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1 mai 2025
Opinions
par Ngor Dieng
LE COVID- 19 : LA PRISE EN CHARGE PSYCHOSOCIALE EN QUESTION
L’Etat qui a la charge de diriger le comité de riposte contre la pandémie, doit mettre en place une cellule de veille permanente, chargée d’accompagner toute personne en contact direct ou indirect avec la maladie afin d’adoucir le choc
« Elle [la psychologie] offre l’opportunité de cerner, non seulement les comportements directement et objectivement observables, mais aussi, les processus conscients et inconscients, cognitifs et affectifs. Autant dire que la psychologie nous permet d’étudier la vie mentale, les états de conscience, les comportements et les conduites (...). De même, elle s’attache à mettre en place des techniques et des moyens efficaces dans le domaine de la thérapie, de la prise en charge et de l’accompagnement psychosocial concernant les crises et les troubles du comportement qui peuvent affecter un sujet particulier. » - Babacar Diop,Jinne Maïmouna, Crises psychosociales et hystériformes dans l’école sénégalaise, Approche psychosociologique, L’Harmattan-Sénégal, Dakar, 2018, pp. 23-24.
Depuis le mois de décembre 2019, le monde subit le diktat d’une pandémie : le Covid-19. Cet infiniment petit a bouleversé l’agenda mondial et n’a épargné aucun secteur d’activités des sociétés humaines, et cela à travers toute la planète terre. Toutes les activités sont presque au ralenti et certaines sont tout bonnement à l’arrêt. L’humanité semble confrontée à ce que nous appelons le premier conflit mondial du XXIe siècle. Le Coronavirus est véritablement la première guerre mondiale de ce millénaire naissant. L’infiniment petit est en guerre contre la race mortelle des hommes.
L’homme, l’humanité sont en guerre contre une minuscule créature qui n’est visible qu’au microscope et qui, aujourd’hui, secoue la marche de l’humanité. Le semblant de pouvoir de l’homme est remis en cause frontalement par un ennemi invisible, mais aussi redoutable que l’arme nucléaire. La puissance de l’homme s’affaisse, son contrôle de la planète l’échappe et son orgueil est atteint de plein fouet.
De la même manière que Galilée a remis en cause le privilège de la terre par la victoire de l’héliocentrisme sur le géocentrisme, Darwin le privilège de l’homme par la théorie de l’évolutionnisme qui fait du singe l’ancêtre de l’homme et Freud le pouvoir de la conscience par la découverte de l’Inconscient, le Covid-19 a remis sérieusement en cause le privilège d’une humanité qui se croyait investie d’une mission de la fin de l’histoire et de l’accomplissement du dernier homme[1]. L’homme a encore beaucoup à apprendre de la nature et de lui-même. Il est loin de réaliser ce rêve cartésien de faire de l’homme le maître et le possesseur de la nature[2].
Le capitalisme [sauvage] qui criait victoire depuis le déclin du communisme, symbolisé par la chute du mur de Berlin en 1989, souffre aujourd’hui des bouleversements causés par le Coronavirus. Les grandes nations qui se considéraient comme les maîtres du monde ont subi la foudre de la pandémie, étant obligées de confiner leurs populations durant des mois pour endiguer la propagation du virus. Pourtant, le virus reste serein et imperturbable. Il ne se déplace pas de son propre gré, mais s’agrippe aux hommes qui se déplacent, l’homme étant un éternel pigeon voyageur, pour contaminer leurs semblables.
La pandémie a remis en cause l’hégémonie de nations qui se croyaient jusque-là invulnérables. Un nouvel ordre mondial est en train, peut-être, de naître comme certains chefs d’Etat l’ont annoncé. L’humanité est obligée de repenser sa relation avec la nature. Les hommes sont tenus de revoir leurs relations entre eux et les Etats gagneraient à redéfinir leurs rapports afin d’humaniser la terre comme le souhaite l’écrivain argentin Silo[3].
Sous nos tropiques, c’est-à-dire au Sénégal, la gestion de la pandémie nécessite une réflexion dans le but de contribuer à la riposte contre le Covid-19. Cette guerre annoncée par le chef de l’Etat, dans son adresse de la nation du 23 mars 2020, nécessite la participation de toutes les ressources humaines et de toutes les expertises aussi bien dans le domaine de la santé que dans celui des autres branches de la connaissance comme l’économie, la sociologie, la philosophie mais aussi et surtout la psychologie. N’oublions pas que la maladie [toute maladie] affecte aussi bien le physiologique que l’état mental ou psychologique du malade.
Et dans le cadre de cette pandémie, la gestion ne doit pas seulement se faire sur le plan médical. Autrement dit, gérer cette pandémie demande la prise en compte de la dimension psychosociale de la maladie qui ne cesse de se propager avec son lot d’infectés, de victimes, de stigmatisés et de confinés. Dans un pays où les populations, dans leur majorité, vivent au jour le jour, il importe de tenir compte de la dimension psychosociale dans la gestion de la pandémie. Le protocole thérapeutique doit intégrer la dimension psychologique des malades, des personnels de santé (médecin, infirmer, etc.), des familles des victimes, des cas suspects, des familles mises en quarantaine qui, d’une manière ou d’une autre, vivent une certaine psychose voire un stress lié à leur face à face direct ou indirect avec le Coronavirus.
C’est pourquoi l’Etat du Sénégal, qui a la charge de diriger le comité de riposte contre la pandémie, doit mettre en place une cellule de veille permanente, chargée d’accompagner toute personne en contact direct ou indirect avec la maladie afin d’adoucir le choc et de gérer le stress qui l’accompagne. Cette cellule jouera le même rôle que jouent les « soldats du feu », en étant toujours dans les dispositions d’intervenir, partout sur le territoire national où ses compétences seront sollicitées, pour aider des populations en souffrance physique, morale, mentale et psychologique. L’individu, étant aussi solide qu’il est fragile, se trouve souvent dans des situations où la résignation n’est qu’une solution de façade. Il a alors besoin d’être assisté psychologiquement pour réaliser ce qui lui arrive afin de « faire le deuil », c’est-à-dire d’accepter psychologiquement la réalité et/ou de s’accommoder d’elle, bien qu’elle soit parfois cruelle et difficilement acceptable.
Et de ce point de vue, notre société a encore des pas à faire. Elle ne mesure pas encore toute l’importance de la santé mentale dans une société qui devient de plus en plus individualiste et matérialiste, où la valeur humaine semble reléguée au second plan au profit de l’argent, du rang social et de la lutte des places (« palaces ») au sens où on l’entend en wolof.
Le malade du Covid-19 doit être traité par un protocole thérapeutique à la fois médical et psychologique pour accepter la maladie, la supporter et guérir. Il a besoin d’un soutien psychologique pour faire face à la stigmatisation à laquelle il est exposé afin de pouvoir se réinsérer facilement dans sa société. Le regard de l’autre est souvent, dans certaines situations, perturbant et ce n’est pas pour rien que Jean-Paul Sartre disait que « l’enfer, c’est les autres ».
Les mesures prises par l’Etat (et assouplies par le discours à la nation du président de la République du 11 mai 2020) ne peuvent être acceptées et intégrées qu’à travers une bonne campagne de communication qui nécessite des spécialistes de la « chose humaine », l’homme n’étant pas un objet des sciences exactes mais plutôt des sciences humaines et sociales. C’est cette dimension humaine et sociale qui fait que son vécu social, ses croyances religieuses, ses réalités socioculturelles et économiques doivent déterminer le type d’intervention dont le traitement de chaque cas de malade nécessite. Malheureusement, au Sénégal, la plupart des victimes et familles de victimes sont laissées à elles-mêmes, abandonnées souvent par la société, et dans certains cas, par les autorités étatiques elles-mêmes, alors qu’elles ont éminemment besoin d’un accompagnement psychosocial. Ainsi, brulent-elles et se consument-elles à petit feu, sous le regard indifférent et/ou insensible d’une société qui commence à perdre sa capacité d’indignation et de commisération.
