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29 avril 2025
Opinions
PAR L'ÉDITORIALISTE DE SENEPLUS, EMMANUEL DESFOURNEAUX
LE FAUX DAUPHINAT
EXCLUSIF SENEPLUS - Du frère au beau-père en passant par le beau-frère, il y a une « surpopulation » politico-familiale au sein du régime de Macky Sall. Cependant, le Sénégal est-il le Togo ou le Gabon ?
Emmanuel Desfourneaux de SenePlus |
Publication 01/06/2020
En ces heures où le Covid-19 frappe durement le Sénégal, la citation de Charles Péguy raisonne en termes de responsabilité politique : « Les peuples vont là où les pouvoirs les conduisent ». L’opposition est dans son droit de critiquer lorsque, selon elle, la direction empruntée par le gouvernement n’est pas la meilleure. A contrario, une certaine opposition ne conduit-elle pas parfois vers de fausses pistes et polémiques comme le dauphinat au risque de ne pas se concentrer sur l’essentiel ?
C’est au détour d’une interview de Mamadou Lamine Diallo, fort captivante au demeurant sur la dépendance du riz, que le mot dauphin a été prononcé à l’endroit de Mansour Faye.
En effet, en pleine crise sanitaire, le président du Mouvement TEKKI cible nommément le beau-frère du président comme successeur de Macky Sall. Mamadou Lamine Diallo persiste et signe ; déjà en 2019, tandis qu’Aliou Sall était éclaboussé par l’affaire Petrotim, l’opposant soutenait que Mansour Faye était le « dauphin caché de la famille Faye Sall (sic) ». Bref la solution de rechange pour envisager l’avenir de façon radieuse !
Cela devient un rituel chez les opposants « patriotes ». Lors de sa dernière sortie médiatique, Ousmane Sonko, président du Pastef, comparait Mansour Faye à Karim Wade. Sur le sujet du dauphinat, aux yeux des Sonkoistes, ils sont sur un même pied d’égalité bien que, aujourd’hui, l’un est opposant et l’autre est ministre. Peu importe si au passage les stratégies politiques d’alliance de fait entre les opposants sont mises à mal avec ce genre de comparaison peu flatteuse et peu diplomatique !
Pour des raisons différentes, Babacar Gaye et Mamadou Goumbala ont aussi établi une comparaison entre Mansour Faye et Karim Wade.
S’il est légitime de s’interroger sur l’implication de la famille des présidents sénégalais dans les affaires publiques à l’image de Mansour Faye et sa gestion de l’aide d’urgence, est-il fondé d’utiliser le mot dauphin à l’égard de ces personnalités politiques d’un genre particulier ? Et en conséquence de leur réserver un traitement politique à part ?
D’emblée, il convient de remarquer que le dauphinat est employé par des commentateurs politiques pour décrire un processus de désignation du successeur par le président sortant. Et ce en dehors de toutes considérations familiales ! Sans doute l’hyper présidentialisation de certains régimes africains s’apparente-t-elle aux monarchies au vu de leur automatisation « successorale » : le roi est mort, vive le roi ! L’élection du candidat soutenu par la majorité présidentielle ne serait dans ce schéma qu’une formalité : 100 % de chance de gagner.
En réalité, je m’attache au mot dauphin tel qu’il est exploité par les opposants « patriotes ». Et donc au regard du sens historique qu’ils leur accordent, à savoir un titre d’héritage « biologique ou familial » tiré de leur lien de parenté avec le président-roi. C’est bien ce sens-là qui est visé par Mamadou Lamine Diallo et Ousmane Sonko dans leurs dernières interventions.
Il faut dire que les exemples en Afrique ne manquent pas où le fils du président a succédé grâce à l’aide de son père, à l’exemple du Togo et du Gabon. C’est donc un argument qui fait mouche. L’opinion publique sénégalaise y est sensible ; elle tient à son patrimoine démocratique. A telle enseigne que la supposée succession de Me Abdoulaye Wade par son fils Karim est considérée comme la principale cause de la chute du pape du Sopi.
En l’espèce pas de preuve tangible de succession contrairement aux monarchies où les titres de dauphin sont strictement réglementés (fils ainé ou fils cadet en cas de décès du premier), juste une rumeur au départ suivie d’une insistante clameur publique au Sénégal ! Cela suffit aux opposants pour en faire leurs choux gras. Ils se focalisent sur les grands ministères attribués aux « dauphins » pour convaincre de la préparation d’un coup d’état, d’un passage en force d’une république à une monarchie. C’est dans ce contexte qu’Ousmane Sonko a fait sa comparaison entre Karim Wade et Mansour Faye.
Les opposants d’hier (c’est le serpent qui se mord la queue !) et d’aujourd’hui, ont en commun la mauvaise foi politique. Jamais ils ne se sont demandé s’il y avait une optimisation des ministères en question (regroupement cohérent de différents ministères sous l’autorité d’un même ministre) ; jamais pour le cas de Me Abdoualye Wade il a été abordé l’essoufflement naturel d’un régime après 12 ans d’exercice de pouvoir, et surtout le goût prononcé des sénégalais dorénavant pour l’alternance démocratique vu le précédent de 2000.
Ces personnalités politiques issues de la famille des présidents, deviennent des boucs émissaires et des proies faciles pour les opposants. Il faut dire que le régime de Macky Sall a élargi la sphère de la famille au pouvoir comme jamais vu auparavant : du frère au beau-père, en passant par le beau-frère, il y a une « surpopulation » politico-familiale ! Et pour ne rien arranger, le président attribua l’aide d’urgence, au coeur du dispositif de la lutte contre la Covid-19, à Mansour Faye !
Cependant, le Sénégal est-il le Togo ou le Gabon ? Admettons que Mansour Faye soit le candidat officiel de Macky Sall en 2024. Ne pensez-vous pas que le sénégalais serait assez mature politiquement parlant pour faire la part des choses et voter en son âme et conscience ? Car l’essentiel dans ces fausses histoires de dauphinat, c’est que le peuple sénégalais ait souverainement le dernier mot. Il y a eu dans l’histoire du Sénégal une seule dévolution monarchique : ce fût le cas lorsque le président Abdou Diouf hérita du pouvoir des mains de Léopold Sédar Senghor, sans vote !
Un bémol à la souveraineté du peuple. Celle-ci ne peut être que pleine et entière sous réserve de la transparence de la future élection présidentielle de 2024. C’est sur ce point-là que l’opposition devra concentrer ses efforts et moins sur la question du dauphinat relevant davantage du populisme. Sous Macky Sall, toutes les élections, la législative de 2017, le référendum de 2018 et la présidentielle de 2019, ont fait l’objet de contestations et de controverses autour des électeurs en doublon, de la non-distribution des cartes à certains électeurs, du changement des règles comme le parrainage, de l’éviction illégale des deux plus sérieux challengers…A l’époque de Wade, le PDS avait perdu les élections intermédiaires car le jeu démocratique existait.
C’est ainsi que le soi-disant héritier de Me Abdoulaye Wade avait perdu la mairie de Dakar !
Pour ma part, il y a un abus de langage de la part des opposants « patriotes ». Ils en sont conscients, cela est fait de façon délibérée. Ce qui a marché en 2012 peut se répéter en 2024, cette fois-ci à leur profit politique ! Mansour Faye est décrédibilisé pour sa gestion de distribution des kits alimentaires d’urgence. Il suffit d’enfoncer le clou par l’affaire du dauphinat. De manière plus générale, l’opposition « patriote » fait constater l’absence de rupture depuis l’accession de Macky Sall. Et le tour est joué : eux seuls incarnent la nouvelle alternance dans l’opposition ! La manoeuvre politicienne est devant nos yeux : concentrer des tirs nourris vers Macky Sall et égratigner au passage certains opposants emblématiques.
Vraiment, y aurait-il une différence si Macky Sall choisissait Mimi Touré en lieu et place de Mansour Faye ? Peut-être et sûrement sur le plan éthique, mais d’un point de vue politique, non ! Je réitère ma démonstration : le dernier mot appartient au peuple sous réserve d’une élection transparente. Les vraies questions pour en finir avec ce sempiternel faux débat de dauphin au Sénégal, seraient de s’interroger si c’est au président sortant de désigner son successeur et si in fine le vote des sénégalais sera respecté ou confisqué. De surcroît, pour évacuer toute crispation sur le dauphinat, il y a une jurisprudence politique claire, voire même un plafond de verre : les fils ou les membres de la famille d’un président sortant ne peuvent lui succéder immédiatement. A moins d’être possiblement sanctionnés par le peuple.
C’est vrai que c’est le véritable talon d’Achille des régimes qui font participer leurs familles proches, aux affaires d’Etat. Ils se prennent les pieds dans le tapis. Ils tendent le bâton à l’opposition pour se faire battre. Il est acquis aujourd’hui (et surtout depuis 2012) et a fortiori avec la crise de la Covid-19 que cette gouvernance « familiale » ne sied plus au nouveau style des démocraties africaines. Il faudrait y réfléchir lors du prochain remaniement.
COVID-19, L'OPPORTUNITÉ D'UNE POLITIQUE ALIMENTAIRE INCLUSIVE ET DURABLE
Pour l’éradication de la faim, le Sénégal fait des contreperformances sur l’anémie et le retard de croissance des enfants. La réduction de moitié de la pauvreté ne semble pas à portée de main
Pour faire face à la Covid-19, le Sénégal, à l’instar des autres pays d’Afrique de l’Ouest, a pris des mesures draconiennes de limitation de la mobilité afin de circonscrire la propagation du virus et rompre ses canaux de transmission. Le gouvernement a en même temps mis en place des mesures économiques et sociales pour atténuer les effets de la pandémie sur les secteurs les plus exposés et les couches de la population les plus vulnérables. En attendant de réaliser une étude exhaustive des impacts de ces mesures, des leçons préliminaires peuvent être tirées de notre récent vécu. La pandémie est une crise multiforme, en même temps qu’elle pourrait constituer une fenêtre d’opportunité, un véritable point d’inflexion, si des actions idoines sont engagées dès maintenant. Aujourd’hui, la question alimentaire interpelle l’État, les organisations professionnelles agricoles, le secteur privé et les citoyens et sa résolution requiert un repositionnement de notre agriculture, en mettant la priorité sur le marché intérieur. Comment la politique agricole du Sénégal a-t-elle jusque-là répondu à la demande alimentaire en constante évolution ? Quels changements insuffler pour répondre aux défis actuels et futurs ?
Le réveil de 2008 et les quelques acquis engrangés
En 2008, la hausse des prix des principaux produits alimentaires notamment le riz avait déclenché des émeutes dans toute la région ouest-africaine. Face à la menace, les gouvernements ont d’abord pris des mesures fiscales et douanières pour atténuer la hausse des prix. En plus de la suspension de la TVA et des droits de douanes, un contrôle des prix a été institué avec une fixation des marges commerciales à tous les échelons de la chaine de distribution. Ces mesures se sont révélées coûteuses, peu efficaces et surtout pas viables. En même temps, les Etats ont lancé des politiques de soutien à l’offre en investissant massivement dans l’agriculture. Au Sénégal, ce fut la grande offensive agricole pour la nourriture et l’alimentation (GOANA) et une de ses composantes le Plan national d’autosuffisance en riz (PNAR).
Grâce à ces initiatives, des progrès notables furent enregistrés, notamment la hausse des superficies emblavées et des niveaux de production. Le riz est un exemple emblématique. Avec l’avènement de la seconde alternance politique au Sénégal, en 2012, les nouvelles autorités ont renouvelé leur engagement pour une autosuffisance en riz en 2017. Même si les statistiques officielles publiées sont souvent controversées, il est indéniable que des progrès substantiels ont été réalisés. Il existe des modèles de bonnes pratiques qui ont fait leur preuve. C’est le cas par exemple de réseaux de producteurs qui sont capables, en plus de la vulgarisation d’itinéraires techniques pour une productivité durable, de fournir des services à leurs membres grâce à une bonne maitrise de l’information économique à travers des bases de données sur les performances de leurs membres. Ces réseaux ont également établi des liens solides avec les banques qui leur octroient des crédits de campagne sous forme groupée et le développement de capacités de consolidation de la production pour une commercialisation groupée au profit des membres. Toutes les principales filières vivrières (mil, maïs, riz) disposent de ces types de réseaux, engagés dans différents modèles de contractualisation avec l’aval notamment les transformateurs et les commerçants.
Au nord du Sénégal, la banque agricole a initié un système de financement intégré entre producteurs de riz paddy, transformateurs et acheteurs du riz blanc, sur la base des remboursements en nature par les producteurs et du nantissement des stocks. En peu de temps, le niveau des crédits octroyés a triplé passant de 3,5 milliards en 2011 à 10 milliards FCFA en 2018 avec des taux de remboursement dépassant 95%. Les innovations majeures notées ces dernières années en termes de bonnes pratiques agricoles, de gestion de la qualité, de gestion de l’information, de contractualisation et de financement innovants, constituent des bases d’un développement à long terme de nos principales chaines de valeurs agroalimentaires si des politiques cohérentes soutiennent ces initiatives. Sans surprise, les options stratégiques actuelles ne génèrent pas des résultats flatteurs.
Limites des options passées, résultats mitigés des politiques agricoles en cours
L’absence d’articulation, voire l’incohérence des politiques agricoles et commerciales et la faiblesse de la politique agro-industrielle, sont des caractéristiques marquantes de ces deux dernières décennies. Au moment où le Sénégal affichait un engagement résolu à gagner la bataille de l’autosuffisance en riz, par l’aménagement de surfaces additionnelles destinées à la culture irriguée et l’octroi de subventions aux intrants et aux équipements, le ministre du commerce allait en Inde pour négocier l’importation de riz à bas prix pour satisfaire les consommateurs urbains. Cette incohérence transparait aussi dans la position du Sénégal lors des négociations sur le tarif extérieur commun (TEC) de la CEDEAO appliqué au riz. A la demande de certaines parties prenantes, telles que les organisations de producteurs, de protéger le riz local par un tarif à 35%, est opposé le maintien, par un groupe de pays dont le Sénégal, du TEC UEMOA de 10%.
Par ailleurs, la politique industrielle n’a pas encore pris la mesure des énormes potentiels d’un développement de la transformation locale des produits primaires des chaines de valeurs agricoles. Les céréales, les fruits et les légumes sont souvent passés à la trappe/ou négligés du fait de l’absence d’une stratégie claire de transformation adossée à des investissements structurants dans la logistique. Les initiatives récentes de mise en place des agropoles, appuyées par l’ONUDI, seraient un pas à encourager.
Le deuxième rapport d’examen biennal de la Commission de l’Union africaine sur la mise en œuvre de la Déclaration de Malabo publié en Février 2020 constitue un avertissement à prendre très au sérieux. En effet, en 2014, les chefs d’Etats africains avaient pris sept (7) engagements visant, entre autres, à renforcer le financement des investissements dans l’agriculture, l’éradication de la faim en Afrique d’ici 2025, la réduction de moitié de la pauvreté d’ici 2025 grâce à la croissance et à la transformation agricoles inclusives, la stimulation du commerce intra-africain des produits de base agricoles, le renforcement de la résilience des moyens de subsistance et des systèmes de production au changement climatique et aux autres risques connexes. Selon le rapport d’examen, le Sénégal, bien qu’ayant fait des progrès, n’est pas sur la bonne voie pour atteindre en 2025 les engagements de Malabo. Seuls le Rwanda, le Maroc, le Mali et le Ghana affichent des résultats satisfaisants à mi-parcours.
De façon spécifique, le Sénégal ne remplit pas les conditions requises par les indicateurs sur les investissements agricoles. Pour les intrants, en particulier l’utilisation d’engrais, le pays est loin des 50 kg/ha de nutriments exigés. Les niveaux de financement, pour la recherche et pour le conseil agricole, sont également insatisfaisants. Pour l’éradication de la faim, le Sénégal fait des contreperformances sur l’anémie et le retard de croissance des enfants. La réduction de moitié de la pauvreté ne semble pas à portée de main tandis que les efforts d’investissement dans la résilience face au changement climatique sont encore timides. La stimulation du commerce intra-africain des produits de base agricoles est l’une des rares satisfactions.
Pour une politique alimentaire inclusive et durable
La pandémie a mis en exergue la vulnérabilité du pays, en particulier sa dépendance alimentaire. Certes les efforts pour une autosuffisance en riz sont louables compte tenu des caractéristiques résiduelles du marché mondial du riz (7% de la production mondiale) et de l’expérience des restrictions sur les exportations de riz imposées par les pays asiatiques durant la période 2008. Mais cette stratégie comporte de nombreuses limites dont la principale est l’imposition d’une spécialisation alors que la diversification comporte plus de vertus aussi bien pour les producteurs que la nation entière. Se fixer des objectifs d’autosuffisance alimentaire en valorisant toutes nos opportunités et nos forces présente plus de garantie d’équilibre, d’efficacité, d’efficience et de durabilité. La réussite d’une telle entreprise nécessite une vision claire sous-tendue par une politique alimentaire consensuelle, inclusive et durable. Quelles devraient être les principales caractéristiques de cette politique alimentaire ?
