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2 mai 2025
International
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NGONÉ FALL, OBJECTIF AFRICA 2020
Cintellectuelle insoumise, choisie par l'Élysée, pour orchestrer la saison culturelle Africa 2020 déclinée partout en France, entre juin et décembre 2020, est l'invité d'En Sol Majeur sur RFI
L’insaisissable N’Goné Fall est là. Eh oui, cette intellectuelle insoumise a été choisie par l'Élysée, pour orchestrer la saison culturelle Africa 2020 déclinée partout en France, entre juin et décembre 2020. Autant dire que cette commissaire d’exposition, architecte de formation, s’y connaît en nuits blanches.
On l’a dit forte tête, frondeuse et cash : « La France - dit-elle- doit changer de focale et ne plus regarder l’Afrique par le prisme du mâle noir et du migrant ». Mais, la fonction faisant le larron, sans doute que N’Goné Fall devra devenir diplomatiquement cash.
Évoquer son nom, c’est forcément réveiller Dakar, la Revue noire, les Rencontres photographiques de Bamako, Niamey, Le Caire, Le Cap où elle a ses attaches et la vieille France dont elle s’était éloignée un peu trop longtemps...
DANS LES UNIVERSITÉS AMÉRICAINES, DES JEUNES SOUS-TRAITENT LEURS DEVOIRS AU KENYA
Dans des pays où le taux de chômage des personnes diplômées est élevé, des jeunes gagnent désormais leur vie en rédigeant les dissertations, essais et autres devoirs universitaires d'étudiant·es originaires des États-Unis, de Grande-Bretagne, etc.
Dans des pays comme le Kenya, l'Inde et l'Ukraine, où le taux de chômage des personnes diplômées est élevé, des jeunes gagnent désormais leur vie en rédigeant les dissertations, essais et autres devoirs universitaires d'étudiant·es originaires des États-Unis, de Grande-Bretagne ou d'Australie. Plusieurs entreprises de rédaction de devoirs ont été créées dans ces pays. Elles répondent aux noms de AceMyHomework (RéussirMesDevoirs) ou Essay Shark (génie des disserts).
Ce site décrit ainsi ses services: «Quel que soit le genre de devoir dont vous avez besoin, il est facile d'embaucher un rédacteur d'essai en tout sécurité et à un prix abordable. Ayez plus de temps pour vous-même.»
Sur le site Academized, une page de devoirs de première année de fac coûte 15 dollars (13,5 euros) si la copie est à rendre dans deux semaines, et 42 dollars le feuillet pour des dissertations de dernière minute (à finir en trois heures). Des entreprises américaines fournissent aussi ce type de services mais les prix sont plus élevés.
Vide juridique
Selon le New York Times, ce marché représente plusieurs millions d'essais et de dissertations. Officiellement, ces sociétés disent que ces copies ne sont à utiliser que de façon consultative. Il n'existe actuellement aucun cadre légal qui interdise ces transactions.
Une jeune Kényane interviewée par le New York Times raconte avoir rédigé des dissertations sur une grande variété de sujets, de la colonisation de l'espaceà l'euthanasie. Les personnes les plus prolifiques peuvent gagner jusqu'à 2.000 dollars par mois –beaucoup plus que le salaire moyen. Cette forme de triche est plus difficile à détecter que le plagiat, mais comme il s'agit d'une pratique qui devient plus courante, une société vient de créer un logiciel nommé Authorship Investigate, qui utilise plusieurs indices –tels que le style des phrases– pour déterminer si un devoir a bien été écrit par la personne indiquée.
Un sentiment de frustration point du côté des personnes qui rédigent les copies au Kenya : celui d'avoir un diplôme mais de ne pas trouver d'autre travail que celui-ci, ainsi que l'envie d'étudier elles-mêmes sur un campus américain plutôt que de faire les devoirs des autres.
"LE MODÈLE DE CROISSANCE DES PAYS AFRICAINS EST MORTIFÈRE"
L’économiste togolais Kako Nubupko, à travers son nouveau livre "L’Urgence africaine" (éd. Odile Jacob) tord aussi le cou au discours « afroptimiste » sur l’émergence en Afrique et dresse un bilan économique général calamiteux
Le Monde Afrique |
Coumba Kane |
Publication 22/09/2019
Alors que les pays africains ont annoncé en grande pompe la réalisation de deux projets historiques – la création d’une monnaie unique pour la Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest (Cédéao) en remplacement du franc CFA et la mise en place d’une zone de libre-échange censée embarquer 54 pays –, voici un ouvrage qui permet de mieux comprendre les rouages des économies africaines.
Dans son nouveau livre, L’Urgence africaine (éd. Odile Jacob), le Togolais Kako Nubukpo, qui fut chargé du numérique auprès de l’Organisation internationale de la Francophonie, connu pour ses travaux contre le franc CFA (Sortir de la servitude volontaire, éd. La Dispute, 2016), plaide pour un changement radical du modèle de croissance. Agriculture, fiscalité, numérique, écologie, cet essai documenté passe en revue les solutions africaines adaptées aux défis du continent. L’économiste engagé tord aussi le cou au discours « afroptimiste » sur l’émergence et dresse un bilan économique général calamiteux. Il rappelle que malgré des taux de croissance moyens de 5 %, l’Afrique subsaharienne est la seule région du monde où la population extrêmement pauvre (vivant avec moins de 1,90 dollar par jours selon la Banque mondiale) a doublé en cinquante ans.
Que reprochez-vous à l’actuel modèle de croissance des pays africains ?
Kako Nubukpo De maintenir l’Afrique dans le modèle dit « d’esclavage colonial ». Les pays du continent restent intégrés, plus de soixante ans après les indépendances, dans un système économique qui les poussent à produire des matières premières puis à les exporter sans les transformer. En revanche, ces Etats importent, du reste du monde, des produits transformés. C’est un modèle de croissance mortifère, car c’est dans la transformation des matières premières qu’on crée des emplois, de la valeur ajoutée et donc des revenus. Ce modèle pousse notre jeunesse à migrer vers là où se créeront la richesse et les jobs.
Ce discours n’est pas nouveau. Des économistes du développement ont dès les années 1970 dénoncé ce modèle de croissance. Pourquoi estimez-vous qu’il y a urgence aujourd’hui ?
La population africaine double tous les vingt-cinq ans. Pour répondre aux besoins de cette jeunesse, le continent doit donc se transformer plus vite et bien. Par ailleurs, il est temps d’acter l’échec des théories néolibérales testées en Afrique depuis trente-cinq ans. Les plans d’ajustements structurels, conçus et imposés par le Fonds monétaire international (FMI) et la Banque mondiale dans les années 1990 dans l’idée de promouvoir la bonne gouvernance, ont été catastrophiques. L’Etat social a été détricoté, les entreprises publiques privatisées, l’économie libéralisée. Ces injonctions ont poussé les pays africains dans la mondialisation néolibérale sans filet de sécurité. Pour des Etats jeunes, les coupes sociales ont été mortifères. En somme, une potion amère délivrée sans comprendre les réalités africaines et les enjeux que représentent les transitions écologique, démocratique, fiscale et démographique.
Vous fustigez le modèle néolibéral et appelez à la rescousse Marx et Polanyi. N’est-il pas obsolète de convoquer ces penseurs en 2019 ? Certains dirigeants africains s’étaient d’ailleurs inspirés des théories marxistes dans les années 1960-1970 sans grande efficacité…
A l’époque, le politique avait pris le pas sur l’analyse rigoureuse des forces productives, des formes institutionnelles, des régimes d’accumulation, des rapports sociaux et des modes de production. Ces dirigeants se sont avant tout positionnés contre le capitalisme en adoptant le communisme ou le socialisme sans prendre en compte le contexte local. Avec le recul, l’échec était prévisible, car ces économies africaines n’avaient pas amorcé leur transformation industrielle quand Marx expliquait que ses thèses n’avaient de sens que pour des sociétés déjà industrialisées.
D’où l’importance de sortir du dogme, et pour l’Afrique de bâtir son propre modèle, non celui des Occidentaux ou des Asiatiques.