Dès lors, nous lançons un appel aux autorités pour la prise en charge de cette dimension psychosociale dans la gestion de la pandémie et le renforcement du dispositif d’assistance psychologique par la création d’une cellule nationale de veille permanente pour la prise en charge psychologique de nos malades, victimes d’accidents, d’incendies, de catastrophes naturelles, bref des personnes traversant des moments très difficiles de leur vie[4]. C’est un gage de santé mentale pour une société et des populations fragilisée par la crise sanitaire du Covid-19 qui impacte la vie humaine sur tous les plans : sanitaire, économique, financière, religieux, social et psychologique.
Nous profitons de l’occasion pour lancer un appel à nos autorités à ne pas se désarmer bien que les stratégies soient revues depuis le 11 mai 2020, et aux populations à rester vigilantes et à respecter les mesures-barrières afin que les pessimistes et les tenants des « thèses complotistes » n’aient pas raison sur l’humain. Après tout, continuons à prier en tant que croyants pour que Dieu éradique, dans sa bonté immense, cette pandémie de la planète terre afin de la permettre de se ré-humaniser...
Nous soutenons nos autorités administratives à la tête desquelles se trouve le chef de l’Etat, son Excellence le président Macky Sall. Nous encourageons les efforts des personnels de santé dont l’autorité est incarnée par le ministère de la Santé et de l’Action sociale. Tout en manifestant notre soutien psychologique aux malades sous traitement, nous présentons nos condoléances les plus attristées aux familles des victimes du Covid-19, au Sénégal et à l’étranger. Que Dieu veille sur notre cohésion nationale et nous épargne d’une propagation exponentielle de la maladie avec les nouvelles mesures prises par le chef de l’Etat. Et pour cela, nous en appelons à la responsabilité de chacune et de chacun des Sénégalais.
Ngor Dieng est Psychologue-conseiller, Doctorant en philosophie à l’UCAD de Dakar
[1]. Francis Fukuyama, La Fin de l’histoire et le Dernier Homme, Free Press, 1992.
[2]. René Descartes, Discours de la méthode, Le Livre de poche, Librairie Générale Française, 2000.
[3]. SILO, Humaniser la terre, Editions Références, Paris, 1999.
[4]. Bien entendu, au niveau régional, on peut avoir des cellules régionales de veuille permanente au service des victimes locales. Elles pourraient être composées de sociologues, de psychologues, d’assistants sociaux, d’éducateurs spécialisés, de psychiatres, etc.
par Pascal Diouf et Ndèye Debo Seck
PROPOSITION DE RÉAMÉNAGEMENT DE L’ANNÉE SCOLAIRE
Il nous semble prématuré, pour ne pas dire hautement risqué de reprendre les cours le 2 juin. Il est primordial de préserver la santé d’une frange importante de ce que la nation a de plus cher, ses enfants les plus jeunes et les plus vulnérables
Pascal Diouf et Ndèye Debo Seck |
Publication 14/05/2020
Dans son discours du 11 mai 2020, le président Macky Sall a annoncé que « le Covid-19 continuera encore de circuler dans le pays jusqu’au mois d'août, voire septembre ». Il a par ailleurs confirmé la reprise des cours prévue le 2 juin prochain. Laquelle avait été annoncée dans une note d’orientation qu’enseignants et élèves s’étaient partagés, notamment sur les groupes de discussions en ligne. Il est à redouter que cette reprise des cours n’ait des répercussions néfastes. Ce sont des centaines de milliers d’élèves qui vont reprendre le chemin de l’école après deux mois d’interruption en raison du Covid-19. D’après la note d’orientation susmentionnée, les enseignant.e.s devront rejoindre leurs postes le 18 mai. Avec eux/elles, il faudra compter le personnel d’appoint, gardiens et personnes de charge, les administrateurs des écoles, etc.
La majorité des écoles du Sénégal sont dans des conditions d’hygiène et de logistiques déplorables. Bon nombre d’entre elles ne disposent pas de salles de classe permettant d’acter une distanciation sociale efficiente. La disponibilité de latrines, l’accès à l’eau, l’enclavement et/ou l’éloignement de beaucoup d’établissements ont toujours constitué un frein à des conditions d’enseignement-apprentissage idoines. Qui plus est l’hivernage a débuté par endroits et nombreux sont les élèves qui préfèreront rejoindre les champs (avec l’accord des parents) que de reprendre le chemin des écoles. Pour ce qui est des zones urbaines, avec la récurrente question des inondations, les écoles servent souvent de lieu de recasements de sinistrés.
Il faut aussi prendre en compte la situation de nombre d’enseignant.e.s et apprenants immunodéprimé.e.s ou souffrant de pathologies liées à leur environnement scolaire, mauvaise qualité de la craie, abris provisoires, humidité dans les salles de classes, etc.
Par ailleurs, qu’est-ce qui a été prévu pour les enseignantes en état de grossesse et celles qui allaitent. Notons que l’ANSD comptait dans sa Situation Économique et Sociale (SES) du Sénégal de 2016, 9827 établissements d’enseignement primaire, 1932 au niveau du Moyen et 827 établissements du secondaire. Le délai entre l’annonce de reprise des cours et la reprise effective nous paraît extrêmement court pour mettre en place, partout au Sénégal, un dispositif de prévention et de prise en charge d’éventuels contaminés (Dieu nous en garde). Toutes conditions qui permettraient aux enseignant.e.s, aux administrateurs et aux élèves de rejoindre les classes en toute confiance.
Tenant compte de tous ces paramètres, il nous semble prématuré, pour ne pas dire hautement risqué de reprendre les cours le 2 juin. Il est primordial de préserver la santé d’une frange importante de ce que la nation a de plus cher, ses enfants les plus jeunes et les plus vulnérables. Il est tout aussi primordial de préserver la santé de dizaines de milliers de mères et de pères de famille.
Nous proposons ainsi :
De reprendre les cours dès le 1er octobre : ce mois, de même que celui de novembre seront consacrés à la poursuite des enseignements-apprentissages, en vue de compenser le retard accusé à tous les niveaux ;
De consacrer le mois de décembre aux examens ou évaluations certificatives (qui prendront fin au plus tard le 22 décembre en tenant compte des congés de Noël) ;
De programmer la rentrée scolaire 2020-2021 dans la fourchette du 05 au 10 janvier 2021. Cette année se poursuivra jusqu’au 31 juillet comme d’habitude ;
De faire cours les samedis pour le compte de l’année scolaire 2020-2021 au niveau de l’élémentaire ;
De réaménager les emplois du temps en augmentant le crédit horaire selon les matières dominantes au niveau du Moyen-Secondaire. Par exemple, une classe de 3eme qui a 4h en Histoire-Géographie par semaine se verrait ajouté 2h dans la discipline.
Ce sont là nos propositions pour sauver l’année scolaire tout en limitant le risque de propagation du covid-19 chez les élèves et les enseignant.e.s.