Une priorisation des chaines de valeurs alimentaires. Sur la base d’une analyse rigoureuse, l’Etat devrait choisir des chaines de valeurs alimentaires et y investir massivement. Le mil est un exemple de produit mobilisant des superficies importantes et une population large avec un potentiel énorme de marché urbain et rural si des investissements adéquats sont réalisés. En agissant sur la productivité et en développant les maillons transformation et distribution, le mil constituerait un formidable apport de diversification des aliments consommés par les populations urbaines. Une articulation avec l’industrie laitière telle que pratiquée par certains agro-industriels constitue une autre source d’inspiration. Les mêmes recommandations peuvent être faites sur les fruits et légumes qui sont peu transformés et dont une partie pourrit avant consommation. Un des critères de choix de ces chaines alimentaires doit être leur intégration des petits producteurs et des petites et moyennes entreprises de valorisation post production (conservation, conditionnement, transformation, services…).
Le financement de la recherche en appui au développement de ces chaines de valeurs. Pour assurer la rentabilité des chaines de valeurs, il est indispensable d’accompagner le processus par une recherche répondant à la demande. Cela suppose un financement adéquat de la recherche, de préférence sur la base de ressources endogènes. Qui finance commande ! Si l’Etat veut mettre la recherche au service de ses priorités, il doit renforcer directement le financement de certaines recherches stratégiques afin qu’elles fournissent des technologies appropriées aux différents maillons des chaines de valeurs (production, transformation, logistiques…). L’ISRA et l’ITA ont déjà le cadre adéquat et l’expérience requise pour conduire de telles ruptures, pourvu qu’un cahier de charges rigoureux leur soit imputé avec des moyens appropriés.
Un appui conséquent au conseil agricole et rural pour l’accompagnement des producteurs. L’appropriation des innovations par les producteurs suppose un bon accompagnement par des conseillers agricoles au fait des réalités et dotés de moyens pour assumer leurs responsabilités. Ces conseillers doivent aussi bénéficier d’un lifting leur permettant d’aller au-delà des apports techniques, en mettant en exergue leur rôle de facilitation, d’appui à la résolution des problèmes et de mise en relation.
L’appui à la formation des exploitants familiaux, des entrepreneurs agricoles, des techniciens, et des ingénieurs. La formation devrait être au cœur de la stratégie de développement des chaines de valeurs alimentaires. Elle devrait néanmoins avoir une forme pyramidale avec une formation de masse destinée aux exploitants familiaux et aux entrepreneurs agricoles. Les champs écoles et autres formes de dissémination du savoir ont besoin d’une forte présence de techniciens agricoles bien formés et soutenus par des ingénieurs.
L’affirmation de certaines options agroécologiques. Le développement durable des chaines de valeurs alimentaires suppose une bonne intégration de l’agroécologie. Celle-ci pourrait ainsi permettre une régénération des terres et favoriser la biodiversité. Elle requiert une politique de gestion des ressources en eau adaptée.
La gouvernance multi-sectorielle. Une véritable politique alimentaire ne peut être l’apanage du seul ministère en charge de l’agriculture. Elle intègre fortement les secteurs de l’élevage et de la pêche. Elle ne peut réussir sans que le ministère en charge de l’industrie et celui du commerce ne soient au cœur des activités. Elle commande la participation du ministère en charge de l’hydraulique et celui des infrastructures. Elle nécessite l’intervention du ministère des finances. La santé et la nutrition doivent être au centre de ses finalités. Dès lors, la politique alimentaire devrait être pilotée sous une gouvernance multisectorielle avec une autorité en charge de fédérer toutes ces entités précitées. Le succès et la durabilité de la politique en dépendent fortement.
Les effets et impacts attendus de la politique alimentaire
La mise en œuvre d’une politique alimentaire vigoureuse centrée sur nos potentialités agroécologiques, socioéconomiques et culturelles devrait générer des résultats tangibles dans plusieurs domaines.
Un développement industriel adossé sur le volet transformation des chaines de valeur agroalimentaires. En améliorant la transformation locale, les microentreprises ainsi que les petites et moyennes entreprises pourraient développer des produits semi-finis qui serviraient de matières premières à l’industrie.
Le développement des terroirs. En mettant l’accent sur les produits locaux et en renforçant les systèmes alimentaires locaux, la politique alimentaire contribue à une bonne structuration des terroirs en facilitant l’emboitement entre villages, petites bourgades et villes secondaires, fixant ainsi les populations dans leurs terroirs.
L’amélioration de la santé et de la nutrition. L’augmentation des productions de légumes, de fruits et de céréales et le développement de filières courtes vont favoriser une alimentation plus saine des populations. Cette option pourrait réduire la prévalence des maladies non transmissibles dont la prolifération résulte en partie des habitudes de consommations alimentaires. Ainsi, en termes de prévention, une valorisation de notre patrimoine culturel dans le domaine culinaire serait salutaire.
La création d’emplois décents et en quantité pour les jeunes et les femmes. La transformation des chaines agroalimentaires peut être source de création de nombreux emplois pour les jeunes et les femmes qui constituent la majorité de la population en milieu rural. Le positionnement des femmes dans le maillon de la transformation est largement documenté. Il s’agit de le renforcer tout en leur permettant d’augmenter leurs marges. Les innovations technologiques offrent aux jeunes, notamment ceux instruits, de proposer des services à haute valeur ajoutée et qui renforcent la rentabilité de l’ensemble de la chaine de valeur.
On le voit, autant la politique alimentaire exige une gouvernance multisectorielle, autant elle interpelle le monde de la recherche. L’intervention des économistes, des socio-anthropologues, des historiens, des nutritionnistes, … est indispensable si nous voulons réussir la rupture indispensable dans nos façons de faire et semer les graines d’une souveraineté alimentaire que les organisations paysannes appellent de leurs vœux depuis plusieurs décennies.
Dr. Ibrahima Hathie est Directeur de recherche, IPAR (ihathie@ipar.sn)
par Dialo Diop
ÉBOLA, LES ENSEIGNEMENTS POUR L’AFRIQUE
Seule une refondation unitaire de nos Etats serait susceptible de créer les conditions requises, permettant aux peuples du continent d’affronter efficacement les dangers de toutes sortes qui hypothèquent leur avenir (français & anglais)
Je dédie cet article à la mémoire de ma sœur et camarade Aminata Diaw Cissé, philosophe de formation, esprit libre et bel esprit s’il en fut, combattante émérite sur tous les fronts de la cause africaine, qui n’est autre que celle de toute l’humanité.
L’histoire naturelle de la maladie à virus Ebola s’est révélée riche d’enseignements au double plan biomédical et socio-culturel, jetant une lumière singulière sur l’état réel de l’Afrique et du monde contemporain.
Il s’agit du principal représentant d’une nouvelle famille taxonomique de virus à ARN, les Filoviridae, dont le prototype est apparu dès 1967 à Marburg (Allemagne) et Belgrade (Yougoslavie), dans un laboratoire de fabrication de vaccins contre la poliomyélite. Ce virus dit de Marburg a provoqué la toute première épidémie humaine de fièvre hémorragique mortelle liée à un filovirus. Isolé à partir d’une colonie de singes verts importés d’Ouganda, (qui finira intégralement euthanasiée), il demeure l’unique espèce identifiée de son genre et sera responsable par la suite de près d’une dizaine d’autres épidémies sporadiques, en Afrique orientale et centrale essentiellement.
Le virus du genre Ebola, quant à lui, ne sera découvert que près d’une décennie plus tard, en 1976, à l’occasion d’une sévère épidémie ayant éclaté quasi simultanément à Yambuku , au Congo (RDC) et à Nzara (Sud –Soudan), avec des centaines de cas, dont plusieurs dizaines de morts. Depuis lors, entre le dernier quart du 20ème siècle et la fin de la première décennie du 21ème, plus d’une vingtaine de poussées épidémiques de fièvres hémorragiques dues au virus Ebola ont été enregistrées en Afrique dite subsaharienne ; au-delà des deux Congo et du Soudan, en Ouganda, au Kenya et au Gabon principalement, mais non exclusivement. Il faut en effet signaler l’apparition d’un cas humain unique et non mortel en Côte d’Ivoire, dans le parc national de la Forêt Tai (1994), ainsi que la survenue d’une épidémie animale à Reston en Virginie (USA), au sein d’une population de singes macaques importés des Philippines (1990). Si cette souche de laboratoire dite Reston est réputée non pathogène chez les humains, la virulence des sous-types dits Zaïre et Soudan pourrait varier de 40 à 90% de taux de mortalité, tandis que la pathogénicité de la souche appelée Forêt Tai reste indéterminée. Enfin, au courant des années 2000, un dernier sous-type nommé Bundibugyo a été isolé et identifié lors d’épidémies humaines en Ouganda et au Congo. Soit, pour l’instant, cinq sous-types distincts reconnus dans le genre Ebolavirus.
Ainsi, entre 1976 et 2012, l’apparition, au cœur du continent africain, d’infections à virus Ebola évoluant sur le mode d’épidémies récidivantes, aura provoqué près de 2000 cas, dont plus de 1100 décès, si l’on ne prend en compte que les flambées ayant entraîné au moins cent cas dûment diagnostiqués. Réputée jusqu’alors être confinée aux seules régions forestières de l’Afrique équatoriale, cette fièvre hémorragique virale de type nouveau, malgré son évidente gravité et sa forte contagiosité interhumaine, ne va susciter d’intérêt, au-delà bien entendu des populations et autorités sanitaires des pays concernés, que parmi les experts de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) et autres organismes de recherche spécialisés, tels que le Centers for Disease Control and Prevention (CDC) d’Atlanta (USA), l’Institut Pasteur de Paris (France), le Medical Research Council (MRC) de Cambridge (GB) ou le National Institute for Communicable Diseases (NICD) de Johannesburg (Afrique du Sud), notamment.
Ce relatif manque d’intérêt des responsables de la santé publique et des multinationales de l’industrie pharmaceutique, venant s’ajouter à la nouveauté de cette famille de virus épidémique dépourvue d’insecte vecteur, et donc différente des arboviroses mieux connues, locorégionales (fièvre jaune, Chikungunya, Vallée du Rift) ou mondiales (dengue), explique au moins en partie les difficultés constatées dans la prise en charge diagnostique et thérapeutique de cette maladie infectieuse émergente. Citons à titre d’exemple, les errements observés dans la détermination du réservoir de virus animal, (d’autant plus importante du point de vue épidémiologique qu’il s’agit d’un agent pathogène à transmission non vectorielle), que l’on a imputé tout d’abord aux petits ou aux grands singes, puis aux rongeurs, avant de l’attribuer finalement aux chauves-souris frugivores, identifiés comme les seuls porteurs asymptomatiques du virus Ebola. En outre, du fait de son extrême dangerosité, la culture de ce type de virus, pourtant indispensable à son étude approfondie, nécessite un laboratoire de biosécurité maximale (niveau 4), dont il n’existe que trois ou quatre unités civiles officiellement répertoriées dans toute l’Afrique. D’où les retards accumulés autant dans la recherche de médicaments et/ou de vaccins que dans la mise au point de tests sérologiques relativement simples et le recours obligatoire aux techniques diagnostiques moléculaires, réservées à quelques rares laboratoires spécialisés dits de référence, situés dans les villes et donc fort éloignés des zones rurales où sévissent habituellement ces épidémies. Un statu quo pluri décennal dont tout le monde semblait plus ou moins s’accommoder…
Jusqu’à la survenue, totalement inattendue, d’une épidémie sans précédent en Afrique de l’Ouest, qui va marquer un tournant majeur dans l’histoire naturelle de la maladie à virus Ebola. A partir d’un cas index apparu en décembre 2013 dans un village de la zone forestière de Guékédou, s’étendant aux districts de Macenta et de Nzérékoré (République de Guinée), va éclater une épidémie de grande ampleur, d’abord rurale puis urbaine, qui va progressivement se répandre par contiguïté aux pays voisins, dans les districts de Kenema et Kailahun (Sierra Léone) et le district de Lofa (Libéria).
Ainsi, au cours de l’année 2014, sur un total de 67 districts dans ces trois pays, 43 seront atteints par l’extension de l’épidémie, avec plus de 90% des cas confirmés, probables ou suspects recensés dans 14 districts seulement. Pire, dès le mois de juillet, la poussée va gagner d’autres pays d’Afrique de l’Ouest, avec des cas importés entraînant des cas secondaires mortels, au Nigéria d’abord et au Mali ensuite, tandis qu’un unique cas d’importation non mortel atteindra le Sénégal… Pourtant, il faudra attendre le 25 mars 2014, soit près de quatre mois, pour que l’OMS déclare officiellement l’existence d’une « épidémie de fièvre hémorragique à virus Ebola en Afrique de l’Ouest ». Et ensuite, quatre mois supplémentaires, le 8 août 2014, avant que ses dirigeants ne proclament « la maladie à virus Ebola, une urgence de santé publique de portée internationale» ! Il est vrai qu’entretemps, le 2 août précisément, l’apparition de quelques cas isolés, mais exportés hors d’Afrique car frappant le personnel expatrié d’assistance médicale et paramédicale (deux aux USA et un en Espagne), avait suffi à provoquer une peur panique dans l’opinion occidentale…et une réaction instantanée de ce qu’il est convenu d’appeler la « communauté internationale ».
Toujours est-il qu’au 22 septembre 2014, le bilan cumulatif de l’épidémie ouest-africaine établi par l’OMS avançait 5843 cas et 2803 décès, le personnel soignant étant sévèrement touché avec 337 cas dont 181 mortels. Ces chiffres vraisemblablement sous-estimés, de l’aveu même des experts africains et étrangers, témoignent néanmoins d’une progression fulgurante par rapport au précédent bilan d’étape qui, le 16 août, faisait état de 2240 cas confirmés, probables ou suspectés, dont 1229 décès.
Preuve ne saurait être plus flagrante de la règle, non écrite mais invariable, du « deux poids, deux mesures », qui prévaut en matière de droit à la santé comme pour tout autre droit fondamental de la personne humaine, en Afrique comme dans le reste du monde. En atteste éloquemment le cas emblématique de notre dévouée consœur sierra-léonaise, Dr Olivet Buck, contaminée par ses patients et décédée à la suite du refus de son évacuation sanitaire vers l’Allemagne, au mépris de la requête pressante du président de la République de son pays.[1]
De nombreuses manifestations de l’inégalité et de l’iniquité dans l’accès aux soins, la mobilisation et la gestion des ressources appropriées, ou les niveaux d’information, etc. vont apparaître, tant dans l’alerte que dans les modalités de la riposte à cette menace à potentiel désormais pandémique. Nous n’en relèverons ici que certains aspects des plus significatifs.
En effet, à la suite de cette annonce spectaculaire, l’OMS va enclencher une série de réunions d’experts internationaux à Genève, entre août et septembre 2014, en pleine période d’expansion de l’épidémie. Il était jusqu’alors communément admis que l’on ne disposait d’aucun traitement, ni curatif ni préventif, contre la maladie à virus Ebola ; les seules interventions possibles étant palliatives, à visée purement symptomatique. L’issue de chaque cas dépendait donc fondamentalement, comme pour toute infection virale, du degré de compétence du système immunitaire du sujet face à la densité et la virulence de l’inoculum contaminant et, accessoirement, de la précocité et de la qualité du traitement d’appoint.
C’est dire quel fut l’étonnement, sinon l’écœurement, des spécialistes africains en apprenant, à l’issue de la première grande rencontre d’experts au siège de l’OMS, qu’il existait non seulement près d’une demi-douzaine de drogues actives contre la virus Ebola et, dira-t-on, au stade encore expérimental, (certaines ayant atteint ou dépassé les phases d’essais cliniques) mais que l’on disposait de surcroît d’au moins deux candidats vaccins en cours d’évaluation ! Ainsi donc, une gamme thérapeutique quasi-complète, préventive et curative, produite par les secteurs public ou privé de la recherche pharmacologique des pays du Nord (USA, Japon et Canada, entre autres), était bel et bien disponible, (quoiqu’en quantités parfois limitées et depuis une période indéterminée), mais surtout à l’insu des premiers concernés, à savoir les populations et les autorités responsables de la santé publique dans les pays africains atteints…
Mieux, l’on ne tardera pas à annoncer, courant 2015, la mise au point de tests de dépistage rapide de l’infection humaine à virus Ebola, rendant possible sur place un diagnostic sérologique aisé quasiment instantané, supprimant ainsi les contraintes de conservation et les délais de transport des prélèvements qu’imposait auparavant le recours aux techniques diagnostiques moléculaires. Reste, bien sûr, à en déterminer le coût réel et le prix affiché par les fournisseurs.
