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4 mai 2025
International
ALPHA CONDÉ REMPILE
Le président sortant remporte la présidentielle guinéenne avec 59,49 % des suffrages, devant Cellou Dalein Diallo, crédité de 33,5 % des voix, selon les résultats globaux provisoires rendus publics par la Commission électorale nationale indépendante
Jeune Afrique |
Diawo Barry |
Publication 24/10/2020
Alpha Condé, le président sortant, a été élu dès le premier tour pour un troisième mandat. Un « coup KO » qui vient d’être annoncé à l’issue d’une semaine extrêmement tendue en Guinée.
Selon les résultats globaux provisoires délivrés samedi 24 octobre par Kabinet Cissé, le président de la Commission électorale nationale indépendante (Ceni), Alpha Condé a remporté 59,49 % des suffrages exprimés, contre 33,5 % pour Cellou Dalein Diallo, son principal rival. Parmi les autres candidats, aucun n’a dépassé la barre fatidique des 5 %.
Les violences ont démarré dans l’après-midi du lundi 19 octobre, quelques heures après que Cellou Dalein Diallo a revendiqué la victoire lors d’une conférence de presse organisée au siège de l’Union des forces démocratiques de Guinée (UFDG). « Mes chers compatriotes, malgré les graves anomalies qui ont entaché le bon déroulement du scrutin du 18 octobre et au vu des résultats sortis des urnes, je sors victorieux de cette élection dès le premier tour », a-t-il lancé devant une foule de partisans.
Les scènes de liesse dans les quartiers de Conakry acquis à l’UFDG, ainsi que dans plusieurs villes du pays, ont rapidement cédé la place à des heurts entre jeunes militants et membres des forces de l’ordre.
Des conflits ont notamment éclaté dans les préfectures de Kissidougou et de Coyah « entre militants de l’UFDG et ceux d’autres formations politiques, notamment du RPG Arc-en-Ciel [au pouvoir]», a fait savoir le ministre de la Sécurité, Albert Damantang Camara, dans un communiqué évoquant également des « attaques ciblées à l’intérieur du pays, dans les quartiers de la haute banlieue de Conakry et contre les sièges des partis de la mouvance présidentielle et les domiciles des militants de ces partis ».
LA CPI MET EN GARDE LES ACTEURS POLITIQUES GUINÉENS
"Je tiens à rappeler que quiconque commet, ordonne, incite, encourage et contribue" à des crimes tels que définis par les statuts de la CPI, "peut être poursuivi par les tribunaux guinéens ou par la CPI", a écrit Mme Bensouda dans un tweet
La procureure de la Cour pénale internationale (CPI), Fatou Bensouda, a mis en garde vendredi les acteurs politiques en Guinée, en proie à des violences liées à l'élection présidentielle du 18 octobre
. "Nous surveillons de près les développements sur le terrain, la violence doit cesser", a écrit Mme Bensouda dans un tweet."Je tiens à rappeler que quiconque commet, ordonne, incite, encourage et contribue" à des crimes tels que définis par les statuts de la CPI, "peut être poursuivi par les tribunaux guinéens ou par la CPI", a-t-elle ajouté.
Les tensions qui ont précédé le vote pendant des mois se sont intensifiées après la présidentielle.Conakry et d'autres villes sont en proie à des affrontements meurtriers entre jeunes supporteurs du principal candidat de l'opposition Cellou Dalein Diallo et forces de l'ordre, et aucune issue n'est en vue. M. Diallo, challenger du chef de l'Etat sortant Alpha Condé qui s'est présenté pour un troisième mandat contesté, a exclu vendredi de reconnaître les résultats publiés par l'organe chargé des élections qui donnent M. Condé vainqueur, et s'est dit ouvert à une médiation internationale pour sortir des troubles qui agitent le pays.
Vendredi, cinq personnes, trois gendarmes, un soldat et un civil, ont encore été tuées dans un quartier de la périphérie de Conakry.
LES POSITIONS RESTENT FIGÉES EN GUINÉE
Cellou Dalein Diallo a exclu vendredi de reconnaître les résultats publiés par l'organe chargé des élections, faisant appel à une médiation internationale pour sortir de la crise, car ajoute-t-il, le 3è mandat est pour Condé une question de vie ou de mort
Cellou Dalein Diallo, le challenger du chef de l'Etat sortant à la récente présidentielle en Guinée, a exclu vendredi de reconnaître les résultats publiés par l'organe chargé des élections et s'est dit ouvert à une médiation internationale pour sortir des troubles qui agitent le pays.