Pascal Diouf est Professeur d’Histoire-Géographie
Ndèye Debo Seck est Professeure d’Anglais
par Ibrahima Cheikh Diong
PARTAGEONS DANS LA DIGNITÉ
Alors que certains d’entre nous ont encore la chance de pouvoir s’approvisionner dans des chers supermarchés du coin, des gens autour de nous (sans-abri, petits commerçants, handicapés, mendiants, etc.) qui sont dans le besoin
Le coronavirus est là, espérons qu’il disparaîtra un jour, pour ne plus jamais revenir afin que nous reprenions nos vies et nos activités. Mais, quelques belles histoires humaines et inspirantes qui en sortiront laisseront des souvenirs gravés en nous, pour toujours.
Voici la mienne en 10 points, l’histoire et les leçons de politiques publiques:
1. J’ai observé…
Alors que je faisais ma marche quotidienne dans les rues de mon quartier à Dakar (Les Almadies) pour préserver ma santé mentale et physique malgré le confinement partiel et le couvre-feu national au Sénégal, j’ai remarqué 4 dames, courageuses et dignes, qui vendaient, sans masques ou autres protections, toutes sortes de petites marchandises (noix, fruits, etc.). Malheureusement, il n’y avait presque aucun client autour d’elles à cause du virus.
Pourtant, je suis convaincu que les recettes de ces petits commerces serviraient certainement à nourrir leurs petites familles, en particulier leurs enfants qui les aident d’ailleurs dans ce petit commerce plutôt que d’étudier ou de jouer comme les autres enfants du quartier privilégié des Almadies.
2. J’ai constaté…
Ces dames semblent toutes avoir une chose en commun: beaucoup de marchandises invendues tout au long de la semaine à cause d’absence de clients dûe au coronavirus.
Cependant, ces femmes et leurs enfants semblaient tous garder une grande dignité et un gros sourire sur leurs visages chaque fois que je leur disais bonjour. Ce respect de leur dignité m’a d’ailleurs amené à ne pas montrer leurs visages dans ces photos de leurs marchandises
3. J’ai agi …
Après une semaine de marche tout en observant tous les jours cette vue insupportable (qui m’a rappelé les petites commerçantes de ma jeunesse dans ma ville natale de Thiès), j’ai décidé de les contacter pour savoir ce que je pouvais faire modestement pour faire preuve de compassion et de soutien, sans aucune démonstration de pitié de ma part envers elles, car après tout, elles gagnaient leurs vies à leurs manières et honnêtement .
J’ai demandé à chacune d’elles comment elles géraient l’impact visiblement négatif du coronavirus sur leurs petits commerces et que faisaient-elles pour trouver des acquéreurs pour leurs marchandises ou gérer leurs invendus. Elles m’ont affirmé qu’elles vendaient peu et que leurs stocks invendus coûteraient environ 10 000 Fcfa (équivalent à 15 USD) par stand! Au total, 40 000 Fcfa (75USD) pour les 4 dames.
Alors, je leur ai proposé d’acheter (le mot clé ici est acheter, pour respecter leur dignité, au lieu de leur faire un don) tous leurs invendus du jour. Les produits achetés ont ensuite été distribués aux gardiens des maisons aux alentours qui suivaient avec surprise nos échanges (bien sûr, j’avais mon désinfectant pour m’assurer que toutes les personnes, surtout ces bonnes femmes, qui étaient impliquées dans la transaction, étaient protègées, coronavirus oblige !
4. J’ai impacté modestement…
Je sais que mon geste symbolique (que j’aurais pu simplement garder pour moi mais l’histoire m’a tellement inspiré pour ne pas la partager) ne résoudra certainement pas toutes leurs difficultés du moment, mais pourrait leur apporter un petit soulagement à ces moments difficiles pour tous, même si certains d’entre nous s’en sortent mieux financièrement.
5. J’ai beaucoup appris…
Voici la meilleure partie de cette histoire. Alors que je continuais ma marche pour rentrer chez moi, je ne savais pas que 5000 Fcfa (8USD) était tombé de ma poche par accident et l’une des 4 femmes qui l’avait vu, a ramassé le billet et a couru vers moi pour me rendre mon argent. Je ne pouvais imaginer un meilleur geste d’honnêteté et de dignité car, malgré leurs difficultés financières apparentes, cette dame a choisi de garder sa fierté, son honnêteté et sa dignité en me rendant mon argent. Quel geste hautement humain et plein de bonnes leçons de valeurs pour nos enfants et pour l’humanité !
6. Morale de l’histoire…
Alors que certains d’entre nous ont encore la chance de pouvoir s’approvisionner dans des chers supermarchés du coin, il y a des gens autour de nous (sans-abri, petits commerçants, handicapés, mendiants, etc.) qui sont dans le besoin. Puisez dans votre cœur pour les aassister, si vous le pouvez, mais d’une manière digne, sans que cela soit une question de gloire pour vous !
7. Les héroïnes …
Encore une fois, rappelez-vous que les vraies héroïnes de cette belle et inspirante histoire sont ces 4 dames (et surtout pas moi) qui continuent de vendre leurs produits et se battent quotidiennement pour leurs familles malgré les risques de coronavirus.
8. Partageons…
Ces moments difficiles, qui seront certainement derrière nous un jour, nous interpellent tous humainement. Il est grand temps de réveiller en nous nos grandes et belles valeurs humaines, dormantes pour certains, et partager avec les moins nantis que nous.
9. Un Etat doit être présent en cas de catastrophe…
Au moment où les pays développés distribuent des chèques a tort et à travers a leurs citoyens en difficulté et/ou en chômage c’est le moment pour nos états en Afrique de revoir nos politiques sociales et de solidarité parce qu’un état doit être présent en cas de pandémie et/ou autres catastrophes. Gouverner c’est anticiper !
10. Soutenons le secteur informel en Afrique…
Nous souhaitons certes que nos économies post-covid 19 se reconstruisent pour retrouver ou dépasser les niveaux de croissance d’avant. Dans ces efforts de nos gouvernements, n’oublions pas de soutenir le secteur informel en Afrique en leur aidant dans la formalisation de leur business et, en leur facilitant l’accès au financement et au marché. Faut-il, enfin, encore le rappeler, 80% des emplois en Afrique proviennent du secteur privé (informel et formel).
Profitez de cette modeste nourriture de l’esprit et protégez vous !
PAR Papa Oumar Ndiaye
LE CALVAIRE DES ÉTUDIANT AFRICAINS CONFINÉS EN FRANCE
Achille, 24 ans, erre dans les couloirs du CROUS de Poitiers. Depuis le début du confinement, cet étudiant sénégalais en Master 2 géographie, doit choisir entre payer son loyer ou dépenser ses épargnes pour vivre
The Conversation |
Papa Oumar Ndiaye |
Publication 13/05/2020
Achille, 24 ans, erre dans les couloirs du CROUS de Poitiers. Depuis le début du confinement, cet étudiant sénégalais en Master 2 géographie, doit choisir entre payer son loyer ou dépenser ses épargnes pour vivre. Il a fait son choix :
« Je préfère avoir de quoi manger. J’ai deux mois d’arriérés de loyers en ce moment mais qu’est-ce que tu veux ? De toute façon, il ne me reste plus rien. »
Comme beaucoup de jeunes étudiants originaires du continent african, Achille est bloqué en France à cause de la crise sanitaire et ses conditions de vie se sont considérablement détériorées.
Le président de la Fédération des étudiants et stagiaires sénégalais de France, Thierno Laye Fall, déclarait dans un article du Monde paru le 11 avril que de nombreux cas d’étudiants africains en détresse lui étaient régulièrement remontés. Ces derniers subissent en effet les conséquences des décisions politiques de leurs pays d’origine mais aussi la précarité estudiantine qui règne dans leur pays d’accueil.
Des étudiants promis à un bel avenir
Achille, originaire de Dakar, est arrivé en France en 2017. Il n’est pas boursier malgré qu’il en a fait plusieurs fois la demande.