Un dernier résultat de cette cascade tardive de réunions internationales de l’OMS consacrée au virus Ebola aura été l’œuvre d’« experts en bioéthique », qui vont autoriser le recours immédiat à des « traitements expérimentaux », y compris des vaccins recombinants, sans respect des rigoureuses procédures d’homologation habituelles, et ceci au nom de l’« urgence sanitaire mondiale » ! Un autre phénomène mis en évidence par cette explosion épidémique du virus Ebola aura été le peu de fiabilité et même l’invalidité des prédictions sur l’évolution probable de l’épidémie, proposées par les experts occidentaux, euraméricains en particulier. (cf. New England Journal of Medicine du 25 septembre 2014). Autant de projections catastrophistes fondées sur des modélisations mathématiques à prétention scientifique, qui se sont avérées fausses, car simplement infirmées par la réalité des faits. Des chiffres qui vont pourtant donner lieu à diverses projections hasardeuses et autres extrapolations fantaisistes, ayant pour effet d’entretenir la peur, de semer la confusion et d’aggraver l’isolement des pays victimes. Ce qui, soit dit en passant, n’aura guère surpris les observateurs attentifs ayant suivi antérieurement les prévisions apocalyptiques de « dépeuplement de l’Afrique », complaisamment colportées par la presse spécialisée et les mass media, au plus fort de la pandémie du VIH-SIDA, à la fin du 20ème siècle…
Nous voici donc en présence d’un virus très fragile dans le milieu extérieur, mais d’une extrême contagiosité interhumaine directe, par le biais des liquides corporels (sang, selles urine, salive, sperme, larmes, etc.) et surtout doté d’un fort potentiel épidémique lié au fait qu’un unique cas non détecté ou un seul contact non identifié peut suffire à initier une nouvelle chaîne de transmission, d’évolution imprévisible. Par la suite, les études ont montré que l’isolat viral responsable de cette épidémie ouest-africaine d’une ampleur inégalée était identique, à quelques variations près, à la souche mère initiale (Zaïre). Même si sa virulence semble moindre en termes de taux de mortalité, il est permis de s’interroger sur la période et les itinéraires de sa migration hors d’Afrique centrale et de sa pénétration en Afrique occidentale ; une question à laquelle l’épidémiologie moléculaire n’a pas encore clairement répondu. D’autant qu’il est à présent établi que le virus peut persister dans le sperme et les sécrétions génitales des sujets infectés plusieurs mois après leur guérison clinique apparente ! Par ailleurs, plusieurs faits passés sous silence laissent perplexe : l’on sait par exemple que la toute première épidémie humaine à virus Ebola s’est déclarée à Yambuku (RDC) après l’ouverture et la mise en exploitation d’une nouvelle mine d’or dans cette zone de forêt équatoriale. De même, la région transfrontalière du Mont Nimba que partagent les trois Etats membres de l’Union du Fleuve Mano principalement atteints, est réputée pour ses énormes richesses minières, non seulement diamantifères et aurifères, mais aussi en métaux ferreux et non ferreux, en voie de « mise en valeur ». Quand on apprend, de surcroît, l’existence secrète dans ces mêmes pays de plusieurs laboratoires de recherche engagés dans le « programme de défense biologique » du gouvernement US, basé à Fort Detrick (Md), initié par le Pentagone avant même la fin de la Guerre froide dans le cadre de la Loi anti-terroriste contre les armes biologiques (1989), financé par l’USAID sous le couvert du CDC ou du National Institutes of Health (NIH) de Bethesda (USA), le doute fait place à la perplexité. Même si certaines de ces unités de guerre microbiologique bénéficient d’une coopération civile officielle avec l’Université Columbia à New York, l’Université du Wisconsin-Madison, ou encore l’Université de Winnipeg au Canada. Et ceci, en totale violation de la Convention internationale sur les armes biologiques de 1988. De plus, après l’éclatement de l’épidémie en Sierra Léone, la décision de fermer (définitivement ?) le laboratoire de Kenema (biosécurité de niveau 4, lié à l’Université Tulane de New Orleans, en Louisiane) est annoncée par le ministère de la Santé, tandis que, peu après, le président Obama en personne va déclarer publiquement : « notre politique officielle est d’arrêter désormais ce type de recherche » ! Signalons au passage que le Centre International de Recherche Médicale de Franceville (CIRMF) au Gabon dispose également d’un laboratoire de biosécurité de niveau 4, où des spécialistes français poursuivent depuis des années des travaux sur les chauves-souris réservoirs du virus Ebola[2].
Le trouble devient franche inquiétude lorsque c’est dans les colonnes du Washington Post qu’un professeur de microbiologie évoque tranquillement l’hypothèse d’une mutation spontanée du virus Ebola susceptible de le rendre transmissible par voie aérienne, amplifiant ainsi son pouvoir de contamination sur le modèle de la souche Reston de l’Institut de Recherche Médicale de l’Armée US pour les Maladies Infectieuses(USAMRIID)…S’agit-il de pure spéculation théorique ou plutôt d’un conditionnement psychologique de l’opinion en vue du résultat attendu d’un programme de manipulation génétique virale en cours ? Les faits ne devraient pas tarder à élucider cette funeste énigme. Quoi qu’il en soit, ce n’est que le 29 décembre 2015 que l’OMS, considérant que dorénavant la maladie à virus Ebola ne représentait plus une « urgence de santé publique de portée internationale », va lever ses recommandations temporaires pour l’épidémie d’Ebola, fondées sur les « Règlements Sanitaires Internationaux » (2005), mais au terme d’une hécatombe ouest-africaine qui aura duré plus de deux ans et provoqué au moins 11300 décès pour environ 28000 cas.
En tout état de cause, interrogée sur les raisons de l’exceptionnelle gravité de l’épidémie ouest-africaine de ce virus précédemment contenu par des mesures classiques de quarantaine et les règles d’hygiène universelle, malgré l’absence de médicament et de vaccin, la Directrice générale de l’OMS, Mme Margaret Chan, a invoqué une cause majeure, « la pauvreté » ! Un doux euphémisme pour désigner la misère qui sévit dans cette région carrefour du Golfe de Guinée. A la faiblesse voire l’absence totale de structures sanitaires dans ces zones reculées, viennent s’ajouter non seulement les séquelles de deux terribles guerres civiles (Libéria et Sierra Léone) et d’une non moins terrible dictature militaire (Guinée), avec la corruption structurelle qu’elles entretiennent, mais aussi la perte d’une fraction significative des personnels de santé, eux-mêmes victimes au premier chef de l’épidémie. Et c’est sur ce terrain meurtri que vont venir se greffer les « interventions militaro-humanitaires » des ex-puissances coloniales, chacune dans son ancienne possession, selon des voies et moyens qui vont entraîner leur rejet violent par les populations censées être les bénéficiaires de telles opérations. De fait, les méthodes policières de recherche des sujets-contact et les procédures quasi-carcérales de mise en quarantaine dans les « centres de traitement Ebola », surajoutées aux interférences autoritaires dans les traditions culturelles et cultuelles locales (interdiction des aliments à base de gibier -stigmatisés comme « viande de brousse » - ou des rites funéraires avec contact du corps du défunt, etc.) ont pu parfois provoquer des destructions de structures sanitaires, allant jusqu’à des agressions mortelles contre des agents de la santé ou de la presse, dans les trois pays visés. D’ailleurs, dans son enquête de terrain, le socio-anthropologue Cheih I Niang n’a pas manqué de souligner à quel point ces actes de défiance psychologique et de résistance culturelle ont favorisé l’extension de l’épidémie et retardé le contrôle et l’élimination de la maladie. A la misère et à l’inefficacité du système de santé publique, il faut associer un troisième facteur explicatif de l’ampleur de la dernière épidémie : il s’agit de la peur entretenue et aggravée par l’ignorance. En effet, seule la panique permet de comprendre certaines propositions insensées formulées au plus fort de la crise sanitaire, telles que la mise en quarantaine de quartiers, et même de villes entières…
Il en va de même des mesures de fermeture intempestive des voies de communication physique, brutalement imposées par des pays du Nord, et surtout par certains Etats africains, tel le Maroc ! A ce propos, il faut saluer la conduite à la fois fraternelle et responsable de deux pays voisins, secondairement touchés par l’épidémie. A l’inverse des pays situés à l’épicentre du fléau où la faillite des systèmes de santé a favorisé l’expansion de l’épidémie, les résultats spectaculaires de contrôle et d’éradication de la maladie au Nigéria et au Mali, méritent d’être soulignés. Autant pour la rapidité et l’efficacité de la prise en charge de l’épidémie dès la détection des premiers cas importés, que pour la rigueur, la vigueur et la justesse des mesures prises pour contenir, puis éteindre la menace, sans enfreindre les valeurs traditionnelles de solidarité, ni contrevenir aux recommandations pertinentes de la Commission de l’Union Africaine (UA), demandant à tous les Etats membres de s’abstenir de fermer leurs frontières avec les pays frères atteints et insistant sur la nécessité de lutter tous ensemble contre l’extension de l’épidémie virale. Un conseil pourtant allègrement ignoré tant par la Côte d’Ivoire que par le Sénégal, qui vont successivement fermer leurs frontières terrestres, aériennes et maritimes avec la Guinée, malgré l’inexistence du moindre cas confirmé d’Ebola endogène dans leurs pays respectifs. Ces deux contre-exemples attestent de l’influence nocive et déstabilisatrice de facteurs d’ordre politico-économique et diplomatique, qui ont pour conséquence d’accroître l’isolement, l’anxiété et la détresse de populations déjà accablées.
Un ultime rappel pour illustrer l’étroite imbrication des données biomédicales, des facteurs politico-économiques et des aspects socio-culturels : en pleine poussée de l’épidémie ouest-africaine, à l’occasion d’un débat radiophonique sur la Deutsch Welle (La Voix de l’Allemagne), au cours de l’émission « L’arbre à palabre », le Dr Félix Kabange Numbi, ministre de la santé de la RDC, alors en partance pour la province de l’Equateur, où la septième flambée du virus Ebola venait d’être déclarée en fin août 2014, nous a révélé que lors des toutes premières épidémies de la fin des années 1970, le Pr Jean Jacques Muyembe, le médecin-virologiste congolais, aujourd’hui Directeur de l’Institut National de Recherche Biomédicale (INRB) de Kinshasha, avait suggéré à ses collègues nord-américains du CDC de recourir au sérum des rares convalescents ayant survécu à l’infection pour tenter une sérothérapie de sauvetage sur les malades menacés de mort. Sa proposition s’était alors heurtée à un veto catégorique et indigné des experts étrangers venus d’Atlanta. Cependant, quelques décennies plus tard, le confrère américain contaminé au Libéria et rapatrié aux USA n’a eu la vie sauve que grâce au Z Mapp fourni par le CDC et qui n’est rien d’autre qu’une préparation d’anticorps monoclonaux anti-Ebolavirus, fabriquée à partir du sérum polyclonal de patients guéris de l’infection ; ce produit dérivé recombinant étant bien évidemment enregistré à l’Office US des Brevets ! Cette anecdote d’apparence banale, est cependant riche d’enseignements quand on sait que le même Pr Muyembe, par ailleurs découvreur du virus Ebola (même s’il lui a fallu se rendre à l’Institut de Médecine Tropicale d’Anvers pour pouvoir isoler et identifier ce nouvel agent pathogène) a souligné, au cours d’une visite en 2015 dans les pays frères ouest-africains frappés par le fléau, que l’objectif principal de toute campagne contre Ebola devrait être d’empêcher que l’infection devienne endémique dans notre sous-région. Et joignant l’acte à la parole, la RDC a mis près de deux cents techniciens médicaux et paramédicaux spécialisés dans la lutte anti-Ebola à la disposition des Etats ouest-africains concernés. Avec plus d’un an et demi de recul et surtout la survenue de nouveaux cas confirmés dès le lendemain de la proclamation officielle de la « fin de l’épidémie » par l’OMS, tant en Guinée qu’au Libéria et en Sierra Léone, l’on mesure mieux l’importance et la valeur des recommandations tirées de l’expérience vécue par l’expertise africaine. A fortiori si l’on tient compte du nouveau fait clinique mis au jour par l’épidémie ouest-africaine, selon lequel les formes hémorragiques typiques de la maladie se font de plus en plus rares…
Comme toute crise majeure, l’épidémie à virus Ebola aura servi de révélateur, grossissant mais non déformant, qui a permis de mettre à nu les multiples contradictions caractérisant les sociétés et Etats du monde contemporain : domination et dépendance politiques, insécurité générale, physique et économique, inégalités sociales criantes, ignorance massive et mépris culturel sinon ethno-racial, spoliation du droit de propriété intellectuelle, fracture entre gouvernants et gouvernés, rupture entre pays légal et pays réel ou encore entre minorité lettrée et majorité analphabète, opposition ville-campagne, etc.
En Afrique, de l’interaction de ces divers facteurs résultent la faiblesse structurelle des Etats et l’extrême vulnérabilité des populations devant toute menace, quelles qu’en soient la nature et l’origine. Pour s’en tenir au seul secteur de la santé publique, domaine capital s’il en est, il n’y a donc pas lieu de s’étonner de l’ancienneté, de l’ampleur et de la sévérité de la maladie à virus Ebola sur notre continent. L’ensemble des faits recensés ci-dessus démontre à suffisance que l’émergence d’un tel virus tueur dans un contexte d’extrême pauvreté, doublée d’une faillite provoquée des systèmes de santé publique, ne pouvait qu’engendrer des conséquences catastrophiques pour les populations touchées. Les taux élevés de morbidité et de mortalité rapportés à de banales maladies infectieuses, curables et/ou évitables (gastro-entérites et broncho-pneumopathies, méningites, paludisme ou tuberculose, par exemple) se passent de commentaires. Des indicateurs médico-sanitaires certes accablants, mais au demeurant partagés avec les diasporas africaines des Amériques et de la Caraïbe ! Comment s’étonner, dès lors, des ravages provoqués, ici comme là-bas, par des virus émergents ou réémergents, de traitement bien plus délicat et coûteux, tels que le VIH naguère, Ebola aujourd’hui et, qui sait, le Zika ou les prions demain ou après-demain ?
Toutefois, l’expérience accumulée par nos compatriotes d’Afrique centrale et orientale, confortée par les exemples positifs et probants du Nigéria et du Mali, pourtant confrontés à des guerres civile et étrangère, d’une part, et surtout la tardiveté et la timidité de la « communauté internationale » tant qu’elle ne s’est pas sentie directement menacée par l’épidémie, d’autre part, devraient constituer une source abondante de réflexion et d’enseignements pour le présent et l’avenir des peuples africains du continent comme de la diaspora.
Cependant, d’ores et déjà, une leçon majeure saute aux yeux : le droit à la santé étant synonyme de droit à la vie, en tant que tel il est à la fois le préalable et la condition sine qua non de l’exercice effectif de tout autre droit humain ; aussi, la garantie de ce bien public commun relève-t-il de la responsabilité principale sinon exclusive de l’Etat souverain, qui ne saurait ni la récuser, ni l’esquiver ni la déléguer à une quelconque autre autorité publique ou privée, nationale ou étrangère. Comment, en effet, nier l’évidence que la clef du succès futur dans la lutte contre l’épidémie à virus Ebola au même titre que toute autre menace sanitaire, alimentaire, sécuritaire monétaire ou environnementale, réside d’abord dans la volonté politique ferme et résolue de faire face au péril soi-même et en comptant d’abord sur ses propres forces ; et ensuite, dans l’efficacité organisationnelle des décisions et mesures pratiques prises ? Et accessoirement seulement, sur l’aide et le soutien extérieurs, c’est-à-dire extra-africains. Autrement dit, la détermination des décideurs prime sur les choix techniques des experts, l’appui étranger ne venant qu’en appoint.
Il convient, pour finir, de citer l’article premier du Serment des Chasseurs (1212) qui n’en compte que sept et deviendra la Charte du Manden en 1222 : «Toute vie (humaine) est une vie. Il est vrai qu’une vie apparaît à l’existence avant une autre vie. Mais une vie n’est pas plus « ancienne», plus respectable qu’une autre vie. De même qu’une vie n’est pas supérieure à une autre vie ». Une banalité de base africaine aussi ancienne que futuriste, qu’il s’agit de réactualiser en principe sociétal fondateur pour toute l’humanité !
C’est dire que seule une refondation unitaire et souveraine de nos Etats, s’accompagnant d’une restructuration égalitaire et solidaire des sociétés africaines, serait susceptible de créer les conditions requises, matérielles et culturelles, permettant aux peuples du continent d’affronter efficacement et victorieusement les dangers de toutes sortes qui hypothèquent présentement leur avenir tant collectif qu’individuel, en ce début de troisième millénaire menaçant et inquiétant.
[1] « Ebola epidemic exposes the pathology of the global economic and political system » PHM Position Paper (2015)
[2] Ref: “Biowarfare and Terrorism” par Francis Boyle (2006)
THE EBOLA VIRUS EPIDEMIC- WHAT ARE THE LESSONS AFRICA CAN LEARN ?
This article is dedicated to our late sister and comrade Aminata DiawCissé, a philosopher by training, and botha free mind and beautiful spirit of the highest order,an esteemed fighter on all fronts of the Africancause, which is none other than the cause of humankind.
The natural history of Ebola virus disease (EVD) has proved to be enlightening in both biomedical and socio-cultural terms, providing new insight into the present state of Africa and of the contemporary world.
Ebola is the main representative of a new RNA taxonomic family, the Filoviridae, whose prototype appeared in 1967 at Marburg (Germany) and Belgrade (Yugoslavia), in a laboratory that produced polio vaccines. The Marburg virus as it was referred to caused the very first human epidemic of deadly haemorrhagic fever associated with a filovirus. It was isolated in a colony of green monkeys imported from Uganda (all of which ended up being euthanized) and remains today the only identified species in its genus. It was subsequently responsible for some ten additional sporadic outbreaks, mainly in eastern and central Africa.
The Ebolavirus genus was not discovered until nearly a decade later, in 1976, when severe outbreaks occurred almost simultaneously at Yambuku, in the Congo (DRC) and Nzara (South Sudan), with hundreds of cases and several dozen deaths. Since then, from the last quarter of the 20th century to the first decade of the 21st century, more than twenty outbreaks of haemorrhagic fevers caused by the Ebola virus were reported in what is known as Sub-Saharan Africa affecting, in addition to the two Congos and Sudan, mainly Uganda, Kenya and Gabon, but not only. A single, non-lethal human case in Cote d’Ivoire, in the Tai Forest national park (1994) and an animal epidemic in Reston, Virginia (USA), affecting a population of macaque monkeys imported from the Philippines (1990) should be noted. This laboratory strain referred to as Reston is thought to be non-pathogenic for humans, while the virulence of the subtypes known as Zaire and Sudan is thought to vary with a case fatality rate of between 40 and 90%. The pathogenicity or otherwise of the Tai Forest strain has yet to be determined. Finally, during the years 2000, another subtype named Bundibugyo was isolated and identified during the human epidemics in Uganda and the Congo. There are therefore five distinct recognized subtypes in the Ebolavirus genus.
