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30 avril 2025
Opinions
PAR L'ÉDITORIALISTE DE SENEPLUS, ALYMANA BATHILY
USAIN QUI RIT, ISABELLE QUI PLEURE
Le sport à l'école instauré dès les premières années qui permettait de vulgariser la pratique sportive, de détecter et de suivre les talents à travers des compétitions interscolaires et nationales a été très tôt abandonné
Alymana Bathily, Éditorialiste de SenePlus |
Publication 26/08/2016
Pourquoi la Jamaïque se couvre t-elle d'or encore alors que le Sénégal rentre encore bredouille de toute médaille, comme à chaque Olympiade depuis plus de cinquante ans ? Pourquoi Usain Bolt rit pendant qu'Isabelle Diédhiou pleure ?
La Jamaïque est pourtant un tout petit pays de seulement 10.991 Km2 de superficie soit moins de 6% de celle du notre, avec une population de moins de 3 millions d'habitants. Indépendant depuis seulement 1962 c'est tout comme le Sénégal un pays pauvre, sous développé dont les principales ressources proviennent également de l'agriculture, de l'exploitation des ressources naturelles (là bauxite) et du tourisme.
Si ce pays a le privilège d'être le berceau du Rastafarisme, d'avoir donné au monde le Reggae et d'avoir enfanté Bob Marley, il est confronté à de terribles catastrophes naturelles (typhons et pluies torrentielles) qui sont fréquentes dans les Caraïbes et connait l'un des taux de criminalité et de violence les plus élevés au monde, du fait surtout de l'omnipotence des narco trafiquants.
L'exemple de la Jamaïque démontre donc que l'indigence du sport sénégalais ne saurait être attribuée ni à la taille de notre pays ni à son niveau de développement économique et social.
"Plus que le poids, c'est plutôt la capacité du pays à investir dans le sport qui permet la performance…. Ce n'est pas le PIB qui permet le résultat …la démographie n'a rien de surdéterminant…° écrit d'ailleurs à ce propos, Pascal Boniface, un analyste français, auteur d'une étude sur les jeux Olympiques (JO Politique). S'investir dans le sport est devenu une nécessité pour tous les États du monde, petits et grands, riches et pauvres.
C'est en effet à travers le sport aussi, à travers les athlètes que chaque État se projette désormais au monde et se donne une place parmi les autres nations, conquiert respect, envie, sympathie ou empathie.
Les analystes du politique considèrent que le sport joue désormais un rôle essentiel dans la géopolitique contemporaine, en tant que composante décisive du "soft power", cet arsenal d'attributs permettant aux États de déployer pacifiquement leur influence à travers le monde.
C'est pourquoi organiser des jeux, tels les Jeux Olympiques ou les grandes compétitions internationales de football ou gagner des médailles lors de ces événements est devenu un enjeu majeur de politique internationale.
Une étude du Kings College London montre ainsi qu'à la suite des Jeux Olympiques de Londres en 2012 qui ont été suivi par la moitié de la population du globe soit plus de 3,5 milliards personnes, 35% des habitants des pays les plus importants stratégiquement pour la Grande Bretagne estiment que ce pays leur apparait désormais comme une destination attractive pour leurs études ou leurs investissements.
Aux Jeux de Rome en 1960, la France n'a gagné aucun titre et s'est classée 25ème, ramenant quand même quelques médailles d'argent et de bronze (dont celle d'un certain Abdoulaye Séye sur 100 mètres). Le Général De Gaulle vécut cela comme une humiliation.
"Si la France brille à l'étranger par ses penseurs, ses savants, ses artistes, elle doit aussi rayonner par ses sportifs. Un pays doit être grand par la qualité de sa jeunesse et on ne saurait concevoir cette jeunesse sans un idéal sportif." C'est à partir de là que fut mise en place la politique sportive que vaut à la France de se hisser à Rio au 7ème des pays par le nombre de médailles.
A Cuba, c'est la politique sportive proclamée par Fidel Castro en 1961, pour exalter la Révolution et pour exister au plan international, face aux États Unis qui a fait de cette ile de onze millions d'habitants seulement, 40% plus petite que le Sénégal, l'un des tous premiers pays au monde au plan du sport. La défaite de nos athlètes signale en creux l'absence de telles ambitions politiques.
Quand le Vice président du Comité Olympique Sénégalais réfute le qualificatif "d'échec" de la participation de notre pays à Rio et estime que "le Sénégal est objectivement à sa place" et que le Secrétaire Général du Ministère en charge des Sports prétend illustrer "l'appui" de son département par les "bourses" attribuées à quelques athlètes, ils révèlent l'absence d'ambition de ce qui tient lieu de politique sportive de notre pays.
En fait, dans le domaine du sport comme dans d'autres, les gouvernements qui se sont succédé à la tête de ce pays ont toujours procédé par tâtonnement et improvisation. Le sport à l'école instauré dés les premières années qui permettait de vulgariser la pratique sportive, de détecter et de suivre les talents à travers des compétitions interscolaires et nationales a été très tôt abandonné. Les infrastructures sportives de niveau international se résument encore pour l'ensemble du pays à deux ou trois unités, toutes à Dakar.
Si la débâcle du sport sénégalais à Rio pouvait être ressentie par les responsables du sport de ce pays et d'abord par le Président de la République particulièrement comme le signe d'une indispensable et urgente nécessité de définir une véritable politique, elle aura servi à quelque chose.
On pourrait ainsi à travers une réflexion collective réunissant autour des autorités politiques, des sportifs, des spécialistes du sport et d'autres spécialistes, sans tenir compte des appartenances politiques, procéder à un diagnostic sans concession et définir un projet sur le long terme.
L'on convoquera aussi l'esprit de ces immenses athlètes qui ont posé les jalons du sport sénégalais et dont l'héritage n'a pas été préservé alors qu'ils ont contribué pourtant au prestige dont ce pays jouissait pendant les toutes premières années post indépendance. Abdou Séye, Papa Gallo Thiam, Habib Thiam, Raoul Diagne , Amadou Gakou sont de ceux là.
On bâtira ensuite un consensus national fort autour de ce projet de manière à lui assurer, quelque soit le régime en place, le soutien politique et les ressources requises. Ainsi, les enfants d'Isabelle reviendront des Jeux Olympiques couverts d'or et de gloire. Les Sénégalais arboreront alors un sourire conquérant face au monde.
SÉNÉGALAIS OU PAS SÉNÉGALAIS
ANALYSE SUR LA CONDITION DE LA NATIONALITÉ DANS LA DÉVOLUTION DU POUVOIR AU SÉNÉGAL - NOTIONS ET ENJEUX - L'INTÉGRALITÉ DE LA DÉCLARATION DU FORUM CIVIL
SenePlus publie ci-dessous l'intégralité d'un document d'analyse du Forum Civil daté du 23 août 2016 et signé par la Commission sur la transparence dans la vie publique.
"L’arrêt de la traque des biens mal acquis, le référendum du 20 mars et différents évènements socio politiques qui ont rythmé ces derniers temps la vie de notre pays n’ont pas manqué de susciter diverses réactions au sein de la classe politique et des citoyens. La tonalité et la vigueur de ces réactions ont donné l’impression d’entretenir un climat de tension soutenu qui, face aux véritables urgences qui assaillent les populations, devraient plutôt inviter à l’apaisement.
C’est ce contexte particulier qui accueille l’appel au dialogue national formulé par le Président de la République, lequel appel a fait l’objet de controverse sur ces motivations profondes. Ce processus a finalement conduit à une revue approfondie des enjeux autour du code électoral avec entre autres questions, la nationalité. Les échanges sur cette question majeure se sont jusque-là polarisés sur la nationalité des candidats à l’élection présidentielle, la bi nationalité et la double nationalité.
L’intérêt suscité par ces questions et le traitement politiquement manipulé de ces concepts à des fins partisanes, ont contribué à amener le Forum Civil à apporter sa contribution dans ce débat et à se poser certaines questions essentielles :
Qu’est-ce que la double nationalité ?
Existe-t-il une différence entre double nationalité et bi-nationalité ?
Ces deux catégories juridiques sont-elles consacrées par la législation sénégalaise sur la nationalité ?
Dans le traitement de ces interrogations, le Forum Civil s’est référé uniquement aux dispositions législatives en vigueur au Sénégal notamment à la Constitution, à la Loi sur la nationalité (LN) et au Code électoral, en s’abstenant de toute analyse politique.
A cette fin il serait important de faire un rappel historique pour une bonne interprétation de ces différents textes surtout celui de la loi sur la nationalité.
La loi sur la nationalité a été adoptée juste un an après l’accession à la souveraineté nationale du Sénégal. Avant celle-ci, du fait de notre statut de territoire d’outre-mer, deux catégories de personnes cohabitaient : les citoyens français (les habitants des quatre communes que sont Saint-Louis, Dakar, Rufisque et Gorée) et les sujets français (les populations issues des autres parties du territoire). Cet état de fait a permis aux citoyens des quatre communes de se retrouver à notre indépendance, dans une situation de double nationalité et la loi 61-10 du 7 Mars 1961 intervenue après y est restée muette.
DE L’ACQUISITION DE LA NATIONALITE
La question de la nationalité sénégalaise est régie par la Loi N°61-10 du 07 Mars 1961.
La nationalité est le lien d’appartenance juridique d’une personne physique ou morale à un Etat. Elle confère à son titulaire des devoirs et des droits politiques, civiques et professionnels.
Cette loi a défini plusieurs critères d’attribution de la nationalité que sont : la filiation, la naissance sur le territoire, le mariage et la manifestation de volonté. Ces différents critères font donc que la nationalité obtenue est soit d’origine, soit par acquisition.
La nationalité d’origine.
La nationalité d’origine est celle que l’enfant acquiert automatiquement à sa naissance en fonction de deux critères : la naissance sur le territoire sénégalais (jus soli ou droit de sol), la filiation (jus sanguini ou droit de sang).
La nationalité d’acquisition :
La nationalité d’acquisition est la nationalité qui n’est pas d’origine, elle s’acquiert au cours de sa vie. Elle suppose soit une demande de l’intéressé (manifestation de volonté), soit un changement d’état civil (mariage, adoption), soit les deux à la fois.
DE LA PERTE DE LA NATIONALITE SENEGALAISE
La perte de la nationalité peut être volontaire ou imposée
La perte volontaire :
La perte volontaire de la nationalité sénégalaise est consacrée par les articles 18, 19 et 20 de la loi sur la nationalité. Cette perte volontaire de la nationalité doit être distinguée selon qu’on est majeur ou mineur.
Le Sénégalais majeur qui acquiert volontairement une nationalité étrangère perd sa nationalité sénégalaise (art. 18 LN)
Le sénégalais qui épouse un étranger et qui peut acquérir la nationalité de son conjoint, est autorisé à perdre sa nationalité sénégalaise s’il en fait la déclaration expresse avant le mariage célébré ou constaté (Art. 20 LN)
Ici on peut dire que c’est une autre variante de la perte volontaire de la nationalité par un majeur sauf que dans le cas du conjoint, la perte n’est pas automatique du seul fait de son mariage avec un étranger, il faut en plus faire la déclaration expresse.
Le mineur qui a une nationalité étrangère ne peut perdre sa nationalité sénégalaise que s’il en fait la demande et qu’il y est autorisé par décret. (Art. 19 LN)
Ce cas du mineur pourrait produire une situation de double nationalité si toutefois qu’une demande n’a pas été faite pour la perte de sa nationalité sénégalaise déjà acquise à la naissance.