Je cite Karl Polanyi, car il a intégré la question anthropologique à l’économie. L’économique ne s’est pas autonomisé du reste du social. Cet encastrement éclaire certaines pratiques. Par exemple, pourquoi dans certaines entreprises, on recrute un cousin moins productif que d’autres employés ? C’est souvent parce qu’on maximise la cohésion sociale à la place du profit. La corruption endémique peut être analysée à l’aune des logiques de don et de contre-don. Quant à Marx, il souligne l’importance des forces productives, des rapports sociaux de production, des formes institutionnelles, des régimes d’accumulation. On n’est donc pas simplement face à des marchés, à des acteurs sans histoire, sans chair, mais dans des processus historiques avec des rapports de forces. Ce qui permet de voir les économies africaines dans un contexte plus large.
Dans la perspective d’un changement de modèle, voyez-vous la démographie africaine comme une chance ou un fardeau pour le continent ?
Le dynamisme démographique n’est pas mauvais en soi, mais il faut être lucide, la transformation des économies africaines nécessite qu’on passe d’une démographie subie à une démographie choisie. Dans le monde, les pays qui se sont développés sont ceux qui ont réduit drastiquement leur taux de croissance démographique. Quand, ces cinquante dernières années, l’Asie de l’Est est passée de 1,4 % de croissance démographique annuelle à 0,1 %, l’Afrique n’est passée dans le même temps que de 2,8 % à 2,7 %. Il faut donc accélérer cette transition démographique en Afrique sous peine de se retrouver face à une bombe à retardement.
Vous plaidez pour une rupture avec le FMI et la Banque mondiale, comme l’a fait le Ghana. N’est ce pas un pari risqué ?
C’est nécessaire, car l’analyse faite par ces institutions est aberrante. Selon elles, comme l’Afrique importe beaucoup de biens – ce qui génère des problèmes de balance commerciale –, il faut réduire la demande pour revenir à l’équilibre. Or c’est le contraire qu’il faut faire, car la demande africaine va s’accroître. En 2050, nous serons 2 milliards, c’est une tendance lourde. Nous aurons donc une demande potentiellement solvable. Il faut au contraire investir massivement dans les infrastructures, les usines, créer de la valeur ajoutée et des emplois pour nos jeunes. La recette du FMI et de la Banque mondiale est adaptée à un pays comme l’Allemagne, dont la population diminue et qui a besoin d’une monnaie forte pour préserver son patrimoine. Les économies africaines, elles, n’en sont pas là. Elles doivent créer maintenant de la richesse.
La fiscalité est le parent pauvre des politiques économiques africaines. Comment les Etats peuvent-ils augmenter leurs recettes fiscales ?
Il y a une vraie déperdition dans la récolte de l’impôt qui s’explique en partie par la corruption. Certains fonctionnaires mal payés s’octroient une partie de l’impôt. Par ailleurs, faute de titres fonciers, le patrimoine immobilier est peu taxé. On a aussi un secteur informel surdimensionné et mal fiscalisé. Tout ceci représente de l’argent perdu pour les caisses de l’Etat, et explique aussi la faible pression fiscale en Afrique (20 % en moyenne, contre 45 % à 46 % en France). Enfin, la base productive est étroite, ce qui rend mécaniquement faible le montant d’impôts à collecter. Toute la pression s’exerce sur les classes moyennes qui se sentent, à juste titre, matraquées.
On annonce pour juillet 2020 le lancement de l’éco, une monnaie unique dans l’espace Cédéao qui réunit 15 pays. Est-ce une alternative crédible au franc CFA, que vous jugez en partie responsable du marasme économique ?
Je ne boude pas mon plaisir de voir des dirigeants, qui expliquaient il y a peu qu’on ne peut pas faire mieux que le franc CFA, dire finalement le contraire. Cependant, beaucoup de choses restent floues. Comment se feront les harmonisations entre les systèmes bancaires francophone, lusophone, anglophone ? Le taux de change sera-t-il fixe avec l’euro, comme l’a déclaré le président ivoirien Alassane Ouattara, ou rattaché à un panier de devises, comme l’a annoncé le président nigérien Mahamadou Issoufou ? Les incertitudes sont nombreuses et le calendrier me semble précipité.
Par ailleurs, les Etats seront-ils capables de solidarité budgétaire à l’égard d’un pays impacté par un choc ? Jusqu’à quel point sommes-nous prêts à faire du fédéralisme budgétaire ? Enfin, il y a un malaise chez les chefs d’Etat concernant la domination nigériane. Le Nigeria, c’est 52 % de la population de la Cédéao et un PIB qui représente plus des deux tiers du PIB de la zone. Il sera donc le garant de l’éco. Je ne suis pas sûr que les chefs d’Etat de la zone franc soient prêts à accepter le passage d’une tutelle française à une tutelle nigériane.
La Zone de libre-échange continentale africaine (Zlecaf) lancée en juillet marque-t-elle un tournant ?
C’est un vieux rêve qui devient réalité, celui des pères des indépendances. Cependant, il y a des écueils à éviter. Cet espace ne doit pas devenir un cheval de Troie pour le reste du monde. Les entreprises africaines doivent massivement alimenter ce marché, en veillant au strict respect des règles d’origine. Il faudrait avoir au moins 50 % de contenu local en termes de facteurs de production et de produits. Mais attention, le marché ne suffit pas. Pour l’alimenter, la production est indispensable, une production qui va engendrer des revenus. La Zlecaf est donc un levier possible pour l’émergence, à condition de savoir ce que l’on veut faire ensemble et mettre au cœur de l’agenda l’impératif de transformation sur place des matières premières.
Vous préconisez également de mettre l’agriculture au cœur de ce modèle de croissance africain. Comment faire face aux agricultures compétitives européennes et nord-américaines ?
L’urgence agricole aujourd’hui, ce sont les terres convoitées par les puissances émergentes et les surplus nord-américains et européens déversés sur nos territoires, tuant ainsi toute incitation à produire localement. Il faut augmenter la productivité agricole, apporter un soutien institutionnel aux acteurs de la filière et, surtout, enclencher une politique agricole protectionniste. Dans un premier temps, le protectionnisme est nécessaire sur un continent où 70 % de la population est rurale. Surtout quand l’on met en concurrence les agricultures ultra productivistes du Nord et celles, familiales, du Sud si peu subventionnées.Voyez seulement, un agriculteur américain est 820 fois plus soutenu qu’un producteur tanzanien. L’Américain reçoit en moyenne 37 000 dollars par an, le Tanzanien… 46 dollars. Sur un même marché, ce dernier disparaîtra.
Après la seconde guerre mondiale, l’Europe n’a pas attendu que les Etats-Unis la nourrissent. La politique agricole européenne pèse pour la moitié du budget commun, car c’est une question de souveraineté alimentaire. L’Afrique doit se nourrir en protégeant son marché.
Vous fustigez le discours sur l’émergence africaine. Doit-on vous classer parmi les afro-pessimistes ?
Je suis afroréaliste et je dénonce les faux-semblants de l’émergence. Ce discours a comblé un vide conceptuel après la fin des programmes d’ajustements structurels. Les cabinets de consultance internationaux qui élaborent ces plans – le Plan Sénégal Emergent, le Gabon Emergent, le Plan national de développement du Burkina Faso ou du Togo… – ne disent pas comment les financer. Alors les chefs d’Etat africains vont demander l’aide des Occidentaux pour le faire. Ces projets ne sont pas conçus en tenant compte des réalités de chaque pays. Il est tant de comprendre que personne ne développera l’Afrique à la place des Africains.
Par ailleurs, inspirons-nous des belles expériences en cours chez les voisins. Du Ghana pour la solidité des institutions, de l’Ethiopie sur les coûts de production compétitifs, du Rwanda pour la bonne gouvernance.
L’autre mantra à propos de l’émergence repose sur le numérique perçu comme opportunité pour les jeunes. N’y a-t-il pas un mirage entretenu au sujet de la croissance portée par ce secteur ?
