La violence se répand si rapidement au Mali qu'elle met en péril la survie même de l'État, a déclaré vendredi l'expert des Nations Unies sur les droits de l'homme dans le pays au terme d'une visite officielle de 11 jours au cours de laquelle il a été informé d'une augmentation des exécutions extrajudiciaires, d'autres homicides, des enlèvements de civils et de viols collectifs de femmes.
« Nous sommes très préoccupés par la détérioration grave et continue de la sécurité qui a dépassé un seuil critique », a déclaré l’expert indépendant des Nations Unies sur la situation des droits de l'homme au Mali, Alioune Tine, décrivant « un État affaibli et impuissant, qui assume difficilement son rôle régalien de protection des populations civiles face aux groupes armés qui essaiment dans tout le pays ».
La volonté politique des autorités remise en question
« Il est grave de constater que les populations civiles subissent aussi des violences de la part des Forces de Défense et de Sécurité Maliennes (FDSM) censées les protéger », a-t-il ajouté.
M. Tine a déclaré que certaines personnes rencontrées lors de sa visite ont exprimé de sérieux doutes sur la volonté politique des autorités maliennes de prendre des mesures concrètes pour garantir la sécurité des populations civiles, en particulier dans les régions les plus touchées par la crise et les conflits.
« Cela doit absolument changer », a-t-il déclaré. « Il faut un sursaut national et une volonté inébranlable des autorités maliennes, avec le soutien actif de leurs partenaires, pour restaurer l’autorité de l’Etat et assurer la protection des populations civiles. »
Tous azimuts contre les populations civiles
M. Tine s'est dit gravement préoccupée par la dégradation rapide et continue de la sécurité créée par la défaillance des institutions de l'État et qui donne lieu à des attaques tous azimuts contre les populations civiles par des groupes armés tels que la Jama'at Nusrat al-Islam wal Muslimin (JNIM), l'État islamique dans le Grand Sahara (EIGS) et d'autres qui consolident leur contrôle sur des zones dans le nord et le centre du pays. Ils s'étendent également aux régions méridionales du Mali, et la violence communautaire augmente dans le centre du pays.
Les populations civiles du nord (régions de Gao, Menaka et Tombouctou), du centre (régions de Bandiagara, Douentza, Mopti et Ségou) et du sud (régions de Koutiala, San et Sikasso) subissent des violations de leurs droits humains fondamentaux et atteintes à ces droits et sont même tuées.
Violations par les forces maliennes, les forces internationales et groupes armés
La détérioration du respect des droits de l'homme s'inscrit dans un contexte d'impunité généralisée des auteurs de ces violations and atteintes.
L'opération de maintien de la paix des Nations Unies, la MINUSMA, a recensé au moins 43 exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires commises par les Forces de Défense et de Sécurité Maliennes (FDSM) entre le 1er avril et le 30 juin 2021.
L'augmentation des atteintes aux droits de l’homme commises par les groupes armés et les milices communautaires est encore pire, le total des six premiers mois de cette année, soit 258 cas, représentant déjà 88 % du nombre de cas signalés pour toute l'année 2020.
Les enlèvements sont également en hausse spectaculaire. Au cours des seuls six premiers mois de cette année, la MINUSMA a documenté 435 enlèvements – cinq fois plus que pour toute l'année 2019.
Les ravisseurs sont principalement les groupes armés et les milices communautaires du centre du Mali, notamment la milice Da Na Ambassagou, mais aussi des groupes armés tels que la Jama'at Nusrat al-Islam wal Muslimin (JNIM) et d'autres groupes similaires.
Les viols collectifs et autres violences à l'encontre des femmes sont en augmentation, tout comme les attaques contre les « esclaves », un problème que l'expert indépendant a souligné le mois dernier.
Mettre fin à l’impunité et restaurer la confiance des populations
Lors des rencontres avec les autorités maliennes, M. Tine a fait part de ses sérieuses préoccupations quant à la détérioration continue de la situation des droits de l'homme. Les autorités maliennes se sont engagées à prendre des mesures concrètes pour répondre à ses préoccupations et améliorer la situation des droits de l'homme.
« Nous invitons donc les autorités maliennes à honorer leurs engagements », a déclaré Alioune Tine. « Cela permettra de rassurer et de restaurer la confiance des populations civiles et des nombreux interlocuteurs face aux institutions de l’Etat ».