Hence, between 1976 and 2012, the emergence in the heart of the African continent of Ebola virus infections in the form of recurrent epidemics gave rise to nearly 2000 cases, including 1100 deaths, considering only the outbreaks that led to at least 100 cases of properly diagnosed cases. This viral haemorrhagic fever of a new type, which had so far been considered to be confined to the forest areas of equatorial Africa, aroused little interest apart from among the populations and health authorities of the countries concerned, and among World Health Organisation (WHO) experts and other specialised research bodies such as the Centres for Disease Control and Prevention (CDC) of Atlanta (USA), the Institut Pasteur in Paris (France), the Medical Research Council (MRC) in Cambridge (GB) and the National Institute for Communicable Diseases (NICD) of Johannesburg (South Africa), in particular.
This relative lack of interest on the part of public health officials and the multinational pharmaceutical corporations combined with the novelty of this family of epidemic viruses that are not insect-borne, and therefore different from the better known arboviruses —both regional (yellow fever, Chikungunya, Rift Valley) and global (Dengue) —explains at least in part the difficulties observed in the diagnosis and treatment of this emerging infectious disease. One example are the meanderings seen in determining the animal reservoir for the virus (particularly important from an epidemiological standpoint since the transmission of the pathogen is non-vector-borne) initially ascribed to small and large apes, then to rodents, before finally being attributed to fruit bats, identified as the sole, asymptomatic carriers of the Ebola virus. Furthermore, because it is an extremely dangerous virus, its culture, which is essential for in-depth investigation, requires the highest bio security level (level 4, of which there are only three or four civilian laboratories officially recorded for the whole of Africa). As a result, there have been cumulative delays both in research on drugs and/or vaccines and the development of relatively simple serological tests which has meant that molecular diagnostic techniques had to be used that only a very few specialised reference laboratories can perform. These laboratories are generally located in cities far from the rural areas where these epidemics tend to occur. For several decades such was the status quo to which nobody seemed to take exception…
Or not until the wholly unexpected and unprecedented occurrence of the epidemic in West Africa, marking a major turning point in the natural history of EVD. From the index case that appeared in a village in the Guekedou forest area in December 2013, spreading to the districts of Macenta and Nzérékoré (Republic of Guinea), a huge epidemic erupted, beginning in rural areas but then moving to cities and gradually onwards by contiguity to neighbouring countries in the districts of Kenema and Kailahun (Sierra Leone) and Lofa district (Liberia).
Hence, during the year 2014, out of a total of 67 districts in these three countries, 43 were affected by the extension of the epidemic, with more than 90% of the confirmed, probable and suspected cases recorded in just 14 districts. Worse still, as early as July, the outbreak spread to other Western African countries, with imported cases leading to fatal secondary cases, first in Nigeria and then in Mali, while a single, non-fatal imported case reached Senegal. It was not until March 25, 2014, i.e. nearly four months later, that the WHO officially announced “the existence of an epidemic of Ebola haemorrhagic fever in West Africa.” Another four months went by before WHO officials announced, on August 8, 2014, that EVD is a “Public Health Emergency of International Concern”! It is true that in the interim, on August 2 to be precise, when a few isolated cases exported outside of Africa involving expatriate medical and paramedical staff (two in the USA and one in Spain) were discovered, a wave of panic gripped Western public opinion… producing an instantaneous reaction on the part of what is customarily referred to as “the international community”.
In any case, on September 22, 2014, the WHO’s count for the West African epidemic stood at 5843 cases and 2803 fatalities; health care staff were severely affected, with 337 cases including 181 fatalities. Although, as stated by African and foreign experts themselves, these figures were in all likelihood underestimated, they show the disease to be spreading at lightning speed when compared to the previous situation report which, on August 16, reported 2240 confirmed, probable or suspected cases, including 1229 fatalities.
This is a patent instance of the application of the invariable unwritten “double standards” rule, which prevails in the area of the right to health as it does to any other fundamental right of human beings, in Africa and in the rest of the world. An eloquent illustration of this is provided by the emblematic case of our devoted Sierra Leone colleague, Dr Olivet Buck, who was contaminated by her patients and died after being denied evacuation to Germany on medical grounds in spite of the pressing request made by her country’s President.[1]
Numerous manifestations of inequality and iniquity in access to care, in the raising and managing of appropriate resources and in levels of information, inter alia, became apparent both in respect of the alert and the response to this threat, now seen to have the potential to become a pandemic. Only some of the more salient aspects are detailed here.
Indeed, following this spectacular announcement, the WHO triggered a series of international meetings of experts in Geneva, between August and September 2014 at a time when the epidemic was expanding fast. Until then it was commonly accepted that there was no treatment, whether preventive or curative, for EVD; the only possible interventions were palliative, aimed at relieving symptoms. The outcome for every case was therefore fundamentally dependent, as for any viral infection, on the patient’s immune competence in the face of the density and virulence of the contaminant inoculums, and to a lesser extent, on the expeditiousness and quality of supportive treatment.
It therefore came as a great surprise to African specialists, not to say a source of outrage, at the end of the first major meeting of experts at WHO headquarters, to be told that not only were there already nearly half a dozen active drugs against the Ebola virus, but also, albeit at the experimental stage (some having already reached or gone beyond the clinical trials stage), at least two candidate vaccines that were undergoing evaluation! In other words, a nearly complete range of preventive and curative therapies produced by the public or private pharmacological research sectors of Northern countries (US, Japan and Canada, amongst others) was already available and had been for some time although sometimes in limited quantities behind the backs of those primarily concerned, i.e. the populations and authorities in charge of public health in the affected African countries…
Better still, there was soon an announcement in 2015, that rapid diagnostic tests for Ebola virus human infection had been developed, making it possible to perform a quick and easy test producing an almost instantaneous diagnosis on the spot with the effect of doing away with the time constraints and preservation requirements for sending samples associated with molecular diagnostic techniques. It remained to be seen, of course, what the actual cost was and the price the suppliers would announce.
Another outcome of this belated cascade of international WHO meetings dealing with the Ebola virus was produced by the “bioethics experts” who immediately authorised the use of “experimental therapies”, including recombinant vaccines, thereby circumventing the usual stringent certification procedures, in the name of the “global medical emergency”! Another phenomenon that came to light through this epidemic explosion of the Ebola virus is the unreliability and indeed the unsoundness of forecasts on the probable progression of the epidemic offered by Western experts, in particular the Euro-American experts (see New England Journal of Medicine September 25, 2014). They produced a plethora of bleak projections based on mathematical models claiming to be scientific that turned out wrong, simply because they were contradicted by actual facts. Nonetheless these figures gave rise to various hazardous projections and fanciful extrapolations, the effect of which was to stoke up fear, cause confusion and increase the isolation of the stricken countries. This did not, by the way, come as a surprise to attentive observers who had previously followed the apocalyptic predictions of the “depopulation of Africa” obsequiously peddled by the specialised press and the mass media, at the height of the HIV-AIDS pandemic at the end of the 20th century.
Here we are dealing with a virus that is very fragile in the outdoor environment but extremely contagious by human to human contact through body fluids (blood, faeces, urine, saliva, semen, tears, etc.) and moreover one that has major epidemic potential deriving from the fact that a single non-detected case or a single unidentified contact can be enough to trigger a new transmission chain whose progression is unpredictable. Studies subsequently showed that the viral isolate responsible for this West African epidemic of unprecedented magnitude was identical, but for a very few variations, to the initial parent strain (Zaïre). While its virulence appears to be lesser in terms of case fatality rate, there are questions about when the virus migrated outside of Central Africa and entered West Africa and the routes it followed; so far molecular epidemiology has not clearly answered these questions. Particularly since now it is established that the virus can persist in the semen and genital secretions of the infected individuals for several months after they appear to have clinically recovered!
Furthermore, a number of facts that are never mentioned provide food for thought: for instance, it known that the very first Ebola virus human epidemic started at Yambuku (DRC) when a new gold mine was first opened and began operations in this area of the equatorial forest. Similarly, the cross-border Mount Nimba area shared by the three member states of the Mano River Union that were most affected is famous for its huge mineral wealth, not only diamonds and gold but also ferrous and non-ferrous metals that are being “developed”. When, additionally, one discovers that in those countries there are several research laboratories secretly engaged in the US government’s “Biological Defence Program” based at Fort Detrick (Md) initiated by the Pentagon even before the end of the Cold War in connection with the Biological Weapons Anti-terrorism Act (1989), and funded by USAID behind the façade of the CDC or the National Institute of Health (NIH) at Bethesda (USA), doubts turn into perplexity. Even though some of these microbiological war units are engaged in official civilian cooperation with Columbia University, New York, the University of Wisconsin-Madison, or the University of Winnipeg, Canada in complete violation of the 1988 International Convention on Biological Weapons. Furthermore, after the Sierra Leone epidemic broke out, the Ministry of Health announced the decision to (permanently?) close down the Kenema laboratory (level 4 bio security) linked to Tulane University, New Orleans, in Louisiana). Soon afterwards, President Obama in person publicly declared: “our official policy is now to stop this type of research”! It should be noted in passing that the Centre International de Recherche Médicale de Franceville (CIRMF-International Medical Research Centre of Franceville) in Gabon also has a level 4 bio security laboratory where French specialists have for years investigated the bats that act as Ebola virus reservoirs.[2]
This bewilderment turns into outright distress when a microbiology professor, writing for the Washington Post, calmly contemplates the hypothesis of a spontaneous mutation of the Ebola virus that could make airborne transmission possible, therefore enhancing its capability to contaminate consistent with the Reston strain model of the U.S. Army Medical Research Institute of Infectious Diseases (USAMRIID).
Is this pure theoretical speculation or else is the aim to condition public opinion psychologically and pave the way for the anticipated result of an ongoing genetic manipulation of the virus? This deadly enigma should soon be elucidated by facts. In any case, it was not until December 29, 2015 that the WHO, which now no longer considered EVD to be an “international public health emergency” lifted its temporary recommendations for the Ebola epidemic, based on the “International Health Regulations” (2005), after the disease had raged through West Africa over a period of more than two years causing at least 11300 deaths out of approximately 28,000 cases.
Ms Margaret Chan, the Director-General of the WHO, answered a question about the reasons for the unusual severity of the West African epidemic of this virus that had hitherto been contained by conventional measures such as quarantine and universal rules of hygiene, in spite of no drugs or vaccines being available, saying that one major cause was “poverty”! A cute euphemism to describe the misery rampant at this meeting point in the Gulf of Guinea. The weakness and sometimes complete lack of health facilities in these remote areas, is compounded by the after-effects of two terrible civil wars (Liberia and Sierra Leone) and by an equally fearful military dictatorship (Guinea) engendering structural corruption. Matters are made worse by the loss of a significant fraction of health workers who are the primary victims of the epidemic. This is the devastated setting where the “military-humanitarian” interventions of former colonial powers come to put down roots, each in its own past possessions, in ways and using means that lead to their being violently rejected by the populations that were supposed to benefit from those operations. Indeed, the police methods for tracing contacts, the prison-like procedures for enforcing quarantine in the “Ebola treatment centres”, combined with authoritarian interference in local cultural and religious traditions (ban on food made from game – stigmatised as “bush meat”- or burial rites where there is contact with the deceased’s body, etc.) have in some cases triggered destructions of health facilities, and even deadly assaults on health care workers or the press in the three countries concerned. Indeed, in his investigations in the field, the socio-anthropologist Cheikh I. Niang underscores how these acts triggered by distrust and cultural resistance facilitated the extension of the epidemic and caused delay in controlling and eliminating the disease. In addition to extreme poverty and the inefficiency of the public health system, a third factor explains the magnitude of the latest epidemic: fear that is fostered and aggravated by ignorance. Only panic can explain some of the senseless proposals made at the height of this health crisis, such a putting whole neighbourhoods, even whole cities in quarantine…
The same applies to the brutal closing of physical communication routes suddenly required by countries of the North, and by some African countries such as Morocco! On this topic, the brotherly and responsible behaviour of two neighbouring countries secondarily affected by the epidemic deserves a tribute. In contrast with the countries situated at the epicentre of the scourge where the failure of health systems fostered the expansion of the epidemic, the spectacular results in controlling and eradicating the disease in Nigeria and Mali deserve recognition. Both for the speed and efficiency of the management of the epidemic as soon as the first imported cases were detected and for the rigorousness, vigour and pertinence of the measures taken to contain and then extinguish the threat, without infringing the traditional values of solidarity or breaching the relevant recommendations of the African Union (AU) Commission requesting all member states to abstain from closing their borders with their affected sister countries and emphasizing the need to fight the extension of this viral epidemic together. This advice was merrily ignored by Côte d’Ivoire and Senegal; they closed their land, air and sea borders with Guinea one after the other in spite of the fact that not a single endogenous case of Ebola was confirmed in their own countries. These two counterexamples are indicative of the harmful and destabilising influence of politico-economic and diplomatic factors that increase isolation, anxiety and distress among populations that are already overwhelmed.
One last illustration of the tightly knit relationship between biomedical data, politico-economic factors and socio-cultural aspects: at the height of the West African epidemic, a debate was broadcast on German radio Deutsch Welle (the voice of Germany), during the “The Palaver Tree” programme. During the discussion, Dr Félix Kabange Numbi, Minister of Health for the DRC who was about to leave for the Equateur province, where the 7th outbreak of Ebola disease had just been declared at the end of August 2014, revealed that during the very first epidemics in the late 1970s, the Congolese physician and virologist Prof. Jean- Jacques Muyembe, who is now the Director of the National Institute for Biomedical Research (INRB) in Kinshasha, had suggested to the CDC and to his North American colleagues that they might use the serum of the few convalescing patients that had survived the infection and attempt serotherapy to save patients at risk of dying. At the time, this suggestion met with a categorical and indignant no from the foreign experts who had come from Atlanta. Nonetheless, a few decades later, the American physician contaminated in Liberia and repatriated to the USA owes his survival to the ZMapp supplied by the CDC. ZMapp is none other than a preparation of anti-Ebolavirus monoclonal antibodies, made from polyclonal serums taken from patients who had recovered from the infection. This recombinant derived product has naturally been registered at the US Patent Office! What might appear to be a trivial detail in fact turns out very informative when one considers that the same Prof. Muyembe—who furthermore discovered the Ebola virus (even if he had to go to the Institute of Tropical Medicine in Antwerp to isolate and identify this new pathogen)— on a visit in 2015 to the sister countries in West Africa that were stricken by this scourge, underscored that the main objective of any campaign against Ebola should be to prevent the infection from becoming endemic in our sub-region. Matching actions with words, the DRC made nearly two hundred medical and paramedical technicians specialised in combating Ebola available to the West African states concerned. With the hindsight of over a year and a half and moreover the occurrence of additional confirmed cases in Guinea, Liberia and Sierra Leone the very next day after the WHO officially announced the “end of the epidemic”, the importance and value of the recommendations based on the experience gained by African experts are made all the more apparent. And even more so if one considers a new clinical fact that has arisen in the West African epidemic, i.e. that the typical haemorrhagic forms of the disease are becoming less and less common…
Conclusion
Like any major crisis, the Ebola virus disease has brought out into full view the multiple contradictions that characterise the societies and States of our contemporary world, magnifying but not distorting them: political domination and dependence, general physical and economic insecurity, glaring social inequalities, mass ignorance and cultural – if not ethno-racial - contempt, dispossession of the right to intellectual property, the rift between governing and the governed, the mismatch between what law sets out a country to be and the actual country, a country by law and the real country, or between literate minority and illiterate majority, urban vs. rural conflict, etc.
In Africa, the interaction between these various factors gives rise to structural weakness of the State and extreme vulnerability of the populations to any threat regardless of its nature or origin. If one considers the public health sector alone, whose role is crucial, it comes as no surprise that the Ebola virus disease has existed for a long time, is widespread and particularly severe on our continent. The facts reported above amply demonstrate that the emergence of such a deadly virus in a context of extreme poverty compounded by the induced collapse of public health systems was inevitably going to have catastrophic consequences on the populations affected. The high rates of morbidity and mortality for ordinary infectious diseases that are curable and/or evitable (gastroenteritis and broncho-pulmonary diseases, meningitis, malaria or tuberculosis, for instance) speak for themselves. These are undoubtedly damning health care indicators shared by the African diasporas in the Americas and the Caribbean! There is hardly reason to be surprised by devastation caused, both there and in Africa by emerging or re-emerging viruses, that are far more difficult and costly to treat, such as HIV in the past, Ebola today and, who knows, perhaps Zika or the prions tomorrow or the day after ?
Notwithstanding, the experience accumulated by our compatriots in central and western Africa, supported by the positive and conclusive examples of Nigeria and Mali in spite of being confronted with civil strife and a foreign war on the one hand, and the sluggishness and timidity of the “international community’s” response up until it felt directly threatened by the epidemic on the other, should provide abundant food for thought and materials from which to draw conclusions about the present and future of African peoples both on the continent and in the diaspora.
One major lesson is immediately obvious: the right to health is synonymous with the right to life and as such it is at the same time a pre-requisite and the sine qua non condition for effectively exercising all other human rights. As such, responsibility for guaranteeing this common public good lies prevalently, if not exclusively, with the sovereign State. The latter cannot decline, or evade or delegate that responsibility to another public or private authority, be it national or foreign.