Il faut dire que la jeunesse africaine innove avec un sens aigu de l’intérêt général. Il y a par exemple ce système d’irrigation goutte-à-goutte contre la sécheresse, ces applications pour prendre soin des personnes âgées, celles facilitant l’inscription des nouveau-nés dans les registres d’état-civil, etc. Le défi se trouve dans le passage à grande échelle. Ces entreprises doivent être soutenues et accompagnées sinon cela restera un mirage. Je propose d’intégrer la filière numérique dans une économie arc-en-ciel qui reposerait sur l’économie maritime (bleue), écologique (verte), numérique (transparente) et culturelle (mauve), car l’Afrique a un potentiel gigantesque sous exploité : ses richesses culturelles. Si chacune de ces filières faisait l’objet d’une réflexion stratégique pour la positionner dans les niches idoines des chaînes de valeur nationales, régionales et internationales, on pourrait transformer structurellement les économies africaines.
Vous insistez sur la nécessaire adhésion des populations africaines à un projet commun. Comment la susciter quand on observe un décalage si grand entre les dirigeants et leurs concitoyens ?
N’oublions pas que nos Etats sont jeunes et que les citoyens n’ont pas d’emblée conscience d’une communauté de destin. Par ailleurs, dans nombre de pays, les dirigeants ne sont pas choisis par leurs compatriotes, mais par les alliés occidentaux. Ce sont des dirigeants offshore qui ne se sentent pas obligés de rendre des comptes à leur peuple.Je rappelle que la première école coloniale française fondée au Sénégal par Louis Faidherbe en 1855 s’appelait l’Ecole des otages [qui formait les fils de chefs et de notables locaux pour en faire les auxiliaires du pouvoir colonial].La solution passera donc par l’émergence de dirigeants issus des sociétés civiles. Les jeunes doivent pour cela investir les élections. L’émergence se fera quand l’Afrique produira ses propres dirigeants ayant à cœur l’intérêt général.
Votre livre a des allures de programme économique. Vous avez été ministre de la prospective et de l’évaluation des politiques publiques du Togo entre 2013 et 2015. Envisagez-vous de vous présenter à la présidentielle togolaise en 2020 ?
Je compte servir mon pays à l’endroit où je pourrais être le plus utile.
VIDEO
LA TUTELLE FRANÇAISE SUR LES PAYS AFRICAINS À L'ONU, ÇA SUFFIT !
L'économiste ivoirien Mamadou Koulibaly, dénonce la tutelle de la France sur les pays africains francophones au sein de l’Onu et propose une nouvelle approche commerciale pour le continent
Depuis Moscou, où il était l’invité du président du Parlement russe, #MamKoul2020 dénonce la tutelle de la France sur les pays africains francophones au sein de l’Onu et propose une nouvelle approche commerciale pour le continent. En voici la retranscription:
« Tout à l’heure, Monsieur Vassiliev est revenu sur un certain nombre d’aspects qui pourraient améliorer le commerce entre les pays africains et la fédération de Russie. Il a insisté sur le cadre juridique, il a insisté sur le cadre sécuritaire, il a insisté sur les règles de commerce, de douane, de calcul, de données, d’échanges de données, et je crois que le fond du dossier se trouve là. On a d’un côté la fédération de Russie, et puis de l’autre côté, près d’une cinquantaine d’états africains.
Échanger avec ces états africains est de plus en plus ressenti lourdement par le continent, qui cherche à avoir un discours commun, une voix commune pour que le commerce qui se fait avec le continent puisse aller au bénéfice du continent et non pas seulement pour chaque État séparé.
La volonté de plusieurs états, c’est de remplacer le bilatéralisme classique par une sorte de multilatéralisme d’échanges avec des pays comme la Russie, mais pour cela, il va falloir que nous fassions quelques efforts sur le continent.
Les parlements africains ne sont pas encore organisés. C’est vrai qu’il y a des organisations sous régionales à l’ouest, au centre, au sud et, dans les statuts de toutes ces organisations sous régionales, il est dit qu’il faut mettre en place des parlements. Vous prenez la Cedeao, vous prenez l’union africaine, vous prenez l’Uemoa, la Cemac, dans tous ces cas, on dit qu’il faut mettre un parlement en place pour gérer les problèmes locaux qui peuvent se poser aux différents pays.
Malheureusement, les états africains ne sont pas encore arrivés, plusieurs années après, à mettre en place ces parlements locaux. Donc une législation commune qui pourrait gérer le commerce entre ces pays et les États extérieurs est difficile, puisqu’on n’a pas de système législatif commun.
La première étape, il me semble, c’est que le plus rapidement, l’union africaine s’efforce de mettre en place le parlement africain, et c’est ce parlement africain qui va définir les règles générales, statistiques, commerciales, monétaires, politiques qui pourraient faciliter le commerce entre la Russie-l’Afrique, l’Inde-l’Afrique, les États-Unis-l’Afrique et la Chine-l’Afrique… pour le moment, ce n’est pas le cas.
Deuxième élément de blocage : les pays africains ont été libérés de la colonisation il n’y a pas très longtemps. Et malheureusement, quand vous regardez les statistiques des Nations unies, 70 à 80 % des dossiers traités au conseil de sécurité ou bien à l’assemblée générale concernent l’Afrique, mais très rarement ces dossiers sont présentés par les états africains.
C’est toujours les anciennes puissances coloniales qui introduisent les dossiers qui concernent l’Afrique. Peut-être qu’il serait temps que les membres du conseil de sécurité des Nations unies, pourquoi pas la Russie, puissent plaider en faveur de ce changement: Si les états sont indépendants depuis 1958-1960, pourquoi n’ont-ils pas le droit d’assumer pleinement devant les Nations unies leur mandat ? Pourquoi faut-il toujours pour le Burkina, le Sénégal, le Congo, que les résolutions soient introduites non pas par l’État congolais ou l’Etat burkinabè, mais par l’Etat français ? Pourquoi ne faut-il pas que ce soit les gouvernements africains qui plaident pour ceci ou pour cela, mais que ce soit toujours les anciennes puissances coloniales ?
Tant qu’il y aura ce double standard aux Nations unies, le commerce avec les puissances qui n’ont pas été coloniales par rapport à l’Afrique restera relativement difficile. Voilà, monsieur le modérateur, les deux mots que je voulais ajouter au plaidoyer de M. Vassiliev.
C’est vrai qu’il y a les organisations que vous mettez en place ici. Elles seront d’autant plus efficaces, que sur le continent africain il y a aussi des organisations qui se mettent en place pour que le dialogue puisse être bilatéral, sinon ça va encore mettre beaucoup de temps. Je vous remercie. »
Chaque jeudi, le Prof. Mamadou Koulibaly, candidat de LIDER à l’élection présidentielle de 2020, publie une courte vidéo explicative de son projet de société pour une Côte d’Ivoire meilleure, unie et stable. Likez et partagez pour qu’ensemble, nous réussissions! 2020 se prépare dès aujourd’hui et merci à chacun de faire sa part.
par Benoit NGOM
FRANCE-SÉNÉGAL, DE LA MÉPRISE AU MÉPRIS
EXCLUSIF SENEPLUS - Qui a empêché les africains d’honorer leurs ancêtres morts en France pendant les deux guerres ? Pourquoi aucun monument digne du sacrifice des tirailleurs sénégalais n’a été bâti dans un pays africain depuis l'indépendance ?
Du 30 Septembre au 2 Octobre de cette année, l’Assemblée Nationale française organise un débat sur l’immigration. La conclusion ira vraisemblablement dans le sens du durcissement des conditions d’accès et de séjour des étrangers notamment de l’octroi des visas.
La question de la délivrance des visas à destination de la France est un vrai marqueur de la nature des relations entre ce pays et ses anciennes colonies d’Afrique notamment le Sénégal. En effet, bon nombre de Sénégalais, qui depuis leur président poète Senghor entendait parler de la relation particulière entre leur pays et la France sont toujours frustrés du traitement qui leur est imposé pour pouvoir séjourner en France. Ces sénégalais se sentent davantage diminués en voyant que leurs amis français, exemptés de visa, peuvent de leur côté se rendre au Sénégal quand ils le désirent. Même les personnes les plus respectées dans leur entourage ne sont jamais certaines de pouvoir bénéficier d’un visa pour la France. Ainsi, dans un mouvement de dépit, se sont-ils demandés à un moment pourquoi il ne fallait pas exiger des français la même chose qu’ils exigent des sénégalais, le visa.
