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30 avril 2025
Opinions
Par Babo Amadou BA
SORTIR DE «L’ENFER DES PARADIS» FISCAUX POUR RATIONALISER NOTRE BUDGET
La majeure partie de notre dette extérieure est en effet orientée vers des investissements non prioritaires (TER, Aréna, Arène nationale, CICAD, Cité ministérielle, etc.), porte grande ouverte pour les malversations : détournements, surfacturations,etc...
Nous apprenons avec stupéfaction à la une du quotidien Les Échos que « le Sénégal déchire son accord avec l’Ile Maurice ». La vérité est qu’il prévaut au Sénégal un laxisme consternant dans la gestion des finances publiques. Le budget national est plombé par la pléthore de régimes dérogatoires accordant beaucoup trop d’avantages fiscaux (code minier, zone franche, code pétrolier, code des investissements) à des investisseurs, étrangers pour la plupart, sans oublier cette propension incompréhensible de l’Etat à accorder des remises gracieuses aux multinationales. Pendant ce temps, le gouvernement s’endette de manière éhontée pour des dépenses de prestige, tout en privant des secteurs névralgiques du minimum vital. D’ailleurs la gestion calamiteuse de la crise de la Covid-19 l'a prouvé à suffisance !
La majeure partie de notre dette extérieure est en effet orientée vers des investissements non prioritaires (TER, Aréna, Arène nationale, CICAD, Cité ministérielle, etc.), porte grande ouverte pour les malversations : détournements, surfacturations, marchés de gré à gré, rétro commissions, corruption. A se demander si nos dirigeants ont compris la notion de priorité ! À croire qu’ils le font exprès ! Leur sport favori consiste à s’amuser et à dilapider de toutes les façons possibles nos ressources pour se transformer par la suite en mendiants costumés à la porte des autres nations.
UN ÉTAT QUI FAIT JOUJOU AVEC SON LEVIER D’ENDETTEMENT
L’impact du processus de l’endettement sur l’aliénation de la souveraineté économique est connu de tous. Déficit budgétaire = DEPENSES - RECETTES -RECETTES : impôts et taxes, droits de douanes, recettes non fiscales, dons -DEPENSES : intérêt de la dette, salaire et fonctionnement, biens et services En 2005 la dette publique du Sénégal s’élevait à 2465 milliards de F CFA, soit 22.1% du PIB. La communauté financière internationale, y compris les institutions multilatérales et les autorités nationales, ont œuvré en vue de ramener à un niveau soutenable la charge de l'endettement extérieur des pays pauvres les plus lourdement endettés. Le Sénégal a reconstitué sa dette publique, en dépit des annulations de dette enregistrées dans le cadre de l’initiative des Pays pauvres et très endettés (PPTE) en 2005.
A peine 15 ans après, nous voici revenus quasiment au point de départ. Aujourd’hui, le stock de la dette du Sénégal a presque quadruplé pour atteindre 8 231 milliards en 2019, soit 58% du PIB. Il faut noter que la capacité d’endettement n’est pas la capacité de remboursement (ratio de surendettement).
Parler de surendettement d’un État signe qu’une partie de son endettement est jugée « excessive ». Cela est destiné à légitimer des actions telles que : le rééchelonnement des échéances (maintien de la valeur de la créance, mais modification de l’échéancier), des réductions de dette (annulation d’une partie de la dette) des annulations de dette. Et depuis le début de la pandémie du Covid-19, les sollicitations d’une nouvelle annulation de la dette africaine se succèdent, comme un rituel de conjuration de la pandémie.
Après la demande des ministres africains des Finances et l'Union africaine pour l’allègement immédiat de la dette, c’est au tour du FMI et la Banque mondiale, du G20 et du président français Emmanuel Macron, d’annoncer un allègement massif de la dette africaine.
POUR LUTTER CONTRE L’ENDETTEMENT : HALTE AUX PARADIS FISCAUX !
La gestion de nos maigres recettes par nos gouvernants montre toutes les failles dans la gouvernance de ce régime. Au niveau des recettes fiscales, le Sénégal a un faible taux de pression fiscale en 2019 de 17,4% (2434/13983 - recettes fiscales/PIB - LFI2020). Dans les pays développés ce taux varie entre 30 et 40% selon l’OCDE (France 46,2%, Allemagne 37,5%, Japon 30,6%). Au Sénégal, nous pouvons atteindre un taux de pression fiscale de 25%, pour un supplément de 1000 milliards dans notre budget, en exploitant des niches.
La principale niche concerne la révision des exonérations d’impôts accordées à certaines multinationales, la rationalisation des conventions signées surtout avec des paradis fiscaux (Anguilla, les Bahamas, les Fidji, Guam, les Îles Vierges américaines, les Iles Vierges britanniques, Iles Maurice, Iles Caïman Luxembourg, Oman, le Panama, les Samoa américaines, les Samoa, les Seychelles, Trinité-et-Tobago et le Vanuatu, etc…).
A cause du principe de non double imposition, nous perdons beaucoup d’argent. Les paradis fiscaux se caractérisent principalement par des impôts faibles ou inexistants, le manque d’échange d’informations, le manque de transparence, l’absence d'exigence d’activité substantielle et j'en passe ! Une étude de l’organisme américain, The National Bureau of Economic Research (NBER), réalisée en 2017, renseigne que le Sénégal serait la 8e nation ayant plus d’argent dans les paradis fiscaux.
Ainsi ce n’est pas un hasard si, dans notre balance des paiements 2018 (BCEAO 2018), les investissements (IDE + investissements de portefeuille) sortants (1349 milliards) sont supérieurs aux investissements entrants (48.6 milliards). Lors de la rencontre du Club de Paris en 2018, la représentante de l’Allemagne disait ceci « une croissance à grande échelle ne nécessite pas uniquement des investissements étrangers conséquents.
Au contraire les investissements les plus importants sont ceux des sénégalais eux-mêmes dans leur pays. Car, premièrement, il y’a mathématiquement bien plus d’investissements si chaque Sénégalais investit dans son pays, même s’il s’agit seulement de petits montants. Et deuxièmement, le Sénégal émettrait un signal important, permettant de convaincre les investisseurs allemands et d’autres pays que leur argent est bien placé. A ce jour les capitaux privés des Africains sont placé principalement hors d’Afrique. Le développement économique est donc privé d’un montant de l’ordre de jusqu’à 800 milliards de dollars (476 800 milliards de F CFA) d’où la question suivante : pourquoi investir dans un pays dans lequel ses propres citoyens n’investissent pas ? »
Le 15 février 2018, Ousmane SONKO avait pourtant alerté l’Exécutif et l’Assemblée Nationale sur le danger de signer des conventions de "non double imposition" qui lieraient le Sénégal à des pays avec statut de paradis fiscaux (Ile Maurice, Luxembourg, ...). Le député avait soulevé le risque encouru (évasion fiscale) par l'État, du fait des entreprises évoluant dans le secteur pétrolier notamment. C’est le cas de PetroTim Ltd & Petro-Asia New Co qui sont tous les deux domiciliés aux Iles Caïmans sous les matricules 265741 & 270031.
Ainsi si notre Etat attend jusqu’en 2020 pour « déchirer son accord avec l’île Maurice » après avoir supporté une évasion fiscale de plus de 150 milliards, combien avons-nous perdu alors avec les autres paradis fiscaux avant de tenter de combler ce trou par un endettement intempestif ?
Babo Amadou BA
Membre du Secrétariat national à la communication PASTEF
par Mamadou Mbakhé Ndiaye
PLUS JAMAIS ÇA
Dans un pays où on se pâme de notre religiosité, de notre hospitalité légendaire et d’un humanisme que les chefs religieux nous auraient légué, ce qui s’est passé à Malika et à Diamaguène est une catastrophe
Dans un pays où on se pâme de notre religiosité, de notre hospitalité légendaire et d’un humanisme que les chefs religieux nous auraient légué, ce qui s’est passé à Malika et à Diamaguène est une catastrophe. Refuser à des concitoyens décédés d’avoir un enterrement digne après avoir été terrassés par une maladie, qui n’a pas encore dit son dernier mot, renseigne de l’affaissement de notre commun vouloir de vivre-ensemble.