Clearly, the key to the future success of the fight against the Ebola virus epidemic, similarly to any other threat in the areas of health, food, security, currency or environment lies primarily in the existence of a firm, resolute political will seeking to confront the danger from within relying on its own forces; and secondly on the organisational efficiency of the decisions and practical measures taken; and also, but in a subsidiary way, on aid and support from outside of Africa. In other words, the determination of the decision makers prevails over the technical choices of experts, with foreign support acting in a supplemental capacity.
To end, here is a quotation of Article 1 of the seven articles of The Hunters’ Sermon (1212) that became the Manden Charter in 1222:
“The hunters declare:
Every human life is a life.
It is true that a life comes into existence before another life
But no life is more ‘ancient’, more respectable than any other
In the same way no one life is superior to any other”
A basic African commonplace as ancient as it is futurist that must be reinstated to serve as a fundamental societal principle for whole of humanity!
This means that only radical reform that achieves the unity and sovereignty of our States, together with the restructuring of African societies on a foundation of equality and solidarity, could produce the material and cultural conditions required to enable the peoples of the continent to effectively and successfully confront the dangers of all sorts that weigh on our collective and individual futures now, at the beginning of this menacing and disquieting third millennium.
[1] “Ebola epidemic exposes the pathology of the global economic and political system” PHM Position Paper (2015)
[2] Ref: “Biowarfare and Terrorism” par Francis Boyle (2006)
LA CHRONIQUE HEBDO DE PAAP SEEN
LE SANG ANONYME
EXCLUSIF SENEPLUS - Sur la chaise de transfusion, j’ai essayé d’être le plus positif possible - Le cœur léger et ouvert - En unité avec l’univers - NOTES DE TERRAIN
Samedi 30 mai 2020. Il n’est pas prévu que je sorte aujourd’hui. Les deux jours précédents, il a fait chaud. Très chaud. Et j’ai beaucoup marché. Plusieurs fois dans la rue, j'ai ôté mon masque en tissu. Tellement l’air était sec, la chaleur pesante. Du reste, je n’ai rien à faire dehors, d’urgent ou d’obligatoire ce week-end. Je vais profiter de la fraîcheur de l’appartement, et continuer la lecture critique de Jeremy Rifkin. C’était le programme. Je m’y suis attelé. De 9 heures à 12 heures. Seules deux conférences de travail, très brèves, ont entrecoupé la séance. Il n’était pas non plus prévu d'ouvrir Twitter. Le samedi est un jour de break sur les réseaux sociaux. Mais voilà, j’ai abdiqué.
La technologie n’a pas seulement changé nos modes de vie. Elle nous rend esclaves. Tentés en permanence par le clic. Indisponibles à la pleine conscience. Happés par une curiosité insatiable et délirante. Qu’est-ce que nous cherchons sur les réseaux sociaux ? Très peu de ce qui augmente l’esprit. J’ai consulté Twitter, par manque de contrôle. Y avait-il des choses intéressantes ? Beaucoup de tweets sur les Etats-Unis. Quelques informations sur la situation du jour, concernant le Covid-19 au Sénégal. Les mêmes centres d’intérêt. Les mêmes rengaines. Les mêmes influences. Les névroses. Les mégalomanies. Les grandes frustrations. On pourrait très facilement faire une archéologie sociale. En parcourant attentivement les messages sur les réseaux sociaux.
Il serait même aisé de tirer quatre ou cinq conclusions solides : des convenances débilitantes ; une médiocrité spirituelle ; une bourgeoisie bouffonne, une disposition à la courtisanerie ; un manichéisme total. Si l’on observe en profondeur, on se rend compte que les mêmes forces d’inertie, qui agissent depuis longtemps sur le corps social et l’exposent à tous les jougs, continuent leur travail de sape, en s’emparant de la technologie. Il faut y voir clair. Si l’on regarde les choses de près, qu’est-ce qui fait tendance ? Un vieil esprit, au fond réactionnaire. En examinant les forces qui nous modèlent, nous parvenons à comprendre notre mouvement en tant que peuple. Nos ressorts psychologiques. Et ainsi, pouvons-nous répondre à cette question : pourquoi sommes-nous dans une situation sociale si mauvaise ?
En scrollant, je suis tombé sur un post qui appelait à un don de sang. Une urgence. Un patient avait besoin d’un donneur spécifique. Je répondais au profil recherché. J’ai envoyé un message à la personne qui a écrit le message, pour lui demander si un donneur a été trouvé. Elle a répondu, quelques minutes plus tard. Des volontaires se sont manifestés. J’avais déjà embarqué dans le premier taxi que j’ai aperçu dans la rue. Une vieille Renault. La carcasse rouillée à l’extérieur, poussiéreuse à l’intérieur. Direction le Centre national de transfusion sanguine. À bord, le chauffeur m’a expliqué qu’il avait entendu à la radio, le matin, qu’il y avait une pénurie de sang. Il m’a demandé si j’allais faire un don. J’ai répondu par l’affirmative.
- Dieu te le rendra.
- Amiin !
Mais il ne s’agissait pas de cela. Ce n’était ni pour une récompense divine, ni par élan altruiste pur que je le faisais. C’était juste une exigence. Un impératif catégorique. En réalité, je ne voulais pas bouger ce samedi matin. En voyant le message sur Twitter, je me suis représenté mentalement un homme mourant, victime d’accident. Quelque part, dans une salle triste de Dantec ou de Principal. Où j’ai quelquefois séjourné. Quel enfer ! Va savoir pourquoi mon imagination est allée aussi loin ! Dès que cette image a surgi, j’ai pensé : « Si tu ne te lèves pas immédiatement pour y aller, ce sera une non-assistance à personne en danger. » Ce jugement moral m’a soulevé de mon siège. Je suis arrivé au Cnts, très vite. La circulation était fluide.
À l’accueil, deux personnes agréables m’ont donné une fiche à remplir. J’ai été ausculté. Puis deux autres formalités ont été suivies. On m’a enfin donné une poche de sang vide, et désigné une salle pour l’opération. La femme qui m’a piqué manquait de délicatesse. Elle faisait son travail, mécaniquement, sans empathie. Vraisemblablement, elle voulait rentrer. Elle était un peu agacée, par le défilé de donneurs, qui continuait. Sur la chaise de transfusion, j’ai essayé d’être le plus positif possible. Le cœur léger et ouvert. En unité avec l’univers. Pour que le sang que je partage puisse être aimant et généreux. J’ai médité sur l’interdépendance. Le sang qui coule dans mes veines est le fruit de nombreuses interactions. Les globules blancs, les globules rouges, le plasma et les plaquettes constituent les produits finis de labeurs. Qui dépassent ma personne et enjambent les frontières.
Au-delà de son caractère vital pour l’organisme, le sang est la moisson d’une collaboration dont les liaisons sont isolées. Le pain que j’ai mangé, ce matin. Le kinkéliba absorbé. L'eau de source embouteillée des plateaux de Diass, avec laquelle je me suis désaltéré. Le riz thaïlandais avalé, hier. Mes veines accueillent les fruits de laboureurs inconnus. Qui sont parfois à des milliers de kilomètres. C’est pourquoi le sang que je donne, qui contient la chaleur de mon être, ne m’appartient pas exclusivement. C’est l’intelligence de l’univers qui a voulu que j’en sois le dépositaire. J’espère que ce sang sera équilibré. Calme. Pour que les nutriments qu’il transporte soient les levains de la guérison. Et qu’il nourrisse utilement les entrailles de ce frère ou de cette sœur, anonyme. C’est une prière. Amiin !
Retrouvez sur SenePlus, "Notes de terrain", la chronique de notre éditorialiste Paap Seen tous les dimanches.
Ni la religion ni les règles de bienséance ou tout simplement de bon sens ne peuvent justifier une chasse aux cadavres de victimes du coronavirus. La réaction de la presse n'a pas été à la hauteur des méfaits des populations de Malika et Diamaguène
Vous souvenez-vous du défunt artiste comédien Abou Camara, celui qui tint le merveilleux rôle de l'imam Biram, dans le film ‘’Guelewaar’’ dont je vous ai parlé il y a quelques semaines ? Sa sagesse et son érudition avaient permis de s'opposer aux irréductibles villageois qui ne voulaient pas accepter l'exhumation du cadavre de Pierre Henri Thioune alias Guelewaar, catholique et activiste, victime d'une confusion de corps avec un musulman à la morgue. Un vigoureux coup de bâton de l'imam asséné à un écervelé mit fin aux ardeurs des plus déterminés.
L'imam Biram alla même jusqu'à sortir de sa bouche de très gros mots qui ne manquèrent pas d'interloquer un des témoins de la scène : "Ah ! Imam saga na" (Imam a injurié). Il avait toute raison, ce jour-là, d'être exaspéré par ses disciples dont l'intolérance et l'obscurantisme ne se justifiaient point. Eux s'opposaient au déterrement d'un cadavre, fût-il de religion différente, et à qui ses proches voulaient offrir tout légitimement un office funéraire conforme à sa croyance religieuse.
D'autres, plus incompréhensibles encore, voulaient s'opposer, cette semaine, à un enterrement sous le prétexte que le mort a succombé au coronavirus. Incroyable ! Que la bêtise humaine peut mener loin. Les histoires relatées par la presse dans les localités de Malika et Diamaguène ne méritent pas simplement d'être rapportés comme des faits d'armes d'une population déterminée à défendre son territoire, mais bien comme les méfaits d'ignorants et d'intolérants qui doivent être jetés à l'opprobre.
Cette vindicte populaire est d'autant plus inacceptable que des concitoyens se sont battus de toutes leurs forces pour faire reconnaître aux Sénégalais décédés à l'étranger du coronavirus le droit d'être enterrés dans leur pays natal. Jusqu'à finir par faire plier l'Etat.
Ni la religion ni les règles de bienséance ou tout simplement de bon sens ne peuvent justifier une chasse aux cadavres de victimes du coronavirus. Mourir de Covid-19 est-il plus honteux que décéder du paludisme, d'hypertension artérielle ou du cancer ? Ceux qui pourchassent les équipes en charge de l'enterrement connaissent-ils leur propre sérologie et jetteront-ils les corps de leurs propres parents, le jour où ils mourront du coronavirus ? C'est à croire que dans ces localités, il n'y a eu personne de la dimension de l'imam Biram pour raisonner la foule sans conscience, au comportement si vilain. Imam Biram leur aurait dit, sans doute, comme dans le film : "Koulou nafsin da iqatu mawti..." (Toute âme goûtera à la mort...). Et puis, si cela est encore utile à la cause, depuis quand un cadavre correctement enterré pose-t-il un quelconque problème aux riverains ? Si tel était le cas, personne ne survivrait aux alentours du cimetière de Yoff où reposent des défunts décédés pour diverses raisons, y compris de maladies contagieuses.
La réaction de la presse n'a pas été à la hauteur des méfaits des populations de Malika et Diamaguène. Les Unes (jeudi 28/05) de "l'As" (Diamaguène saccage les ambulances des pompiers et de la Croix-Rouge) et de "la Tribune" (Les populations empêchent un enterrement Covid-19) sont, d'une part, les rares à être consacrées à cette abomination tout en étant, d'autre part, assez factuelles pour ne pas dire neutres. "L'Obs" avait tout de même, dès la première forfaiture, traité cet incident d'"effarant" dans son édition de mercredi. "Il faut éclairer l'ignorance qui ne connaît pas et la pauvreté qui n'a pas les moyens de connaître", disait Henri Grégoire, Evêque et homme politique français. Un imam Biram français, aurait-on pu dire...
Face à certains dangers, la banalisation des faits ou l'indifférence de la presse est tout aussi coupable que les pratiques condamnables. A l'Etat, de qui est attendue la plus grande fermeté, comme aux leaders d'opinion locaux aussi, de ne pas laisser prospérer de telles inconduites chez les populations victimes de leur ignorance. Un comportement bête et méchant !
par Babacar Diop Buuba
MULTIPLE PHOTOS
HORREUR ET FÉCONDITÉ (4)
EXCLUSIF SENELUS - Unis, solidaires, nous pouvons vaincre le Covid-19 et d’autres fléaux qui apparaîtront. Les divinités les plus terrifiantes de l’Egypte pharanoique sont aussi symboles de fécondité et de vie nouvelle (français & arabe)
SenePlus publie en exclusivité, la quatrième et dernière partie du texte "Horreur et fécondité" du PAALAE initialement écrit en wolof par Babacar Buuba Diop, traduit en arabe par Samira Dlimi, professeure à l'université Mohammed V de Rabat.
V / Epilogue ou interlude
Depuis donc la presqu’île du Cap-Vert, de Dakar, des Mamelles, Almadies, terre et colline, grotte, coin de spiritualité concentrée et contrastée, j’ai pu sentir le tournant du deuxième mois d’observation au Sénégal ; ce pic redouté et annoncé parfois par des officiels dont le ministre de la Santé et de l’Action Sociale, Abdoulaye Diouf Sarr, la Directrice de la Santé Mme Khémesse Ngom Ndiaye.
Il suffira de lire ces signaux dans nos documents annexes regroupés sous le titre « Chroniques d’angoisses et d’espoirs ».
Il est légitime de se demander si le bon départ médiatisé ne constitue pas en réalité un faux départ.
Un des excellents éditorialistes de seneplus.com, Serigne Saliou Guèye n’a pas hésité à titrer « Les frais du dilettantisme » (seneplus.com du 26 Avril 2020). Il a souligné l’absence de prévision, les erreurs d’appréciations, de pilotage de la lutte contre la pandémie. A son avis, on avait crié trop tôt victoire et entonné l’hymne de l’exception sénégalaise. Il a bien suivi le déboussolement des autorités politiques face aux embouteillages humains, etc.
Il est révélateur que, durant le second mois d’observation, le cap de 1 000 cas a été dépassé, au début du troisième, avec 3 décès, la barre presque symbolique de 10 a été dépassée ; en wolof fukk (dix) semble proche de sukk, être à genoux. On s’est mis à souhaiter ne pas atteindre 20 (nitt ou ňaari fukk, ňaari sukk, deux génuflexions, ce qui pourrait tout de même permettre de se redresser avec, comme dans la lutte traditionnelle (làmb), une troisième chance. Il faut imaginer Sisyphe heureux, ainsi on peut toujours se réorienter (niit), comme a fait le grec Diogène, en utilisant sa lanterne, et découvrir le véritable humain qui peut rire ou pleurer comme rama, ramatou des Egyptiens, qui est passé d’homo erectus à sapiens. Ku bëreey daan, seuls ceux qui luttent peuvent espérer vaincre.
Pic ou plateau
Durant les dernières semaines d’Avril, le Sénégal est classé dans les dix premiers pays où la progression du Covid-19 est la plus grande, avec une augmentation journalière en moyenne de 100%. La question est de suivre les mouvements pour mieux repérer correctement le pic ou, encore mieux, le plateau épidémiologique.
Il est vrai que le Sénégal, comme du reste l’Afrique, malgré les prévisions catastrophiques de certains esprits bien ou mal intentionnés, n’a pas été à la derrière classe des pays engagés dans la lutte. Les spécialistes des différentes disciplines essayeront d’analyser le répit accordé à l’Afrique, du reste confrontée, au même moment, au paludisme, aux menaces des inondations, du criquet pèlerin, aux terrorismes de toutes sortes, à la mal gouvernance, au fléau des dettes honteuses et illégitimes, etc.
Au moment où, après un trimestre, les dégâts sont chiffrés à 2 954 106 touchés par le virus, 87 458 guéris ; 205 398 décès, la Méditerranée Orientale avait 5%, l’Europe 50%, les Amériques 37%, le Pacifique Occidental 6%, l’Afrique, comme l’Asie du Sud Est, se situait à 1%. Et dans cette Afrique, brillent certains success histories (Lesotho, Comores, République Centrafricaine, Mozambique, Rwanda, Madagascar, Zambie, Bénin) alors que d’autres présentent des signes inquiétants (République Sud-africaine plus le Maghreb et Machreb). Comme quoi, ceux qui sont les plus intégrés au marché mondial et aux trafics divers ont été les plus menacés et les plus atteints.
Observatoire
Notre aventure, nos complicités et solidarités, ont démarré dans le cadre d’un dialogue entre Dakar, Mbao, Thiaroye, en direction des Niayes, Kër Mbay Faal, Yeen, Tubaab Jalaaw, en direction de Joof Yoor, Yaayeem, Kër Samba Ja, avec des aller-retour vers Paris, Toulouse, Bruxelles, La Sicile, New-York, le Canada, retour sur Dakar Fann, Le Plateau, Médina, Mermoz sans oublier le quartier Bopp, siège de l’USE, au centre A. Malick Gaye, sans oublier l’internet, ce lien vers divers sites dont celui du CONGAD, covid 19, du Congrès de la Renaissance Démocratique (CRD), 100 fleurs s’épanouissent, Xare bi, du SAES fitnes Club UCAD, Afrika Jom, etc.
Le semi-confinement m’a permis de rédiger ces lignes, j’ai bien observé les vaches errantes dans Dakar, des quartiers de Liberté à Ouakam : elles étaient heureuses, tranquilles sur le terrain de football ouvert aux jardins d’enfants, aux lycées de Ouakam ; elles ne pensaient pas, elles les vaches, à tous les chants religieux, aux prières rituelles de l’Aïd El Fitr (Korité) et d’Aïd El Kébir (Tabaski).