Ce nombre importante représente 5 % des 5 100 000 étudiants internationaux en mobilité dans le monde qui ont choisi la France en 2019, le premier pays non anglophone accueillant des étudiants non européens.
À l’horizon 2030, le nombre des étudiants en mobilité dans le monde devrait dépasser les 10 millions d’individus. Aujourd’hui, 46 % des étudiants étrangers en France sont originaires du continent africain. Le Maroc est le premier pays d’origine des étudiants étrangers (12 %), suivi par l’Algérie (9 %), la Chine (9 %), l’Italie (4 %), Tunisie (4 %), le Sénégal (soit 3 %).
Ces étudiants internationaux indiquent souvent souhaiter rentrer dans leurs pays pour y poursuivre des carrières prestigieuses et constituer ainsi une future élite impliquée dans l’avenir politique de leurs nations respectives.
« Ils serviront souvent de trait d’union entre leur pays de naissance et le pays où ils auront été diplômés […] »
Pourtant leur avenir semble aujourd’hui compromis par la crise sanitaire.
L’impossible retour au pays
Le 15 mars, lorsque le confinement est annoncé, tous les étudiants (y compris moi-même), locataires dans des résidences universitaires ont reçu une lettre expliquant :
« Les consignes nationales nous imposent de vous demander de quitter votre logement d’ici le mercredi 18 mars 2020. »
Ce calendrier, très serré pour quitter son logement, s’est encore accéléré́ avec l’annonce du président de la République indiquant que le mardi 17 mars à midi devient désormais le dernier délai possible pour rejoindre son lieu de domicile régulier, c’est-à-dire, dans leur pays d’origine.
Cette période a été vécue comme particulièrement angoissante. Pour beaucoup d’entre nous prendre un avion de façon précipitée est financièrement impossible.
Rappelons que le montant de la bourse varie entre 300 et 600 € selon que l’étudiant fait ses études à Paris ou dans une autre région de France. Or le prix des billets d’avion pris la veille pour le lendemain peuvent monter jusqu’à plus de 1 000 €.
Peu à peu, cette mesure devient impossible à suivre : la plupart des vols sont annulés, et les trains ne circulent plus.
Nombreux sont donc les étudiants à Poitiers et partout en France qui se sont mobilisés à travers des associations ou conseils de résidence pour pouvoir garder leur logement en cité CROUS. J’ai personnellement participé à ces mouvements pour tenter de trouver des solutions.
À Poitiers, le CROUS a proposé une distribution de pains tous les deux jours aux étudiants, ponctuellement des denrées. Mais surtout, l’organisme a mis en place un système de consultations par téléphone que moi-même et deux autres étudiants encadrent.
Il s’agit d’appeler une fois toutes les semaines tous les étudiants confinés de prendre de leurs nouvelles. C’est lors de ces appels, que l’on apprend que certains restent plusieurs jours sans avoir de quoi manger, que d’autres ont perdu leur « petit boulot » mais ne peuvent bénéficier du chômage partiel puisqu’ils étaient intérimaires, que certains n’ont aucune aide tandis que d’autres ont entendu parler d’un soutien hypothétique venant de leur pays d’origine…
Nous nous sommes ainsi demandé, de façon assez légitime : que font les gouvernements sénégalais, marocain, togolais pour leurs ressortissants étudiants en France depuis le début de la pandémie ?
Le volte-face du Sénégal
L’exemple du Sénégal est assez intéressant. Tout au début de la pandémie en Chine, nombreux gouvernements (occidentaux surtout) avaient commencé à rapatrier leurs citoyens. Interrogé sur le sort des étudiants sénégalais à Wuhan, le président du Sénégal Macky Sall déclarait ceci le 3 février 2020 :
« Le Sénégal n’a pas les moyens de rapatrier ses compatriotes. » (soit une douzaine d’étudiants à Wuhan)
Ce discours a choqué beaucoup d’étudiants et d’autres observateurs mais paradoxalement salué par de nombreux autres sénégalais population civile pour qui les rapatrier pourrait exposer le pays au virus.
Le Sénégal compte pourtant aujourd’hui plus d’un millier de personnes infectées.
Face aux nombreuses critiques, le gouvernement Sall a enfin « envisagé » de mieux intégrer « sa » diaspora dans sa politique de lutte contre la pandémie.
Vraisemblablement, si « les Sénégalais de l’extérieur » – en France ici – remplissent le formulaire qui leur est destiné, ils pourront bénéficier d’une aide, > « un forfait minimal de 200€ qui pourra être revalorisé en fonction de la situation de certains étudiants (en particulier ceux directement atteints par la pandémie du Covid-19. »
La formulation laisse toutefois perplexe lorsque l’on sait que tous les étudiants comme l’ensemble de la population en France peuvent être directement touchés par l’épidémie.
Une précarité financière accentuée
Le fait aussi que cette aide concerne prioritairement les étudiants non boursiers est aussi assez révélateur. En temps normal, le taux d’étudiants boursiers (obtenues du Sénégal) tourne autour de 35 à 40 % environ. Il est difficile d’avoir les chiffres exacts mais lorsqu’on qu’on fait le prorata entre les 3 900 allocataires annoncés en 2015 par le service de gestion des étudiants à l’étranger et le nombre d’étudiants actuellement en France (10974), on pourrait estimer le nombre de non-boursiers à près de 7 000.
En dehors d’un soutien de leur famille, la majorité de ses étudiants dépendent d’un « petit boulot » pour vivre comme je l’ai constaté dans le cadre de mes recherches doctorales.
Enfin, le montant du loyer de la chambre de 9m2 où sont confinés la plupart de ses étudiants est de 236€/mois. Le montant de cette aide paraît alors bien peu.
Si le projet du gouvernement sénégalais semble insuffisant, il a cependant le mérite d’exister et compte comme le seul en Afrique de l’Ouest actuellement.
Ainsi, un étudiant togolais me confiait récemment :
« Les Sénégalais ont la chance de remplir des formulaires, nous on meurt ici, ils [l’État et ses composants] s’en fichent. »
Mes discussions avec des étudiants marocains, nigériens, algériens vont dans le même sens. Un jeune nigérien me déclarait avec indignation :
« Nous, on nous demande même de contribuer à l’effort national, de faire des dons. »
Dans l’ensemble aucun des États d’origine des étudiants n’a mis en place une politique de prise en charge réelle pour ses ressortissants. Vers qui ces étudiants peuvent-ils alors se tourner ?
En France, options limitées
En France, le ministre de l’Éducation national et de l’Enseignement supérieur reste discret à leur sujet.
On lit ainsi sur le site officiel du Ministère que la précarité étudiante et la situation des étudiants français à l’étranger sont au cœur des préoccupations ministérielles. Mais les cas d’étudiants étrangers et leur situation sur le sol français ne sont soulevés qu’à travers le prisme du titre de séjour :
« Les étudiants internationaux engagés dans une formation en France et dont le titre de séjour arriverait prochainement à expiration feront l’objet d’une attention spécifique du Gouvernement. Une disposition spécifique du projet de loi d’urgence pour faire face à l’épidémie de Covid-19 permettra au gouvernement de prendre toutes les mesures utiles afin de prolonger leurs titres de séjour. »
#BienvenueEnFrance
Il y a seulement quelques mois, on acclamait les étudiants étrangers, « une chance pour la France », accueillis sous la bannière #BienvenueEnFrance.
L’argument politique majeur était de permettre un meilleur accueil à tous ces étudiants non européens. Ces mêmes étudiants invités à rentrer chez eux et leur sort demeure peu médiatisé.