La coupe est pleine. Les responsabilités doivent être situées pour que de tels agissements ne se reproduisent plus. Car le Covid-19 n’a pas encore épuisé toutes ses munitions. La guerre est toujours en cours. Il est vrai que les autorités sanitaires ont trop mis l’accent sur la prévention, sur les gestes barrières.
Des choses qui sont incontestablement nécessaires pour la lutte contre le Covid-19. Mais force est de constater qu’en plus de tuer, le coronavirus stigmatise. Et des informations distillées çà et là dans les réseaux sociaux rajoutent à la confusion. Certains soutiennent que le virus est contagieux même après la mort. Sans dédouaner les populations qui se sont tristement illustrées, il faut dire que la lanterne des Sénégalais n’a pas été bien éclairée sur cette question. Face à la prolifération des fausses informations, les scientifiques avaient l’obligation de communiquer aux Sénégalais qui n’ont pas tous le même niveau de compréhension des informations reçues.
N’oublions pas que nous sommes dans un pays où l’instruction est encore un luxe. Le gouvernement a eu tort de ne pas avoir bien insisté sur l’inexistence de danger liée aux enterrements des morts du Covid-19. Certaines personnes du troisième âgé, interrogées il y a quelques jours dans la banlieue, ont fait part de leurs inquiétudes. Pas de mourir du coronavirus, mais de ne pas avoir droit à un enterrement digne de ce nom. «C’est terrible parce que si tu meurs du Covid-19, tu seras incinéré», soutenait un sexagénaire, il y a quelques semaines. Donc sur ce sujet, l’information n’a pas été audible. Ce qui ne disculpe pas pour autant des populations de Bambey, de Malika ou de Diamaguène qui se sont montrées indignes face à l’épreuve. Car c’est dans l’épreuve qu’on reconnaît les grandes nations et par ricochet les grands peuples. Il ne faut pas qu’au lendemain de cette pandémie, toutes nos certitudes soient à terre.
Les notions de «Ngor», «Suturà» ne doivent pas être de vains mots. Et le contexte actuel est bien propice pour les revitaliser. Dans la langue Bantu, il y a une notion ‘’Ubuntu’’ qui est reprise maintenant par tous les humanistes du monde. Selon l’archevêque sud-africain, Desmond Tutu, quelqu’un d’Ubuntu est ouvert et disponible pour les autres, car il a conscience d’appartenir à quelque chose de plus grand». On ne peut pas revenir en arrière, mais on peut aller de l’avant.
Donc Ubuntu !
PAR Ibrahima Cheikh Diong
COVID-19 ET LEADERSHIP POLITIQUE, DES LEÇONS ÉMERGENTES
Le monde politique ne peut plus être tout simplement comme d’habitude car les politiciens ne peuvent pas continuer à se faire élire sur des promesses, puis s’en détourner et blâmer les autres une fois élus
Le leadership politique est défini par beaucoup comme «la capacité de guider les autres, sans force, et dans une direction ou une décision qui les laisse encore se sentir responsabilisés et accomplis. La tâche du leader est donc d’amener son peuple d’où il est à où il n’a pas été ».
Plus précisément, les quatre styles de leadership les plus connus sont : Autocratique, Participatif, Laisse-Faire et Paternaliste.
Puis vint la pandémie du Covid-19 ! Cette pandémie nous fait tous revisiter la définition ci-dessus et les styles de leadership.
Le leadership politique, à travers le monde, a géré la crise de Covid-19 avec des succès tangibles pour certains et d’autres avec des résultats mitigés. Ceci me fait penser aux qualités que nous devrions rechercher chez nos dirigeants politiques en temps de crise comme Covid 19..
Le monde politique ne peut plus être tout simplement comme d’habitude car les politiciens ne peuvent pas continuer à se faire élire sur des promesses, puis s’en détourner et blâmer les autres une fois élus, surtout en temps de crise.
Voici mes 10 points, Covid 19 oblige, qui guideront désormais mon appréciation des leaders politiques:
1. Une véritable compassion est fondamentale :
La Première ministre de la Nouvelle-Zélande, Mme Jacinda Ardern, a émergé comme la dirigeante la plus efficace au monde pour faire face à la crise de Covid-19, grâce à sa capacité à transmettre une véritable compassion à ses compatriotes.
L’une des innovations d’Ardern a été les fréquents chats en direct sur Facebook qui parviennent à être à la fois informels et informatifs. Nos dirigeants politiques sont, après tout, des êtres humains et exprimer des émotions et de la compassion ne les fait surtout pas ressembler à des dirigeants faibles, mais les humanise tout simplement.
Partout dans le monde, les pertes d’emplois et les citoyens affamés semblent être devenus la norme, et pourtant les familles dévastées qui les sous-tendent méritent toute notre attention. Il est très édifiant et louable de noter un mouvement vaste et spontané à travers le monde avec toutes sortes d’initiatives pour soutenir les sans-abris, les chômeurs, les communautés vulnérables, etc. Cependant, au-delà de ces gestes spontanés, nos dirigeants politiques devraient développer, avec nos impôts, de fortes politiques de sécurité sociale et des programmes de solidarité pour soutenir les plus vulnérables en période de crise. Après tout, cela fait partie des raisons pour lesquelles la plupart ces politiciens, entre autres, ont été élus.
2. Une stratégie nationale concise est importante :
Tout le monde semble reconnaître que le Covid-19 a gagné le monde par surprise. Une question demeure : pourquoi quelques mois après le début de la crise, certains pays ont élaboré des stratégies et des directives nationales claires et concises tandis que d’autres envoient des messages contradictoires à leurs citoyens, maires et autres responsables locaux.
Les États-Unis en sont un bon exemple. Alors qu’après près de 100 000 morts et un taux d’infection instable, les gouverneurs des États exigent toujours une stratégie fédérale et des orientations claires tandis que le gouvernement fédéral continue de les blâmer pour toutes les lacunes constatées. Les grands perdants de ce genre de confrontation politique sont les populations.
En Afrique, le président Paul Kagame du Rwanda est reconnu pour avoir développé une stratégie nationale Covid-19 claire et concise qui a contribué à contenir la pandémie dans son pays.
Il est donc facile de développer des stratégies nationales d’avant crise, mais le véritable leader politique devrait avoir la capacité d’articuler et d’adapter clairement sa stratégie pendant la crise.
3. La transparence rassure :
Certains politiciens sont connus pour gonfler leurs résultats modestes, tout en étant défensifs sur leurs échecs afin d’éviter les retombées politiques négatives. Nous avons vu des pays où les données économiques sont manipulées pour montrer des taux de croissance économique élevés ou des taux de chômage plus faibles pour booster leur image politique.
Malheureusement, manipuler les données scientifiques relatives à la santé pendant une pandémie comme Covid-19 peut être mortel.
Les dirigeants politiques devraient donc être transparents avec leur population en partageant des données fiables et en prenant des décisions de politique publique en conséquence. Covid-19 nous a simplement appris l’importance de la transparence et d’une approche décisionnelle fondée sur la science car elle pourrait sauver des vies. Beaucoup de pays doivent, par exemple, être felicités pour leurs exposés quotidiens sur leur situation de Covid 19 fondés sur les faits par leurs ministères de la Santé.
Au-delà des données scientifiques, la transparence est également attendue pendant les acquisitions de biens et matériels chez les fournisseurs en temps de crise, car nous ne pouvons tout simplement pas nous permettre de faire face à une crise sanitaire comme Covid 19 et à des problèmes de gouvernance et d’éthique en même temps. Le leadership nécessite d’être au-dessus du lot en tout temps.
4. Acceptez la responsabilité avec humilité :
Ce sera long et délicat, après le Covid-19, pour évaluer les succès et les échecs dans la gestion de la crise, aux niveaux local, national, régional et international, et trouver des remèdes pour l’avenir. Pour l’instant, il est largement reconnu qu’en temps de crise de cette ampleur, les paroles de nos dirigeants politiques sont importantes car elles peuvent réconforter et/ou aggraver la situation.
Par exemple, malgré le fait que nous aimerions tous voir un traitement et un vaccin efficaces contre Covid 19, la responsabilité morale exige que nos politiciens s’abstiennent de promouvoir des traitements et / ou des médicaments non testés simplement parce qu’ils sont impatients de montrer quelques succès.