L’exemption de visa en faveur des ressortissants d’un pays exprime naturellement la considération, l’estime et la confiance qu’on a à l’égard de ce pays. En cela la réciprocité dans ce domaine peut montrer le degré d’intégration culturelle, politique et économique qu’il y a entre les pays concernés. Toutefois, l’exemption de visa ne découle pas forcément de l’observation de la règle de réciprocité. Un pays peut unilatéralement proposer à un autre pays d’exempter, pour des raisons souvent économiques, ses ressortissants du visa.
Cependant, nous semble-t-il, dans le cas des relations entre le Sénégal et la France, la non observation de la règle de réciprocité n’est pas le problème fondamental mais plutôt les conditions d’octroi du visa français. La délivrance du visa français, à cet égard, doit-elle continuer à être considérée comme une œuvre de bienfaisance ou être le reflet d’une amitié enracinée dans l’histoire ?
FRANCE, SÉNÉGAL UNE VIEILLE ALLIANCE
La relation entre la France et le Sénégal n’est historiquement comparable à aucune autre en Afrique. En effet, la présence française au Sénégal commence à partir du 17e Siècle par l'île Saint-Louis. Ainsi, Saint-Louis est généralement considérée comme la première colonie française d’Afrique.
Une présence humaine et culturelle qui va revêtir progressivement des formes commerciales. En effet, à côté de la coexistence des populations, marquée par les premiers mariages mixtes « à la mode du pays », commencèrent à s’installer et à se consolider les embryons des comptoirs commerciaux qui à partir de Saint-Louis vont essaimer en Afrique occidentale.
Ainsi, quand Louis Faidherbe, futur Gouverneur du Sénégal arrive à Saint-Louis, sa première mission fut de sécuriser les comptoirs commerciaux qui se développaient sur les côtes africaines mais qui avaient besoin d’être protégés contre les attaques venant des pays limitrophes.
Sa mission prit alors une nouvelle dimension : celle de mettre en place une armée d’africains pour appuyer le petit contingent militaire originaire de la métropole. Faidherbe, avant d'élargir sa mobilisation aux anciens esclaves de case va s’appuyer sur des sénégalais de souche dont certains étaient des français qui cohabitaient avec les français de la métropole. Cette nouvelle armée dite « noire » va être le socle sur lequel Louis Faidherbe va bâtir en 1857 celle dite des « Tirailleurs sénégalais » qui va fonder le nouvel empire colonial français et dont certains participeront à la guerre de 1870.
Dans cet esprit, il n’est pas exagéré de dire que des sénégalais ont contribué fondamentalement à la création de l’armée coloniale française et ont contribué à la naissance et à l’expansion de l’empire colonial français. Ceux sont ces hommes qui auront pour mission de « pacifier » d’abord le Sénégal, leur pays d’origine, en obligeant la dissidence locale à partager les valeurs françaises. Ces considérations ne sont que le reflet de la réalité historique en dehors de toute considération morale qui pourrait suggérer une quelconque invitation à la repentance. A cet égard, il convient de citer le président Abdoulaye Wade qui a ressuscité la mémoire du Tirailleur sénégalais et qui disait «. Il faut assumer l'histoire, quelle qu'elle soit. Il ne faut pas en effacer une partie parce qu'elle dérange. Ceux qui font des critiques trop sévères vis-à-vis des tirailleurs ou des régimes de l'époque et de Blaise Diagne premier député noir à la chambre des députés, qui est à l'origine de l'engagement massif des tirailleurs dans la première guerre mondiale, sont des gens qui ne sont pas très justes. Certains qualifient Diagne d'agent de l'impérialisme. Je pense qu'ils ont tort. Pour apprécier son apport à l'histoire de l'Afrique, il faut le replacer à son époque, qui était une époque de non-droit. Les Africains n'avaient pas de droits. Ils étaient des sujets français. Et à cette époque, un homme s'est singularisé en prenant la défense des Noirs, c'était Diagne. A l'époque, les Sénégalais étaient contents de voir un Noir au Palais-Bourbon défendre la race noire. Il se battait contre le racisme ».
Ces tirailleurs, d’abord originaires du Sénégal, vont provenir au fil du temps des différents pays africains et être progressivement de toutes les batailles dans les différentes régions de l’Empire colonial. La dénomination de « Tirailleurs sénégalais » va toutefois faire que les sénégalais, dans de nombreux pays qui ont connu l’oppression coloniale, soient considérés pendant longtemps comme des « mercenaires » de la France.
La présence des tirailleurs sénégalais dans tous ces théâtres d’opération militaire est une réalité historique. Cependant, est-il possible d’affirmer sans hésiter qu’ils avaient tous une conscience claire de se battre pour leur patrie ? Toujours est-il que la guerre de 1914 va changer la perception qu’ils avaient de leur engagement dans l’armée française. En effet, quand advint, à la demande de Georges Clémenceau, la nécessité de mobiliser des troupes d’Afrique noire pour soutenir les soldats en métropole, Blaise Diagne, sénégalais et premier Député noir au Palais Bourbon, comprit que la respectabilité future des Noirs dans l’empire colonial français pouvait changer positivement si les africains acceptaient d’aller se battre sur le front au nom de la France mère patrie. Blaise Diagne réussit cette mobilisation à partir du Sénégal. Après la victoire française lors de la 1ere Guerre mondiale une loi dite Blaise Diagne fut votée qui octroyait la nationalité française à l’ensemble des habitants des quatre communes de plein exercice du Sénégal, Dakar, Rufisque, Saint-Louis, Gorée.
Toutefois, en l’espace de moins d’une génération la 2e Guerre mondiale fut déclarée et les africains se mobilisèrent une deuxième fois en masse mais cette fois-ci principalement pour libérer la patrie occupée. Ainsi, bon nombre d’africains ont payé le prix du sang pour contribuer à la libération de la France. Blaise Diagne lors de la mobilisation pour la Première Guerre mondiale avait pour slogan « En versant le même sang, vous gagnerez les mêmes droits ».
Dans cet esprit, l’alliance entre le Sénégal et la France, modestie ou mépris mis à part, est tout aussi digne que celle qui unit les USA et la France. Du côté français, pour illustrer l’amitié entre la France et l’Amérique, il est souvent rappelé le soutien que le Marquis de la Fayette apporta aux indépendantistes, mais aussi la statue de la liberté réalisée par Bartholdi que la France offrit au jeune état américain sans oublier naturellement la marque de Pierre l’Enfant dans la construction de la ville de Washington. Du côté américain, le pacte a été scellé par le sang versé par leurs soldats durant la première et la Deuxième Guerre mondiale.
UNE RELECTURE DE L’HISTOIRE D’UNE ALLIANCE
Malheureusement, dans cette alliance entre la France et le Sénégal, les considérations racistes du siècle passé vont rapidement gripper la dynamique qui devait sceller la fraternité virile entre soldats métropolitains et tirailleurs sénégalais. Le tocsin qui annonçait la nouvelle relation coloniale fut Thiaroye, située dans les Faubourgs de Dakar, dans un camp militaire de la France libérée. C’est ici qu’un matin, des soldats qui revenaient des campagnes d’Europe, ont été massacrés parce qu’ils avaient osé réclamer leur dû : leur pension militaire. Ces tirailleurs sénégalais qui revenaient triomphants du front européen furent mitraillés par l'armée qu'ils venaient de servir. Ces faits restèrent longtemps peu connus de la grande masse des sénégalais comme des français. C’est le film de Sembène Ousmane Thiaroye qui remit en mémoire cette douloureuse histoire.
En vérité, Thiaroye devait être compris comme un avertissement qui signifiait que les Tirailleurs sénégalais n’avaient pas de droits à revendiquer, que rien ne leur était dû par la France officielle dont ils pouvaient tout au plus solliciter la magnanimité.