Aujourd’hui nous essayons tant bien que mal de poursuivre normalement nos études, comme nos collègues français. Les difficultés restent malgré tout très préoccupantes.
La crise sanitaire est une épreuve de plus pour cette migration étudiante originaire du continent africain. Les premières crises économiques des années 1970 se sont ainsi accompagnées par une baisse des nombres de bourses,
Cette crise sanitaire, parce qu’elle a des conséquences économiques, accentuera sans aucun doute les inégalités sociales, notamment l’accès au numérique pour les étudiants.
J’ai bien peur aussi que le déconfinement ne présente pas une réelle solution puisque certains étudiants ne pourront pas retrouver rapidement un travail d’appoint pour préparer la rentrée. L’été semble ainsi compromis et s’annonce bien morose.
Papa Oumar Ndiaye est Doctorant en Sociologie, Université de Poitiers, laboratoire GRESCO. Spécialité : Migration internationale des étudiants, Université de Poitiers
Par Marie-Pierre Rokhayatou Sarr
L’IMPACT DU COVID 19 DANS LE DOMAINE JURIDIQUE
La crise sanitaire aura évidemment des conséquences dans différentes matières juridiques, notamment sur les entreprises et les salariés. Ce qui nous pousse à inciter le Gouvernement à prendre des mesures exceptionnelles.
La crise sanitaire aura évidemment des conséquences dans différentes matières juridiques, notamment sur les entreprises et les salariés. Ce qui nous pousse à inciter le Gouvernement à prendre des mesures exceptionnelles.
-Dans le domaine du droit des assurances
Si des entreprises ont subi une interruption forcée de leurs activités et des pertes de chiffre d’affaires, la couverture du risque de pandémie est à admettre. La pandémie pourra être considérée comme une catastrophe économique indemnisable. Elles doivent pouvoir compter sur l’assurance perte d’exploitation, suite à l’arrêt de leurs activités et être remboursées par leurs compagnies d’assurance, par le biais des garanties des pertes d’exploitation. Le gouvernement pourrait élaborer un projet de loi qui reconnaît la situation de catastrophe naturelle du covid 19. Le cadre législatif permettra ainsi aux entreprises assurées, ayant souscrit l’option de garantie perte d’exploitation, d’obtenir une compensation de leur perte d’exploitation. Pour les entreprises de spectacle, si elles ont souscrit une assurance annulation et que l’annulation est due au covid 19, elles devraient être indemnisées par leur assureur.
-Dans le domaine du droit pénal et de la procédure pénale
On a noté la mise en danger, parfois délibérée, de la vie d’autrui dans les lieux publics, et même dans les hôpitaux. S’il y a un lien de causalité entre le préjudice et un tel fait, l’agissement doit être considéré comme fautif et être puni. Quant au Code de procédure pénale, il prévoit la suspension des délais, en cas de trouble majeur au fonctionnement normal de la justice. Les délais applicables en matière pénale sont à aménager, de même l’adaptation des règles de procédure pénale, les suspendre, pour permettre la continuité de l’activité pénale essentielle au maintien de l’ordre public et même les allonger, à compter de la date de cessation de la crise. La prorogation des délais échus et l’adaptation des procédures visant à tenir compte des difficultés d’exécution permettront de paralyser les astreintes et les clauses contractuelles qui ont pour objet de sanctionner l’inexécution du débiteur.
-Dans le domaine du droit du travail et de la sécurité sociale
Le gouvernement peut inclure le covid 19 dans la liste des maladies professionnelles et accidents du travail. Ainsi, suite à la contamination d’un travailleur, il pourra bénéficier d’une prise en charge par la sécurité sociale. Pour les personnels soignants et les forces de l’ordre, qui sont les plus exposés au virus, la reconnaissance est, en principe, automatique, si leur contamination éventuelle est liée à leurs conditions de travail. Pour les autres salariés qui sont soumis au régime de droit commun, ils devront apporter la preuve de l’imputabilité au travail, de leur contamination due à la profession exercée et aux contacts rapprochés effectués dans le cadre de celle-ci. Le risque de contamination par les collègues de travail positives au covid 19 ou par le fait, au sein de l’entreprise, d’avoir touché un objet infecté, est réel. Lorsque la contamination est survenu pendant ou à l’occasion du travail, le covid peut être qualifié d’accident du travail, si le travailleur prouve qu’il a été contaminé pendant le travai.
Le gouvernement peut aussi créer un fonds d’indemnisation financé par l’Etat et les employeurs. Il faut noter au passage qu’il appartient à l’employeur de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé de ses travailleurs. S’il ne leur a pas fourni le matériel de protection pour éviter le risque de contamination, il aura commis une faute inexcusable, sera donc responsable de l’absence de protection et devra les indemniser pour le préjudice subi, que le juge appréciera in concreto. Par ailleurs, lorsque le système de protection est défectueux ou si le travailleur a un motif raisonnable de penser que sa situation de travail représente un danger grave et imminent pour sa santé, il peut bien exercer son droit de retrait.
L’inspection du travail et de la sécurité sociale doit vérifier si le service médical de l’entreprise fonctionne correctement, s’il y a effectivement un comité d’hygiène et de sécurité pour les entreprises ayant au moins 50 salariés. Elle doit également vérifier si l’employeur n’a pas licencié un salarié pendant cette période (il ne peut le faire que si ce dernier a commis une faute lourde). Il faut souligner aussi qu’un salarié ne doit pas être mis en quarantaine, parce qu’il est suspecté simplement d’avoir le covid 19.
Son employeur doit plutôt recourir au médecin du travail, qui est en effet seul habilité à prescrire un arrêt de travail. La suspension des départs négociés pendant la période de la pandémie est aussi à interdire pour éviter le recours abusif de la part de l’employeur. Pour le télétravail qui est en ce moment pratiqué par des travailleurs, il n’est pourtant pas clarifié en l’état actuel de la législation sociale. Il est souhaitable, comme il n’est pas pris expressément en compte par le Code sénégalais du travail, que le gouvernement le règlemente. Il en est de même du chômage technique.
-Dans le domaine du droit fiscal
Les entreprises doivent s’acquitter, à bonne de date, de leurs obligations fiscales, pour éviter les pénalités et les mesures de recouvrement forcé par le trésor public. La dématérialisation des procédures fiscales étant une réalité au Sénégal, le contribuable peut déclarer et payer ses impôts et taxes en ligne. Les grandes entreprises ont même l’obligation de souscrire en ligne, elles doivent alors pouvoir payer la TVA collectée. En revanche, les autres impôts, tel l’impôt sur le revenu, peuvent être tributaires des circonstances (suspension de contrats, annulation de commandes, retrait de salariés …). Il faudrait en tenir compte. Le fisc pourrait octroyer des mesures d’exonération fiscale aux TPE et PME fortement touchées par la crise sanitaire , la réduction du taux de la patente sur le transport, l’exonération des droits et taxes de porte sur les équipements de santé, matériels et autres intrants sanitaires qui entrent dans le cadre de la lutte contre le covid 19. Le CGI prévoit que le contribuable peut bénéficier, suite à sa demande au fisc, d’une remise ou d’un effacement partiel ou total de sa dette fiscale, s’il prouve qu’il traverse des difficultés qui le privent de ressources. Le gouvernement pourrait consentir des plans d’échelonnement, suspendre les procédures fiscales, notamment les avis à tiers détenteurs. Il pourrait aussi exonérer la TVA à l’importation et la vente de produits de première nécessité.
-Dans le domaine bancaire
Il est possible que les PME soient confrontées à un problème d’endettement et de financement de leurs activités. La baisse des taux d’intérêt des banques privées et des institutions de micro finance qui sont excessifs est à préconiser, d’autant plus que la BCEAO a baissé son taux directeur.