Il en est de même pour le cas des citoyens français issus des quatre communes (Dakar, Rufisque, Gorée et Saint Louis) qui lors de l’accession à l’indépendance se sont retrouvés dans cette situation de double nationalité du fait qu’aucune disposition transitoire n’a été prise en ce sens par la loi sur la nationalité pour régler cette situation.
La perte involontaire : la déchéance
Pendant un délai de 15 ans à compter de l’acquisition de la nationalité sénégalaise, tout bénéficiaire peut en être déchue, par décret, si :
•-il a été condamné au Sénégal pour un crime ou un délit contre la sûreté de l’Etat.
•il a été condamné au Sénégal ou à l’étranger pour un acte, qualifié au Sénégal de crime ou délit, pour une peine supérieure à 3 ans de prison
•il s’est livré à des actes ou à un comportement incompatible avec la qualité de sénégalais ou préjudiciable aux intérêts du Sénégal.
Cette déchéance de la nationalité sénégalaise ne concerne que les individus qui se sont naturalisés sénégalais. Elle ne concerne pas les personnes qui ont la nationalité sénégalaise d’origine.
NATIONALITE ET ELECTIONS
La question de la nationalité en matière électorale est régie par la Constitution et le Code électoral. Elle concerne à la fois les électeurs et les candidats aux élections.
Nationalité et électeur :
C’est l’article L 30 du Code électoral qui traite des dispositions relatives à la nationalité dans les conditions d’inscription sur les listes électorales.
Selon les dispositions de cet article : «Nul ne peut refuser l'inscription sur les listes électorales à un citoyen sénégalais par naturalisation, après la date d'acquisition de la nationalité sénégalaise ou, pour l'un des conjoints ayant acquis la nationalité sénégalaise par le mariage, après la date d'expiration du délai d'incapacité prévu par l'article 07 de la Loi sur la nationalité (…) »
Peuvent donc être électeur tout citoyen ayant la nationalité, qu’elle soit d’origine ou acquise, à condition que pour cette dernière (nationalité d’acquisition) que le délai d’incapacité prévu par l'article 07 de la Loi sur la nationalité soit respecté.
Nationalité et candidatures aux élections :
Les questions de la nationalité et des candidatures aux élections sont traitées différemment selon le type d’élection.
Nationalité et candidature à l’élection présidentielle
La nationalité et la candidature à l’élection présidentielle sont régies par les dispositions combinées des articles 28 de la Constitution et L.O 113, L.O 114 du Code électoral.
L’article 28 de la Constitution prévoit expressément l’exclusivité de la nationalité sénégalaise pour la candidature à l’élection présidentielle : « Tout candidat à la Présidence de la République doit être exclusivement de nationalité sénégalaise (…) ».
Les articles L.O 113 et L.O 114 exigent respectivement, pour la candidature et la déclaration de candidature, la mention que le candidat est de nationalité sénégalaise et la production d’un certificat de nationalité.
Par ailleurs, ce même article LO.114 exige une déclaration sur l’honneur attestant que le candidat à une nationalité exclusivement sénégalaise conformément à l’article 28 de la constitution.
La Constitution ne fait pas de distinction entre ceux qui ont la nationalité d’origine ou d’acquisition, contrairement aux dispositions prévues par le Code électoral pour la candidature aux élections législatives. Autrement dit, même si l’individu renonçait, au profit de la nationalité sénégalaise, à sa ou ses autre (s) nationalité (s) à la veille du dépôt de sa candidature, il aura rempli le critère d’exclusivité de la nationalité sénégalaise selon les dispositions de l’article 28 de la constitution.
Dans tous les cas, il appartient au Conseil constitutionnel de procéder à toute vérification nécessaire pour établir l’exclusivité de la nationalité des candidats.
Au Sénégal, où le régime politique actuel est caractérisé par une forte concentration des pouvoirs entre les mains du président de la république, il est important pour des questions de souveraineté, d’exiger que les candidats à l’élection présidentielle soient exclusivement de nationalité sénégalaise.
Nationalité et candidatures aux élections législatives
Les restrictions apportées par le code électoral à la candidature aux élections législatives en matière de nationalité ne concernent que les étrangers naturalisés sénégalais et les conjoints qui ont acquis la nationalité sénégalaise par le mariage. Pour ces deux catégories d’individus, leur candidature ne peut être valide du point de la nationalité que si une période de 10 ans s’est écoulée à compter de leur naturalisation, sous réserve qu’ils ne conservent une autre nationalité pour le premier cas et de l’épuisement du délai d’opposition dans le second cas (article LO.153 du code électoral).
L'un des conjoints qui a acquis la nationalité sénégalaise par le mariage n'est éligible qu'à l'expiration d'un délai de dix ans (10), à compter de la date à laquelle cette acquisition ne peut plus faire l'objet d'opposition.
La loi fixe les cas dans lesquels cette incapacité peut être réduite en fonction des titres et circonstances dont les personnes visées (les étrangers naturalisés sénégalais et les conjoints) pourraient se prévaloir.
L’article LO.153 du code électoral ne traite que le cas de la nationalité par acquisition. On pourrait donc affirmer que les sénégalais qui se trouvent dans une situation où ses deux parents sont de nationalités différentes et qui auraient acquis la nationalité de chacun de ses parents (binationaux) ne sont pas concernés.
Nationalité et candidatures aux élections locales
Pour les élections des conseillers départementaux
Les conditions d'éligibilité, d'inéligibilité et d'incompatibilité aux élections des conseillers départementaux relatives à la nationalité sont fixées par l’article L.199 du code électoral qui dispose que : « Ne peuvent être conseillers départementaux sauf dispositions contraires prévues par les conventions internationales, les étrangers naturalisés pendant un délai de dix (10) ans à compter de la date du décret de naturalisation, à moins que le naturalisé ait été relevé de cette incapacité pour services exceptionnels rendus au Sénégal au sens de l'article 12 de la loi n° 61-10 du 7 mars 1961 déterminant la nationalité sénégalaise, modifiée par la loi n° 2013- 05 du 08 juillet 2013 ».
La seule restriction relative à la nationalité faite par le code électoral pour les élections des conseillers départementaux concerne les étrangers naturalisés sénégalais. Ceux-ci ne peuvent y participer, sauf en cas de dispense ou lorsqu’une période de dix ans s’est écoulée après le décret de naturalisation.
Pour les élections des conseillers municipaux
Le Code électoral n’a pas prévu de dispositions spécifiques relatives à la nationalité en ce qui concerne les élections des conseillers municipaux. Mais pour être candidat à ces élections, il faut juste être électeur de la commune.
« Sont éligibles au conseil municipal, tous les électeurs de la commune, sous réserve des dispositions des articles L.230 à L.233 ». (Article L.229 code électoral)
Il est important de rappeler que pour être électeur il faut avoir la nationalité sénégalaise par conséquent, pour être éligible au conseil municipal il faut avoir la nationalité Sénégalaise (cf. Article L 30.2 du code électoral).
L’évaluation de la mise en œuvre du code de la nationalité
La loi 61-10 du 7 mars 1961 déterminant la nationalité Sénégalaise, plusieurs fois modifiée, pose un certain nombre de problèmes dans sa mise en œuvre effective. Parmi ces problèmes on peut noter :
absence de décret d’application fixant les conditions et les modalités de son application. En effet, la plupart des lois sénégalaises, adoptées par le législateur, promulguées par le président de la République et publiées au Journal officiel, comportent à la fin de l'article concerné des dispositions du type : « les modalités d'application de la présente Loi seront précisées par décret». Une telle disposition n’existe pas dans la loi déterminant la nationalité sénégalaise. L’existence d’un tel décret permettrait une meilleure application de ladite loi notamment en précisant les modalités d’instruction et d’octroi des demandes de nationalité sénégalaise.
problèmes de moyens pour une application rigoureuse de la loi la nationalité. Par moyens on entend tous les outils (services dédiés, informatisation de l’état civil au Sénégal, fichier fiable des sénégalais de l’extérieur ou base de données, conventions de coopération etc.) nécessaires pour l’application effective de la loi sur la nationalité. Depuis 1960 ces conditions d’application de la loi n’existent pas au Sénégal.
absence de processus de destitution en cas de violation des dispositions de l’article 28 de la constitution qui exige la nationalité exclusive des candidats à l’élection présidentielle et de l’article L.O 114 du code électoral qui exige par ailleurs une déclaration sur l’honneur attestant de la nationalité exclusive du candidat.
nécessité d’une adaptation la loi sur la nationalité aux réalités actuelles à cause de son obsolescence surtout en créant une commission d’évaluation de la loi qui va s’appuyer sur deux hypothèses de travail : la double nationalité comme règle générale avec des exceptions ou l’exclusivité comme principe avec des exceptions ;
au besoin, s’interroger sur le modèle allemand de la Nationalité qui présente un certain intérêt en termes de similitude avec la loi sénégalaise relativement à la question de l’option. En effet, pour les modalités d’acquisition de la nationalité, la loi allemande prévoit la déclaration d’option. Si l’enfant possède en général la nationalité des parents et la nationalité allemande, comme la double nationalité ne devrait pas devenir la règle, ils ont introduit ce qu’ils appellent le modèle de l’option: à 18 ans, l’enfant ayant donc atteint la majorité doit se prononcer pour une des deux nationalités. Cette option n’existe pas au Sénégal car notre loi ne s’est pas prononcée sur la question de l’enfant qui serait né au Sénégal avec la possibilité d’acquérir la double nationalité du fait que ses parents sont de nationalités différentes.
Toujours selon le modèle allemand, après qu’un enfant ait atteint l’âge de 18 ans, l’Administration chargée des questions de naturalisation lui pose par écrit la question s’il veut garder la nationalité étrangère ou allemande. Si l’enfant majeur décide de garder la nationalité étrangère, il perd automatiquement la nationalité allemande. S’il veut garder la nationalité allemande, il doit alors prouver jusqu’à l’âge de 23 ans la perte de la nationalité étrangère. Une telle précision n’existe pas dans la loi sénégalaise. Pourtant, elle permettrait d’éviter toute cette polémique inutile sur la question de la double nationalité ou bi nationalité.
L’extension de la question de la nationalité exclusive à d’autres secteurs de la gouvernance publique
La question de la nationalité exclusive mérite d’être étudiée de manière approfondie. Pour des motifs de sécurité et de souveraineté Nationale, il serait non seulement intéressant d’avoir un consensus sur la question mais aussi d’élargir le périmètre d’application d’une telle loi. Ce qui pose la pertinence de l’extension de la question de la nationalité exclusive à d’autres secteurs de la gouvernance publique.
Pour ce faire, certains postes de responsabilité (les hautes fonctions sur la sécurité, la justice, le gouvernement, le parlement, les représentants diplomatiques) doivent être occupés uniquement par des sénégalais qui ont une nationalité exclusive.
On entend par haute fonction sur la sécurité, les postes de chef d’état-major général des armées, de Haut commandant de la gendarmerie nationale, du directeur de la sûreté nationale, du directeur du renseignement etc.
Pour ce qui est de la justice on fait référence aux membres du Conseil constitutionnel, du Haut Conseil de la Magistrature, des Procureurs généraux et Procureurs de la République, les présidents des cours et tribunaux.
Pour le gouvernement, il s’agit de l’ensemble des ministres de la république sans exception.
Au niveau du parlement, la nationalité exclusive devrait être exigée à tous les membres du bureau de l’Assemblée Nationale.
Les ambassadeurs et consuls, compte tenu de leur statut de représentant du Sénégal à l’extérieur et pour éviter d’être en situation de conflit d’intérêt, doivent avoir la nationalité exclusive.
La nationalité exclusive devrait être élargit aussi au membre du bureau du conseil économique, social et environnemental et de celui du Haut conseil des collectivités territoriales.