De mauvais conseils médicaux, provenant en particulier de personnes non agréés médicalement, peuvent tuer. Par exemple, le débat sur l’efficacité de la Chloroquine sur les patients infectés de Covid 19 devrait être laissé à la communauté scientifique qui conseillera éventuellement les décideurs politiques sur les actions nécessaires à adopter.
5. L’approche inclusive compte en temps de crise:
Covid-19 a démontré qu’une réponse efficace à une crise de cette nature doit être inclusive (gouvernements, secteur privé, société civile, chefs religieux, etc.). Bien sûr, la vraie démocratie exige qu’un pays accueille des opinions différentes, mais en période de crise majeure qui nous touche tous, se rassembler derrière le drapeau national est la seule issue.
Au Sénégal, par exemple, le président Macky Sall a pu rallier, autour de lui, la plupart des dirigeants politiques, de la société civile, du secteur privé et des religieux pour élaborer une réponse nationale au Covid-19. Bien sûr, cela ne remet pas en cause les obligations législatives et les responsabilités des partis d’opposition, mais la population ne peut tout simplement pas se permettre de voir des gens mourir et souffrir pendant que les hommes politiques se chamaillent.
Les dirigeants politiques devraient donc avoir cette capacité de s’élever et de trouver les mots de consensus en temps de crise pour favoriser la contribution des tous les acteurs politiques, civils, économiques et religieux, entre autres, car une pandémie comme le Covid-19 ne fait pas de discrimination.
6. Le temps est venu de favoriser les solutions locales :
Nous avons vu des pays, y compris des pays développés, lutter pour obtenir les équipements de protection individuelle (EPI) dont ils ont tant besoin, car ils proviennent principalement de la Chine. Les systèmes mondiaux de la chaîne d’approvisionnement ont simplement été perturbés car personne ne semble avoir prévu qu’il y aurait un moment où le monde entier s’approvisionnerait en même temps auprès de la Chine.
Pour aggraver les choses en Afrique de l’Ouest, la France a décidé d’arrêter les exportations de certains médicaments essentiels vers nos pays en vue de satisfaire leurs propres besoins. Par conséquent, en l’absence d’une industrie pharmaceutique locale viable, nous nous dirigeons vers une perturbation majeure de nos systèmes de chaînes d’approvisionnement médical. Par conséquent, il est temps que nos dirigeants politiques dépassent les slogans industriels et commencent à encourager sérieusement le développement de solutions industrielles locales pour le secteur de la santé. Après tout, nous avons le capital humain, les entrepreneurs et les instruments de financement pour produire localement les médicaments dont nous avons besoin. Il suffirait tout simplement d’un engagement politique fort et soutenu, et d’un environnement des affaires favorable.
7. Les bons dirigeants sont bien entourés :
Personne ne s’attend à ce que nos dirigeants politiques sachent tout, mais tout le monde s’attend à ce qu’ils s’entourent de compétences nécessaires pour prendre de décisions idoines au nom du peuple.
Le charisme pourrait peut être vous faire élire mais gouverner nécessite une expertise et un savoir-faire, donc un vrai leader politique à devrait, avec humilité et modestie, bien s’entourer. Avoir des gens plus intelligents autour de vous et leur créer un espace pour mettre en valeur leurs talents ne fait que vous élever en tant que leader.
Il est fondamental de reconnaître que certaines des personnes qui ont contribué à faire élire sont pas forcement outillées à vous aider à gouverner, c’est donc uniquement en élargissant vos horizons que vous pouvez attirer des talents externes, surtout en temps de crise.
8. Prendre des décisions saines :
Les données de Covid 19 ont montré que les pays qui avaient hésité à fermer leurs aéroports et leurs frontières a temps pour contenir le virus et à faire face aux cas existants ont le plus souffert. En période de crise, la capacité de prise décision de nos dirigeants politiques peut sauver des vies. Bien sûr, il y a une différence entre prendre une bonne décision et la précipitation dans la prise de décisions, mais en cas de crise nous attendons de nos dirigeants politiques qu’ils prennent des décisions éclairées basées sur des informations avérées.
Columbia University (mon ancienne université) a dévoilé une étude pertinente qui montre que les États-Unis auraient pu sauver plus de 30000 vies si la distanciation sociale et le port de masques étaient strictement observés et obligatoires au début du virus aux États-Unis.
9. Gouverner c’est anticiper :
Gouverner, c’est bien anticiper, mais peu importe à quel point vous prévoyez une catastrophe, elle peut et va toujours frapper. Par exemple, qui aurait pensé que Covid-19 paralyserait le monde comme il l’a fait. La gestion des risques devrait faire partie de tout plan de développement national.
Heureusement, il existe des instruments qui permettent aux pays de se préparer, de se rétablir et de réagir en cas de catastrophe naturelle. En Afrique, par exemple, l’Union africaine a créé une agence spécialisée (www.africanriskcapacity.org) pour aider ses pays membres à renforcer leurs compétences en matière de gestion de catastrophes naturelles (sècheresse, cyclone, épidémie, etc.) à et à accéder à des instruments de financement innovants.
10. Un leader rassemble ses troupes :
Une des choses que les pays ne peuvent simplement pas se permettre en temps de crise comme Covid-19 est une réponse gouvernementale chaotique par laquelle un ministre énoncerait des lignes directrices et un autre dirait le contraire, laissant la population générale s’interroger sur la position officielle du gouvernement.Ce genre de situation est tout simplement une recette pour un désastre, donc je suis un ardent défenseur d’un porte-parolat bien informé ou un groupe de travail du gouvernement qui peut parler d’une seule voix.
Par exemple, le gouverneur de l’État de New-York a gagné tant d’admirateurs aux États-Unis et au-delà pour ses exposés concis, clairs et simples, au cours desquels il est entouré de tous les services techniques concernés. Au Sénégal, le Ministre de la Santé briefe la nation quotidiennement, entouré de ses services techniques. En période de crise comme le Covid-19, la concurrence politique et le positionnement devraient être au dernier rang et laisser la place à l’efficacité, aux résultats et à la franchise.
Disons simplement qu’il n’y a pas de leaders politiques parfaits mais en tirant les leçons du Covid-19, nous pouvons au moins nous attendre à ce que nos dirigeants politiques, en temps de crise, affichent certains de ces attributs : compassion, réflexion stratégique, transparence, responsabilité, état d’esprit unificateur, champion des solutions locales, esprit d’équipe, approche décisionnelle éclairée, excellentes compétences en planification et en gestion
Dans le monde du marketing politique et de la communication, vous pouvez vous faire élire sur des slogans et promesses, mais gouverner, en particulier en période de crise, nécessite plus que cela car la population est devenue de plus en plus exigeante en termes de clarté, transparence, résultats, compassion, d’humilité, valeurs et civilité
Restez en sécurité !
PAR Mouhamadou Moctar Sourang
RÉFLEXIONS ET PROPOSITIONS A PROPOS DE L’OUVERTURE PROGRAMMÉE DES CLASSES
Comment attendre des écoliers de bas-âge l’observance stricte des gestes-barrières quand ils sont livrés à eux-mêmes, à l’intérieur comme à l’extérieur de leurs établissements, quelles que soient par ailleurs les mesures d’encadrement prises ?
La situation de l’Ecole en cette période de pandémie du Cornavirus, en particulier à la veille de la réouverture des classes d’examens, décidée par le gouvernement pour le 02 juin prochain nous inspire quelques réflexions que nous voulons partager.
La faisabilité de la décision, au vu de la complète désorganisation qui prévaut dans les prémices de sa mise en œuvre, apparait plus que problématique, voire irréalisable. Il y a lieu de s’alarmer de ce que les opérations entreprises pour le convoyage des enseignants à leurs lieux de travail respectif soient sujettes de risques fort élevés de circulation du virus que l’on est censé combattre ! Toutes choses qui ne rassurent pas les parents d’élèves et inquiètent les enseignants eux-mêmes. Comprenant le souci des autorités publiques de « sauver » l’année scolaire, nous les invitons instamment à étudier les réaménagements idoines à opérer dans les meilleurs délais.