-Dans le cadre du droit communautaire OHADA
*Le domaine du droit des procédures collectives d’apurement du passif La crise sanitaire risque d’engendrer la défaillance de pas mal de TPE et PME , malgré les mesures, notamment fiscales et financières, prises par le gouvernement en leur faveur. Pour cette matière, il faut se référer à l’Acte uniforme portant organisation des procédures collectives d’apurement du passif, puisqu’aucune dérogation ne peut être prise au plan national. S’il y a arrêt des activités et dépôt de bilan, l’entreprise en cessation d’activités se trouvera dans un état d’insolvabilité. Le débiteur d’une créance affecté par la crise peut alors se retrouver en cessation de paiement. Il serait donc judicieux de modifier temporairement les règles existantes en matière de procédures collectives pour adapter leur mise en œuvre.
Les mesures à prendre :
demander au Conseil des Ministres de se réunir, dans les plus brefs délais, par visioconférence. Ainsi, les décisions qu’il prendra s’appliqueront à toutes les sociétés commerciales de l’espace OHADA. - donner la possibilité au débiteur de pouvoir présenter la procédure de redressement au-delà du délai imparti. Ainsi, les créanciers qui n’ont pas pu produire leur créance dans le délai requis, pourront demander au juge un relevé de forclusion. Pour la procédure de conciliation, comme la durée maximale est de 4 mois, l’OHADA pourrait envisager de proroger le délai à 6 mois.
*Le domaine du droit des sociétés
L’acte uniforme relatif au droit des sociétés commerciales et du GIE n’a pas prévu la pandémie. On pourrait toutefois reconnaître le covid 19 comme une pandémie. Des décisions stratégiques devront alors être prises pour s’adapter à la crise. L’assouplissement temporaire des textes est souhaitable, notamment la révision des statuts pour permettre le report des délais d’arrêté et d’approbation des comptes sociaux annuels et d’affectation des résultats de 2019. Des mesures qui pourraient être prises : -adapter l’application du droit des sociétés -revoir les modalités de tenue des réunions des organes de gouvernance -mettre l’accent sur le vote par correspondance, le vote à distance, la vidéoconférence, prévue par l’AU. Dans le secteur bancaire, la BCEAO pourrait permettre aux banques de tenir les réunions, sans la nécessité d’une présence physique pendant la crise. Le Centre régional de l’épargne publique et des marchés financiers pourrait prendre des mesures spéciales pour les sociétés cotées à la BRVM de l’UEMOA. Il est souhaitable que le gouvernement n’applique pas de pénalités financières ou intérêts de retard, de dommagesintérêts, d’astreinte, d’exécution de clause résolutoire, de clause pénale ou de toute clause prévoyant une déchéance ou d’activation des garanties ou cautions. Le système actuel de l’OHADA est à adapter, on pourrait adopter dans les plus brefs délais, un acte uniforme portant mesures urgentes en cas de crise, pour ne plus être pris au dépourvu.
-Dans le domaine du contentieux
La crise sanitaire peut entraîner de nombreux contentieux. Le gouvernement peut déclarer le covid 19 comme un cas de force majeure, pour les contrats internes. Pour les contrats internationaux, en cas de litige, il appartiendra au juge d’apprécier si les circonstances justifient l’usage de la force majeure, d’étudier si le covid est suffisant pour annuler le contrat. Les parties pourront aussi faire appel à l’arbitrage international, s’il est prévu une clause d’arbitrage dans le contrat.
-Dans le domaine des procédures civiles d’exécution
Dans le cadre d’une mesure d’exécution forcée ou d’une saisie conservatoire, il peut y avoir un problème de respect des délais. S’il y a carence ou refus du concours de la force publique à l’exécution forcée du titre exécutoire, au sens de l’AU portant procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution, la responsabilité de l’Etat ne pourra être retenue, vu la situation de pandémie. Les recours et voies de recours peuvent être effectuées par voie électronique, de même que les tâches administratives des greffes (les conclusions d’avocats, les actes d’huissier, la communication de pièces) nécessaires à la tenue des audiences.
-Dans le domaine pharmaceutique
Le Sénégal ne produit presque pas de médicaments. L’importation de médicaments qui coûte des milliards constitue une énorme perte de devises. Les compétences étant là, l’Etat doit:
- accompagner le secteur pharmaceutique, pour répondre aux défis de la santé
- développer une industrie locale de fabrication de médicaments et de matériel médical
- être actionnaire dans les entreprises pharmaceutiques
- mettre en place rapidement le centre d’incubation et de recherche exonérer de taxes les matières premières importées (qui entrent dans la fabrication de médicaments)
-inciter les investisseurs privés à investir dans le secteur pharmaceutique en leur accordant des exonérations fiscales conséquentes
-abaisser le taux minimal de 51% du capital social d’une industrie pharmaceutique exigé aux pharmaciens qui ne disposent pas très souvent d’une grande capacité financière (très peu peut acquérir des actions, le secteur demande d’énormes moyens financiers)
-créer une fondation pour la recherche médicale
-augmenter considérablement le budget octroyé à la recherche scientifique
-aider au financement direct d’entreprises pharmaceutiques
-encourager le transfert de technologies
Au niveau de la sous-région, la CEDEAO pourrait créer une agence africaine chargée du médicament et au niveau de l’UA une organisation africaine de la santé et harmoniser le droit pharmaceutique.
Mme Marie-Pierre Rokhayatou Sarr
Docteur d’Etat en droit, Maître de conférences à la Faculté des Sciences juridiques et politiques de l’UCAD
par Yoro Dia
LA QUERELLE DES ALLÉGEANCES
Le Sénégal, depuis l’indépendance, «voit double» et évite avec des trésors d’ingéniosité la «querelle des allégeances» entre la «cité de Dieu» et celle des hommes. La pandémie du coronavirus sera peut-être l’occasion de trancher cette guerre froide
Avec la réouverture des lieux de culte et des marchés le jour où le pays a atteint un record de cas positifs, le Président s’enferme dans un pari pascalien à l’envers. A tous les coups, il risque de perdre. Si les cas baissent parce que nous aurons atteint le pic, les religieux vont revendiquer la bonne nouvelle comme une preuve que Dieu a exaucé leurs prières. Les desseins de la providence étant impénétrables, personne ne pourra prouver le contraire. Par contre, si le nombre de cas et de décès explose, le Président Macky Sall devra en endosser la responsabilité devant les Sénégalais à qui il devra rendre compte, parce que les religieux ne rendent compte qu’à Dieu, dont le royaume n’est pas de ce monde.
Donc à tous les coups, Macky Sall risque de perdre. Il rend compte aux Sénégalais qui l’ont élu grâce à un système représentatif, alors que les religieux ne rendent compte qu’à «Celui qui ne rend jamais compte», un des noms de Dieu. La responsabilité de Macky Sall est concrète et palpable alors que celle des religieux est abstraite. Dans l’histoire de l’Europe et de la chrétienté, pendant des siècles, l’Eglise voulait gouverner les hommes. C’était un «gouvernement visible» au nom d’un roi invisible dont le royaume n’est pas de ce monde. Cette confusion des sphères entre le temporel et le spirituel avait pour conséquence que «l’homme voit double», selon Thomas Hobbes qui ajouta : «Comment celui qui voit double peut s’orienter judicieusement dans ce monde» bouleversé par le coronavirus, j’ai envie d’ajouter.