Conclusion et perspectives
La question de la nationalité qui agite le débat public au Sénégal ces derniers jours est comme on le constate, différemment traitée par les textes en vigueur dans le pays, selon qu’on est électeur ou éligible ou bien selon qu’on est candidat à l’élection présidentielle ou aux élections législatives, départementales ou municipales.
Dans la situation actuelle, seule l’élection présidentielle exige des candidats qu’ils soient de nationalité exclusivement sénégalaise. La Constitution et le Code électoral ne fixent aucun délai relatif au critère d’exclusivité pour les candidats.
Le Forum Civil fidèle à ses traditions d’ancrage républicain demande le maintien du statu quo pour une application rigoureuse de la loi actuelle. Dans cette logique, le Forum Civil s’oppose à toute tentative d’instrumentalisation de la loi par l’introduction de nouvelles dispositions pour gêner un potentiel candidat.
Pour l’avenir et au-delà de ces échéances électorales, l’importance de la question de la nationalité dans le débat politique actuel, commanderait d’étendre le critère d’exclusivité à certains postes de responsabilité publique.
Dans cette dynamique, le Forum Civil propose que des sanctions exemplaires soient prévues dans des dispositions à aménager en cas de fausses déclarations sur l’honneur relative à la nationalité.
Dans la même veine, les changements à apporter dans la loi sur la nationalité pourrait intégrer la question de l’option, c’est-à-dire l’obligation faite à l’individu majeur d’opter pour la nationalité sénégalaise ou pas.
Pour y arriver, le Forum Civil invite le gouvernement à s’engager avec toutes les forces vives de la nation dans une démarche consensuelle pour réadapter la loi sur la nationalité aux réalités de notre temps et de notre société.
Le Forum Civil, invite l’Etat à renforcer les moyens et prérogatives du conseil constitutionnel pour rendre plus efficace son contrôle sur la question de la nationalité.
La question de la nationalité, du fait de sa complexité ne peut être gérée isolément par un Etat. A cet effet le Forum Civil invite à une réflexion pour l’élaboration d’une convention internationale sur la question."
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LA POLITIQUE SUR LA PLAGE...
Les photos d'une femme en burkini contrôlée par la police de Nice font polémique
(AFP) - Des photos d'un contrôle de police sur une plage de Nice (sud-est), montrant une femme, foulard sur les cheveux, ôtant sa tunique devant des agents, ont suscité l'indignation sur internet mercredi et relancé la polémique autour de l'interdiction du burkini par plusieurs villes de France.
La décision de plusieurs communes de la Côte d'Azur de bannir de leurs plages les tenues ne respectant pas la laïcité, notamment le burkini, qui couvre le corps de la tête aux chevilles, provoque depuis plusieurs jours un débat enflammé en France et à l'étranger. Mardi soir, le tabloïd britannique Daily Mail a mis en ligne une série de photos - non sourcées et non datées - montrant quatre policiers municipaux en train de contrôler une dame assoupie au soleil sur une plage de la célèbre Promenade niçoise, frappée le 14 juillet par un sanglant attentat djihadiste (86 morts).
Cette femme est habillée et porte un foulard turquoise et blanc noué au-dessus de la nuque et une tunique de même couleur à manches longues, qu'elle enlève ensuite sous l'oeil des policiers, sans qu'on sache si elle agit sur ordre de ceux-ci ou de sa propre initiative. La mairie de Nice, contactée par l'AFP, n'était pas en mesure de préciser dans l'immédiat les circonstances de ce contrôle. Mais elle a confirmé qu'une quinzaine de femmes avaient été verbalisées depuis le début de la semaine, en raison de leur tenue de plage. Mardi, une mère de famille verbalisée le 16 août dernier, alors qu'elle était voilée et portait legging et tunique sur une plage de Cannes, a annoncé son intention de contester cette amende.
Les images du contrôle de Nice ont suscité mercredi un déluge de réactions d'internautes dénonçant "une humiliation" et "une chasse au voile" leur faisant "honte" ou leur donnant la "haine". "Ils veulent lui retirer ses vêtements. Mais qu'ils retirent leurs uniformes ! La police de la honte", a réagi Marwan Muhammad, le président du Collectif contre l'islamophobie en France (CCIF) qui a attaqué en justice les arrêtés municipaux avec la Ligue des droits de l'homme. "Question du jour: combien de policiers armés faut-il pour forcer une femme à se déshabiller en public?", s'indigne sur Twitter le directeur de la communication Europe de Human Rights Watch, Andrew Stroehlein.
L'actrice américaine Susan Sarandon a elle aussi tweeté les photos assorties du commentaire: "La police française applique l'interdiction du burkini en ordonnant à une mère de famille d'enlever sa tenue musulmane". La justice française a validé à deux reprises ces arrêtés, qui font l'objet d'un recours devant la plus haute instance administrative du pays, le Conseil d'Etat. Celui-ci se penchera jeudi sur la question, avec pour délicate mission de trancher sur la légalité de ces interdictions controversées.
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LE BURKINI NE FAIT GUÈRE DE VAGUES EN AFRIQUE DU NORD
(AFP) - Le débat lancé cet été en France sur le burkini rencontre peu d'écho en Afrique du nord, où ce costume de bain islamique a trouvé sa place sur des plages où les tenues sont de plus en plus pudiques.
A Zeralda, station balnéaire à l'ouest d'Alger, rares sont désormais les femmes qui osent se mettre en maillot, surtout en bikini, sur les plages publiques.
Hakima, professeur de mathématiques d'une quarantaine d'années, nage en burkini puis s’entoure d’un large paréo en sortant de l’eau. "C’est plus décent. Le maillot intégral est la solution pour les musulmanes pratiquantes qui aiment la mer", explique-t-elle.
Mais certaines se couvrent à contrecœur, comme Manel Brahimi, étudiante en biologie: "J’adore nager mais si je porte un maillot de bain normal, on me regarde comme une martienne".
Siham, 24 ans, s'est également résignée à porter, au-dessus de son maillot une pièce, un short cycliste afin d'"éviter les regards".
Sur les plages de Rabat, les baigneuses se trempent aussi dans les tenues les plus disparates, du bermuda au bas de survêtement en passant par le legging, le short en jean, ou même le suggestif tee-shirt mouillé.
Mais rares sont celles arborant un burkini proprement dit, ce costume de bain créé en Australie dont le prix moyen (au moins 500 dirhams, 50 euros) le met hors de portée pour la majorité d'entre elles.
"Ce phénomène est surtout le fait des MRE (les Marocains résidant à l’étranger). Ils ont importé cette mode cette année lors de leur vacances sur les plages marocaines", en particulier dans le nord du pays, plus conservateur, souligne Miloud, un retraité.
Fadel, un quadragénaire, y voit avant tout "une histoire de gros sous" qui "fait les affaires des boutiques de mode islamique". "Mais la plupart des gens ici s’en foutent", souligne-t-il.
- Réservée aux femmes -
De ce fait, la polémique créée en France par l'interdiction du burkini par plusieurs communes du sud, comme Nice ou Cannes, paraît décalée.
"Ce débat n'intéresse pas en Tunisie", indique le sociologue Abdessatar Sahbani. "Le port du burkini, qui a évolué d’une façon considérable depuis la révolution (de 2011), n’a pas provoqué de problèmes sur les plages... Et cet été les Tunisiens sont surtout préoccupés par la situation économique et sécuritaire".
L'évolution des moeurs a ouvert la voie aux plages privées réservées aux seules femmes et enfants. Comme le "Marina club" ouvert à l'est d’Alger par l'entrepreneur Riadh Bourayou.
Bien que son prix d'entrée soit élevé, les clientes, voilées ou non, se bousculent autour de la piscine, où se côtoient bikinis, maillots échancrés ou burkinis loin des regards masculins. Seules des femmes, étudiantes pour la plupart, y sont employées comme serveuses ou maîtres nageuses.
"C’est un havre de paix, un endroit discret pour une femme musulmane", se réjouit Ouahiba Chatouri, une hôtesse de l’air à la retraite voilée heureuse de porter son maillot deux pièces en toute tranquillité.
Un peu plus loin, un mur sépare sur la plage ces baigneuses de celles portant le voile intégral.
Ces dernières "en fait n’apprécient pas qu’il y ait de jeunes garçons", affirme une cliente, étonnée que l’on puisse comparer le regard d’un gamin de 7 ou 8 ans à celui d’un adulte.
- En bikini 'par principe' -
Début août, un article de la presse arabophone algérienne avait provoqué un tollé sur les réseaux sociaux en assimilant les femmes en bikini à des débauchées. La journaliste y affirmait que "certaines plages d’Alger se sont transformées en points noirs, interdites de fait aux familles, à cause de la nudité et de la mixité".
Or, jusqu’aux années 1990, la mixité et les maillots de bain étaient la règle sur les plages d'Algérie, où la baignade habillée était l’exception le long de ses 1.600 km de côtes.
"Au lieu d’avoir une mixité sociale sur les plages comme cela avait toujours été le cas, des murs sont érigés entre celles qui peuvent se permettre une plage payante et bronzer comme elles le veulent et celles qui, par conviction ou par obligation, nagent dans une tenue décrétée décente par la société", regrette Saida, une enseignante d'anglais.
Près d’elle, Katia Ouahid, est en bikini "par principe".
"J’ai pris du poids avec mes grossesses mais je refuse le diktat de la société. Quand les islamistes interdisaient aux femmes d’aller à la plage, on n’a pas cédé. On partait en famille et avec des amis et on se mettait en maillot", rappelle Katia, la cinquantaine.
Amina, l'une de ses amies, regrette aussi que "la société ait énormément régressé sur le plan des libertés individuelles". "Il ne manque plus que l’on placarde à l’entrée: +plage familiale, tenue décente exigée+", s’insurge-t-elle, en se disant "nostalgique" des grandes plages où les filles étaient en maillots aux couleurs chatoyantes.
PAR L'ÉDITORIALISTE DE SENEPLUS, MOMAR SEYNI NDIAYE
LA 4G ET QUOI ENCORE ?
Quoi de plus normal pour des consuméristes de réclamer une meilleure qualité de service et une plus grande accessibilité ? Comment ne pas s'assurer que le partenariat avec France Télécom ne va pas obérer le développement de la Sonatel ?
MOMAR SEYNI NDIAYE DE SENEPLUS |
Publication 21/08/2016
Il n'échappe à personne que l'acquisition de la licence 4G et la mise en service de la 4G, font entrer le Sénégal de plain-pied dans la société de l'information. Le renouvellement par l'état sénégalais de sa concession et l'octroi de la licence 4G pour dix-sept ans constituent un jalon supplémentaire dans l'acquisition de nouvelles chaînes de valeurs dans l'immense étendue d'opportunités offertes par l'économie et la culture numériques.
Dans la foulée, l'opérateur historique sénégalais vient d'engranger 100%, de l'AIRTEL, filiale du Groupe hollandais, Bharti International et principal opérateur mobile en Sierra Leone, avec son partenaire stratégique Orange. La nouvelle structure sera dirigée par un cadre sénégalais, issu de la Sonatel, Djibril Dramé. Cette acquisition obtenue, après un précieux coup de pouce de l'État sénégalais, permet à la Sonatel de renforcer son implantation en Afrique, à la suite celles du Mali (2001), de la Guinée (2007) et la Guinée-Bissau (2007. Dans l'escarcelle sonatélienne un bassin potentiel de 20 millions d'abonnés ! Heureuse concomitance, qui suscite malgré tout, et doute et scepticisme acerbes critiques.
On peut s'étonner voire s'indigner qu'en dépit de ces performances, l'un des fleurons de notre économie (12,5% de notre PIB) reçoive une telle volée de bois de vert d'association de consommateurs, d'organisation sociale et même de l'organe nationale de régulation. Les raisons et motivations, des uns et des autres sont diverses et variées. Mais il serait contre-productif de les ignorer.