A cet égard, il nous parait particulièrement dangereux d’inclure dans cette réouverture imminente de l’Ecole, les classes du niveau élémentaire. Comment en effet, attendre des écoliers de bas-âge l’observance stricte des gestes-barrières quand ils sont livrés à eux-mêmes, à l’intérieur comme à l’extérieur de leurs établissements, quelles que soient par ailleurs les mesures d’encadrement prises ? Une telle décision prend-elle en compte le dénuement de bon nombre des établissements scolaires qui peuvent manquer même de toilettes adéquates, voire d’eau courante ?
Une telle décision, telle qu’elle est déclinée, pose dans sa conception même, le problème d’égalité de chances dès lors que les élèves vivant avec une maladie chronique sont exclus dans le processus. Qu’en sera-t-il alors de leur sort, de la suite de leur cursus scolaire ?
Par contre les élèves de Terminale, postulant au baccalauréat, sont suffisamment matures pour être pris en compte et organisés pour une reprise des cours en début juin. L’examen du BAC pourrait ainsi être envisagé au mois d’août, pour permettre aux nouveaux bacheliers de postuler aux grandes Ecoles de pays étrangers, avant le début de la nouvelle année académique.
Pourquoi ne pas attendre le mois de septembre le temps d’évaluer la situation et de tester l’expérience des terminales pour la réouverture des autres classes, tout en prévoyant d’organiser les contrôles du second semestre de l’année en cours et les évaluations de passage en classe supérieure au mois de Novembre ?
La prochaine ouverture des classes pourrait alors être envisagée au plus tard en janvier 2021.
Par Moussa Kamara
CHIENLIT !
A lire les gazettes, nous avons l’impression qu’il y a des sénégalais qui ignorent ou défient les lois de la République. Tantôt un groupe d’individus se lève pour décréter tout bonnement une interdiction d’inhumer !
Qui l’eut cru ? Une grève en pleine pandémie de Covid-19 est la menace brandie par des transporteurs dirigés par un Gora Khouma sans peur ! Grève de soutien clament-ils mais le lien est vite fait avec les fonds de soutien généreusement distribués ailleurs.
Le sénégalais raffole d’argent depuis vingt ans que les Libéraux règnent. Nous avons tous vu le précédent résident distribuant abondamment et généreusement des millions à d’heureux sénégalais et étrangers.
Des lutteurs aux footballeurs et basketteurs sans compter les sinistrés et victimes des inondations dignement logés à Jaxay ; les planches à billets avaient bien fonctionné. Nonobstant le cactus et le rictus créés par l’opération Segura, foireuse et malheureuse, l’opinion découvrait que la corruption était une règle non écrite chez plusieurs de nos dirigeants. Alors avec les sous du fonds Convid-19, tous les pauvres diables du Sénégal se croyaient élus.
Déçus de n’avoir rien reçu, ils s’adonnent à une forme de bataille. Sans travail, pas de graille pour ces chauffeurs qui content leurs malheurs devant les micros et dans les studios. Avec cette grève, ils espèrent être entendus et reçus pour de futures négociations. Rien que ça !
A lire les gazettes, nous avons l’impression qu’il y a des sénégalais qui ignorent ou défient les lois de la République. Tantôt un groupe d’individus se lève pour décréter tout bonnement une interdiction d’inhumer !
En vertu de quoi ? C’est notre quartier, pas d’étrangers ni de victimes du coronavirus pour reposer éternellement sans notre quitus ! Quand les ignares prennent la barre, on en arrive à ce stade d’incompréhensions qui entrainent des exactions sur les biens des forces de l’ordre, les ambulances des sapeurs-pompiers en l’occurrence.
Toujours dans cette chronique sur la pandémie, y a aussi le cas Rangou. Cette fille qui se vend sur le Net par des photos suggestives a, au mépris de tout, convoqué ses gogos pour un « yendu » torride dans un hôtel de la place. Et la DIC d’intervenir pour faire tout capoter (sans jeu de mots !). A ce rythme de transgression des règles de la vie faut-il craindre la chienlit ?
Par Mamadou Oumar NDIAYE
LE BON PLAISIR DU ROY MACKY SALL…
Au moment où on quémande des annulations ou des remises de créances, donc, on octroie sur le plan intérieur des privilèges coûteux pour les finances publiques. Macky a l’art de danser à contretemps
Comme nous l’écrivions il y a deux semaines, au lendemain de sa décision d’assouplir certaines restrictions prises dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire, le président de la République a décidément le talent inouï de danser à contretemps ! Nous avions notamment moqué sa valse à contretemps.
En effet, alors que la pandémie était au plus bas et n’avait encore fait aucune victime, il avait pris des dispositions de confinement ubuesques. Et lorsque la même pandémie grimpait allègrement vers les sommets après avoir fait des dizaines de morts, il avait entrepris de déconfiner !
En tout cas assoupli son confinement. Un peu comme les banquiers dont on dit qu’ils vous prêtent un parapluie par beau temps et vous le retirent dès que l’orage éclate ! Mieux, et pour en revenir à notre président, alors que toutes les troupes de ce pays sont au front de la lutte contre le coronavirus, le Généralissime qu’il est jouait tranquillement au Ludo avec sa famille. Et le faisait savoir au peuple moutonnier que nous sommes…
Eh bien jamais deux sans trois puisque c’est encore en plein état d’urgence sanitaire, alors que ses gouverneurs et préfets avaient fermé tous les « loumas » du pays, accentuant la misère dans le monde rural, et décrété une ouverture alternée kafkaïenne des marchés des autres localités, précarisant davantage les acteurs de l’informel, alors que des secteurs entiers de l’économie sont à l’arrêt ou agonisent, c’est donc ce moment particulièrement grave que notre Connétable a choisi pour encore octroyer des privilèges. A une courtisane cette fois-ci. Car enfin, quelle urgence y avait-il à sortir un décret pour nommer Mme Aminata Tall présidente honoraire de ce machin qu’est le Conseil économique, social et environnemental ? Je n’entrerai évidemment pas dans la querelle byzantine voire picrocholine consistant à savoir s’il y a eu un faux décret ou un décret falsifié voire un décret détourné de son objet.
Peu m’importe également que le décret instaurant l’honorariat pour les anciens présidents de ce Conseil ait été signé par l’ancien président de la République, Me Abdoulaye Wade. Au demeurant, je savais bien que ce dernier avait octroyé ce statut particulièrement juteux en termes pécuniaires et d’avantages matériels à son pote big Fam. Là n’est pas le problème !
Il se trouve dans le fait que même si Wade, avec sa prodigalité légendaire, à eu à donner un tel statut et les privilèges qui vont avec, le président Macky sall, plébiscité par les sénégalais pour, entre autres missions, mettre fin aux dérives dépensières de son prédécesseur, ait pu continuer à distribuer à tour de bras des privilèges ruineux pour les finances publiques. C’est encore plus grave à ce moment précis où, investi des pleins pouvoirs de chef de guerre, il est chargé de mener la bataille contre un terrible ennemi invisible appelé Covid-19.
Une guerre pour les besoins de laquelle il a organisé un grand « mastata fi sabililahi » au niveau national ayant parfois pris des allures d’un braquage genre « la bourse ou la vie ! » pour financer son plan de riposte contre la pandémie. Le geste du président de la République fait d’autant plus désordre et est d’autant plus inopportun qu’il est intervenu après que le même président Macky sall s’est autoproclamé « leader » de la cohorte de présidents africains mendiants mise sur pied pour solliciter de la communauté internationale l’annulation de la dette publique des pays du continent.
Au moment où on quémande des annulations ou des remises de créances, donc, on octroie sur le plan intérieur des privilèges coûteux pour les finances publiques. Macky a l’art de danser à contretemps, on vous dit. Et pas seulement du « wango » ou du « wathiatha » !
Privilège royal
Car enfin, président honoraire du Conseil économique, social et environnemental (Cese) ce n’est malheureusement pas qu’un titre ronflant. C’est aussi une foultitude d’avantages qui, cumulés, coûtent bonbon au contribuable. Et c’est justement cela qui heurte la morale et insulte l’éthique en plus d’être carrément indécent.