Le Sénégal, depuis l’indépendance, «voit double» et évite avec des trésors d’ingéniosité la «querelle des allégeances» entre la «cité de Dieu» et celle des hommes. La pandémie du coronavirus sera peut-être l’occasion de trancher cette guerre froide de la querelle des allégeances. En Europe, où l’Etat est né de ce «conflit de loyauté» entre le glaive du Christ et de César, la question ne se pose plus. C’est ce qui permet de comprendre l’attitude de l’Eglise au Sénégal qui rend à César ce qui est à César et à Dieu ce qui est à Dieu. Pour retrouver cette sagesse pourtant énoncée par le Christ, il a fallu des siècles de conflits entre les glaives.
Le Sénégal en est à la querelle des allégeances, même si le débat semble être réglé sur le plan purement religieux par Abu Hamid Mohamed Al Ghazali (1058-1111) qui écrit dans son célèbre livre Nasihat al muluk(Conseils aux rois) que «Dieu a choisi et a élu deux sortes de personnes : les prophètes et les rois. Les premiers ont pour mission de diriger les hommes vers Dieu et les seconds d’établir la sécurité». Et sans sécurité, sans santé, sans paix civile, qui est la raison d’être de l’Etat, il n’y a pas de pratique religieuse normale. Avec cette division claire de travail, l’islam a réglé la question de la querelle des allégeances qui a fait des millions de morts dans la chrétienté. C’est pourquoi ni à la Mecque ni à Fez, ni Jérusalem ni en Iran, il n’y a eu de querelle des allégeances dans la gestion de la pandémie.
Mais le Sénégal est une exception qui s’enferme dans l’illusion du peuple élu. Demandons aux religieux de prier pour que le réveil ne soit pas aussi brutal que celui du «Peuple élu», mais en attendant, vu que l’Etat n’a pas réussi sa politique de containment du virus, tout le monde avance masqué par cet «instinct de conservation» cher à Hobbes ! La peur est plus forte que le civisme et les prières.
PAR Paul K. Fokam
LA CRISE DU CORONAVIRUS DOIT POUSSER L'AFRIQUE À PRENDRE SON INDÉPENDANCE
Pour l’instant, je suis étonné par l’attitude de certains princes africains qui, au lieu de réunir les intelligences du continent pour trouver des solutions locales, agissent comme des suppliants… assis sur une mine d’or
Jeune Afrique |
Paul K. Fokam |
Publication 13/05/2020
La crise du coronavirus est une épreuve mondiale historique. Je n’ai pas souvenir d’une épreuve qui ait touché presque tous les continents dans un temps aussi court et déstabilisé à un tel point la science et l’économie.
La pandémie n’a pas dit son dernier mot, mais, déjà, nous sommes appelés à tirer les premières leçons qui en découlent. La crise a ceci de positif qu’elle rappelle à l’humanité une vérité simple que nous bafouons : l’égalité entre les hommes, quelle que soit la couleur de leur peau, et entre les nations, puissantes et faibles.
Cela suffit aujourd’hui à nous pousser à trouver des solutions fraternelles, à accentuer la solidarité mondiale et à réduire les conflits politiques, économiques et sociaux à leur plus simple expression. Il est souhaitable que les solutions apportées par toutes les nations s’inscrivent dans la préservation du présent et la protection du futur.
Retrouver notre dignité
Pour l’instant, je suis étonné par l’attitude de certains princes africains qui, au lieu de réunir les intelligences du continent pour trouver des solutions locales, agissent comme des suppliants… assis sur une mine d’or.
C’est ainsi qu’on a vu des appels au moratoire temporaire de la dette, aux aides budgétaires, aux aides alimentaires… Ces solutions permettront peut-être de joindre les deux bouts pour quelques jours, voire quelques mois, et sauver des vies menacées. Mais il ne faut pas oublier que les épidémies sont un phénomène cyclique. Ce qui impose des solutions à court, moyen et long termes.
L’Afrique doit dès aujourd’hui mettre sur pied, de façon globale et à l’échelle de chaque pays, des solutions internes à très court terme, en acceptant les conséquences dommageables sur la population la plus vulnérable. Il s’agit en l’occurrence, pour la dignité du peuple africain, de rechercher des solutions endogènes auxquelles viendront s’ajouter des bonnes volontés externes, dans le respect mutuel et non par pitié.
L’Afrique doit ensuite mettre un accent particulier sur les solutions durables de moyen terme, non seulement pour garantir la sécurité de ses citoyens, mais surtout pour rétablir leur dignité. Il est urgent de changer d’attitude vis-à-vis du secteur informel, généralement considéré comme une calamité sociale. Celui-ci doit reprendre son rôle de centre de « formation sur le tas » des futurs entrepreneurs du secteur formel, qui vont prendre en main le processus de création de richesses.
Réduire notre vulnérabilité
L’Afrique doit enfin, à long terme, consolider les acquis des deux précédentes étapes, pour s’assurer une indépendance relative. Du fait de leurs structures extraverties, les économies africaines sont vulnérables aux crises déclenchées sous d’autres cieux. Réduire cette vulnérabilité est le défi de long terme.
Il faut profiter de ce qui nous arrive aujourd’hui pour se concentrer sur la confection d’un véritable tissu productif local, tous secteurs confondus : agroalimentaire, textile, matériaux de construction, automobile, etc. Tant que nous n’aurons pas un tissu industriel consistant, nous resterons à la merci de chaque crise.
Puisque la catastrophe a sévi dans le secteur de la santé, il faut par ailleurs promouvoir des industries pharmaceutiques transformant les plantes locales ou exploitant des licences tombées dans le domaine public. De même, il faut mettre l’accent sur la formation du personnel de santé et la construction d’infrastructures médicales d’accueil et de prise en charge des patients.
Enfin, tout ceci nous impose de réinventer nos systèmes éducatifs, pour les mettre au niveau des défis du futur.
Paul Kammogne Fokam est el fondateur du groupe Afriland First Bank.
Par Mbagnick DIOP
BAS LES ARMES, MON GÉNÉRAL !
Redoutant une fureur populaire imparable, le président Macky Sall décide alors de mettre bas les armes et incite le peuple à l’autodéfense
Il y a environ cinq ans, le président de la République nous était apparu en fantassin, commandant suprême de la légion Sénégal en proie à une soif morbide (la dipsomatie). Les habitants de Dakar et sa banlieue alimentés au compte-gouttes par un réseau hydraulique continuellement défectueux l’ont alors aperçu revêtu d’un treillis pour superviser les travaux de remise en état de la station de Gnith.
Passé l’effet communication politique, l’alimentation en eau accuse toujours un déficit accentué. A peine son deuxième mandat entamé, un autre défi plus pesant, la pandémie du coronavirus, surgit et le général, comme le commun des mortels, se barricade d’abord le temps de sonner l’alerte pour passer en revue les troupes et réfléchir sur la stratégie et la tactique.
Alors que le peuple inquiet s’interroge sur son sort, le général hésite, observe à travers les télévisions ce qui se fait ailleurs dans le monde pour enfin déclarer un état d’urgence qui consacre l’option de guerre contre le coronavirus. Les pesanteurs sociologiques et le désastre économique lui ont créé tellement de soucis qu’il en a perdu le sommeil, notre général, lui qui naguère adorait se présenter comme un lion endormi dont il fallait redouter le réveil. Comment mettre au pas l’oligarchie confrérique du Sénégal ?
Avec quoi entretenir les deux tiers d’une population très mal en point, du fait d’un déficit alimentaire qui s’aggrave après chaque campagne agricole et met à nu les déclarations politiciennes sur une prétendue sécurité vivrière voire l’autosuffisance alimentaire ? Comment contraindre une population caractérisée par sa propension à bouleverser les normes urbaines ? Voilà quelques-unes des principales questions auxquelles le général a eu du mal à répondre dès le début de la dissémination du coronavirus au Sénégal.