"Il est hors de question d'accepter les faux résultats que la Céni (Commission électorale nationale indépendante) est en train de proclamer en faveur d'Alpha Condé", le président sortant, qui brigue un 3e mandat controversé, a dit M. Diallo dans un entretien téléphonique avec l'AFP. La Céni, chargée d'organiser la présidentielle de dimanche dernier, publie depuis mardi des résultats circonscription par circonscription.
Jeudi soir, elle avait communiqué les résultats de 37 des 38 circonscriptions nationales, ne laissant plus de doute sur ce que serait l'issue pour les organes officiels. Selon l'addition de ces résultats, M. Condé l'emporte avec plus de 2,4 millions des voix sur environ 3,9 millions d'exprimés, distançant très largement M. Diallo (environ 1,2 million de suffrages) et s'assurant une majorité absolue et une réélection dès le premier tour.
M. Diallo s'est unilatéralement proclamé vainqueur lundi en se fondant sur les résultats remontés par ses partisans. Il accuse le pouvoir de falsifier les résultats.Les tensions qui ont précédé le vote pendant des mois se sont intensifiées après le vote. Conakry et d'autres villes sont en proie à des affrontements meurtriers entre jeunes supporteurs de M. Diallo et forces de l'ordre, et aucune issue n'est en vue. M. Diallo, dont le domicile est ceinturé par les forces de sécurité et qui dit ne pouvoir en sortir, a déclaré s'alarmer du risque que les agissements de M. Condé ne donnent une tournure ethnique à la crise. "On s'attaque aux boutiques des gens de la même ethnie que moi (les Peul), ces gens sont désarmés.
Depuis qu'Alpha est au pouvoir (en 2010), on est à 220 morts. Vous n'avez aucun militant de son parti", a-t-il dit. M. Condé, Malinké, se défend constamment de toute politique communautariste. Les appartenances communautaires sont un important facteur politique, les Malinké se reconnaissant majoritairement dans le parti de M. Condé, les Peul dans celui de M. Diallo. Les deux groupes représenteraient largement plus de la moitié de la population.Interrogé sur les moyens d'une sortie de crise, M. Diallo a dit ne pas être "opposé à une médiation internationale", laissant entendre qu'elle constituait un rare recours tant les positions sont figées. Son propre camp ne peut espérer dans les organes guinéens pour contester les résultats, "Alpha Condé ayant complètement inféodé la Céni et la Cour constitutionnelle", a-t-il dit. "Et on sait que pour rien au monde Alpha Condé ne va renoncer de son propre chef à son troisième mandat. C'est pour lui une question de vie ou de mort", a-t-il ajouté. L'opposition à laquelle il appartient a "toujours fait appel à la Cédéao (Communauté des Etats ouest-africains) et à l'Union africaine pour organiser un dialogue politique en Guinée. Mais Alpha Condé n'a jamais voulu du dialogue", a dit M. Diallo.
#EndSARS
Le cri de ralliement au Nigéria contre les violences policières et la répression - La jeunesse nigériane est dans la rue. Depuis début octobre, un mouvement de contestation secoue le pays
Depuis le 8 octobre, des milliers de Nigérians manifestent contre les violences policières, en se ralliant sous la bannière de #EndSARS, du nom d'une unité de police controversée. Après la répression sanglante du mouvement de contestation, l'ONU appelle au respect des droits de l'Homme mais le président Muhammadu Buhari se montre intransigeant.
La jeunesse nigériane est dans la rue. Depuis début octobre, un mouvement de contestation secoue le pays. Au cri de "#EndSARS" (mettons fin à la Sars, une unité spéciale de la police contre le vol), il réclame la fin de l'impunité des violences policières, mais aussi un changement du système politique.
La mobilisation #EndSARS a commencé en ligne le 3 octobre 2020, lorsqu'une vidéo montrant des officiers de la cette unité spéciale en train de brutaliser deux jeunes hommes avant de tirer sur l'un d'eux est devenue virale.