Pendant que le peuple se serre la ceinture, mange son pain noir et est même à l’article de la famine dans le monde rural, tandis qu’une grave récession se profile, notre Président, dont on pensait qu’il était tout entier absorbé par la guerre contre la pandémie et ses terribles conséquences sanitaires et économiques, trouve non seulement le temps de jouer au Ludo mais encore de faire les samba Linguère ! Car tel est son bon plaisir… Côté symboles et provocations — voire insultes — au peuple, je ne vois que deux précédents illustres dans l’Histoire qui ressemblent, toutes proportions gardées bien sûr, à l’acte que vient de poser en catimini le président de la République.
Le premier, c’est lorsque la reine de France Marie-Antoinette avait déclaré, soit avec morgue soit par sottise, ceci : « Le peuple n’a plus de pain ? Il n’a qu’à manger de la brioche ! » Une phrase prêtée à tort à l’Autrichienne (Jean-Jacques Rousseau l’aurait mise dans la bouche d’une princesse d’un de ses livres) même si d’aucuns soutiennent qu’elle aurait contribué à déclencher la Révolution française !
Le second s’était passé en Ethiopie, pays qui abrite depuis 1963 le siège de l’Organisation de l’Unité Africaine (OUA) devenue UA. En 1973, pendant que le pays était frappé par une terrible sécheresse et que les gens mouraient de faim, la Télévision montrait le Négus (ou empereur) Haïlé sélassié en train de donner des quartiers de viande de bœuf à ses lions !
Un geste en comparaison duquel, sans doute, le privilège du roi Macky sall à une courtisane déchue peut apparaître à priori comme un péché véniel ou un geste banal. A priori seulement !
par Abdou Latif Coulibaly
LES RÈGLES DU JOURNALISME SONT-ELLES DIVISIBLES ?
EXCLUSIF SENEPLUS - Le texte publié il y a moins d’une semaine par le Monde Afrique sur le pétrole sénégalais, est un tissu d’erreurs factuelles qui étonnent à plus d’un titre
J’ai lu dans la journée du mercredi 27 mai 2020 un article publié sur le site du Monde Afrique et portant sur le secteur pétrolier au Sénégal. Titré : « Au Sénégal, les perspectives d’exploitations pétrolières s’éloignent une fois de plus », et rédigé à deux mains par Théa Ollivier (Dakar, correspondance) et Mariama Darame, le texte qui a été publié en ligne, il y a moins d’une semaine, est un tissu d’erreurs factuelles qui étonnent à plus d’un titre. Nul n’a besoin d’une lecture attentive pour s’en rendre compte, tant celles-ci nous paraissent grossières. On pourrait croire que les deux rédacteurs de cet article ont voulu ériger en faits, des opinions radicales pour construire on ne sait quelle vague de discrédit autour des politiques économiques. Au fond de moi, je me suis posé la question de savoir : est-ce que certains journalistes en Occident, n’en sont-ils pas arrivés, dès lors qu’ils parlent de l’Afrique, à croire que les règles qui s’appliquent à leur métier peuvent être divisibles. Une divisibilité qui fonctionnerait selon qu’on est en Europe ou en terre africaine. Sinon, Théa Olivier et la personne avec qui il a travaillé, auraient pris le minimum de précautions, pour vérifier auprès des autorités du pays le fondement des fausses informations publiées sur leur site. Quand c’est en Afrique, le doute professionnel s’envole, l’empathie qui assure une bonne communication avec tout interlocuteur et la distance qui sauvegarde et protège la neutralité et l’objectivité procédurale ont alors vite fait de déserter le terrain. Je n’ai nullement envie de dénoncer des comportements ou de répondre à des journalistes qui ont estimé devoir faire leur travail comme ils ont cru devoir le faire au Sénégal, mais j’ai plutôt envie de débattre avec eux, pour que je sois définitivement édifié, quant à la question de savoir si le journalisme a changé au cours de ces dix dernières années. Je sais que l’Internet est passé par là, toutefois, même si on constate impuissant les effets dévastateurs que ce nouvel outil porte à la crédibilité de ce métier, je ne pourrais me résoudre à l’idée que ce que le site en ligne du Monde Afrique a écrit est normal.
Quelle est la première erreur factuelle notée ? Un expert du nom de M. Omgba, consulté par les journalistes, je me demande il est expert de quoi, affirme de façon péremptoire : « Le rêve pétrolier et gazier s’éloigne encore un peu plus pour les Sénégalais. Initialement prévue en 2020, l’exploitation des deux principaux projets d’hydrocarbures, le champ pétrolier Sangomar offshore et le gisement gazier Grand Tortue Ahmeyim (GTA) partagé avec la Mauritanie – tous deux découverts en 2014 – avait déjà été retardée à trois reprises. La pandémie de la Covid-19 vient à nouveau de repousser d’un an, à la fin de 2023, le lancement de la production commerciale ». Nulle part dans les documents officiels publiés par le Sénégal et ses partenaires, une exploitation des hydrocarbures n’a été envisagée en 2020. Même pas imaginé. La date d’exploitation le plus tôt avancée a été fixée pour l’année 2022. On a d’ailleurs le plus souvent parlé de fourchette : 2022-2023. On parle d’erreur factuelle, pour éviter d’avoir un gros mot pour qualifier la liberté prise avec les faits. Les opérations de développement (construction des plateformes d’exploitation) ayant démarré en 2019, comment le Sénégal pouvait-il attendre des recettes pétrolières en 2020 ? En fait, je constate, pour ma part, que ce sont les journalistes, eux-mêmes, qui se trompent quand, ils pensent pouvoir avec leur expert, informer sur le pays de la manière dont ils l’ont fait. La question de perte de recettes pétrolières qui porterait un rude coup aux attentes du Sénégal est une vue de l’esprit de l’expert du site Monde Afrique, une pure invention. Nulle part dans la loi de programmation triennale qui détermine les investissements publics au cours des trois années (2017-2020) des recettes provenant du pétrole ou du gaz n’ont été prévues, encore moins dans le budget en cours (2020). Pour le collectif budgétaire en cours, le tableau ci-après donne le profil des prévisions de recettes : « Le budget général pour l’année 2020 s’élève à 3 122,55 milliards FCFA en recettes et à 3 573 milliards de FCFA en dépenses. Les recettes budgétaires sont composées des grandes masses suivantes : recettes fiscales : 2 675 milliards de FCFA (en hausse de 9,9% par rapport à la LFR1) ; recettes non fiscales : 124 milliards de FCFA (en hausse de 0,5% par rapport à la LFR1) ; recettes FSE : 30 milliards de FCFA ; - tirages sur dons - projets : 260,5 milliards de FCFA ; - dons budgétaires : 33 milliards de F CFA ». Nulle part ne figurent des recettes provenant de nos champs gaziers ou pétroliers.
Quelle est la deuxième erreur factuelle ? L’expert consulté par le Monde Afrique prétend que, dès que l’annonce de découvertes d’hydrocarbures a été faite, les salaires des fonctionnaires ont été augmentés. Une augmentation de salaire n’est pas intervenue dans la Fonction publique sénégalaise depuis le 11 août 2009. La dernière augmentation est intervenue dans ce secteur public, à la suite d’un protocole tripartite signé entre les centrales syndicales, le Patronat et l’Etat. Ce qui est constant, c’est une baisse d’impôts de l’ordre de 15000 FCFA, en moyenne qui avait impacté tous les travailleurs du secteur public et privé. Cette baisse a été actée en 2013, à la suite de la refonte globale du Code général des Impôts. La baisse des impôts des particuliers avait été prévue dans le protocole tripartite tantôt évoqué. Le Monde Afrique confond (sciemment ?) l’augmentation de salaire négociée et actée dans le secteur privé en 2019, avec la Fonction publique. Signalons que le secteur privé était resté dix ans sans aucune augmentation des traitements.