En réalité, la colonisation qui globalement n’a été que la continuation de l’esclavage sous d’autres formes, va se perpétuer avec les indépendances en habillant les apparences. Ainsi, après les indépendances octroyées, le pouvoir colonial réussit à faire comprendre aux anciens sujets que tout ce qui était fait en leur faveur, l’était parce que la puissance coloniale en avait décidé ainsi et non en reconnaissance de ce qu’ils avaient accompli pour la France.
La volonté idéologique de placer les anciennes colonies dans une position d’assistés s’inspire de l’idéologie coloniale selon laquelle les colonies n’étaient capables de rien faire sans l’aide de la France. Cette perception a sous-tendu toute la politique de la coopération internationale post indépendance fondée sur l' ”aide” que l’imagination populaire a longtemps assimilé au don. A cet égard, faut-il rappeler que quand le pont Faidherbe fut construit, une certaine opinion refusa de croire que ce fût le budget de la colonie du Sénégal qui le finança intégralement et préféra soutenir que le financement avait été pris en charge par la France métropolitaine.
Ceux qui pensent que les anciennes colonies d’Afrique ne peuvent rien apporter à la France sont les mêmes qui sont convaincus que la « francophonie » n’est qu’une histoire de peuples misérables qui veulent se servir de la langue française pour s’accrocher aux basques de la France. En vérité tout ceci n’est que la conséquence d’une ignorance bien partagée. En effet, en France toute génération confondue l’histoire coloniale, est globalement méconnue. Ainsi, il n’est pas rare de voir des intellectuels ou responsables politiques français tenir des propos que seul le manque de connaissance de certains pans de leur passé peut expliquer.
Ainsi, récemment, des acteurs politiques français comme Nadine Morano et de Jordan Bardella qui après avoir reproché à Sibeth Ndiaye la porte-parole du gouvernement français ses habits peut être par trop bariolés pour eux, ont tenu à insister sur le fait qu’elle était d’origine sénégalaise et qu’elle n’avait acquis la nationalité française que depuis trois ans. Faudrait-il rappeler à ces détracteurs que Sibeth Ndiaye avec les habits qui lui sont reprochés et sa coiffure qu’ils ne sauraient voir, a contribué incontestablement à mener le candidat Emmanuel Macron à la victoire en 2017. Par ailleurs, cette dame dont ils évoquent la nationalité sénégalaise vient d’un pays dont bon nombre de ressortissants ont été des français avant les aïeux de certains, qui aujourd’hui, se prétendent français de souche. En effet, faut-il rappeler que les indigènes de l’ile Saint-Louis et de l’île de Gorée, au Sénégal, se virent accorder la citoyenneté française par l’Assemblée législative française de la première République en 1792. Ces révolutionnaires français, plus généreux et plus lumineux que certains de leurs concitoyens d’aujourd’hui, ont posé les grands principes qui guident la France éternelle et ont permis à ces sénégalais d’être parmi les premiers citoyens français de l’histoire.
CONNAÎTRE SES INTÉRÊT S ET REVENDIQUER SES DROITS
Au Sénégal, comme dans la plupart des pays qui ont subi de longues périodes de domination, le peuple a beaucoup perdu de ses valeurs ancestrales et a fini par confondre ce qui lui est dû et ce qui lui est octroyé. Cette confusion mentale est au centre de la relation entre les peuples d’Afrique noire et les anciennes puissances coloniales.
A cet égard, seule la connaissance de leur histoire, de leur passé peut aider d’abord l’élite qui gouverne à mieux conduire leur peuple vers des destinations prometteuses et aider les masses à mieux comprendre les discours et orientations de leurs dirigeants. En ce sens, c’est un impérieux devoir de promouvoir tout ce qui nous entraîne à croire en nous et à penser par nous-mêmes et pour nous-mêmes comme nous y invitait le président Léopold Sédar Senghor.
C’est pourquoi, il convient de saluer la noble et opportune initiative prise par le professeur Iba Der Thiam d’écrire l’histoire générale du Sénégal en 25 volumes et la décision éclairée du président Macky Sall d’en assurer la réalisation. La prise en compte de cette histoire, nous semble-t-il, facilitera le réarmement intellectuel et moral du citoyen sénégalais.
Dans l’histoire contemporaine du Sénégal la relation avec la France occupe une place particulière. Mais les fondements de cette alliance, voire de cette amitié ont souvent été refoulés, du côté de la France comme du Sénégal, dans les abîmes manichéennes de la période coloniale qui n’aura retenu que la relation entre dominateur France et dominé Sénégal.
Cependant, quand une relation ne peut pas cesser, il convient de l’entretenir avec courage et lucidité. Ainsi, dans sa relation avec la France, nous pensons qu’il est temps que le Sénégal mette en évidence les fondements de l’alliance entre les deux pays comme les Tirailleurs sénégalais, la contribution à la naissance de l’Empire colonial, la contribution à la libération de la France sous la domination nazie et enfin, son rôle dans la consolidation de la position diplomatique de la France dans les relations internationales contemporaines. En effet, le Sénégal a joué un rôle remarquable pour consolider le bloc francophone africain autour de la France. Dans le même ordre d’idée, le président Abdou Diouf a apporté une contribution inestimable au monde francophone en faisant de l’organisation de la coopération francophone une Organisation internationale dont la voix compte de plus en plus sur certains problèmes internationaux.
Pour toutes ces raisons, la diplomatie sénégalaise ne devrait plus se contenter des relations de condescendance avec son homologue française notamment dans la délivrance des visas français aux sénégalais. En effet, le visa exprime d’une manière forte la nature des relations entre deux pays.
C’est pourquoi, dans l’affaire des visas français, en réalité, le problème de fonds est moins le nombre visas accordés chaque année que le fait d’avoir introduit dans cette affaire, une dimension d’aléas qui ne devrait pas avoir sa raison d’être. Ce n’est pas une question comptable mais psychologique. En effet, le Sénégalais qui a rempli toutes les conditions requises et qui demande un visa n’a pas la certitude de l’avoir.
Ainsi a-t-on pu s’inquiéter de savoir si des parents sénégalais d’enfants français vivant en France, des professeurs d’université internationalement connus, parfois d’éminentes personnalités du pays allaient recevoir leur visa qu’ils ont demandés. Le comble est que ces inquiétudes se trouvent très souvent fondées quand ces personnes se heurtent à un refus de délivrance de visa sans explication.
A cet égard, il est possible de citer le refus de visa à une éminente personnalité intellectuelle africaine qui avait tellement irrité un des anciens présidents du Sénégal qu’il décida de lui octroyer un passeport diplomatique qui l’exemptait du visa français. Mais, il faut en convenir, un tel geste quoique noble ne règle pas le problème mais ne fait que contourner la difficulté d’une façon ponctuelle. En effet, le gouvernement du Sénégal doit veiller à tout mettre en œuvre pour garantir la liberté de circulation à tous ses citoyens qui en ont la possibilité et éviter de les laisser à la merci de la libre appréciation, voire l’arbitraire des fonctionnaires des consulats de France.
REDYNAMISER UNE COOPÉRATION SANS COMPLEXE
Le jeune président français Emmanuel Macron, après avoir admis la nécessité de rendre aux africains les objets d’art qui leur avait été confisqué du fait de l’ordre colonial, a lancé un appel lors du 70 e anniversaire du débarquement en Provence aux maires de France pour que des places et des monuments rappellent le souvenir de la contribution des africains à la libération de la France sous l’occupation nazie. Ceci devait se faire, selon lui, en considération du pacte scellé dans le sang par les combattants français et africains.