Quoi de plus normal pour des consuméristes de réclamer une meilleure qualité de service et une plus grande accessibilité ? Comment ne pas s'assurer que le partenariat avec France Télécom ne va pas obérer le développement de la Sonatel ? Surtout dans un contexte de retour en force des intérêts français au Sénégal, dans des secteurs névralgiques comme les infrastructures portuaires, routières, l'industrie extractive, et e capital foncier ! Comment, faire en sorte que les Sénégalais tirent le meilleur profit économique et social des performances de la Sonatel, en préservant ses intérêts face au géant tes télécoms françaises ?
Il y a, cependant probablement une question aussi stratégique qu'il convient de se poser. Comment intégrer dans l'analyse des enjeux du secteur, l'impact de la globalisation, le poids des multinationales et leur extraordinaire force de frappe financière? Et comment prendre en compte, au moindre frais, toute la logistique de la géopolitique des grands États, qui trouve leur prolongement sur le terrain des marchés.
Le secteur des télécommunications, porteur de croissance, et de compétitivité internationale, et autres enjeux stratégiques en termes de contrôle de l'information, comme outil à la décision, ne peut y échapper. En Europe et singulièrement, la politique et les affaires font bon ménage. C'est à la faveur de cette diplomatie économique que la puissance politique des États puissants exerce à travers les grandes entreprises, tous secteurs confondus leur pouvoir économique sur les pays moins nantis, et politiquement peu représentatifs.
Depuis bientôt trente ans, l'opérateur français à travers France Câble Radio a toujours accompagné le secteur des télécoms au Sénégal, de Télésénégal à nos jours. Toutes les évolutions technologiques, les performances commerciales, techniques et professionnelles, sont le fruit d'un partenariat conséquent, qui a profité aux deux parties.
Mais à l'arrivée, la posture actuelle de la Sonatel et du secteur des télécoms au Sénégal doit son formidable expansion à ce partenariat. Ce serait preuve d'angélisme, que de croire que ce transfert de technologie, de compétence professionnelle et de valeur ajoutée, ne génère pas de plus-values aux partenaires techniques. Même dans les monarchies arabes du Golfe ce rapport de domination s'exerce encore de façon plus nette ? Le combat des altermondialistes, de Davos à Montréal, s'évertue précisément à inverser cette tendance prédominante.
Au Sénégal, l'exemple du secteur de l'eau illustre parfaitement ce cas. Sans l'appui et certainement la présence marquante des partenaires techniques et financiers de Vivendi à Erano, en passant par Bouygues et Finagestion. Il en ainsi du secteur hydraulique ivoirien, qui partage les mêmes partenaires que la Sénégalaise des Eaux.
Il apparaît donc essentiel d'approcher l'analyse sous l'angle systémique pour que nos États, sur les frêles épaules, arrivent tout de même à donner à nos sociétés nationales, tout l'appui dont elles ont besoin, pour tirer tous les profits d'un partenariat public privé (PPP) équilibré. A l'heure où les Accords de Partenariat Economique (APE) pointent à l'horizon, ce recadrage relève d'une vitale nécessité. Certes France Télécom détient, encore 42% du capital de la Sonatel. Et probablement aspire à bien plus.
Il faut tout de même reconnaître que l'état, (27% du capital) depuis bientôt trente ans, a mis la Sonatel dans les meilleures conditions d'épanouissement. L'avance considérable que l'opérateur historique sénégalais a prise sur les autres pays au Pib dix fois plus élevé que le nôtre le prouve aisément. La Sonatel est le seul opérateur historique qui ait réussi une croissance externe aussi importante avec un partenaire stratégique qui ne détient pas la majorité du capital. Dans Maroc Télécom, Côte d'Ivoire télécom et Mauritius télécom, l'opérateur français, est, pourtant majoritaire.
Sans doute faut-il aussi le reconnaître, l'apport de France Télécom a été déterminant dans l'expansion de la Sonatel. Même si au demeurant, ce gain de part de marché profite aussi à l'opérateur français dont les chiffres d'affaires hors de France sont estimés à 50%. En valeur absolue, la Sonatel fait aussi une bonne affaire en son volume d'affaires à plus de 800 milliards, dont 450 milliards sont redistribués au Sénégal. Elle reste aussi la première capitalisation boursière à la Bourse Régionale des valeurs mobilières (BRVM) dont la présidence du conseil est assurée par notre compatriote, Pierre Goudiaby Atepa.
Dans un monde globalisé où la conquête de nouvelles parts de marchés, est une exigence de survie, la Sonatel, aurait tort de ne pas adopter une stratégie de relais de croissance. Avec l'appui des dirigeants régimes, elle semble s'y atteler et de manière plus marquer, ces quinze dernières années. L'état sénégalais a donc accompagné la vision des dirigeants sénégalais, sans doute. Mais sans le modèle économique partagé entre Orange et Sénégal, le succès n'était pas forcément garanti.
Néanmoins, la Sonatel devrait garder l'œil sur le viseur, et éviter d'être entraînée dans une logique de diversification et de mutation technologique, nuisible à ses équilibres macroéconomiques et sociaux. La froide logique des grands groupes les conduit souvent à des options purement mercantilistes, au détriment de l'équilibre social et économique d'entreprises stratégiques comme la Sonatel, évoluant dans un contexte, socio-économique particulier.
Les dirigeants de la Sonatel, l'état, l'organe de régulation, ,les partenaires sociaux, les associations de consommateurs ont l'impérieux devoir de garder ce cap de la performance. Le secteur des télécoms fait partie des moteurs de croissance sur lesquels le Plan Sénégal Emergent, compte pour notre décollage économique.
Le journaliste couvrant une cérémonie officielle doit-il, comme toutes les personnes présentes sur les lieux, se lever à l’entrée d’une ou de personnalités en guise d’un témoignage de respect à ces dernières ?
Ou, de manière plus prosaïque, ou moins, le même reporter doit-il plutôt rester assis pour ne pas afficher une obséquiosité qui serait contraire à sa déontologie et à son éthique professionnelle ? La question m’a été posée il y a une dizaine de jours par un journaliste membre d’une rédaction qui a, en son sein, soulevé ce débat avec des points de vue bien divergents de part et d’autre.
Mon avis bien personnel et que j’exprime en une question est : ‘’En quoi le journaliste est-il d’un statut si extraordinaire qui le dispenserait de faire un signe de respect à une autorité ?’’ Je crois qu’il n’y a rien d’obséquieux à ce qu’un journaliste se lève à l’arrivée d’une autorité étatique, politique, religieuse, coutumière… à une cérémonie.
Il n’y a aucun manquement à l’éthique ; et le journaliste qui observerait cette position ne devrait pas être perçu comme ayant manqué à une quelconque déontologie professionnelle. Interprétons l’éthique professionnelle avec moins de rigidité, ne soyons pas des intégristes de la déontologie qui n’exige pas du journaliste des attitudes d’irrespect encore moins de défi à une autorité digne de respect quand il s’agit juste de témoigner respect à cette dernière.
Tout chroniqueur judiciaire habitué à couvrir les sessions des prétoires et autres procès des tribunaux est obligé de se lever en entendant la voix d’un huissier (pas de justice, cependant) annoncer l’entrée de la cour : ‘’La Cour !‘’. Tout journaliste qui n’obéirait pas à cet ordre de se lever risque l’expulsion, pour dire le moins et l’impossibilité de couvrir ce pour quoi il est venu là.
Qui trouverait à redire quand toute une salle se lève pour saluer en silence l’entrée d’un président de la République, d’un premier ministre et autres autorités ? A l’école, les élèves font ainsi. Et au lycée, j’ai eu, en deux années consécutives, un professeur d’histoire-géographie, le regretté Mouhamédy Kaba (frère de l’actuel ministre de la Justice), qui en avait fait une règle imposée à tous les élèves. ‘’De la 6e à la Terminale, on nous a appris à nous lever à l’arrivée d’une autorité’’, avait-il expliqué.
Ne confondons pas le devoir de courtoisie aux rigueurs d’un code de déontologie. C’est le meilleur argument qu’on donnerait aux contempteurs convaincus que les journalistes se croient ‘’citoyens pas comme les autres’’ et qui, par cet amalgame, lui dénient le droit de ne pas aller en prison s’il commet, de bonne foi, une faute commise dans l’exercice de sa profession.
Et puis, quel drôle d’effet cela ferait de voir un ou des journaliste(s) seul(s) restés assis alors que d’autres sont là bien debout pour témoigner respect à la personnalité venant d’arriver ?
Respectueux sans être obséquieux, voilà ce qui peut être la ligne de conduite du journaliste en reportage ou dans son traitement de l’information. Se tenir debout comme les autres pour saluer une autorité, mais pas applaudir (à tout rompre ou de manière) à tout propos de la même personnalité au cours d’une cérémonie ; le journaliste n’est pas là pour la claquette.
En juillet dernier, l’Association des éditeurs et professionnels de la presse en ligne (Appel) du Sénégal a tenu d’importantes assises avec pour objectif la ‘’labellisation et la mise en place d’un cahier de charges dont le respect strict sera obligatoire pour tout promoteur de sites, expliquent les initiateurs cités par l’Agence de presse sénégalaise (Aps). Ledit projet cherche à fédérer tous les acteurs des médias et du droit, afin de bien cerner ces deux problématiques, dans le but d’approfondir le travail d’assainissement et de professionnalisation des médias online’’.
Il faut reconnaître à l’Appel son mérite à travers ses initiatives d’autorégulation pour crédibiliser un secteur où se multiplient dérives et abus sous couvert de journalisme. Et dans les abus, certains sites sénégalais ne sont pas des pires : en Europe et ailleurs, des sites parodiques prétextant l’ironie véhiculent des faussetés reprises sans précaution sous nos cieux et d’autres.
Et ‘’www.nordpresse.be’’ peut être classé dans le Top 10 mondial. Dans la journée du 18 août dernier, le site parodique belge a annoncé la survenue en France d’un coup d’Etat perpétré par des militaires français favorables à Marine Le Pen. Une intox reprise sur Facebook. Et ce fut tellement gros que ça se passait de commentaire.
‘’Notre petite équipe d’amateurs n’a pas toujours le temps de vérifier toutes nos informations, mais nous sommes des gens optimistes et faisons donc confiance à nos sources, écrit nordpresse.be dans une sorte d’avant-propos. Vous pouvez, bien sûr, nous contacter pour rectifier une information, nous ne sommes pas à l’abri d’une erreur. Nous militons également pour plus de réflexion face à l’information et encourageons donc nos lecteurs à vérifier les informations qu’ils lisent sur internet’’. Défense de rire…
Le défi de l’Appel peut être apprécié à travers la définition que le site http://www.abc-netmarketing.com/Pourquoi-certifier-un-site.html donne de la certification qui ‘’simplifie, clarifie, et apporte de la confiance’’. Un autre site,http://www.webaccessibilite.fr/labellisation-accessibilite-des-sites-web..., souligne que ‘’la labellisation accessibilité d’un site Web est un processus visant à vérifier et à garantir la conformité des pages et des fonctionnalités proposées sur un site, au regard de normes définies dans un des référentiels d’accessibilité existants.
Ce processus peut être conduit par l’éditeur du site lui-même, avec ou sans l’aide d’un prestataire externe ; il peut être formalisé par une déclaration de conformité (WCAG 2.0) ou une attestation de conformité (RGAA). Il peut aussi être conduit par une tierce partie indépendante reconnue/accréditée : la labellisation s’apparente alors à une démarche de certification au sens Qualité du terme’’.