Selon l’expert, une « priorité absolue doit être réservée par les autorités au traitement de la question préoccupante de l’impunité au Mali ».
L’impact sur le droit des femmes
Selon M. Tine la dégradation de la sécurité a un impact considérable sur la situation des droits fondamentaux de la femme avec la récurrence inquiétante des cas de violence basée sur le genre, y compris les viols collectifs.
Il a signalé que la MINUSMA a documenté plusieurs viol collectifs en mars. Aussi, dans les localités sous le contrôle ou l’influence des groupes extrémistes violents, les femmes sont forcées de porter le voile. Une vingtaine de cas de flagellations des femmes en guise de punition pour n’avoir pas porté le voile ou avoir porté le mauvais voile, auraient été signalés depuis le début de l’année.
L’expert a rappelé que les femmes continuent d’être sous-représentées dans la sphère publique et politique au Mali, en violation de la loi no 2015-052 du 18 décembre 2015, qui fixe un quota d’au moins 30 % de femmes aux fonctions nominatives et électives.
Des détentions à caractère illégal
Lors de sa visite, M. Tine a notamment rencontré le Premier Ministre, le Ministre des affaires étrangères et de la Coopération internationale, le Ministre de la Défense et des anciens combattants, le Ministre de la justice et des Droits de l’Homme, Garde des Sceaux, le Ministre de la Refondation de l’Etat chargé des relations avec les institutions, le ministre de la Réconciliation, de la Paix et de la Cohésion nationale, chargé de l'Accord pour la paix et la réconciliation nationale, le président de la Commission nationale des droits de l'homme et les autorités judiciaires.
« Nous avons pu rencontrer l'ancien président Bah N'Daw et l'ancien Premier ministre Moctar Ouane qui sont toujours en résidence surveillée » a déclaré Tine. « Nous avons discuté avec les autorités maliennes sur le caractère illégal de cette situation et la nécessité d’y mettre fin dans les meilleurs délais. Nous avons pris bonne note des dispositions concrètes prises par les autorités maliennes allant dans le sens d’une prochaine libération ».
L’Expert a également discuté avec les autorités sur le décès en détention dans des conditions non encore élucidées de l'individu arrêté pour tentative d'assassinat du Président de la Transition, le Colonel Assimi Goïta.
« Nous demandons aux autorités maliennes d’ouvrir d'une enquête approfondie, rapide et impartiale conformément aux obligations internationales pertinentes du Mali en matière des droits humains », a informé M.Tine.
Il a également rencontré les organisations de la société civile, y compris celles des personnes atteintes d’albinisme et des personnes vivant avec un handicap, les organisations de la société civile et les associations de victimes de l'esclavage par ascendance et les associations luttant contre cette pratique, les organisations non gouvernementales, des représentants du corps diplomatique, les agences, fonds et programmes des Nations Unies ainsi que le Représentant Spécial du Secrétaire général des Nations Unies et Chef de la MINUSMA.
Il s'est également rendu dans la région de Gao, où il a rencontré les autorités locales, les associations de femmes et les agences des Nations unies.
À l'issue de sa visite, AliouneTine a publié une déclaration. Il soumettra le rapport complet de sa visite au Conseil des droits de l'homme en mars 2022. (news.un.org)
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DES MILLIONS DE LOCATAIRES SOUS PRESSION
Point USA évoque cette semaine, la question du moratoire locatif ; les multiples accusations de harcèlement sexuel contre le gouverneur de New York, Andrew Cuomo ; la santé mentale des athlètes de haut niveau à l'aune des JO de Tokyo
- Plus de 6 millions de foyers menacés d’expulsion pour retard dans le paiement de leur loyer, sauvés in extrémis, mais les propriétaires se tournent vers les tribunaux pour stopper le nouveau moratoire. Entretien avec Jean-Michel Giraud, président d’une association d’aide aux sans-logis de Washington.
Andrew Cuomo, gouverneur de l’Etat de New York, maintenant officiellement accusé de harcèlement répété, après la plainte de 11 de ses employées. Pressé de toute part de démissionner, il refuse et clame son innocence, mais pourra-t-il sauver sa carrière politique ?