A cet égard, l’Afrique doit assumer ses responsabilités historiques. Nous pensons qu’il appartient aussi aux africains de prendre des initiatives qui honorent leurs morts, qui donnent à leur jeunesse le sens et la signification de l’engagement et de la mort de leurs ancêtres qui ont combattu à côté de la France dans les différentes guerres qu’elle a menées. Les africains doivent avoir le courage de prendre en charge leur destin. Il est temps que leurs responsables s’assument pleinement et cessent de se défausser sur l’ancienne puissance coloniale. Qui a empêché aux africains d’honorer leurs ancêtres morts en France pendant les deux guerres mondiales ? Pourquoi, à notre connaissance, aucun monument digne du sacrifice consenti par ces ancêtres tirailleurs sénégalais n’a été bâti dans un pays africain depuis l’accession de nos pays à la souveraineté nationale ? Ainsi l'appel du président Macron doit avoir comme pendant les initiatives que le Sénégal est en devoir de prendre pour commémorer la mémoire des Tirailleurs sénégalais partis mourir à l’étranger en édifiant au Sénégal un monument pouvant s’inspirer du Vietnam Memorial Veteran qui, à Washington, honore les combattants Blancs, Jaunes et Noirs de l’armée américaine morts au Vietnam.
Le Sénégal doit assumer la spécificité de sa relation historique avec la France et par conséquent son rôle dans l'histoire de l'empire colonial français en poussant sa diplomatie à faire plus de place au souvenir comme fondement de certaines de ses initiatives. Ainsi, la statue de Demba et Dupont, devant la gare d’où partiront les TER, fleuron de la haute technologie française au service des citoyens sénégalais, est un symbole de ce que cette amitié peut donner. Cette statue magnifie la fraternité virile entre deux anciens combattants européens et africains dans une parfaite égalité d’apparence.
Dans cet esprit, le président Macky Sall doit conduire le Sénégal à assumer sa responsabilité historique par rapport à nos autres frères d’Afrique afin que le pays berceau des Tirailleurs sénégalais soit à l’avant-garde de la promotion et la sauvegarde de notre mémoire historique.
Benoit Ngom est président Fondateur de l’Académie Diplomatique Africaine (ADA)
Abdoulaye Wade : "Assumer l'histoire, quelle qu'elle soit » Interview le Monde hors-série Novembre 2018
Iba Der Thiam : Coordonnateur du Comité de rédaction de l’Histoire Générale du Sénégal, HGS Editions
texte collectif
RACISMES, NE PLUS JOUER AVEC LES MOTS
Une critique de l’islam doit être possible, pas le rejet de l’islam et des musulmans. Il doit être possible d’interroger la norme blanche d’une société sans être accusé de racisme anti-Blanc, comme vient d’en faire les frais Lilian Thuram
Libération |
Rokhaya Diallo et Esther Benbassa |
Publication 21/09/2019
La dernière université d’été de La France insoumise (LFI) a relancé, suite à une intervention d’Henri Peña-Ruiz, la polémique autour de l’islam. L’islamophobie serait-elle un rejet de l’islam en tant que religion ou un rejet des musulmans ? On pourrait poser la même question sur la judéophobie : haine du judaïsme ou haine des juifs ? Il est vrai que dans ce dernier cas, on n’ose pas trop le faire…
Le mot «antijudaïsme», pourtant, existe bien. Il désigne une haine religieuse du juif repérable dès l’Antiquité, qui a dominé la société d’Ancien Régime mais qui a considérablement détérioré, concrètement, la condition juive. Face au christianisme, religion du «vrai Israël» spirituel, se serait trouvé le judaïsme, porté par un «Israël charnel» prétendument déchu, incapable de reconnaître la messianité et la divinité de Jésus. Peuple «déicide» qui payera lourdement le tribut de cette infériorité…
Alors, l’«islamophobie», rejet de l’islam ou rejet des musulmans ? Les deux. Comme la judéophobie est à la fois haine du judaïsme et haine des juifs. L’ambiguïté persiste dans le cas de l’islamophobie sans doute parce qu’il n’existe pas un autre terme se référant spécifiquement à la religion, comme ce fut le cas de celui d’antijudaïsme. Mais aussi en raison de la réalité concrète ordinaire à laquelle le mot renvoie, qui est en fait un rejet du musulman plutôt que de l’islam.
Le racisme antimusulman contemporain s’enrichit d’un autre amalgame avec la figure du migrant récent ou actuel. Si l’immigration actuelle était composée de migrants d’origine chrétienne, on peut penser que l’opposition de la population française à ces vagues de migrants aurait été moindre.
Il va de soi qu’on peut critiquer l’islam comme n’importe quelle religion. Curieusement, pourtant, c’est l’islam, et d’abord lui, qui est aujourd’hui critiqué et non le bouddhisme ou le catholicisme, etc. Encore moins le judaïsme et cela pour des raisons historiques bien précises. Après la Shoah, ce n’est tout simplement plus aussi simple. Ceux qui se hasarderaient à le critiquer trop violemment savent à quelle accusation ils s’exposeraient : celle d’antisémitisme, tout simplement.
Qu’on passe au tamis de la critique certaines pratiques et certains discours de l’islam d’aujourd’hui devrait être considéré comme possible et légitime dans un pays laïc dont la loi de 1905 appelle au respect de tous les cultes sans en reconnaître aucun. Les attentats terroristes et leurs répercussions désastreuses ont nourri cette critique. Mais les polémiques autour de l’islam et des musulmans - port du voile, prières de rue, burkini - datent d’avant ces attentats.
Un islam d’Europe va bien finir par se construire. Mais pour qu’il se construise sans trop de heurts, encore aurait-il fallu depuis longtemps œuvrer à endiguer les discriminations, les humiliations et le racisme antimusulman qui sévissent dans nos territoires. Aucune réforme concernant l’organisation du culte musulman n’a vraiment abouti. Parce que les pratiques sont déjà ancrées, avec ses poches de racisme systémique dans la société et au sein même des différentes strates de l’Etat. Même s’il n’y a pas, en France, d’islamophobie ou de racisme d’Etat ouvertement institué.
Lorsque Lilian Thuram a évoqué le complexe de supériorité qui traversait les supporteurs blancs dans les stades, il ne se doutait pas, quant à lui, de l’ampleur de la levée de boucliers qu’il susciterait. Des protestations incroyablement nombreuses ont fusé pour dénoncer la prétendue essentialisation du groupe «blanc» commise par l’ancien footballeur. Des dénonciations bien tonitruantes au regard de l’indifférence suscitée par les manifestations racistes qui faisaient l’objet des commentaires de Thuram.
Depuis des décennies, les joueurs de football noirs sont exposés à toutes sortes de vexations racistes allant des cris de singes au lancer de peaux de bananes en passant par des injures racistes. Etrangement, alors que jamais ces agissements inadmissibles n’ont mobilisé une telle énergie, il a suffi d’évoquer la position dominante des personnes blanches dans la hiérarchie raciale pour que de toutes parts l’on accuse Thuram de racisme… anti-Blancs !
Le racisme ne se résume pas à des interactions individuelles désobligeantes, il s’agit d’un système découlant d’une histoire. La place des minorités en France est conditionnée par un passé colonial et esclavagiste, elles ont fait l’objet de théories raciales qui les ont mises dans une condition d’infériorité. Cette condition se traduit aujourd’hui par un traitement structurellement inégalitaire dans l’accès à des biens ou à des services (logements, emplois…) et dans le traitement institutionnel (contrôles au faciès, situation des outremers…).
Si des personnes blanches peuvent être exposées à des déconvenues du fait de leur appartenance, ce qui est tout à fait condamnable, elles ne sont désavantagées ni politiquement ni socialement par le fait d’être blanches. On ne peut en aucun cas comparer la position de personnes qui subissent un racisme protéiforme et systémique et peuvent se voir questionner quant à la légitimité de leur présence sur le sol français, avec une interaction - si malheureuse soit-elle - qui s’inscrit dans un rapport strictement interpersonnel.
Lorsque Lilian Thuram évoque un complexe de supériorité, il fait écho au fait que la société est organisée pour conforter les personnes blanches dans l’idée qu’elles sont la norme. En réalité, cet engouement pour la notion de racisme anti-Blancs masque la volonté de minorer la réalité du racisme en France et de concevoir un bloc de solidarité entre les personnes qui sont placées au sommet de la pyramide raciale et qui, qu’elles le veuillent ou non, en sont les bénéficiaires. Comme l’invocation d’une laïcité déformée, visant à exclure des minorités religieuses de la sphère publique, l’invocation du racisme anti-Blancs est un mécanisme de préservation visant à stigmatiser les minorités pour mieux ignorer leurs problématiques. C’est aussi le moyen de les présenter comme des menaces pour la majorité.