Il y aura du boulot, mais la crédibilité de la presse en ligne au Sénégal est à ce prix.
PAR L'ÉDITORIALISTE DE SENEPLUS, SALIOU GUÈYE
MANIPULATION IDENTITAIRE
Être citoyen signifie aussi que l'on est détenteur d'une partie de la souveraineté politique. Et quand on est détenteur de cette souveraineté politique, on peut, par le vote, élire comme on peut se faire élire
Saliou Guèye, Éditorialiste de SenePlus |
Publication 19/08/2016
Il y a des personnages dont l'histoire retient le nom, non pas par leur contribution aux œuvres de construction de leur nation, mais par les idées déstabilisatrices qu'ils auront conceptualisées et distillées pour des raisons partisanes.
De ceux-là, on peut on peut en citer Niadiar Sène avec son amendement en février 1998. Cet amendement faisait passer le nombre de députés de 120 à 140 et l'établissement de la parité entre le scrutin majoritaire et le scrutin proportionnel.
S'y ajoute le député Moussa Sy qui, le 21 novembre 2001, propose un amendement relatif à la prorogation du mandat des élus locaux et à l'installation de délégations spéciales chargées d'assurer la gestion provisoire des collectivités locales jusqu'au 12 mai 2002.
Ibrahima Isidore Ezzan n'échappe pas à cette catégorie, lui qui a proposé le 7 janvier, la loi visant à amnistier tous les auteurs et commanditaires de crimes et délits en relation avec les élections de 1993 à 2004. L'alors pouvoir visait à enterrer définitivement l'implication de certains de ses dignitaires dans l'assassinat du juge constitutionnel Babacar Sèye le 15 mai 1993.
Il y a eu aussi Aminata Tall dont la loi en 2007 a renvoyé les locales de 2008 au mois de mars 2009. Sada Ndiaye complète cette liste noire avec sa loi voté en urgence, le 9 octobre 2008, uniquement pour exclure de l'Assemblée nationale Macky Sall, alors président de l'institution parlementaire.
On pensait que les amendements et autres lois scélérates étaient des exclusivités des deux régimes précédents. Que nenni ! L'actuel régime, comme englué dans des calculs politiciens, commence à instiller dans l'esprit des Sénégalais une disposition qui amenderait l'article LO.114 du code électoral.
En effet, lors de la revue du code électoral, le ministre conseiller personnel du président de la République, Benoît Sambou, plénipotentiaire de la majorité présidentielle, a proposé d'amender l'article LO.114 du code électoral
"la déclaration de candidature doit être accompagnée d'une déclaration sur l'honneur par laquelle le candidat atteste… qu'il est exclusivement de nationalité sénégalaise" par l'addendum suivant : "Tout candidat détenteur d'une autre nationalité doit avoir renoncé à celle-ci, depuis au moins 5 ans, avant le jour du scrutin et en fournir les preuves". Et cela vient compléter l'article 28 de la Constitution sénégalaise qui précise que "tout candidat à la présidence de la République doit être exclusivement de nationalité sénégalaise".
Benoit Sambou, chargé des élections de l'Alliance pour la République, serait-il inspiré par son homonyme Benoît Sacanoud, président de l'ex-CURDIPHE (Cellule universitaire de recherche et de diffusion des idées et des actions politiques du président Henri Konan Bédié), cette fameuse structure qui conglomérait les idéologues du PDCI et autres intellectuels et universitaires qui se sont se sont attelés à la conceptualisation et la manipulation de l'Ivoirité dans les années 90 ?
En effet Benoît Sacanoud avec des intellectuels comme les professeurs Saliou Touré, Niamkey Koffi et autres idéologues du PDCI ont conceptualisé un code électoral où transparaissent les germes de l'Ivoirité. Le 23 novembre 1994, soit presque un an après la mort du président Félix Houphouët-Boigny, le nouveau code électoral ivoirien adopté dispose en son article 49 que "nul ne peut être élu président de la République, s'il n'est ivoirien de naissance, né de père et de mère eux-mêmes ivoiriens de naissance".
Et pour contrer la candidature éventuelle de l'ex-Premier ministre ivoirien Alassane Ouattara, les conditions d'éligibilité sont corsées. Dans le nouveau code électoral, outre la nécessité d'être Ivoirien et de parents ivoiriens, le candidat à l'élection présidentielle doit désormais justifier d'une part "d'une présence continue sur le territoire ivoirien les cinq années qui précèdent l'élection" et d'autre part "ne s'être jamais prévalu d'une autre nationalité".
En effet, Alassane Ouattara a effectué ses études secondaires en Haute-Volta (devenu Burkina Faso) et, selon ses opposants, il a travaillé à la Banque centrale des États d'Afrique de l'Ouest (BCEAO) sous le quota voltaïque. En sus il est retourné, en juillet 1994, directeur général adjoint du FMI avec sa résidence à Washington et les idéologues de la CURDIPHE affirment que son père est d'origine burkinabé.
Aujourd'hui quand on évoque parallèlement l'Ivoirité qui a fracturé la Côte d'Ivoire et semé les graines d'une haine tenace entre citoyens d'un même pays et cette Sénégalité dont les miasmes putrides et ethno-nationalistes s'exhalent de la proposition croupie de Benoit Sambou, certains militants de la mouvance présidentielle clament que la comparaison est inappropriée.
Mais ce qu'il faut savoir, c'est que ceux qui ont conceptualisé l'Ivoirité soutenaient au tout début qu'il s'agissait d'un concept intégrateur alors qu'il était exclusiviste. Dans l'ouvrage-manifeste de la CURDIPHE paru 1996 et intitulé L'Ivoirité ou l'esprit du nouveau contrat social d'Henri Konan Bédié, le professeur Saliou Touré soutient :
"Contrairement à certaines opinions, la notion d'Ivoirité n'est ni sectarisme étroit, ni expression d'une quelconque xénophobie; elle est la synthèse parfaite de notre histoire, l'affirmation d'une manière d'être originale, bref, un concept fédérateur de nos différences". Pourtant dans le même ouvrage son collègue Niamkey Koffi défend que "pour construire un "Nous", il faut le distinguer d'un "Eux". Il faut parvenir à établir la discrimination "Nous / Eux" d'une manière qu'il soit compatible avec le pluralisme des nationalités."
"L'Ivoirité apparaît comme un système dont la cohérence même suppose la fermeture. Oui, fermeture… Fermeture et contrôle de nos frontières : veiller à l'intégrité de son territoire n'est pas de la xénophobie. L'identification de soi suppose naturellement la différenciation de l'autre et la démarcation postule, qu'on le veuille ou non, la discrimination. Il n'est pas possible d'être à la fois soi et l'autre". Finalement le concept de l'Ivoirité qui prétendait être intégrateur et unificateur est devenu le ferment d'une profonde scission de la société ivoirienne.
Quant à l'amendement de circonstance "Tout candidat détenteur d'une autre nationalité doit avoir renoncé à celle-ci, depuis au moins 5 ans, avant le jour du scrutin et en fournir les preuves" proposé par Benoit Sambou, il vise, sans circonlocution, à écarter de la future compétition présidentielle Abdoul Mbaye et Karim Wade, deux candidats sérieux qui peuvent compromettre les chances d'une élection au premier tour du président sortant Macky Sall. In fine, notre pays court le risque de sombrer dans la méfiance identitaire et les binationaux dont certains le sont involontairement risquent d'être étiquetés Sénégalais de seconde zone.
Si aujourd'hui Benoit Sambou et les bien-pensants de la même étoffe proposent à ce que "tout candidat détenteur d'une autre nationalité renonce à celle-ci, depuis au moins 5 ans, avant le jour du scrutin et en fournir les preuves", il ne faut point être surpris que ces énergumènes proposent de modifier un jour la Constitution en son article 28 par "nul ne peut être élu président de la République, s'il n'est exclusivement sénégalais, né de père et de mère eux-mêmes sénégalais de naissance".
Et pour justifier cette rhétorique identitaire, les concepteurs de cette thèse exclusiviste défendraient que c'est pour la sécurité et la sauvegarde des intérêts de la Nation ainsi que la préservation de notre souveraineté qu'il ne faut pas élire quelqu'un qui ne satisfait une telle disposition.
D'ailleurs ceux qui ont modifié la Constitution du Sénégal en 1992 en introduisant l'adverbe "exclusivement" dans l'article 23 ont été les premiers à ouvrir les brèches d'une discrimination constitutionnalisée. Etre citoyen signifie que l'on fait partie de ce corps politique qui est l'État, peu importe que cela soit par le droit du sol (jus soli) ou du sang (jus sanguinis), que l'on a des droits et des devoirs dans ce corps politique.
Être citoyen signifie aussi que l'on est détenteur d'une partie de la souveraineté politique. Et quand on est détenteur de cette souveraineté politique, on peut, par le vote, élire comme on peut se faire élire. Et voilà que partant de l'existant, les responsables de la mouvance présidentiel par subterfuge politicien veulent assujettir la postulation à la magistrature suprême aux binationaux à une renonciation de sa nationalité cinq ans précédant l'élection présidentielle. Ainsi corréler la nationalité sénégalaise exclusive du citoyen à la plus haute fonction de l'État est une aberration démocratique.
Nombre de pays africains ont été embrasés par cette question nationalitaire "confligène" débouchant sur un rejet d'éventuelle candidature. Ainsi, Benoit Sambou et le pôle de la majorité doivent méditer sur ces propos du conseiller juridique du président de la République, Ismaïla Madior Fall, qui disait à l'émission du grand jury de la RFM du 29 janvier 2012 :
"Ce qui a brûlé la Côte d'Ivoire, c'était le contentieux de la candidature de Ouattara sur l'Ivoirité. Ce qui a brûlé le Togo, c'est le contentieux de la candidature. On a voulu exclure Sylvanus Olympio. La première fois, on a dit qu'il n'a pas produit de certificat médical. On l'exclut, le pays brûle. En matière d'élections présidentielles, il ne faut pas exclure. Il faut faire dans l'inclusion".
PAR L'ÉDITORIALISTE DE SENEPLUS, MOMAR SEYNI NDIAYE
ENTRE DOUTE ET EMBARRAS
Comment Khalifa Sall ne s'est pas rendu compte du manège tanorien ? À l'évidence, Khalifa Sall espérait qu'avec le temps, sa légitimité historique de militant de la première heure et sa sécularité, lui profiteraient
MOMAR SEYNI NDIAYE DE SENEPLUS |
Publication 17/08/2016
Le choix, le 4 septembre des membres élus du Haut Conseil des Collectivités Territoriales (HCCT) démontre une nouvelle fois encore la profonde division des socialistes. La ligne de fracture entre Ousmane Tanor Dieng, le secrétaire général et Khalifa Sall, le Maire de Dakar Ville et chef de file des rénovateurs (comment les appeler autrement ?) s'élargit et s'approfondit.
Au point qu'on peut logiquement s'interroger sur ce qui peut encore les unir, en dehors de l'historique label socialiste, aujourd'hui, si déparé. A la grande surprise, le Président Macky Sall a décidé que son parti ne présenterait pas de candidat à l'élection des trois conseillers de Dakar au HCCT.
On s'imaginait alors, que le PS allait saisir cette perche pour rassembler ses troupes derrière Taxawu Ndakaru. Et du coup amorcer une phase de rabibochage entre les deux camps. Mais voilà que, autre grande surprise, la défection de dix maires et de nombre de conseillers des rangs de Taxawu Ndakaru vient changer les donnes.