Troisième erreur factuelle. Écoutons l’expert du site du Monde Afrique pour comprendre : « Depuis 2012 et l’arrivée au pouvoir du président Macky Sall, la dette publique du Sénégal est passée de 42,9 % à 67 % du PIB en 2020, selon le Fonds monétaire international (FMI). Cet accroissement s’explique d’abord par les investissements massifs dans des projets d’infrastructures et de développement réalisés dans le cadre du Plan Sénégal émergent (PSE), mais pas seulement. Le pays a augmenté les salaires des fonctionnaires dès 2018. Il a aussi mis en place des subventions en faveur du secteur énergétique, malgré une hausse des cours », précise M. Omgba. Quand Macky Sall arrivait au pouvoir, la subvention accordée par l’État au secteur de l’énergie dépassait les 200 milliards par an. Il a maintenu les subventions qui sont allouées à ce secteur depuis pratiquement le premier choc pétrolier de 1973. Comment un expert qualifié peut-il ignorer cela ? En 2011, au-delà des subventions actées chaque année, les locations de barges de production électrique pour suppléer les défaillances de Senelec en la matière, avaient, au bas mot, coûté 300 milliards de nos francs. Pour un expert, la qualité de la prestation est tout sauf brillante.
Quatrième erreur factuelle : « En juin 2019, une affaire de corruption sur ces contrats impliquant le frère du président sénégalais, Aliou Sall, avait indigné la population. En réponse, le gouvernement de Macky Sall a promulgué un nouveau code pétrolier promettant de respecter les intérêts du pays ». Faux ! La réforme du Code pétrolier a été adoptée le 24 janvier 2019. C’est dire donc, six mois avant cette affaire de corruption que vous évoquez non sans malice. La réforme de ce Code pétrolier procède d’une politique d’Etat de réformes en profondeur des secteurs minier, pétrolier et gazier du pays. C’est d’abord la réforme du Code minier qui a été réalisée deux ans avant que n’intervienne en janvier 2019 la réforme du Code pétrolier. Un nouveau Code gazier distinct du Code pétrolier a été dans la foulée adoptée. C’est cela la stricte vérité.
De la faute de goût professionnel. Apparemment, pour le site du Monde Afrique, les autorités qui ont été mises en cause et vilipendées n’ont pas droit à la parole. Ainsi, les opposants peuvent trôner sans contradicteurs. C’est la ronde des contempteurs. Ousmane Sonko fidèle à son discours de dénonciations tous azimuts, a encore sonné la rengaine pour le Monde Afrique. C’est Fatou Diop qui enchaîne. Sans trop d’idées nouvelles dans la critique. « Malgré les incertitudes liées à ce projet, le Sénégal avait tout misé sur le pétrole. Il a perdu, estime la militante ». Inexact de dire que le Sénégal a tout misé sur le pétrole. Si le Sénégal a tout misé sur le pétrole, pourquoi alors s’est-il employé à construire de grandes centrales solaires à Ten Mérina (Ngaye Mékhé) avec 30 mégawatts, à Bokhol (20 MW) à Malicounda (22 MW) ? Et que dites-vous du parc éolien de Taïba Ndiaye ? Au contraire, le Sénégal étant conscient des dangers du tout pétrole, mise plutôt sur le mix énergétique. Ainsi, dès 2017, le pays a mis en service cinq nouvelles centrales solaires qui ont porté le taux des énergies renouvelables à 21%. Avec les premiers 50 MW du parc éolien de Taïba Ndiaye et les 100 MW du programme scaling Solar, ce taux sera porté à 30% en 2018. En 2019, quatre autres centrales photovoltaïques hybrides ont été inaugurées dans les îles du Saloum, précisément à Bettenty, Djirnda, Bassoul et Dionewar dans le département de Foundiougne, là où justement le pétrole de Sangomar a été découvert. C’est quoi tout misé sur le pétrole ? C’est se préparer à une exploitation rationnelle et optimale de la ressource, en mettant en place les moyens et les conditions indispensables à cette fin ? Si c’est cela, heureusement alors que le pays mise toujours et raisonnablement sur son pétrole. C’est légitime. « Il a tout perdu », dit la militante. J’espère que ce n’est pas là un souhait du cœur de sa part. Je souhaite conclure, en soulignant que je m'agace souvent, face à une certaine pratique de type latin du journalisme. Une pratique souvent marquée par une avalanche d'opinions sentencieuses martelées avec certitude, voire arrogance par des pontifes qui ne doutent jamais. Les faits pour eux sont secondaires, pour ne pas dire relégués sous les décombres d'un métier un peu trop malmené, ces temps-ci, par le déferlement quotidien de productions de nouvelles de toutes sortes venant des réseaux sociaux, mais provenant aussi de tous les supports disponibles sur Internet. Le site Monde Afrique m‘a semblé cette fois-ci un peu léger, en se montrant peu digne de l'aura et du professionnalisme de son père géniteur : Le Monde. Ce que j'aime dans la pratique anglo-saxonne, c'est son attachement encore effectif au fait. Je ne me fais cependant aucune illusion. Je vois bien que là également, on peut s'organiser pour tenter de travestir le fait, en le plongeant dans un magma d'opinions dévastatrices qui en dénaturent totalement le sens et la signification.
En tout état de cause, les règles du journalisme, nous semble-t-il, changent dès lors que l'Afrique est en cause. La pandémie en cours en donne une parfaite illustration. Ainsi, à défaut de pouvoir ramasser à la pelle des morts dans les hôpitaux du continent noir, on s’évertue à trouver des angles d'attaque « ingénieux », en se demandant, par exemple, pourquoi les Africains ne meurent pas encore en masse du Covid-19 ? Comme si les journalistes qui ne sont pas des scientifiques, ni médecins - les seuls susceptibles de répondre, et encore, à cette interrogation, pouvaient eux trouver la réponse. L'information, c'est : les Africains meurent, du Covid-19 mais ils en meurent aujourd’hui beaucoup moins que les autres. C'est cela le fait. Toute autre chose dite est de la spéculation. Une opinion, ni plus ni moins.
UNE NOUVELLE INÉDITE DE BOUBACAR BORIS DIOP
COMME UN DÎNER D’ADIEU (4/4)
EXCLUSIF SENEPLUS - J’entends plein de gens nous bassiner avec ça depuis ce matin, répliqua Chris avec vivacité. Ah, vous savez, disent nos bonnes âmes, ils étaient des gars bien, à Charlie Hebdo, puis ils ont mal tourné
Boubacar Boris Diop de SenePlus |
Publication 28/05/2020
Dembo Diatta réfléchissait, quant à lui, sur une pièce dans laquelle on ne verrait à aucun moment les visages des acteurs.
Tout va se jouer sur la déception sans cesse renouvelée des spectateurs, précisa-t-il. Jusqu'à la fin, ces pauvres crétins attendront en vain et…
Et n’importe quoi, mon petit Dembo… coupa Chris.
Riant de bon cœur, ils trinquèrent à leur infernale puissance créatrice. Malgré leur gaieté, tous trois restaient sur le qui-vive, moins à l’aise que d’habitude. D’ailleurs, pendant que Chris descendait en flammes une pièce qu’il avait vue quelques jours auparavant, Dembo Diatta sentait peser sur lui le regard inquisiteur de Muriel Carpentier. L’heure de vérité était de plus en plus proche. Les assassins de la rue Nicolas-Appert étaient d’autant plus présents dans les esprits que l’on ne savait presque rien d’eux. Des noms. Des visages. Rien de plus.
Lorsque le sujet fut abordé pour la première fois, Dembo Diatta se mit à tourner autour du pot et commit l’erreur de déclarer, au milieu de plusieurs phrases embarrassées :
Je ne suis pas tellement sûr d’être d’accord avec ce que j’entends ici et là mais bon, je ne suis peut-être pas bien placé non plus pour parler de ça…
Allons, Dembo, pas de manières avec nous, fit Muriel, il n’y a rien de politique dans cette histoire. Des fous débarquent dans une salle de rédaction et abattent tout le monde…
“Rien de politique, vraiment ?” se demanda Dembo, un peu perdu.
Il avait perçu une légère irritation dans la voix de Muriel mais aussi une réelle curiosité, visiblement partagée par son mari. Cette fois-ci c’était au tour de ce dernier de chercher à lire à travers lui.
Dembo Diatta se jeta à l’eau :
Vous savez, juste avant de venir à notre rendez-vous, je suis allé sur le Net pour voir les caricatures de Charlie Hebdo. Je tenais absolument à les voir de mes propres yeux.