Fin des Jeux Olympiques : ils se sont en définitive plutôt bien passés, et même si la gymnaste Simone Biles n’a pas satisfait toutes les attentes, elle a rendu un grand service au monde sportif en attirant, après Naomi Osaka, l’attention sur la santé mentale des athlètes.
Rubrique variétés : portrait de Patricia Kennely-Morrison, épouse du légendaire chanteur des Doors, Jim Morrison. Elle avait fondé en 1967 le premier magazine sur le Jazz et la pop music.
Nouvelle édition de Point USA, une émission hebdomadaire qui s’adresse plus particulièrement à un public francophone et francophile, avec pour objectif de discuter en français de l’actualité américaine en compagnie de René Lake, analyste politique et directeur de presse, Dennis Beaver, avocat et chroniqueur juridique à Bakersfield, en Californie, Herman Cohen, ancien secrétaire d’Etat adjoint américain et avec la légende du monde radiophonique Georges Collinet. La présentation et la production sont assurées par Claude Porsella et la réalisation et le montage par Serge Ndjemba.
KOFI YAMGNANE, LE DESTIN INCROYABLE D'UN ENFANT DE LA BROUSSE DEVENU ÉLU DE LA RÉPUBLIQUE
Élu l'un des premiers maires noirs de France à Saint-Coulitz dans le Finistère, il a mené une longue carrière politique en étant notamment nommé au gouvernement par Mitterrand en charge de l'intégration. À 76 ans que devient ce retraité dynamique ?
Kofi Yamgnane, jeune retraité, a aujourd'hui 76 ans. Ingénieur en chef des Mines celui qui a construit 1 552 ponts a eu un destin incroyable. Élu l'un des premiers maires noirs de France à Saint-Coulitz dans le Finistère, il a mené une longue carrière politique en étant notamment nommé au gouvernement par François Mitterrand en charge de l'intégration. À 76 ans que devient ce retraité dynamique ?
Après plusieurs jours où les rumeurs les plus folles ont agité la planète foot, l’Argentin a livré sa propre version des faits ce dimanche lors d’une conférence de presse exceptionnelle
Lionel Messi a tenu une conférence de presse exceptionnelle ce dimanche après l’annonce de son départ du Barça. L’attaquant argentin de 34 ans en a profité pour rétablir les vérités sur les conditions de son départ.
L’annonce du départ de Lionel Messi a fait l’effet d’une bombe en milieu de semaine. Après plusieurs jours où les rumeurs les plus folles ont agité la planète foot, l’Argentin a livré sa propre version des faits ce dimanche lors d’une conférence de presse exceptionnelle.
"C'est clair que j'ai fait tout ce que je pouvais pour rester. Le club a réfléchi et on a discuté de plein de choses, a confirmé l’attaquant de 34 ans face aux journalistes. Je peux assurer que de mon côté j'ai fait tout mon possible. L'année dernière je ne voulais pas rester mais cette année je voulais rester. Cela n'a pas été possible."
Messi: "Convaincus de ce qui allait se passer"
Relancé sur le timing de cette douloureuse décision, Lionel Messi a raconté comment tout s’était déroulé entre lui et le président Joan Laporta. Des échanges intervenus dans une atmosphère sereine malgré une issue attendue.
"En réalité, on a dîné avec le nouveau président. On a discuté et après le dîner on était convaincus de ce qui allait se passer. On savait qu'il y avait un problème avec mon contrat. Ce qui s'est passé est arrivé. Cela ne pouvait pas marcher, Il n’y avait pas beaucoup de doute. On le pressentait. Nous savions ce qui allait être décidé, et ce que nous pensions faire."
Quel espoir de changement pour une jeunesse dynamique et pleine de rêves alors que partout en Afrique survivent des autocrates qui érigent des systèmes sur le clientélisme, la corruption et la peur ?
Le Temps Afrique |
Hamidou Anne |
Publication 07/08/2021
En mars 2021, malgré la distance sociale qu’impose la pandémie, des milliers de jeunes gens ont investi les rues de plusieurs villes du Sénégal. Parmi eux quelques casseurs, mais surtout des gens qui voulaient exprimer leur colère vis-à-vis du régime avec comme prétexte un scandale de mœurs devenu une affaire politique.