Les déserteurs, conduits par un ex-bras armés de Khalifa Sall, Alioune Ndoye, vont-ils emporter les voix de leurs conseillers ? Seront-ils esseulés dans leur démarche de défection ? Il faut certainement attendre le soir du 4 septembre pour en être édifié. Si les trois postes d'élus destinés tout naturellement à l'escarcelle de Taxawu Ndakaru vont à la coalition, il faudra alors comprendre et accepter que l'érosion électorale de Khalifa Sall entamée depuis le référendum du 20 mars, s'intensifie.
Sans doute, le changement de ligne de ces élus, ne serait qu'une tempête dans un verre d'eau, si le clan de Khalifa Sall s'adjugeait le gros lot des trois postes. Et surtout, il serait confirmé que la grande majorité des conseillers reste encore fidèle à Taxawu. En attendant que les législatives de mai 2016, (suffrage direct) viennent certifier ou non l'ancrage populaire du maire de la Ville de Dakar.
Mais d'ores et déjà, l'alignement des dix maires derrière les thèses de Tanor et le sévère argumentaire servi par Alioune Ndoye pour le justifier, affaiblissent sensiblement la posture de khalifa Sall. Directement accusé par le Maire de Dakar Plateau de privilégier son avenir politique, Khalifa Sall doit aussi se passer de l'appui non moins précieux, de Doudou Issa Niasse (Biscuiterie), Ousmane Ndoye (Colobane, Fass Gueule Tapée), Santi Agne, (Sicap) Amadou Samb (Cambérène), entre autres.
Les dures admonestations du Maire Alioune Ndoye, frondeur parmi les frondeurs, contre Khalifa Sall laissent présager une campagne salée menée par le dirigeant la liste de Benno Bokk Yaakaar contre son ancienne coalition.
D'autres édiles de la populeuse banlieue dakaroise, auraient également pris le chemin inverse des élections départementales et municipales en tournant le dos à leur ex mentor. Certes Khalifa Sall peut s'enorgueillir du soutien du tonitruant, Barthélémy Dias (PS, Mermoz) et Cheikh Guèye en rupture de ban avec son parti la LD entichée dans la coalition gouvernementale, entre autres.
Mais, il faut bien le reconnaître, le Maire de Dakar Ville, a déjà du pain sur la planche. Il lui faudra un fort soutien populaire, pour isoler ses désormais adversaires et donner encore plus de crédibilité à sa posture de candidat à l'élection présidentielle de 2017. En attendant, Abdoulaye Diouf Sarr de l'APR, se frotte les mains. Il devrait, contrairement aux promesses de la majorité, diriger une liste de conseiller. Et surtout essayer de tirer le meilleur profit de l'éclatement prévisible du PS, pour prendre des galons et se poser en alternative apériste face à Khalifa Sall, ébranlé par le lâchage massif de ses ex-alliés de Taxawu Ndakaru.
Le Maire de Dakar Ville s'attendait-il vraiment à ce coup de Jarnac ? Sans doute, mais pas de cette ampleur ! En effet, la campagne pour le référendum en avait donné quelques signes avant-coureurs. Le Maire de Dakar Plateau, Alioune Ndoye avait ouvertement évité de suivre son patron, dans le vote en faveur du non. Il avait ainsi fendu l'armure et fissuré le bloc compact de Taxuwu Ndakaru, présenté après les élections de juin 2014, comme le nouveau centre de gravité de l'opposition à Benno Bokk Yaakaar.
L'alliance factuelle réalisée avec Idrissa Seck, (Rewmi), Abdoulaye Baldé (UCS) Cheikh Bamba Dièye (FDBJ), Mme Aïssata Tall Sall (du PS, isolée par sa direction à Podor) lors de ces élections locales, avait tonifié son image présidentielle. Même si on pouvait imaginer qu'un problème d'égo se poserait indubitablement pour le leadership de cette unité d'action, difficilement mutable en unité organique. Et pour cause !
Mais il semblait bien inscrit quelque part dans l'horizon politique du Sénégal, que Khalifa Sall, avait un destin national à assumer. D'atermoiements en hésitations, à force de craindre d'être présenté par le plus grand diviseur du PS, il dé-tricote lentement et sûrement, son image. Le timonier Ousmane Tanor Dieng, lui appliquant sans ménagement la règle machiavélienne de l'isolement stratégique, en le coupant progressivement de ses bases de soutien, tout en le maintenant dans l'appareil.
Comment Khalifa Sall ne s'est pas rendu compte du manège tanorien ? A l'évidence, Khalifa Sall espérait qu'avec le temps, sa légitimité historique de militant de la première heure et sa sécularité, lui profiteraient, face à ces dirigeants de la 35 ème heure, surgis en 1996, forts du seul soutien d'Abdou Diouf. S'il avait revisité le parcours de Moustapha Niasse, Djibo Leyti Ka, Moustapha Kâ et tant d'autres perdus dans les oubliettes socialistes, il aurait une autre idée de l'endurance d'Ousmane Tanor Dieng.
De l'autre côté, en mettant le couvercle sur ses projets (emprunts obligataires, travaux de la place de l'Indépendance), la majorité a fait douter ses partisans, surtout après fait triompher, à tout prix, le oui à Dakar lors du référendum. La désertion de nombre de ses alliés a, de fait, cassé la position dominante de Khalifa Sall et Taxawu Ndakaru, voire leur totale mainmise sur la capitale. Du moins pour l'heure, au niveau des états-majors.
En dépit de son légendaire flegme, le Maire de Dakar Ville, sent tout de même que la terre commence à se dérober sous ses pieds et que sa stratégie de conquête du PS par l'intérieur a pris du plomb dans l'aile. Il ne compte plus désormais que sur la vox populi pour le re-légitimer. Encore faudrait-il qu'il en manifeste la ferme volonté, par une attitude franche et non feinte !
A présent, il ne lui est offert qu'une perspective, forger sa trajectoire, au nom du postulat de "qui m'aime me suive." Ousmane Tanor Dieng en vieux briscard organise son dé-tricotage, et mobilise ses troupes de l'intérieur du pays. A Kaolack, Thiès et autres grandes villes bastion du PS, les structures du parti lasses des querelles byzantines, comment à lui témoigner de leur soutien. La perspective d'une nomination de Tanor à la tête du HCCT, revigore ses troupes, maintenant leur patron, occupera l'envieuse station de quatrième personnage de l'État. En plus de ses deux ministres, vingt députés et une kyrielle de DG et d'ambassadeurs et de PCA.
En circonscrivant ses actions à Dakar, en dépit des tumultueuses tournées d'explication de Barthélémy Dias, Khalifa rate le pari du maillage du territoire et du soutien des bases du PS au sein desquelles, Ousmane Tanor Dieng a installé ses hommes. Mme Aïssata Tall, la téméraire mairesse de Podo l'a appris à ses dépens, pour avoir défié l'indéboulonnable Tanor au poste de SG.
Aujourd'hui, le Maire de Dakar Ville est dans l'embarras. On peut l'imaginer en proie à un doute, conscient que pour la prochaine échéance, (mai 2017), Benno Bokk Yaakaar et le PS déploieront la grosse artillerie pour éroder ses ambitions. Et il y a peu de chance que l'indice de victimisation lui profite, car si le PS met en branle le processus de départage par la base, il risque de perdre toute sa légitimité populaire.
L'arbitrage des militants pourrait bien lui être défavorable. Ce scénario aurait pu être évité s'il avait comme Malick Gackou pris son destin en main et créer les conditions de son envol. Il a choisi la stratégie du pourrissement de l'intérieur, pour isoler Tanor et cueillir tout le patrimoine politique et matériel du parti. Cette voie semble, pour l'heure, avoir fait long feu.
L'élection des conseillers du HCCT, ne peut en aucun fournir un indicateur sur la représentativité de Khalifa Sall. Mais la succession des évènements, ne milite pas en sa faveur. A moins que dans huit mois lors des élections législatives, les électeurs dakarois, lui restituent ce que les apparatchiks, lui ont enlevé. Mais en restant sur ses approches entristes, qui lui ont si peu réussi, on voit mal comment Khalifa Sall assumerait son destin présidentiel.
Lors de la campagne électorale de 2012, le candidat de l'Alliance pour la République (APR) avait fait de la bonne gouvernance son leitmotiv. Ainsi il avait promis en cas d'élection de promouvoir "une gouvernance vertueuse, sobre et performante, apte à favoriser la préservation des ressources et la création de richesse, en vue de l'émergence du Sénégal, dans la stabilité, le renforcement de l'État de droit et de la démocratie".
Élu le 25 mars 2012, il marqua les esprits dans sa première adresse à la nation le 3 avril en réitérant sa bonne volonté à lutter contre la corruption. Il déclara :
"S'agissant de la gouvernance économique, je serai toujours guidé par le souci de transparence et de responsabilité dans la gestion vertueuse des affaires publiques. Je mets à ma charge l'obligation de dresser les comptes de la Nation et d'éclairer l'opinion sur l'état des lieux. Je compte restituer aux organes de vérification et de contrôle de l'État la plénitude de leurs attributions. Dans le même sens, l'assainissement de l'environnement des affaires et la lutte contre la corruption et la concussion me tiennent particulièrement à cœur. A tous ceux qui assument une part de responsabilité dans la gestion des deniers public, je tiens à préciser que je ne protègerai personne. Je dis bien personne ! J'engage fermement le Gouvernement à ne point déroger à cette règle."
C'est ainsi que le président mit en place le ministère de la Bonne gouvernance et une structure chargée de lutter contre la fraude et la corruption. Il s'agit de l'Office national de lutte contre la fraude et la corruption (OFNAC) créé par la loi n° 2012-30 du 28 décembre. Cet instrument de lutte contre la corruption supplée la Commission Nationale de lutte contre la Corruption et la Concussion (CNLCC) qui a fait long feu.
L'Ofnac vient renforcer les corps de contrôle tels que l'Inspection général d'État, la Cour des comptes et l'Agence de régulation des marchés. La remise en service de la Cour de répression de l'enrichissement illicite (CREI) en 2012 pour poursuivre 25 dignitaires libéraux participe de la volonté de la lutter contre la corruption. Et l'adoption de la Loi n° 2012-22 du 27 décembre 2012 portant Code de transparence dans la gestion des finances publiques vient compléter notre corpus législatif et réglementaire en matière de lutte contre la corruption.
En juin 2015, l'État du Sénégal a adopté le Protocole de la Cedeao relatif à la lutte contre la corruption. Cela vient renforcer la Convention des Nations unies contre la corruption dite Convention de Merida et la Convention sur la prévention et la lutte contre la corruption dont le Sénégal est signataire.
Le 2 juin 2015 à Dakar, le chef de l'État Macky Sall présidait la conférence ministérielle sur le renforcement de l'État de droit et la lutte contre la corruption en Afrique. Au cours de cette rencontre, il a réaffirmé sa détermination et sa volonté de poursuivre cette politique de rigueur, de transparence, de bonne gouvernance pour le bien des populations en déclarant : "J'ai demandé au gouvernement de rester ferme sur cette question. De toute façon, moi je ne reculerai pas sur cette question quels que soient les écueils et les résistances en face."
Toutes ces structures de contrôle, ces conventions ratifiées, ces discours de rigueur tenus montrent que la bonne gouvernance constitue dans l'intention la pierre angulaire de la politique du président de la République. Mais force est de constater que depuis son accession à la magistrature suprême, la lutte contre la corruption n'a pas connu les succès escomptés.
Si on analyse depuis 2013 le classement du Sénégal dans les tableaux de Transparency International qui publie annuellement les résultats de l'Indice de Perception de la Corruption (IPC), on se rend compte au niveau continental que l'IPC a stagné entre 2013, 2014, 2015 à la 11e place sur 48 pays, 10e sur 47 pays et 8e sur 46 pays. Et les scores de 2013 à 2015 ont timidement varié. 41/100 en 2013, 43/100 en 2014, 44/100.