Qui croit vraiment qu’une religion ou une population minoritaire puisse un jour dominer l’espace public ou que des minoritaires, arabes, musulmans ou noirs puissent jamais accaparer le pouvoir ? Tout cela est surtout la traduction d’une angoisse profonde, celle de voir une identité nationale fantasmée se dissoudre au profit de groupes dont on imagine qu’ils sont structurés dans une optique de «grand remplacement».
C’est surtout le constat de la perte de privilèges. Il n’est aujourd’hui plus possible de se soustraire aux discours antiracistes portés par les minorités, ce confort qui permettait de balayer leurs revendications d’un revers de main est aujourd’hui remis en question. Et au lieu d’être entendus, ces questionnements sont rejetés, critiqués. Et chacun croit pouvoir jouer avec les mots pour s’épargner la confrontation au réel.
Si vous faites partie de ceux qui croquent une tablette pour chasser les idées noires, l’effarant documentaire réalisé par Paul Moreira, La Face cachée du cacao, risque fort de vous faire passer le goût du chocolat. On savait la filière trouble, mais la réalité dévoilée par les enquêtes et reportages, de plus en plus nombreux ces derniers mois, dépasse tout ce qu’on peut imaginer. Déforestation, travail des enfants, aveuglement des autorités, double discours des multinationales, promesses non tenues des industriels de l’agroalimentaire… Il y a quelque chose de pourri au royaume des cabosses.
Accompagné d’une caméra cachée et d’un « fixeur », le journaliste a réussi à filmer des images terrifiantes dans l’une des plantations illégales qui grignotent, année après année, les forêts pourtant protégées du sud-ouest de la Côte d’Ivoire, pays producteur de 40 % du cacao mondial. Balisées par des miliciens qui prélèvent une dîme à chaque passage de camion, voiture ou moto, les routes boueuses de la région tracent un chemin difficilement praticable au milieu d’une végétation étrange. Les arbres y ressemblent à des squelettes blancs : ils ont en fait été brûlés pour permettre la plantation de cacao à leur pied. Plantations que de jeunes adolescents pulvérisent, toute la journée, d’un produit à « tête rouge » dont on découvre très rapidement qu’il s’agit de glyphosate, le désherbant de Monsanto, classé « cancérigène probable » par l’OMS.
Absence de traçabilité des fèves
Inutile de préciser que ces gamins, pour la plupart venus du Burkina Faso voisin et « vendus » par leurs parents, trop pauvres pour les nourrir, travaillent non seulement dans l’illégalité la plus totale (le travail des enfants est interdit en Côte d’Ivoire) mais également sans aucune protection contre les défoliants qui tuent, petit à petit, la forêt ivoirienne. Pis, ceux qui ont trop faim en arrivant travaillent pendant plusieurs années gratuitement contre de la nourriture, avant d’être payés par l’octroi d’une petite parcelle. L’absence de traçabilité des fèves leur permet de rejoindre le circuit légal, en toute impunité. Nourrie par l’appétit des industriels pour les douceurs chocolatées, l’expansion, légale ou non, des plantations de cacao a fait perdre à la Côte d’Ivoire 90 % de sa forêt en vingt ans.
Opiniâtre, Paul Moreira frappe à toutes les portes de la filière. Du chef du réseau qui vend les enfants aux planteurs clandestins, à l’intermédiaire opaque qui refuse de parler, en passant par les ONG qui dénoncent sans relâche ce business « cannibale ». Son documentaire explique avec clarté et sans pathos pourquoi la filière cacao est l’une des plus inéquitables au monde : selon l’Agence française de développement, un cultivateur de cacao gagne en moyenne moins de 1 euro par jour.
Les industriels et les lobbys du secteur ont pourtant multiplié les déclarations d’intention depuis vingt ans, se fixant des objectifs aussi ambitieux qu’irréalistes. Mais face à la déscolarisation des enfants, au laxisme des autorités dans certaines provinces reculées, à l’incurie des intermédiaires et au laisser-faire des industriels, les moyens déployés pour nettoyer la filière paraissent dérisoires. La publication de rapports alarmants fait toutefois bouger les lignes : la Côte d’Ivoire et le Ghana ont décidé cette année de cesser de vendre leurs fèves aux grands industriels si le prix payé aux producteurs n’augmentait pas.
par Abdourahmane Sarr
LIBÉRER LES FINANCES DU SÉNÉGAL ET DE LA BCEAO
La liquidité actuellement détenue par les banques au-delà de leurs réserves obligatoires et qui est en réalité financée par la banque centrale n’est pas une liquidité potentiellement destinée au privé
Dans une série de contributions dédiées à la gestion monétaire de la BCEAO, et à l’intention d’une cible particulière, nous soutenions (i) que la BCEAO est à la remorque des banques et des états dans sa politique de refinancement puisque les banques détiennent des titres d’état refinancés à la BCEAO et ne peuvent réduire cet encours que progressivement ou sevrer les états (ii) que le Sénégal et la Côte d’Ivoire sont venus au secours de la BCEAO et des banques par des émissions d’eurobonds avec le double résultat d’une part, de renflouer les réserves de change négativement impactées par la politique de financement indirect de déficits budgétaires excessifs, et d’autre part, d’apporter de la liquidité aux banques au vu de la nécessité de réduire le volume de refinancement de la BCEAO (iii) que sa politique était plus ivoirienne que régionale dans sa gestion de la liquidité globale de l’union et enfin (iv) qu’elle était retournée à une hibernation salutaire sur ses instruments après un activisme dicté par sa politique ivoirienne et commerciale entre 2016 et 2018 puisque ses instruments annoncés de politique monétaire (taux d’intérêts et réserves obligatoires) n’ont pas de liens avec les développements du marché libre sur ces instruments. Ces thèses sont confirmées par les analyses du dernier rapport de la surveillance régionale UEMOA du FMI, par l’encours disproportionné des titres de la Côte d’Ivoire sur le marché financier régional, et par le comportement des taux d’intérêts sur le marché, faits documentés dans le rapport de politique monétaire de septembre 2019.
Dans un tel contexte, notre banque centrale devra continuer à refinancer nos banques à un niveau qui corresponde au rythme d’ajustement budgétaire de l’union, notamment de la Côte d’Ivoire, avec le risque d’un effet d’éviction sur le crédit au secteur privé et sur les autres pays comme le Sénégal. En effet, la Côte d’Ivoire traine un déficit budgétaire plus élevé que sa capacité de financement régional et extérieur ne peut soutenir, ce qui rend sa croissance élevée par l’investissement public insoutenable. Il en résulte que son niveau d’investissement public engendre un déficit de son compte courant de la balance des paiements que les entrées de capitaux d’autres pays de l’union ou de l’extérieur ne suffisent pas à couvrir. Le déficit de la balance des paiements qui s’en suit affecte les réserves de change de la BCEAO et nécessite des financements exceptionnels du FMI et de bailleurs alors que la Côte d’Ivoire ne devrait plus, comme le Sénégal, avoir de programme FMI avec financement.
La Côte d’Ivoire devrait donc non seulement réduire son déficit budgétaire bien en dessous du critère de convergence de 3% du PIB de l’union mais également réduire son recours au financement sur le marché régional pour donner de l’espace aux autres pays comme le Sénégal. Tous les pays de l’UEMOA, y compris la Côte d’Ivoire, pourraient du même coup réduire le financement en devises de leur dette publique de sorte à réduire la vulnérabilité extérieure de l’union. Ceci permettra également aux pays comme le Sénégal d’éviter des tensions de trésorerie et le recours à des arriérés intérieurs, lettres de confort aux banques, ou paiements en instance comme mode de financement effectif de dépenses budgétaires en année courante à payer avec des crédits budgétaires d’années à venir. Nos finances publiques seraient ainsi davantage libérées.