Le Sénégal n’offre pas un avenir rassurant à sa jeunesse. Le chômage endémique et la misère sociale poussent des milliers de jeunes à l’immigration clandestine, provoquant des drames que les médias occidentaux relaient régulièrement. Des centaines de jeunes Sénégalais périssent chaque année dans la Méditerranée, au mépris des autorités. Ces morts officiellement n’existent pas, le gouvernement les ignore. Ce n’est pas non plus auprès des oppositions politiques que cette jeunesse trouve une oreille attentive. Dans son écrasante majorité, la classe politique est davantage préoccupée par les questions électorales que par la proposition de solutions efficaces aux problèmes qui assaillent les jeunes Sénégalais.
Quel espoir de changement ?
Ces jeunes-là ne sont pas une exception, on les retrouve partout en parcourant le continent, faisant face aux mêmes défis et ayant les mêmes préoccupations liées au devenir. Ils survivent dans des villes insalubres, trompent l’ennui par n’importe quel moyen et ne cessent de fulminer contre des hommes politiques qui ne leur témoignent aucun respect.
Quel espoir de changement pour une jeunesse dynamique et pleine de rêves alors que partout en Afrique survivent des autocrates qui érigent des systèmes sur le clientélisme, la corruption et la peur? Ces vieux leaders s’accrochent au pouvoir par la force ou par des artifices constitutionnels, empêchent les respirations démocratiques, organisent un système clanique et répriment les envies d’une jeunesse nourrie aux images de changement qui lui parviennent d’ailleurs.
Depuis les indépendances, les hommes politiques nous montrent qu’ils n’aiment pas leur pays. Ils ne gouvernent pas dans la vertu, confisquent le pouvoir et désespèrent une génération qui veut changer le cours de l’histoire. Même les alternances, quand elles surviennent, prennent l’allure d’un changement d’hommes, en perpétuant les mêmes méthodes pour produire les mêmes résultats. La politique africaine se résume à une vieille série télé, avec toujours les mêmes personnages et le même scénario.
CRISE ANGLOPHONE AU CAMEROUN, WITH ALL THESE DIALOGUES, WHY IS PEACE STILL SO ELUSIVE?
La décision d’accorder un statut spécial au NoSo n’a encore aucune traduction concrète dans les faits, pas plus que celle de diffuser largement l’offre gouvernementale d’amnistie aux combattants pour qu’ils rejoignent leurs communautés
Du côté des autorités camerounaises, on ne manque pas d'énumérer les mesures prises pour répondre à la « crise anglophone » qui a marqué au fer rouge de la violence et du deuil des dizaines de milliers de familles, peuplé les camps de déplacés et les chemins de l'exil, anéanti d'indispensables infrastructures collectives. Parmi ces mesures figurent la création d'une commission nationale pour le bilinguisme, d'un plan temporaire d'assistance humanitaire aux victimes, d'un organisme de démobilisation et d'insertion des combattants, ainsi qu'un ensemble de dispositions sectorielles, dont l'introduction du « common law » anglo-saxon dans les filières éducatives, à l'université ou à l'école nationale d'administration et de magistrature. Le tout entériné par le Grand dialogue national de 2019 qui a réuni une partie des "modérés" de la cause séparatiste et lancé symboliquement le processus de réconciliation.
Tout est-il réglé pour autant ? Plus de cinq ans après le début des hostilités, force est de constater que les régions du Nord-ouest et du Sud-ouest, désormais désignées comme "NoSo", ne connaissent toujours pas la paix – et les femmes, victimes meurtries de tant de manières infâmes, le savent dans leur chair.
Qui d’autre qu’elles-mêmes pour appeler au sursaut ? Dans un élan massif et venues des quatre coins du pays, plus de 1500 femmes issues de tous les milieux et de toutes conditions ont convergé vers la capitale, fin juillet, dans une démarche inédite, pour faire entendre le même cri : « Assez ! Enough is enough! » La Convention nationale des femmes pour la paix au Cameroun, la toute première du genre, inclusive et solennelle, s’est donné les moyens de sa crédibilité en devenant un moment privilégié de parole pour les Camerounaises anglophones, qu’on n’avait sans doute jamais vues réunies en aussi grand nombre à Yaoundé. Au Palais des congrès, sur les hauteurs de la ville, des avocates côtoyaient des revendeuses du marché, les fameuses « Bayam Sellam », des paysannes et des enseignantes, des étudiantes, des participantes en fauteuil roulant, des infirmières et même des policières, dans le but de former « une alliance plus forte, plus audible et plus nombreuse que celle des hommes qui profitent de la guerre et des conflits ».