"C'est le meurtre des mains de la SARS d'un jeune dans l'État du Delta (sud), qui a mis le feu aux poudres", rappelle Laurent Fourchard, directeur de recherche au Centre de recherches internationales (Ceri) et spécialiste du Nigeria, interrogé par France 24. "Cette unité de la police s'est fait connaître pour ses exactions extrajudiciaires en torturant et en tuant un grand nombre de jeunes. Elle fait dans l'extorsion. Elle agit sans plaques et sans uniformes", explique Laurent Fourchard à France 24.
Le fondateur de l'unité lui-même, Fulani Kwajafa, dit ne pas reconnaître la force qu'il avait fondée en 1984. "Le Sars d'aujourd'hui n'est pas le même Sars que celui que j'ai créé", a-t-il affirmé dans une interview récente à la BBC, avouant se sentir "triste" et "coupable" face à ces dérives.
La fin du Sars, le début du Swat
Face à la pression de la rue, et surtout à l'ampleur qu'a pris le mouvement #EndSARS sur les réseaux sociaux, avec le partage de super-stars internationales comme CardiB, Kayne West, et même le PDG de Twitter Jack Dorsey, le gouvernement nigérian a annoncé le 11 octobre la dissolution de cette unité et la création de la Swat (l'unité spéciale d'armes et de tactiques) pour la remplacer.
Peine perdue : peu après l'annonce, le hashtag #EndSWAT avait remplacé #EndSARS, et des centaines d'autres manifestants sont descendus dans la rue, dans de nombreuses villes du sud du pays et d'Abuja, la capitale fédérale.
"Au début, le mouvement luttait pour une réforme de la police", explique Laurent Fourchard. "Petit à petit, sous le poids de la répression, le mouvement s'est radicalisé et remet désormais en cause le système politique, sa corruption et son fonctionnement. C'est devenu une protestation générale contre le pouvoir en place."
Le chercheur du Ceri note que le mouvement social est inédit "par son ampleur, sa durée et sa radicalité"
"Il est inédit car il n'a pas d'équivalent en ampleur depuis le milieu des années 1960. Il est inédit politiquement car il rejette le soutien des partis tout en brandissant des drapeaux et chantant l'hymne national pour montrer son attachement au Nigeria. Enfin, le mouvement est inédit car il est transclasse : la jeunesse aisée se mêle aux pauvres chômeurs", énumère Laurent Fourchard.
Cinquante six morts depuis le début du mouvement
Tout est parti du "mardi sanglant", comme l'a surnommé la presse locale. Le 20 octobre, les manifestants se réunissent au péage de Lekki, près de Lagos, devenu l'épicentre de la contestation populaire.
Ce jour-là, plus d'un millier de manifestants avaient décidé de braver le couvre-feu décrété par les autorités à partir de 16 h à Lekki. La police les a dispersés à balles réelles, faisant 12 morts, selon l'ONG Amnesty international, qui estime à 56 le bilan total des morts depuis le début du mouvement.
"Ce genre de violences est habituel de la part de l'armée et la police nigériane, mais là, ils ont réprimé une manifestation pacifique de gens désarmés. L'attaque a été préméditée. La scène vidée des médias. C'est effroyable,", estime Laurent Fourchard.
Washington, l'Union Africaine, l'Union européenne et l'ONU ont condamné ces violences et ont demandé à ce que les responsables soient traduits en justice.
Certains manifestants souffrent de séquelles psychologiques terribles, comme le raconte Moïse Gomis, correspondant de France 24 sur place. "Les gens sont traumatisés par ce qu’il s'est passé. J'ai parlé avec un père de famille qui me racontait qu'il avait dû dormir avec ses enfants, alors que les balles sifflaient. Une autre manifestante est prostrée dans sa chambre depuis les évènements de mardi", détaille Moïse Gomis.
Jeudi 22 octobre, le président nigérian Muhammadu Buhari, un ancien militaire putschiste, s'est exprimé pour la première fois depuis le début de la crise dans un discours très attendu. Il s’est montré intransigeant et inflexible, prévenant les manifestants qu'il "n'autoriserait personne ni aucun groupe à mettre en péril la paix et la sécurité nationale", a-t-il déclaré. "Résistez à la tentation d'être utilisés par des éléments subversifs pour causer le chaos et tuer notre jeune démocratie."