Elles respirent leurs propres crottes, leur farniente semble prendre fin malgré leurs protections mystiques et mythiques ; les autorités administratives semblent avoir enfin pris leur courage à deux mains (cf Observateur du 27 Avril 2020, p.2)
Le Covid-19 peut être saisi pour accélérer le nettoiement, l’assainissement de Dakar. Ainsi le canal de la Gueule Tapée serait nettoyé, comme le long collecteur Hann-Fann, préservé, sécurisé et débarrassé des algues, des ordures et des mauvaises odeurs.
Il faut espérer que le saupoudrage des canaux à ciel ouvert, comme la toilette des marchés, va se poursuivre et régulièrement.
Sacrées populations !
Sacrés politiciens !
Vivent les citoyens !
Bonne chance à vous tous et toutes qui avez partagé nos états d’âme. Espérons qu’on va vivre ensemble longtemps encore, pour échanger et approfondir nos analyses, améliorer nos actions pour le développement durable et solidaire.
La vie et la mort
Les lieux de sépulculture ont leur histoire et leurs emplacements, leurs significations. Ndar (là où le fleuve termine sa course poursuite contre la mer (Dar) en wolof et où on peut trouver de l’eau douce, potable (Ndaa canari) comme à Màkka Tube, autre jalon islamique, offrent des sites particuliers.
Thiaka Ndiaye pas loin de l’embouchure migrante du fleuve Sénégal, sur la langue de Barbarie, prolongement des figues de Barbarie, Berbérie septentrionale, annonçant le Cap-Vert, les Niayes, abris des filaos,
Marmi Yaal aimé de Dieu, Sang Suul, lieu de purification avant l’inhumation. Ici à Sor, tissu, morceau de terre souvent disputé entre Waalo Waalo, Ajoor Ajoor, Njambur Njambur, Jolof Jolof, on admire, on boit jus de cocos et on déguste cocos, goyaves et sapotilles.
Il ne faut pas oublier qu’il existe un cimetière chrétien avec ses spécificités, d’autres ont disparu. Il faut aussi rappeler qu’il y a eu un cimetière où on enterrait les chrétiens et les musulmans comme à Ziguinchor et Fadiouth.
L’établissement, enclos des animaux et zone de pêche (Get), est devenu établissement humain (Sancaba). C’est dire que la gestion de l’aménagement du territoire reste problématique. Ici Jawling du Sénégal et de la Mauritanie, les deux se regardent, séparés par le grand bras du fleuve qui finit son cours, depuis le Bafing et le Bakoy, depuis Bafoulabé, pour arriver dans l’espace de paix, Dar Es Salam en arabe, espace sécurisé (Jàmmagen).
Chez nous, le lieu de sépulture dépend des parents et aussi des autorités administratives et religieuses et des places disponibles.
Ainsi, on peut se retrouver, nous tous sur l’Autre Rive
Amen, Amiin
Amoon naa fi, il était une fois
Daa naa am, il était une fois
Dana amati, ça reviendra
Ainsi va la vie
VI / Chances et malchances
Dès l’annonce de la propagation du coronavirus, j’ai pensé à Seriň Joob, mon père Ndiaga Diop, devenu Elhadj Ndiaga Diop, ancien imam de la mosquée à Balakoos, espace sacré, autel en sereer, avec ses arbres géants, puis place forte coloniale française, puis britannique, blockhaus, que les Sereer ont poldérisé, comme Poomu Xor, près de Jukk, Saanar, Ngalel, Bango, etc.
Sor est un morceau convoité, offert, (Lewna) enregistré et légal, c’est une des nombreuses îles qui accompagnent le fleuve jusqu’à l’embouchure (Bël-ba) poissonneuse, attirante et dangereuse avec ses hippopotames Langbar sereer, leeber, lebar wolof, ngabu pular, en verlan bang d’où Kumba Baŋ, enfin Wungaane soninke.
J’ai pensé à mon père qui dit être né l’année de la peste, mbas mi du siècle dernier. Sur ses papiers officiels, il est écrit qu’il est venu au monde à Ndar, Saint-Louis du Sénégal en 1918 ; en réalité, il reconnaît qu’il est né à 70 km de Saint-Louis, à Louga plus précisément, où sa maman s’était retirée suite à la propagation de l’épidémie dans la première capitale du Sénégal et de la Mauritanie. Je lui ai souvent dit » Papa, tu es né peut-être en 1916 ou en 1917, et 1918 étant l’année d’enregistrement de la naissance «
Bref, il est centenaire et j’ai pensé à lui qui s’est retiré à Jelleru à 3 km de Luga, dans le Jaambur, terre de ses ancêtres du côté de sa mère Jaxu Ñas ; Jelleru Silla est terre de résistance, de refus, de liberté. Jelleru, c’est un avertissement, un conseil donné aux prédateurs, aux dictateurs sans foi ni loi.
Quand le corona est rentré au Sénégal, par le canal des cas importés, je ne pouvais pas ne pas penser aux nombreux Njaambur Njaambur, appelés Moodu Moodu, disséminés à travers le monde et qui constituent, avec leurs cousins bawol bawol, une des grandes vagues de l’émigration sénégalaise, après nos parents soninke et al pulareen. J’ai averti mes frères et transmis leurs contacts au comité mis en place au niveau national par le Conseil des ONGs d’Appui au Développement au Sénégal (CONGAD). Le corona est parvenu à atteindre Luga.
Baay Njaga, Njaga Laxdariyu, pour ses profondes connaissances en matière de prières rituelles, islamiques, continue de prier pour le Sénégal, l’Afrique et le monde.
Comme quoi, chacun a son lot, muur en wolof semble évoquer, ce qui est couvert, les musulmans peuvent penser à la sutura. Il peut faire penser au grec moira (la part du destin), le fatum (destin en latin), lui-même peut faire penser au coup fatal (faat wolof) à la victime du coup fatal (faatu wolof).
J’espère qu’il y aura, un jour, un étudiant audacieux qui se penchera sur les thèses, hypothèses, instructions de Cheikh Anta Diop sur les langues ou langages préhistoriques (lire à ce propos, le ch. VII de l’Unité culturelle de l’Afrique Noire, chapitre du reste intitulé l’unité culturelle de l’Afrique Noire). En effet, comment expliquer les clignotants entre geen wolof progéniture et genos (grec), la tribu, l’ethnie, le lar wolof et le laar latin, tous deux expriment des éléments de cultes religieux. Le jaw wolof et le jaw indo-européen qui évoquent le firmament, le ciel.
Mieux, comment expliquer les similitudes entre l’arabe, le français, l’anglais, le germanique (voir ibidem, ch. II Critique de la théorie classique sur le matriarcat universel)
Une suggestion : il nous faut revenir aux langues, aux noms de certains animaux ex le singe en wolof golo, proche de goloma soninke, être humain, renforcé par le noppu jaboot en wolof, l’oreille du parent. Comme quoi, les Africains n’ont pas attendu Darwin pour comprendre ce qui nous lie au chimpanzé, au gorille.
Les poux et puces ont des noms (teeň et fel en wolof), le premier semble indiquer la source de la crasse, de la saleté autour du protège crane. Enfin le garab, le médicament par excellence est issu des arbres, de la végétation, de notre environnement. La langue donne des indications utiles, livre une expérience et des expérimentations.
Bël ba, un des endroits les plus beaux , les plus magiques, inspirateurs, comme le Cap de Bonne Espérance en Afrique du Sud, Montego Bay en Jamaïque, comme Les Finger Lakes et parmi eux Kayuga Lake ; pas si loin de la frontière entre les Usa et le Canada ; quand on a vu les Niagara Falls en Amérique, les Grands Lacs d’Afrique et les chutes d’eau qui existent sur tout le continent, quand on a survolé le Kilimanjaro, le Ruwenzori, l’Atlas, le Kamerun, on peut se dire que le monde peut inspirer les artistes.
Dieu sait que j’ai beaucoup voyagé, surtout en Afrique, grâce à l’AALAE, à la PAALAE, à l’ICAE, au CODESRIA, au SAES, à la FEDER, au CONGAD.
J’ai compris que le combat entre les fleuves, les rivières et la mer, se termine par la victoire de cette dernière, la maman ; les dernières bagarres sont fécondes en termes de faune et de flore aquatiques. La mer a fini d’avaler ses enfants et pourra les rejeter à nouveau pour leur apprendre à nager depuis Caaka Njaay jusqu’à Marmi Yaal, jusqu’à Gigilax, Njalaxaar, témoins du passé ghanéen ou malien, avec le pectoral en or de Raw, jusqu’à Podor, jusque dans l’île à Morphil, des coquillages, on en trouve presque partout.
Nous devons exploiter et enrichir notre patrimoine environnemental, culturel et artistique. On devrait parfois se rendre au parc de Njujj si proche de Ndar Saint-Louis, si prisé par la faune. Il faut voir les autres parcs du pays, du monde, et les protéger. Nous devons célébrer, chaque année, les deux dates consacrées, en mai et en octobre, aux migrations des oiseaux.
Le plaisir et l’éclairage apportés par les langues sont immenses, comment ne pas penser à Oumar Sankaré (Sankhos pour les intimes) qui a eu le savoir et l’intelligence pour informer largement au Sénégal, sur certains aspects de l’histoire de l’hellénisme, sur les relations entre la culture arabo-musulmane et la grecque, comme a eu à le faire, de manière plus subtile, le grand penseur et militant altermondialiste Samir Amin.
Oumar, notre collègue et cousin, a été victime de la confusion obscurantiste et opportuniste. Il nous a quitté comme vrai martyr académique, les universitaires sénégalais, africains, les humanistes à travers le monde doivent célébrer ta mémoire et redoubler de vigilance ; tu as su tirer profit de tes connaissances en grec, en arabe ancien, comme l’a fait ton amie sur la même rive que toi, là-bas, Nguissali Sarré notre sœur, pour ce qui est de la connaissance de l’ancien français, comme aurait pu le faire, si sa santé le lui avait permis, Boury Sarr pour le passage de l’ancien égyptien au copte et du copte aux langues africaines actuelles.
Goor gi li mu am du muur mburaaké la : la chance dont il s’agit, c’est du couscous avec notre pâte d’arachide et du sucre. Papa est encore parmi nous, alors que notre oncle, Alioune Badara Diagne Golbert, célèbre homme de radio à Saint-Louis du Sénégal, beaucoup plus jeune et qui avait amené mon père à animer, à radio Saint-Louis, des émissions religieuses, est parti sur la pointe des pieds en peine crise du corona, à l’âge de 80 ans, à peu près.
Gol pour les intimes a eu toutefois plus de chance que ma mère Aïda Kamara, qui n’a vécu qu’un demi (1/2) siècle, arrachée à notre affection, le jour-même où je lui ai envoyé, depuis Dakar, sa part de mon trousseau-rappel de l’étudiant de première année que j’étais à l’Université de Dakar, qui ne portait pas encore, en 1971, le nom du professeur Cheikh Anta Diop.
Maman, elle est bien née à Ndar, Saint-Louis ; elle était consciente de ses origines à la fois Silaayeen comme mon père, ce n’est que tard que j’ai appris que nos deux parents ont tous les deux des ancêtres Silla, une des branches des familles soninké dispersées, à la suite de l’éclatement du grand empire, dont le cœur névralgique était plus au Nord, dans l’actuelle Mauritanie.
Maman était consciente de ses ancêtres éparpillés dans le Ganjoolais, à Ngay Ngay par sa mère Maryaan Ndaw, qui faisait appel à ses protecteurs d’origine sereer installés à MPaal ou Paal, terre des Ngom et des Juuf wolof ou wolofisés. Ces traces sereer et wolof sont perceptibles à Gandon (Gandoŋ, arbre ? ou étranger ?).
Maman était consciente de ses origines maliennes, en tant que membre de la famille Kamara, passée de Sibi dans le Mali actuel à Fuuta Tuuba en Guinée Conakry actuelle, Sibi, ce n’est pas loin de Kirina où a eu lieu la fameuse bataille de Kirina au XIIIe siècle, qui a vu Sunjata Konate devenu Keyita, prendre le dessus sur Sumawuru Kante.
Bref, c’est à Sibi que j’ai appris que le pacte est scellé entre les détenteurs des terres (les Kamara) et les détenteurs de pouvoir militaire (les Konate, Keyita)
Keyita, Konate, Kamara, Siise, Tuure, etc. ce défilé de patronymes m’a permis de comprendre pourquoi, peut-être mon oncle Baabakar Kamara, à Saint-Louis, a épousé ma tante, Kumba Siise.
Sources de lyrisme
Le soupçon est renforcé par le terme Bafulabe que j’entendais de la bouche de mon grand-père, Mooda Kamara, agent de trésor à l’époque coloniale.
Mooda, nom qui résonne oriental, non seulement par Mouhamed, mais aussi par son africanisation précoce et agisymbien (Tchad, Niger, Nigeria). Mooda au teint très clair, proche de celui de certains Peul ou Touareg, amazigh.
Mooda qui a été pris parfois pour un descendant de Cap-Verdiens ou de Maures avec tout ce que cela a pu créer comme stigmatisation, méprise, avec des débordements, plus tard, comme ce fut le cas lors de conflits sportifs ou sociopolitiques, économiques, diplomatiques entre le Sénégal et ses voisins.
Mooda, fidèle et méthodique dans ses tournées du vendredi, avec son parasol, se faisant un honneur de passer, tour à tour, chez ses deux épouses habitant l’île discrète de Sor. Il quittait très tôt sa résidence du quartier Sud (Sindoone en langue africaine) dans le quartier d’abord habité par une majorité de chrétiens (Ker Caan), sur l’île visible et imposante, comme un serpent qu’on touche, après avoir franchi les sept arches du pont Faidherbe.
Dans ce quartier administratif, bourgeois et chrétien, il avait acquis une grande maison dont la majeure partie était réservée à l’école coranique qu’animaient des érudits, ses cousins, Makhssine et Mousse Diop et leurs disciples.
Il s’arrêtait parfois devant les jeunes footballeurs qu’il rencontrait sur son chemin, il leur distribuait des bonbons (tangal) qui les réchauffaient, les revigoraient, leur permettant de multiplier passes, feintes ou tirs. Les jeunes observaient une pause et peut-être formulaient des prières pour l’octogénaire, bien propre, si propre qu’il pouvait se permettre de boire l’eau bénite, huilée ou sucrée selon les mets, et recueillie dans la bassine. Les prières et les bénédictions semblent avoir fait leurs effets. Vieux Mooda Kamara est l’un des rares personnages que j’ai connus dont la mort avait été annoncée, les préparatifs de l’enterrement faits, les fils et les petits fils, voire arrières petits enfants réunis, pour ensuite entendre le médecin annoncer que le déclaré mort était bien vivant.
Le veinard, le chanceux, a continué à accompagner ses petits-enfants des années après, avant de passer définitivement sur l’autre rive. Il repose à Caaka Njaay et dans ce cimetière, l’espace le mieux entretenu, un peu en retrait du reste, sur la langue de Barbarie, c’est la partie réservée aux soldats victimes de la fièvre jaune.
En fait au Sénégal, il y a eu 28 épidémies au 19 ième siècle dont 12 de fièvre jaune, 2 de choléra et 11 de variole. En 1878, la fièvre jaune a emporté la moitié de la population de Saint-Louis la ville la plus infectée avec 20 médecins sur 22. Celle de 1881, une des plus meurtrières au Sénégal, peut-être avec au moins 600 victimes dont la majorité est composée d’expatriés (Français, Marocains). En 1900, la fièvre jaune a presque décimé l’armée et il ne restait que 50 européens survivants. Elle pousse 3 000 personnes à retourner en France, deux gouverneurs meurent et le 3 ième a déserté (Cf Thèse Adama Ali Pam archiviste paléographe, responsable de la bibliothèque de l’UNESCO) ; comme quoi, l’Afrique et le Sénégal sont dans l’histoire, depuis la préhistoire jusqu’à maintenant, n’en déplaise au plus inculte des présidents de la République française que j’ai connus ; faut-il s’étonner quand des peuples portent au pouvoir ce genre d’individus comme Trump du reste, qu’ il y ait des risques constants pour l’humanité dans tous les domaines.
Grand père aimait, tous les jours ouvrables, pendant la pause de la fin de matinée, face à la capitainerie du port fluvial, retrouver ses amis collègues ou parents dans le beau jardin fleuri de la gouvernance, face à la cathédrale ; ils parlaient wolof, francais, pulaar, soninke, hasanya.
Gaana, Maali Bero, Agisymba, Sahara, Kmt, Egypte pharaonique, ce sont des repères que beaucoup de nos ancêtres peuvent réclamer. J’ai à l’esprit les parentés plaisantes, pour ne pas parler des parentés à plaisanterie ; merci à Raphael Ndiaye pour la rectification, merci à Isaa Laay Thiaw, Saliou Kandji, Ababacar Sedikh Diouf, Youssou Tata Cissé, Waa Kamissoko et d’autres qui ont balisé le chemin.
Bref, Saint-Louis du Sénégal, Ndar Geej, consacre la victoire de la mer sur le fleuve ou le retour de ce dernier vers sa mère vraie, féminine, agressive, épouse de la Mer calme, masculine, dit-on, la Mer qui poursuit sa course vers Dakar, Ziguinchor jusqu’au Cap de bonne Espérance
Saint-Louis a ses quartiers qui renvoient à des sonorités du Sud du pays (Sindoone : joola, baïnuk ?), du Nord (Loodo, Jukk, Jawlin), du Centre (Njolofeen), voire de l’Afrique forestière ou soudano-sahélienne (Senefobugu), bref de l’Afrique poreuse aux souffles d’Orient (Daaru Salaam) et d’Occident (Pikine sonne pulaar, portugais, latin).