« Assez ! », a martelé l’écrivaine Djaili Amadou Amal, Prix Goncourt des Lycéens 2020 et keynote speaker. « Nous devons tout faire, individuellement et toutes ensemble, pour que la paix revienne », a enjoint par message vidéo Chimamanda Ngozi Adichie, célébrité littéraire nigériane, révélant son attachement particulier au Cameroun où sa mère a grandi. Cheville ouvrière de cette rencontre historique, Nina Netzer, la représentante de la Fondation allemande Friedrich-Ebert-Stiftung, en pagne et foulard, a également une raison personnelle pour s’impliquer dans la résolution d’un conflit qui déchire son pays d’adoption ; elle est mariée à un Camerounais depuis ses années estudiantines en Allemagne. « Envoyer un signal fort que les femmes du Cameroun aspirent à la paix », pose-t-elle comme objectif, afin que « cet appel soit entendu partout au Cameroun, en Afrique, dans le monde, dans les couloirs de l’ONU, de l’Union africaine, de l’Union européenne… ». La plateforme mise sur pied pour la convention comptait 38 organisations de femmes et leurs réseaux.
« Nous, les femmes du Nord-ouest et Sud-ouest, avons découvert une nouvelle réalité quotidienne de souffrance et de deuil qui détruit nos familles, nos communes, nos villages. Nous réclamons des rôles stratégiques dans les négociations de paix pour nos régions », a clarifié d’entrée de jeu Yvonne Muma, du Mouvement des femmes camerounaises pour la paix (CAWOPEM). « Ne parlez plus pour nous. Mes sœurs, ne vous résignez pas en disant ”on va faire comment ? ”. Ce sont les femmes qui vont changer le narratif dans notre pays ». Comme ce fut le cas en Colombie où on leur reconnaît un rôle essentiel pour mettre fin à des décennies de guérilla. Venue spécialement de Bogota, Rosa Emilia Salamanca, du Collectif Femmes, paix et sécurité pour la réflexion et l’action, a livré du combat des Colombiennes un puissant témoignage.
Pourquoi donc le Cameroun est-il toujours en guerre avec une partie de ses ressortissants ? D’abord, parce qu’il y a loin de la coupe aux lèvres et bien des remèdes préconisés sont peu ou pas appliqués. La décision d’accorder un statut spécial au NoSo n’a encore aucune traduction concrète dans les faits et pas plus que celle de diffuser largement l’offre gouvernementale d’amnistie aux combattants pour qu’ils rejoignent leurs communautés. Difficile, par ailleurs, de procéder à la reconstruction promise tant que perdurent les hostilités, et le très attendu dialogue avec les membres radicalisés de la diaspora reste une vue de l’esprit. Tout traîne en longueur et le comité de suivi des résolutions du Grand dialogue national ne s’est réuni que deux fois en deux ans. Du coup, de guerre lasse, certains pensent devoir réclamer une « arbitrage international » dont les décisions forcément tranchées pourraient tout juste aggraver les rancunes et préparer le lit de futurs litiges.
Enseignant-chercheur à l’université de Maroua, le Dr. Mbarkoutou Mahamat relève l’absence d’un préalable essentiel : un consensus politique sur la nature même du problème à résoudre. « En évitant de discuter des causes, on se contente de traiter les symptômes », analyse-t-il, non sans pointer les obstacles structurels, lorsqu’une des parties au conflit, le « système », contrôle 90% des instances de décisions (parlement, localités, etc.) et impose ses opinions et ses méthodes. « On aurait pu dissocier le système dominant du conflit et de ses solutions », préconise-t-il, pour permettre aux différentes parties de définir le canevas à suivre pour un véritable dialogue stratégique.
Mais alors comment faire s’il revient uniquement aux acteurs du conflit de s’amender eux-mêmes, parce que le troisième acteur, la société civile, n’a pas fait la démonstration de ses capacités politiques et techniques à influencer les camps établis ? Les communautés, les femmes, les chefs traditionnels, ceux qui sont dans la réalité de la crise, peuvent-ils être correctement impliqués, écoutés ?