Un discours qui est loin d'avoir convaincu, d'autant plus que de nombreux Nigérians attendaient du discours du président que les responsables de la répression soient désignés. L'armée et la police nient en effet être impliquées.
"Les gens sont catastrophés mais ne faisaient pas d'illusions sur le discours. Pour eux, le président n'a rien dit, il répond à côté de la plaque au mouvement", note Moïse Gomis.
"Quelqu'un a-t-il remarqué que le président n’avait pas été capable de reconnaître les vies perdues et les personnes blessées à cause de la gâchette de policiers ?", a déclaré sur Twitter l'actrice nigériane Kemi Lala Akindoju. "Au lieu de cela, il a célébré les braves policiers qui ont perdu la vie. Rien sur les fusillades."
"Je suis si déçue, minée. J'ai le cœur brisé. Comment peut-on avoir un dirigeant pareil ?", s'interroge Chioma*, l'une des participantes au mouvement.
"Si vous faites partie de ceux qui croient encore que Buhari n'a pas ordonné le massacre de Lekki, alors vous êtes débile. Son discours montre qu'il est aussi coupable qu'un prêtre dans un bordel", lâche Michael*, dans sur les réseaux sociaux.
"Douze minutes de n'importe quoi", estime Fati*, une autre manifestante, sur les réseaux sociaux, en réaction au discours adjoignant plusieurs emojis de pleurs.
Après trois nuits de pillage et d'émeutes, les forces de sécurité reprennent peu à peu le contrôle de Lagos, selon les journalistes de l'AFP. Des officiers de police patrouillent dans les quartiers de la ville pour assurer la sécurité de ses habitants. Vous êtes priés de rester chez vous", tweetait dans la nuit la police, quelques heures après le discours du président Muhammadu Buhari.
De leur côté, les quelques organisations ou célébrités qui ont porté le mouvement semblaient également appeler au calme. "Préparez vos cartes d'électeurs ! Ce n'est pas fini", écrivait la star de la musique afro-pop Davido, soulignant que le combat devrait désormais se dérouler dans les urnes et non dans la rue.
INTERNET FORTEMENT PERTURBÉ EN GUINÉE
L'observatoire internet de NetBlocks confirme des perturbations au niveau national dans le service internet en Guinée depuis 07h30 (GMT) ce matin, y compris sur Orange, premier réseau de téléphonie mobile du pays
La Guinée en proie à de fortes tensions post-électorales accusait vendredi de sérieuses perturbations d'internet, ont constaté les correspondants de l'AFP, le groupe spécialisé NetBlocks et la compagnie Orange.
Netblocks, qui surveille de telles coupures en particulier en lien avec la politique, a expliqué soupçonner l'action de l'Etat guinéen. Les journalistes de l'AFP ont constaté que leur liaison internet via le réseau de téléphonie mobile Orange, omniprésent en Guinée, était quasiment inopérante. "L'observatoire internet de NetBlocks confirme des perturbations au niveau national dans le service internet en Guinée depuis 07h30 (GMT) ce matin, y compris sur Orange, premier réseau de téléphonie mobile du pays", a indiqué dans un message à l'AFP Alp Toker, directeur exécutif de NetBlocks. "Cet incident semble cohérent avec les restrictions imposées par le passé et attribuées aux organes de contrôle étatiques pendant les élections", a-t-il ajouté.
Les liaisons internet avaient par exemple été perturbées lors du référendum et des législatives controversées de mars."Orange Guinée a observé que son accès à internet par le câble ACE était coupé à son point d'accès", a annoncé une porte-parole d'Orange. "C'est GUILAB qui gère l'accès du pays à ce câble. Orange a signalé le défaut à GUILAB et attend des informations pour savoir quand les services vont reprendre". ACE est le câble sous-marin qui relie la côte ouest-africaine et l'Europe. GUILAB, ou Guinéenne de large bande, est le premier opérateur d'infrastructures de télécommunications en Guinée et gère la capacité allouée au pays sur le câble sous-marin en fibre optique Africa Coast to Europe.