Au niveau mondial, c'est la même configuration. 11e /48 pays en 2013, 10e /47 en 2014, 8e /46 en 2015. Concernant les scores, c'est la stagnation : 41/100 en 2013, 43/100 en 2014, 44/100 en 2014. Le Sénégal se trouve toujours dans la zone rouge de la corruption franchissable à partir de 50.
Concernant l'Indice MO Ibrahim de la gouvernance en Afrique (IIAG) 2015, le classement du Sénégal n'a pas varié. De 9e en 2014, notre pays a conservé le même rang cette année sur 54 états. Il faut même noter qu'entre 2014 et 2015, le score global du Sénégal s'est érodé de 1.9, baissant de 64.3 à 62.4. Ce qui constitue une contre-performance dans la lutte contre la corruption.
Ces résultats obtenus pendant ces trois ans de magistère du président Sall ne sont pas à la hauteur des moyens financiers et institutionnels consentis. C'est donc dire que la lutte contre la corruption demeure encore un tonneau des Danaïdes. Aujourd'hui, on se rend compte que le discours présidentiel sur la lutte contre la corruption n'est pas en phase avec ses actions qui consistent à favoriser des situations de corruption. L'implication de la famille présidentielle dans la gestion des affaires publiques en est la plus patente.
Affaire Pétro-Tim
En effet, l'affaire Pétro-Tim dont le "gérant" est Aliou Sall, le frère du président de la République constitue l'une des taches noires de la gouvernance mackyste. En juin 2012, le président de la République et grand-frère a signé un décret pour accorder 90% à Pétro-Tim, la société du frangin et la portion congrue de 10% à l'État du Sénégal.
Mais il se trouve comme l'a souligné l'inspecteur des impôts et domaines, Ousmane Sonko, l'inconnue dans cette concession pour la fouille et la recherche pétrolière demeure le ticket d'entrée donné par Aliou Sall pour obtenir ces 90%. Rappelons que le ticket d'entrée représente l'ensemble des frais, coûts et investissement nécessaire qu'une société doit engager pour s'introduire sur un marché.
Or il est de notoriété publique que non seulement Pétro-Tim Sénégal n'a rien versé pour le ticket d'entrée mais sans effectuer une seule once de recherche, il a cédé ses 90%, par le biais de la société-mère Pétro-Tim Limited, à Timis Corporation à un prix qui demeure encore un mystère. Le fisc du Sénégal a perdu dans cette double transaction plusieurs dizaines milliards.
Mais à y voir de près, Pétro-Tim Sénégal, Pétro-Tim Limited et Timis Corporation appartiennent à une même personne à savoir le milliardaire Frank Timis. Ce dernier a vendu 60% à Kosmos Energy, société d'exploration et de production pétrolière et gazière à hauteur de 200 milliards, en conservant les 30%. Là aussi, rien sur la part due au Trésor sénégalais. In fine, la nébuleuse dans cette affaire inextricable qui fleure la corruption à grande échelle demeure les milliards perdus par le Sénégal au profit de particuliers.
Affaire Bictogo
Dans l'affaire Bictogo, l'État du Sénégal n'a toujours pas dit dans quelle condition, la Société nationale d'édition de documents administratifs et d'identification (SNEDAI) est adjudicataire du marché des visas biométriques avant la résiliation. Certains parlent d'un problème de sécurité mais cette justification du gré à gré ne résiste pas à la vérité.
En 2008, Atos Origin, l'un des principaux acteurs internationaux dans les services informatiques, et Sagem Sécurité (devenu Morpho) du Groupe Safran, leader mondial en solutions d'identité, annoncent avoir été sélectionnés par l'Agence nationale des titres sécurisés (ANTS) à l'issue d'un appel d'offres international, pour assurer la mise en œuvre et le déploiement du système des passeports biométriques sur l'ensemble du territoire français.
Aujourd'hui l'entreprise SNEDAI a récolté la somme de 13 milliards selon le porte-parole du gouvernement Seydou Guèye et 12 milliards selon le ministre des Finances Amadou Ba comme indemnisation après avoir effectué seulement 22 mois de travail.
Mais si le gouvernement du Sénégal respectait le code des obligations de l'administration notamment en son article 29 qui stipule que "toute personne impliquée dans la passation et l'exécution des marchés publics pour le compte d'une autorité contractante, d'un candidat à un marché public ou à un autre titre est tenue de respecter les règles d'éthique concernant en particulier l'absence de participation à toute pratique de corruption active ou passive et doit effectuer toute déclaration écrite relative à cet engagement qui leur est demandée est conformément à la réglementation applicable" Bictogo, impliqué dans le scandale de l'indemnisation des victimes des déchets toxiques de 2006 (raison pour laquelle le président Alassane Ouatarra l'a limogé du gouvernement ivoirien en mai 2012), ne devrait pas bénéficier de ce marché de plusieurs milliards sans appel d'offre.
Dans cette adjudication, la proximité de Mankeur Ndiaye, alors ambassadeur au Mali et de Adama Bictogo, ministre ivoirien de l'intégration à la même période. Selon le site Xibaaru.com le 22 mai 2012, Bictogo est viré du Gouvernement ivoirien pour plusieurs scandales financiers. Mankeur est nommé 5 mois plus tard, en octobre, ministre des affaires étrangères. Il exprime son souhait d'instaurer la réciprocité du Visa. Et quelques semaines après cette annonce, une publication est faite à Abidjan.
La SCPA BANNY, IRITIE & ASSOCIES qui est un cabinet d'avocats près de la Cour d'Appel d'Abidjan, publie cet avis de nomination qui suit : "Aux termes du procès-verbal de l'Assemblée générale ordinaire du 14 Novembre 2012, enregistré à Abidjan le 28 Novembre 2012, sous le numéro registre SSP vol 01, folio 25, n° 295, bordereau n° 295/07, les actionnaires de la société SNEDAI CÔTE D'IVOIRE ont nommé, en qualité d'administrateur, Monsieur ADAMA BICTOGO, en adjonction aux membres actuellement en fonction, pour une durée de six exercices sociaux, soit jusqu'à l'assemblée générale qui statuera sur les comptes de l'exercice social clos le 31 décembre 2018".
Cette publication paraît au journal officiel de la Côte d'Ivoire le mercredi 30 janvier 2013. Et cinq jours plus tard, le 04 février 2013, le Sénégal signe avec la SNEDAI et son nouveau boss Adama Bictogo, pour la production de visas biométriques du Sénégal pour cinq ans renouvelables, dans le cadre d'un BOT.
En regardant de près l'affaire Bictogo, on voit quelques similitudes avec l'affaire Pétro-Tim. Le marché des visas biométriques est attribué à SNEDAI Côte d'Ivoire par le biais de sa filiale SNEDAI-Sénégal dont le directeur Oumar Abdoul Wane se trouve être un cousin du président Sall. Et in fine, le marché est cédé à la société belge Zetes, intégrateur de systèmes paneuropéen de premier plan déployant des solutions à valeur ajoutée dans le secteur de l'identification automatique, pour l'identification des biens et l'authentification de personnes. Finalement SNEDAI n'a servi que de courtier pour que Zetes s'empare du marché comme Pétro-Tim/Timis Corporation à l'endroit de Kosmos Energy.
Autre chose non clarifiée : combien de milliards Bictogo a empoché pendant les 22 mois de service en sus de son indemnisation ? En tout cas, du 1er juin au 30 octobre 2013, rien qu'au niveau de la France, les visas ont généré 458 millions de francs CFA.
Ces deux gros scandales financiers où sont mêlés des proches du président vont à l'antipode de sa volonté et de sa détermination à lutter contre la corruption. Nous ferons abstraction de l'affaire ArcelorMittal, des 273 personnalités gérant un budget de plus d'un milliard et récalcitrantes à la déclaration de patrimoine et autres scandales soulevés par les derniers rapports de la Cour des comptes et de l'Ofnac dont les présumés auteurs de corruption sont protégés par le président de la République. Comme quoi la corruption au Sénégal a encore de beaux jours.
Lors de l’ouverture de l’Assemblée générale de l’Union des magistrats sénégalais (UMS) tenue à SALY les 5 et 6 Août 2016, le Garde des Sceaux, Ministre de la Justice, a fait part aux magistrats de la décision du gouvernement sénégalais de faire passer, à la prochaine rentrée parlementaire, le projet de réforme portant sur le Statut des magistrats et le Conseil Supérieur de la Magistrature (CSM).
Cette réforme, destinée à renforcer les garanties statutaires des magistrats, est naturellement attendue avec beaucoup d’impatience par l’ensemble du corps judiciaire.
La lecture du projet de réforme laisse apparaître beaucoup d’aspects positifs tels que :
- La création de nouveaux emplois judiciaires,
- La réduction de la durée de l’avancement dans l’ordre hiérarchique des magistrats qui peuvent désormais accéder au grade Hors Hiérarchie dès la 18ème année d’ancienneté,
- L’augmentation du nombre de magistrats élus au Conseil Supérieur de la Magistrature,
- L’aménagement d’une voie de recours contre les sanctions prononcées par le Conseil de discipline,
Il nous semble toutefois, au regard des objectifs annoncés, que la réforme comporte des insuffisances qu’il serait utile de redresser.
Ces insuffisances concernent principalement deux aspects : l’indépendance du juge et la gestion de la carrière du magistrat.
DE L’INDEPENDANCE DU JUGE
Deux dispositions nous semblent poser problème :
- L’article 5 relatif à la règle de l’inamovibilité,
- L’article 17 relatif au pouvoir d’avertissement conféré aux chefs de juridiction
A. Les nouvelles dispositions sur la règle de l’inamovibilité
Quand on parle d’indépendance de la justice, il est capital de distinguer ce à quoi renvoie cette notion de ce qui la garantit.
En disposant à l’article 90 de notre Charte fondamentale que, dans l’exercice de leurs fonctions, les juges ne sont soumis qu’à l’autorité de la loi, le constituant sénégalais a entendu donner l’exacte mesure de cette condition, qui exige des magistrats qu’ils s’affranchissent de toute forme d’influence.
Ainsi entendue, l’indépendance renvoie non seulement à une question d’état d’esprit, mais également aux rapports que la justice entretient avec les autres pouvoirs ou groupes de pression.
Cependant, pour être effective, l’indépendance doit être garantie de manière à ce que le juge soit assuré de pouvoir exercer son office en son âme et conscience sans s’exposer à des mesures de représailles de la part de l’exécutif ou d’un quelconque autre pouvoir.
C’est précisément l’objet de l’article 5 de la loi organique n°92-27 du 30 mai 1992 portant statut des magistrats qui pose la règle de l’inamovibilité, les juges ne pouvant en principe être affectés sans leur consentement, sauf en cas de nécessité de service.
Mais cette règle qui est censée préserver l’indépendance du juge en le mettant à l’abri des velléités de représailles du pouvoir exécutif, a toujours été, en pratique, vidée de sa substance par le recours systématique à la notion de « nécessité de service », installant du coup les juges dans une situation très précaire.
Cette situation de précarité dans laquelle se trouvent la quasi-totalité des magistrats, y compris certains chefs de cour,[1]nous paraît incompatible avec la sérénité et l’esprit d’indépendance que requiert la fonction de juger.
Lorsque des membres du conseil supérieur de magistrature, dont le rôle est de veiller au respect des garanties statutaires des magistrats, sont eux-mêmes dans une situation de précarité qui les expose à la colère de l’Exécutif, il devient naturellement difficile pour ne pas dire illusoire, de parler d’indépendance de la justice.