« Il existe des perspectives de paix parce que le fardeau de la guerre est tout simplement écrasant », tranche Dr Akumah Hedwig Ngwa, enseignante au Département des femmes et des études de genre à l’université de Buea, tout en insistant sur le rôle crucial de « facilitateurs » extérieurs pour pallier l’impuissance du chaînon manquant qu’est la « société civile ». L’implication de la Fondation Friedrich Ebert est saluée.
« Let the people talk ! » - Aborder les sujets avec un souci de vérité, d’honnêteté et de responsabilité apparait incontournable. Arrêter les « discours de haine » et l’usage de « termes péjoratifs » pour désigner les compatriotes qui revendiquent leur part de respect et celle du « gâteau national ». La juste répartition des ressources au profit de tous a été évoquée parmi les solutions, mais avec moins d’insistance que le mépris dont bon nombre d’Anglophones se sentent victimes de la part de « ceux qui se croient supérieurs ».
Cet aspect psychologique, non quantifiable, reste sans doute le moins intégré dans le traitement gouvernemental d’une crise qui touche au sentiment d’appartenance d’une partie de la population ayant reçu l’anglais et ses attributs en héritage, bien malgré elle, tout autant que la majorité versée dans l’escarcelle francophone. Au final quelques principes sont affirmés pour améliorer le « dialogue stratégique ».
Sortir du carcan du maintien de l’ordre et du tout-répressif apparait une priorité. « L’option camerounaise semble s’éterniser dans l’option militaro-sécuritaire », constate le chercheur de Maroua. Avec son corollaire d’abus, d’accusations d’exactions et de violations des droits humains. On ne fera pas non plus l’économie de construire une vision commune du conflit, accordant ceux qui mettent en avant son caractère autochtone et ceux qui tiennent à l’internationaliser. Cette divergence fondamentale a longtemps rendu tout dialogue impossible.
Or aucune autre voie que le dialogue ne mène à une paix durable, certes en respectant des règles indispensables que Tembi Mavis Yeluma, anglophone de Bamenda et présidente de Femmes et Alliés pour la paix et la sécurité (WAPS), a tenu à rappeler dans une sorte de bréviaire. Loin d’une simple conversation, le dialogue stratégique suppose un échange sincère et honnête de « sentiments » entre les parties, où les idées arrêtées restent au vestiaire pour favoriser une approche nouvelle. Tout accord obtenu n’est que le début d’un processus de paix. Pas son aboutissement.
La « crise anglophone » a clairement dominé les débats, étant un « problème camerounais », à la différence du terrorisme de Boko Haram dans l’extrême Nord, également inscrit au programme, mais considéré comme un « problème au Cameroun », son origine se situant hors de ses frontières. L’action des djihadistes made in Nigeria a toutefois exacerbé des failles intercommunautaires et créé son lot de profiteurs de guerre.
Lue en fufuldé (peulh), en pidgin-english, en anglais et en français, la déclaration des femmes camerounaise venait comme « une pluie bienfaisante sur une terre asséchée », dans le texte : « a welcome shower on a scorched dry earth », selon la formule de l’empathique maître des cérémonies Norman Taku. Officiellement remise à la Ministre de la promotion de la femme et de la famille, Marie-Thérèse Obama Abena-Ondoa, la supplique des Camerounaises issues de toutes les régions du pays, représentées notamment par des victimes de viols et de tortures, se trouve désormais entre les mains du gouvernement.
Les créations de villes futuristes censées décongestionner les anciennes capitales coloniales comme Diamniadio, sont autant des projections symboliques dans un futur «émergé» que de potentiels éléphants blancs déconnectés des réalités locales
Le Temps Afrique |
Didier Péclard |
Publication 07/08/2021
En janvier 2019 s’est tenue à Dakar la troisième édition de la Conférence internationale sur l’émergence de l’Afrique, expression parmi bien d’autres de la place privilégiée qu’y occupe désormais cette notion dans les débats sur le développement et la croissance économique. Sur les 54 pays du continent, 37 se sont en effet dotés d’une «stratégie d’émergence», en écho au contexte macroéconomique des vingt dernières années: entre 2000 et 2019, l’Afrique a connu les taux de croissance les plus élevés du monde. Le continent serait-il passé de la «faillite de l’espoir», comme le titrait The Economist en 2001, à la promesse de l’émergence?