Les violences politiques meurtrières auxquelles est en proie la Guinée depuis des mois se sont avivées après la présidentielle de dimanche, faisant plusieurs morts. Depuis des jours, les internautes s'attendent à des perturbations à l'instigation du pouvoir, dont l'objet serait de contrôler la diffusion d'information au moment de la publication de résultats qui risquent d'échauffer encore davantage les esprits. De telles perturbations ont déjà été rapportés jeudi soir. Les autorités n'ont toujours pas rendu public de résultat global.
Mais une telle annonce passe pour très prochaine. Et les résultats préliminaires mais quasiment complets publiés au fur et à mesure par l'organe en charge des élections créditent le sortant Alpha Condé de la majorité absolue dès le premier tour. Avant même la proclamation d'un résultat final, le camp du challenger de M. Condé, Cellou Dalein Diallo, a dénoncé une "fraude à grande échelle" menée selon lui par le pouvoir pour falsifier le vote.
ALIOUNE TINE PRÔNE UNE RÉPONSE RÉGIONALE
L’expert indépendant des Nations Unies pour le Mali fondateur du Think tank ’’Afrikajom Center’’, appelle à une ’’réponse régionale’’ à ’’la crise de la démocratie, du suffrage universel, de la gouvernance et de la sécurité’’ en Afrique de l’Ouest.
Dakar, 22 oct (APS) – L’expert indépendant des Nations Unies pour le Mali, Alioune Tine, fondateur du Think tank ’’Afrikajom Center’’, appelle à une ’’réponse régionale’’ à ’’la crise de la démocratie, du suffrage universel, de la gouvernance et de la sécurité’’ en Afrique de l’Ouest.
’’La crise de la démocratie, du suffrage universel, de la gouvernance et de la sécurité est régionale et c’est par une réponse régionale au sein de la CEDEAO, qu’une réponse appropriée et durable pourra être trouvée’’, a-t-il indiqué lors d’un entretien, jeudi, avec l’APS.
’’Cela appelle de la part de toute l’opinion africaine une mobilisation exceptionnelle’’, a estimé Alioune Tine, ancien président de la Rencontre africaine pour la défense des droits de l’homme (RADDHO).
M. Tine a exprimé ses ’’sérieuses préoccupations’’ par rapport à ’’la grave crise régionale de la démocratie, du suffrage universel, de la gouvernance et de la sécurité qui constitue à terme un véritable risque de déflagration de l’Afrique de l’ouest’’.
Le fondateur du Think tank ’’Afrikajom Center’’ a, entre autres, recommandé ’’un sommet extraordinaire’’ de la CEDEAO consacré à la crise régionale de la démocratie, des élections, des droits humains et de la gouvernance.
Cette rencontre pourrait faire le diagnostic des ’’causes profondes’’ de la crise et ’’proposer des remèdes appropriés aux pathologies et dysfonctionnements de la démocratie et des élections qui sont une menace pour la stabilité régionale’’.
Il a aussi recommandé ’’une réforme profonde de la Commission de la CEDEAO qui semble avoir atteint ses limites dans la prévention, la gestion et la résolution des crises particulièrement les crises de la démocratie et des élections’’.
M.Tine a appelé aussi à ’’repenser l’observation des élections qui tourne à vide et est incapable de jouer quel que rôle que ce soit dans le cadre de crises graves des élections et des droits humains comme celles de la Côte d’Ivoire et de la République de Guinée’’.
Il a également suggéré de ’’renforcer l’indépendance structurelle, juridique et financière des organes de régulation et d’arbitrage nationaux, régionaux et internationaux qui font l’objet de contestations et de discrédit de la part de certains acteurs politiques et de la société civile pour leur manque d’impartialité et leurs dysfonctionnements’’.
M. Tine a recommandé la création d’une commission d’enquête internationale sur ’’les violations graves des droits de l’homme en Côte d’Ivoire et en République de Guinée’’.
Selon lui, ’’l’impunité de certains auteurs de violations graves de droits de l’homme en Guinée (événements du 28 septembre 2009) et en Côte d’Ivoire (événements post-électoraux de 2010) explique la récidive de ces mêmes violations en ce moment dans ces pays’’.
