QU'EST LE SOUS-DÉVELOPPEMENT"
Ndongo Samba Sylla revient sur les conséquences de la crise du covid-19, ainsi que les enseignements à tirer de cette pandémie pour l’Afrique en particulier et les peuples du Sud en général, dans une perspective décoloniale
Entretien de la Fondation Frantz Fanon avec Ndongo Samba Sylla, économiste basé à Dakar sur la situation de la crise du Coronavirus au Sénégal. Il revient sur la réaction des pouvoirs publics locaux et les conséquences sanitaires, politiques et sociales de la crise, ainsi que sur les enseignements à tirer de cette pandémie pour l’Afrique en particulier et les peuples du Sud en général, dans une perspective décoloniale et panafricaine.
Entretien réalisé par Mireille Fanon Mendès France, présidente de la Fondation Frantz Fanon.