Comme le soulignent de nombreuses voix critiques, croissance n’est cependant pas synonyme de développement social. Durant ces mêmes années, les inégalités se sont très profondément creusées. De plus, la croissance des années 2000 reposait pour une bonne part sur les cours très élevés du pétrole et d’autres matières premières sur les marchés internationaux. Elle est donc volatile et, selon les projections de la Banque mondiale, cette dynamique va connaître un brusque coup d’arrêt du fait de la pandémie de Covid-19. Les discours et les pratiques de l’émergence méritent pourtant qu’on s’y arrête pour ce qu’ils révèlent des continuités et ruptures dans les modes de gouvernement de la croissance et du développement en Afrique. Les stratégies d’émergence s’inscrivent en effet dans une dynamique de redéploiement de l’Etat comme moteur dans la planification et la mise en œuvre des politiques de développement.
C’est dans le domaine des infrastructures que les effets de l’émergence sont peut-être le plus visibles. Après les décennies de l’ajustement structurel qui avaient mis à l’arrêt de nombreux projets au nom de l’orthodoxie budgétaire et du désendettement, on ne compte plus les barrages hydroélectriques, ports en eaux profondes, ponts, routes et voies ferrées construits ou en construction au titre des stratégies d’émergence. De même, les créations de villes futuristes censées décongestionner les anciennes capitales coloniales, comme la cité de Diamniadio entre le centre historique de Dakar et le nouvel aéroport international, sont autant des projections symboliques dans un futur «émergé» que de potentiels éléphants blancs déconnectés des réalités des populations locales.
Dakar, 6 août (APS) – La Fifa, dans une réponse à un courrier qui lui a été adressé par le Comité de défense du football sénégalais (CODEFS), a salué l’approche prônée par les acteurs du football national en vue ‘’d’un consensus autour d’un candidat présidentiel pour porter la fusion des programmes de chacun’’.
‘’Nous vous félicitons de l’approche entreprise dans la mesure où elle démontre la recherche de l’unité pour l’intérêt du football sénégalais’’, a répondu la Fifa dans un courrier envoyé à la Fédération sénégalaise de football.
‘’Ceci étant, nous sommes d’avis qu’il n’empêche nullement les candidats encore en lice de se présenter aux élections’’, ajoute le texte.
‘’Il semble d’ailleurs que les élections auront finalement lieu avec la participation de deux candidats’’, poursuit le même texte signé par le directeur de la division Associations membres, Kenny Jean-Marie.
La Fifa dit ‘’prendre acte de l’accord signé le 22 juillet dernier et notamment par les candidats ainsi que les autorités sportives nationales incluant le ministère du sport et le Comité national olympique en vue d’un consensus autour d’un candidat présidentiel pour porter la fusion des programmes de chacun’’, souligne le texte.
’’Nous sommes confiants que les élections de la FSF se tiendront dans le respect de l’autonomie de la fédération eu égard aux principes et exigences prévues dans les statuts de la Fifa’’, ajoute par ailleurs le même document.
Mercredi, des citoyens sénégalais regroupés dans un Comité de défense du football sénégalais (CODEFS) ont appelé la FIFA à "demander’’ le report de l’assemblée générale élective de la Fédération sénégalaise de football (FSF) prévue ce samedi au Centre de Conférence Abdou Diouf de Diamniadio (ouest).
"Qu’il plaise à la Fifa de demander le report de ces renouvellements controversés et de veiller également à ce que les élections, seul mode de dévolution de responsabilités prévu par les statuts et règlements de la fédération sénégalaise de football (FSF) soient organisées de façon inclusive, démocratique et transparente en l’absence de tout immixtion intempestive du gouvernement sénégalais", ont-ils indiqué dans un courrier envoyé mercredi à l’instance dirigeante du football mondial.
Ce collectif qui compte en son sein des personnalités de la société civile et des hommes politiques, comme les anciens députés Cheikh Oumar Sy et Babacar Gaye, dénonce l’immixtion de ministres du gouvernement sénégalais dans le comité chargé de trouver un consensus dans le renouvellement du comité exécutif de la Fédération de football.