L’ancien haut responsable d’Amnesty international pour l’Afrique de l’Ouest et l’Afrique centrale estime qu’il ’’faut la mobilisation’’ de l’opinion africaine et internationale pour ’’mettre une forte pression sur la CEDEAO et les leaders politiques africains, toutes obédiences confondues, pour le respect du droit à la vie, à l’intégrité physique, à la jouissance des libertés publiques et surtout et fondamentalement à la paix et au bien-être des africains’’.
VERS UNE MAJORITÉ ABSOLUE POUR CONDÉ AU PREMIER TOUR
Selon l'addition des résultats des seules circonscriptions de l'intérieur, le président sortant l'emporte avec plus de 2,4 millions des voix sur environ 3,9 millions d'exprimés, distançant Cellou Dalein Diallo (environ 1,2 million de suffrages)
Les résultats préliminaires mais quasiment complets de la présidentielle guinéenne publiés par l'organe en charge des élections créditent le sortant Alpha Condé de la majorité absolue dès le premier tour, dans un contexte de vives tensions et de contestation de la régularité du scrutin.
La Commission électorale nationale indépendante (Céni) a publié jeudi soir les résultats de l'élection de dimanche dans 17 nouvelles circonscriptions sur le territoire national, en plus des circonscriptions l'étranger. Seules trois circonscriptions manquent encore (une en Guinée, deux à l'étranger). Les 37 circonscriptions de l'intérieur dont la Céni a communiqué les résultats depuis mardi représentent plus de cinq millions des 5,41 millions d'inscrits. La Céni n'a pas procédé à un cumul et n'a pas déclaré de vainqueur. Mais selon l'addition des résultats des seules circonscriptions de l'intérieur, M. Condé l'emporte avec plus de 2,4 millions des voix sur environ 3,9 millions d'exprimés, distançant son principal challenger, Cellou Dalein Diallo (environ 1,2 million de suffrages).
Douze candidats en tout étaient en lice. Les dix autres se partagent les miettes électorales.L'éventualité d'un troisième mandat consécutif de M. Condé, 82 ans, a provoqué pendant un an une contestation dans laquelle des dizaines de civils ont été tués, faisant craindre une éruption autour du vote, dans un pays coutumier des confrontations politiques sanglantes. Des violences ont en effet éclaté après le vote, faisant une dizaine de morts selon les autorités, au moins 19 selon M. Diallo.
M. Diallo, battu par M. Condé en 2010 et 2015, a proclamé sa victoire lundi en invoquant le travail mené par son parti pour faire remonter les données du terrain et ne pas s'en remettre aux organes officiels, la Céni et la Cour constitutionnelle, inféodées au pouvoir selon lui. M. Diallo a dénoncé une "fraude à grande échelle" en cours selon lui pour falsifier les résultats.Ceux-ci doivent encore être proclamés par la Céni et validés par la Cour constitutionnelle.
VIVES TENSIONS EN GUINÉE EN ATTENDANT LES RÉSULTATS OFFICIELS
Les jeunes dressent des barricades, renversent des poubelles, allument des feux et harcèlent à coups de pierres policiers et gendarmes qui ripostent à l'aide de moyens anti-émeute, voire de frondes, et très souvent à balles réelles
La banlieue de Conakry a de nouveau été le théâtre jeudi de tirs et de heurts entre partisans du candidat Cellou Dalein Diallo et forces guinéennes, quatre jours après une présidentielle dont les résultats officiels se font attendre, ont rapporté des journalistes de l'AFP et des témoins.
Différentes villes de Guinée, à commencer par la capitale, sont en proie depuis lundi à des violences qui ont fait une dizaine de morts selon les autorités, au moins 19 selon M. Diallo.
Les tensions qui ont précédé le scrutin pendant des mois ont été avivées après le vote par la proclamation unilatérale de victoire par M. Diallo, les soupçons de fraude et la publication par les autorités de résultats partiels très favorables au président sortant, Alpha Condé.
L'éventualité d'un troisième mandat consécutif de M. Condé, 82 ans, a provoqué pendant un an une contestation dans laquelle des dizaines de civils ont été tués, faisant craindre une éruption autour du vote, dans un pays coutumier des confrontations politiques sanglantes.
Les affrontements se sont poursuivis jeudi à Conakry, dans les quartiers de Cosa, Nongo, Sonfonia ou encore Wanindara, mais aussi en province.