Au moment où le virus entrait au Sénégal, les ravages en Europe (Italie, Espagne, France) étaient importants. Notre inquiétude a été grande quand, à Ségoufielle, dans la banlieue toulousaine en France, ma belle-fille et une de mes petites filles ont été touchées par le corona. Elles se sont tirées d’affaire, heureusement.
Nous n’avons pas osé informer leur arrière-grand-mère, Annie Sylla Caron, figure de mère Thérésa au Sénégal, au service des réfugiés, des élèves, étudiants sénégalais et africains, à l’écoute du clergé et des laïcs. Silence aussi sur le coup de sort, sur le décès de son grand frère, Paul Caron, banquier rigoureux, esprit généreux et curieux, admiratif et étonné des shows académiques, emporté par le corona à Paris, ancienne Lutetia qui doit son nom à Isis, l’Africaine. Per Isis, la maison d’Isis, ce qui permet de comprendre la dispersion du culte des Vierges Noires dans la vieille Europe (lire Jacques Bovin, Vierges Noires, Dervy, 2000, p.104).
Alors me reviennent à l’esprit les enseignements de mes anciens professeurs à Dakar, puis à Paris : Woronoff, Chiapore, Chaumartin, Lonis, Devisse, Leclant, Lalouette.
Tout cela semble compliqué pour mon fils cadet, aux inspirations multiples qui l’invitent à vouloir écrire contre Bush, Trump, Sarkozy.
Quand il m’a demandé des conseils pour l’écriture, je lui ai acheté Huis clos, les Mouches de Sartre, au moment où, en librairie, beaucoup se jetaient sur la Peste de Camus. Je ne sais pas s’il a lu le livre, j’ai senti en lui un intérêt soudain pour mes vieux dictionnaires grec (Bailly) latin (Gaffiot), Brugsch pour l’égyptien.
Nous sommes tous des antiquisants, des médiévistes, des modernistes, des contemporanéistes.
Nous sommes tous des Africains (des Tumai, des Lucie), des Amérindiens, des Américains, des Asiatiques, des Occidentaux, des Européens, des Occidentaux, des Océaniens.
Unis, solidaires, nous pouvons vaincre le Covid-19 et d’autres fléaux qui apparaîtront.
Retour sur la rive ferme
L’un des plus grands défis auxquels l’actuel gouvernement sénégalais est confronté demeure l’articulation des défis internes (réaménagements profonds de l’économie et du territoire, en respectant les normes environnementales consacrées, en faisant preuve de bonne gouvernance, scientifique et technique, politique, surtout électorale, économique, socio-culturelle, réligieuse et spirituelle) et externes (combat solidaire pour la réparation des crimes odieux coloniaux, néocoloniaux, pour l’annulation des dettes complices, illégitimes, illégales, pour l’accélération de la lutte pour un nouvel ordre mondial, en matière de sécurité, d’environnement, etc. ). C’est la voie royale pour la solidarité entre les peuples, le développement durable et la coopération mutuellement avantageuse
Ce jeudi matin, 28 mai 2020, je quitte mon bureau et repose mon stylo, tout en ayant à l’œil, la manne, le bourbier, le purgatoire libyen, si proche d’une des cornes septentrionales de l’Afrique. J’ai à l’esprit trois faits majeurs :
Au Sénégal, Dakar est la ville la plus infectée par le Covid-19 et à Dakar, c’est le secteur Ouest, surtout la zone Ouakam Almadies où j’habite, qui est le plus touché ;
C’est là où il y a les spéculations foncières, les constructions sauvages, les plus inouïes, les plus insolentes, les plus irresponsables au Sénégal et sur la Presqu’île du Cap-Vert. Des activistes, défenseurs de l’environnement, des socioculturels sont mobilisés.
Depuis quelques jours, la mobilisation grandit pour le recentrage africain et solidaire en matière de pharmacopée. Les luttes vont continuer, les victoires les plus belles sont souvent douloureuses. Mucc dans la belle langue wolof signifie délivrer, donner naissance après une grande souffrance. Moise ; Moshe, Muusa, le prophète vénéré par les trois (3) grandes religions monothéistes est égyptien et africain, le pauvre Freud a osé le dire et l’écrire. Moise comme tous les enfants qui ont pu être sauvés des eaux et s’épanouir, doivent respecter leurs mamans ; elles sont gentilles parfois, terribles à d’autres moments.
Dans notre espace familial, on cherche toujours et encore l’équilibre entre matrilinéarité et patrilinéarité, comme du reste entre sédentaires et nomades. Ce n’est pas facile, mais souvent c’est la première qui ressurgit fortement. Ainsi on jure par sa mère ma ñakk sama ndey, d’autres ajoutent sama geño baay, par la ceinture de mon père, mais en dernier ressort, dans la grande concession, on distingue les homonymes par la mère, je suis baptisé Mbay Ayda par ma mère, mon homonyme connu est Mbay Jaxu, frère aîné de mon père, différent de mon oncle, Mbay Maryaan. Ainsi Joob et Kamara ont leur dignité. Les Joob, Job en Gambie, proche de Job de la Bible, le pauvre, Jubba, les puissants rois des Mauretanies, avec leurs touffes de cheveux ou leurs belles plumes, comme chez les grues couronnées ou paons, jamba joob, coqs de pharaons, disent les Soninke, bref ils ont pensé prendre leurs distances vis-à-vis des fauves de la savane les Njaay Gaynde, les lions assaillants devant l’ Éternel et devant le reste du clan, de la tribu, même si parfois ils sont ensemble pour s’aventurer très loin jusqu’en Espagne avec les Almoravides depuis l’île à morphil, sur le fleuve Sénégal. Ainsi, la boucle est bouclée et le jeune Mbay tire profite de toutes les branches, ainsi stratégie et tactiques sont combinées. Il faut penser au manifeste des Romantiques et au grand Hugo avec Hernani. En substance, insensé, toi qui penses que je ne pense pas à toi, quand je parle de moi.
Cette leçon est dans nos mythes : les divinités les plus terrifiantes de l’Egypte pharanoique (la lionne Sekhmet, le crocodile Sobek, l’hippopoptame Tawrt) sont aussi symboles de fécondité et de vie nouvelle. La vie continue, elle continuera encore pour des siècles, des millénaires, qui sait ? Cheikh Anta diop a bien ouvert les esprits.
Fin de la version électronique et la version imprimée sera disponible plus tard, de même que la vidéo des parties iconographiques et musicales.
Version Arabe
مع فيروس كورونا أصبحت 2020 سنة عصيبة ومفيدة في نفس الوقت
من الصعب أن ننسى 2020، سنة انتشار وباء عنيد وصعب وسخيف، أثار خلافات عديدة هنا وهناك، داخل البلدان وبين الشعوب والأجناس.
قدِم هذا الوباء من بعيد متسللا من الشرق ومن القارة الأسيوية ومن الصين وتحديدا من محافظة ووهان مقتحما القارة الإفريقية ليستقر في داكار بشبه جزيرة الرأس الأخضر التي تشبه قدما ضخمة وسط الماء تربط افريقيا بالمحيط الأطلسي وتضم يافو وأوكام ونغور وألماديز.
قبل أن يغزونا، اجتاح هذا الوباء أوربا وامتد الى أمريكا فجعل العالم ينهار والأرض ترتعش.
يقول المؤرخون أن هذه ليست بالمرة الأولى التي تحل فيها جائحة على بلدة أو دولة أو مكان في العالم، لكن الجديد اليوم هو التفشي السريع لهذا الفيروس المستجد بسبب كثرة التفاعل والتواصل بين الناس وتعدد وسائل النقل والاتصال.
فانتشر القلق والتوتر بين الناس وتعددت الإصابات في صفوف الرجال والنساء والأطفال وارتفع عدد الضحايا بين كبار السن وأصحاب الأمراض المزمنة بسبب حدوث هذا الوباء الذي أرهب الصين، وطارد الأوروبيين والأمريكيين وجعل العرب يتنفسون بصعوبة وها هو الآن يصيب السود هنا في إفريقيا، فيخترق أسوار السنغال الذي كان يعتقد أهلها أنهم في مأمن من الخطر ومحصنين ضد كل شر.
فاحتار العالم والخبراء والأطباء والمعالجين ورؤساء الدول أمام فيروس غامض ومخيف، لا أحد يعلم من أين أتى. هل قام بتسريبه باحثون متهورون، أم هو مؤامرة، أم نتيجة صراع سياسي أو اقتصادي؟ سنكتشف كل هذا يوما ما. لا يجب أن ايقاظ أسد أصم وأعمى من نومه. أهو الخفاش من أيقظه من سباته أم حيوان آخر يباع في السوق؟
هل هو برغوث أم قمل أم عشبة ضارة؟ هل يعيش الفيروس في الاعشاب، أم في الأوراق؟ ستتم الإجابة على كل هذه الأسئلة يوما ما. لكن ما هو مؤكد الآن أنه يدخل جسم الإنسان وأنه معدي، ويسبب الحمى والسعال الجاف وضيق التنفس بالإضافة إلى سيلان الأنف والإسهال.
فالأمر الملح اليوم هو محاربة هذه الجائحة التي تجندت لها كل البلدان. هناك من اتخذ تدابير وقائية مثل الصين التي تمكنت من الحد من تفشي الفيروس وهناك من تأخر في اتخاد الإجراءات اللازمة لمواجهته كإيطاليا وإسبانيا فرنسا وأمريكا فاحتاروا بما أصابهم. إلا أن الضربة كانت قاسية موجعة للجميع بما فيهم السكان الأصليين أو الأجانب المقيمين أو المستثمرين أو كل عامل يشتغل لربح المال.
الحلول والوسائل:
انتشر هذا الفيروس فقدمت بلدان مثل الصين الخبرة والذكاء والأبحاث وعملت على تطبيق الحجر الصحي وفرض حظر التجوال وعزل المصابين ثم شرعت في البحث عن علاج قد يكون مفيدا.
بينما استعان بعض الأشخاص في بلدان أخرى بوصفات تقليدية يعتقدون أنها مانعة للإصابة بعدوى الفيروس ووجد آخرون ملاذهم في الدين معتقدين أن فظاعة البشر أثارت غضب الإله فدعوا للرجوع إلى اعتناق المبادئ التي علمها الأنبياء.
حان الوقت لقراءة القصيدة الجميلة «Xarnu bi» للشاعر Serigne Moussa Ka الذي وصف فيها الأزمة الاقتصادية التي عرفها العالم في أواخر عشرينات وبداية ثلاثينات القرن الماضي والتي تناول فيها كل مناحي الحياة ولم ينس شيئا أبدا بحيث تحدث عن الاقتصاد والثقافة والدين والعادات والتقاليد والزوايا الدينية والصوت الذي ينشد تراتيل الذكر والخلاص والنعيم. يجب أن نتذكر دائما أن أسلافنا من كيميت ومصر القديمة كانوا أول من تحدث عن الحياة والموت والفرح والحزن.
هنا في السنغال
في بلدنا العزيز، أجرى الرئيس ماكي سال سلسلة من المشاورات مع قادة المعارضة السياسية والمنظمات النقابية والمجتمع المدني والبرلمانيون بخصوص الوباء المستجد وطرق الوقاية منه فلم يبخل أحدهم بما أوتي من معرفة ووسائل وموارد لمحاربته.
كما بذل الباحثون والأطباء قصارى جهدهم للسيطرة على الفيروس والحد من تفشي هذا المرض وتفادي حصول الإغراق الوبائي. وبعد شهر من اكتشاف أول إصابة بهذا الفيروس في السنغال، بلغ العدد الإجمالي للإصابات 195 حالة، 40 في المائة منها قادمة من الخارج، و56 في المائة من المخالطين للحالات الإيجابية و4 في المائة انتقال محلي وبالتالي يصعب تحديد مصدر أو أصل الإصابة.
وأمام عجز إجراءات الرصد والتقصي عن الوصول لسبب الإصابة أو تحديد رابط وبائي بين سلاسل الانتشار تصبح الاجراءات الوقائية هي الحل الوحيد لمواجهة كورونا المستجد مع مضاعفة وسائل الوقاية والرعاية والعلاج كما قال البروفيسور " Seydi " منسق عملية المكافحة ضد فيروس كوفيد وفريقه المكون من الدكتور Abdoulaye Bousso، و Alpha Sall، و Moussa Diarra Béye الذين قاموا بحملات لتوعية الشعب والتخفيف من قلقه وتقديم مجموعة من النصائح قد تنقذ حياتهم.
صحيح أن هناك بعض السينغاليين قد فارقوا الحياة داخل البلاد أو خارجها نذكر منهم على سبيل المثال مابابا ديوف، رجل شريف وذو قيمة عالية زيادة على كونه رائدا في عالم الرياضة على المستوى الوطني والدولي ومعلم عظيم بحيث ترأس نادي أولمبيك مرسيليا لكرة القدم في فرنسا.
ماذا يخبئ لنا المستقبل يا ترى؟
الإهمال يقتل والغفلة لا زالت مستمرة والغباء والندم يسيران معا وتبقى الصحة والتعليم والمعرفة والخبرة من الأولويات التي يجب أن تؤخذ بعين الاعتبار.
فالطريق الوحيد لمواجهة التحديات الطارئة هو العودة إلى تعاليم الحكماء القدامى والتمسك بالشورى وترجمة الاستنتاجات والتوصيات إلى أفعال. كما يجب على الباحثين رفع تحدي التعاون فيما بينهم والحوار مع القادة والمسؤولين من مختلف مجالات الحياة.
بينما أنتم أعزائي المواطنين في هذه القرية العالمية، ستكون هذه السنة طويلة جدا وستبدو كمصاصي الدماء أو كالقزم الخرافي أو كحصان إبليس يعرج برجـْل واحدة ولا يعطي أية فرصة لبوم الليل العنيدة.
ها هو إذن الوحش الذي أرعب الناس قد أدى ببعض المراهقين يصرحون باكتشاف علاج جديد أو لقاح سيقومون بتجريبه على الأفارقة لاختبار إمكانية تصديه لفيروس كورونا.
كيف نرد على هذه الإساءة؟ بالاحتقار أم بالاحتجاج؟ فاستمرار وجود الإيديولوجيا الاستعمارية في أوروبا لا يمكن التغاضي عنه. والشعب السنغالي كسائر الشعوب الأخرى قلق لهذا الوضع، وبالتالي يجب توخي الحذر والا سنجدهم يعاملوننا كآكلي لحوم البشر وينعتوننا بالسحرة.
ما العمل إذن؟
يجب الحفاظ على الهدوء والوضوح والدقة في التصور وتطوير البحث، والتماسك والتآزر، بالإضافة إلى الرفع من مستوى الوقاية وتعزيز الرعاية الصحية.
لاحظنا أن بعض الدول الافريقية مثل ليسوتو وجزر القمر والملاوي والسودان وسان تومي التي لم تتأثر بعد بشكل كبير بفيروس كوفيد COVID لا تزال بعيدة نسبيا عن صدام المنافسة اﻟﻌﺎﻟﻤﻴﺔ اﻟﻤﻔﺘﻮﺣﺔ ولم تندرج كليا في اﻟﻌﻮﻟﻤﺔ. لهذا يجب على جميع البلدان الأفريقية أن تعمل معًا لبناء أفريقيا متحدة ومتماسكة.
كتب هذا النص ذ. باباكار ديوب بوبا، رئيس جمعية التعاون الافريقي لمحو الأمية وتعليم الكبار ورئيس سابق لجمعية ANAFAونائب منسق مشروع التاريخ العام في السنغال.
ترجمته للفرنسية السيدة سي خلي فال كوليبالي وللعربية ذة سميرة الدليمي
par Siré Sy
SENGHOR, LA CAROTTE ET LE BÂTON (1/4)
EXCLUSIF SENEPLUS - Dans sa méthode de gestion de crise, l'ancien chef de l'Etat pouvait se révéler d’une brutalité inouïe et d’un art maîtrisé de la manœuvre périlleuse - PRÉSIDENT ET GESTION DE CRISE, ‘’QUAND L’HEURE EST GRAVE !’’
L’adage dit que c’est au pied du mur que l’on reconnaît le maître-maçon. Dans la même temporalité, c’est par et dans la gestion de crise(s) de magnitude ‘’secousse du régime’’ sur l’échelle d’une Nation-État, que l’on apprécie les choix, les décisions et le leadership d’un chef d’Etat dans sa fonction de président de la République. Le Think Tank Africa WorldWide Group en partenariat avec SenePlus vous propose Feuilleton managérial : Président et Gestion de crise, ‘’quand l’heure est grave !’’. Pour cette première épisode de ''Président et Gestion de crise ‘’quand l’heure est grave’’, Style et Méthode de gestion de crise du président Léopold Sédar Senghor (Léo le poète).
Sous Senghor, la gestion de crise, en tant que Management de la Très Haute Performance, était avant tout, Poésie et Figures de style. Tantôt en analogie (en comparaison, ou en métaphore, ou en allégorie, ou en personnification). Tantôt en substitution (en métonymie, ou en synecdoque, ou en périphrase, ou en antonomase). Mais toujours en Rhétorique et en Style. Dans son Style de gestion de crise ‘’l’heure est grave’’, le président Senghor, est poète en la matière. S’il n’est pas l’acteur principal, il en est le metteur en scène ou alors le réalisateur. Jamais dépassé par les événements. Dans sa Méthode de gestion de crise, Senghor pouvait se révéler d’une brutalité inouïe et d’un art maîtrisé de la manœuvre périlleuse. Au point que Senghor, tout en gérant et incarnant le pouvoir politique d’Etat, savait aussi jouer tantôt les figures de l’opposition (en antithèse, ou en antiphrase, ou en oxymore), tantôt jouer les figures de l’amplification (en hyperbole, ou en gradation, ou en répétition).