MESSI A DIT OUI AU PSG
Au club parisien, désormais, de trouver l'équilibre budgétaire pour réussir à faire le deal. Il est question d'un contrat de deux ans, plus un en option
Au lendemain de l'annonce de son départ du Barça, Lionel Messi a dit oui au PSG. S'il n'y a pas encore d'accord entre le club parisien et le meneur de jeu, son arrivée se précise.
La grosse opération de l'été gagne en concret. Il n'y a pas encore d'accord mais Lionel Messi a informé le PSG de sa volonté de jouer au club la saison prochaine. Au club parisien, désormais, de trouver l'équilibre budgétaire pour réussir à faire le deal. Il est question d'un contrat de deux ans, plus une en option.
Le volte-face du Barça pour sa prolongation
Tout va très vite dans ce dossier, au lendemain de l'annonce du départ de l'Argentin du Barça. Alors que tout semblait bouclé pour voir le meneur de jeu prolonger au FC Barcelone, tout a volé en éclats compte tenu des difficultés financières du club. Le président barcelonais Joan Laporta s'en est expliqué ce vendredi matin. Et reconnaissait déjà une possible signature du sextuple Ballon d'or au PSG.
"Il faut demander à Leo Messi et son agent (son père, ndlr), je ne peux pas parler de cela, estimait Joan Laporta. C'est le meilleur joueur du monde et la logique veut qu'il ait des offres." Le PSG était le mieux placer pour convaincre le joueur de 34 ans. Quelques heures plus tard, l'hypothèse prend de plus en plus d'ampleur.
Théoricien de la reconstruction, le philosophe congolais a été emporté le 19 juillet par le Covid-19. Retour sur une pensée consacrée aux crises traversées par le continent
Jeune Afrique |
Jean-Pierre Karegeye |
Publication 05/08/2021
Godefroid Kangudie vient de nous quitter. Plus connu sous son nom de plume, Kä Mana, le philosophe, théologien et analyste politique congolais vivait dans l’est de la République démocratique du Congo, où sévissent plusieurs groupes armés. De Goma, il bravait les miliciens autant que le pouvoir de Kinshasa, armé uniquement de son impétueuse plume.
Habiter les incertitudes
Il avait courageusement choisi de s’installer dans cette région dangereuse pour habiter les incertitudes africaines, qu’il ne cessait de penser dans ses œuvres philosophiques et théologiques.
Dans cet environnement violent, même le volcan Nyiragongo ne voulut pas être en reste. Il se mit à menacer et gronder, pour finalement cracher du feu le 22 mai 2021. M’inquiétant pour la vie de Kä Mana, je lui écrivis. Je reçus dès le lendemain, 26 mai, une réponse dont la sérénité donnait la mesure de son courage : « Je suis à Goma et je me porte bien. La colère du volcan se calme, mais la terre tremble de temps en temps. »
Ce ne sont ni les canons, ni le volcan qui nous l’ont finalement arraché, mais le Covid-19, qui a fait voler en éclats les frontières entre la vie et la mort, le visible et l’invisible, le virtuel et le réel, le bruit de la rue et la vie intérieure.
Cet être invisible a surtout rétréci l’entendement de l’essentiel à l’air qu’on respire. Le virus nous a pris Kä Mana ce jeudi 19 juillet. Et la question que le philosophe-théologien se posait sur l’Afrique, dans une de ses œuvres, de résonner en nous : « Kä Mana va-t-il mourir ? »
Profondément africain
Kä Mana a médité les apports et les échecs de courants de pensée qui ont précédé ses propres pratiques discursives de la reconstruction. Il a construit sa pensée à partir des deux piliers que sont les cultures africaines et l’idée de la libération.
Il a de même envisagé un discours sur Dieu ayant un impact sur la vie sociopolitique de l’Africain et qui se laisse informer et éclairer par la raison. Lui, profondément africain, ne manquait pas de stigmatiser « l’image de Dieu dans les religions africaines […] susceptible de dériver vers un imaginaire des conflits et une métaphysique des guerres ».
Bien que pasteur luthérien, il ne manquait pas non plus de souligner les dangers des religions d’origine étrangère dans la vie des Africains. Ainsi mettait-il en garde contre « les dérives guerrières du christianisme et de l’islam ».