"Nous n’avons pas fermé l'œil de la nuit à cause des détonations, des tirs nourris.On a l'impression que nous sommes dans un pays de guerre", a dit à l'AFP un habitant de Sonfonia, Mamadou Moussa Bah.
"Les enfants en bas âge sont traumatisés pendant que leurs aînés sont dans la rue, affrontant violemment les forces de l’ordre", a-t-il dit.
- Sous scellés -
Des journalistes de l'AFP qui se sont approchés de ces zones dangereuses ont décrit des rues habituellement très animées et à présent désertées, des détonations au loin confirmant les affrontements en cours.
Les jeunes dressent des barricades, renversent des poubelles, allument des feux et harcèlent à coups de pierres policiers et gendarmes qui ripostent à l'aide de moyens anti-émeute, voire de frondes, et très souvent à balles réelles selon de nombreux témoignages.
Le camp de M. Diallo accuse celui de M. Condé de se livrer à une "fraude à grande échelle" pour conserver le pouvoir à tout prix.
M. Diallo, battu par M. Condé en 2010 et 2015, a proclamé sa victoire lundi en invoquant le travail mené par son parti pour faire remonter les données du terrain et ne pas s'en remettre aux organes officiels, inféodés selon lui.
L'animosité et la méfiance ont été accrues par le dispositif policier déployé depuis mardi autour de chez M. Diallo qui se dit maintenant "séquestré", par une opération de police menée mercredi contre les bureaux de son parti et des résultats partiels publiés par la commission électorale.
Le ministre de la Sécurité Albert Damantang Camara a confirmé que les locaux du parti avaient été placés "sous scellés" en vertu d'une procédure judiciaire ouverte parce que "des messages contraires à l'ordre public et à l'unité nationale ont été diffusés".
Quant au dispositif mis en place autour de chez M. Diallo, il a invoqué des "raisons de sécurité", sans plus de détails.
- Exode -
La commission électorale, quant à elle, a rendu publics depuis mardi soir les résultats dans 20 des 38 circonscriptions que compte le pays, représentant 2,28 millions d'électeurs potentiels sur un total de 5,41 millions d'inscrits.
Ces résultats ne permettent pas de se prononcer sur l'issue du vote.Mais, avec plus de 59% des scrutins exprimés, ils accordent une très large avance à M. Condé sur M. Diallo, qui ne recueille qu'un peu plus de 31%, selon un calcul provisoire de l'AFP.
M. Diallo revendique 53% des voix.Il a dénoncé dans un communiqué des "falsifications massives", des disparitions "inexplicables de procès-verbaux", ou encore des manipulations de taux de participation.
Le doute subsiste quant au moment où la commission publiera un résultat final.
En province, les villes de Pita, Labé et Mali ont également connu des heurts.
"Beaucoup de nos parents sont allés dans les villages, ils ont préféré aller se réfugier là-bas", a dit à l'AFP Marwana Soumanoh, chaudronnier à Pita (centre), accusant les forces de l'ordre d'exactions.
Le maire de Mali (nord), Abdoulaye Fily Diallo, a pour sa part dénoncé les agissements des soldats du bataillon d'infanterie local, "qui rentrent en ville et tirent n'importe comment, effraient tout le monde" et ont fait plusieurs blessés selon lui.
par Tierno Monénembo
LA TECHNIQUE DU PREMIER COUP K.O
Opposer les ethnies et falsifier les fondements juridiques ne suffit pas pour s'accaparer la miraculeuse friandise. Il faut aussi juguler la Commission électorale, la Cour constitutionnelle et toutes les autres machines à tricher
La vie politique s'appauvrit en Afrique. Le personnel vieillit. Le débat se tribalise. Les Constitutions partent en lambeaux. Autant de portes ouvertes pour le djihadisme qui avance.