Alors, l’état-major à fait un sursaut d’orgueil pour en mettre plein la vue à l’ennemi invisible et à ceux qui, faute d’approuver sa gouvernance, sont fichés comme membres de la cinquième colonne. Le temps du divertissement étant révolu, le peuple sous-alimenté est situé en pôle position de la stratégie de sauvetage, avant que l’ennemi invisible ne l’anéantisse. Une procession de camions remplis de denrées alimentaires, sous le regard joyeux du général, est mise en route pour servir de quoi nourrir, pour un laps de temps, des nécessiteux et des impactés.
Nonobstant les clauses décriées sur la base desquelles le ministre du Développement communautaire et l’équité sociale et territoriale a commandé les denrées (riz, huile, sucre et pattes alimentaires), le général est resté de marbre. Le fameux comité de pilotage n’y changera rien et, au terme du saupoudrage, les rapports qui feront état de malversations connaîtront le même sort que ceux des corps de contrôle empilés dans les couloirs des services judiciaires. Après deux mois de guerre, le général semble essoufflé.
Redoutant une fureur populaire imparable, il décide alors de mettre bas les armes et incite le peuple à l’autodéfense. La seule consolation, pour ce peuple éperdu, réside dans l’abnégation des personnels de santé. Le général reclus dans son bunker se contentera, selon la gravité de la situation, de stimuler les troupes pour ne perdre la face.
Par Oumar-Diouf FALL
ARMISTICE DU 11-MAI !
On ne gouverne pas un pays contre la volonté de son peuple, même si celle-ci peut être la source de son malheur. Telle semble être la devise adoptée lundi par le président de la République dans son discours à la Nation.
On ne gouverne pas un pays contre la volonté de son peuple, même si celle-ci peut être la source de son malheur. Telle semble être la devise adoptée lundi par le président de la République dans son discours à la Nation.
Son Excellence a carrément succombé aux sirènes des adeptes de l’assouplissement de mesures pourtant censées atténuer les effets ravageurs du coronavirus. On a senti le Président Macky Sall fatigué, épuisé, complètement dépassé par les événements du bilan macabre du nombre de morts et de l’augmentation des cas positifs, probablement aussi embrouillé par les avis de spécialistes aussi contradictoires les uns que les autres, et même à la limite dégoûté par les vociférations et complaintes des divers lobbies beaucoup plus enclins à sauvegarder leurs intérêts mercantilistes et pécuniaires que de se soucier de la santé de leurs ouailles.
Ainsi donc, celui qui est investi de la mission de protéger contre vents et marées les Sénégalais a finalement jeté son masque pour reprendre le titre du journal Le Quotidien. Le Général d’armée Macky Sall a baissé les bras, il a abdiqué en desserrant l’étau anti Covid 19, nous demandant de mener seuls la guerre en apprenant à vivre avec le virus, tout en respectant les principes de précaution.
Pour éviter un soulèvement populaire ? Pour éviter de paralyser l’économie devant l’insaisissable virus qui n’est pas prêt de nous laisser tranquille pendant de longs mois ? En tout cas, tout ca sent l’armistice du 11 mai 2020 !
A présent, le scénario catastrophe que tout le monde redoute serait de voir une bonne partie de la population infectée, des hôpitaux submergés, un personnel soignant exténué et désarmé face à l’ampleur de la pandémie.
Parce que, pour ce coup-ci, l’Etat a fait preuve de faiblesse coupable dont personne ne souhaite que le prix soit très cher à payer, si le pire arrivait.
Hélas, il faut craindre le pire avec l’indiscipline caractérisée et le manque de civisme de la plupart de nos concitoyens qui ne se sentent à l’aise que dans l’anarchie et le désordre.
C’est pourquoi, devant pareille pandémie aussi dangereuse qui sème catastrophe et désolation partout où elle passe, il faut savoir faire preuve d’autorité pour marquer son territoire régalien en prenant des mesures certes impopulaires mais salutaires pour le pays et pour la postérité.
Dès lors, le choix est vite fait entre le souci de respecter le serment de protéger la santé des populations, la direction du vent d’une relance incertaine de la machine économique déjà sérieusement grippée et la furie festive d’une population enfin libérée. Ah, que c’est difficile de diriger ce pays qui se croit, à grand tort, être le centre du monde !
Par Abdoulaye THIAM
DES LICENCES RUSSES A CELLES SINO-TURQUES
Dire que les côtes de continent sont riches, relève d’une lapalissade ; qu’elles sont pillées depuis des années par des flottes étrangères en est une autre.
«La pêche illégale coûte chaque année 1,3 milliard de dollars (plus de 715 milliards de F CFA) à l’Afrique de l’Ouest». Dixit, Max Bankole Jarrett, de l’Africa Progress Panel. Dire que les côtes de continent sont riches, relève d’une lapalissade ; qu’elles sont pillées depuis des années par des flottes étrangères en est une autre.
Ce qui étonne plus d’un, c’est que les régimes se suivent mais le problème reste entier. Il n’y a pratiquement pas de volonté politique pour résoudre le problème qui remonte aux années 80. Qui ne se souvient pas encore des fameuses licences de pêche russes ?
Sous le régime socialiste, on avait assisté à une délivrance de plusieurs licences à des bateaux de pêche battant pavillon russe en dehors des dispositions du code de la pêche, au motif que cela financerait la Coupe d’Afrique des Nations (CAN) de 1992. La seule que notre pays a eu à abriter depuis la première édition en 1957.
Pendant de longues années, des armateurs russes vont exploiter illégalement les ressources halieutiques sénégalaises. A la survenance de la première alternance politique, on assistera à un débat stérile, sans conviction aucune, pour mettre un terme à ce pillage organisé de nos sites. Pis, les Russes vont rester sur nos côtes, parce que disposant des plusieurs autres licences qui seront encore accordées irrégulièrement à leurs chalutiers pélagiques. A leur départ, les armateurs sénégalais croyaient pouvoir enfin jouir convenablement de leur métier. Que nenni !
TAPIS ROUGE AUX TURCS ET CHINOIS
Alors que le Sénégal n’a signé officiellement d’accorde de pêche qu’avec l’Union européenne (UE), en 1979, les acteurs sénégalais assistent impuissants à un autre pillage savamment organisé par des navires turcs et chinois. Comme les russes, ces derniers vont, eux aussi, bénéficier de la délivrance de licences relevant, cette fois, d’une catégorie qui n’existe pas la pêche maritime. Il s’agit de la «licence de pêche démersale profonde, option poissons-céphalopodes». Mais, le plus abracadabrant, c’est la stratégie développée pour acquérir de ces licences.
Le département de la pêche maritime ne devrait pas ignorer les contrats de coopération de pêche qui lient des Sénégalais à des Chinois pour l’octroi facile d’une naturalisation des bateaux, condition sine qua non, pour pêcher dans les cotes sénégalaises.
Une note de service de la commission consultative de l’attribution des Licences de pêche avec consultation à distance du 13 avril dernier devrait attirer leur attention sur cette mafia savamment organisée. Mais il n’est pire aveugle que celui qui ne veut rien voir, dit l’adage.
Pourtant, la pêche est une source d’emplois, d’employabilité et d’alimentation. Elle génère des milliards de F CFA à nos concitoyens. Sans occulter des sommes importantes devant être versées dans les caisses du Trésor. Mais nos autorités devraient surtout comprendre que les ressources halieutiques sont certes renouvelables mais non inépuisables.