Dans le projet de réforme, de nouvelles dispositions ont été prévues pour remédier à cette situation. C’est ainsi que pour renforcer l’indépendance du magistrat, l’article 5 du statut, devenu article 4, a été modifié ainsi qu’il suit :
Ancien article 5
« Les magistrats du siège sont inamovibles. Ils ne peuvent recevoir une affectation nouvelle, même par voie d’avancement, sans leur consentement préalable.
Toutefois, lorsque les nécessités du service l’exigent, les magistrats du siège peuvent être provisoirement déplacés par l’autorité de nomination, après avis conforme et motivé du Conseil Supérieur de la Magistrature qui indiquera la durée maximum pour laquelle le déplacement est prévu ».
Nouvel article 4 :
« Les magistrats du siège sont inamovibles.
En dehors des sanctions disciplinaires du premier degré, ils ne peuvent recevoir une affectation nouvelle, même par voie d’avancement sans leur consentement préalable, sous réserve des dispositions des articles 89 et suivants.
Toutefois, lorsque les nécessités du service l’exigent, les magistrats du siège peuvent être provisoirement déplacés par l’autorité de nomination,
après avis conforme et motivé du Conseil Supérieur de la Magistrature spécifiant lesdites nécessités de service ainsi que la durée du déplacement et uniquement pour un emploi supérieur ou équivalent à celui qu’ils occupaient précédemment. Cette durée ne peut excéder trois ans ».
L’article 89 auquel renvoie l’article 4, précise que la durée maximale d’exercice de la fonction de chef de juridiction à la tête d’une Cour d’appel, d’un TGI et d’un TI est fixée respectivement à six, cinq et quatre années.
Comme on peut le constater, les modifications envisagées portent sur l’encadrement des affectations pour nécessité de service. Mais à l’analyse, il est aisé de constater que cette modification ne résout pas les préoccupations des magistrats par rapport à la problématique de leur indépendance.
Certes, le nouveau texte a prévu que les nécessités de service doivent être spécifiées et que le juge ne peut être affecté qu’à un emploi supérieur ou équivalent. Mais même si elles ont le mérite d’encadrer l’usage de la notion de nécessité de service, ces deux conditions ne remettent nullement en cause la possibilité pour l’Exécutif de faire déplacer un magistrat jugé « récalcitrant ».
D’une part en effet, l’indication des motifs caractérisant les nécessités de service ne constitue pas une condition suffisamment contraignante pour limiter le recours à cette notion car à supposer même que les motifs avancés ne soient pas convaincants, le magistrat concerné a peu de chance de faire annuler la mesure une fois que le conseil l’a entérinée.
D’autre part, des emplois peuvent être équivalents en droit sans revêtir le même attrait du point de vue des responsabilités et de l’expérience professionnelle qu’on peut en tirer.
Ainsi, avec le nouveau texte, le Doyen des juges pourrait légalement être affecté comme premier substitut ou premier vice-président d’un TGI hors Classe, pourvu que les nécessités de services soient spécifiées.
De même, le président du TI hors Classe de Dakar pourrait se retrouver juge d’un tribunal de grande instance hors classe sans qu’on ne puisse invoquer une atteinte à son indépendance. En tout état de cause, le problème du magistrat réside moins dans la nature de l’emploi auquel le destine la nouvelle affectation que le sentiment de précarité dans lequel le confine la possibilité d’être affecté à tout moment.
Au regard de ces considérations, il nous parait clair que le recours à la notion de nécessité de service, même avec l’encadrement envisagé, contribuera à maintenir le juge dans cette situation de précarité jusqu’ici décriée.
La solution consisterait à notre avis à supprimer toute référence à l’affectation pour cause de nécessités de service et à prévoir, lors de chaque nomination à un poste, une durée maximale d’exercice au cours de laquelle aucune affectation ne serait autorisée sans le consentement de l’intéressé, sauf en cas de faute disciplinaire ou d’empêchement dûment constaté.
A l’expiration de la période, le juge pourrait choisir entre plusieurs juridictions d’affectation.Cette solution aurait l’avantage de concilier le souci de favoriser une nécessaire mobilité professionnelle avec le respect dû à la règle de l’inamovibilité.
L’article 4 pourrait donc, au regard de toutes ces observations, être reformulé ainsi qu’il suit :
« Les magistrats du siège sont inamovibles.
En dehors des sanctions disciplinaires du premier degré ou d’un empêchement dûment constaté, ils ne peuvent recevoir une affectation nouvelle, même par voie d’avancement sans leur consentement préalable, sous réserve des dispositions de l’article 89 du présent statut ».
Bien entendu, l’article 89 devrait être complété de manière à inclure tous les magistrats, chaque poste devant être occupé pour une durée précise.
B. Le pouvoir de donner un avertissement conféré aux chefs de juridictions
Le projet consacre une innovation à travers l’article 17 qui dispose que : « En dehors de toute action disciplinaire, les chefs de cour ont le pouvoir de donner un avertissement aux magistrats placés sous leur autorité. L’avertissement est effacé automatiquement du dossier au bout de trois ans si aucun nouvel avertissement ou sanction disciplinaire n’est intervenu pendant cette période ».
A la lecture de ces dispositions, on ne peut manquer de s’interroger sur l’opportunité d’une telle innovation dans le cadre d’une réforme censée renforcer l’indépendance des magistrats.
Il nous semble au contraire que, tel qu’il est prévu, ce pouvoir risque de constituer une sérieuse entorse à leur indépendance.
En effet, l’article n’indique ni les motifs pouvant justifier un avertissement, ni la procédure à suivre avant d’en arriver à cette sanction. En outre, la possibilité de faire un recours n’est pas évoquée. Ainsi, un juge peut se retrouver avec un avertissement inscrit au dossier sans avoir été entendu ni eu la possibilité de faire un recours. Or, nul ne peut avoir la garantie que tous les chefs de juridiction auront en permanence suffisamment de sagesse pour ne pas abuser de ce pouvoir.
Il est certes louable de chercher à asseoir l’autorité des chefs de juridiction. Mais tout doit se faire dans le respect des règles qui garantissent l’équité dans les procédures administratives ou disciplinaires, à savoir le respect du principe du contradictoire et le droit au recours. A cet égard, nous pensons qu’il vaudrait mieux, à l’instar du statut général de la fonction publique,[2]faire de l’avertissement une sanction disciplinaire soumise au même régime que les autres sanctions.
S’agissant des magistrats, le conseil de discipline devrait être la seule instance habilitée à prononcer une mesure de sanction dans le cadre d’une procédure juste et équitable.
Par ailleurs, il nous semble que la réforme envisagée ne garantit pas suffisamment de transparence dans la gestion de la carrière des magistrats.
I. DE LA TRANSPARENCE DANS LA GESTION DE LA CARRIERE DU MAGISTRAT
La réforme contient des innovations destinées à améliorer la gestion de la carrière des magistrats. Il s’agit de :
- l’augmentation du nombre de magistrats élus au sein du CSM. Ce nombre passe de trois à quatre, le deuxième grade ayant droit désormais à deux représentants élus.[3]
- la fixation de la durée maximale d’exercice de certaines fonctions[4]
- L’amélioration des modes d’évaluation du magistrat traduite par une note chiffrée assortie d’une appréciation globale basée sur le professionnalisme et le mérite[5]
Ces mesures sont loin de correspondre à ce que les Magistrats sont en droit d’attendre d’une réforme du CSM digne de ce nom.
C’est le lieu de rappeler que le magistrat Ibrahima Hamidou Dème a publié, il y a quelques mois, un très intéressant article sur la réforme du CSM[6].
Quelques-unes de ses propositions que nous reprenons ici, nous semblent indispensables si l’on veut aboutir à une gestion véritablement transparente de la carrière des magistrats.
A. Publication des postes vacants et appels à candidature
La logique de transparence et de mobilité professionnelle qui justifie la rédaction de l’article 89 fixant la durée maximale d’exercice de certaines fonctions devrait à notre sens, être renforcée. A l’expiration de la durée prévue à l’article 89, les postes devraient être déclarés vacants et soumis à appel à candidature par la Direction des services judiciaires. Les dossiers de candidature, accompagnés des notes d’évaluation, pourraient être soumis à l’appréciation des membres du CSM pour les propositions de nomination.
B. Le pouvoir de proposer aux postes de nomination devrait revenir exclusivement au conseil supérieur de la magistrature
Aux termes de l’article 8 du statut, c’est le Ministre de la justice qui propose aux postes de nomination. Selon quels critères ? Nul ne peut le dire.
Nous pensons que ce pouvoir de proposition aux postes de nomination devrait revenir au conseil supérieur de la magistrature. Car qui, mieux que les membres du conseil, notamment les chefs de cour, est en mesure d’apprécier les qualités des magistrats et de choisir les personnes répondant aux profils recherchés ?
Cette procédure offre l’avantage de pouvoir mettre fin aux supputations sur les motivations qui seraient à la base de certaines propositions de nominations.
L’article 8 devrait donc être modifié dans ce sens.
A défaut de parvenir à une telle modification, les membres du conseil devraient être mis dans les conditions de pouvoir donner leur avis en toute connaissance de cause. Il nous a été donné d’apprendre en effet que dans la pratique, c’est au dernier moment que les membres reçoivent l’ordre du jour.
Or, ils devraient disposer de suffisamment de temps pour vérifier si les mesures envisagées :
- sont conformes au statut
- ne sont pas susceptibles de créer des dysfonctionnements dans les juridictions
- correspondent aux choix de carrière des concernés
Un délai minimum de quarante-huit (48) heures nous semble indispensable pour examiner sérieusement les propositions de nomination.
Il est temps de mettre un terme à la pratique qui consiste à tenir les réunions du CSM en catimini. Certes, pour justifier cette pratique, on évoque souvent des raisons liées aux interventions jugées intempestives auxquelles on assiste à l’occasion de certaines réunions du CSM.
Cependant, force est d’admettre que ce qui encourage le recours à ces interventions, c’est précisément l’absence de transparence et de lisibilité dans les critères qui président aux propositions de nomination. Il n y a pas mieux que la transparence pour mettre fin aux jeux de coulisse, aux frustrations et au sentiment d’injustice qui gagne de plus en plus du terrain chez les magistrats.
En définitive, les amendements que nous proposons sont les suivants :
v Concernant le projet de loi sur le statut
· Modifier l’article 4 dans le sens d’une suppression de toute possibilité d’affectation pour cause de nécessité service et préciser que durant la période prévue par son acte de nomination, le juge ne pourra être affecté sans son consentement que pour faute disciplinaire ou empêchement dûment constaté.
· Supprimer l’article 17 et intégrer l’avertissement au rang des sanctions disciplinaires de premier degré prévues à l’article 18 du projet de Statut.
· Compléter l’article 89 et prévoir l’obligation de procéder à la publication des postes vacants et aux appels à candidature.
v Concernant le projet de loi sur le CSM
· Modifier l’article 8 pour confier le pouvoir de faire des propositions de nomination au conseil supérieur de la magistrature ou, à défaut,
· Prévoir un délai minimum de quarante-huit (48) heures pour la transmission des propositions du ministre aux membres du CSM.
CONCLUSION
Les projets de réforme que le Ministre de la justice a promis de faire passer à la prochaine rentrée parlementaire consacrent sans aucun doute des avancées qu’il faut saluer.
Mais à notre avis, il n’est pas encore tard pour améliorer le texte et envisager des amendements dans le sens d’un renforcement de l’indépendance des juges et d’une plus grande transparence dans la gestion de leur carrière. Car il serait dommage qu’après avoir tant attendu, nous laissions voter un texte qui, par certains de ses aspects, laisserait croire, comme disait Pascal, que : « Ne pouvant fortifier la justice, on a justifié la force ».