Mais pour notre plus grand bonheur, le vocabulaire politique s'enrichit. À Abidjan et à Conakry, où les mots fleurissent dans les rues, les bordels, les académies de bière et non sous la Coupole, on dit « dès que dès que » ou « kaba-kaba » en lieu et place du mot investiture. Les personnalités de ce monde ne se convient pas pour tenir un tête-à-tête mais pour « se têter ». S'éterniser au pouvoir s'appelle faire du « koudaïsme » et ce satané troisième mandat qui fait tant jaser, « la pénible rallonge du té mouna yé mouna (« pas d'eau, pas d'électricité » en langue soussou) ». Cette fête des mots version tropicale bat son plein jusque sous les lambris des palais
« Coup K.-O. » pour la démocratie
Alpha Condé, Alassane Ouattara et les autres ne disent plus « victoire au 1er tour » mais « premier coup K.-O. ». Par les matraques ou par les urnes, chez nous, la course électorale reste avant tout un combat de gladiateurs où tous les coups sont permis. Nos démocrates à nous se gaussent des principes et des règles. Ils sont là pour gagner et ils gagneront coûte que coûte. Le public et l'arbitre n'ont qu'à se le tenir pour dit.
Ces petits malins savent que les mots ne sont jamais que des mots ; que la démocratie n'a rien de sacré. Ses textes ne sont que des chiffons de papier que l'on brûle ou rature selon son gré. Rien pour les retenir ! Ces ronds-de-cuir de la Communauté Internationale bougonneront pour la forme et les émeutiers des bas-quartiers retourneront dans leurs bouges aux premiers cliquetis de mitraillettes.
Nous sommes dans la CEDEAO du club des chefs d’État. Guinée, Mali, Côte d’Ivoire, Nigeria, etc. ça suinte de partout et si nous n’y prenons garde, tout risque de s’écrouler, plus tôt qu’on ne le croit
L’Afrique de l’Ouest, notre grande et belle région, est sens dessus-dessous. On n’a pas fini d’épiloguer sur les graves crises politiques et sociales qui minent plusieurs pays de la région et causent des dizaines de morts, qu’un autre problème, économique cette fois-ci, vient s’ajouter à nos défis.
La Côte d’Ivoire vient en effet de signer un accord de partenariat économique (APE) avec la Grande Bretagne. Cet accord négocié à la hâte, sans en informer les structures compétentes de la CEDEAO, est calqué sur le modèle de l’APE intérimaire qu’elle a signé avec l’Union européenne. Nul ne peut comprendre cet empressement à signer cet accord alors que la Grande Bretagne elle-même n’a pas encore trouvé un accord avec l’UE pour organiser les conditions de leurs échanges commerciaux.
De surcroît, avec l’Union douanière déjà fonctionnelle dans la CEDEAO, aucun pays ne devrait plus se donner le droit de s’engager unilatéralement dans un accord commercial sans que ce dernier ne soit porté par la CEDEAO.
Enfin, alors que les effets de l’APEi de la Côte d’Ivoire avec l’UE sur le commerce intra-régional n’ont pas encore fini d’être documentés et que les implications de la mise en œuvre de la Zone de libre échange continentale (ZLECAf) n’ont pas révélé tous leurs secrets, voilà qu’un pays aussi important que la Côte d’Ivoire se lance dans une fuite en avant que rien ne saurait justifier.
Pour de nombreux dirigeants africains, hélas, l’intégration n’est qu’un slogan répété à longueur de sommets et de conférences pour être dans l’ère du temps. Ils n’y croient pas. L’intérêt national, pour ne pas dire l’intérêt personnel, prime sur tout le reste.
La CÉDÉAO est en train d’être détruite lentement, mais sûrement, par ses dirigeants. Et aucun mécanisme ne permet aux peuples de donner leurs avis. Le rêve de la CEDEAO des Peuples à la place de la CEDEAO des États s’est mué en cauchemar. Nous sommes dans la CEDEAO du club des chefs d’État. Guinée, Mali, Côte d’Ivoire, Nigeria, etc. ça suinte de partout et si nous n’y prenons garde, tout risque de s’écrouler, plus tôt qu’on ne le croit.
Je n’ai jamais cru aux théories du complot que des forces extérieures fomenteraient contre l’Afrique, lequel expliquerait tous nos problèmes. Je crois en revanche qu’il existe de véritables stratégies mise en œuvre par des États, des groupes d’intérêts politiques et financiers étrangers, ayant de solides relais et complices locaux qui leur ouvrent nos portes. Et nos dirigeants, s’ils ne sont pas les complices de ces intérêts, ne font rien contre eux par manque de vision, d’intelligence stratégique et souvent de courage.
Voilà pourquoi nous sommes tous en danger.