Le président Senghor, durant sa présidence (1962-1981) a eu à faire face à trois crises de magnitude ‘’secousse du régime’’: une crise politique, une crise universitaire et une crise alimentaire. Le président Senghor, au chapitre de sa gestion de sa crise politique de 1962, s’en est sorti haut la main, en parvenant à caporaliser le pouvoir judiciaire et faire coffrer Mamadou Dia, à la suite d’une parodie de justice. Avant de régner pendant vingt ans sans tempêtes politiques majeures ; en instaurant l’hyper-présidentialisme, un monarque républicain. Au chapitre de sa gestion de sa crise universitaire de Mai 68 qui a failli l’emporter pour de peu, lui et son régime, le président Senghor a pu redresser la barre et reprendre les choses en main, in-extremis, au prix de plusieurs concessions et compromis accordés. Enfin, le président Senghor va faire face à la pire crise alimentaire qu'a connue le Sénégal, la crise de la famine due à la grande sécheresse des années 1973-1974. On n’avait jamais vu une telle sécheresse au Sénégal, écrira le président Senghor, dans l’un de ses formidables textes. Le président Senghor se sortira de cette terrible crise alimentaire - la famine -, en s’endettant auprès du FMI et de la Banque mondiale. C’est d’ailleurs, l’acte fondateur des relations Sénégal-Institutions de Bretton Woods, qui jusqu’à ce jour, nous tiennent la gorge. Pour gérer cette crise, Senghor va s’offrir à l’Aide au Développement et ouvrir le Sénégal sur les marchés du Capitalisme libéral.
En 1980, le président Senghor a vu venir à vive allure et en grande chevauchée, un Nouvel Ordre Mondial, un nouveau Monde : la Mondialisation/Globalisation. Sentant qu’il a fait son temps et réalisant qu’il faut changer complètement de disque dur mental pour affronter les défis et les pièges du Monde Nouveau (la Mondialisation) qui pointait à l’horizon, Senghor organise sa succession en 1981, en se choisissant son propre successeur- un homme de son temps à l’époque -. Éminemment poète et foncièrement intellectuel, Senghor au sommet de son art, a préféré partir quand tout le monde lui demandait de rester que de rester quand tout le monde lui demandera de partir.
Lundi 1er Juin 2020, votre épisode (2/4) portera sur le président Abdou Diouf - Président et Gestion de crise, ‘’quand l’heure est grave!’’
EXCLUSIF SENEPLUS - Tu ne m’empêcheras pas de dire gloire aux travailleurs de tous ordres : médecins, personnels soignants, forces de sécurité. Authentiques soldats de la Nation, qui avez su répondre au rendez-vous de l’Histoire (français & wolof)
Et partout sur terre d’Est en Ouest, du Nord au Sud
Toi qui brises les reins des économies
Qui fermes écoles et instituts Mosquées et Eglises
Maudit sois-tu et retourne en enfer
Auprès de tes diables de frères !
Toi qui as pris en otage la société entière
Cadenassé à double tour rues et domiciles
Maudit sois-tu et retourne en enfer
Auprès de tes diables de frères
Tu ne m’empêcheras pas pourtant de dire
Gloire à vous braves combattants et combattantes
Gloire aux travailleurs de tous ordres
Médecins, personnels soignants, forces de sécurité,
Authentiques soldats de la Nation
Qui savez en l’être humain apprécier la dignité
Soulager et le corps et le cœur et l’esprit et l’âme
Vous concitoyens qui aimez ce pays
Savourez les mélodies de tous ces artistes
Qui sensibilisent et qui préviennent
Admirez tous ces artisans et tailleurs
Confectionnant pour nous tenues et masques
De jour et de nuit sans jamais se lasser
Fantastiques tous ces jeunes
Prodiges et as des nouvelles technologies
Honneur aux chercheurs et aux créateurs
Vous témoins actifs et féconds de votre propre histoire
Qui avez su répondre présents au rendez-vous de l’Histoire !
Vérité hier vérité aujourd’hui :
« L’Homme est le remède de l’Homme »
Et je puis rajouter et je puis affirmer :
« L’esprit critique et de discernement e
Et le remède de l’Homme »
Concitoyens compatriotes, il est venu le temps
De nous secouer de nous remettre en question
Le temps de nous abreuver de savoir et de science
De nous armer jusqu’aux dents
D’esprit critique et de discernement
Pour être sevrés à jamais des berceuses qui endorment
Et des mensonges qui aliènent.
Au combat, citoyens ! Au combat, patriotes !
A la tâche encore à la tâche
Sans fatigue ni relâche
Avec en bandoulière la foi immense
En nous-mêmes, en notre peuple, en notre avenir
Les yeux fixés vers le même horizon
Parcourant ensemble le même chemin de lumières
Pour la dignité du genre humain
Aujourd’hui et demain.
Version Wolof
KORONAA, MBAS MA LA !
Mbas ma la bόoxun ma la subόoxun ma la !
Yaw miy tëral yaw miy rey
Di yee fitnë di rëccal fit yi
Yaw miy jaxase xel yi tey lëmbé àddina si
Kow ba suuf ndeyjoor ba càmmoñ
Mbas ma la yaw miy nërméel koomkoom
Di tëj lekkool yeek daara yi Jumaa yeek jàngu kërcaan
Mbas ma la bόoxun ma la subόoxun ma la !
Yaa wër ndombo dund gi
Jël caabi-lawbe tëj ràpp
Mbedd yeek dëkkuwaay yi
Mbas ma la bόoxun ma la subόoxun ma la !
Moonte maa ngi naan Waaw gόor waaw jigéen,
Yéen liggéeykat yi Fajkat yeek kaarànge gi
Yéen jàmbaari réew yi fonk doomu aadama
Di xettali ci moom yaram wa, xol baak ruu ga.
Yaw doomu réew aji bëgg réew
Déglul ma woykat yay yeeteeka artu
Gisal ma tajoor yay ñaw muurukaayi kanam ya,
Guddéek bëcëk toqi wu ñu
Xoolal ma ndaw ya ca xarala yu yees yi,
Sargalal ma gëstukat yeek fentkat yi
Ñoom ñi maaseek jamono
Ba indi tegal nu jumtukaay yi méngόok jamono!
Dëgg feeñaat na tey, naa wax ko waxaat ko
« Nit nitay garabam » !
Ma teg ci tegaat ci : « Nit nitéey garabam » !
Nanu xoolaat sunu bopp
Sàkku xamxam roggantikoo ràññee
Ba fer ciy aayόo nenne aki naxee mbaay
Aywa léen doomi réew aji bëgg réew
Ñeme waar ñeme coono
Gëm sunu bopp ak sunu askan gëm sunu ëllëg
Looloo di bokk jëmu ci yoonu bokk tedd tey ak ëllëg !
Par Babo Amadou BA
SORTIR DE «L’ENFER DES PARADIS» FISCAUX POUR RATIONALISER NOTRE BUDGET
La majeure partie de notre dette extérieure est en effet orientée vers des investissements non prioritaires (TER, Aréna, Arène nationale, CICAD, Cité ministérielle, etc.), porte grande ouverte pour les malversations : détournements, surfacturations,etc...
Nous apprenons avec stupéfaction à la une du quotidien Les Échos que « le Sénégal déchire son accord avec l’Ile Maurice ». La vérité est qu’il prévaut au Sénégal un laxisme consternant dans la gestion des finances publiques. Le budget national est plombé par la pléthore de régimes dérogatoires accordant beaucoup trop d’avantages fiscaux (code minier, zone franche, code pétrolier, code des investissements) à des investisseurs, étrangers pour la plupart, sans oublier cette propension incompréhensible de l’Etat à accorder des remises gracieuses aux multinationales. Pendant ce temps, le gouvernement s’endette de manière éhontée pour des dépenses de prestige, tout en privant des secteurs névralgiques du minimum vital. D’ailleurs la gestion calamiteuse de la crise de la Covid-19 l'a prouvé à suffisance !
La majeure partie de notre dette extérieure est en effet orientée vers des investissements non prioritaires (TER, Aréna, Arène nationale, CICAD, Cité ministérielle, etc.), porte grande ouverte pour les malversations : détournements, surfacturations, marchés de gré à gré, rétro commissions, corruption. A se demander si nos dirigeants ont compris la notion de priorité ! À croire qu’ils le font exprès ! Leur sport favori consiste à s’amuser et à dilapider de toutes les façons possibles nos ressources pour se transformer par la suite en mendiants costumés à la porte des autres nations.
UN ÉTAT QUI FAIT JOUJOU AVEC SON LEVIER D’ENDETTEMENT
L’impact du processus de l’endettement sur l’aliénation de la souveraineté économique est connu de tous. Déficit budgétaire = DEPENSES - RECETTES -RECETTES : impôts et taxes, droits de douanes, recettes non fiscales, dons -DEPENSES : intérêt de la dette, salaire et fonctionnement, biens et services En 2005 la dette publique du Sénégal s’élevait à 2465 milliards de F CFA, soit 22.1% du PIB. La communauté financière internationale, y compris les institutions multilatérales et les autorités nationales, ont œuvré en vue de ramener à un niveau soutenable la charge de l'endettement extérieur des pays pauvres les plus lourdement endettés. Le Sénégal a reconstitué sa dette publique, en dépit des annulations de dette enregistrées dans le cadre de l’initiative des Pays pauvres et très endettés (PPTE) en 2005.
A peine 15 ans après, nous voici revenus quasiment au point de départ. Aujourd’hui, le stock de la dette du Sénégal a presque quadruplé pour atteindre 8 231 milliards en 2019, soit 58% du PIB. Il faut noter que la capacité d’endettement n’est pas la capacité de remboursement (ratio de surendettement).
Parler de surendettement d’un État signe qu’une partie de son endettement est jugée « excessive ». Cela est destiné à légitimer des actions telles que : le rééchelonnement des échéances (maintien de la valeur de la créance, mais modification de l’échéancier), des réductions de dette (annulation d’une partie de la dette) des annulations de dette. Et depuis le début de la pandémie du Covid-19, les sollicitations d’une nouvelle annulation de la dette africaine se succèdent, comme un rituel de conjuration de la pandémie.
Après la demande des ministres africains des Finances et l'Union africaine pour l’allègement immédiat de la dette, c’est au tour du FMI et la Banque mondiale, du G20 et du président français Emmanuel Macron, d’annoncer un allègement massif de la dette africaine.
POUR LUTTER CONTRE L’ENDETTEMENT : HALTE AUX PARADIS FISCAUX !
La gestion de nos maigres recettes par nos gouvernants montre toutes les failles dans la gouvernance de ce régime. Au niveau des recettes fiscales, le Sénégal a un faible taux de pression fiscale en 2019 de 17,4% (2434/13983 - recettes fiscales/PIB - LFI2020). Dans les pays développés ce taux varie entre 30 et 40% selon l’OCDE (France 46,2%, Allemagne 37,5%, Japon 30,6%). Au Sénégal, nous pouvons atteindre un taux de pression fiscale de 25%, pour un supplément de 1000 milliards dans notre budget, en exploitant des niches.
La principale niche concerne la révision des exonérations d’impôts accordées à certaines multinationales, la rationalisation des conventions signées surtout avec des paradis fiscaux (Anguilla, les Bahamas, les Fidji, Guam, les Îles Vierges américaines, les Iles Vierges britanniques, Iles Maurice, Iles Caïman Luxembourg, Oman, le Panama, les Samoa américaines, les Samoa, les Seychelles, Trinité-et-Tobago et le Vanuatu, etc…).
A cause du principe de non double imposition, nous perdons beaucoup d’argent. Les paradis fiscaux se caractérisent principalement par des impôts faibles ou inexistants, le manque d’échange d’informations, le manque de transparence, l’absence d'exigence d’activité substantielle et j'en passe ! Une étude de l’organisme américain, The National Bureau of Economic Research (NBER), réalisée en 2017, renseigne que le Sénégal serait la 8e nation ayant plus d’argent dans les paradis fiscaux.
Ainsi ce n’est pas un hasard si, dans notre balance des paiements 2018 (BCEAO 2018), les investissements (IDE + investissements de portefeuille) sortants (1349 milliards) sont supérieurs aux investissements entrants (48.6 milliards). Lors de la rencontre du Club de Paris en 2018, la représentante de l’Allemagne disait ceci « une croissance à grande échelle ne nécessite pas uniquement des investissements étrangers conséquents.
Au contraire les investissements les plus importants sont ceux des sénégalais eux-mêmes dans leur pays. Car, premièrement, il y’a mathématiquement bien plus d’investissements si chaque Sénégalais investit dans son pays, même s’il s’agit seulement de petits montants. Et deuxièmement, le Sénégal émettrait un signal important, permettant de convaincre les investisseurs allemands et d’autres pays que leur argent est bien placé. A ce jour les capitaux privés des Africains sont placé principalement hors d’Afrique. Le développement économique est donc privé d’un montant de l’ordre de jusqu’à 800 milliards de dollars (476 800 milliards de F CFA) d’où la question suivante : pourquoi investir dans un pays dans lequel ses propres citoyens n’investissent pas ? »
Le 15 février 2018, Ousmane SONKO avait pourtant alerté l’Exécutif et l’Assemblée Nationale sur le danger de signer des conventions de "non double imposition" qui lieraient le Sénégal à des pays avec statut de paradis fiscaux (Ile Maurice, Luxembourg, ...). Le député avait soulevé le risque encouru (évasion fiscale) par l'État, du fait des entreprises évoluant dans le secteur pétrolier notamment. C’est le cas de PetroTim Ltd & Petro-Asia New Co qui sont tous les deux domiciliés aux Iles Caïmans sous les matricules 265741 & 270031.
Ainsi si notre Etat attend jusqu’en 2020 pour « déchirer son accord avec l’île Maurice » après avoir supporté une évasion fiscale de plus de 150 milliards, combien avons-nous perdu alors avec les autres paradis fiscaux avant de tenter de combler ce trou par un endettement intempestif ?
Babo Amadou BA
Membre du Secrétariat national à la communication PASTEF
par Mamadou Mbakhé Ndiaye
PLUS JAMAIS ÇA
Dans un pays où on se pâme de notre religiosité, de notre hospitalité légendaire et d’un humanisme que les chefs religieux nous auraient légué, ce qui s’est passé à Malika et à Diamaguène est une catastrophe
Dans un pays où on se pâme de notre religiosité, de notre hospitalité légendaire et d’un humanisme que les chefs religieux nous auraient légué, ce qui s’est passé à Malika et à Diamaguène est une catastrophe. Refuser à des concitoyens décédés d’avoir un enterrement digne après avoir été terrassés par une maladie, qui n’a pas encore dit son dernier mot, renseigne de l’affaissement de notre commun vouloir de vivre-ensemble.
La coupe est pleine. Les responsabilités doivent être situées pour que de tels agissements ne se reproduisent plus. Car le Covid-19 n’a pas encore épuisé toutes ses munitions. La guerre est toujours en cours. Il est vrai que les autorités sanitaires ont trop mis l’accent sur la prévention, sur les gestes barrières.
Des choses qui sont incontestablement nécessaires pour la lutte contre le Covid-19. Mais force est de constater qu’en plus de tuer, le coronavirus stigmatise. Et des informations distillées çà et là dans les réseaux sociaux rajoutent à la confusion. Certains soutiennent que le virus est contagieux même après la mort. Sans dédouaner les populations qui se sont tristement illustrées, il faut dire que la lanterne des Sénégalais n’a pas été bien éclairée sur cette question. Face à la prolifération des fausses informations, les scientifiques avaient l’obligation de communiquer aux Sénégalais qui n’ont pas tous le même niveau de compréhension des informations reçues.
N’oublions pas que nous sommes dans un pays où l’instruction est encore un luxe. Le gouvernement a eu tort de ne pas avoir bien insisté sur l’inexistence de danger liée aux enterrements des morts du Covid-19. Certaines personnes du troisième âgé, interrogées il y a quelques jours dans la banlieue, ont fait part de leurs inquiétudes. Pas de mourir du coronavirus, mais de ne pas avoir droit à un enterrement digne de ce nom. «C’est terrible parce que si tu meurs du Covid-19, tu seras incinéré», soutenait un sexagénaire, il y a quelques semaines. Donc sur ce sujet, l’information n’a pas été audible. Ce qui ne disculpe pas pour autant des populations de Bambey, de Malika ou de Diamaguène qui se sont montrées indignes face à l’épreuve. Car c’est dans l’épreuve qu’on reconnaît les grandes nations et par ricochet les grands peuples. Il ne faut pas qu’au lendemain de cette pandémie, toutes nos certitudes soient à terre.
Les notions de «Ngor», «Suturà» ne doivent pas être de vains mots. Et le contexte actuel est bien propice pour les revitaliser. Dans la langue Bantu, il y a une notion ‘’Ubuntu’’ qui est reprise maintenant par tous les humanistes du monde. Selon l’archevêque sud-africain, Desmond Tutu, quelqu’un d’Ubuntu est ouvert et disponible pour les autres, car il a conscience d’appartenir à quelque chose de plus grand». On ne peut pas revenir en arrière, mais on peut aller de l’avant.