Dans un contexte où les états se financeraient davantage sur le marché régional en FCFA pour réduire le poids de leur dette en devises, l’union pourrait néanmoins avoir besoin d’entrées de devises avec la liquidité correspondante en FCFA qui provenaient du financement en devises des états. Cet apport sera bénéfique pour les réserves de change de la BCEAO et la liquidité des banques et à travers elles, le financement de l’économie. Pour ce faire, la BCEAO pourrait se substituer aux états et émettre des titres sur les marchés internationaux pour son propre compte afin de combler ce déficit en devises et en liquidité pour le secteur privé. Elle pourrait prendre exemple sur la Banque de Tunisie qui des années durant a émis des titres sur le marché Samurai japonais notamment, dès fois pour son propre compte en soutien au secteur privé, d’autres fois pour le compte de l’état tunisien. Elle l’a fait récemment avec la garantie de l’état japonais au vu de la situation politique tunisienne. Les statuts de la BCEAO permettent de faire la même chose.
Pour matérialiser cette vision, nous recommandons à la BCEAO en collaboration avec la Commission de l’UEMOA d’élaborer une stratégie globale d’endettement public de l’union pour déterminer la composition appropriée globale en devises de cet endettement et les déclinaisons nationales. Il s’en suivra qu’il lui restera à gérer son propre bilan pour apporter le résiduel de financement en devises nécessaire à l’union par une présence sur les marchés internationaux.
Dans cette perspective, et en donnant une autonomie d’objectif à la BCEAO sur le taux de change et en l’affranchissant du Conseil des ministres, les chefs d’états lui permettraient de mieux gérer le niveau de ses réserves de change dans ce nouveau rôle. Un taux de change flexible inciterait également davantage les investisseurs étrangers à s’intéresser à notre marché en FCFA, ECO devrait-on dire. Cependant, ces investisseurs ne s’intéresseront pas à notre marché si le marché secondaire des titres d’état n’est pas actif et liquide pour leur permettre d’entrer et de sortir facilement au besoin.
De ce fait, nous concluons cette contribution en réitérant à l’endroit de la BCEAO que la liquidité actuellement détenue par les banques au-delà de leurs réserves obligatoires et qui est en réalité financée par la banque centrale n’est pas une liquidité potentiellement destinée au privé. Les banques ont utilisé les réserves excédentaires non rémunérées qu’elles détenaient pour financer les états et refinancer ces mêmes montants qu’elles conservent en dépôt à la banque centrale. Ces dépôts, par ce mécanisme, sont devenus des dépôts rémunérés que la BCEAO doit considérer comme des dépôts détenus dans une facilité synthétique de dépôts qu’elle n’avait pas dans ses instruments, rémunération financée par les états. Puisque ces dépôts sont au-delà des réserves obligatoires, la BCEAO doit émettre des bons BCEAO pour éponger cette liquidité excédentaire afin d’avoir une emprise sur les taux d’intérêts du marché interbancaire qu’elle souhaite. Ceci permettra d’animer le marché interbancaire et monétaire, ce qui favorisera un marché secondaire des titres d’état. Il en résultera également une réduction des profits nets de la BCEAO qui ne devrait pas l’inquiéter. Sa politique ne doit pas être commerciale mais monétaire et financière et les états devraient se tenir prêts à assumer les conséquences éventuelles sur le capital de la banque. Il serait peut-être judicieux, de ce point de vue, de changer les statuts de la BCEAO pour que son capital soit détenu au prorata du poids des états de l’UEMOA afin que les responsabilités éventuelles soient adéquatement distribuées. Un collège de gouverneurs nationaux aux droits de vote correspondants dans les décisions de la banque centrale en serait le corollaire.
Librement
Abdourahmane Sarr est président CEFDEL, Moom Sa Bopp Mënël Sa Bopp
MACKY S'ENVOLE POUR L'AG DE L'ONU
Le président fera une allocution à la plénière de l’Assemblée le 24 septembre. Il prendra également part à plusieurs événements en marge de la session, en plus des audiences et entretiens bilatéraux - COMMUNIQUÉ DE LA PRÉSIDENCE DE LA RÉPUBLIQUE
SenePlus publie ci-dessous, le communiqué de la présidence de la république, relatif à la participation de Macky Sall à la 74e session ordinaire de l’Assemblée générale des Nations Unies à New York.
"Son Excellence Monsieur le Président Macky Sall quitte Dakar le Samedi 21 septembre 2019 pour prendre part à la 74e session ordinaire de l’Assemblée générale des Nations Unies à New York.
Le thème de la session porte cette année sur : « Dynamiser les efforts multilatéraux pour l’éradication de la pauvreté, l’éducation de qualité, l’action contre le changement climatique et l’inclusion ».
A ce titre, le Président Sall fera une allocution à la plénière de l’Assemblée le 24 septembre. Il prendra également part à plusieurs événements en marge de la session, en plus des audiences et entretiens bilatéraux.
En outre, il fera une adresse devant le Centre d’Affaires US-Afrique, qui est une composante de la Chambre américaine de Commerce, et animera une Conférence à l’Université de Yale sur le thème : « L’Afrique dans les relations internationales contemporaines ».
Le retour du Chef de l’Etat est prévu le 26 septembre."
FSL À BERLIN, LE BILLET DE SAXEWAR
SORTIR DU POTENTIEL POUR LE RÉEL
EXCLUSIF SENEPLUS - Oui l'Afrique a un potentiel énorme - Comment transformer ce continent pour le développer dans une logique qui lui soit propre ? Comment repenser la notion même de développement ?
Saxewar Diagne de SenePlus |
Publication 21/09/2019
(SenePlus.com - Berlin) - Cette troisième et dernière journée du Forum de Saint-Louis prolonge la conversation sur le type de développement qui pourrait convenir à ce continent au potentiel incommensurable.
Oui, le potentiel est énorme. Le PIB de l'Afrique avec son milliard d'habitants qui tourne autour de $2 trillons, dans 30 ans sera multiplié par 15 pour atteindre $30 trillions. A elle seule, elle possède un tiers des ressources naturelles de la planète. Ces 10 dernières années, 6 des économies à la croissance la plus rapide étaient africaines.
Les facteurs qui supportent cet immense potentiel sont de 5 ordres.
La démographie d'abord. En 2050 un humain sur 5 sera Africain. L'âge moyen sur le continent est de 18.6. Que de jeunes pour booster l'économie mais aussi les idées et la pensée. En 2040, l'Afrique comptera la plus large population adulte active dans le monde.
La gouvernance ensuite. Les pas de tortue restent des pas quand même. Il y a 20 ans, seulement 7 pays organisaient régulièrement des élections démocratiques. Aujourd'hui, il y en a 2 sur 3.
Deux autres facteurs, l'urbanisation et la technologie. 40% d'Africains vivent dans les villes aujourd'hui. En 2050, ils seront 60%. Entre 2000 et 2011, l'utilisation d'Internet a augmenté sur le continent de 2527%. Aujourd'hui l'Afrique compte 120 millions d'internautes.
Cinquième élément qui porte la croissance en Afrique, le commerce. Un indicateur particulièrement marquant. Il y a 22 ans, les 4 BRICs, Brésil, Russie, Inde et Chine comptaient pour seulement 1% du commerce africain. Aujourd'hui, ils en sont à 22% et en 2030, ils en seront à 50%.
Oui, le potentiel est énorme. L'Afrique va t-elle pour autant se développer ? C'est la grande interrogation de cette dernière journée du Forum de Saint-Louis à Berlin. Les acteurs présents sont tous des optimistes et c'est cela qui explique leur infatigable engagement au quotidien. Mais tous comprennent que le processus de développement passe par une décolonisation des esprits, de la pensée. Il passe par une sortie de la posture de victime pour emprunter celle d'un acteur en charge et seul responsable de son propre destin. Il passe par une réappropriation de soi qui mène à une ouverture à l'autre pour un nouveau vivre ensemble avec moins d'inégalités, moins de préjugés, moins d'antagonisme.
La route est encore longue mais le Forum considère que "l'urgence décoloniale trace son chemin dans la pensée contemporaine africaine". Comment achever sous toutes ses formes cette décolonialité ? La question est ouverte, elle reste ouverte, et chacun par son engagement apportera une parcelle de réponse.