Leurs regards fixés sur lui posaient la même question muette : « Et alors ? »
Ces caricatures sont abominables, dit-il avec un calme qui le surprit lui-même, détachant bien ses mots. Vous et moi, on sait ce que c’est, des caricatures, mais celles-ci m’ont franchement horrifié. Ai-je le droit d’ajouter que je les ai trouvées vulgaires et racistes ? J’ai longtemps aimé certains dessinateurs de cet hebdo mais là je ne les ai même pas reconnus.
C’était sans doute le bout de phrase de trop.
Tu ne les as pas reconnus… ? fit Chris en se penchant légèrement vers lui.
Il y avait une inhabituelle aigreur dans sa voix. Dembo Diatta fit comme s’il n’avait rien remarqué :
Faire sourire et blesser, ça n’est pas pareil, dit-il. Pourquoi jeter de l’huile sur le feu ?
J’entends plein de gens nous bassiner avec ça depuis ce matin, répliqua Chris avec vivacité. Ah, vous savez, disent nos bonnes âmes, ils étaient des gars bien, à Charlie Hebdo, puis ils ont mal tourné. Tu veux dire qu’ils ont fini par être obsédés par l’islam, c’est ça ? Islamophobes, Cabu et Wolinski, c’est bien ça ? Racistes aussi ? Eh bien, Dembo, ils ont payé, des petits salopards sont venus, et ces petits salopards-là, tu sais, ils ont pris le temps d’appeler chacun par son nom avant d’en faire un tas de viande froide.
Ça commençait mal.
Et tel qu’il connaissait son Chris, un gars généreux et à l’esprit ouvert mais un peu cinglé, ça risquait d’aller de mal en pis au fil des minutes. Bientôt on n’entendrait plus qu’eux au Casa Nostra. Dembo Diatta choisit de réagir sur un ton détaché. Cependant, il tenait tant à se faire bien comprendre qu’il resta sur la défensive, plus occupé à se justifier qu’à donner, tout simplement, son opinion.
Ce jour-là, ses deux amis et lui ne se quittèrent pas fâchés mais, ce qui était bien plus triste aux yeux de Dembo, très mal à l’aise. De serrer la main de Muriel et de son époux près d’une bouche de métro en fuyant leurs regards lui donna l’impression qu’entre eux plus rien ne serait comme avant. Il devait se souvenir longtemps après du dernier regard, glacial et dur, de Muriel.
« C’est fou, comme ce monde a les nerfs à vif ! dit-il à haute voix, sans se soucier des passants. Bientôt, vos meilleurs amis ne vous parleront plus parce que vous détestez un film ou un roman qu’ils trouvent génial ! » Il reprit un instant son souffle et pesta : « Je l’ai bien douchée, Muriel, quand elle m’a accusé de prôner le port du voile ! » C’était quand Dembo leur avait lancé : « Qu’est-ce qui ne va donc pas avec ce pays ? Vos yeux ne supportent pas le voile des musulmanes et vous voulez que les leurs supportent des images aussi obscènes de leur religion ? Je ne vois pas bien la logique.» Le dépit et l’agacement lui avaient involontairement fait élever la voix à ce moment-là.
Il en voulait presque à Chris et Muriel d’avoir provoqué cette discussion sur la tuerie au siège de Charlie Hebdo. Ou peut-être est-ce lui qui aurait dû tenir sa langue ? Après tout, quand une famille est dans le deuil, vous ne déversez pas votre bile sur le défunt au nom de la liberté de parole. Mais c’était trop tard pour revenir en arrière. Il leur avait fait remarquer que jamais, nulle part, y compris en France, personne n’avait osé soutenir que tout pouvait être dit. « Savez-vous comment a été créé ce canard, Charlie Hebdo ? » Ils s’en souvenaient vaguement.
« Moi, je l’ai appris aujourd’hui même avec stupéfaction, reprit-il. Un ami, redoutable fouineur, m’a envoyé le lien d’un papier qu’il a d’ailleurs mis en ligne. Les faits parlent d’eux-mêmes : en novembre 70, Charles de Gaulle s’éteint paisiblement chez lui et Hara-Kiri titre : ‘Bal tragique à Colombey : 1 mort’. La police prend alors d’assaut les kiosques, saisit tous les numéros, les détruit et interdit illico le journal. Pourquoi donc ? ‘Atteinte au respect dû aux morts’. Et vlan ! Ce n’est pas fini : pour contourner la mesure et continuer à se moquer du Général, le même canard se rebaptise Charlie Hebdo. » Là aussi, quelque chose échappait à Dembo Diatta : pourquoi, soudain, tout un pays, voire l’humanité entière, devait-elle se mettre à trottiner derrière un petit groupe de libertaires parisiens qui avaient toujours craché à la gueule de tout le monde ? Ayant de plus en plus de mal à se contrôler, Dembo les avait traités de ‘nihilistes puérils et ringards ‘.
Et pendant toute cette bagarre au Casa Nostra, des mots interdits n’avaient pas cessé de planer silencieusement autour d’eux. Vous. Nous. Oppresseurs. Damnés de la terre. Traite négrière. Madagascar. Sétif. Thiaroye. Les mots de Césaire aussi : « L’Europe est comptable devant la communauté humaine du plus haut tas de cadavres de l’histoire… » Tout ça, il l’avait heureusement gardé pour lui. Ce n’était pas le genre de choses qu’il pouvait jeter à la figure de Muriel et Chris. Il se méfiait d’ailleurs moins de ces propos eux-mêmes que du fiel et de la tenace rancune qu’ils charriaient. Cependant, Dembo n’avait pu s’empêcher de leur parler de la ‘Matinale’ de France 2 où deux journalistes s’étaient mis à pérorer sur « le génocide rwandais où la communauté hutu va être entièrement massacrée par les Tutsi. » Il n’avait jamais rien entendu d’aussi fou. « Je ne vois pas le rapport », avait dit Muriel d’un air pincé et Chris avait ajouté : « Tu nous parles de deux parfaits crétins, là. Qu’ils aillent se faire pendre par là où je pense ! » Et lui ne put se retenir : « Encore une fois, quel est votre problème ? C’est vous qui poussez les autres à faire des comparaisons mal venues… Il y aurait un beau charivari si quelqu’un disait dans ce pays que les Juifs ont été les bourreaux des Nazis ! Pourquoi êtes-vous si peu capables de vous mettre à la place des autres ? » C’est à ce moment précis que Dembo avait surpris un sourire amusé sur le visage de Muriel. Toujours aussi énervé, il voulut riposter violemment mais elle l’arrêta d’un geste de la main : « Ne le prends pas mal, Dembo, je ne me moque pas de toi, je viens simplement de réaliser que tu ne sais même plus nous parler, à nous tes vieux camarades, tu parles à deux Blancs, à deux Occidentaux. »
Dembo, troublé, se contenta de la regarder en silence. Muriel Carpentier, plus froide et réfléchie que son mari, avait une fois de plus visé juste. Dembo n’était pourtant pas tout à fait d’accord avec elle: « Je vois bien ce que tu veux dire, mais pour vous non plus je ne suis pas juste Dembo Diatta. Non, ça ne se passe plus ainsi. On est tous bien au chaud dans des cages et chacun devrait se bouger le cul pour en sortir. » Puis, après une pause : « Et peut-être vous plus que les autres…» « Nous…? » fit Muriel avec une sorte d’effarement sincère. « N’ayons pas peur des mots, Muriel », répondit simplement Dembo.
Il se souvint d’avoir ensuite longuement promené les yeux autour de lui. Le Casa Nostra s’était peu à peu vidé de ses clients. Une brune solitaire entre deux âges, perchée sur un tabouret tout près d’eux, semblait plus intéressée par Chris que par leur bagarre. « Bon, avait soudain ajouté Dembo, je suis un peu perdu, comme tout le monde. C’est simple, plus personne ne sait où il en est. Ils vont finir par nous avoir. »
Il y eut une ou deux minutes de silence gêné, sans doute le tout premier en plus de vingt ans d’amitié.
En retraversant le parc Emile Perrin quasi désert, Dembo repensa à Muriel et Chris. Ils avaient un long parcours en métro avant d’arriver chez eux, Place du Caquet, à Saint-Denis et il les imagina en train de se demander pourquoi lui, Dembo, était de plus en plus tendu et intolérant. Il se reprocha une nouvelle fois d’être incapable de tenir sa langue, de ne pas savoir refouler au fond de sa gorge tous ses pourtant-peut-être bien que-à moins que-néanmoins-en revanche. Le temps des nuances était bel et bien révolu et la peur de l’avenir scellait toutes les bouches. Qu’avait-il donc à faire le malin ?
Il lui restait une journée à Paris, celle du lendemain, avant le retour au pays. Il la passerait étendu dans sa chambre à lire les vieilles BD qu’il emportait toujours avec lui en voyage. Elles le mettraient, au moins momentanément, à l’abri des infos de la télé et de la radio. Il en avait marre de toute cette histoire, ça lui chauffait la tête pour rien.
Peut-être d’ailleurs ferait-il mieux d’appeler Mambaye Cissé au lieu de rester enfermé au Galileo. La danse d’amour des mérous marbrés ne l’intéressait pas vraiment mais ils pourraient toujours se moquer avec tendresse de leurs stupides rêves d’étudiants dakarois. C’était dans une autre vie.
Malgré le mutisme d’Abidjan, les positions tranchées de Dakar et Cotonou au sujet du moratoire sur les dettes des pays africains signalent deux visions antagonistes des priorités de l’État et de son pouvoir face aux marchés
Jeune Afrique |
Joël Té-Léssia Assoko |
Publication 28/05/2020
Pourvu qu’elles échappent à l’extrême agressivité du débat sur le franc CFA, les lignes de fracture créées ou exacerbées par la crise sanitaire et économique liée au Covid-19 pourraient donner un nouveau souffle au débat d’idées sur le continent.
Les propos embarrassés devant la dépendance croissante des économies africaines aux capitaux chinois cèdent le pas à une discussion plus franche sur les arbitrages à réaliser. Le choix d’Ethiopian Airlines de maintenir la desserte de la Chine a fait voler en éclats le consensus mou qui existait en Afrique de l’Est, Nairobi prenant la tête de la fronde contre son allié et concurrent régional.
Approfondissement des marchés
Toujours vis-à-vis de Pékin, l’enthousiasme peut-être excessif au sujet des « 85 millions d’emplois » que l’empire du Milieu ne manquerait pas de délocaliser, à terme, vers l’Afrique a vécu. Place désormais à une réflexion plus ardue sur le développement des chaînes de valeurs locales et l’approfondissement des marchés africains.
Malgré le mutisme d’Abidjan, les positions tranchées de Dakar et Cotonou au sujet du moratoire sur les dettes des pays africains signalent deux visions antagonistes des priorités de l’État et de son pouvoir face aux marchés. Par là, des préférences potentiellement différentes quant aux contours de l’eco, la future monnaie commune.
La maîtrise de l’information stratégique dans les entreprises sénégalaises peut être une aubaine dans cette politique de construction économique du pays après avoir subi les politiques d’ajustement structurel des institutions de Bretton Woods
Trente ans après la chute du mur de Berlin marquée par l’effondrement du bloc soviétique, le monde a inauguré un nouveau cycle avec la mise en place d’un système capitaliste sans résistance symbolisé par une économie de marché dont la base est la recherche de profit.
Pourtant même sans être passionné de géopolitique, il n’est point de secrets que le capitalisme est le système économique reflétant la compétitivité et la libre concurrence entre les entreprises de tous les secteurs d’activités et quelles que soient leur taille (GE, ETI, PME).
En effet, cette nouvelle hégémonie a profondément changé le circuit économique du monde car elle a donné un blanc-seing aux Grandes Entreprises (GE) dont l’effectif est supérieur ou égal à 4235 employés[1]. Alors, avec cette marge de manœuvre les GE dictent leur loi. Les GAFAM, entreprises de la Silicon Valley sont un exemple patent de cette domination économique voir de ce pouvoir sans précédent des Grandes Entreprises. Ces dernières ont mis en place des stratégies afin de maîtriser leur capital informationnel gage d’influence et de sécurité économique.
Mais malgré cet état de fait, c’est-à-dire la farouche concurrence au sein du marché, certaines entreprises moins costauds n’ont pas jusqu’à présent mesuré l’importance de l’information dans la bonne marche de leurs activités.
Paradoxalement, depuis la fin de la guerre froide, le monde est entré de plain-pied de ce qu’on peut appeler la société de l’information. Comme la société industrielle avec ses multiples indices qui sont entre autres l’essor des moyens de production et la floraison des biens de consommation, la société de l’information a aussi ses propres leitmotivs in fine son contingent d’identifiants. « Les nouvelles technologies de l’information et de la communication dont Internet constitue le référent identitaire, sont présentes dans tous les domaines d’activité des hommes, enseignement, documentation, édition, commerce, finance, médecine, loisirs, recherche scientifique, etc… La généralisation des échanges électroniques d’informations et de documents, le caractère universel de cette nouvelle communication globale, planétaire, la rapidité et le caractère spectaculaire des mutations induites font de cette « révolution » un moment clé voire spéciale de l’histoire de l’humanité.[2] »
Par ailleurs, à l’aune de la connaissance immatérielle, l’information occupe un pan de l’économie mondiale irriguée par deux facteurs majeurs : la mondialisation et la globalisation. Ce faisant, certaines entreprises ont pris le train en marche afin d’être aux aguets des signaux faibles pour mieux anticiper les évolutions et d’avoir une vision 360° de leur environnement concurrentiel, commercial, technologique. C’est la raison pour laquelle, beaucoup de pays ont adopté une démarche de veille stratégique dont le substrat est la maîtrise de l’information garantie de compétitivité et de sécurité pour les entreprises.
Par exemple, en France, l’efficacité de l’information à valeur économique découle du rapport d’Henri Martre « Intelligence économique et stratégie des entreprises », publié en 1994 à la Documentation française[3]. C’est à l’issu de ce travail que les entreprises françaises ont pris conscience, en proportion de leur goût, l’importance de la mise en place d’outils de veille stratégique in fine d’intelligence économique pour mieux se positionner en Europe et à l’international. Ce qui leur permet d’avoir une photographie de l’environnement des affaires et de la compétitivité mais aussi d’engranger des parts de marché.
Ayant compris l’importance de l’information stratégique pour la bonne marche de leur économie, certains pays africains à l’image du Maroc via ses petites et moyennes entreprises s’initient à la veille informationnelle car les PME occupent une place cruciale dans le tissu économique du pays[4]. Ne voulant pas être le dernier de la classe en Afrique subsaharienne, le Sénégal a entamé aussi sa mue d’Intelligence économique dans l’optique d’armer ses entreprises avec la mise en place au sein du ministère de l’Economie des Finances et du Plan d’un dispositif national d’intelligence économique. Ainsi, le Sénégal est l’un des pays africains à avoir fixé une réflexion sur sa sécurité économique par le management de l’information[5]. L’objectif est de booster l’économie des entreprises notamment des PME. Mais malheureusement, cette initiative souffre de rigueur car les outils « cellules de veille » qui devaient l’accompagner ne sont pas présents dans certaines entreprises.
Cela dit, la pénétration des technologies de l’information et de la communication ont donné un nouveau visage à l’information à tel point qu’on parle de trop-plein d’informations « Infobésité ». Ainsi, les entreprises sénégalaises, doivent asseoir un travail de vigie pour anticiper, innover dans l’optique d’atteindre cette quête de compétitivité. Ceci demande une stratégie bien pensée de la part des entreprises en toile de fond les PME si le pays veut atteindre les objectifs fixés par le Plan Sénégal Emergent (PSE) d’ici 2035.
La maîtrise de l’information stratégique dans les entreprises sénégalaises peut être une aubaine dans cette politique de construction économique du pays après avoir subi les politiques d’ajustement structurel des institutions de Bretton Woods (FMI, Banque mondiale). Il faut armer nos entreprises à l’ère de la guerre de l’information, lit de la compétitivité économique où le marché est roi.
[2] Michel, Jean. Société de l’information et nouvelles solidarités professionnelles : L’impérative exigence de dépassement des frontières. In : http://michel.jean.free.fr/publi/JM331.html
[3] Le rapport d’Henri Martre, « Intelligence économique et stratégique des entreprises », publié en 1994 à la Documentation française, est le premier ouvrage considéré comme fondateur de l’IE en France.